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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 313, Mars 1999

Cas no 1977 (Togo) - Date de la plainte: 18-JUIL.-98 - Clos

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220. Le 18 juillet 1998, la Force ouvrière togolaise (FOT) a déposé une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement du Togo.

  1. 220. Le 18 juillet 1998, la Force ouvrière togolaise (FOT) a déposé une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement du Togo.
  2. 221. Dans une communication en date du 21 octobre 1998, le gouvernement a fait parvenir ses observations.
  3. 222. Le Togo a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

A. Allégations de l'organisation plaignante
  1. 223. La Force ouvrière togolaise (FOT) indique que, en date du 5 avril 1995 et conformément aux dispositions législatives pertinentes, ses statuts ont été déposés au Cabinet du Procureur de la République, à la direction générale du travail et des lois sociales et à la mairie de Lomé. La FOT rappelle que, aux termes de l'article 5 de l'Ordonnance no 16 du 8 mai 1974 portant Code du travail (ci-après "Code du travail"), un syndicat dont les statuts ont été dûment déposés acquiert une existence légale trois mois après la date du dépôt; la FOT soutient qu'elle a dès lors acquis de droit une existence légale à compter du 7 juillet 1995.
  2. 224. L'organisation plaignante ajoute que sa reconnaissance par les autorités du pays n'a souffert aucun doute au cours de sa première année d'existence; elle fournit à l'appui de ses prétentions différentes correspondances et documents démontrant notamment qu'elle a été associée à plusieurs activités organisées par le gouvernement togolais et autres organisations de promotion de défense et de protection des droits de l'homme au cours de la période courant du mois de mai 1995 au mois de décembre 1996.
  3. 225. Par ailleurs, l'organisation plaignante soutient que la situation a changé en 1996; elle ferait depuis lors l'objet de persécution de la part des autorités -- en raison notamment de sa protestation relative à la désignation des délégués des travailleurs qui ont participé à la 83e Conférence internationale du Travail en juin 1996 -- et ne serait plus associée aux diverses activités nationales sous prétexte qu'elle n'a pas de récépissé confirmant le dépôt de ses statuts.
  4. 226. Bien que la FOT ait écrit au ministre de l'Intérieur et de la Décentralisation en septembre 1995 afin d'obtenir la délivrance du récépissé prévu à la loi, aucune réponse ne lui est encore parvenue à cet égard. La FOT considère que l'attitude du gouvernement du Togo viole ses engagements internationaux en matière de liberté syndicale.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 227. Dans sa réponse, le gouvernement du Togo traite des questions relatives à l'existence légale de l'organisation plaignante, à sa non-association aux diverses activités sur le plan national et à la persécution dont elle serait victime de la part des autorités.
  2. 228. Pour ce qui est de l'existence légale de la FOT, le gouvernement soutient qu'elle n'a pas de véritable existence légale en raison des conditions dans lesquelles le congrès constitutif de la FOT s'est déroulé. En effet, le gouvernement indique qu'aux cérémonies d'ouverture et de clôture du congrès constitutif de cette centrale, seuls 12 et sept militants étaient présents respectivement. En outre, ni le bureau exécutif national ni le rapport sanctionnant le déroulement des travaux du congrès n'ont été présentés au représentant du ministre à cette occasion. Pour toutes ces raisons, le gouvernement s'étonne que l'organisation plaignante, qui ne mène aucune activité sur le terrain, ait protesté contre la désignation des délégués travailleurs à la 83e Conférence internationale du Travail tenue en juin 1996.
  3. 229. Toutefois, l'organisation plaignante s'étant conformée aux dispositions de l'article 5 du Code du travail, le gouvernement indique que les pouvoirs publics ont accepté de collaborer avec elle; c'est sur cette base que les différentes communications qu'elle a produites à l'appui de sa plainte lui ont été adressées.
  4. 230. Le gouvernement nie avoir violé ses obligations internationales relatives à la liberté syndicale et soutient que, si l'organisation plaignante estime avoir des problèmes, ceux-ci ne sauraient être liés ni à son existence légale ni à la non-délivrance d'un récépissé mais, au contraire, à son incapacité notoire à organiser la moindre activité ou le moindre séminaire de formation ou de sensibilisation pour ses membres.
  5. 231. Pour ce qui est de la non-association de la FOT aux diverses activités nationales depuis 1995, le gouvernement souligne la contradiction qui existe entre l'allégation de l'organisation plaignante à cet égard et les différentes correspondances datées de mai 1995 à décembre 1996 annexées à la plainte. Pendant toute l'année 1996, période coïncidant avec celle au cours de laquelle le secrétaire général de l'organisation plaignante a été éloigné de la vie publique, le gouvernement indique que la FOT s'est emmurée dans un silence persistant ne permettant plus de croire à son existence effective.
  6. 232. Enfin, en ce qui concerne la persécution dont feraient l'objet l'organisation plaignante et ses dirigeants, le gouvernement estime que cette allégation est sans objet et que l'organisation plaignante n'a fourni aucune preuve à cet égard.
  7. 233. Le gouvernement conclut en insistant sur le fait qu'il est respectueux des dispositions des conventions qu'il a ratifiées en matière de liberté syndicale et réaffirme son engagement à les respecter. Dans ce contexte, le secrétaire général de l'organisation plaignante ne saurait lui imputer les conséquences de sa propre turpitude.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 234. Le comité observe que les allégations de la plainte se réfèrent notamment au droit des travailleurs et des employeurs de constituer des organisations sans autorisation préalable ou ingérence des autorités publiques (convention no 87, art. 2, ratifiée par le Togo).
  2. 235. Le comité observe qu'au regard des dispositions pertinentes du Code du travail togolais les syndicats professionnels peuvent être constitués librement aux fins d'étude et de défense des intérêts économiques, industriels, commerciaux, agricoles et artisanaux de personnes exerçant la même profession, des métiers similaires ou des professions connexes (voir, à cet égard, Code du travail, art. 3 et 4).
  3. 236. Pour ce qui est des exigences formelles que doivent respecter les organisations syndicales au moment de leur création, l'article 5 du Code du travail dispose que "à peine de nullité, les fondateurs de tout syndicat professionnel doivent déposer les statuts et les noms de ceux qui, à un titre quelconque, sont chargés de son administration ou de sa direction". Cette disposition précise que "(c)e dépôt a lieu en quatre exemplaires à la mairie ou au siège de la circonscription administrative où le syndicat est établi, et un exemplaire des statuts est adressé respectivement à l'inspecteur du travail et des lois sociales et au Procureur de la République". Un récépissé est par la suite délivré dans un délai maximal de trois mois. Passé ce délai, le syndicat est considéré comme ayant une existence légale (art. 5 in fine).
  4. 237. Le comité rappelle qu'il a toujours considéré que les formalités prévues par les réglementations nationales concernant la constitution et le fonctionnement des organisations de travailleurs et d'employeurs sont compatibles avec les dispositions des conventions relatives à la liberté syndicale à condition, bien entendu, que ces dispositions réglementaires ne mettent pas en cause les garanties qui y sont prévues. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 247.)
  5. 238. Plus précisément, ces formalités ne doivent pas être utilisées par les autorités publiques de manière à empêcher les activités légitimes d'une organisation syndicale dûment constituée; une telle situation autoriserait l'ingérence des autorités publiques dans les activités des organisations syndicales et serait incompatible avec les principes de la liberté syndicale. En d'autres termes, ces prescriptions et formalités ne doivent pas équivaloir en pratique à une autorisation préalable ni faire obstacle à la création d'une organisation au point de constituer en fait une interdiction pure et simple. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 249 et 259.) En outre, le comité relève que, selon le gouvernement, ni le bureau exécutif national de la FOT ni le rapport sanctionnant le déroulement des travaux du congrès constitutif de cette centrale n'ont été présentés au représentant du gouvernement à l'occasion de ce congrès. Le comité rappelle qu'une telle procédure doit s'avérer n'être qu'une simple formalité ayant pour but d'assurer la publicité pour être conforme aux principes de la liberté syndicale ci-dessus mentionnés.
  6. 239. Le comité observe que l'organisation plaignante semble a priori avoir respecté les exigences formelles qui doivent être remplies pour qu'une organisation syndicale prétende à l'existence légale au regard de la loi togolaise. En outre, le comité relève que l'organisation plaignante aurait été associée à diverses activités organisées par le gouvernement togolais au cours des années 1995 et 1996, étant partie notamment aux négociations tripartites tenues en mai 1995 entre le gouvernement, le conseil national du patronat et les organisations syndicales.
  7. 240. Dans la mesure où les exigences formelles fixées pour la création d'un syndicat sont remplies, l'organisation syndicale ainsi créée doit pouvoir exercer ses activités légitimes sans aucune intervention de la part des autorités publiques, notamment pour ce qui est de la manière dont ses réunions sont tenues.
  8. 241. Par ailleurs, le comité prend note des observations du gouvernement concernant la représentativité de l'organisation plaignante. Bien que le comité n'ait pas les éléments pour se prononcer sur la représentativité de l'organisation plaignante, il doit souligner que le droit de constituer librement des organisations syndicales et la reconnaissance de la représentativité d'un syndicat selon des critères objectifs, préétablis et précis sont deux questions tout à fait distinctes; en outre, la reconnaissance de la représentativité de certains syndicats, aux fins d'octroi et de privilèges et d'avantages de portées variables, ne doit pas aboutir dans les faits à interdire l'existence d'autres organisations syndicales ne répondant pas à ces critères, privant les travailleurs de leur droit fondamental de constituer ou de s'affilier aux organisations de leur choix.
  9. 242. Dans ces circonstances, le comité prie le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer que les organisations syndicales togolaises légalement constituées, incluant l'organisation plaignante, puissent exercer leurs activités syndicales sans autorisation préalable ou ingérence des autorités publiques et que, conformément aux termes de l'article 5 du Code du travail, le récépissé de dépôt des statuts de l'organisation plaignante soit délivré. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 243. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
    • Le comité prie le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer que les organisations syndicales togolaises légalement constituées, incluant l'organisation plaignante, puissent exercer leurs activités syndicales sans autorisation préalable ou ingérence des autorités publiques et que, conformément aux termes de l'article 5 du Code du travail, le récépissé de dépôt des statuts de l'organisation plaignante soit délivré. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
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