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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 19, 1956

Cas no 132 (Grèce) - Date de la plainte: 31-OCT. -55 - Clos

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A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 91. Par une lettre en date du 31 octobre 1955, le Secrétaire général des Nations Unies a transmis à l'O.I.T une plainte en date du 12 octobre 1955 émanant de l'Union internationale des syndicats des travailleurs des transports, des ports et de la pêche (F.S.M.).
  2. 92. Le plaignant allègue que M. G. Tsapakis, président de l'Association des employés de la Compagnie privée des autobus du Pirée, se serait vu retirer son permis de conduire en raison de ses opinions politiques. Cette mesure aurait eu pour conséquence d'empêcher ce dernier de conserver son affiliation à l'association dont il faisait partie et, à fortiori, d'en rester président.
  3. 93. Le plaignant proteste contre une mesure qu'il considère comme arbitraire et demande que tout soit mis en oeuvre pour que les moyens d'existence de M. Tsapakis lui soient restitués et pour qu'il bénéficie à nouveau de ses droits syndicaux.
  4. 94. Le plaignant a été informé par une lettre en date du 22 novembre 1955 qu'il lui était loisible de présenter, dans le délai d'un mois, des informations complémentaires à l'appui de sa plainte ; il n'a pas fait usage de cette latitude.
  5. 95. La plainte a été communiquée pour observations au gouvernement de la Grèce par une lettre en date du 22 novembre 1955.
    • ANALYSE DE LA REPONSE DU GOUVERNEMENT
  6. 96. Le gouvernement a fait parvenir sa réponse au Bureau par une lettre en date du 16 janvier 1956.
  7. 97. Dans cette réponse, le gouvernement reconnaît le fait que le permis de conduire de M. Tsapakis lui a été retiré, mais précise que la mesure en question serait le résultat d'une décision no 161604/2-8-55 adoptée par un comité spécial lui-même prévu par la loi no 4841 de 1930. Il ajoute cependant que cette mesure aurait été prise non pas en raison des opinions politiques de celui qui en a été l'objet, mais par suite de l'attitude impertinente qu'il aurait adoptée dans l'exercice de ses fonctions.
  8. 98. Le gouvernement indique enfin qu'une décision récente aurait restitué son permis de conduire à M. Tsapakis.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 99. Le plaignant allègue que le permis de conduire du président de l'Association des employés de la Compagnie privée des autobus du Pirée lui aurait été retiré, l'empêchant ainsi de conserver ses fonctions syndicales. Le gouverne ment précise que la mesure prise à l'encontre de cette personne l'aurait été exclusivement en raison de son comportement dans l'exercice de sa profession. Il ajoute d'ailleurs qu'une décision aurait été prise récemment lui restituant son permis de conduire.
  2. 100. Il semble bien ressortir, tant de la communication du plaignant que de la réponse du gouvernement, que la mesure incriminée, à savoir le retrait du permis de conduire de M. Tsapakis, a effectivement été prise et qu'elle a eu pour conséquence de contraindre celui-ci à abandonner les fonctions syndicales qu'il occupait avant qu'elle fût adoptée. Toutefois, la preuve n'a pas été apportée que la mesure en question ait été motivée par le fait que celui qui en a fait l'objet a occupé les fonctions de président de l'Association des employés de la Compagnie privée des autobus du Pirée. De plus, il ressort de la réponse du gouvernement que cette mesure a été rapportée.
  3. 101. En conséquence, le Comité, notant que la mesure incriminée a été rapportée et assumant, par suite, que la personne qui en était l'objet a retrouvé toute liberté de reprendre son activité syndicale, activité que ladite mesure l'avait indirectement contraint d'abandonner, considère, tenant compte des éléments d'information qui figurent au paragraphe précédent, que la plainte spécifique dont il est saisi est devenue sans objet et recommande au Conseil d'administration de décider qu'elle n'appelle aucune action de sa part.
  4. 102. Le Comité a noté toutefois que le fait que M. Tsapakis, à la suite de la cessation de ses fonctions, ait été contraint d'abandonner ses responsabilités syndicales, est la conséquence de l'application d'une des dispositions du décret loi no 3072 de 1954 (Journal officiel du 9 octobre 1954) aux termes de laquelle «les membres du conseil d'administration d'un syndicat professionnel perdent automatiquement cette qualité aussitôt qu'ils cessent d'exercer la profession qu'ils représentent ».
  5. 103. Or le Comité a déjà eu - dans le cadre du cas no 105 - à examiner - ce texte, qui n'était alors encore qu'un projet de loi. A l'occasion de cet examen, le Comité avait notamment appelé l'attention sur l'importance qu'il attache au principe formulé à l'article 3 de la convention de 1948 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, selon lequel les travailleurs ont le droit d'élire librement leurs représentants, et au principe formulé à l'article 1 de la convention de 1949 sur le droit d'organisation et de négociation collective, aux termes duquel les travailleurs doivent bénéficier d'une; protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi, une telle protection devant notamment s'appliquer à des actes ayant pour but de congédier un travailleur ou de lui porter préjudice par tous autres moyens, en raison de son affiliation syndicale ou de sa participation à des activités syndicales en dehors des heures de travail, ou avec le consentement de l'employeur, durant les heures de travail.
  6. 104. Ayant réaffirmé ces principes, le Comité a fait remarquer que la disposition dont il est fait mention au paragraphe 102 ci-dessus aurait pour conséquence, si elle était mise en application, que lorsqu'un travailleur faisant partie d'un conseil d'administration d'un syndicat serait licencié par son employeur ou - comme dans le cas présent -- perdrait son emploi à la suite d'une initiative gouvernementale, il serait automatiquement destitué de ses fonctions syndicales ; une telle disposition permettrait donc qu'il soit fait obstacle au droit des travailleurs d'élire librement leurs représentants, droit qui constitue l'un des aspects essentiels de la liberté syndicale.
  7. 105. Toujours à l'occasion de l'examen du cas no 105, mais à une session ultérieure du Comité, celui-ci avait appris par une lettre en date du 10 février 1955, émanant du gouvernement hellénique, que la disposition qui était en projet au moment du dépôt de la plainte constituant le cas no 105 avait été incorporée dans le décret-loi auquel il est fait allusion au paragraphe 102 ci-dessus, c'est-à-dire antérieurement à la décision du Conseil d'administration. Dans sa communication, le gouvernement ajoutait que cette disposition faisait l'objet d'un réexamen de sa part. Dans une deuxième lettre, en date du 30 avril 1955, le gouvernement précisait qu'il avait, pris la décision de modifier dans un proche avenir ladite disposition et qu'il se proposait « d'envoyer prochainement » le nouveau texte législatif qui serait adopté sur la question.
  8. 106. Il apparaît - le cas présentement devant le Comité en est la démonstration - que le gouvernement n'a pas encore à ce jour réalisé son intention. En conséquence, le Comité recommande à nouveau au Conseil d'administration de demander au gouvernement grec de bien vouloir envisager - comme il en a lui-même exprimé l'intention à plusieurs reprises - un amendement de sa législation nationale actuelle en la matière afin de la mettre en plus grande harmonie avec les principes rappelés ci-dessus.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 107. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administra:
    • a) de décider que, pour les raisons indiquées aux paragraphes 100 et 101 ci-dessus, le cas d'espèce n'appelle aucune action de sa part ;
    • b) de demander au gouvernement grec d'envisager - comme il semble en avoir eu lui-même l'intention - la possibilité de réviser sa législation nationale à la lumière des principes énoncés dans les conventions de 1948 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical et de 1949 sur le droit d'organisation et de négociation collective, en vue de mettre cette législation en plus grande harmonie avec lesdits principes ;
    • c) de demander au gouvernement grec de tenir le Conseil d'administration au courant des suites qu'il aura pu donner à la recommandation ci-dessus.
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