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- 40. La plainte présentée par la Confédération générale du travail du Nicaragua (CGT), la Confédération des paysans et travailleurs agricoles du Nicaragua et la Fédération des travailleurs de Managua est contenue dans une communication en date du 15 juillet 1968. Copie de ladite plainte a été adressée au gouvernement qui a transmis ses observations par une communication en date du 3 décembre 1968.
- 41. Le Nicaragua a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, de même que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 42. Dans la plainte, il est allégué que le 7 juillet 1968 la police aurait fait irruption aux sièges des organisations syndicales plaignantes et qu'une vingtaine de dirigeants et de militants des syndicats affiliés à ces organisations auraient été arrêtés alors qu'ils tenaient des réunions de travail. Les autorités responsables de ces actes auraient essayé de justifier ceux-ci en prétendant qu'ils constituaient un moyen de prévenir des troubles éventuels. En effet, à la date précitée, on aurait annoncé la visite du Président des Etats-Unis à l'aéroport international du Nicaragua, ce qui aurait provoqué des démonstrations de la part d'organisations étudiantes et politiques. Les plaignants affirment ensuite que le conseiller juridique de la CGT a demandé la libération des prévenus devant les cours d'appel, mais que celles-ci ont attendu dix jours avant de nommer le juge instructeur. Une protestation a été également présentée au Président de la République et au ministre du Travail, qui n'ont fait parvenir aucune réponse. Finalement, après cinq jours de détention, les intéressés furent mis en liberté sans l'intervention d'aucun tribunal.
- 43. Dans sa réponse, le gouvernement indique qu'au ministère du Travail il existe un département compétent pour toutes les affaires syndicales, y compris toute plainte relative à la violation de la liberté syndicale. Or ce département n'a été saisi d'aucune plainte concernant les faits allégués par les plaignants. En outre, le gouvernement précise que, au sujet de la visite du Président des Etats-Unis, les autorités ont pris quelques mesures préventives, sachant que certains éléments préparaient des actes de nature à sérieusement troubler l'ordre public. Ces mesures n'avaient aucun rapport avec les affaires syndicales et il n'y a pas eu irruption dans les locaux syndicaux; il s'est uniquement agi de procéder à l'interrogatoire de certaines personnes (quelques membres des syndicats mentionnés dans la plainte) au sujet des événements qui se préparaient. Le gouvernement nie qu'il y ait eu une quelconque violation de la liberté syndicale, dont il garantit le respect. Il a en effet ratifié en 1967 la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949; il prépare en outre un avant-projet de réforme du règlement des associations syndicales, qui donnera pleine application aux instruments précités. De même, le Parlement a déjà approuvé la création d'un comité tripartite sur la liberté syndicale et la participation des travailleurs aux plans nationaux de développement. Enfin, le gouvernement déclare que, lorsqu'il s'agit de maintenir l'ordre public, il peut prendre toutes les mesures préventives qu'il juge appropriées, le fait que ces mesures soient prises à l'encontre de personnes qui, étant liées avec quelque syndicat, participent à des actes de nature à troubler l'ordre public ne constitue pas une violation du droit syndical.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 44. Le comité constate qu'il existe une concordance entre les déclarations des plaignants et celles du gouvernement, à propos de la détention préventive d'un certain nombre de syndicalistes en raison de la visite du Président des Etats-Unis au Nicaragua. Par contre, le gouvernement nie qu'il y a eu irruption dans les locaux syndicaux et que les plaignants aient adressé, au ministère du Travail, une plainte concernant les faits allégués. En ce qui concerne les affirmations contenues dans la plainte sur les délais de la procédure judiciaire entreprise en vue d'obtenir la libération des détenus, le gouvernement ne formule aucun commentaire dans sa communication.
- 45. Le comité tient à rappeler que dans des cas précédents, où il était allégué que des dirigeants syndicaux avaient été détenus préventivement, le comité a estimé que ces mesures pouvaient constituer une grave ingérence dans l'exercice des droits syndicaux et il lui a paru nécessaire que ces mêmes mesures soient justifiées par une situation grave, que, à moins d'être accompagnées des garanties judiciaires appropriées, appliquées dans un délai raisonnable, ces mesures feraient l'objet de critiques, et que la politique de tout gouvernement devrait veiller à garantir comme il convient les droits de l'homme, et spécialement le droit de toute personne détenue à être jugée de manière équitable et le plus rapidement possible.
- 46. En l'occurrence, il s'agit, déclare le gouvernement, de mesures préventives prises à l'encontre de certaines personnes, dont divers dirigeants syndicaux, afin d'empêcher que l'ordre public soit troublé. Néanmoins, le comité observe que ces dirigeants n'ont pas été mis à la disposition de l'autorité judiciaire, mais que la police les a libérés au bout de quelques jours sans que l'on ait apparemment trouvé de motifs justifiant leur mise en accusation. Le comité estime que la présentation rapide d'un détenu devant le juge compétent constitue l'une des garanties fondamentales de l'individu, garantie qui est reconnue par des instruments tels que le Pacte international des droits civiques et politiques des Nations Unies et par la Déclaration américaine des droits et des devoirs de l'homme, ainsi que par la Constitution politique du Nicaragua. Dans le cas de personnes ayant des activités syndicales, il s'agit de l'une des libertés civiles qui devraient être assurées par les autorités afin de garantir plus réellement l'exercice des droits syndicaux.
- 47. En outre, le comité tient à rappeler qu'il a déjà signalé en d'autres occasions que l'arrestation, par les autorités, de syndicalistes contre lesquels aucun motif de condamnation n'a été ultérieurement retenu, pouvait entraîner des restrictions à l'exercice des droits syndicaux; le comité avait alors recommandé au Conseil d'administration de prier le gouvernement intéressé de bien vouloir faire en sorte que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées, en vue de faire disparaître le danger que les arrestations représentent pour les activités syndicales.
- 48. En ce qui concerne la prétendue irruption dans les sièges syndicaux, fait que le gouvernement nie dans sa réponse, le comité estime que les syndicats ne peuvent pas réclamer un droit d'immunité à condition que l'autorité judiciaire ait lancé le mandat correspondant. Les plaignants n'ont pas apporté sur cet aspect de l'affaire les informations complémentaires qui auraient permis au comité de formuler ses conclusions à son sujet.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 49. Dans ces conditions, compte tenu du fait que les syndicalistes ont recouvré la liberté, le comité recommande au Conseil d'administration, sous réserve des considérations exposées dans les paragraphes précédents, de décider que ce cas n'appelle pas un examen plus approfondi.