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A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  • Analyse de la plainte
    1. 79 Le plaignant allègue les griefs suivants:
      • a) Le gouvernement aurait licencié plusieurs professeurs d'école qui auraient protesté, en leur qualité de membre du Comité exécutif de l'Organisation pancypriote des enseignants (P.T.O) contre l'intervention des autorités britanniques au sujet de l'introduction et de l'utilisation d'un livre d'études publié par le ministère grec de l'Education.
      • b) Le gouvernement aurait empêché et pratiquement suspendu le fonctionnement de la P.T.O en raison du licenciement susmentionné de plusieurs membres du Comité exécutif de cette organisation qui, ayant perdu leur qualité de professeurs, n'étaient plus habilités à être membres du Comité.
      • c) Quatre lois en date du 21 février 1951 tendraient à juguler le mouvement syndical démocratique et le libre exercice des droits syndicaux.
      • d) Lors de manifestations publiques organisées en protestation contre les lois précitées, plusieurs dirigeants syndicaux ainsi que des travailleurs auraient été arrêtés et condamnés soit à des peines de prison, soit à des amendes dépassant au total la somme de 400 livres.
    2. Analyse de la réponse
    3. 80 Le gouvernement fait valoir les arguments suivants:
      • a) Les professeurs d'école, bien que membres de l'Organisation pancypriote des enseignants, n'auraient pas été licenciés en leur qualité de syndicalistes, mais en raison de leur activité politique interdite par la loi sur l'enseignement primaire.
      • b) L'Organisation pancypriote des enseignants n'aurait pas cessé de fonctionner mais continuerait son activité après élection d'un nouveau comité lors d'une assemblée générale extraordinaire en août 1950.
      • c) Les quatre lois incriminées ne tendraient pas à restreindre la constitution ou le fonctionnement de syndicats. En effet, la première, amendant la loi sur le maintien de l'ordre public et la prévention de la criminalité, autoriserait les présidents des tribunaux de district à exiger une garantie de bonne conduite de la part des personnes dont les agissements, déclarations ou publications seraient susceptibles de troubler l'ordre public. La seconde, amendant la loi sur la presse, autoriserait notamment le gouverneur en conseil à interdire l'introduction dans le pays de journaux étrangers dangereux aux bonnes moeurs ou à l'ordre public. La troisième, amendant les lois sur les étrangers et les immigrants, autoriserait la déportation de personnes d'origine cypriote qui auraient acquis une nationalité étrangère. La dernière enfin, amendant le code pénal, sanctionnerait comme tentatives de rébellion tous actes tendant à rendre méprisable ou haïssable le gouvernement du Royaume-Uni.
      • d) Des réunions auraient été organisées au mois de février 1951 dans plusieurs villes, en protestation contre les lois précitées, par le parti communiste avec la participation des syndicats communistes, dans les locaux de ces derniers; à la suite de ces réunions, des manifestations publiques auraient eu lieu sans autorisation préalable, raison pour laquelle 64 personnes auraient été mises en accusation, dont 11 auraient été condamnées à des peines de prison et les autres à des amendes d'une somme totale de 439 livres.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 81. Le gouvernement du Royaume-Uni a ratifié, en ce qui concerne Chypre, la convention de 1947 sur le droit d'association dans les territoires non métropolitains, qui prévoit que le droit des employeurs et des salariés à s'associer en vue de tous objets non contraires aux lois sera garanti par des mesures appropriées.
  2. 82. Il ressort des précisions données par le gouvernement que les fonctionnaires en question ont été licenciés en vertu de la disposition de la loi sur l'enseignement primaire qui autorise le gouvernement à congédier ou à suspendre un professeur au service de l'Etat " lorsque sa conduite paraît être préjudiciable aux intérêts de l'éducation, de la religion, d'une saine administration ou de l'ordre social ". C'est dire qu'en protestant contre l'intervention des autorités au sujet de l'introduction et de l'utilisation d'un livre d'études, les professeurs ont été l'objet de certaines mesures disciplinaires qui auraient frappé tout professeur membre ou non de l'organisation pancypriote des enseignants. Il semble donc que les faits allégués ne doivent pas être considérés comme une atteinte à la liberté syndicale.
  3. 83. Si un tel avis prévaut en ce qui concerne ce grief, il semble qu'il doive également prévaloir quant au second grief, qui n'est que le corollaire du premier. En effet, la paralysie temporaire de l'organisation pancypriote des enseignants résultait, aux dires mêmes du plaignant, de ces licenciements opérés par le gouvernement et non pas d'une intervention directe de sa part. D'ailleurs, le gouvernement a précisé dans sa réponse que cette organisation, après l'élection d'un nouveau comité, a repris son activité.
  4. 84. Quant au troisième grief, il convient de se reporter au résumé des quatre lois incriminées que le gouvernement a donné dans sa réponse. Il semble en ressortir que ces textes ne visent pas directement les syndicats, mais le maintien de l'ordre public. Sans doute, l'application de ces textes pourrait se répercuter sur le fonctionnement des syndicats, mais pas davantage que sur celui de toute autre association qui, elle-même ou dans la personne de ses membres ou dirigeants, pourrait être frappée de l'une des mesures envisagées par cette législation. Il ne semble donc pas que la situation politique créée par ces lois ait un aspect spécifiquement social que l'O.I.T soit appelée à examiner.
  5. 85. En ce qui concerne le quatrième grief, l'organisation de réunions publiques est certainement un élément important de cette activité des organisations de travailleurs. Il ressort cependant de la plainte elle-même que c'était la protestation contre les quatre lois précitées qui formait l'objet de ces manifestations. C'étaient, d'après le plaignant, " les travailleurs soutenus par la population ", qui " manifestèrent contre ces lois dans toutes les villes et tous les villages de Chypre ". Dans sa réponse, le gouvernement a précisé que la campagne contre ces lois a été organisée par un parti politique, avec la participation de syndicats. Il semble donc que les manifestations publiques qui, d'après les indications fournies par le gouvernement, auraient eu lieu sans autorisation préalable, ne doivent pas être considérées comme des manifestations ayant un objet purement syndical. Par conséquent, les mesures prises par le gouvernement ne semblent pas avoir été dirigées contre le syndicat, mais contre les participants à la manifestation politique comme tels. Si certains syndicalistes étaient donc les victimes des mesures répressives prises par le gouvernement, ils ne l'étaient pas à un autre titre que tous les autres participants à la manifestation.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 86. A la lumière de la réponse faite par le gouvernement du Royaume-Uni et de la présente analyse de la situation, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que les faits allégués sont d'un caractère si purement politique qu'il ne paraît pas opportun de poursuivre l'affaire.
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