353. Le comité a examiné ce cas pour la première fois à sa session de mai 1998 où il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. (Voir 310e rapport, paragr. 474 à 507, approuvé par le Conseil d'administration à sa 272e session (juin 1998).)
- 353. Le comité a examiné ce cas pour la première fois à sa session de mai 1998 où il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. (Voir 310e rapport, paragr. 474 à 507, approuvé par le Conseil d'administration à sa 272e session (juin 1998).)
- 354. Le gouvernement a fait parvenir par la suite de nouvelles observations dans une communication du 18 mai 1999.
- 355. Le Panama a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas
- 356. Lors de son examen antérieur du cas, le comité a formulé les conclusions suivantes sur les allégations en suspens. (Voir 310e rapport, paragr. 498 à 501.)
- 500. Le comité constate que l'organisation plaignante s'oppose à ce que le Code du travail oblige l'employeur à verser les salaires quand la grève a pour but de: 1) exiger l'exécution de la convention collective de travail, de l'arrangement direct ou de la sentence d'arbitrage (art. 510 1)); 2) obtenir l'exécution de dispositions légales violées d'une manière générale et réitérée dans l'entreprise (art. 510 1) du Code); 3) lorsque l'employeur n'a pas répondu au cahier de revendications ou a abandonné la procédure de conciliation (art. 510 2) du Code); et 4) lorsque l'employeur a violé l'obligation de fermer l'entreprise en cas de grève légale (art. 511 du Code). Le comité observe en outre que, dans le cadre de ces questions, les organisations plaignantes signalent qu'avec les dispositions légales en vigueur les autorités administratives du travail ne sont pas habilitées à refuser un cahier de revendications faisant valoir des violations imaginaires ou non fondées des normes de travail; dans ces conditions, le comité croit comprendre que, selon les plaignants, dans les circonstances mentionnées ci-dessus, la procédure de conciliation sera engagée, la grève pourra être déclarée par la suite et l'employeur devra verser les salaires pour les jours de grève.
- 501. Avant d'examiner les allégations relatives au paiement du salaire des grévistes par l'employeur, le comité doit obtenir les informations et clarifications sur les points suivants: 1) la manière dont les articles 510 et 511 du Code du travail sont mis en oeuvre dans la pratique; et 2) l'existence de procédures et d'organes compétents en cas de violations des dispositions de la loi ou des conventions collectives en cas de conflits dans l'interprétation de leurs dispositions ou dans le cas où l'employeur omet de coopérer dans le processus de négociation collective. Le comité prie le gouvernement d'envoyer les informations pertinentes à cet égard.
- 357. Compte tenu de ces conclusions provisoires sur ces aspects du cas, le comité a invité le Conseil d'administration, en juin 1998, à approuver les recommandations suivantes (voir 310e rapport, paragr. 507):
- -- Avant d'examiner les allégations relatives au paiement du salaire des grévistes par les employeurs, le comité a besoin d'obtenir les informations et clarifications sur les points suivants: i) la manière dont les articles 510 et 511 du Code du travail sont mis en oeuvre dans la pratique; et ii) l'existence de procédures et organes compétents en cas de violation des dispositions de la loi ou des conventions collectives, en cas de conflit dans l'interprétation de leurs dispositions ou dans le cas où l'employeur omet de coopérer dans le processus de négociation collective. Le comité prie le gouvernement d'envoyer les informations pertinentes à cet égard.
- -- Le comité rappelle au gouvernement que l'assistance technique du BIT est à sa disposition, s'il le désire, de telle sorte que les dispositions critiquées dans le présent cas soient modifiées en vue de les rendre conformes aux principes de la liberté syndicale et de la négociation collective.
- -- Le comité soumet le présent cas à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
- 358. Par ailleurs, à sa session de mars 1999, le comité, tout en prenant note du fait que le gouvernement avait demandé l'assistance technique du Bureau, a prié le gouvernement de répondre aux questions soulevées dans ce cas afin que l'assistance technique demandée puisse se fonder sur les conclusions et recommandations définitives du comité. (Voir 313e rapport du comité, paragr. 5.)
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 359. En ce qui concerne les demandes d'informations formulées par le comité lors de son examen antérieur du cas quant au fond, le gouvernement se réfère, dans sa communication du 18 mai 1999, aux articles 510 et 511 du décret ministériel no 252 de 1971 (Code du travail) relatifs à l'imputabilité de la grève à l'employeur.
- 360. A propos de ces articles, le gouvernement indique que l'imputabilité de la grève est un processus juridictionnel qui relève des tribunaux du travail, avec comme voie de recours la possibilité d'interjeter appel auprès des tribunaux supérieurs du travail et de former un pourvoi en cassation auprès de la troisième chambre de la Cour suprême de justice. Il s'agit d'une procédure sommaire qui suppose un jugement rapide établissant, de la part des travailleurs, que la grève a été déclenchée en raison de la non-exécution "de la convention collective, de l'arrangement direct ou de la sentence arbitrale", ou de l'inobservation de dispositions légales "violées de manière générale ou réitérée" par l'employeur, cela ayant été traité sans que l'on puisse parvenir à un accord dans le cadre de la procédure de conciliation engagée à la suite de la présentation du cahier de revendications. Il peut également être établi que l'employeur n'a pas répondu au cahier de revendications ou a abandonné la procédure de conciliation.
- 361. Le gouvernement ajoute que, de la même manière, la grève fournit des motifs d'imputabilité, énoncés à l'article 511, tel le fait de ne pas permettre la fermeture de l'entreprise, laquelle est un effet immédiat de la grève, ou d'établir de nouveaux contrats de travail pour assurer la reprise des travaux interrompus par la grève, sauf s'il s'agit de contrats destinés à "éviter des dommages irréparables aux machines et aux éléments de base", lorsque les grévistes n'autorisent pas ces travaux et que les autorités administratives considèrent qu'ils revêtent un caractère d'urgence. En ce cas, l'employeur demande aux autorités administratives l'autorisation d'effectuer ces travaux. La plupart du temps, lorsque la demande est agréée, la direction s'efforce de faire appel au personnel de l'entreprise pour l'exécution de ces travaux, lesquels doivent être des travaux d'entretien et non de production. La grève est également imputée à l'employeur lorsque ce dernier empêche les travailleurs d'accomplir les activités indiquées à l'article 496 du Code du travail, à savoir:
- Article 496. Sont garantis aux grévistes en dehors de l'établissement:
- 1. le droit de manifestation pacifique;
- 2. le droit de propagande auprès de leurs camarades et du public, et celui de faire connaître par voie d'affiches leurs revendications;
- 3. le droit d'établir des piquets de propagande et de surveillance aux alentours des locaux de travail;
- 4. le droit de recueillir des dons.
- En outre, si l'employeur essaie d'empêcher la grève, celle-ci peut également lui être imputée.
- 362. Selon le gouvernement, l'imputabilité implique le paiement des salaires pendant la grève, ce que le tribunal décide en statuant sur l'imputabilité de la grève. En fait, la procédure a pour objet de déterminer si l'employeur répond ou non aux différents motifs d'imputabilité énoncés par la loi. Comme indiqué, cela passe par une procédure contentieuse, contradictoire, qui relève de l'organe judiciaire.
- 363. Le gouvernement précise qu'il n'existe pas, pour la période de négociation collective, d'organes "compétents en cas de violation de la loi ou des conventions collectives, en cas de conflits dans l'interprétation de leurs dispositions ou dans le cas où l'employeur omet de coopérer dans le processus de négociation collective". Cependant, la loi no 53 de 1975 dispose que le ministère du Travail et du Développement social est compétent pour connaître des procédures portant sur "l'interprétation en droit ou la validité des dispositions d'une convention collective ou d'un autre accord de nature collective". En outre, l'article 527 du Code du travail dispose que: "Toute personne cherchant à rendre effectif un droit, à faire déclarer l'existence de ce droit ou l'inexistence d'un droit contraire à ses intérêts, ou encore à faire déclarer l'existence ou l'inexistence d'une relation juridique qui l'intéresse ou qui l'affecte, ou à obtenir une quelconque déclaration l'intéressant ou l'affectant, peut s'adresser aux tribunaux de la façon prescrite dans le présent Code." A cet égard, la question de savoir quel serait l'effet de l'une de ces procédures sur la présentation d'un cahier de revendications ou la réalisation d'une négociation collective ne s'est pas encore posée au Panama. Le traitement des revendications ou la négociation collective serait-il suspendu si la procédure portait sur les mêmes questions? Quelle est l'autorité compétente pour déterminer ces effets? Ces questions doivent être élucidées soit par la voie administrative, soit par la voie judiciaire.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 364. Le comité constate que les questions restées en suspens lors de l'examen antérieur du cas ont trait à la conformité des dispositions légales énonçant les cas où l'employeur est tenu de payer les salaires correspondant aux jours de grève avec les principes de la liberté syndicale. Concrètement, il s'agit des cas où la grève a pour but: 1) d'exiger l'exécution de la convention collective, de l'arrangement direct ou de la sentence arbitrale (art. 510 1) du Code); 2) d'obtenir l'exécution de dispositions légales violées de manière générale et réitérée dans l'entreprise (art. 510 1) du Code); 3) lorsque l'employeur n'a pas répondu au cahier de revendications ou a abandonné la procédure de conciliation (art. 510 2) du Code). A propos de ces questions, les organisations d'employeurs plaignantes ont signalé qu'avec la réglementation en vigueur les autorités administratives du travail ne sont pas habilitées à refuser un cahier de revendications défectueux faisant valoir des violations imaginaires ou non fondées des normes du travail; en de telles circonstances, la procédure de conciliation serait engagée, la grève pourrait être déclarée par la suite et l'employeur devrait verser les salaires pour les jours de grève.
- 365. En ce qui concerne l'allégation relative aux dispositions légales qui imposent à l'employeur de payer les salaires correspondant aux jours de grève, le comité prend note des déclarations du gouvernement et en particulier du fait que: 1) l'"imputabilité" de la grève (légale) à l'employeur est déclarée dans le cadre d'une procédure judiciaire sommaire au cours de laquelle les travailleurs doivent prouver les motifs d'imputabilité prévus dans la législation qui sont indiqués ci-après:
- -- inexécution de la convention collective, de l'arrangement direct ou de la sentence arbitrale (art. 510 1) du Code du travail);
- -- inobservation de dispositions légales violées de manière générale et réitérée dans une entreprise, un commerce ou un établissement (article 510 1));
- -- inobservation de l'obligation de fermer l'entreprise lorsque la grève est déclarée (art. 511) (lors de l'examen antérieur du cas quant au fond, le comité avait demandé au gouvernement de prendre des mesures pour abroger les dispositions du Code du travail imposant la fermeture immédiate de l'entreprise, de l'établissement ou du commerce lorsqu'une grève est déclarée (voir 310e rapport, paragr. 507 a) i)));
- -- établissement de nouveaux contrats de travail pour assurer la reprise des travaux interrompus par la grève (sauf si les grévistes autorisent les travaux destinés à éviter des dommages irréparables aux machines et aux éléments de base) (art. 511);
- -- entrave à l'exercice de certains droits des travailleurs en dehors de l'établissement (manifestation pacifique, propagande, piquets de propagande et de surveillance et collecte de dons) (art. 496);
- -- empêchement de la grève ou entrave sérieuse et injuste à sa réalisation (art. 511);
- -- absence de réponse au cahier de revendications ou abandon de la procédure de conciliation (art. 510 2)).
- 366. A cet égard, bien que la majorité des motifs d'imputabilité de la grève à l'employeur susmentionnés constituent des violations aux conventions nos 87 et 98 des actes illégitimes sanctionnés de différentes façons dans de nombreux pays pour violation du droit de grève, inobservation du devoir de bonne foi dans la négociation ou commission d'un autre type de pratiques déloyales, le comité estime que le fait d'obliger l'employeur à verser les salaires correspondant aux jours de grève dans les cas mentionnés, outre qu'il peut altérer l'équilibre des relations professionnelles et s'avérer trop coûteux pour l'employeur, pose des problèmes de conformité aux principes de la liberté syndicale, dans la mesure où ce versement ne devrait être ni interdit ni obligatoire (voir 307e rapport, cas n o 1865, paragr. 223); c'est pourquoi, cette question devrait être résolue par les parties. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour modifier la législation dans le sens indiqué.
- 367. Par ailleurs, le comité rappelle que les organisations d'employeurs plaignantes avaient souligné qu'avec la réglementation en vigueur les autorités administratives du travail ne sont pas habilitées à rejeter un cahier de revendications comportant des défauts dans lequel sont formulées des violations imaginaires ou non fondées des normes du travail; en de telles circonstances, la procédure de conciliation serait engagée, la grève pourrait être déclarée par la suite et l'employeur devrait verser les salaires pour les jours de grève. De même, le comité avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur l'existence de procédures ou organes compétents en cas de violation de la loi ou des conventions collectives, en cas de conflits dans l'interprétation de leurs dispositions ou dans le cas où l'employeur omet de coopérer dans le processus de négociation collective.
- 368. A cet égard, le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles: 1) il n'existe pas, pour la période de négociation collective, d'organes "compétents en cas de violation de la loi ou des conventions collectives, en cas de conflits dans l'interprétation de leurs dispositions ou dans le cas où l'employeur omet de coopérer dans le processus de négociation collective"; 2) cependant, la loi no 53 de 1975 donne compétence au ministère du Travail et du Développement social pour statuer dans les procédures sur "l'interprétation en droit ou la validité des dispositions d'une convention collective ou d'un autre accord de nature collective"; 3) l'article 527 du Code du travail permet à toute personne intéressée de demander à l'autorité judiciaire de déclarer l'existence ou l'inexistence d'un droit ou d'une relation juridique ou tout autre type de déclaration. Néanmoins, le comité note que, d'après les déclarations du gouvernement, l'application dans la pratique des textes de lois mentionnés -- en ce qui concerne en particulier les conflits de droits -- n'a pas encore eu lieu d'être à ce jour et que les questions qui se posent (suspension éventuelle du traitement du cahier de revendications, organes compétents, etc.) doivent être élucidées le moment venu par la voie administrative ou par la voie judiciaire.
- 369. Dans ces conditions, le comité recommande au gouvernement de développer les normes et procédures existantes concernant les conflits de droits ou d'interprétation et d'instituer une procédure claire et rapide de vérification de l'inobservation des dispositions légales et des clauses des conventions collectives impliquant les organisations de travailleurs et d'employeurs qui permette d'éviter des conflits collectifs pour ces motifs. Eu égard aux conséquences sur le plan légal de l'absence de réponse de l'employeur au cahier de revendications ou de l'abandon par l'employeur de la procédure de conciliation, le comité considère que le fait de ne pas répondre à un cahier de revendications peut être considéré comme une pratique déloyale et contraire au principe de la bonne foi dans la négociation collective qui peut entraîner certaines sanctions prévues par la législation mais sans pour autant, comme on l'a vu auparavant, que l'employeur soit obligé légalement de payer les jours de grève, cette question devant être laissée aux parties concernées. En ce qui concerne l'abandon de la procédure de conciliation, le comité constate que la législation impose la conciliation obligatoire et empêche, quelles que soient les circonstances, l'employeur de l'abandonner sous peine d'être contraint de verser les salaires correspondant aux jours de grève, ce qui est non seulement disproportionné mais contraire au principe de la négociation collective volontaire, qui est consacré par la convention no 98. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement d'envisager la modification de la législation de façon à ce que: 1) l'absence de réponse à un cahier de revendications n'entraîne pas de sanctions disproportionnées, et 2) l'abandon de la procédure de conciliation par l'une des parties ne donne pas lieu à des sanctions disproportionnées.
- 370. En ce qui concerne la demande d'assistance technique du gouvernement, le comité rappelle que l'OIT est à sa disposition pour lui fournir toute l'assistance dont il peut avoir besoin pour procéder à un ajustement important de sa législation de manière à l'aligner sur les conventions ratifiées en matière de liberté syndicale et de négociation collective. Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 371. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver le présent rapport, et en particulier les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande au gouvernement d'envisager la modification de la législation de façon à ce que: 1) le versement des salaires correspondant aux jours de grève ne soit pas imposé par la législation mais soit une question à régler par les parties, 2) l'abandon de la procédure de conciliation par l'une des parties ne donne pas lieu à des sanctions disproportionnées, et 3) l'absence de réponse à un cahier de négociations n'entraîne pas de sanctions disproportionnées.
- b) Le comité recommande au gouvernement, pour développer les normes et procédures existantes concernant les conflits de droits ou d'interprétation, d'instituer une procédure claire et rapide de vérification de l'inobservation des dispositions légales et des clauses des conventions collectives impliquant les organisations de travailleurs et d'employeurs qui permette d'éviter des conflits collectifs pour ces motifs.
- c) En ce qui concerne la demande d'assistance technique du gouvernement, le comité rappelle que l'OIT est à sa disposition pour lui fournir toute l'assistance dont il peut avoir besoin pour procéder à un ajustement important de sa législation de manière à l'aligner sur les conventions ratifiées en matière de liberté syndicale et de négociation collective.
- d) Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.