Afficher en : Anglais - Espagnol
- 28. L'Union panhellénique des mécaniciens de la marine marchande (PEMEN), l'Union panhellénique des matelots de la marine marchande (PENEN) et l'Union panhellénique des mécaniciens de troisième degré certifiés et des pompiers Stefenson ont présenté une plainte alléguant la violation de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, dans une communication du 28 novembre 1985. Le gouvernement a fait parvenir ses observations au sujet de cette plainte dans une communication du 10 avril 1986.
- 29. La Grèce a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des plaignants
A. Allégations des plaignants
- 30. Les plaignants allèguent une violation de la liberté syndicale qui résulterait de l'article 238 du décret no 187/1973 portant Code maritime de droit public. Selon les plaignants, cette disposition interdit au marin grec d'engager un recours, sans autorisation du ministère de la Marine marchande, devant une autorité ou une institution étrangère pour obtenir la résolution d'un conflit résultant de son contrat de travail, et permet de punir le marin de peine pouvant aller jusqu'à trois mois de prison et cinq ans de retrait de permis de travail dans la marine marchande. Selon les plaignants, sont considérés comme autorité étrangère par les conseils chargés d'instruire les recours des marins, outre les tribunaux étrangers, les syndicats étrangers ainsi que les fédérations et confédérations internationales, dont la Fédération des marins grecs (PNO) et les syndicats professionnels des marins, sont membres.
- 31. D'après les plaignants, cette disposition constitue une violation de l'article 5 de la convention no 87 car:
- 1) elle porte atteinte au droit des syndicats d'être en contact avec des organisations, fédérations ou confédérations internationales dont les syndicats sont ou ne sont pas membres;
- 2) elle porte atteinte au droit de demander l'aide intellectuelle, matérielle et législative des fédérations et confédérations locales, étrangères et internationales et de leur demander leur appui en matière de revendications des syndicats de marins et de recours en justice;
- 3) elle porte atteinte au droit des syndicats de branches de demander l'aide des fédérations et confédérations internationales étrangères et locales dans leur lutte et dans la lutte de leurs mandants, et à leur droit de revendiquer des actions de solidarité pour la protection des intérêts communs des travailleurs et des droits collectifs et individuels au plan international;
- 4) elle porte enfin atteinte au droit de réclamer la non-ingérence des autorités gouvernementales quand elles adoptent des obstacles législatifs ou matériels à l'encontre des marins grecs, des navires, ou des lieux où ils accostent.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 32. Dans sa réponse du 10 avril 1986, le gouvernement explique de manière générale qu'un secteur maritime développé doit nécessairement assurer un trafic maritime normal et paisible à travers le monde, et que les navires doivent non seulement assurer leurs tâches commerciales mais essentiellement leurs responsabilités en matière de sauvegarde de la sécurité et de la vie des marins. Il ajoute que toutes les nations maritimes de l'Ouest comme de l'Est ont adopté un Code pénal et disciplinaire régissant les relations entre les personnes travaillant à bord des navires et que la Grèce a adopté un tel code dès 1923, lequel a par la suite été amendé.
- 33. Au sujet du décret législatif 187/1973 portant Code maritime de droit public, le gouvernement affirme que ce texte n'a pas introduit de nouvelles dispositions mais qu'il a simplement codifié la législation existante. Il explique cependant que, ce code étant entré en vigueur depuis un certain nombre d'années, il va faire l'objet d'une mise à jour pour laquelle les parties intéressées, y compris les marins, ont été invitées à exprimer leur opinion. Un comité spécial, dont les membres vont prochainement être désignés et auquel les représentants des marins participeront, sera chargé de ces modifications.
- 34. Selon le gouvernement, la corrélation entre les lois disciplinaires de la marine marchande qui existent dans tous les pays à vocation maritime et les dispositions de la convention no 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical alléguées par les plaignants ne peut être acceptée, étant donné qu'elles n'ont aucune relation entre elles. Les organisations de marins ont, toutefois, aux termes de la loi, le droit de constituer des conseils de discipline chargés du contrôle disciplinaire de ceux de leurs membres qui violent les règlements. Ces conseils sont composés de manière collégiale et non d'une seule personne et les marins disposent d'un droit d'appel devant un conseil de second degré. Les conseils de premier et de second degré sont composés d'un représentant des marins et de personnes compétentes en matière de conditions de vie à bord des bateaux, d'exigences relatives à la sécurité de la navigation et d'égalité de traitement disciplinaire. D'après le gouvernement, de tels conseils de discipline existent en Italie, en France, en Argentine, au Brésil et en Angleterre.
- 35. Au sujet de la disposition du décret législatif 187/1973 relatif au droit d'appel devant des autorités autres que celles de l'Etat du pavillon, le gouvernement indique qu'il s'agit d'un point très controversé en droit international. Dans la navigation grecque, elle a soulevé des problèmes qui ont découlé du fait que les tribunaux des Etats-Unis ont décidé d'accepter d'examiner des plaintes présentées par des marins grecs.
- 36. Pour illustrer son propos, le gouvernement joint à sa réponse deux exemples récents de telles plaintes. Le premier fait état d'un recours en dommages et intérêts introduit par un marin grec devant un tribunal de la Nouvelle-Orléans à propos d'un accident du travail survenu en mai 1984 sur un navire grec ancré dans le port français de Boulogne-sur-Mer. Le second a trait au versement d'une indemnité considérable à la veuve d'un autre marin grec, mort à la suite d'un accident survenu sur un navire ancré dans le port grec de Patras et qui menaçait de porter l'affaire devant un tribunal américain.
- 37. Le gouvernement conclut qu'il ne pouvait pas demeurer indifférent à ce genre de situation et qu'il avait introduit l'article 238 du décret législatif 187/1973 avec l'accord des représentants des fédérations de marins et d'armateurs. Cet article dispose que les recours relatifs au travail ou aux droits des marins, y compris ceux découlant de la maladie ou de l'accident, peuvent être jugés par la législation grecque. D'autres nations maritimes suivent cette pratique, affirme le gouvernement. Il en est ainsi notamment de l'Italie, du Danemark, des Pays-Bas, de la Suède et de l'Islande.
- 38. En outre, ajoute-t-il, la Grèce a pris toutes les mesures nécessaires pour que les différends du travail résultant du travail des marins à bord des navires puissent être jugés équitablement et promptement. Les autorités consulaires maritimes grecques sont tenues au courant de toutes nouvelles dispositions régissant ces questions ainsi que de la jurisprudence en la matière. Par ailleurs, les marins ou les armateurs, lorsqu'ils ont un problème, télexent ou écrivent aux divisions compétentes du ministère de la Marine marchande et obtiennent des réponses au bout de quelques jours. Dans les cas où un marin grec ne peut être protégé par les autorités grecques, notamment lorsqu'il souhaite qu'un navire soit confisqué dans un pays étranger, l'autorisation est toujours accordée par le ministère de la Marine marchande par télex, en application de l'article 238, paragraphe 3. L'article 246, dernier paragraphe, dispose que le commandant du navire est tenu pour responsable si un membre de l'équipage ou un passager est injustement empêché de déposer une plainte devant les autorités grecques.
- 39. En conséquence, tout recours déposé par un marin devant une autorité ou une institution étrangère à propos d'une plainte découlant d'un contrat de travail à bord d'un navire, alors que les marins sont protégés par la législation grecque et qu'ils peuvent introduire des recours devant les autorités consulaires grecques (en application de l'article 238), est injustifiable, estime le gouvernement. De plus, ajoute-t-il, il peut avoir pour conséquence de troubler le fonctionnement normal des navires, il est diffamatoire pour la Grèce à l'étranger et est donc interdit.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 40. Le comité observe que la disposition législative incriminée par les plaignants porte sur l'interdiction faite à un marin grec de recourir devant une autorité étrangère pour obtenir la résolution d'un conflit résultant de son contrat de travail. L'article 238 dispose en effet: "Le membre de l'équipage d'un navire en service ou licencié qui a recours à une institution ou autorité étrangère pour revendiquer ses droits prétendus ou pour obtenir la résolution d'un différend qui résulterait de son contrat de travail sur le navire, malgré le fait qu'il est protégé juridiquement par les lois grecques et malgré le fait qu'il peut avoir recours à une autorité consulaire grecque, est sanctionné par un emprisonnement jusqu'à trois mois. Constituent des cas aggravants: premièrement, le fait que cette personne soit le capitaine ou un officier du navire; deuxièmement, le fait qu'un tel recours provoque le retard du départ d'un navire prêt à appareiller. Les dispositions précédentes ne s'appliquent pas dans les cas où le ministre de la Marine, des Communications et des Transports a donné son autorisation de recourir devant des autorités ou institutions étrangères en évaluant les conditions de l'application du premier paragraphe." Selon les plaignants, cette disposition violerait l'article 5 de la convention no 87 en ce qu'elle empêcherait les marins grecs et leurs syndicats d'entrer en contact avec les organisations syndicales internationales auxquelles leurs syndicats appartiennent. En revanche, le gouvernement estime que cette disposition n'a aucune relation avec la convention no 87 et il explique qu'elle ne vise qu'à interdire aux marins grecs de recourir devant des autorités étrangères étant donné qu'ils disposent d'un droit de recours et d'un droit d'appel devant les autorités grecques en matière de litige découlant de leur contrat de travail.
- 41. Les plaignants n'ont pas fait état, au moment de la formulation de leur plainte, d'exemples concrets démontrant que cette disposition est utilisée pour empêcher les syndicats de marins grecs d'entrer en contact avec les organisations syndicales internationales auxquelles ils appartiennent ou d'obtenir leur solidarité et n'ont pas, depuis, fourni d'autres informations alors qu'aux termes de la procédure ils ont été invités à le faire. Le gouvernement, en revanche, a indiqué par des exemples concrets que cette disposition vise à ne pas permettre aux marins grecs en litige avec leur employeur au sujet de l'application de leur contrat de travail de porter l'affaire devant une juridiction étrangère, dès lors qu'ils disposent à cet effet d'un droit de recours et d'appel devant les autorités grecques. Dans ces conditions, le comité estime que la disposition incriminée ne porte pas atteinte à la liberté syndicale.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 42. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration de décider qu'en l'état actuel des éléments d'information disponibles, ce cas n'appelle pas un examen plus approfondi.