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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 278, Juin 1991

Cas no 1530 (Nigéria) - Date de la plainte: 19-AVR. -90 - Clos

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  1. 192. La Fédération internationale des travailleurs du transport (FITT), la Fédération internationale des organisations de travailleurs de la métallurgie (FIOTM), la Fédération internationale des travailleurs du textile, de l'habillement et du cuir (FITHC), la Fédération internationale des syndicats de travailleurs de la chimie, de l'énergie et des industries diverses (FITCE), la Fédération internationale des journalistes (FIJ), l'Internationale des services publics (ISP), l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation et des branches connexes (UITA), la Fédération internationale des employés, techniciens et cadres (FIET) et la Fédération internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (FITBB) ont présenté, dans une communication du 19 avril 1990, une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement du Nigéria. La Confédération internationale des syndicats libres (CISL) s'est associée à cette plainte par lettre du 25 avril 1990. La Fédération internationale des travailleurs du transport (FITT), agissant de nouveau au nom des secrétariats professionnels internationaux susmentionnés, a communiqué des informations complémentaires par lettre du 27 avril 1990.
  2. 193. Dans sa communication du 29 octobre 1990, le gouvernement a envoyé certaines informations partielles sur les allégations présentées contre lui, observations auxquelles s'est référé le comité à sa réunion de novembre 1990 lorsqu'il a ajourné le cas et a demandé au gouvernement de lui communiquer l'intégralité de ses observations à ce sujet. (Voir 275e rapport, paragr. 5, approuvé par le Conseil d'administration à sa 248e session (novembre 1990).) Le gouvernement a fourni d'autres informations dans une communication datée du 26 avril 1991.
  3. 194. A sa réunion de février 1991, le comité a observé qu'en dépit du temps écoulé depuis le dépôt de la plainte et de la gravité des allégations il n'avait pas reçu les observations et informations du gouvernement. Il a attiré son attention sur le fait que, conformément à la règle de procédure, il pourrait présenter un rapport sur le fond de l'affaire en instance à sa prochaine session, même si les observations du gouvernement n'étaient pas reçues à temps. Il a prié instamment le gouvernement de transmettre d'urgence l'intégralité de ses observations. (Voir 277e rapport, paragr. 11, approuvé par le Conseil d'administration à sa 249e session (février-mars 1991).)
  4. 195. Le Nigéria a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 196. Dans leur communication conjointe du 19 avril 1990, les trois secrétaires professionnels internationaux, agissant au nom de leurs divers affiliés au Nigéria, allèguent que le décret no 35 du 7 décembre 1989 sur l'affiliation internationale des syndicats, publié dans la Nigérian Official Gazette, constitue une violation manifeste de l'article 5 de la convention no 87 en raison de ce qu'il interdit cette affiliation, sauf très rares exceptions.
  2. 197. Les articles 1 et 3 de ce décret, dont le texte a été communiqué par les plaignants, donnent la liste des organismes internationaux auxquels a le droit de s'affilier l'Organisation centrale du travail et soumettent l'affiliation à tout autre organisme à l'autorisation préalable du gouvernement. En vertu de l'article 2, le décret s'applique aussi à l'ensemble des syndicats d'industrie, dont les droits sont encore plus restreints, puisque l'interdiction qui leur est faite de s'affilier à un syndicat international est totale et qu'ils ne peuvent bénéficier d'aucune exception. L'article 2 dispose clairement que ces organisations de travailleurs "devront mettre fin à leur affiliation à tout secrétariat professionnel ou organisation internationale".
  3. 198. Selon les plaignants, leurs affiliés sont maintenant contraints de mettre fin à ces affiliations, faute de quoi ils s'exposent aux peines prévues à l'article 4 du décret: "1) Toute personne qui contrevient à l'une quelconque des dispositions du présent décret est coupable d'une infraction et est passible d'une amende de 5.000 nairas ou d'une peine de cinq ans de prison, ou des deux; 2) si l'infraction est commise par un syndicat ou une association professionnelle, ceux-ci sont passibles d'une amende minimale de 10.000 nairas et de la radiation de leurs noms de la liste des syndicats."
  4. 199. Dans leur lettre du 27 avril 1990, les plaignants ont ajouté que, par suite de l'adoption du décret no 35, leurs affiliés nigérians les avait informés de ce que, à leur grand regret, ils devaient mettre fin à leur affiliation; il s'agit des organisations suivantes: le Syndicat des dockers du Nigéria; le Syndicat nigérian des gens de mer et des travailleurs des transports par eau; le Syndicat nigérian des travailleurs portuaires; le Syndicat des travailleurs des agences d'expédition, de compensation et de transit du Nigéria.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 200. Dans une communication du 29 octobre 1990, le gouvernement avait déclaré qu'il examinait la possibilité d'abroger le décret no 35 de 1989 sur l'affiliation internationale des syndicats. Selon lui, il n'y avait donc plus lieu pour le comité d'examiner cette question. En accusant réception de cette communication, le Bureau a demandé au gouvernement de lui fournir le plus tôt possible des informations sur les mesures effectivement prises pour abroger le décret.
  2. 201. Dans sa communication du 26 avril 1991, le gouvernement déclare qu'il a décidé d'abroger le décret en question et que les amendements nécessaires seront promulgués en temps voulu.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 202. Le comité regrette que, à l'exception d'une brève communication avançant l'idée qu'il n'y avait plus lieu pour le comité d'examiner la question et d'une lettre tout aussi succincte indiquant que le décret serait abrogé en temps voulu, le gouvernement n'ait pas envoyé d'observations sur le fond de cette plainte déposée il y a plus d'un an par plusieurs secrétariats professionnels internationaux et appuyée par la CISL. Eu égard à cette carence et au temps qui s'était écoulé, le comité est contraint d'examiner le cas sans disposer des observations du gouvernement sur le décret litigieux.
  2. 203. Le comité doit donc rappeler les observations qu'il a faites dans son premier rapport (paragr. 31) et qu'il a dû rappeler en plusieurs occasions: le but de l'ensemble de la procédure instituée est d'assurer le respect des libertés syndicales en droit comme en fait, et le comité est convaincu que si elle protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables, ceux-ci voudront bien reconnaître à leur tour l'importance qu'il y a à ce qu'ils présentent, en vue d'un examen objectif, des réponses complètes et détaillées aux allégations portant sur des faits précis qui pourraient être dirigées contre eux.
  3. 204. Sur le fond de l'affaire, le texte du décret communiqué par les plaignants montre clairement qu'une interdiction de s'affilier ou de rester affilié à des organisations internationales de travailleurs a été imposée aux organisations de travailleurs nigérianes, avec pour seule réserve que, aux termes de l'article 3(1), l'Organisation centrale du travail est autorisée à s'affilier à l'Organisation de l'unité africaine, l'Organisation des travailleurs de l'Afrique de l'Ouest et "toute autre organisation syndicale internationale expressément agréée par le Conseil de gouvernement des forces armées". Cette interdiction, qui ressort clairement des termes du décret, est confirmée par les informations complémentaires fournies par les plaignants qui attestent que certains de leurs affiliés nigérians ont effectivement mis fin à leurs affiliations par suite de l'adoption de ce décret.
  4. 205. Le comité exprime les graves préoccupations que lui inspire ce décret, qui nie aux organisations de travailleurs nigérianes le droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs de leur choix, prévu par les articles 5 et 6 de la convention no 87.
  5. 206. En outre, le comité note que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a estimé, lors de son récent examen de l'application de la convention no 87 par le Nigéria en mars 1991, que le décret en question violait la convention et qu'il devait donc être abrogé.
  6. 207. Le comité rappelle que les organes de contrôle de l'OIT ont toujours estimé que le droit des organisations de travailleurs et d'employeurs de s'affilier à leurs organisations internationales respectives, de participer aux activités de ces organisations et de profiter des avantages que leur confère leur affiliation doit être protégé. (Etude d'ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1983, paragr. 250-251, et Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 518-524.) Le comité attire en particulier l'attention du gouvernement sur le principe qu'il a affirmé à maintes reprises, à savoir que la solidarité internationale constitue l'un des objectifs fondamentaux de tout mouvement syndical et qu'elle a inspiré la norme énoncée à l'article 5 de la convention no 87 selon laquelle toute organisation, fédération ou confédération a le droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs et d'employeurs. (Recueil, paragr. 518.) Ce principe est également consacré dans la Constitution de l'OIT.
  7. 208. Compte tenu de ce qui précède, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour assurer l'abrogation immédiate du décret no 35 et de lui communiquer un exemplaire du texte d'abrogation.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 209. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité regrette que, à l'exception de deux brèves communications indiquant qu'il n'y avait plus lieu pour le comité d'examiner le cas et que le texte mis en cause serait abrogé en temps voulu, le gouvernement n'ait pas fourni ses observations sur les allégations présentées sur cette affaire plus d'un an auparavant.
    • b) Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour assurer l'abrogation immédiate du décret no 35 de 1989 sur l'affiliation internationale des syndicats, qui constitue une violation du droit reconnu aux organisations nationales de travailleurs de s'affilier aux organisations internationales, tant par la Constitution de l'OIT que l'article 5 de la Convention no 87 et de lui communiquer un exemplaire du texte d'abrogation.
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