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- 30. Par une communication en date du 20 mai 1963, adressée directement à l'O.I.T, la Confédération camerounaise des syndicats croyants (C.C.T.C) a formulé des allégations aux termes desquelles il aurait été porté atteinte à l'exercice des droits syndicaux au Cameroun. Informée de son droit de présenter des informations complémentaires à l'appui de sa plainte, l'organisation plaignante a fourni de telles informations par plusieurs communications datées respectivement des 12, 17, 18 et 26 juillet 1963.
- 31. La plainte et les informations complémentaires venues l'appuyer ayant été transmises au gouvernement pour observations à mesure de leur réception, celui-ci a fait parvenir sa réponse par une communication en date du 31 août 1963.
- 32. Le Cameroun a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, de même que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 33. La plainte du secrétaire général de la Confédération camerounaise des travailleurs croyants (C.C.T.C.), à laquelle était jointe une volumineuse documentation, contient des allégations d'où il ressort essentiellement que la C.C.T.C, aux yeux de l'auteur de la plainte, aurait été dissoute dans des conditions irrégulières. C'est pourquoi le plaignant refuse d'admettre qu'une telle dissolution soit réellement intervenue et s'élève contre les mesures qui en ont été la conséquence, à savoir: l'éviction de la C.C.T.C des locaux qu'elle occupait au profit d'une autre organisation et la non-attribution de sièges aux représentants de la C.C.T.C dans les divers organismes consultatifs prévus par le Code du travail et les règlements pris pour son application. Le plaignant fournit de nombreux documents à l'appui des assertions qu'il formule en ce qui concerne les mesures précitées.
- 34. Aux dires du plaignant, la réunion qui a abouti à la dissolution des deux organisations chrétiennes existantes - la C.C.T.C et l'U.C.T.C. (Union camerounaise des travailleurs croyants) - et à la création d'une centrale unique répondant au nom d'Union des syndicats croyants du Cameroun (U.S.C.C.) se serait déroulée dans des conditions irrégulières. Ces dissolutions et la création d'une centrale unique équivaudrait simplement à une manoeuvre destinée à masquer la réalité des faits. Cette réalité, d'après le plaignant, qui, d'ailleurs, donne un tableau des événements assez confus, serait que la C.C.T.C et l'U.C.T.C auraient décidé de fusionner pour se placer sous la seule égide de la première de ces organisations, c'est-à-dire de l'organisation plaignante.
- 35. Dans sa réponse, le gouvernement donne des faits une version bien différente. Il rappelle tout d'abord qu'au début de l'année 1962, après de nombreuses confrontations et sous l'impulsion de responsables syndicaux nationaux, régionaux (dirigeants de l'Union panafricaine des travailleurs croyants) et internationaux (dirigeants de la C.I.S.C.), un mouvement s'était dessiné visant à un regroupement des deux syndicats croyants que comptait le Cameroun en une seule organisation.
- 36. A cette fin, un congrès extraordinaire des travailleurs croyants fut organisé à Yaoundé le 9 septembre 1962 sous la double égide de l'organisation plaignante, la C.C.T.C, et de l'U.C.T.C. Au cours de travaux fertiles en incidents de séance - déclare le gouvernement -il apparut bien vite que M. Enama (le signataire de la plainte) voulait bien de l'unité, mais à son profit exclusif. C'est alors - poursuit le gouvernement - que fut proposée, non point l'union des deux centrales conformément aux prescriptions de l'article 24 du Code du travail et dont on avait un moment espéré qu'elle pût se réaliser dans l'unanimité, mais la dissolution statutaire des deux centrales par leur assemblée générale et la création subséquente d'une nouvelle centrale croyante unitaire. C'est cette double procédure, à laquelle M. Enama n'a pu s'opposer, que le congrès extraordinaire a décidé de suivre. Le congrès, constitué en assemblée générale, a dissous les deux organisations existantes, puis a établi les statuts de la nouvelle centrale, qui a pris le nom d'Union des syndicats croyants du Cameroun. Ces statuts, déposés quelques jours après, furent reconnus par l'administration conformes aux stipulations de la loi et récépissé en fut délivré aux responsables. La nouvelle centrale prenait dès lors une existence légale et les biens primitivement détenus par les deux anciennes organisations, C.C.T.C et U.C.T.C, se trouvaient automatiquement dévolus, de par leurs propres statuts, à l'U.S.C.C nouvellement créée.
- 37. « Seul M. Enama - déclare le gouvernement -, auquel un égocentrisme sans envergure avait inspiré le refus d'occuper un haut poste dans la nouvelle organisation, ne fut pas d'accord » et il « s'ingénia dès lors à susciter toutes sortes de difficultés à la nouvelle centrale ». Cette attitude prit la forme de protestations et de démarches visant à conserver les locaux jusque-là occupés par l'organisation dont il était secrétaire général et les sièges attribués à ladite organisation dans les divers organes consultatifs. Ces démarches sont restées vaines car, déclare le gouvernement, M. Enama ne représentant plus rien, la centrale qu'il dirigeait ayant été statutairement dissoute, il en résultait: qu'il ne pouvait prétendre conserver la jouissance du local syndical attribué à la C.C.T.C.; qu'il ne pouvait prétendre conserver les sièges primitivement attribués à la C.C.T.C, à raison de sa représentativité, dans divers organismes consultatifs; qu'il ne pouvait prétendre présenter, au premier tour d'élections de délégués du personnel, des candidats sous l'étiquette « C.C.T.C. » puisque cette centrale n'existait plus et que le premier tour de scrutin est réservé, par la réglementation locale, « aux seuls groupements professionnels les plus représentatifs, s'il en existe ».
- 38. Le gouvernement déclare enfin - et cette déclaration est confirmée par les pièces qu'il joint à sa réponse - que la Confédération internationale des syndicats chrétiens, par une décision prise parle Conseil mondial de la C.I.S.C réuni à Berlin du 16 au 18 janvier 1963, reconnaît comme unique organisation affiliée à la C.I.S.C au Cameroun l'Union des syndicats croyants du Cameroun, telle qu'elle résulte de la fusion volontaire des deux organisations existant précédemment. De son côté, l'Union panafricaine des travailleurs croyants a adopté la même attitude.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 39. Il paraît tout d'abord ressortir des explications du gouvernement comme des pièces que celui-ci fournit pour les appuyer que te congrès visant à promouvoir un regroupement des deux centrales syndicales croyantes du Cameroun a été organisé, non seulement avec l'accord de ces deux organisations, mais sous leurs auspices mêmes. Il semble par ailleurs que, l'unanimité n'ayant pu se faire sur une union proprement dite des deux centrales, la - majorité des participants se soit alors décidée, constituant le congrès en assemblée générale, à procéder successivement à la dissolution statutaire des organisations existantes et à la création d'une nouvelle et unique organisation. Rien ne donne à penser, au vu des éléments dont dispose le Comité, que le choix de la procédure ou son déroulement ne se soient pas effectués selon des règles démocratiques.
- 40. D'autre part, il paraît bien ressortir des observations gouvernementales - et ceci n'est pas infirmé par les termes de la plainte, au contraire - que les autorités publiques n'ont joué aucun rôle dans les décisions prises, qui semblent donc être le seul fait des travailleurs intéressés, réunis volontairement pour tenter de trouver une solution au problème qui les confrontait. Le gouvernement, en effet, n'est intervenu que pour entériner les décisions prises librement par les travailleurs en recevant dépôt des statuts de la nouvelle organisation.
- 41. En ce qui concerne enfin les aspects accessoires de la plainte - expulsion des locaux syndicaux, non-représentation dans les organismes consultatifs -, dès lorsque l'organisation plaignante avait cessé d'exister, de par la volonté même des travailleurs, il paraît évident qu'elle (ou son ex-dirigeant) ne pouvait prétendre conserver des avantages qui, s'ils étaient consentis à une organisation effective, ne pouvaient, par définition, l'être à une entité inexistante.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 42. Dans ces conditions, estimant que la dissolution de l'organisation plaignante a été décidée volontairement par un congrès régulièrement convoqué par tous les travailleurs intéressés, le Comité considère que ladite dissolution, ou les conséquences qu'elle a entraînées, ne saurait être considérée comme ayant constitué une atteinte aux droits syndicaux et il recommande donc au Conseil d'administration de décider que le cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.