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- 138. Par communications en date du 15 juin et du 28 juillet
- 1988, la
- Fédération nationale des fermiers et des travailleurs de
- l'agriculture et des
- plantations (NAFAPAW) a présenté une plainte en violation
- des droits syndicaux
- contre le gouvernement du Libéria. Le gouvernement a
- envoyé ses observations
- sur ce cas dans une communication en date du 13 février
- 1989, reçue par le BIT
- le 20 mars 1989.
- 139. Le Libéria a ratifié la convention (no 87) sur la liberté
- syndicale et
- la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98)
- sur le droit
- d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- 140. Dans sa première communication en date du 15 juin
- 1988, dont la NAFAPAW
- affirme qu'elle est également présentée au nom du Syndicat
- national des
- travailleurs de l'agriculture et assimilés du Libéria (NAAWUL) et
- du Syndicat
- national des gens de mer, des travailleurs portuaires et autres
- travailleurs
- du Libéria (NSP/GWUL), l'organisation plaignante formule les
- allégations
- suivantes:
- a) Le ministère du Travail a commis des violations
- continuelles, délibérées
- et flagrantes des droits syndicaux et des libertés
- démocratiques qui ont eu
- des effets désastreux sur les activités et le fonctionnement de
- la fédération
- et sur les conditions de vie et de travail des travailleurs.
- b) Au cours des cinq dernières années, le ministère du
- Travail a poursuivi
- une politique "déplaisante et dangereuse", contraire aux droits
- fondamentaux
- des travailleurs dont certains, dans le domaine agricole, n'ont
- pas été payés
- pendant six, huit et même 16 mois, et doivent travailler sans
- protection
- syndicale.
- c) Le ministère du Travail a refusé de reconnaître la
- NAFAPAW depuis le 12
- décembre 1986, date de sa création, bien qu'elle soit en
- principe, selon elle,
- reconnue par le gouvernement.
- d) Le ministère du Travail a refusé de reconnaître le
- Syndicat national des
- travailleurs de l'agriculture et assimilés du Libéria (NAAWUL) et
- ses
- responsables (le "groupe Mooney-White"), dûment élus le 18
- janvier 1986 au
- cours de la deuxième convention nationale du syndicat. A cet
- égard, la NAFAPAW
- reproche au ministère de reconnaître et d'utiliser d'autres
- personnes nommées
- dans la plainte (le "groupe Stanley") comme responsables du
- NAAWUL; d'après la
- NAFAPAW, ces personnes sont actuellement sous le coup de
- poursuites pénales.
- 141. Dans une autre communication en date du 28 juillet
- 1988, la NAFAPAW
- prétend que le ministère du Travail fait usage de toutes les
- manoeuvres
- possibles pour transformer les syndicats membres de la
- fédération en
- organisations progouvernementales dans le dessein de
- détruire la fédération. A
- titre d'exemple, la NAFAPAW indique qu'une "convention"
- tenue le 16 juillet
- 1988 par des personnes se présentant comme des membres
- du NAAWUL n'était en
- fait qu'une manifestation clandestine et antidémocratique
- organisée avec le
- soutien du ministère et financée indirectement par la
- Confédération mondiale
- du travail.
- B. Réponse du gouvernement
- 142. Dans sa réponse en date du 13 février 1989, le
- gouvernement nie toutes
- les allégations contenues dans la deuxième communication de
- la NAFAPAW en date
- du 28 juillet 1988. Le gouvernement indique qu'il n'a jamais
- usé de manoeuvres
- visant à détruire la fédération, ni appuyé l'organisation de
- quelque
- convention que ce soit réunissant des syndicats ou d'anciens
- responsables
- syndicaux. Le gouvernement déclare également qu'il sait
- seulement que le
- NAAWUL a élu ses cadres dirigeants et que les personnes
- élues se sont
- acquittées de tâches syndicales. Le gouvernement ajoute qu'il
- n'intervient pas
- dans les activités syndicales car l'article 4100 de la loi sur les
- pratiques
- du travail le lui interdit.
- 143. Le gouvernement nie en outre toutes les allégations
- contenues dans la
- première communication de la NAFAPAW et ajoute qu'il n'a
- même pas eu
- connaissance de la création ou de l'existence de cette
- fédération, étant donné
- qu'elle n'a pas communiqué ses statuts et sa constitution
- comme le requiert
- l'article 4100 de la loi sur les pratiques du travail. Le
- gouvernement nie
- également l'existence de toute politique "déplaisante et
- dangereuse" qui
- serait contraire aux droits fondamentaux des travailleurs et dit
- ignorer que
- des travailleurs agricoles n'aient pas reçu leurs salaires pour
- les périodes
- mentionnées par l'organisation plaignante, ou que des
- travailleurs soient
- contraints de travailler sans protection syndicale. Le
- gouvernement nie
- l'existence de toute exploitation de la main-d'oeuvre et de tout
- travail forcé
- au Libéria.
- 144. Le gouvernement nie avoir refusé de reconnaître le
- NAAWUL, ainsi qu'il
- est dit dans la plainte, étant donné que cette organisation est
- en fait
- reconnue par le gouvernement du Libéria, dont les archives
- indiquent comme
- membres du bureau exécutif du NAAWUL une liste de
- personnes différente de
- celle mentionnée par l'organisation plaignante. Le
- gouvernement ajoute que
- l'actuel bureau directeur du syndicat est en contact permanent
- avec le
- ministère du Travail et qu'un membre dudit syndicat a été
- envoyé comme
- conseiller technique des travailleurs à la 75e session de la
- Conférence
- internationale du Travail. Le gouvernement précise qu'il n'a
- pas reconnu M.
- David White et son groupe comme dirigeants du NAAWUL car
- leurs noms n'ont
- jamais été communiqués au ministère du Travail par le
- secrétariat du NAAWUL.
- En outre, le gouvernement nie avoir eu connaissance d'une
- élection de
- responsables du NAAWUL le 18 janvier 1986 (le "groupe
- Mooney-White"), et il
- n'a pas été informé de l'élection tenue le 14 juillet 1988; les
- personnes
- élues (le "groupe Stanley") sont dûment reconnues par le
- ministère du Travail.
- 145. Le gouvernement nie en outre avoir quelque intention
- que ce soit de
- démanteler le NAAWUL ou d'utiliser d'anciens responsables
- du syndicat au
- détriment des travailleurs. Enfin, le gouvernement souligne que
- la NAFAPAW
- n'est pas habilitée à présenter cette plainte au nom du
- NAAWUL et du NSP/GWUL,
- étant donné qu'elle n'a pas communiqué ses statuts et sa
- constitution au
- ministère du Travail.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 146. Le comité note que, dans le cas présent, les allégations
- peuvent être
- classées en trois catégories. Tout d'abord, l'allégation générale
- de violation
- des droits syndicaux (paragraphe a) ci-dessus); en deuxième
- lieu, la politique
- "déplaisante et dangereuse" du gouvernement, qui aurait
- privé certains
- travailleurs agricoles de leurs salaires pendant des périodes
- pouvant
- atteindre 16 mois (paragraphe b) ci-dessus); enfin, une
- allégation qu'on peut
- généralement qualifier de problème de reconnaissance
- syndicale et/ou de
- rivalité intersyndicale (paragraphes c) et d) ci-dessus). En fait,
- la deuxième
- communication de l'organisation plaignante ne constitue
- qu'une variation sur
- ce thème.
- 147. En ce qui concerne la première allégation de
- l'organisation plaignante,
- le comité est contraint de noter qu'il s'agit là d'une allégation
- d'un
- caractère extrêmement général, à laquelle le gouvernement a
- donné une réponse
- tout aussi générale, et qui n'est étayée par aucune preuve
- concrète dans les
- deux communications fournies par l'organisation plaignante;
- dans ces
- conditions, cette allégation n'appelle pas d'examen plus
- approfondi.
- 148. En ce qui concerne la deuxième question soulevée par
- l'organisation
- plaignante, à savoir la politique "déplaisante et dangereuse"
- du gouvernement
- qui aurait pour effet de priver certains travailleurs agricoles de
- leurs
- salaires pendant des périodes pouvant atteindre 16 mois, le
- comité observe que
- cette allégation est purement et simplement niée par le
- gouvernement. Ici
- également, le comité se trouve confronté à deux déclarations
- totalement
- contradictoires, ne s'appuyant sur aucun exposé détaillé et sur
- aucune preuve,
- et il doit par conséquent rejeter cette allégation.
- 149. La troisième question a trait à une situation que l'on
- peut, au mieux,
- qualifier de confuse. Le comité croit comprendre, d'après la
- documentation
- reçue, qu'un conflit de pouvoir a surgi au sein du Syndicat
- national des
- travailleurs de l'agriculture et assimilés du Libéria (NAAWUL)
- entre deux
- groupes, dont l'un (le "groupe Stanley") est reconnu par le
- gouvernement comme
- ayant été dûment élu le 14 juillet 1988 comme bureau directeur
- du NAAWUL.
- L'autre faction (le "groupe Mooney-White") prétend être le seul
- représentant
- légitime des travailleurs membres du NAAWUL; le
- gouvernement nie avoir eu
- connaissance de leur élection et indique que leurs noms n'ont
- jamais été
- communiqués au ministère du Travail. Autre élément
- compliquant encore
- davantage l'affaire, le gouvernement nie l'existence même de
- la NAFAPAW (qui a
- présenté la plainte), du fait qu'elle n'a pas communiqué ses
- statuts et sa
- constitution; le gouvernement conteste le droit de la
- NAFAPAW de présenter
- cette plainte au nom du NAAWUL et du NSP/GWUL pour la
- même raison.
- 150. Le comité a indiqué à de nombreuses reprises qu'il
- n'était pas
- compétent pour formuler des recommandations sur des
- dissensions au sein d'une
- organisation syndicale tant que le gouvernement n'intervient
- pas d'une manière
- risquant de nuire à l'exercice des droits syndicaux et au
- fonctionnement
- normal d'une organisation. (Voir, par exemple, 217e rapport,
- cas no 1086
- (Grèce), paragr. 93.) En cas de conflit interne, le comité a
- suggéré diverses
- solutions permettant de clarifier ces situations juridiques et de
- résoudre les
- questions de représentativité des responsables syndicaux en
- cause (vote des
- travailleurs, procédures judiciaires). Dans le cas présent, le
- comité estime
- que des procédures impartiales devraient être mises en oeuvre
- pour permettre
- le libre choix de leurs représentants par les travailleurs.
- 151. Le comité observe que certains des groupes, syndicats
- ou personnes
- mentionnés dans la présente plainte étaient déjà impliqués
- dans des problèmes
- similaires dans les cas nos 1219 et 1410 (233e et 259e
- rapports). Dans le
- second de ces cas, le comité a noté qu'il ne lui appartenait
- pas de déterminer
- quel groupe devait représenter les membres du syndicat en
- cause, mais
- simplement de déterminer s'il y avait eu une quelconque
- interférence du
- gouvernement dans le libre choix des responsables syndicaux
- par les
- travailleurs. La même opinion doit prévaloir ici et aucune
- interférence de
- cette nature n'a été établie dans le présent cas. En fait, le
- comité se trouve
- en face de deux versions contradictoires et n'est pas en
- mesure de présenter
- des commentaires définitifs sur cet aspect du cas.
- 152. Toutefois, le comité ne saurait trop insister sur le fait
- que, dans les
- cas de rivalité intersyndicale, ceux qui ont le plus à perdre sont
- les
- travailleurs, et qu'il importe de remédier au plus tôt aux
- incertitudes
- découlant de ces conflits de pouvoir, dans l'intérêt même de
- toutes les
- parties en cause, et en particulier des travailleurs.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 153. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le
- Conseil
- d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité considère que les allégations générales
- présentées par
- l'organisation plaignante n'appellent pas d'examen plus
- approfondi.
- b) Le comité estime que des procédures impartiales
- devraient être mises en
- oeuvre pour permettre le libre choix de leurs représentants par
- les
- travailleurs.