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Rapport intérimaire - Rapport No. 286, Mars 1993

Cas no 1630 (Malte) - Date de la plainte: 02-MARS -92 - Clos

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  1. 576. La Confédération des syndicats de Malte (CMTU) a présenté cette plainte contre le gouvernement dans une lettre datée du 2 mars 1992. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication datée du 24 juin 1992.
  2. 577. Malte a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

A. Allégations de l'organisation plaignante
  1. 578. Dans sa lettre du 2 mars 1992, la CMTU prétend que le refus opposé aux travailleurs non membres du Syndicat général des travailleurs (GWU) de faire des heures supplémentaires à l'entreprise Malta Drydocks constitue une violation des conventions nos 87 et 98. Les travailleurs en question sont membres du Syndicat Haddiema Maghqudin (UHM), qui est affilié à la CMTU. La confédération explique que, depuis 1973, cette entreprise est autogérée par les travailleurs et par l'intermédiaire d'un conseil de gestion dont les membres sont élus tous les trois ans parmi et par ces travailleurs. Bien que gérant ses affaires d'une manière autonome, l'entreprise a bénéficié de l'appui financier des gouvernements successifs au fil des ans.
  2. 579. Lors d'une conférence de presse tenue le 17 janvier 1990, le président du conseil de gestion de Drydocks, M. Sammy Meilaq, avait présenté un rapport sur la situation de l'entreprise et répondu à des questions, dont une portait sur la démocratie professionnelle dans ses rapports avec des travailleurs qui ne pouvaient effectuer des heures supplémentaires. Il avait déclaré que la majorité des travailleurs appartenait au GWU et que cette majorité s'élevait contre le fait qu'une minorité puisse faire des heures supplémentaires; le conseil ne voulait pas risquer de voir interdire les heures supplémentaires en permettant à quelques travailleurs minoritaires d'en faire car cela serait désastreux pour les chantiers navals. Le 22 mars 1990, la CMTU avait écrit au président en ces termes: "Toute discrimination quelle qu'elle soit est une pratique antisyndicale au sens le plus large du terme. Nous n'admettons pas que le boycottage de certains travailleurs par d'autres, quel qu'en soit le motif, puisse justifier la passivité de la direction, surtout dans une entreprise autogérée par les travailleurs." Le président a répondu le 9 mai que la grande majorité des travailleurs faisaient partie du GWU et refusaient de faire des heures supplémentaires aux côtés de personnes qui n'en étaient pas membres et que l'on s'efforçait par divers moyens de remédier à cette situation. La CMTU a envoyé copie de cette correspondance au Premier ministre et au ministre des Affaires économiques. Ultérieurement, le Premier ministre a fait allusion, dans un discours, à la nécessité pour Malta Drydocks de respecter les droits fondamentaux, y compris l'absence de toute discrimination. Le secrétaire général du GWU a fait état des commentaires du Premier ministre dans un discours adressé aux sympathisants du parti travailliste et a nié que l'on ait refusé à de nombreux travailleurs des chantiers navals de faire des heures supplémentaires parce qu'ils n'étaient pas membres du GWU.
  3. 580. Le 15 septembre 1991, la section des jeunes de la CMTU a organisé une manifestation symbolique devant les chantiers navals. Afin d'intimider les manifestants, plusieurs écriteaux portant des slogans tels que "Pas d'heures supplémentaires pour ceux qui ne sont pas membres de notre syndicat" avaient été accrochés au mur entourant les chantiers. Parmi les perturbateurs qui insultaient les manifestants se trouvaient des membres de la section des métallurgistes du GWU. La déclaration qui a été lue à la fin de la manifestation demandait au gouvernement d'obliger le conseil de gestion de Malta Drydocks à mettre un terme à la discrimination à l'encontre des travailleurs non affiliés au GWU. Le lendemain, le président du conseil de gestion a déclaré que les travailleurs majoritaires devaient tolérer les minoritaires ou que ceux-ci devaient accepter d'être avec la majorité en tout, y compris comme membres du syndicat.
  4. 581. L'organisation plaignante signale que certains travailleurs des chantiers navals qui estiment ne pas devoir faire partie du GWU continuent de faire l'objet de discrimination et de ne pas être autorisés à faire des heures supplémentaires. Elle considère que les membres du GWU qui ne veulent pas faire d'heures supplémentaires aux côtés de travailleurs non membres ne sont pas majoritaires, mais qu'il s'agit plutôt d'une poignée de voyous qui empoisonnent le milieu de travail. La CMTU allègue que, par ailleurs, des pressions indirectes ont été exercées sur les travailleurs pour qu'ils s'affilient à un syndicat qu'ils n'ont pas choisi. Si elle ne peut pas admettre que la direction de l'entreprise et le GWU sont impuissants à contrôler la situation, elle estime cependant qu'il incombe en dernier ressort au gouvernement de mettre un terme à la discrimination.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 582. Dans sa lettre du 24 juin 1992, le gouvernement déclare que le cas soumis par la CMTU est exact pour l'essentiel et il ne conteste pas les faits tels qu'ils sont exposés. Il s'est efforcé dès le début du conflit de persuader le conseil de gestion de Drydocks et le GWU de se conformer à la Constitution maltaise pour ce qui est des droits à la liberté d'expression et d'association, et de respecter les obligations découlant des conventions de l'OIT. Le conseil prétend qu'il n'exerce pas de discrimination dans la répartition des heures supplémentaires et que les actes discriminatoires sont commis par les travailleurs eux-mêmes. Il considère que c'est là une question qui concerne le syndicat et non la direction, alors que le GWU soutient le contraire, étant donné qu'il n'a donné aucune directive en la matière. Le gouvernement s'est donc trouvé dans une impasse. Tant le conseil que le GWU prétendaient qu'ils n'avaient pas adopté de politiques discriminatoires fondées sur l'affiliation à un syndicat. Néanmoins, il a été allégué que des travailleurs membres du GWU avaient refusé de faire des heures supplémentaires aux côtés de travailleurs non membres de ce syndicat.
  2. 583. Tout en exerçant le plus de pression possible sur le conseil de gestion et le GWU, le gouvernement s'est montré prudent et s'est efforcé de convaincre les parties d'honorer leurs obligations légales et morales envers la liberté d'expression et d'association. Il a avisé récemment les parties que, si une solution équitable n'était pas trouvée, il ne pourrait plus tolérer que soient violées la Constitution de Malte et les conventions de l'OIT qu'il a signées, et qu'il devrait prendre des mesures appropriées.
  3. 584. Entre-temps, un certain nombre de travailleurs faisant l'objet d'une discrimination ont saisi les tribunaux. En outre, après les élections de février 1992, à l'issue desquelles le parti au pouvoir a été réélu, les pourparlers ont repris entre les représentants du gouvernement et ceux du conseil de gestion de Drydocks, et l'on a bon espoir que l'affaire se réglera à l'amiable. Le gouvernement s'engage à tenir le comité informé de l'évolution de la situation et espère être en mesure de l'informer du prompt règlement de ce conflit.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 585. Dans le cas présent, l'organisation plaignante allègue que le gouvernement a enfreint l'obligation qui lui incombe de prévenir toute discrimination antisyndicale, conformément à la convention no 98, car il n'a pas pu régler un conflit relatif à des heures supplémentaires qui opposait un syndicat affilié à l'organisation plaignante et un deuxième syndicat. Le comité note que non seulement le gouvernement ne conteste pas les faits, mais encore qu'il fait remarquer qu'il s'est efforcé par tous les moyens de résoudre le conflit de Malta Drydocks et qu'il a bon espoir d'y parvenir rapidement, dès lors que des pourparlers sont engagés avec l'employeur.
  2. 586. Le comité s'est abstenu dans des cas antérieurs d'examiner des allégations se rapportant à des conflits intersyndicaux. Une plainte contre une autre organisation, si elle est libellée en termes suffisamment précis pour en permettre l'examen au fond, peut néanmoins mettre en cause le gouvernement du pays intéressé, par exemple si les actes de l'organisation objet de la plainte sont injustement soutenus par le gouvernement ou sont de telle nature que le gouvernement est dans l'obligation de les empêcher du fait qu'il a ratifié une convention internationale du travail. (Recueil, paragr. 667.)
  3. 587. Au sujet des faits dont il est saisi, le comité considère que le gouvernement est dans l'obligation d'intervenir dans le conflit de Malta Drydocks, car l'employeur - à savoir le conseil de gestion de Drydocks géré par les travailleurs - a permis à des membres d'un syndicat d'effectuer des heures supplémentaires et refusé aux membres d'un autre syndicat d'en faire. Lorsque le gouvernement l'a interrogé à ce sujet, l'employeur a répondu qu'il s'agissait d'une question purement syndicale et qu'il n'appliquait pas de politique de discrimination fondée sur l'appartenance à un syndicat. Les faits montrent cependant une préférence de l'employeur pour le GWU par opposition au syndicat affilié à la CMTU.
  4. 588. En outre, le comité note que, selon l'organisation plaignante, les membres du syndicat affilié à celle-ci qui ont fait l'objet de discrimination dans leurs conditions de travail en raison de leur appartenance audit syndicat cherchent à obtenir réparation auprès des tribunaux. En conséquence, le comité demande au gouvernement de lui fournir des renseignements détaillés sur la procédure judiciaire engagée, et en particulier des informations sur le résultat de celle-ci et sur la suite donnée par l'employeur aux décisions des tribunaux.
  5. 589. Il demande également au gouvernement de le tenir informé des résultats des pourparlers en cours avec l'employeur sur la question de la répartition des heures supplémentaires sur une base non discriminatoire, question qui, d'après la lettre du gouvernement du 24 juin 1992, semblait devoir être résolue rapidement.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 590. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Notant que le gouvernement ne dément pas l'allégation de l'organisation plaignante selon laquelle les membres du syndicat affilié à celle-ci ont fait l'objet de discrimination dans leurs conditions de travail en raison de leur appartenance audit syndicat et qu'ils cherchent à obtenir réparation auprès des tribunaux, le comité demande au gouvernement de fournir des renseignements détaillés sur la procédure judiciaire engagée, et en particulier des informations sur le résultat de celle-ci et sur la suite donnée par l'employeur aux décisions des tribunaux.
    • b) Il demande également au gouvernement de le tenir informé des résultats des pourparlers en cours avec l'employeur sur la question de la répartition des heures supplémentaires sur une base non discriminatoire.
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