ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Rapport définitif - Rapport No. 268, Novembre 1989

Cas no 1466 (Espagne) - Date de la plainte: 20-JUIN -88 - Clos

Afficher en : Anglais - Espagnol

  1. 129. La plainte figure dans une communication du 20 juin 1988 adressée par la Confédération syndicale des commissions ouvrières (CC.OO). Le gouvernement a répondu par des communications en date des 15 décembre 1988 et 16 mai 1989.
  2. 130. L'Espagne a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations de l'organisation plaignante

A. Allégations de l'organisation plaignante
  1. 131. La Confédération syndicale des commissions ouvrières (CC.OO) allègue dans sa communication du 20 juin 1988 que, à la suite des élections syndicales parmi les travailleurs de la fonction publique, les cinq organisations les plus représentatives de l'enseignement public non universitaire ont souligné auprès du ministère de l'Education et de la Science la nécessité de constituer un bureau sectoriel de négociation et de fixation des conditions de travail et d'emploi du personnel enseignant non universitaire. Les revendications syndicales étaient en particulier les suivantes: alignement des salaires des enseignants sur ceux des autres fonctionnaires ayant les mêmes titres, responsabilité civile à la charge de l'administration en cas d'accident dans les établissements scolaires (sans préjudice des sanctions à prendre en cas de négligence), stabilité et perception de 200 pour cent du salaire de base en cas d'enseignement intensif, solution des problèmes de mobilité géographique du personnel enseignant "provisoire" et "en attente", n'occupant pas de postes définitifs pendant plusieurs années, classification des postes de travail de tous les établissements d'enseignement et répartition correspondante du personnel.
  2. 132. Face à ce cahier de revendications, le ministère de l'Education et de la Science a utilisé des moyens dilatoires proposant des réunions mais ne présentant aucune contre-proposition aux suggestions présentées pendant les mois de janvier et de février 1988. Devant cette attitude, les cinq syndicats représentant le personnel enseignant non universitaire ont appelé le 29 février le personnel enseignant à se mettre en grève les 9, 10, 16 et 21 mars et les 14, 20, 21, 26, 27 et 28 avril pour appuyer leurs revendications et exiger qu'elles fassent l'objet de négociations. Aux dates précitées, le ministère de l'Education a refusé de tenir une réunion avec les syndicats, posant comme préalable à toute réunion ou négociation l'annulation de l'ordre de grève. Le personnel enseignant a répondu par une participation massive et généralisée à la grève, à raison de 95 pour cent du total de tous les professeurs en exercice dans les villes et agglomérations d'Espagne. Cependant, dès le 25 février, date antérieure à la grève, le ministère s'était toujours refusé à tenir une réunion avec les syndicats, et ce bien que ceux-ci l'aient sollicité officiellement conformément à la loi no 9/87. Aucune réunion n'a eu lieu jusqu'au 6 avril, ce qui fait que le conflit s'est prolongé inutilement et s'est même aggravé, mettant ainsi obstacle à toute négociation volontaire des conditions d'emploi. Le ministère a persisté dans son refus de toute réunion avec les syndicats pendant trente-six jours. Puis, à partir du 6 avril, le ministère de l'Education et de la Science a fixé de façon unilatérale et discrétionnaire les jours et dates des réunions qui lui paraissaient opportuns, en dehors des jours de grève, de façon à bien marquer qu'il n'y aurait aucune négociation et aucun accord dans un contexte de grève.
  3. 133. La CC.OO ajoute que, le 4 mai 1988, quatre des cinq syndicats représentatifs ont signé un accord préliminaire avec le ministère de l'Education et de la Science. La Fédération de l'enseignement de la CC.OO n'a pas signé l'accord et par conséquent elle a été exclue de la discussion sur les autres questions prévues. Cependant, les organisations signataires et la CC.OO sont convenues avec le consentement du ministère de l'Education et de la Science, qui devait fournir les facilités nécessaires en moyens matériels et en personnel, de consulter le corps professoral le 16 mai sur l'accord préliminaire. Avec une participation de plus de 90 pour cent du personnel enseignant intéressé, les accords préliminaires ont été rejetés par 78 pour cent du corps enseignant contre 13 pour cent de votes positifs. A la suite de ce rejet, les syndicats et le ministère de l'Education et de la Science se sont de nouveau réunis le 23 mai. Le ministère de l'Education et de la Science a annoncé qu'il prévoyait de soumettre les revendications salariales à une commission interministérielle des salaires et, pour les autres questions en discussion, il a posé en principe l'intangibilité du contenu des accords préliminaires rejetés si largement par le corps professoral.
  4. 134. Parallèlement, en mai 1986, le Bulletin officiel de l'Etat a publié le décret royal no 417/88 du 29 avril portant établissement de normes pour garantir la prestation des services essentiels dans les établissements d'enseignement public non universitaire dépendants du ministère de l'Education et de la Science. A propos du contenu de ce décret royal sur le service minimum dans l'enseignement, aucune audience ou négociation, aucun dialogue n'a eu lieu avec les syndicats ayant appelé à la grève. Ledit décret royal, imposé unilatéralement par le gouvernement, ne comportait pas la moindre justification des critères retenus pour établir un tel service minimum, et il ne définissait pas davantage les critères techniques ou les faits concrets dont il avait été tenu compte pour justifier une telle restriction à l'exercice du droit de grève. Le seul motif invoqué par le décret royal no 417/88 était l'invocation générale et abstraite de la nécessité de satisfaire le droit à l'éducation et d'éviter le préjudice qui pourrait être causé dans ce domaine.
  5. 135. Par ailleurs, le décret royal no 417/88 contient d'autres mesures attentatoires à l'exercice du droit de grève:
    • - en son article 2 b), en considérant comme service essentiel les activités de direction de l'établissement, il restreint l'exercice du droit de grève pour toute une catégorie ou tout un groupe de travailleurs, à savoir le personnel de direction de l'établissement d'enseignement;
    • - en qualifiant d'essentiel le droit, pour les élèves, d'être accueillis et de recevoir un enseignement, il a pour résultat: dans tous les enseignements et matières où il existe un professeur unique pour chaque classe ou unité scolaire, par exemple dans l'enseignement général de base, que ces professeurs ou maîtres sont pratiquement tous privés du droit de grève. Or les professeurs d'enseignement général de base regroupent la catégorie professionnelle la plus nombreuse parmi toutes celles qui font grève car ils sont plus nombreux, par exemple, que les autres catégories d'enseignants (personnel des instituts, etc.);
    • - en son article 2 b), le décret royal no 417/88 catalogue comme service essentiel la protection de rien moins que le droit de ne pas faire grève. Il faut signaler que la Constitution espagnole protège le droit de ne pas participer à une grève comme un droit ou une prérogative constitutionnelle à l'égal du droit de grève;
    • - en son article 3, le décret royal formule une autorisation abstraite et inconditionnelle selon laquelle le ministère de l'Education et de la Science est habilité, de la façon la plus arbitraire et la plus discrétionnaire (vu que le texte du décret ne définit aucune situation particulière), à préciser en détail et de façon unilatérale le service minimum à assurer en cas de grève.
  6. 136. Postérieurement au 23 mai et aux divers événements susmentionnés, les cinq organisations auxquelles il a été fait allusion, ainsi que la Confédération des syndicats régionaux d'enseignants STEC, ont décidé, devant les mesures restrictives et dilatoires du ministère de l'Education et de la Science, de déclencher une grève illimitée à partir du 31 mai dès lors que cette grève serait suivie par plus de 40 pour cent du personnel intéressé. Faute d'obtenir ce pourcentage, les syndicats mettraient fin à la grève. Face à cet ordre de grève justifié par l'inflexibilité des propositions du ministère de l'Education et de la Science, par son manque de souplesse et de volonté de négocier, le gouvernement espagnol, dans l'après-midi du 27 mai 1988, a annoncé à tous les moyens de communication, par l'intermédiaire du porte-parole du Conseil des ministres, qu'il prenait les mesures suivantes:
    • - rupture des conversations et de tout dialogue ou négociation avec les syndicats d'enseignants qui ne se désolidariseraient pas avec l'ordre de grève;
    • - publication au Bulletin officiel de l'Etat en date du 26 mai 1988 de l'arrêté ministériel du 25 mai 1988 portant instructions en matière de service minimum dans les établissements d'enseignement public non universitaire. Ledit arrêté contient les mêmes dispositions litigieuses que le décret royal no 417/88. Il contient en outre un certain nombre de dispositions nouvelles comportant de nombreuses restrictions. Ainsi, entre autres, l'alinéa c) considère de façon générale comme activité essentielle "tous les examens prévus au programme des différents domaines ou matières qui permettent l'évaluation objective du travail scolaire des élèves". Cette obligation légale imposée à tous les enseignants de participer aux examens scolaires implique la suppression totale du droit de grève pour la totalité du corps professoral non universitaire auquel s'appliquait l'ordre de grève lancé par les syndicats. Cet obstacle insurmontable au droit de grève tient au fait que l'année scolaire était sur le point de se terminer et que les professeurs de l'enseignement général de base, selon les règles imposées par le ministère (circulaire du 27 novembre 1981), ne doivent pas procéder à des examens de fin d'année mais au contrôle continu des connaissances;
    • - le 4 juin 1988, les autorités ministérielles ont annoncé, en utilisant les moyens de communication, leur décision unilatérale de prolonger la durée des cours d'enseignement afin de pallier les effets de la grève. Cette décision non seulement porte de nouveau atteinte au droit syndical de grève et de négociation mais suppose en outre que les journées de grève observées par les enseignants et assorties d'une perte de salaire devront désormais être considérées comme journées de travail obligatoire sans aucun supplément de salaire. Il est évident que cette troisième mesure ou décision constitue une véritable sanction administrative pour exercice du droit de grève, indépendamment de la perte économique.
  7. 137. La CC.OO conclut en affirmant que tout ce qui précède constitue une atteinte à la convention no 87 du point de vue de la protection du droit de grève en tant qu'élément de l'activité des organisations syndicales, et à la convention no 151 qui exige de promouvoir la négociation et la participation des syndicats à la détermination des conditions de travail des fonctionnaires. La CC.OO se réfère enfin aux principes du Comité de la liberté syndicale concernant les services essentiels et le service minimum et souligne que le gouvernement a porté atteinte à l'exercice du droit de grève en se refusant à toute négociation sur les revendications au lieu de promouvoir la négociation.

B. Réponses du gouvernement

B. Réponses du gouvernement
  1. 138. Par communication en date du 15 décembre 1988, le gouvernement déclare que, pendant de longs mois et jusqu'à la fin de l'année scolaire 1986-87, le ministère de l'Education et de la Science a négocié avec les représentants du corps enseignant les grands thèmes qui définissent les fonctions de l'enseignement public, par exemple les systèmes de formation initiale et permanente, l'accès au corps enseignant, la promotion professionnelle, la définition des postes de travail, la mobilité et les droits et devoirs du corps enseignant. Le ministère portait le plus grand intérêt à la poursuite de la négociation afin de définir les grands axes d'une amélioration des conditions de travail du personnel enseignant et, par là, d'une amélioration de la qualité de l'enseignement. Les représentants du corps enseignant avaient déjà proposé au printemps 1987 d'ajourner ces contacts jusqu'à ce que les premières élections dans l'enseignement public précisent la situation en ce qui concerne la représentation syndicale des enseignants. Les élections ont eu lieu en décembre 1987 et, pour la première fois, le personnel enseignant, conformément à la loi de 1987 sur les organismes représentatifs, a pu exercer pleinement ses droits syndicaux.
  2. 139. Le gouvernement ajoute que, le 23 décembre 1987, le ministère de l'Education et de la Science, avant que la période électorale soit terminée et que les résultats définitifs du vote soient proclamés, et avant même la constitution des conseils du personnel enseignant et du bureau général de négociation de l'Administration de l'Etat (dont la première réunion a eu lieu le 15 avril 1988), a convoqué les représentants élus du corps enseignant pour établir un programme de contacts avec un ordre du jour concret et un calendrier en vue de discuter des problèmes de l'enseignement public et notamment l'augmentation progressive des rémunérations.
  3. 140. Se référant à la nature et au déroulement du conflit qui fait l'objet de la plainte de la CC.OO, le gouvernement souligne que le ministère de l'Education et de la Science, dès la publication de l'ordre de grève (cet ordre a été annoncé publiquement le 29 février bien que divers documents en fassent mention antérieurement), a maintenu une attitude d'ouverture à la négociation afin d'éviter les préjudices découlant de la grève. Les contacts, les réunions préalables avec les différents syndicats, la clarification des positions respectives, l'étude des cahiers de revendication, etc. ont été le comportement habituel des autorités. Elles se sont donc efforcées de promouvoir la négociation. Les réunions tenues les 10 et 25 février 1988 avec les syndicats ont été centrées sur la totalité des thèmes qui formaient la plate-forme revendicative des syndicats. Les autorités se sont efforcées de maintenir un climat propice au déroulement de cette négociation dans les conditions les plus favorables et de respecter à tout moment la qualité de l'enseignement puisque tant les familles que les élèves subissaient passivement un conflit qui menaçait gravement le droit à l'éducation d'une importante partie de la population.
  4. 141. Le gouvernement indique que les efforts du ministère de l'Education et de la Science, avant et pendant le conflit, ont tendu à restaurer le climat de dialogue nécessaire à la recherche d'un accord avec les syndicats d'enseignants, à preuve la lettre adressée le 23 mars 1988 par le sous-secrétaire du ministère à toutes les organisations syndicales. Cette lettre marquait la mise en route de toute une série de contacts entre le ministère et les syndicats, puis une nouvelle lettre du sous-secrétaire en date du 5 avril a invité les syndicats à une réunion prévue pour le 6 avril. Lors de cette réunion, le ministère de l'Education et de la Science a formulé une proposition économique d'ajustement des rémunérations par rapport au reste de la fonction publique, les crédits alloués à cet égard étant de 33 milliards de pesetas. Cette proposition du 6 avril matérialisait l'intention du gouvernement d'aligner en trois ans les salaires des enseignants sur ceux des autres fonctionnaires, soit une augmentation annuelle moyenne de 130.000 pesetas par enseignant. Lors de cette réunion, les autorités d'éducation ont également abordé les autres points faisant l'objet de négociations avec les syndicats. Il fut décidé de reprendre les conversations deux jours plus tard. L'attitude des syndicats fut alors de maintenir l'ordre de grève prévu pour les jours suivants et de doubler la durée de la grève.
  5. 142. Les 16, 18, 21, 22 et 23 avril, de nouvelles réunions ont eu lieu avec les syndicats pour manifester le désir du ministère de régler le conflit par la négociation. Après de longues discussions qui ont demandé près de 75 heures, la possibilité d'un accord de principe fut entrevue le samedi 23 avril, mais cet accord s'est en définitive révélé impossible. En raison de l'évolution du conflit et du grand nombre de journées perdues par les élèves du fait de la grève, le ministre de l'Education et de la Science a convoqué, le 25 avril, une conférence de presse au cours de laquelle il a insisté sur le fait que le gouvernement était prêt à poursuivre la négociation afin de régler le conflit; il a annoncé en outre que si celui-ci se poursuivait, il serait nécessaire, le cas échéant, d'assurer conformément à l'article 28 de la Constitution un service public aussi essentiel que l'enseignement et de prévoir à cet effet un service minimum pour garantir le droit fondamental à l'éducation. Les mesures annoncées le 25 avril répondaient à la demande formelle des représentants des parents d'élèves et au fait avéré que, par sa gravité, ce conflit portait gravement atteinte au droit à l'éducation. Il ne s'agissait pas de mesures contre la grève, mais de mesures de protection d'un droit fondamental, à savoir le droit à l'éducation. Il convient de signaler en outre que ces mesures, qui comprenaient l'établissement d'un service minimum, étaient connues de la Conférence des conseillers d'éducation des communautés autonomes et que, lors de leur réunion du 25 avril, les conseillers d'éducation avaient exprimé leur appui total à la position du ministère de l'Education et de la Science dans ce conflit.
  6. 143. Malgré d'intenses négociations qui se sont poursuivies pendant la semaine en question et surtout vers la fin de la semaine, le 4 mai un accord préliminaire est intervenu avec quatre des cinq organisations syndicales représentant la grande majorité du personnel enseignant, soit quelque 72 pour cent du total du corps professoral de l'enseignement public. Une seule des organisations qui avaient participé à toutes les négociations a décidé en définitive de rompre le front commun qu'elle avait jusque-là maintenu avec les autres syndicats et elle s'est désolidarisée de cet accord préliminaire qui ne répondait pas à son attente. L'accord, signé par quatre syndicats, représentait des améliorations substantielles et très satisfaisantes pour le corps enseignant en ce qui concernait les questions de rémunération et de conditions de travail et autres améliorations qui contribuaient à l'élévation de la qualité de l'enseignement.
  7. 144. Le décret royal no 417/88 du 29 avril et l'arrêté ministériel d'application assurent la compatibilité entre l'exercice du droit de grève des enseignants et le droit fondamental des élèves à l'éducation, consacré par la Constitution. Le gouvernement a adopté ce texte alors que se poursuivait une grève prolongée qui menaçait de durer indéfiniment et il l'a fait avec prudence en cherchant à ne pas dépasser le niveau strictement minimum d'un service public fondamental, ayant présent à l'esprit le fait que les élèves risquaient d'être les principales victimes du conflit en cette période décisive de l'année scolaire. Cette réflexion sur les circonstances entourant la grève et sur ses incidences, ainsi que sur la nature du droit à l'éducation garanti constitutionnellement, a convaincu le gouvernement espagnol de la nécessité de prévoir des activités permettant d'assurer un service minimum afin de garantir le droit à l'éducation.
  8. 145. En réponse à une demande du Comité de la liberté syndicale d'envoyer des informations détaillées au sujet de l'allégation selon laquelle le ministère de l'Education et de la Science aurait annoncé unilatéralement, en utilisant les moyens de communication, sa décision de prolonger la durée des cours d'enseignement afin de pallier les effets de la grève sans que les enseignants concernés ne reçoivent de salaire supplémentaire, le gouvernement indique, dans une nouvelle communication du 16 mai 1989, que les autorités ministérielles ont effectivement annoncé cette prolongation de l'année scolaire 1987-88 pour minimiser les effets de la grève sur la formation des élèves. Cependant, cette mesure, ajoute-t-il, n'a eu aucune incidence négative étant donné qu'elle n'a pas été appliquée dans les faits. Les cours se sont terminés aux dates prévues initialement, à savoir le 13 juin pour les élèves de l'enseignement secondaire et le 23 pour les élèves de l'enseignement général. Par ailleurs, les enseignants, tout comme les autres fonctionnaires publics, jouissent d'un mois de congé annuel de sorte que, même si l'année scolaire avait été prolongée de quelques jours au mois de juillet, les droits du personnel enseignant n'auraient pas été transgressés.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 146. Le comité observe que, dans le présent cas, l'organisation plaignante a critiqué l'attitude du gouvernement dans les négociations avec les organisations représentatives de l'enseignement public non universitaire pendant le premier semestre de 1988, à propos de la promulgation du décret royal no 417 du 29 avril 1988 et de l'arrêté ministériel du 25 mai 1988 relatifs à un service minimum dans les établissements d'enseignement public non universitaire, textes de contenu très restrictif et préparés sans consultation, négociation ou dialogue avec les syndicats; elle a également critiqué la décision unilatérale des autorités de prolonger la durée de l'année scolaire afin de pallier les effets de la grève, sans compensation économique pour les travailleurs. Le comité prend note des réponses du gouvernement.
  2. 147. S'agissant des critiques de l'organisation plaignante relatives aux mesures dilatoires du ministère de l'Education et de la Science et, d'une manière plus générale, à son attitude lors des négociations avec les organisations syndicales de l'enseignement public non universitaire, le comité prend note des observations et explications du gouvernement qui souligne en particulier ses efforts déterminés au vu de parvenir à un accord par la négociation. De l'avis du comité, d'une part, le refus allégué du ministère de négocier pendant une grève ou sous la menace d'une grève - point sur lequel le gouvernement n'a pas répondu - n'est pas nécessairement incompatible avec les principes de la liberté syndicale. D'autre part, le comité constate que, durant le premier semestre de 1988, période pendant laquelle s'est produit le conflit qui a donné lieu à la présente plainte, plusieurs réunions se sont tenues avec les syndicats à l'initiative du ministère de l'Education, lequel a formulé des propositions importantes; ces réunions ont débouché sur le principe d'un accord qui ne s'est pas concrétisé, puis sur un accord préliminaire avec quatre des cinq syndicats participant aux négociations. Le comité conclut que, bien que les autorités eussent peut-être pu favoriser la fluidité du processus de négociation et éviter des retards, il ne semble pas qu'elles aient enfreint l'obligation générale de négocier de bonne foi.
  3. 148. Le comité note que le décret royal no 417 du 29 avril 1988 et l'arrêté ministériel du 25 mai 1988 relatifs au service minimum dans le secteur de l'enseignement public non universitaire prévoient que le ministère de l'Education doit entendre le comité de grève avant de désigner le personnel considéré comme nécessaire pour la prestation du service minimum. En revanche, les activités nécessitant un service minimum sont définies par le décret, et le gouvernement n'a pas nié que cette définition a été établie unilatéralement, sans consultation des organisations syndicales. Le comité doit donc souligner le principe selon lequel les organisations professionnelles devraient pouvoir participer à la définition des services minima à effectuer en cas de grève (voir 234e rapport, cas no 1244 (Espagne), paragr. 153 à 155, et 244e rapport, cas no 1342 (Espagne), paragr. 151), et non pas seulement à la détermination du nombre de travailleurs affectés à ces activités.
  4. 149. Quoi qu'il en soit, le comité considère qu'il ne convient pas de s'arrêter plus longtemps sur cette question étant donné que ni les allégations de l'organisation plaignante ni la réponse du gouvernement ne permettent d'établir si la réglementation du service minimum figurant dans le décret royal et dans l'arrêté ministériel a été appliquée en pratique et, le cas échéant, avec quelle portée, et que, selon les informations dont dispose le comité, la grève de durée illimitée entamée le 31 mai 1988 fut arrêtée par les organisations syndicales le 3 juin.
  5. 150. Enfin, le comité observe que le gouvernement a confirmé l'allégation selon laquelle les autorités du ministère de l'Education et de la Science ont annoncé devant les moyens de communication leur décision unilatérale de prolonger l'année scolaire afin de pallier les effets de la grève. Toutefois, le comité note que finalement cette mesure n'a pas été appliquée. Le comité doit signaler cependant que l'annonce faite par le gouvernement de l'obligation de travailler au-delà de la durée normale du travail pourrait en elle-même influencer indûment le déroulement de la grève.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 151. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
    • Le comité exprime l'espoir qu'à l'avenir les organisations professionnelles pourront participer à la définition du service minimum à assurer en cas de grève.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer