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Rapport définitif - Rapport No. 168, Novembre 1977

Cas no 866 (France) - Date de la plainte: 05-OCT. -76 - Clos

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  1. 65. Par une communication en date du 5 octobre 1976, l'Union internationale des syndicats des travailleurs de la fonction publique et assimilés a présenté une plainte concernant les atteintes qui auraient été portées à l'exercice des droits syndicaux en France.
  2. 66. Le texte de la communication précitée a été transmis au gouvernement qui a formulé ses observations dans une lettre datée du 25 avril 1977.
  3. 67. La France a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que la convention (no 1351 concernant les représentants des travailleurs, 1971.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 68. Dans sa communication, l'Union internationale des syndicats des travailleurs de la fonction publique et assimilés allègue qu'une décision en violation des libertés syndicales a été prise à l'encontre de M. Laganier, secrétaire général du syndicat CGT du ministère de l'industrie.
  2. 69. L'organisation plaignante explique que M. Laganier, administrateur de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), était, depuis sept ans, détaché au ministère de l'Industrie. A son retour de vacances, il découvre les déménageurs dans son bureau et apprend brutalement du Cabinet du ministre qu'il est renvoyé à son administration d'origine, sans que ses supérieurs hiérarchiques en aient fait la demande. Les restrictions budgétaires constituent le motif officiel de cette mesure. Seulement, ajoutent les plaignants, ce fonctionnaire ne coûte rien au ministère de l'Industrie puisqu'il continue à être rémunéré par l'INSEE.
  3. 70. En conclusion, les plaignants déclarent que cette mutation s'adresse non au fonctionnaire mais au secrétaire général de syndicat et qu'il s'agit d'une atteinte aux droits syndicaux en parfaite contradiction avec les conventions nos 98 et 135. Cela s'inclut, selon les plaignants, dans une vaste offensive plus générale contre les libertés syndicales des agents de la fonction publique, organisée par le gouvernement français.
  4. 71. Dans sa réponse, le gouvernement précise que l'intéressé à été informé de son retour à l'INSEE par le directeur de cet organisme dès le 28 juillet 1976. Le Directeur du Cabinet du ministre de l'Industrie en a fait part aux supérieurs hiérarchiques de M. Laganier le 16 août 1976.
  5. 72. Selon le gouvernement, cette mesure a pour origine la réorganisation des services du ministère de l'Industrie qui nécessitait une augmentation des effectifs d'attachés de l'INSEE et une réduction du nombre des administrateurs. Certes, poursuit le gouvernement, M. Laganier était rémunéré par son administration d'origine mais il existe une limitation globale des moyens dont disposent les administrations pour leurs services statistiques, ce qui implique une certaine répartition par l'INSEE des fonctionnaires qu'il recrute.
  6. 73. En outre, le gouvernement signale que cette décision ne revêt nullement un caractère exceptionnel car elle entre dans le processus normal de déroulement de carrière des administrateurs de l'INSEE qui ne sont que temporairement mis à la disposition du ministère de l'Industrie. Le cas de M. Laganier, qui était affecté à ce ministère depuis plus de sept ans, est, selon le gouvernement, analogue à celui de tous les autres administrateurs de l'INSEE de sa promotion ou des promotions antérieures, sans aucune exception, qui ont comme lui rejoint cet organisme après avoir exercé quelques années leurs fonctions au ministère de l'Industrie. Le gouvernement ajoute que le départ de l'intéressé ne modifie en rien l'audience du syndicat CGT au sein du ministère. Il conclut en affirmant que la liberté syndicale est pleinement respectée dans ce ministère comme dans les autres départements par l'application des dispositions de la circulaire du Premier ministre en date du 14 septembre 1970 relative à l'exercice des droits syndicaux dans la fonction publique.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 74. Le comité note que le cas qui lui est soumis concerne une mesure de mutation affectant un dirigeant d'une organisation syndicale de fonctionnaires. Il note également que, selon les plaignants, cette mesure constitue une atteinte aux droits syndicaux alors que, selon le gouvernement, elle est due à une réorganisation de services et est analogue aux cas des collègues de même promotion ou de promotion antérieure de la personne concernée.
  2. 75. D'une manière générale, le comité estime qu'un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est que les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi - licenciement, transfert, rétrogradation et autres actes préjudiciables - et que cette protection est particulièrement souhaitable en ce qui concerne les dirigeants syndicaux, étant donné que, pour pouvoir remplir leurs fonctions syndicales en pleine indépendance, ceux-ci doivent avoir la garantie qu'ils ne subiront pas de préjudice en raison du mandat syndical qu'ils détiennent.
  3. 76. En outre, le comité considère que l'existence de normes législatives fondamentales interdisant les actes de discrimination antisyndicale est insuffisante si celles-ci ne s'accompagnent pas de procédures efficaces qui assurent leur application dans la pratique. Ainsi, quand un salarié s'estime victime de pratiques antisyndicales, il devrait pouvoir introduire un recours auprès d'un tribunal ou d'une autre autorité indépendante des parties.
  4. 77. Dans le cas présent, le comité a pris connaissance des dispositions de la circulaire du Premier ministre mentionnée par le gouvernement. Ce texte rappelle notamment que le développement normal de l'activité des organisations syndicales suppose en premier lieu que leurs représentants qualifiés et dûment mandatés ne puissent faire l'objet de discrimination à raison de leur activité syndicale sur quelque plan ou sous quelque forme que ce soit, en particulier au plan du déroulement de leur carrière. Le comité a également noté qu'en vertu de l'article 14 du Statut général des fonctionnaires, les syndicats professionnels "peuvent notamment, devant les juridictions de l'ordre administratif, se pourvoir contre... les décisions individuelles portant atteinte aux intérêts collectifs des fonctionnaires".
  5. 78. Il n'apparaît pas, au vu des informations en la possession du comité, qu'un tel recours ait été présenté. Le comité a affirmé en maintes circonstances qu'étant donné la nature de ses responsabilités, il ne saurait se considérer comme lié par les règles qui s'appliquent par exemple aux tribunaux internationaux d'arbitrage et selon lesquelles les procédures nationales de recours doivent être épuisées. Toutefois, il a considéré également, lorsqu'il examine un cas selon ses mérites, devoir tenir compte du fait, lorsque c'est le cas, que les possibilités offertes par la procédure nationale de recours devant un tribunal indépendant présentant toutes les garanties n'ont pas été pleinement utilisées.
  6. 79. Dans le cas concret qui lui est soumis, le comité ne peut, en raison des déclarations contradictoires des plaignants et du gouvernement, aboutir à des conclusions précises sur la mesure ayant fait l'objet de la plainte. Le comité doit cependant signaler que c'est dans le cadre d'une procédure nationale appropriée que des recours contre des actes de discrimination antisyndicale peuvent être examinés de la manière la plus adéquate.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 80. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration, tout en attirant l'attention sur les principes et considérations exposés aux paragraphes 75 à 79 ci-dessus, de décider que le cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
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