National Legislation on Labour and Social Rights
Global database on occupational safety and health legislation
Employment protection legislation database
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Un représentant gouvernemental du Pakistan a indiqué que l'accord gouvernemental sur l'élimination du travail des enfants dans l'industrie du tapis a été signé le 22 octobre 1998 entre le Programme international pour l'abolition du travail des enfants (IPEC) de l'OIT et l'Association pakistanaise des exportateurs et fabricants de tapis (PCMEA). Cet accord tend à la mise en place d'un projet prévoyant initialement de retirer de cette industrie 8.000 enfants dans un délai de 36 mois. Cet accord a été conclu notamment dans le but de satisfaire aux échéances fixées par la Déclaration de MALE (Maldives) de l'Association pour la coopération régionale en Asie du Sud-Est (SAARC) tendant à l'élimination du travail des enfants d'ici à 2010. Les autres objectifs seront de continuer à retirer les autres enfants encore occupés dans cette industrie et d'éviter que d'autres ne prennent leur place.
L'attachement du gouvernement à l'élimination du travail en servitude est attesté par le fait que, le 21 mai 1997, un accord a été signé avec la Commission européenne et l'Organisation internationale du Travail pour mettre en place un programme d'élimination du travail des enfants en servitude au Pakistan. Ce programme est conçu pour sensibiliser l'opinion sur les pratiques exploitatrices et néfastes du travail en servitude et du travail des enfants; pour développer les moyens dont disposent l'administration publique, les organisations d'employeurs et les organisations de travailleurs ainsi que les ONG pour retirer les enfants de leur servitude et empêcher que d'autres n'y entrent. Le programme vise un petit groupe de travailleurs et d'enfants en servitude ainsi que leur famille. Il est centré sur des activités de réinsertion.
Il n'a pas été procédé, à ce jour, à une étude sur le travail des enfants et des adultes en servitude selon les orientations de l'étude du Programme international pour l'abolition du travail des enfants (IPEC). Cette étude est cependant considérée comme incluant toutes les formes de travail des enfants, y compris le travail en servitude. Mis à part le gouvernement, le seul organe du Pakistan qui soit en mesure de fournir des chiffres sur le nombre des travailleurs en servitude est la Commission des droits de l'homme. Le problème se pose presque exclusivement dans la province du Sindh et dans certaines régions du Pendjab. Les efforts déployés dans ce domaine se heurtent aux problèmes de visibilité: étant donné que le travail en servitude est interdit par la loi, ceux qui y recourent ne reculent devant aucun artifice pour le cacher. Des opérations de police sont menées pour révéler au grand jour des situations de travail en servitude. Comme le problème de la visibilité constitue un obstacle à l'application pleine et entière de la loi de 1992 sur l'abolition du travail en servitude, l'orateur a confirmé que ces cas, lorsqu'ils sont révélés, font immédiatement l'objet d'investigations.
Le gouvernement a fourni des statistiques sur les poursuites et les condamnations sur la base de la loi de 1991 sur l'emploi d'enfants. Il a indiqué cependant que les chiffres de 1998 ne sont pas complets et que les chiffres définitifs de cette année se révéleront probablement beaucoup plus élevés que les chiffres précités. Le nombre des inspections devrait lui aussi être beaucoup plus élevé, de même que celui des inspections et des poursuites exercées sur la base d'autres instruments ayant une incidence sur l'emploi des enfants. Les données concernant les inspections menées en application de la loi de 1992 sur l'abolition du système de travail en servitude sont elles aussi en cours de compilation et seront communiquées à la commission d'experts dans le prochain rapport du gouvernement.
Le gouvernement a lancé une campagne de sensibilisation sur le problème du travail des enfants et du travail en servitude, qui associe la presse écrite, la radio et la télévision. Le ministère du Travail (Département de l'éducation des travailleurs) a publié un certain nombre de documents, affiches et autocollants, et a diffusé un documentaire télévisé en 13 épisodes qui a suscité un grand intérêt pour la question du travail des enfants. Le ministère du Travail a également publié un bulletin sur le travail des enfants intitulé The Future dont il a communiqué copie au bureau de l'OIT à Islamabad.
Le ministère, en réponse à l'observation de la commission d'experts, qui demande si les sentences du tribunal fédéral de la charia peuvent avoir une incidence sur l'application de la loi de 1992 sur l'abolition du travail en servitude et si le gouvernement est disposé à défendre cette loi devant ledit tribunal, déclare que le gouvernement est assurément disposé à le faire mais qu'en tout état de cause l'application de cette loi ne peut aucunement être affectée par les sentences de ce tribunal. Quant à la commission consultative sur le travail des enfants, elle est chargée de contrôler la mise en oeuvre du plan d'action et de la stratégie établie par le groupe de travail sur le travail des enfants. Ce groupe a formulé un projet et un plan d'action sur la politique du travail des enfants. Les gouvernements provinciaux élaborent des plans d'action pour donner effet à cette stratégie dans leur juridiction. La stratégie et le plan d'action seront finalisés dès que tous les plans d'action des gouvernements provinciaux auront été communiqués. La commission consultative commencera alors sa tâche. Le gouvernement communiquera tous les documents qui auront été adoptés par cette commission consultative à la commission d'experts dès qu'ils seront disponibles. L'orateur a fait observer que la Commission des droits de l'homme du Pakistan est une ONG n'ayant aucun lien avec le gouvernement. Son rapport annuel est un document public, en vente au Pakistan. Le deuxième rapport périodique du Pakistan à la Commission des droits de l'enfant des Nations Unies a été établi par la Commission nationale sur le bien-être et le développement des enfants (NCCWD). Il en sera communiqué copie à la commission d'experts dès son achèvement. En ce qui concerne la composition des comités de vigilance de district, ces comités, présidés par le vice-commissaire du district, accueillent des représentants de la police, de la magistrature, du barreau, des municipalités, des syndicats, des organisations d'employeurs et des ONG. L'administration du district est elle aussi représentée. Il en résulte que les plaintes dont cette dernière est saisie sont automatiquement transmises au comité de vigilance. Des précisions quant au nombre et à la nature des affaires traitées et des infractions jugées par des magistrats de district seront établies et communiquées dès que possible à la commission d'experts. Les équipes de surveillance constituées en 1997 ont achevé leurs visites au siège de l'administration de la province par des contacts directs avec les autorités du district et les comités de vigilance. Cette année, le secrétaire d'Etat au Travail s'est rendu dans les provinces du Pendjab, du Sindh et du Baloutchistan pour tenir des réunions avec des autorités provinciales sur l'application de la loi portant abolition du travail en servitude. De plus, des organisations de travailleurs et d'employeurs participent aux comités de vigilance établis au niveau du district en application de la loi de 1992 et du règlement de 1995.
Le gouvernement s'est efforcé de limiter progressivement le champ d'application de la loi de 1952 sur les services essentiels, dont le nombre est désormais limité à cinq. En outre, la réforme de cette loi va être étudiée par la nouvelle commission tripartite chargée de la consolidation, de la simplification et de la rationalisation de la législation du travail. Le rapport de cette commission sera disponible en temps utile. Pour conclure, le représentant gouvernemental a souligné que son gouvernement est animé de la volonté de faire disparaître le travail en servitude et le travail des enfants. Il a demandé que la commission note que le gouvernement a répondu pratiquement sur tous les points soulevés, en s'engageant à fournir une réponse sur les autres. Il a mentionné également la contribution financière du gouvernement, par le biais du Bait-ul-Mal, aux programmes concernant l'abolition du travail des enfants. Il a également fait observer que les employeurs et le gouvernement du Pakistan consacrent des sommes importantes à la mise en oeuvre de ce programme, comme le font les organisations de travailleurs du Pakistan, malgré les difficultés financières qu'elles connaissent. Pour conclure, il a réaffirmé la volonté du Pakistan de résoudre le problème du travail des enfants et du travail en servitude et a exprimé l'espoir que la commission en prendrait dûment note.
Les membres employeurs ont remercié le gouvernement pour les informations communiquées à la commission et noté que le gouvernement a fourni des informations complètes en réponse à neuf demandes sur les douze formulées par la commission d'experts. Les informations sont vraiment très utiles, mais le champ couvert par les demandes illustre l'ampleur du problème. Le cas a fait l'objet de discussions à douze reprises depuis 1982 et a été cité à trois reprises dans un paragraphe spécial. Il concerne le problème crucial du travail en servitude des adultes et des enfants. Ainsi que le gouvernement l'a déjà souligné, le travail en servitude est, par nature, caché; il est difficile d'obtenir des chiffres précis; toutefois, il y a lieu d'observer que les chiffres cités par le gouvernement ne reflètent pas l'ampleur du phénomène. Le problème est très difficile à cerner et requiert une vigilance permanente.
En ce qui concerne le travail des enfants, les indications fournies par le gouvernement montrent qu'il a pris un certain nombre de mesures positives, y compris à travers des programmes tels que le Programme international pour l'abolition du travail des enfants (IPEC), les initiatives de la Commission européenne et du Fonds des Nations Unies pour les enfants ainsi que l'adoption de la réglementation visant à mettre en application les dispositions de la loi de 1992 sur le Système du travail en servitude (abolition) et de la loi de 1991 sur le travail des enfants. Par suite de ces mesures, des cas ont été déférés devant les comités de vigilance, qui ont été renforcés. Ces derniers avaient tardé à montrer leur efficacité. Les membres employeurs ont salué la création par le gouvernement de quatre équipes de contrôle pour veiller à l'efficacité de ces comités.
En ce qui concerne le travail en servitude des adultes, la commission d'experts a demandé des informations précises quant au rôle des magistrats de district en vertu de la loi de 1992 sur le travail obligatoire (abolition) en matière d'identification, d'affranchissement et de réinsertion des travailleurs soumis au travail obligatoire. Une des faiblesses de la loi réside dans l'inefficacité des règles applicables en matière de réinsertion ou d'affranchissement de ces travailleurs.
S'agissant du problème des restrictions au droit des travailleurs de mettre fin à la relation de travail sans le consentement de leurs employeurs, faisant encourir l'emprisonnement pour une période pouvant aller jusqu'à une année, cela ne concerne que les services essentiels. Le droit accordé aux travailleurs de démissionner sans préavis est un problème particulièrement épineux. Il est regrettable que le gouvernement n'ait pas communiqué d'informations récentes à cet égard.
En conclusion, tout en saluant les actions accomplies par le gouvernement, les membres employeurs ont appelé ce dernier à prendre des mesures à tous les niveaux en vue de remédier au problème que pose le travail en servitude et souligné que, au regard de l'ampleur du problème, il reste beaucoup à faire.
Les membres travailleurs ont remercié le représentant gouvernemental pour les informations qu'il avait fournies. Ils ont rappelé que le cas du Pakistan avait été discuté cinq fois dans les années quatre-vingt-dix et que la dernière fois en 1997 la discussion avait été particulièrement approfondie. La commission a toujours insisté auprès du gouvernement pour qu'il renforce considérablement son action afin d'éliminer le travail en servitude des enfants et des adultes dans la pratique. La législation de base est conforme à la convention depuis quelques années mais le problème réside dans l'application.
Les commentaires de la commission d'experts sont basés, outre le rapport du gouvernement, sur les informations obtenues dans le cadre de programmes comme l'IPEC et sur des commentaires de la Fédération des syndicats du Pakistan. Les commentaires de la commission d'experts portent sur le travail d'enfants en servitude, le travail en servitude en général et les restrictions à la liberté de quitter son emploi. En ce qui concerne le travail d'enfants en servitude et le travail en servitude en général, la commission d'experts a rappelé la gravité des problèmes qui ont été soulevés. Sur la base de chiffres qui lui ont été communiqués par le gouvernement et de statistiques disponibles, la commission d'experts estime que le pays compte entre 2,9 et 3,6 millions d'enfants au travail (de l'âge de 5 à 14 ans). De plus, selon la commission d'experts, le travail en servitude des adultes semble persister dans de vastes proportions. Le gouvernement n'a jamais avancé de chiffres détaillés sur le travail d'enfants en servitude. Il reconnaît depuis quelques années l'ampleur du problème, mais il se limite à critiquer les estimations. Il est d'avis que les chiffres sont exagérés. Les membres travailleurs craignent cependant que les chiffres avancés par l'OIT soient proches de la réalité.
Les membres travailleurs insistent depuis des années pour que le gouvernement élabore des programmes d'action crédibles au niveau notamment de la sensibilisation, de la détection, de la punition, de la prévention des cas et de l'accompagnement des enfants libérés. Le représentant gouvernemental a indiqué que des données sur les inspections et autres actions entreprises seront communiquées au Bureau. Celles-ci devront être examinées par la commission d'experts.
La commission d'experts a noté avec intérêt que le gouvernement a pris à présent des mesures en coopération notamment avec l'IPEC, l'UNICEF et l'Union européenne. L'accord conclu entre le gouvernement, d'une part, et l'IPEC, d'autre part, tendant à l'élimination du travail des enfants dans la manufacture des tapis doit également être relevé. Ces mesures représentent indéniablement une petite avancée, mais il faut les juger par rapport à l'ampleur du problème et par rapport à l'impact réel au niveau des provinces, des municipalités, des secteurs comme la briqueterie, les tapis tissés, la construction et l'agriculture. De plus, il ne faut pas oublier que certains mouvements sociaux et associations au Pakistan ont fait des efforts considérables de mobilisation contre le travail en servitude. Après 1992, le Front pour la libération des travailleurs en servitude a lancé une campagne pour la libération des enfants dans le sec- teur des tapis. Il a réussi à libérer 30.000 enfants et il a pu orienter 10.000 enfants vers l'école. Parmi ces 30.000 enfants libérés, se trouvait le jeune Iqbal Masih, qui a été tué entre-temps en raison de son action pour la libération. Ce cas est devenu célèbre. Malheureusement, ces organisations n'ont pas toujours eu le soutien des autorités publiques. Certaines autorités au niveau des provinces et au niveau fédéral ont été parfois plus attentives à neutraliser les actions des organisations sociales qu'à la lutte pour la libération des enfants et des adultes. Le fondateur du Front pour la libération des travailleurs en servitude, Ehsan Ullah Khan, est poursuivi par les autorités pour haute trahison.
Selon les informations dont disposent les membres travailleurs, l'efficacité et le nombre de comités de vigilance opérationnels seraient très limités. Pourtant, l'action des comités de vigilance est indispensable pour entamer les procédures et les plaintes visant à libérer des enfants. Les tribunaux rendent effectivement des jugements et des ordonnances afin de libérer des enfants, mais la police et l'administration ne font pas diligence pour leur mise en oeuvre.
Les membres travailleurs estiment, tout comme la commission d'experts, qu'il faut renforcer considérablement la sensibilisation et les différents mécanismes et procédures. La commission d'experts a insisté pour obtenir davantage de données de la part du gouvernement. Celles-ci devraient porter sur les domaines suivants: les modalités de coopération entre les comités de vigilance et les magistrats; les moyens dont disposent les comités de vigilance; les procédures de fonctionnement des comités de vigilance, y compris des données et chiffres sur la composition effective des comités existants: selon les règles en vigueur, 18 catégories de personnes peuvent en faire partie et les organisations de travailleurs ne disposent que d'un siège; les procédures prévues pour libérer effectivement les enfants concernés: selon les informations des membres travailleurs, le règlement d'application de la loi de 1995 ne semble pas contenir d'indications sur les procédures à suivre pour libérer les enfants en servitude; les budgets et programmes prévus pour réinsérer les enfants et les adultes afin d'éviter qu'ils ne retombent dans la servitude.
L'arrêt célèbre de la Cour suprême du Pakistan prononcé en 1988, déclarant inconstitutionnel le travail en servitude, a suscité des espoirs réels parmi les travailleurs concernés. Deux lois ont été adoptées: en 1991, la loi sur l'emploi des enfants et, en 1992, la loi portant abolition du travail en servitude. Depuis lors, le travail en servitude persiste, notamment dans le secteur informel et l'agriculture, puisque la sensibilisation d'une partie importante de la population et des fonctionnaires locaux n'est pas encore à la hauteur des attentes.
Le gouvernement fait mention dans son rapport d'une opposition contre la loi portant abolition du travail en servitude, sur la base de la charia. Le gouvernement devrait informer la commission d'experts sur les répercussions négatives de cette opposition pour l'application de la loi de 1992 et la mise en oeuvre de la libération des travailleurs concernés. Le gouvernement devrait également indiquer les mesures prises pour passer outre à cette opposition. Les membres travailleurs demandent qu'il soit tenu compte dans les conclusions de la commission de leur demande et de celle de la commission d'experts pour que des informations détaillées indispensables pour connaître l'impact réel des mesures, actions et programmes annoncés par le gouvernement soient fournies. Ces mesures, actions et programmes devraient être adoptés à la hauteur de la gravité de la situation.
En ce qui concerne les restrictions à la liberté de quitter son emploi, la commission d'experts a à nouveau rappelé que des dispositions des lois fédérales et provinciales sur les services essentiels prévoient des peines d'emprisonnement pour des travailleurs qui mettent fin à leur emploi sans le consentement de l'employeur. Le gouvernement semble avoir réduit la liste des emplois concernés à cinq catégories depuis la dernière discussion au sein de la commission. Pourtant, ces lois n'ont pas encore été modifiées. Le gouvernement a affirmé à plusieurs reprises son intention de modifier les dispositions de la loi mais n'a pas encore concrétisé ses promesses. La commission d'experts a signalé que le gouvernement avait mentionné dans son rapport de 1996 qu'un rapport avait été établi par un groupe de travail tripartite et qu'il en étudierait les recommandations. Aucune information à ce sujet n'a été donnée, ni lors de la Conférence de 1997 ni dans le dernier rapport du gouvernement.
Les membres travailleurs ont conclu en soulignant qu'imposer des sanctions pénales afin de lier le travailleur à un employeur revient au travail forcé et qu'en conséquence les conclusions de la commission doivent insister sur le fait que le gouvernement doit honorer ses promesses.
Le membre travailleur du Pakistan a rappelé l'importance de ce pays, avec ses 140 millions d'habitants. Il a fait observer que, au moment de la déclaration d'indépendance, il était question de le bâtir sur des bases démocratiques et égalitaires, et de garantir les droits des travailleurs. Quant aux services essentiels, si le gouvernement déclare aujourd'hui que leur nombre est actuellement ramené à cinq, ils sont en vérité encore plus étendus qu'auparavant. En 1998, le gouvernement s'est engagé à modifier la loi sur les services essentiels à l'issue de consultations tripartites. Mais, depuis lors, comme la commission d'experts le fait observer, aucune information n'a été fournie quant aux mesures prises ou envisagées pour modifier cette loi afin de la rendre conforme à la convention.
Il a abordé la question de la suspension des droits syndicaux des quelque 130.000 travailleurs employés par le plus grand établissement public du pays, l'Autorité pakistanaise du développement de l'eau et de l'énergie (WAPDA), par effet de la dispense accordée à cet organisme d'appliquer l'ordonnance de 1969 sur les relations du travail et l'ordonnance de 1968 sur les emplois industriels et commerciaux pendant deux ans. En tant que service essentiel, ce secteur restreint considérablement le droit, pour les travailleurs, de mettre fin à leur emploi et leur refuse tout droit à une enquête indépendante. Ces travailleurs ont vu leurs horaires de travail allongés. Ils se sont en outre vu attribuer des tâches difficiles, dans des conditions non moins difficiles. Cette situation constitue non seulement une violation de la convention, mais aussi de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958. L'orateur a mentionné que le Comité de la liberté syndicale et la Cour suprême ont été saisis d'une plainte concernant la WAPDA. Il a également indiqué que ces restrictions n'ont pas seulement été étendues par le gouvernement au WAPDA, mais également au KESC, dont les droits syndicaux ont été suspendus. Ceux-ci se sont vu dénier la sécurité de l'emploi, en comparaison avec d'autres travailleurs dans le pays, du fait de l'autorisation donnée à la direction de se dispenser des services d'un travailleur sans avoir à fournir de motif, ce en violation des conventions de l'OIT nos 111, 87, 29, 105, ratifiées par le gouvernement du Pakistan. Ces restrictions ont été incluses dans la récente ordonnance. Il s'est également référé aux commentaires de la commission d'experts sur les conventions nos 87, 98, 105, qui déclarent que les restrictions apportées aux droits des travailleurs du secteur bancaire, des chemins de fer et dans les ZFE sont contraires aux conventions ratifiées et recommandent incessamment au gouvernement de retirer ces restrictions injustifiées. Il a demandé au représentant du gouvernement de faire savoir à la commission si les restrictions susmentionnées doivent être levées et s'il entend s'acquitter de ses obligations en vertu des conventions pertinentes et de la Constitution nationale.
L'orateur a déclaré que le travail en servitude et le travail des enfants sont à la fois un fléau et un crime contre l'humanité. Comme le gouvernement reconnaît que ces pratiques perdurent, l'intervenant en appelle à sa volonté politique pour remédier à la situation. Il a souligné que les enfants nés en servitude n'ont pas la moindre chance de s'épanouir, ce qui est une violation de leur droit à l'égalité de chances. Il a invité le gouvernement à consacrer plus de ressources à l'éducation et à la formation des déshérités et à prendre des sanctions effectives contre ceux qui recourent au travail en servitude, notamment en prononçant des peines de prison plutôt que de simples peines d'amende. Il a aussi cité l'exemple de son syndicat, qui a ouvert un centre de formation gratuit et a commencé à distribuer, à une échelle modeste, des livres gratuits, édités par l'un des principaux syndicats, aux enfants des travailleurs décédés ou handicapés afin de promouvoir l'éducation des enfants des pauvres. Il a exprimé son soutien total pour l'élimination de ce fléau du travail des enfants et son appréciation pour le rôlé joué par l'OIT/IPEC au Pakistan dans les industries du football, chirurgicale et de la tapisserie dans ses campagnes de sensibilisation sur la nécessité d'éliminer le travail des enfants. En ce qui concerne les comités de vigilance, il a déclaré qu'il serait plus efficace de permettre aux syndicats d'exercer des actions en justice. Il a appelé le gouvernement à ratifier et mettre en oeuvre la convention sur le travail des enfants, à laquelle la présente session de la Conférence consacre ses discussions.
Le membre travailleur de l'Irlande a déclaré que les commentaires très détaillés et exhaustifs exprimés par la commission d'experts étaient une indication claire de la gravité du problème persistant du travail des enfants et des adultes en servitude dans le pays. Bien que dix années se soient écoulées depuis que la Cour suprême ait qualifié le travail des enfants en servitude d'inconstitutionnel, la commission d'experts note que l'on compte encore entre 2,9 et 3,6 millions d'enfants au travail (de l'âge de 5 ans à celui de 14 ans). Quant au travail en servitude des adultes, la commission d'experts a observé qu'il semble encore exister en grand nombre.
La loi portant abolition du travail en servitude a été adoptée en 1992 et son règlement d'application en 1995. Un système administratif élaboré a également été mis en place, avec le double objectif présumé de maintenir et de renforcer la conformité avec cette législation. La commission d'experts a fait référence à une série d'organes tels que la Commission nationale pour l'enfance et le développement, le Comité consultatif sur le travail des enfants et le travail en servitude, les comités de vigilance constitués aux niveaux des provinces et des départements, ainsi que les quatre équipes de contrôle constituées par le ministère du Travail. Ces institutions et structures forment un réseau élaboré de mécanismes de contrôle et de mise en conformité. Il est alors très difficile de comprendre pourquoi le travail des enfants et des adultes en servitude se maintient en tant que phénomène persistant et répandu dans l'infrastructure économique du pays. Le rapport de la commission d'experts fournit un élément de réponse dans ses commentaires sur le manque de transparence dans le fonctionnement de ces institutions et la manière dont elles interagissent. En effet, elle a prié le gouvernement de lui expliquer les modalités selon lesquelles les comités de vigilance et les magistrats de district coopèrent. Elle avait également noté l'absence d'informations sur le nombre et la nature des procédures engagées et traitées par les magistrats de district. La commission d'experts a demandé des précisions sur le mandat et le fonctionnement du Comité consultatif sur le travail des enfants et le travail en servitude, et la fourniture de quelque rapport ou recommandation.
Devant l'amplitude du problème des enfants en servitude au Pakistan, de sérieuses questions doivent être posées par la commission sur l'échec des mécanismes officiels, à savoir un quelconque impact significatif sur le problème. Cette situation soulève des doutes quant à la volonté des autorités de trouver une solution effective et sérieuse au problème. De larges éléments de preuve existent selon lesquels les efforts pour assurer la libération des travailleurs en servitude ont été entravés par un manque de coopération de la part de fonctionnaires locaux. Les travailleurs en servitude eux-mêmes se sont trouvés face à d'énormes difficultés quand la police refusait, de manière régulière, d'enregistrer leurs plaintes concernant des problèmes allant de la servitude pour dettes à l'agression physique et à l'enlèvement. Il est dès lors clair que, à moins que et jusqu'à ce que les autorités à tous les niveaux, et en particulier au niveau local, n'appliquent de manière active et permanente la loi sur l'abolition du travail forcé, la pratique du travail des enfants en servitude continuera à prospérer au Pakistan devant l'inertie de la bureaucratie officielle, son inefficacité et son manque de volonté.
Enfin, l'oratrice a exprimé ses préoccupations quant au harcèlement exercé par les autorités envers les dirigeants et activistes de l'organisation non gouvernementale du Front de libération du travail en servitude (BLLF). L'arrestation avec tortures de Zafar Yab, le trésorier du BLLF, est déplorable. L'accusation, montée de toutes pièces, de haute trahison faite à l'encontre de Ehsan Ullah Khan, le fondateur du BLLF, est un discrédit pour le système judiciaire et légal du pays.
Le membre travailleur de l'Inde a félicité la commission d'experts pour la manière dont elle a traité ce cas et appuyé ses conclusions. Le nombre d'enfants travailleurs dans le pays est trois à quatre fois plus élevé que les chiffres de 2,9 à 3,6 millions reconnus par le gouvernement. Bien que le gouvernement ait déclaré que les chiffres avancés par la commission d'experts en ce qui concerne le travail forcé d'enfants étaient exagérés, il n'a pas fourni ses propres chiffres. Il n'a pas non plus fourni de statistiques sur les visites d'inspection qui sont menées, sur les affaires pendantes devant les tribunaux ni sur le nombre de condamnations et la nature des peines imposées en cas de violation des dispositions légales relatives au travail des enfants. Même s'il existe des dispositions constitutionnelles et légales interdisant le travail forcé d'enfants, ce problème est difficile à surmonter parce qu'il est étroitement lié à l'important trafic de drogue qui sévit dans le pays. Il a appelé le gouvernement à appliquer la convention, ce qui nécessite en premier lieu de développer la volonté politique d'éliminer le travail forcé. L'exploitation des filles au travail requiert spécialement des mesures immédiates et sérieuses. Des lois seules ne sont pas suffisantes. L'orateur a prié instamment le gouvernement de coopérer avec les partenaires sociaux dans ce domaine, ceux-ci ayant clairement manifesté leur volonté de soutenir ces efforts. L'orateur a également appelé le gouvernement à suivre l'exemple de l'Inde qui est en voie de fixer à 14 ans l'âge minimum d'admission à l'emploi. Une telle mesure entraînera une diminution du nombre de cas de travail forcé et de travail des enfants.
Le membre travailleur des Etats-Unis a constaté avec satisfaction et surprise que le membre travailleur du Pakistan avait pu se joindre à la discussion étant donné la crise à laquelle étaient confrontés les syndicats dans ce pays, et en particulier la récente suspension des droits syndicaux des travailleurs de l'Autorité pakistanaise du développement de l'eau et de l'énergie.
La situation du Pakistan est un cas sérieux et persistant de travail forcé et de travail des enfants. Tout en notant que le gouvernement a pris certaines mesures face à ce problème, il est clair que la commission d'experts continue à être préoccupée par le fait que cette pratique demeure généralisée et que le gouvernement ne semble pas capable ou disposé à saisir la dimension du problème. L'attitude du gouvernement, qui a déclaré que les estimations basées sur l'étude du travail des enfants réalisée avec l'assistance technique du Programme international pour l'abolition du travail des enfants étaient exagérées sans avancer de chiffres lui-même, est révélatrice. La commission d'experts a demandé au gouvernement de communiquer, dans les plus brefs délais, des chiffres fiables, collectés au niveau du district, de la province et au niveau fédéral, sur les inspections réalisées, les procédures ouvertes et les condamnations prononcées. En conclusion, l'orateur a indiqué que les travailleurs se sentaient de plus en plus préoccupés par le fait que l'évolution de la situation politique au Pakistan ne semble pas s'orienter vers un combat sérieux et déterminé du gouvernement contre la diffusion continue de l'usage du travail forcé.
Le membre travailleur de l'Italie s'est joint aux propos des membres travailleurs et du membre travailleur du Pakistan quant à la complexité de la situation au Pakistan. Ce pays a une législation adéquate mais la situation pratique est encore grave, comme les chiffres en témoignent. Il conviendrait d'agir à deux niveaux. En premier lieu, il faudrait procéder au renforcement des institutions au niveau local en associant des organisations d'employeurs et des syndicats. Un travail de sensibilisation pour promouvoir des initiatives positives dans la société devrait être effectué. A cet égard, le gouvernement ne doit pas faire obstacle à des organisations non gouvernementales telles que le Front de libération du travail en servitude. En deuxième lieu, le marché du travail devrait être renforcé. Le chômage et la faim amènent parfois les individus à accepter le travail en servitude. La coopération économique internationale devrait être accrue et les ressources nationales devraient être allouées aux secteurs qui peuvent aider au développement économique et à celui de l'éducation.
Le représentant gouvernemental a indiqué que son gouvernement partageait pleinement les préoccupations exprimées par la commission d'experts et les membres de cette commission. Il a informé la commission que la question du travail était du ressort à la fois des juridictions provinciales et des juridictions fédérales, les gouvernements provinciaux devant adopter des lois pour mettre en oeuvre les lois fédérales. Bien qu'au niveau fédéral des mesures aient été prises pour coopérer avec les organes de contrôle, des retards ont résulté du fait qu'il y a 106 districts, chacun ayant son propre comité de vigilance, chaque comité faisant rapport aux différents niveaux. Il a indiqué que son gouvernement s'engageait à recueillir les informations concernées et qu'il espérait que de meilleures statistiques seraient fournies dans le prochain rapport à la commission d'experts.
En ce qui concerne les questions soulevées sur l'estimation du gouvernement de la dimension du travail des enfants, il a indiqué que les chiffres étaient basés sur une étude indépendante et représentaient une évaluation réaliste de la situation. Il a noté qu'en raison du succès des programmes de sensibilisation le travail en servitude était caché. Cependant, lorsque de telles pratiques se font jour, les tribunaux et les magistrats de district prennent des mesures efficaces. Son gouvernement s'engage à mettre fin au travail en servitude et concentre ses efforts depuis peu au niveau de la communauté, y compris en s'attachant un groupe de journalistes pour faire rapport sur le travail d'enfants en servitude. Cela a permis de réaliser quelques progrès.
Sur la question de la charia, il a indiqué que celle-ci n'admettait pas le travail en servitude, mais plutôt le caractère sacré des relations contractuelles et des engagements financiers. Le travail en servitude et les engagements financiers qui en résultent relèvent de la juridiction des tribunaux ordinaires, et la loi est claire dans son interdiction du travail en servitude.
Il a souligné que le travail des enfants ne peut pas être éliminé du jour au lendemain, particulièrement parce qu'il y a un certain nombre de difficultés à surmonter. Son gouvernement demande l'assistance et l'appui du BIT à cet égard et s'engage à honorer ses obligations en vertu de la convention. La nécessité d'impliquer des acteurs autres que le ministère du Travail a été reconnue par le BIT dans une publication récente, et son gouvernement cherche effectivement à impliquer un certain nombre de groupes en vue de traiter les problèmes d'application de la convention. Il a exprimé l'espoir que le gouvernement dans son prochain rapport serait en mesure de montrer des progrès significatifs.
En réponse à une autre question soulevée par le membre travailleur du Pakistan, au sujet de la loi sur les services essentiels, le représentant gouvernemental a indiqué que le gouvernement n'était pas fier de cette législation et qu'elle était utilisée seulement lorsque le gouvernement considérait que les situations avaient atteint un stade extrême. Sur les questions particulières soulevées à propos du conflit au "Pakistan Water and Power Development Authority" (WAPDA), il n'est pas en mesure de faire des commentaires; cependant, il a indiqué que, généralement, le gouvernement visait à établir des limites dans les conflits industriels et à s'éloigner de l'approche destructrice et de confrontation qui a caractérisé les conflits dans le passé. Il a souligné le besoin de dialogue avant que des mesures extrêmes soient prises. Les restrictions ne sont en place que pour une courte période de temps, à savoir quatre mois, bien qu'il admette qu'une ordonnance ait déjà été renouvelée. Du point de vue de son gouvernement, c'est une courte période pour désamorcer une situation difficile et trouver une solution à travers le dialogue social.
Le membre travailleur du Pakistan a répondu qu'il ne peut y avoir de dialogue social sans syndicats libres et indépendants. Le gouvernement doit être appelé à supprimer les restrictions aux droits des travailleurs de l'Autorité pakistanaise du développement de l'eau et de l'énergie; ce n'est qu'à ce moment qu'un véritable dialogue social pourra voir le jour.
Le représentant gouvernemental a déclaré que le point soulevé par le membre travailleur du Pakistan a trait à la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, qui n'est pas l'objet de la présente discussion. En ce qui concerne la convention examinée, le gouvernement a remédié de façon définitive à la situation et vaincu les difficultés d'application avec l'aide de la commission. Les leçons apprises dans le cadre de l'application de cette convention ne manqueront certainement pas de produire un impact sur l'application d'autres conventions dans le pays.
La commission a pris note des informations détaillées présentées par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi. Elle rappelle qu'elle a déjà examiné ce cas plusieurs fois. En ce qui concerne le travail en servitude des enfants, elle prend note avec intérêt de l'accord conclu récemment avec le Programme international pour l'abolition du travail des enfants (IPEC) tendant à l'élimination du travail des enfants dans l'industrie du tapis, ainsi que des autres mesures tendant à l'abolition du travail des enfants et du travail en servitude signalées par le gouvernement. Elle note néanmoins avec préoccupation l'absence persistante de mesures pratiques qui permettraient de recueillir des statistiques fiables sur le nombre d'enfants en servitude dans le pays et des informations concernant le fonctionnement des mécanismes de suivi dans le pays, notamment des comités de vigilance. Elle appelle le gouvernement à fournir des informations sur les mesures prises à l'encontre de certaines personnes uvrant pour la libération des travailleurs en servitude. Prenant note des indications selon lesquelles il existe un très grand nombre d'enfants en servitude dans le pays, elle exprime à nouveau le ferme espoir que le gouvernement prendra toutes les mesures supplémentaires possibles pour déterminer l'ampleur de ce phénomène au Pakistan et pour l'éliminer. La commission a également noté qu'il reste encore un grand nombre de travailleurs adultes en servitude. Elle a prié le gouvernement de fournir des informations détaillées, comme demandé par la commission d'experts, sur les mesures prises pour assurer l'identification, la libération et la réinsertion de ces travailleurs. Enfin, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement de modifier la loi sur les services essentiels afin de la rendre conforme à la convention pour ce qui est du droit des travailleurs de quitter leur emploi moyennant un préavis raisonnable.
Une représentante gouvernementale du Pakistan a indiqué qu'elle appréciait les précieux conseils donnés par la présente commission dans le domaine de la promotion et la protection des droits inhérents au travail. En ce qui concerne l'application de la convention no 29, il convient de souligner quelques points. Depuis l'année passée, les lois nationales relatives au travail des enfants et au travail en servitude sont appliquées plus efficacement. L'enquête nationale sur le travail des enfants a été réalisée avec l'assistance technique du programme IPEC de l'OIT. Elle a permis d'établir clairement le nombre d'enfants qui travaillent et d'identifier les domaines dans lesquels une action planifiée et concertée pour éliminer le travail des enfants pouvait être entreprise. Le nombre d'inspections réalisées en vertu de la loi de 1992 sur l'abolition du système de travail en servitude et de la loi de 1991 sur l'emploi des enfants a considérablement augmenté. Du mois de juin 1995 au mois de juin 1997, 35 000 inspections ont été réalisées en application des lois relatives au travail des enfants. Plus de 9 000 inspections ont été effectuées conformément à la loi de 1991 sur l'emploi des enfants; 6 183 procédures judiciaires, qui ont abouti à 1 349 condamnations, ont été déclenchées. En vertu des autres lois relatives au travail des enfants, 24 695 inspections ont également été menées et ont abouti à 8 274 cas de poursuites et à 3 556 condamnations. Au regard du travail en servitude, 349 descentes ont eu lieu au Sindh et au Pendjab. D'après les chiffres fournis par la Commission des droits de l'homme du Pakistan - une ONG -, 1 000 travailleurs en servitude ont été libérés au cours de l'année passée. Des changements significatifs montrant la volonté du gouvernement d'appliquer la loi et de s'occuper des questions de travail des enfants et de travail en servitude sont intervenus. Ils comprennent l'élaboration de directives administratives claires ainsi que la mise au point de programmes dans les secteurs public et privé, en collaboration avec les partenaires sociaux. Des mesures sont également prises pour s'attaquer aux faiblesses du système, telles que le manque de ressources destinées à la réinsertion des travailleurs libérés. Enfin, le public prend de plus en plus conscience de l'importance de mettre un terme à ces problèmes.
Le gouvernement a ratifié cinq des sept conventions fondamentales de l'OIT. Il a déjà manifesté son intention de participer activement aux travaux sur l'élaboration du projet de convention sur l'élimination des formes les plus intolérables du travail des enfants. Il va sans dire que le Pakistan est un pays en développement confronté à une myriade de problèmes, dont certains sont profondément liés à la pauvreté et d'autres au milieu socioculturel. En outre, il doit faire face à des difficultés économiques dues à de multiples facteurs, tels qu'une dette publique écrasante, la présence, depuis plus de dix ans, d'un million et demi de réfugiés afghans qui fournissent une main-d'oeuvre abondante, ou encore une position géopolitique difficile. Trente-six pour cent de la population vit en deçà du seuil de pauvreté. En dépit de ces profonds obstacles, des efforts ont été faits pour respecter les obligations volontairement souscrites lors de la ratification des conventions de l'OIT. Le gouvernement a toujours pris très au sérieux les commentaires de la commission d'experts et de la Commission de la Conférence. Il souhaite poursuivre sa coopération avec ces deux organes, prendre note des critiques constructives qu'ils formulent, fournir des explications, reconnaître ses faiblesses et utiliser leurs commentaires pour permettre une meilleure application des lois nationales.
Le gouvernement du Premier ministre Nawaz Sharif est entré en fonctions en février 1997. L'engagement du nouveau gouvernement d'éliminer le travail en servitude ressort clairement du programme électoral établi en 1997 par la Ligue musulmane du Pakistan, parti auquel le Premier ministre appartient. Le vice-président des membres travailleurs au sein du Conseil d'administration en a du reste été clairement informé par le Premier ministre lors d'une visite effectuée au Pakistan à l'invitation de la Fédération des syndicats du Pakistan. Le gouvernement fédéral a créé une commission consultative sur le travail des enfants et le travail en servitude. Cette commission comprend des représentants des ministères du Travail, des Affaires étrangères et du Commerce et du secteur privé chargés de donner suite aux mesures adoptées et de fournir des conseils sur des programmes d'ensemble visant l'élimination du travail des enfants et du travail en servitude au Pakistan.
Il semble que l'observation de la commission d'experts se fonde largement sur les informations contenues dans le rapport d'Anti-Slavery International. Il convient toutefois de préciser que ce rapport date de 1995. Des améliorations sont intervenues depuis lors; la présente commission doit être informée que le gouvernement a engagé un dialogue constructif avec Anti-Slavery International au sein du Groupe de travail sur les formes contemporaines d'esclavage. Le gouvernement s'efforce de lui fournir autant d'informations que possible à l'égard des problèmes soulevés tant dans un cadre bilatéral qu'au sein du groupe de travail.
La commission d'experts mentionne le chiffre de 20 millions de travailleurs en servitude, dont 7 millions seraient des enfants. Ces chiffres sont complètement irréalistes. La Fédération des syndicats du Pakistan partage d'ailleurs cette appréciation. La question de l'ampleur du travail des enfants et du travail en servitude a été soulevée, il y a quelques années, lorsqu'une ONG a avancé ce chiffre de 20 millions. Sans qu'aucune vérification n'ait été faite, ce chiffre a été repris par quelques ONG internationales respectées et, malheureusement, par l'OIT. Pour évaluer l'étendue du problème, le gouvernement a conclu un arrangement avec l'OIT, dans le cadre du programme IPEC, pour qu'une étude sur le travail des enfants soit réalisée. Les résultats de cette enquête menée sur de solides bases scientifiques et statistiques ont été publiés. Selon l'enquête, il existe entre 2,7 et 3,3 millions d'enfants qui travaillent. S'il y avait vraiment 20 millions de travailleurs en servitude au Pakistan, cela signifierait qu'environ 60 pour cent des 33,87 millions de travailleurs seraient soumis à un régime de servitude, ce qui est absolument impossible. La Commission des droits de l'homme du Pakistan (HRCP) a établi une liste de 3 000 travailleurs en servitude dans la Province du Sindh. Cette liste permet de conclure que, logiquement, il ne devrait pas y avoir plus de quelques milliers de travailleurs en servitude au Pakistan. La HRCP est une ONG indépendante qui s'est toujours révélée prompte à signaler et à agir à l'égard de toutes les violations qu'elle a pu constater dans les domaines de la promotion et de la protection des droits de l'homme au Pakistan. Elle est également très engagée en ce qui concerne l'identification et la libération des travailleurs en servitude. La HRCP peut ne pas avoir été en mesure d'identifier tous les travailleurs en servitude au Sindh. Il est également possible que cette pratique se soit étendue à quelques régions du Pendjab. Mais, en aucun cas, il n'est possible d'arriver à ce chiffre de 20 millions. Toutefois, ici, ce ne sont pas les chiffres qui sont importants. On ne doit et ne devrait jamais tolérer cette ignoble pratique, même si elle ne concernait qu'un seul individu. Sur la base des informations fournies par la HRCP, des descentes ont été effectuées, au cours de l'année dernière, par l'administration du district du Sindh. Lors de ces descentes, les représentants de la HRCP étaient accompagnés d'un fonctionnaire du ministère des Droits de l'homme. Environ 1 000 travailleurs en servitude ont été libérés.
Anti-Slavery International a fait un certain nombre de commentaires sur les instruments légaux et les mécanismes visant à éliminer le travail en servitude. Certains méritent d'être soulignés. Afin d'améliorer l'application, par les gouvernements des provinces, de la loi de 1991 sur l'emploi des enfants et de la loi de 1992 sur l'abolition du système de travail en servitude, un règlement d'application a été élaboré et notifié en 1995 avec l'assistance du programme IPEC de l'OIT. Le gouvernement de la Province frontalière du Nord-Ouest a adopté une directive, en date du 31 mai 1995, ordonnant, en vertu de l'article 9 de la loi de 1992 sur l'abolition du système de travail en servitude, à tous les magistrats de districts d'assurer le respect des dispositions de cette loi. En vertu de l'article 16 de la même loi de 1992, il a également adopté une autre directive, au mois de juin de cette année. Celle-ci donne pouvoir à tous les magistrats de première classe d'instruire les infractions à la loi de 1992. Les magistrats des gouvernements du Balouchistan et du Pendjab ont reçu la même habilitation. Le gouvernement du Sindh a également ordonné à tous les magistrats de districts adjoints de s'occuper des cas de travail en servitude. Dans quatre provinces, des comités de vigilance ont été constitués au niveau du district, conformément à la loi de 1992. Certains de ces comités ne sont pas très efficaces et devraient sans aucun doute être réorganisés. Il n'en reste pas moins qu'ils établissent dans toutes les provinces un cadre institutionnel permettant d'enquêter sur les cas de travail en servitude. Des efforts sont entrepris pour améliorer le fonctionnement de ces comités sous le contrôle des départements de l'intérieur des provinces. En outre, un système permettant d'évaluer le fonctionnement de ces comités a été mis en place. Des évaluations sont fréquemment réalisées au cours des réunions interministérielles et interprovinces. Le gouvernement apprécierait l'assistance du BIT pour revoir le fonctionnement de ces comités.
En ce qui concerne la réinsertion des travailleurs libérés, la règle no 9 prévoit la création d'un fonds destiné à financer des projets de réinsertion et de formation des travailleurs libérés. Conformément à cette règle, le fonds est alimenté par les contributions du gouvernement fédéral et du gouvernement de la province. Le gouvernement a l'intention d'accorder des crédits à cette fin. La signature, le 21 mai 1997, d'un accord avec la Commission de l'Union européenne et l'OIT pour mettre en oeuvre un programme destiné à éliminer le travail des enfants en servitude témoigne une fois de plus de l'engagement du nouveau gouvernement dans ce domaine. Ce programme d'une durée de deux ans dispose d'un budget de 2,2 millions de dollars des Etats-Unis. Il est destiné à sensibiliser le public sur les pratiques dangereuses d'exploitation des enfants en servitude, à renforcer la capacité de l'administration, des organisations d'employeurs et de travailleurs et des ONG de sauver des enfants asservis, et à empêcher que les enfants n'entrent à leur tour en servitude. Ce programme vise à protéger un petit groupe d'enfants et leurs familles et met l'accent sur les activités alternatives de réinsertion. Il prévoit, par exemple, la création de 18 centres communautaires d'éducation et d'action à travers tout le pays. Ces centres ont pour but de réinsérer les enfants dans des secteurs particuliers de l'économie, de les libérer de la servitude et d'empêcher leurs jeunes frères et soeurs d'y tomber. Il vise également à renforcer la capacité de fournir des services aux travailleurs libérés aux organismes suivants: Bait-ul-Mal du Pakistan (PBM) et ses fonctionnaires, le Conseil communautaire d'alphabétisation du Bunyad, le Comité de l'association des pédiatres pakistanais contre les abus commis sur des enfants et la Commission des droits de l'homme du Pakistan.
Le gouvernement a adopté des mesures visant à informer le public sur le travail en servitude. A cette fin, la Direction de l'éducation ouvrière du ministère du Travail a publié la loi de 1992 et les règles adoptées en 1995 en urdu. Le ministère du Bien-être social a préparé un projet qui prévoit un programme de quatre ans en vue d'informer le public sur le travail des enfants et le travail en servitude grâce à des médias électroniques. La liberté de la presse ainsi que les divers programmes lancés dans le cadre du programme IPEC ont contribué à éveiller la conscience du public dans ce domaine. Le gouvernement est également en train de mettre au point un programme de sensibilisation en collaboration avec l'AUSAID.
La référence, dans le rapport d'Anti-Slavery International, au recours intenté devant les tribunaux de la charia sur la légalité des articles 6 et 8 de la loi de 1992 est correcte. Toutefois, en 1988, la Cour suprême a déclaré le travail en servitude inconstitutionnel car il est contraire aux dispositions de l'article 11 de la Constitution. L'arrêt de la Cour suprême permet de poursuivre l'application de la loi de 1992.
Au cours de l'année dernière, plusieurs mesures concrètes ont été prises par le gouvernement et le secteur privé. Il s'agit, par exemple, de l'accord de Sialkot signé en février 1997 par la Chambre de commerce et d'industrie de Sialkot, l'OIT et l'UNICEF dans le but d'éliminer le travail des enfants dans l'industrie des ballons de football dans un délai de dix-huit mois suivant la signature de l'accord. Cet accord a mis en place un programme destiné à aider les fabricants et les entreprises d'assemblage de ballons de football à identifier et retirer les enfants des usines et à leur fournir une éducation ainsi que d'autres opportunités. De plus, une ONG, la Fondation pour les soins à donner aux enfants (CCF), a été créée au niveau national pour s'occuper des questions du travail des enfants. Le comité de direction de la CCF comprend des représentants du ministère du Travail, de l'UNICEF et de la HRCP. Il a mis en place un sous-comité chargé de préparer des projets pour établir un système fiable et durable de surveillance du travail des enfants au Pakistan. Ce système devrait commencer à fonctionner à la fin de l'été 1997. De plus, un certain nombre d'initiatives ont été prises par le secteur privé dans le domaine de la certification internationale des produits. Rugmark International, STEP, Care and Fair et Qualité France travaillent activement pour établir des systèmes de certification et mettre en place des projets destinés aux enfants. La Fondation Rugmark et les exportateurs de tapis sont sur le point de conclure un accord pour mettre en oeuvre ce système. Enfin, l'Association des fabricants et des exportateurs de tapis du Pakistan (PCMEA) a créé, dans les zones de fabrication de tapis de la région de Lahore, six écoles dans lesquelles les rudiments de la lecture et de l'écriture sont enseignés à près de 600 enfants. Les membres de la PCMEA gèrent également dix dispensaires dans les zones où les tapis sont fabriqués. La Chambre de commerce de Sialkot a créé un certain nombre d'écoles, de dispensaires et d'instituts de formation pour les enfants travaillant dans l'industrie du ballon de football. Toutes ces mesures illustrent non seulement l'engagement du gouvernement, mais également celui du public, des syndicats, des ONG et des employeurs pour combattre et éliminer le phénomène du travail des enfants en servitude au Pakistan.
Le gouvernement a également pris d'autres initiatives pour éliminer le travail des enfants, telles que, par exemple, la création de 27 centres d'insertion par Bait-ul-Mal du Pakistan. En outre, le Pakistan est particulièrement impliqué dans l'établissement d'un calendrier pour l'élimination du travail des enfants en Asie du Sud. La troisième Conférence SAARC sur les enfants en Asie du Sud, qui s'est tenue au Pakistan, s'est fixé comme objectif d'avoir éliminé le travail des enfants dans la région en 2005. Enfin, comme mentionné précédemment, le nombre des inspections a beaucoup augmenté. Des cours de formation ont été organisés pour permettre aux inspecteurs d'améliorer la méthodologie utilisée ainsi que leurs qualifications professionnelles afin qu'ils soient en mesure d'appliquer la loi plus efficacement.
Sur la question des restrictions à la liberté de quitter son emploi et la demande faite au gouvernement par la commission d'experts de prendre les mesures nécessaires pour se conformer à la convention no 29 sur ce point, le champ d'application de la loi sur les services essentiels a été réduit. Alors que cette loi couvrait neuf établissements ou catégories professionnelles en 1995, elle ne s'applique plus qu'à six catégories d'établissements qui sont considérés comme particulièrement importants pour la sécurité du pays et le bien-être de la communauté, à savoir: i) la production, la transmission, la distribution et la fourniture d'électricité; ii) certains organismes pétroliers et gaziers dont le nombre a été réduit de 17 à 9; iii) la société imprimant les titres et autres documents officiels du Pakistan à Karachi; iv) les laboratoires de recherche Kahuta; v) la Direction de l'aviation civile; et vi) le port de Karachi et la Direction de Port Qasim.
Les membres travailleurs ont indiqué qu'ils se concentreraient sur les parties I et II de l'observation formulée par la commission d'experts. En ce qui concerne la partie III - restriction à la liberté de quitter son emploi -, ils ont estimé que les conclusions de la commission l'année dernière doivent être reprises. Bien que le représentant gouvernemental ait indiqué que des progrès ont été réalisés à cet égard, il ressort de ses commentaires que des restictions continuent d'être encore imposées pour certains groupes de travailleurs en ce qui concerne la possiblité de quitter leur emploi. La commission doit de nouveau mettre cette question en exergue.
Les membres travailleurs ont observé que ce cas avait été soumis à la commission à de nombreuses reprises et qu'à chaque fois la commission avait demandé que des progrès substantiels soient réalisés. En l'espèce, ce n'est pas la législation mais son application effective qui pose problème. Le travail en servitude est répandu dans de nombreux secteurs de l'économie au Pakistan, notamment dans l'industrie de la briqueterie, de la construction, des articles de sport et dans la production de tapis tissés. Bien que la Constitution nationale interdise le travail en servitude et, en dépit du fait qu'il a été aboli aux termes de la loi sur l'abolition du travail en servitude, celui-ci est fréquent. L'un des aspects les plus répugnants de la servitude pour dettes se pratique dans l'agriculture qui est encore largement informelle et non réglementée. Les propriétaires fonciers exercent une influence considérable sur les fonctionnaires des impôts et autres fonctionnaires locaux. Dans les cas où les parents sont forcés de rembourser leur dette par le travail, leurs enfants sont souvent pris au piège du travail en servitude. Souvent les parents contractent un emprunt pour faire face à des besoins urgents et doivent ensuite rembourser leur dette par du travail. Dans la pratique, la dette ne se résorbe jamais; bien au contraire, elle s'accroît. C'est ainsi que tous les membres de la famille, y compris les enfants, doivent participer au remboursement de la dette accumulée. Dans l'agriculture, dans certains cas, les métayers et leur famille sont surveillés étroitement - 24 heures sur 24 - afin de les empêcher de fuir et, dans les cas les plus graves, sont enfermés dans des prisons privées et portent des fers aux pieds quand ils vont travailler dans les champs. Les preuves abondent sur le harcèlement sexuel que subissent les femmes.
Le gouvernement ne niant pas que le problème existe, les membres travailleurs ont demandé quels programmes avaient été mis en oeuvre pour rendre conscients les travailleurs en servitude du fait qu'ils n'ont pas d'obligation par rapport à leur dette. En ce qui concerne la mise en oeuvre de la loi, selon la législation, les magistrats de districts ont le pouvoir de veiller à ce que les dispositions de la loi sur l'abolition du travail forcé soient correctement appliquées par le biais de contrôles d'investigation et d'inspections. Ils sont également habilités à constituer des comités de vigilance. Les règles de ces comités sont spécifiques et énumèrent 18 catégories de personnes qui peuvent en faire partie. Les organisations représentatives de travailleurs ne disposent que d'un seul siège. Dans les faits, de tels comités sont composés essentiellement de notables locaux, y compris d'employeurs qui, eux-mêmes, ont recours au travail en servitude.
Les membres travailleurs ont demandé quels changements ont été introduits par le gouvernement depuis l'année dernière - lorsque la commission d'experts a exprimé l'espoir que le gouvernement soit en mesure de faire état de progrès concernant l'efficacité et la représentativité de ces comités. Qu'a-t-il fait concrètement pour améliorer le taux des mesures de détection et de visites d'inspection? Combien de procès ont véritablement eu lieu et quelles ont été les sanctions infligées? Le faible taux de poursuites a été noté: quelles en sont les raisons? Rien ne sert d'avoir une législation conforme à la convention si celle-ci n'est pas appliquée et mise en oeuvre énergiquement.
En ce qui concerne la libération et la réinsertion de travailleurs en servitude, les membres travailleurs ont déclaré que le règlement d'application de la loi publié en 1995 ne donne aucune indication sur les procédures visant à permettre la libération des travailleurs. La représentante gouvernementale a affirmé que son gouvernement a l'intention d'allouer des ressources à la création et au soutien de programmes d'aide aux travailleurs libérés du travail en servitude. Il semble toutefois qu'aucune ressource n'ait été affectée dans la pratique pour la réinsertion des travailleurs en servitude. Les statistiques communiquées par la représentante gouvernementale ne sont pas à la hauteur du nombre de personnes concernées. Suite à l'absence d'aide à la réinsertion, nombre de travailleurs libérés ne peuvent que retomber en servitude.
Les membres travailleurs ont noté que la loi de 1992 a été contestée devant le tribunal islamique par le propriétaire d'une briqueterie de céramique. Ils ont pris note des commentaires de la représentante gouvernementale sur cette affaire, mais ont estimé que les faits semblent prouver que les employeurs tirent parti de l'incertitude légale créée par ce cas puisque aucun jugement n'est encore intervenu. Ils ont demandé ce qu'avait fait le gouvernement pour mettre fin à cette confusion légale et ont estimé que ce cas constitue une tentative directe de passer outre aux exigences de la législation nationale.
Dans son observation, la commission d'experts affirme qu'aucun progrès de substance n'a été accompli en ce qui concerne l'application de la convention dans la pratique. Il existe toutefois un exemple de progrès. Il s'agit de l'accord de Sialkot. Les membres travailleurs se réjouissent de ce développement. Ils reconnaissent que ce progrès est un exemple de ce que les organisations syndicales, les employeurs, le gouvernement et les ONG peuvent accomplir ensemble, même s'il n'affecte qu'un secteur d'exportation restreint. Les membres travailleurs se félicitent également des treize projets mis sur pied grâce au programme IPEC et à la collaboration du BIT. Ils ont exhorté le gouvernement à continuer cette tâche avec une énergie renouvelée afin que des progrès durables et significatifs puissent être rapportés.
En conclusion, les membres travailleurs ont prié le gouvernement de s'engager à suivre les recommandations détaillées, figurant aux paragraphes 13 et 14 de l'observation de la commission d'experts, sur les mesures citées au paragraphe 15 qui doivent être prises pour appliquer la convention. Ils se sont référés, en particulier, aux recommandations relatives au lancement d'une campagne d'information publique conçue pour s'attaquer aux mentalités ainsi que pour fournir des informations sur la législation en vigueur; à l'établissement d'un programme intégré d'action juridique et sociale aux niveaux national, provincial et des districts afin que les affaires en instance ne puissent plus être invoquées comme prétexte pour ignorer l'application de la loi; et à un financement accru des comités de vigilance et à un renforcement de leur compétence. Ils ont également appelé le gouvernement à fournir une aide pratique et une assistance aux personnes libérées du travail en servitude; à accroître les ressources affectées à l'éducation; et à mettre fin au harcèlement et à la répression des militants faisant campagne contre le travail en servitude. La commission d'experts a exprimé l'espoir que les mesures nécessaires seront prises pour assurer la mise en oeuvre effective de la loi de 1992. Les membres ont prié le gouvernement de prendre l'engagement de les suivre.
Les membres travailleurs ont également mentionné le fait que le gouvernement n'avait pas répondu à plusieurs points soulevés par la commission d'experts dans son observation - y compris les commentaires présentés par la Fédération pakistanaise des syndicats (All Pakistan Federation of Trade Unions).
Les membres employeurs ont noté avec regret que ce cas a été discuté 11 fois depuis 1981. Bien qu'il apparaisse que l'ampleur du problème du travail forcé et du travail forcé des enfants a pu être exagérée, il reste néanmoins un problème significatif que l'on ne peut pas minimiser, particulièrement dans les briqueteries. Les statistiques et les informations qui ont été fournies par la représentante gouvernementale doivent être analysées par la commission d'experts. Cependant, il ne s'agit pas d'un manque d'information de la part du gouvernement. On peut seulement exprimer le ferme espoir que le gouvernement prenne rapidement des mesures concrètes et précises pour éradiquer le travail forcé et le travail des enfants.
En 1992, la loi sur l'abolition du travail forcé a donné aux magistrats de district le pouvoir d'appliquer la loi et a autorisé les comités de vigilance à soutenir les magistrats dans leurs efforts d'identification, de libération et de réhabilitation des personnes en servitude pour dettes. Malheureusement, pendant les trois dernières années, la loi n'a pas été appliquée du tout. En effet, depuis 1995, certaines mesures ont été prises par le gouvernement central pour déléguer des pouvoirs spéciaux aux magistrats de district, y compris des instructions pour établir des comités de vigilance. L'un des aspects du règlement d'application de 1995 est la relative faiblesse des règles sur la réhabilitation des personnes victimes du travail forcé. C'est pourquoi des informations spécifiques et détaillées sur l'application de ces programmes doivent être communiquées au BIT. Les membres employeurs ont eu confirmation du nombre de travailleurs libérés, mais aucune information sur le succès ou l'échec du programme de réhabilitation. Apparemment, les fonctionnaires locaux n'appliquent pas la loi. De plus, peu de comités de vigilance ont été établis; en outre, lorsqu'ils le sont, ils n'agissent pas conformément à la loi. Enfin, les juges n'ont pas les pouvoirs nécessaires et n'ont pas compétence.
Les membres employeurs ont indiqué que ces problèmes devaient être corrigés. Il apparaît que le gouvernement se penche actuellement sur la question du travail forcé et du travail forcé des enfants dans le cadre de comités, par des enquêtes et l'engagement d'assurer l'éducation primaire; ces efforts doivent être encouragés. Le gouvernement doit également clarifier les circonstances dans lesquelles un enfant est considéré comme recruté volontairement. Toutefois, il y a également des indications selon lesquelles le gouvernement n'applique pas effectivement les dispositions de la loi. Cela encourage la servitude pour dettes. Des preuves existent également selon lesquelles les activistes oeuvrant contre le travail en servitude sont victimes d'arrestations et de harcèlement. Il y a donc urgence à assurer une application effective de la loi sur l'abolition du travail en servitude. Cela doit figurer dans les conclusions de la commission en des termes forts.
Enfin, il existe un autre problème, celui des travailleurs fédéraux qui ne peuvent mettre fin à leur contrat sans le consentement de l'employeur, en vertu de la loi sur les services essentiels du Pakistan, même si le contrat de travail en dispose autrement. Il s'agit là d'une forme de travail forcé. Depuis plusieurs années, le gouvernement indique qu'il abrogera cette loi qui a été adoptée en 1952. De plus, il indique, année après année, que cette loi s'applique seulement à certains services essentiels et catégories de travailleurs dont la liste fait l'objet d'une révision régulière et est constamment réduite. Il s'agit d'une violation manifeste de la convention. Cette loi doit être amendée d'urgence pour la mettre en conformité avec la convention et éliminer les restrictions à la liberté des travailleurs de quitter leur emploi.
Le membre travailleur du Pakistan a indiqué que les enfants sont l'avenir de toutes nations et que, si les enfants sont menacés, la nation le sera également. Au Pakistan, la prévalence du système féodal n'a pas permis le développement des structures économiques et sociales. Il a souligné qu'en plus des commissions de surveillance le gouvernement devrait s'engager à allouer des ressources pour l'éducation et les questions sociales. Pour mettre en oeuvre ces mesures, un programme national d'action est nécessaire. Des mesures doivent être prises pour lutter contre les causes sous-jacentes de la pauvreté. De plus, des aides financières doivent être données aux familles pauvres pour les inciter à envoyer leurs enfants à l'école. L'orateur reconnaît toutefois que le nouveau gouvernement qui vient d'être constitué s'est engagé à prendre des mesures concrètes. Il serait souhaitable que le gouvernement fasse également recours à l'assistance technique du BIT.
Le mouvement ouvrier au Pakistan exerce une pression sur les politiciens afin que des ressources soient allouées à l'éducation et à la formation des enfants. La pauvreté des parents ne doit pas priver les enfants de leur droit fondamental au plein développement physique, mental et spirituel en rendant inaccessibles les véritables institutions d'éducation. L'orateur a informé la commission que des développements positifs ont été réalisés grâce à la coopération du BIT, incluant: la conclusion d'une entente entre le BIT, l'UNICEF, la Chambre de commerce et d'industrie de Sialkot (Province du Punjab) en vue de la réhabilitation des enfants oeuvrant dans l'industrie des ballons de football; et la constitution de la Fondation Rugmark visant à l'éradication du travail des enfants dans l'industrie du tapis ainsi que leur éducation, formation et réhabilitation. Il a indiqué que le mouvement syndical a aussi contribué à éveiller la conscience sociale à l'égard du mal que constitue le travail forcé des enfants et à assurer le succès de ces deux initiatives, par son appui financier symbolique. L'orateur a prié instamment le gouvernement de supprimer la loi sur les services essentiels et de mettre sa législation nationale en conformité avec les dispositions des conventions nos 29 et 87 et avec les recommandations formulées par la mission technique du BIT au Pakistan. En outre, il a pressé le gouvernement de retirer les récents amendements à l'ordonnance de 1996 sur le secteur des banques (tribunaux spéciaux) qui, en rendant inéligible une personne sans emploi à un poste de dirigeant syndical, viole les principes de la liberté syndicale.
Le membre travailleur de la Turquie a relevé que le rapport du gouvernement concernant les cas de travail en servitude découverts par les autorités n'est pas convaincant. Le rapport de 1995 de la Commission des droits de l'homme du Pakistan a considéré que le nombre d'enfants qui travaillent peut être raisonnablement estimé entre 11 et 12 millions. Selon ce même rapport, au moins la moitié de ces enfants ont moins de 10 ans. Leur salaire représente en moyenne le tiers du salaire d'un travailleur adulte; leur entrée sur le marché du travail a des répercussions négatives sur le salaire de leurs parents. C'est dire que le travail de l'enfant ne contribue pas à la solution du problème de la pauvreté des familles, mais plutôt l'exacerbe. De plus, l'idée selon laquelle les enfants pakistanais ont traditionnellement travaillé dans leur famille n'est plus de nos jours pertinente. En effet, jusque dans les années soixante, les enfants travaillaient rarement en dehors de la famille. Le système actuel de travail en servitude s'est développé à partir de ces années, alors que les pouvoirs publics s'efforçaient d'élargir l'infrastructure industrielle. Cela a donc conduit à une augmentation importante du nombre d'enfants travaillant en tant que salariés.
L'orateur a demandé des informations au représentant gouvernemental sur les points suivants: le nombre d'inspecteurs du travail au Pakistan; la législation concernant le droit des travailleurs à domicile; le niveau du secteur informel; si les membres de la Fondation pour la libération du travail en servitude ont fait l'objet de poursuites ou sont libres de mener leurs activités; si l'assassin d'Iqbal Masih a été arrêté; quel est le taux de scolarisation des enfants de moins de 15 ans et s'il y a eu une amélioration depuis la promulgation de la loi de 1992; enfin, si des sanctions ont été appliquées aux magistrats des districts qui ne respectent pas leurs obligations en vertu de la loi de 1992.
Le membre travailleur de l'Inde a rappelé que le gouvernement a ratifié la convention en 1957 et a souligné que pendant quarante années son application a été absolument inadéquate. Bien qu'il reconnaisse qu'il n'est pas facile d'éliminer ce problème, des mesures doivent être prises progressivement. Par exemple, l'existence de comités de vigilance n'est pas suffisante, car leurs travaux doivent être contrôlés. De plus, il faut trouver une solution aux problèmes posés par les travailleurs en servitude libérés puisque très souvent, comme en Inde, ces travailleurs retombent en servitude six à huit mois plus tard. Il n'est pas vrai que le problème puisse être réglé d'ici 2005, comme il a été mentionné, puisqu'il existe depuis plusieurs siècles. Le programme IPEC se limite à sensibiliser l'opinion sur le problème. Cependant, des mécanismes pour éliminer le travail en servitude doivent être établis au niveau national.
Le membre travailleur de la Nouvelle-Zélande a souligné que l'observation de la commission d'experts montre qu'il y a eu peu, voire aucun, progrès depuis l'année dernière. Les commentaires de la commission d'experts font apparaître clairement que de nombreux cas de travail en servitude des enfants sont dus à l'endettement et à la servitude des parents et de toute la famille. Cette conclusion est inévitable: tant que perdure la servitude pour dettes des adultes, persistera celle des enfants. En ce qui concerne le travail en servitude des adultes, la commission d'experts a souligné que le gouvernement a omis de procéder aux campagnes d'information systématiques et exhaustives nécessaires sur les droits des travailleurs en servitude. En outre, le gouvernement n'a pas adopté les mesures nécessaires pour assurer la pleine application de la loi sur l'abolition du travail en servitude pour assurer, de manière appropriée, la réhabilitation des travailleurs libérés et pour interdire que les activistes oeuvrant à l'identification et à la libération des travailleurs en servitude ne fassent l'objet de harcèlement.
Une grande partie des informations contenues dans l'observation de la commission d'experts sont choquantes, notamment en ce qui concerne les points suivants: l'absence de solutions rapides aux attaques juridiques contre la loi faites par des employeurs de travailleurs en servitude, ce qui leur permet de prétendre que la loi n'est pas applicable; la participation des employeurs de travailleurs en servitude dans certains comités de vigilance; et le fait que près de 2 000 cas présentés par des victimes du travail en servitude sur la base de la loi entre mars 1992 et 1995 ont été rejetés par les tribunaux au motif qu'ils ne sont pas compétents. Dans ce contexte, le gouvernement doit lancer une vaste campagne d'information pour permettre aux travailleurs en servitude de prendre conscience de leurs droits et pour que les employeurs soient informés de leurs responsabilités. De plus, le gouvernement doit lancer une campagne globale intégrant des actions légales et sociales. Enfin, le gouvernement doit s'employer à mettre fin au harcèlement des activistes oeuvrant pour la libération des travailleurs en servitude.
Le membre travailleur de l'Italie a souligné que la documentation rassemblée par la commission d'experts montrait l'ampleur de cette situation particulièrement choquante: les lois existent, mais elles ne sont pas appliquées, sinon localement par certains magistrats ou grâce à l'action de groupes de libération des travailleurs en servitude. L'enracinement du travail en servitude dans les réalités socio-économiques exige des changements en profondeur. La déclaration du représentant gouvernemental semble aller dans le bon sens. Mais les autorités devraient cesser d'entraver l'action des ONG telles que le Front de libération de la main-d'oeuvre en servitude. Des représentants de cette ONG ont récemment été invités à témoigner en Italie: trop souvent, ont-ils dit, les travailleurs libérés tombent à nouveau en servitude pour échapper à la misère. La lutte contre le travail en servitude devrait faire l'objet d'un vaste programme intégré sur le modèle de l'IPEC.
Le membre travailleur de la Grèce a fait observer qu'il était inexact de déclarer que la situation ne serait connue que par des informations émanant d'ONG: elle est longuement décrite tout au long de treize pages du rapport de la commission d'experts, et il est trop facile de prétendre que les ONG exagèrent l'ampleur de ce phénomène criminel. Evoquer le colonialisme ne peut servir à justifier l'esclavage d'adultes et d'enfants. Mettre fin à cette situation est également de la responsabilité des pays développés: on devrait pouvoir, dans le cadre de l'OMC, trouver un procédé indiquant la provenance et les conditions de fabrication des produits, et les consommateurs rejetteraient alors les produits du travail forcé. Il ne faut pas accabler le nouveau gouvernement dont on ne connaît pas encore les intentions exactes, mais ce cas doit être suivi de près pour vérifier s'il a la volonté réelle de combattre l'exploitation ou si ses déclarations sont vouées à rester sans suite.
La représentante gouvernementale a remercié tous les intervenants et a indiqué que leurs commentaires seront transmis au gouvernement. Elle a assuré la commission qu'un rapport écrit et détaillé sera communiqué à la commission d'experts. En ce qui concerne les allégations sur le peu de progrès en matière d'inspection, elle a souligné que plus de 35 000 inspections ont eu lieu cette année comparativement aux 6 800 de l'année dernière. Cependant, s'il est vrai que le nombre de 1 000 travailleurs libérés l'année dernière n'est pas important, le nombre de 20 millions de travailleurs en servitude n'est pas réaliste. L'oratrice a noté que tant les comités de vigilance que le règlement de 1995 pris en application de la loi sur la libération et la réhabilitation des travailleurs asservis libérés ont été l'objet de critiques. Toutefois, ce règlement a été élaboré avec l'assistance technique du BIT. Finalement, en ce qui concerne les critiques faites au gouvernement depuis 1957 sur l'application de la convention qui n'est toujours pas mise en oeuvre, elle a souligné que, bien qu'il soit vrai que la convention ne soit pas complètement appliquée, la loi sur l'abolition du travail en servitude n'est en vigueur que depuis cinq ans.
Les membres travailleurs ont indiqué qu'il leur était difficile d'évaluer l'ensemble des informations communiquées par la représentante gouvernementale. Toutefois, ils ont insisté sur le fait que le taux de condamnation des personnes ayant recours au travail en servitude était relativement faible et qu'aucune information n'avait été fournie par le gouvernement sur les sanctions infligées aux coupables. Ils ont également insisté sur le fait que c'est un problème urgent, important et largement répandu. Ils ont regretté de ne pas avoir entendu la représentante gouvernementale s'engager à mettre en oeuvre les recommandations formulées par la commission d'experts dans les paragraphes 13, 14, 15 et 16 de son rapport. Ils ont demandé au gouvernement d'inclure, aux niveaux local et régional, des représentants des organisations d'employeurs et de travailleurs ainsi que des organisations non gouvernementales oeuvrant à l'élimination du travail en servitude dans le mécanisme de contrôle de l'application de la loi de 1992 sur l'abolition du travail en servitude.
Le membre travailleur du Pakistan a insisté sur le fait que ce problème doit être la première préoccupation du gouvernement. En outre, il a insisté sur le fait que le chiffre avancé par Anti-Slavery International en ce qui concerne les personnes soumises au travail est erroné. Comment, dans une ère moderne d'information et au sein d'un pays démocratique, peut-on affirmer que deux tiers de la force ouvrière est soumise au travail forcé? Toutefois, un tel fléau doit être éliminé aussi vite que possible. Cela nécessite une volonté politique ferme et l'allocation des ressources financières et sociales nécessaires. La peine pour un tel crime doit être suffisamment dissuasive. Il ajoute que le gouvernement doit fournir une assistance juridique aux personnes en servitude puisqu'elles n'ont pas les moyens d'entreprendre des actions légales.
La commission a pris note des informations détaillées fournies par la représentante gouvernementale et du large débat qui s'en est suivi. La commission a également noté que le gouvernement avait adopté un certain nombre de mesures visant à éliminer le travail forcé et qu'il avait reçu l'assistance technique du BIT et de l'IPEC, pour l'élimination du travail des enfants, notamment. La commission a relevé que le gouvernement considérait que les estimations sur le nombre de travailleurs en servitude sont exagérées. La commission a constaté avec préoccupation qu'un grand nombre de questions restaient en suspens en ce qui concerne les effets pratiques des mesures adoptées jusqu'à présent afin de résoudre ce cas dont elle traite depuis longtemps. La commission a exprimé l'espoir que le nouveau gouvernement aurait recours à l'assistance technique du BIT, qu'il poursuivrait ses efforts de manière continue pour abolir effectivement cette pratique inacceptable et qu'il examinerait la possibilité de demander l'envoi d'une mission de contacts directs. La commission a prié instamment le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des réponses complètes et détaillées sur chacun des points soulevés par la commission d'experts, dans l'attente de pouvoir constater des progrès concrets dès l'année prochaine.
Un représentant gouvernemental a souhaité rappeler le caractère interdépendant des différents problèmes dus à la pauvreté, qui n'est certes pas une excuse pour le travail asservi, mais permet de placer les mesures requises dans une perspective plus large. En ce qui concerne le travail des enfants, il s'agit d'un problème qui n'a pas au Pakistan une plus grande incidence que dans d'autres pays en développement. Le chiffre de 20 millions d'enfants au travail qui a été avancé par une ONG est exagéré, sans fondement et n'a pu être vérifié. Dans le cadre d'un accord avec le Programme international pour l'abolition du travail des enfants (IPEC) de l'OIT, une étude a été entreprise au Pakistan pour établir la réelle dimension du problème. Les résultats de cette étude qui, avec un certain retard, devraient être disponibles d'ici quelques mois seront fournis à l'OIT.
L'estimation du nombre des enfants au travail peut être établie de la manière suivante. La population totale du Pakistan est estimée à 128 010 000, dont 22 610 000 dans le groupe d'âge des 5-9 ans et 15 940 000 dans le groupe d'âge des 10-14 ans, soit un total d'enfants dans le groupe d'âge de 5 à 14 ans de 38 550 000. Selon l'enquête de main-d'oeuvre 1991-92, le taux de participation à l'activité des 10-14 ans était de 26,97 pour cent, ce qui signifie que les enfants au travail dans cette classe d'âge étaient au nombre de 4 300 000. Le taux de scolarité des 5-9 ans était de 71 pour cent selon l'étude économique de 1994-95, ce qui signifie que 16 050 000 enfants de cette classe d'âge étaient à l'école, tandis que 6 560 000 n'y étaient pas. Parmi ces derniers, 5 030 000 étaient des filles et 1 530 000 des garçons. Compte tenu des pratiques traditionnelles, le travail est bien moins fréquent chez les filles, ce qui permet d'en déduire qu'environ 2 millions d'enfants (les filles restantes s'ajoutant aux 1 530 000 garçons) de la classe d'âge 5-9 ans pouvaient participer à une forme de travail, et surtout à un travail à temps partiel ou dans le secteur informel. Ainsi, ce sont au maximum 6 millions d'enfants (4 millions de 10-14 ans et 2 millions de 5-9 ans) qui peuvent se trouver au travail ou dans une forme d'activité économique.
En ce qui concerne les inspections visant le travail des enfants qui ont été spécialement recommandées par la commission d'experts, des progrès significatifs ont été enregistrés: entre janvier 1995 et mars 1996, 6 803 inspections ont été menées, 2 531 cas constatés et 774 condamnations à des amendes prononcées.
La réadaptation sociale des enfants affectés reste sans doute plus importante que les seules sanctions. Le gouvernement est conscient du caractère essentiel de l'éducation et accroît les ressources allouées au secteur de l'éducation dans ses plans de développement: de moins de 1 pour cent du PIB, la dépense dans ce domaine est passée à 2 pour cent au cours de ces dernières années et devrait atteindre 3 pour cent dans le cadre du prochain plan quinquennal.
Le gouvernement n'a pas d'objection de principe à la participation de représentants des syndicats aux comités de vigilance institués en vertu de l'article 15 de la loi de 1992 sur l'abolition du système de travail en servitude, dont les dispositions relatives à la composition des comités de vigilance devraient être modifiées à cet effet.
Il convient de rappeler qu'un seul cas de travailleur asservi a été identifié dans l'ensemble du pays entre 1992 et 1994. Huit inspections ont été conduites en application de la loi de 1992 par la Commission des droits de l'homme du Pakistan et l'administration de district de la province du Sindh, où le problème du travail asservi semble avoir la plus grande incidence.
Des rafles ont été menées contre des prétendues prisons privées: dans le district du Sanghar, le 17 novembre 1995, 96 personnes ont été libérées et le responsable a été inculpé en application de l'article 11 de la loi de 1992. Une autre prison privée du district d'Umerkot a fait l'objet de deux rafles le 1er juin 1995 et le 14 janvier 1996, permettant la libération de 70 personnes. Onze responsables ont été inculpés, dont deux ont été arrêtés, les autres étant laissés en liberté sous caution par la Haute Cour du Sindh et le tribunal d'instance d'Umerkot. Une autre rafle a encore été menée dans le district d'Umerkot par le juge sous-divisionnaire et l'adjoint au superintendant de la police, qui a permis la libération de dix familles de paysans et l'inculpation formelle du responsable. Dans les quatre cas, aucune preuve de travail asservi n'a pu être trouvée dans les locaux dont il était allégué qu'ils hébergeaient des travailleurs asservis.
Tous ces efforts démontrent amplement que le gouvernement est résolument déterminé à s'attaquer au problème des enfants en servitude et du travail asservi. S'il n'a pas été en mesure d'éliminer complètement ce phénomène, il est néanmoins clair qu'il progresse dans la bonne direction et que les résultats de son action seront visibles dans les années à venir.
En ce qui concerne les restrictions à la liberté de quitter son emploi, le champ d'application de la loi sur les services essentiels a encore été réduit depuis le dernier rapport. Des neuf catégories visées en 1995, la loi n'est plus applicable qu'aux catégories suivantes qui sont essentielles à la sécurité du pays et de la population: i) l'emploi dans les activités de production et de distribution de l'électricité; ii) l'emploi dans les entreprises pétrolières, dont le nombre a été réduit à 9 contre 17; iii) l'emploi dans les entreprises Pakistan Security Printing Corporation et Security Papers Ltd.; iv) l'emploi dans les laboratoires de recherche Kahuta; v) l'emploi dans l'Autorité de l'aviation civile; vi) l'emploi dans l'entreprise de fourniture d'électricité de Karachi; vii) l'emploi dans l'entreprise du port de Karachi et l'autorité du port de Qasim.
En conclusion, le travail et la servitude des enfants ne sont pas seulement une préoccupation de la présente commission, mais inquiètent plus gravement encore la nation pakistanaise. L'ampleur et la persistance du problème sont dues à la grande pauvreté de nombreux pays tels que le Pakistan. Les efforts doivent donc viser à offrir aux enfants un meilleur environnement et un meilleur avenir.
Les membres travailleurs ont rappelé que ce cas avait été examiné à sept reprises par la présente commission au cours des dix dernières années et donné lieu à l'adoption de paragraphes spéciaux en 1986, 1987 et 1989. Les quatre années écoulées depuis l'adoption de la loi de 1992 n'ont pas permis une réelle évaluation de son effectivité et de l'efficacité de sa mise en oeuvre. Il est exact que l'éradication du travail et de la servitude des enfants au Pakistan est un défi complexe pour tous les intéressés: les employeurs, les syndicats, les gouvernements central et provinciaux, l'ensemble des Pakistanais et également tous ceux qui, hors du Pakistan, consomment les produits du travail des enfants ou en tirent profit. On attendrait une riposte globale du gouvernement, mais c'est surtout le travail exceptionnel mené sur le terrain par de nombreuses ONG ainsi que par les syndicats qui doit être salué. Le problème que pose ce cas est de savoir si le gouvernement soutient, renforce et complète ces efforts dans le cadre d'un programme national concerté visant à assurer le respect de la convention. Les éléments dont disposent les membres travailleurs tendent à montrer que le gouvernement n'a jusqu'à présent pris que peu de mesures concrètes en application de ses propres lois concernant le travail forcé et la servitude des enfants. Il a consacré plus d'énergie à ceux qui oeuvrent pour la libération des travailleurs asservis, en l'occurrence le Front de libération du travail en servitude, qu'à appliquer les lois visant à supprimer ce type de travail. Les données sur les inspections et les poursuites fournies par le gouvernement tant dans son rapport que dans sa déclaration sont affligeantes.
La mise au point de la commission d'experts sur le manque de visibilité du travail des enfants, et en particulier du travail en servitude des enfants, et la différence entre travail des enfants et travail asservi des enfants aux fins de la convention qui figure aux paragraphes 4 et 5 de son observation est utile, tout comme la contribution concernant le Pakistan soumise au séminaire d'Islamabad qui y est citée. Certains pays en développement qui connaissent des problèmes de pauvreté ont un nombre limité d'enfants au travail, et la pauvreté ne saurait à elle seule expliquer ni excuser cette situation. Il n'est pas besoin de s'en tenir à un chiffre particulier pour considérer, sur la base de l'ensemble des éléments disponibles (y compris la déclaration du représentant gouvernemental), que le gouvernement sous-estime gravement l'ampleur du problème. Parler d'invisibilité signifie seulement que le gouvernement ne voit pas ce qu'il a choisi de ne pas regarder. Le problème ne réside pas dans l'absence de législation, comme le gouvernement l'a déjà affirmé dans le passé. Aussi audacieuses que soient ces lois, le gouvernement n'a pas assuré leur application effective et il a négligé d'informer les millions d'enfants au travail et de travailleurs asservis qu'ils étaient libres et libérés de leurs dettes. Le directeur de la Commission des droits de l'homme du Pakistan a pu déclarer que le gouvernement avait constamment refusé d'exécuter les lois qu'il promulguait, et qu'un pays disposant de plus de ressources et de possibilités judiciaires que la Chine, l'Inde ou l'Indonésie faisait pourtant moins que ces pays pour ses jeunes: le problème est bien celui de l'absence de volonté politique.
A certains égards, la situation du Pakistan a un caractère plus structurel et plus profondément enraciné que dans d'autres pays. Le gouvernement doit cependant être exhorté à donner impérativement la priorité au développement d'une campagne agressive associant l'ensemble des ministères et des administrations gouvernementales aux niveaux national, provincial et local, y compris les responsables du développement économique et rural, de l'éducation, de la santé, des femmes, du travail et, aussi et surtout, de la justice. On ne peut s'attendre à une amélioration sans que des sanctions systématiques et efficaces qui dissuadent de chercher à tirer profit du travail des enfants et du travail asservi soient appliquées sans relâche. Une telle campagne devrait comporter un effort national de publicité pour informer par tous les moyens disponibles les enfants au travail et les travailleurs asservis, enfants ou adultes, de leur droit inaliénable à la liberté sans sanction d'aucune sorte. Elle devrait également prévoir l'annulation par la loi de tout ou partie des dettes à l'origine de l'asservissement et s'accompagner de programmes et d'activités d'assistance des personnes libérées dans la reconquête de leur pleine autonomie. L'éducation devrait être étendue, le pourcentage du PIB qui lui est alloué étant particulièrement bas en comparaison de la plupart des autres pays. Des mesures en matière de santé seraient également nécessaires, y compris en matière de maîtrise des naissances. La croissance économique et le développement que connaît actuellement le Pakistan devraient bénéficier aux catégories les plus pauvres de la population telles que les populations rurales sur lesquelles pèse encore souvent un pouvoir féodal, si l'on en croit le Conseil des syndicats du Pakistan. L'association des représentants des syndicats, des organisations d'employeurs et des autres organisations intéressées est essentielle au succès de cette campagne, comme l'a suggéré la commission d'experts au paragraphe 13 de son observation. Les assurances fournies à cet égard par le représentant gouvernemental sont bienvenues et il faut espérer qu'elles se concrétiseront dans le rapport de l'année prochaine.
S'agissant des restrictions à la liberté de quitter son emploi, qui font également l'objet de discussions depuis de nombreuses années, la commission d'experts souligne fort justement au paragraphe 17 de son observation que les travailleurs doivent être libres de mettre fin à leur emploi sous réserve d'un préavis raisonnable. Un plein appui doit être apporté aux recommandations de la Fédération des syndicats du Pakistan sur la nécessité d'abroger la loi sur la continuité des services essentiels et rien ne justifie les atermoiements actuels.
En conclusion, les recommandations particulières faites par la commission d'experts aux paragraphes 13, 17 et 18 de son observation doivent être appuyées. La présente commission devrait demander au gouvernement: de faire cesser immédiatement le harcèlement des personnes s'occupant de la libération des travailleurs asservis; de donner la priorité au développement d'une campagne concertée et intégrée, aux niveaux national, provincial et local, associant étroitement les syndicats, les organisations d'employeurs et d'autres organisations non gouvernementales, avec un programme clair et un plan stratégique pour l'élimination du travail des enfants et de toutes les formes de travail asservi; et de fournir un rapport complet pour permettre à la commission d'experts de soumettre son propre examen du cas à la présente commission l'année prochaine. La commission devrait en outre inviter instamment le gouvernement à faire appel à l'assistance technique ou à d'autres formes d'appui du BIT.
Les membres employeurs ont souligné que ce cas était bien familier à la commission pour avoir déjà été discuté à de nombreuses reprises; la brièveté de leurs propos ne saurait donc être interprétée comme le signe qu'ils attachent moins d'importance à l'examen de ce cas, bien au contraire. Le gouvernement insiste sur les distinctions entre le travail des enfants et l'aide qu'ils apportent dans les petites entreprises familiales; entre le travail des enfants et le travail forcé des enfants; entre le travail visible et le travail invisible des enfants. Quelle que soit la pertinence de ces distinctions, c'est le travail forcé sous toutes ses formes qui ne peut être accepté, et en particulier le travail forcé des enfants lorsqu'il prend la forme de la servitude telle qu'elle existe depuis des années au Pakistan. Dès 1934, une loi qui interdisait d'une manière générale le travail des enfants dans les mines préfigurait la législation actuelle.
Le seul fait que l'ampleur du problème fasse l'objet d'informations contradictoires est en soi préoccupant: le gouvernement croit pouvoir conclure à l'existence d'un seul cas attesté de travail en servitude d'un adulte. On ne peut qu'en déduire l'insuffisance des inspections et des enquêtes sur le sujet. La loi de 1992 sur l'abolition du travail en servitude pour dettes prévoit de nouvelles mesures et un nouveau programme d'action, mais il ne semble pas être fait grand cas de ces dispositions par les magistrats de district et les comités de vigilance. La commission d'experts est donc fondée à demander que la nouvelle législation soit appliquée d'une manière plus constante et systématique. Sa position à cet égard doit recevoir le plein appui de la présente commission.
Du fait de la taille du pays, un plus grand nombre d'inspections et d'enquêtes est nécessaire. La rareté des cas de travail forcé des enfants qui ont été identifiés au regard de l'ampleur réelle et de la gravité du problème montre que trop peu a été fait jusqu'à présent. La présente commission doit donc insister auprès du gouvernement, dans des termes sans équivoque, pour qu'il intensifie de façon significative ses efforts pour abolir le travail forcé, et notamment le travail forcé des enfants, et que l'on n'ait pas de nouveau à constater d'année en année l'absence d'amélioration de la situation.
Le deuxième point soulevé a trait aux restrictions à la liberté de quitter son emploi. En application d'une législation remontant à 1952, les salariés de certains secteurs de l'économie ne peuvent quitter leur emploi qu'avec l'accord de leur employeur, ce qui constitue sans aucun doute une forme de travail forcé. Le gouvernement ne cesse pour sa part d'insister sur le fait qu'il ne s'agit que de certains services essentiels dans un nombre très limité de secteurs, que la liste des secteurs auxquels cette disposition s'applique est régulièrement revue pour être encore réduite et qu'un groupe de travail tripartite vient de soumettre de nouvelles propositions à l'examen du Cabinet. La commission se souviendra sans doute que le gouvernement a déjà tenu de tels propos dans le passé sans pour autant qu'on ait constaté par la suite de changements dans une situation qui reste inacceptable et gravement contraire à la convention. Après tant d'années, il faut demander instamment au gouvernement de prendre enfin des mesures pour mettre la législation en conformité avec la convention.
Le membre travailleur du Pakistan a déclaré que les travailleurs au Pakistan estiment que le travail forcé, quelle que soit sa forme, constitue un déni des droits fondamentaux de l'homme ainsi qu'un crime contre l'humanité. Cela est particulièrement grave dans le cas des enfants. Le préambule de la Constitution de l'OIT qui se réfère à la protection des enfants et des jeunes, ainsi que la présente convention et la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant, interdisent le travail forcé des enfants. En effet, selon la Convention des Nations Unies, il incombe aux Etats d'assurer l'éducation pour le développement de chaque enfant de manière à ce que celui-ci ne soit pas victime d'inégalité des chances. Une enfance perdue étant également un avenir perdu, l'éradication du travail des enfants reste au bénéfice de la société tout entière. L'emploi de personnes en bas âge équivaut à du travail forcé, en vertu de l'article 2 de la convention, car ces personnes ne sont pas en mesure de prendre de plein gré la décision d'accomplir un travail donné.
L'orateur souscrit à la déclaration du représentant gouvernemental selon laquelle le problème principal réside dans la mise en oeuvre de la législation pertinente. Suite à une pression considérable du mouvement syndical, il y a eu adoption de la loi de 1991 sur l'emploi des enfants ainsi que de la loi de 1992 sur l'abolition du système de travail en servitude, ce qui constitue un cadre législatif adéquat. Dans ses observations, la commission d'experts s'est également référée à l'institution de comités de vigilance. L'orateur estime qu'il aurait été plus efficace d'y associer les représentants des partenaires sociaux et des ONG. L'Etat devrait également jouer un rôle plus efficace dans la poursuite des personnes coupables d'avoir pratiqué du travail forcé sur des travailleurs. Un autre moyen efficace de lutte contre ces problèmes consiste à consacrer une proportion plus importante du PNB à l'éducation et à la protection de l'enfance, afin d'améliorer le bien-être de la société et de la nation tout entière. Le mouvement syndical a pris des mesures visant à aider les enfants des travailleurs organisés. Ainsi, l'orateur espère que les travailleurs, syndiqués ou non, et notamment les travailleuses rurales, jouiront de meilleures possibilités d'éducation. A cet effet, il relève que le gouvernement du Pendjab a adopté une loi rendant la scolarité obligatoire; un exemple à suivre dans le pays. En outre, le gouvernement devrait, dans le cadre de l'accord avec le BIT/IPEC, rendre plus efficace le recours à l'assistance technique disponible par des mesures telles que la création de centres de réhabilitation et la mise en oeuvre de campagnes de sensibilisation du public sur la nécessité d'éradiquer le travail des enfants. En conclusion, l'orateur a instamment prié la Commission de la Conférence d'interpeller le gouvernement afin qu'il modifie la loi de 1952 sur les services essentiels de manière à permettre aux travailleurs de quitter leur emploi de leur propre gré. La commission devrait également presser le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour améliorer la qualité de vie des travailleurs par l'allocation de niveaux plus élevés de ressources destinées à leur bien-être et par une mise en oeuvre plus efficace de la loi, conformément aux conventions nos 29 et 105.
Le membre travailleur de Colombie a déclaré qu'il s'agissait d'un cas très sérieux, impliquant aussi bien le travail des enfants que le travail forcé et touchant presque sept millions d'enfants. Il s'agit d'une situation aberrante provoquée par l'inégalité dans la répartition des revenus, aussi bien au niveau national que sur le plan international. On ne peut simplement se contenter de l'introduction de réformes législatives. Il convient d'établir des mécanismes orientés vers la garantie d'une juste répartition des revenus ainsi que le plein emploi pour les travailleurs adultes, de manière à éradiquer la pauvreté pour permettre aux enfants de se consacrer aux activités scolaires. Le progrès ne peut aller de pair avec le travail forcé des enfants et la pauvreté. Les violations des droits fondamentaux de l'homme, souvent traduites dans l'assassinat de syndicalistes, touchent également des enfants qui ont été assassinés en compagnie de leur famille, comme c'est le cas en Colombie.
Le membre travailleur du Japon, tout en relevant le nombre très élevé de travailleurs enfants au Pakistan, a rappelé les très vifs commentaires précédemment émis par la commission d'experts concernant la situation de ces enfants. Le problème principal semble résider dans l'inefficacité des mesures adoptées pour éradiquer le travail des enfants, et notamment le travail des enfants en servitude. Les observations de la commission d'experts confirment que les bénéficiaires de cette situation ont une forte emprise sur le système administratif, ce qui rend inefficace l'éradication du travail des enfants en servitude. Le représentant gouvernemental a gardé le silence sur la réclamation du mouvement syndical tendant à rendre obligatoire leur participation aux comités de vigilance. Il y a encore beaucoup d'actions à entreprendre d'urgence dans le cadre de la lutte contre la pratique répandue du travail des enfants au Pakistan.
Le membre gouvernemental des Etats-Unis a exprimé la sérieuse préoccupation de son gouvernement devant ce cas qu'il a suivi de près, en partie à cause des plaintes introduites sur le plan du droit commercial des Etats-Unis par l'AFL-CIO et d'autres ONG, qui accusent le Pakistan de ne pas prendre de mesures visant le respect et la mise en oeuvre des droits universellement reconnus aux travailleurs. Parmi les allégations figurent l'existence de travailleurs enfants exploités, le travail des enfants en servitude ainsi que des restrictions empêchant certains travailleurs de quitter leur emploi. Il est de toute évidence que le travail des enfants en servitude est pratiqué à une grande échelle et que, même si des mesures juridiques pertinentes ont été adoptées, leur mise en oeuvre reste en grande partie inefficace. L'oratrice souscrit aux commentaires de la commission d'experts selon lesquels les efforts entrepris jusqu'à présent dans la pratique n'ont pas réussi à maîtriser le problème du travail des enfants en servitude. Tout en ajoutant que son gouvernement reste conscient de l'engagement du gouvernement du Pakistan à améliorer la situation, l'oratrice espère l'adoption de mesures concrètes, telles que le renforcement des contrôles, la multiplication des poursuites envers les personnes soupçonnées de violations, de même que l'application de sanctions très sévères à l'égard des responsables du travail des enfants en servitude. En particulier, dans le cas où les enfants en servitude ne sont pas aisément identifiables, le gouvernement devrait prendre les mesures nécessaires pour les trouver, les libérer et leur assurer une éducation, de manière à ce que ces derniers restent en bonne santé, soient heureux et utiles pour la société. En ce qui concerne aussi bien le travail en servitude que toutes les formes d'exploitation du travail des enfants, des mesures doivent être prises aux niveaux de la législation et de la pratique par les gouvernements locaux, en coordination avec les comités de vigilance, les organisations de travailleurs et les autres organisations de terrain et avec la coopération du BIT, de manière à éradiquer les problèmes susmentionnés dans la plus grande mesure et dans les plus brefs délais.
Le membre travailleur de l'Italie a relevé l'existence actuelle au Pakistan d'un gouvernement démocratique qui a adopté une législation contre le travail des enfants et le travail forcé, et qui a adhéré à la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant. Toutefois, les manifestations de volonté politique du gouvernement semblent inefficaces face aux intérêts des grands propriétaires terriens qui disposent d'un vrai système de prisons privées fondé sur la servitude pour dette. Il y a eu également des preuves concernant l'exploitation sexuelle de travailleuses en servitude. La tragédie réelle consiste en l'implication d'un nombre très élevé d'enfants. L'orateur se réfère à la tragédie d'un jeune travailleur en servitude qui a été assassiné après sa libération. Toute une série de mesures doivent être prises au plan national au niveau de la justice et de l'éducation, y compris la formation de ceux qui sont libérés du travail forcé. L'orateur presse les membres de la commission de soutenir le Pakistan dans ses efforts visant à éradiquer la servitude et l'exploitation.
Les membres travailleurs ont, en conclusion, relevé le consensus dans le débat entre les membres tripartites de la commission et selon lequel, même si la législation au Pakistan reste appropriée sinon parfaite, sa mise en oeuvre ainsi que la volonté politique de lutter contre le travail des enfants et le travail des enfants en servitude demeurent totalement inadéquates. Les intervenants ont également été unanimes dans le rejet du concept selon lequel le travail des enfants reste un résultat naturel de la pauvreté. La commission pourrait alors adopter des recommandations très énergiques invitant le gouvernement à adopter un programme d'action globale dans tous les secteurs concernés, tout en impliquant les partenaires sociaux dans la mise en oeuvre afin de surmonter le problème.
Les membres employeurs ont affirmé que le travail des enfants en servitude au Pakistan constitue un fléau à éradiquer. Ils soulignent la nécessité de déployer davantage d'efforts que par le passé, afin que le drame puisse être résolu plus rapidement.
Le représentant gouvernemental a répondu en déclarant que beaucoup de suggestions utiles avaient été faites par les orateurs de tous les groupes. Il apprécie la préoccupation exprimée ainsi que les suggestions remarquables qui ont été faites. En ce qui concerne la proposition sur l'implication des ONG et les organisations de travailleurs et d'employeurs dans la lutte contre le problème, il certifie à la commission que le gouvernement a déjà soutenu l'intensification des efforts des ONG à cet égard. Le programme IPEC est principalement mis en oeuvre par le biais des ONG représentées de manière adéquate dans le Comité de surveillance dudit programme. L'orateur prévient néanmoins qu'un problème séculaire ne peut être résolu en l'espace de deux ou trois années, tout en donnant à la commission l'assurance que le gouvernement va agir de manière vigoureuse pour éradiquer le problème. Toutefois, il avertit, tout comme la presse occidentale l'a dénoncé à juste titre, que certaines ONG sans scrupule profitent de la situation pour renflouer leur caisse. Eu égard à la suggestion sur le lancement d'une campagne de sensibilisation, l'orateur relève qu'elle a déjà cours. Il accueille aussi favorablement l'offre, en cas de nécessité, d'assistance technique du BIT ou d'une tout autre agence compétente. En réponse à la proposition de renforcement des inspections, il affirme que le nombre d'inspections effectuées s'est considérablement accru au cours de l'année 1996 et que le Premier ministre a poussé dans le sens d'une intensification des actions, afin d'atteindre plus rapidement les résultats escomptés. Tout en reconnaissant la qualité de la pression du mouvement des travailleurs dans le cadre de la lutte contre cette situation, l'orateur déclare que le gouvernement reste conscient du rôle important que ces derniers jouent, en attirant son attention sur des problèmes concernant des questions telles que les droits des travailleurs, le travail des enfants et le travail des enfants en servitude, de même que les questions touchant les travailleuses.
La commission a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi. La commission est consciente de l'ampleur et de la complexité du problème et note à cet égard les efforts déployés par le gouvernement ainsi que par d'autres milieux pour lutter contre le travail des enfants et le travail en servitude. La commission regrette toutefois que les effets pratiques de ces efforts et des mesures prises n'aient pas abouti à des résultats suffisants et n'aient pas permis de s'attaquer avec l'efficacité nécessaire au travail des enfants et à la situation des enfants en servitude. La commission exprime le ferme espoir que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires, y compris le lancement d'une campagne globale intégrée touchant des domaines aussi fondamentaux que l'éducation, la santé et la justice, pour assurer l'application effective de la législation pertinente et garantir la pleine conformité en droit et en pratique avec les exigences de la convention, et cela si nécessaire avec l'aide technique du BIT. La commission espère que le gouvernement fournira des informations détaillées sur les mesures prises pour intégrer des représentants des organisations d'employeurs et de travailleurs, ainsi que d'autres milieux concernés, dans la mise en oeuvre de la loi de 1992 sur l'abolition du travail en servitude. Rappelant les commentaires que la commission d'experts formule depuis un grand nombre d'années, la commission a exprimé également le ferme espoir que le gouvernement prendra dans un avenir très proche toutes les mesures destinées à ce que les lois, tant nationales que provinciales, sur les services essentiels soient modifiées pour éliminer les restrictions à la liberté de quitter l'emploi. La commission espère que le gouvernement sera en mesure de lui fournir les informations détaillées nécessaires afin de pouvoir constater des progrès substantiels.
Depuis la réunion de la commission d'experts le gouvernement a communiqué des textes législatifs et notamment la loi sur la servitude pour dettes. Les membres employeurs ont relevé que ce cas a été examiné par la commission depuis de nombreuses années et que de nouveaux textes législatifs, et notamment une loi sur la servitude pour dettes, ont été reçus récemment au BIT et devraient être examinés par la commission d'experts. Ils ont souligné qu'une loi en elle-même n'est pas suffisante et que son application dans la pratique sera importante. Ils ont suggéré que l'examen de ce cas soit reporté après que la commission d'experts ait étudié les textes en question. La commission a ajourné l'examen de ce cas.
En réponse aux observations de la commission d'experts, le gouvernement déclare que la Constitution du Pakistan interdit l'esclavage sous toutes ses formes; que le travail forcé est strictement interdit, et qu'aucun enfant âgé de moins de 14 ans ne peut être employé. Le recrutement illégal d'enfants est punissable en vertu de la loi de 1991 sur l'emploi des enfants. En cas de violation de la Constitution et des lois, les parties lésées peuvent demander réparation en justice. Le gouvernement a décidé d'abolir le système de la servitude pour dettes par un loi devant être votée par le Parlement. Le projet de loi figurait à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale lorsque celle-ci a été dissoute. Ce texte devrait être redéposé devant la nouvelle Assemblée nationale prochainement. Lorsque le projet de loi aura été adopté, les travailleurs asservis seront libérés de tout travail obligatoire. La loi disposera que seront nuls et non avenus toutes les coutumes, traditions et pratiques, ainsi que tous les contrats ou accords créant une obligation de travail ou de prestation de service pour toute personne ou tout membre de la famille d'un travailleur asservi, qu'ils soient en vigueur ou aient été conclus avant et après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi.
Une disposition importante du projet de loi est que toute obligation faite aux travailleurs asservis de rembourser une dette ou une partie de celle-ci sera réputée éteinte et qu'aucune poursuite ne pourra être engagée devant une juridiction civile ou devant aucune autre autorité en vue du recouvrement d'une dette ou d'une partie de celle-ci.
Le projet de loi prévoit des sanctions appropriées en cas de non-rétrocession des biens appartenant aux travailleurs asservis dans les 90 jours à partir de l'entrée en vigueur de la loi. Le texte de ce projet de loi a été communiqué au secrétariat pour information.
Restrictions à la cessation de l'emploi
S'agissant de l'observation de la commission d'experts relative aux restrictions à la cessation de l'emploi, le gouvernement a indiqué à nouveau qu'il est envisagé de modifier la loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels afin qu'un employé puisse mettre fin à son emploi, conformément aux termes et conditions de service régissant son contrat de travail.
En outre, un représentant gouvernemental a réitéré les informations écrites transmises par son gouvernement. Le nouveau gouvernement s'est efforcé en toute sincérité de mettre toute la législation du travail en conformité avec les conventions de l'OIT. En dépit de contraintes liées à la guerre du Golfe et au rapatriement d'un grand nombre de travailleurs qui ont provoqué une crise économique, des progrès substantiels ont été réalisés ces sept derniers mois. Toutefois, ces progrès ont été lents parce que le nouveau gouvernement a pris un certain temps pour faire le point de la situation. C'est ainsi que même après le jugement de la Cour suprême, qui a force de loi jusqu'à ce qu'une nouvelle législation soit adoptée, le nouveau gouvernement a voulu recueillir des informations sur l'existence de la servitude pour dettes. Tout avis que la commission d'experts pourrait donner à propos de la législation envisagée sera pris en considération. Le gouvernement a promulgué en 1991 une loi sur le travail des enfants qui interdit le travail de mineurs de moins de 14 ans et interdit strictement le travail des enfants dans des emplois dangereux. Une copie de cette loi a été fournie à la commission d'experts pour information. En ce qui concerne les restrictions à la cessation de l'emploi aux termes de la loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels, le nouveau gouvernement envisage de la modifier afin qu'un employé puisse mettre fin à son emploi conformément aux termes et conditions de son service ou du contrat de travail.
Les membres employeurs ont rappelé que le cas avait été discuté huit fois au cours des dix dernières années et qu'il avait fait l'objet de trois paragraphes spéciaux en 1986, 1987 et 1988. Ce cas concerne la pratique répréhensible de la servitude pour dettes. En 1989, un représentant gouvernemental avait déclaré que le gouvernement modifierait la loi sur le maintien des services essentiels et avait prétendu qu'il n'y avait pas de servitude pour dettes dans le pays; en 1990, la commission fut informée que les modifications à la loi sur le maintien des services essentiels étaient encore à l'étude et que le problème de la servitude pour dettes était reconnu. Cette reconnaissance fut un premier pas salutaire vers la prise en considération du problème. Dans son rapport de 1989, la commission d'experts a estimé qu'environ 20 millions de personnes parmi lesquelles 7,5 millions d'enfants tombaient dans la catégorie des travailleurs asservis, dont 2 millions de familles travaillant dans les briqueteries comme de vrais esclaves. Bien que la crédibilité du gouvernement ait posé quelques problèmes dans le passé, les membres employeurs espèrent que les assurances selon lesquelles le gouvernement a présenté des lois visant à abolir le travail asservi et à interdire le travail des enfants correspondent à la réalité et qu'elles seront mises en oeuvre rapidement. La servitude pour dettes doit être éliminée aussi rapidement que possible, tant dans la législation que dans la pratique et des sanctions efficaces doivent être imposées à ceux qui y recourent.
Les membres travailleurs ont convenu avec les membres employeurs que le cas était extrêmement grave. Il est donc regrettable que la commission d'experts n'ait pas reçu à temps le rapport du gouvernement. Les informations écrites fournies par le gouvernement n'ont donc pas encore pu être examinées par la commission d'experts. Le représentant gouvernemental a déclaré que l'adoption de la loi interdisant la servitude pour dettes avait été retardée en raison de la dissolution du Parlement; la question qui reste donc posée est de savoir quand cette loi sera adoptée et quelles mesures seront prises pour assurer son application. Les informations écrites fournies par le gouvernement semblent moins précises que ses déclarations antérieures. Par exemple, en ce qui concerne la servitude pour dettes, il n'est plus question d'amendes substantielles ni de la création de comités locaux de surveillance mais simplement de sanctions appropriées. La commission d'experts devra donc examiner attentivement les informations et tout particulièrement celles relatives au travail des enfants. En ce qui concerne les restrictions à la cessation de l'emploi, la commission d'experts réitère les mêmes observations depuis vingt ans. En 1989, le gouvernement a indiqué qu'il avait l'intention de se conformer à la convention; en 1990, le gouvernement a déclaré que la loi allait être modifiée à cet effet. En dépit des assurances qui viennent d'être données, la commission devrait souligner que les dispositions de la convention doivent être appliquées dans la législation et dans la pratique et que le gouvernement doit fournir les informations demandées.
Le membre travailleur du Pakistan se référant aux décisions de la Cour suprême du Pakistan dont fait état le rapport de la commission d'experts, aux informations écrites ainsi qu'à la déclaration du représentant gouvernemental, a déclaré que les travailleurs voudraient qu'une législation soit promulguée et qu'il faudrait peut-être envisager de promulguer le projet de loi sous forme d'ordonnance. L'orateur s'est félicité de l'introduction de la nouvelle loi sur l'emploi des enfants de 1991 interdisant le travail des mineurs de moins de 14 ans ainsi que le travail des jeunes dans des emplois dangereux et il a souligné la nécessité d'appliquer la lettre et l'esprit du texte par des mesures économiques et sociales pour combattre l'utilisation du travail des enfants dans le pays. Au Pakistan, les travailleurs ont pressé le gouvernement d'améliorer le sort des ruraux pauvres qui sont véritablement exploités, quoique les chiffres donnés dans le rapport de la commission d'experts ne semblent pas réalistes. En effet, comment un pays qui a une population totale de 110 millions d'habitants peut avoir dans une seule industrie 20 millions de travailleurs asservis travaillant dans les briqueteries. Il a déclaré que le syndicat des travailleurs des briqueteries qui a introduit des recours devant la Cour suprême s'efforce constamment de promouvoir le bien-être de ces travailleurs au sein de leurs organisations et de faire pression sur le ouvernement. Cependant, revenant sur la question du travail asservi, il a déclaré que ce fléau aurait pu être éliminé si ces personnes avaient bénéficié de l'égalité de chances en matière d'éducation, de formation et d'accès aux ressources. Le gouvernement devrait donc faire des efforts pour améliorer la situation socio-économique des défavorisés. Une attention particulière devrait être accordée aux travailleurs dans les briqueteries qui, pour la plupart sont pauvres et travaillent en famille. Il est très difficile d'organiser ces travailleurs bien que les syndicats s'y emploient et tentent de les représenter. Néanmoins, le gouvernement devrait prendre des mesures afin de mettre un terme à l'exploitation de ces travailleurs et leur permettre de devenir des travailleurs indépendants.
Le membre travailleur du Sri Lanka a estimé que la déclaration du représentant gouvernemental est encourageante mais qu'il devrait indiquer à la commission quand les projets de lois entreraient en vigueur. En outre, des informations détaillées devraient être fournies sur les mesures qui seront prises pour assurer la mise en oeuvre de la législation.
Le représentant gouvernemental a déclaré que les chiffres concernant les travailleurs asservis qui figuraient dans le rapport de la commission d'experts étaient très éxagérés. Il convient de rappeler que le problème de la servitude pour dettes avait été révélé par les travailleurs eux-mêmes dans une affaire soumise à la Cour suprême. Le gouvernement n'a pas retardé la promulgation des textes législatifs et il a déploré que l'Assemblée nationale n'ait pas été en mesure d'adopter les textes déposés devant elle avant sa dissolution en 1990. Le nouveau gouvernement a, à juste titre, souhaité faire le point de la situation et le projet de loi devrait être soumis à la prochaine session du Parlement, sinon une ordonnance sera promulguée. En tout état de cause, la législation sera approuvée d'ici deux mois. Le projet de loi prévoit un mécanisme d'application et toute infraction sera portée devant les tribunaux. Ce projet prévoit en particulier la création de comités de surveillance chargés de contrôler l'application de la loi. De même, la loi sur le travail des enfants comporte un mécanisme de mise en oeuvre. S'agissant de l'amélioration des conditions économiques et sociales, l'orateur a rappelé qu'un projet de formation professionnelle mis sur pied par la Banque mondiale formait quelque 40000 personnes par an. En outre, il existe un programme d'apprentissage et des instituts de formation professionnelle ont été créées.
La commission a pris note du rapport de la commission d'experts, des informations orales et écrites communiquées par le gouvernement, ainsi que du débat qui a eu lieu en son sein. La commission a noté les indications selon lesquelles une loi sur le travail des enfants a été promulguée en 1991 et un projet de loi portant sur l'abolition de la servitude pour dettes sera soumis à l'Assemblée nationale. La commission a exprimé l'espoir que ce projet sera rapidement soumis et adopté et que le gouvernement communiquera un exemplaire des nouvelles lois telles qu'adoptées, pour examen par la commission d'experts. La commission a exprimé l'espoir de pouvoir notamment constater l'année prochaine que, conformément à l'article 25 de la convention, le fait d'exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire était passible de sanctions pénales réellement efficaces et strictement appliquées. De plus, la commission a déploré que le gouvernement n'ait pas soumis au Parlement un projet de loi modifiant les dispositions comportant des restrictions légales à la cessation de l'emploi comme il en avait exprimé l'intention à la commission en 1990. La commission a exprimé l'espoir de pouvoir constater des progrès réels en la matière l'année prochaine.
Un représentant gouvernemental a assuré la présente commission que son gouvernement n'avait pas tenté délibérément de retarder la mise en oeuvre des conventions nos 29 et 105; le processus d'application a été ralenti en raison des conditions difficiles prévalant dans le pays. Son gouvernement est déterminé à mettre toutes les lois nationales du travail en conformité avec les conventions de l'OIT et à abolir totalement la servitude pour dettes sous quelque forme que ce soit; il a adopté plusieurs mesures pour honorer cet engagement, pris par le gouvernement actuel dans son programme électoral et réitéré ensuite par le Premier ministre. Son gouvernement a déjà rétabli certains droits fondamentaux aux termes de la Constitution: l'esclavage sous toutes ses formes, la servitude pour dettes et le travail des enfants âgés de moins de quatorze ans sont strictement interdits. Par ailleurs, la loi punit l'embauche illégale d'enfants. Les parties lésées peuvent faire respecter leurs droits juridiques et constitutionnels en s'adressant aux tribunaux, comme le montre le cas des travailleurs asservis dans l'industrie des briqueteries mentionné dans le rapport de la commission d'experts. Son gouvernement a décidé d'abolir la servitude pour dettes au moyen d'une loi qui garantira une totale liberté aux travailleurs asservis. Le projet de loi a été approuvé par le Cabinet et devrait bientôt être promulgué. En vertu de cette loi, les travailleurs asservis seront libérés de tout travail obligatoire; la loi disposera que sont nuls et non avenus tous les contrats, coutumes, traditions, pratiques ou ententes créant des obligations pour les travailleurs asservis ou leurs familles, qu'ils aient été conclus ou en vigueur avant ou après l'entrée en vigueur de la loi. Par ailleurs, toute obligation faite aux travailleurs asservis de rembourser une dette ou une partie de celle-ci sera réputée éteinte et non exécutoire. Les infractions à la loi seront punies par des amendes substantielles et des sanctions pénales. Les travailleurs asservis travaillant après l'entrée en vigueur de la loi seront payés au taux prescrit et des comités locaux de surveillance contrôleront l'application de la loi. En ce qui concerne les restrictions à la cessation de l'emploi dans les établissements assujettis à la loi de 1952 sur le maintien des services essentiels, le gouvernement envisage d'adopter des modifications permettant à un employé de mettre fin à son emploi conformément aux conditions et modalités prévues dans son contrat d'emploi.
S'agissant de la convention no 105, le représentant gouvernemental a répété qu'il n'existait pas au Pakistan de loi forçant une personne à travailler. Les dispositions de la loi sur la sécurité du Pakistan et de la loi sur les partis politiques ne prévoient aucunement la possibilité de travail forcé, puisque les sanctions imposées aux termes de ces lois ne peuvent l'être que par les tribunaux après un procès en bonne et due forme. Quant aux observations de la commission d'experts au sujet de l'ordonnance sur la presse et les publications, un projet de loi modifiant cette ordonnance (et dont copie sera communiquée) a été présenté au parlement. Des mesures ont été prises en vue de modifier les articles 54 et 55 de l'ordonnance sur les relations professionnelles, ainsi que les articles 100 à 103 de la loi sur la marine marchande, afin de répondre aux objections formulées par la commission d'experts. Le représentant gouvernemental a répété que la discrimination religieuse n'existe pas et qu'elle est interdite par la Constitution et les lois nationales; le travail forcé par suite d'une discrimination religieuse n'existe pas et les minorités, y compris les Ahmadis et les Qadianis jouissent de tous les droits fondamentaux garantis par la Constitution. Le gouvernement n'a pas encore reçu le rapport du rapporteur spécial sur l'application de la Déclaration sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion et la conviction. Lorsqu'il l'aura reçu, le gouvernement l'examinera et fournira des renseignements détaillés à cet égard.
Le membre travailleur du Royaume-Uni a rappelé que ce cas a été discuté en 1981 par la présente commission et que les membres travailleurs avaient alors accueilli avec satisfaction la déclaration du représentant gouvernemental, selon laquelle plusieurs lois qui créaient des problèmes en regard des conventions nos 29 et 105 étaient abrogées ou étaient sur le point de l'être. Cette commission s'était dite alors profondément préoccupée par les points discutés. Cette année, l'orateur observe que très peu de progrès ont été réalisés depuis l'année dernière. Ainsi, le rapport du Groupe de travail sur les formes contemporaines d'esclavage indique qu'il n'y a pas vraiment eu d'étude sur le travail asservi des enfants, même si un fort pourcentage des enfants qui travaillent sont dans cette situation. L'orateur a dit comprendre les difficultés auxquelles le pays fait face, particulièrement si l'on tient compte du fait que ce problème dure depuis très longtemps et que le pays a vécu durant de nombreuses années sous une dictature militaire. Toutefois, cela ne dispense pas la présente commission d'insister pour une pleine application de ces conventions essentielles. L'orateur s'est dit encouragé par l'arrêt de la Cour suprême du Pakistan qui a reconnu que les travailleurs des briqueteries étaient des travailleurs asservis, mais il est préoccupé de la mise en oeuvre de cette décision significative; il devrait certainement être assez facile d'amender la législation. Il est beaucoup plus difficile de l'appliquer intégralement, particulièrement dans les régions isolées. Néanmoins, des modifications devraient être apportées à la loi existante et l'orateur a invité le représentant gouvernemental à indiquer concrètement quand ces projets de lois seraient présentés au parlement et mis en vigueur.
Le membre travailleur des Pays-Bas a fait observer que le nouveau gouvernement semble avoir repris les habitudes du gouvernement précédent consistant à répéter les informations antérieurement données sur le cas, à la différence que les renseignements maintenant répétés semblent plus prometteurs. Toutefois, ces promesses répétées doivent être suivies de mesures concrètes. L'orateur s'est interrogé sur les réactions du parlement aux changements législatifs proposés et s'est demandé si le gouvernement avait envisagé d'établir un système permettant de contrôler la mise en oeuvre de ces modifications. Le fait que des dizaines de millions de personnes appartiennent à la catégorie des travailleurs asservis crée en pratique des difficultés énormes pour le contrôle de l'application des lois éliminant le régime de travail forcé; il a donc demandé que des mesures soient prises pour remédier à ce problème.
Le membre travailleur du Pakistan a déclaré que le mouvement syndical pakistanais avait toujours exhorté le gouvernement à appliquer les conventions de l'OIT, et notamment les conventions sur les droits fondamentaux de l'homme. La servitude pour dettes est un héritage colonial et nie les besoins fondamentaux des pauvres en région rurale, y compris en matière d'emploi et de conditions de travail correctes. Certaines dispositions juridiques et constitutionnelles sont entrées en vigueur et sont exécutées, mais seule la force d'un mouvement syndical organisé permettra l'application de ces lois. Le mouvement syndical favorise trois approches en ce qui concerne les modifications à la politique du travail susceptibles d'avoir un impact sur l'application des conventions de l'OIT. Premièrement, une accélération des changements proposés à la législation nationale et de leur entrée en vigueur; deuxièmement, un renforcement des mécanismes d'inspection du travail; troisièmement, une amélioration globale des conditions économiques et sociales, par exemple l'instruction, le logement, les soins médicaux et la sécurité sociale. Il a demandé instamment au gouvernement d'accorder à ces travailleurs le salaire minimum de 1100 roupies par mois. Il a souligné également la nécessité d'adopter des dispositions législatives rétablissant les droits syndicaux à la télévision et à la radio pakistanaises, de même que dans les lignes aériennes. L'orateur a relevé qu'un ministère est spécialement chargé du bien-être des minorités. Il a indiqué que le mouvement syndical souscrit à l'égalité de tous les travailleurs sans distinction de race, de couleur ou de croyance et qu'il préconise la tolérance, le respect mutuel et la fraternité.
Les membres employeurs ont souligné le caractère très important de ce cas que la présente commission a discuté sept fois au cours des dix dernières années, et qu'il a été mentionné à trois reprises dans un paragraphe spécial durant la même période. Les membres employeurs ont noté que l'exactitude des déclarations du gouvernement avait été mise en question par le passé. Bien que cette année le gouvernement ait ouvertement admis l'existence du problème du travail asservi, on ne saurait surestimer la nécessité de prendre des mesures pour éliminer le problème dans la pratique. En ce qui concerne la question de la cessation d'emploi, ils ont instamment invité le gouvernement à adopter dès que possible les modifications législatives promises. S'agissant de la convention no105, les membres employeurs avaient cru comprendre, d'après les informations fournies par le gouvernement l'an dernier, que certaines dispositions législatives avaient été abrogées; or il ressort des déclarations faites aujourd'hui que la loi ne l'a pas été en fait. Ils se sont demandé si le gouvernement avait fourni des renseignements complets à la commission d'experts sur ces modifications et sur leur application pratique.
Le représentant gouvernemental a déclaré que, même si le nouveau gouvernement a hérité de problèmes énormes qu'il est difficile de résoudre, on peut constater un changement d'orientation manifeste puisqu'il a établi certaines priorités, notamment le bien-être de la classe ouvrière et l'abolition du travail asservi. Les modifications législatives proposées ont été présentées au parlement et il est à espérer qu'elles seront adoptées par le parlement dans les deux mois à venir. En ce qui concerne la mise en oeuvre de ces lois, le représentant gouvernemental a répété que des mesures concrètes seraient prises par l'intermédiaire des comités régionaux établis à cette fin. On a déjà constaté des progrès en pratique, puisqu'un grand nombre de travailleurs asservis ont déjà quitté leur employeur afin de chercher librement un emploi; l'éducation continue des travailleurs permettra de mieux assurer l'exercice des libertés dont ils ne jouissaient pas précédemment.
Les membres travailleurs se sont associés aux membres employeurs pour déclarer qu'il s'agit d'un cas important et relever que le gouvernement a fait un pas en admettant l'existence du problème de la servitude pour dettes. Le nouveau gouvernement est allé plus loin que le précédent dans les mesures législatives visant à mettre fin à cette pratique, mais la présente commission doit néanmoins exprimer sa profonde préoccupation quant à la nécessité d'une adoption rapide de la nouvelle législation et de son application effective.
Le représentant gouvernemental a répété que la rectification des problèmes discutés constituait une priorité pour son gouvernement. Il a donné l'assurance que les lois nationales seraient mises en conformité avec les conventions et que des progrès seraient déjà réalisés lors de la prochaine réunion de la présente commission.
La commission a noté les informations communiquées par le représentant gouvernemental. Elle ne doute pas de la bonne volonté et de l'intention du gouvernement de mettre sa législation et sa pratique en pleine conformité avec la convention. Toutefois, la commission s'est déclarée déçue et préoccupée du fait que les renseignements fournis ne répondent pas à ses attentes, fondées sur les assurances données par le gouvernement à la session précédente. Elle a estimé devoir inviter instamment le gouvernement à accorder la plus grande priorité à ses engagements à cet égard afin que la commission puisse constater des progrès à sa prochaine session.
Voir sous convention no 105, comme suit:
Un représentant gouvernemental a déclaré que le Premier ministre, Mme Mohtarma Benazir Bhutto, avait annoncé, dans son message à la nation le 2 décembre 1988, que les restrictions aux activités syndicales en vigueur sous le régime précédent seraient levées et que la législation du travail serait mise en conformité avec les conventions de l'OIT.
Conformément à cet engagement du Premier ministre, les activités syndicales s'exercent sans entrave et des dispositions législatives sont en cours d'élaboration pour donner à ces activités un fondement légal.
Un comité de révision a été institué pour statuer sur le cas des travailleurs sanctionnés pour leurs activités syndicales.
Se référant aux commentaires de la commission d'experts sur la loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels, selon lesquels les dispositions de cette loi sont en conflit avec les dispositions de la convention no 29 que le Pakistan a ratifiée, le représentant gouvernemental a annoncé que son gouvernement avait décidé de respecter les dispositions de la convention en amendant cette loi de façon à ce qu'un salarié d'un établissement entrant dans le champ d'application de ladite loi puisse mettre fin à son emploi conformément aux stipulations de son contrat de travail. Cet amendement sera soumis au parlement.
S'agissant de la référence à l'emploi de travailleurs asservis par des entrepreneurs connus sous le nom de "kharkars" pour la construction de digues et de canaux d'irrigation, le représentant gouvernemental a déclaré que son gouvernement niait catégoriquement l'existence de camps kharkars dans le pays. En outre, la référence à l'emploi d'enfants asservis dans les camps kharkars dans le rapport de la mission d'évaluation sectorielle du BIT (juillet-août 1986), mentionnée également par la commission d'experts, n'est fondée que sur des oui-dire à l'appui desquels peu de faits sont cités. Si un camp kharkar existait, dans des régions éloignées du pays, les membres de la mission avaient toute latitude pour s'y rendre et les inspecter. Par conséquent, le gouvernement réitère qu'il n'existe pas de servitude pour dettes illégales dans le pays.
Passant aux observations de la commission d'experts au sujet de certaines dispositions de la loi de 1952 sur la sécurité du Pakistan, de l'ordonnance de 1963 du Pakistan occidental sur la presse et les publications et de la loi de 1962 sur les partis politiques qui confèrent aux autorités le pouvoir de dissoudre des associations et d'interdire l publication d'opinions sous peine d'emprisonnement pouvant comporter l'obligation de travailler, le représentant gouvernemental a informé la présente commission que l'ordonnance de 1963 du Pakistan occidental sur la presse et les publications avait été abrogée. En ce qui concerne les dispositions de la loi de 1952 sur la sécurité du Pakistan et la loi de 1962 sur les partis politiques, les contrevenants sont traduits devant des tribunaux ordinaires; ils ont le droit d'être défendus par un avocat de leur choix et peuvent faire appel. Le gouvernement estime que la condamnation judiciaire des contrevenants aux dispositions spécifiques de ces lois n'entre pas dans le champ d'application de la présente convention.
Afin de lever les objections de la commission d'experts à propos des articles 54 et 55 de l'ordonnance de 1969 sur les relations professionnelles, les dispositions pertinentes vont être amendées afin d'éliminer l'élément de travail obligatoire. La peine d'"emprisonnement" sera remplacée par une peine d'"emprisonnement simple". Le gouvernement a déjà présenté au parlement un projet d'amendement de l'ordonnance sur les relations professionnelles afin que ces articles soient mis en conformité avec la présente convention. Il faut également noter que les dispositions des articles 54 et 55 sont applicables aux employeurs comme aux travailleurs.
Le gouvernement prend également les mesures nécessaires pour apporter les modifications appropriées à la loi du Pakistan sur la marine marchande.
Le membre travailleur du Pakistan a déclaré que la situation s'était beaucoup améliorée depuis les dernières élections après lesquelles le nouveau Premier ministre a promis que le gouvernement mettrait la loi et la pratique en conformité avec les conventions de l'OIT. S'agissant des problèmes qui se posent au titre de la convention no 29, les assurances données par le gouvernement de mettre les dispositions de la loi du Pakistan sur le maintien des services essentiels et celles de la loi du Pakistan occidental sur le maintien des services essentiels en conformité avec cette convention constituent un motif de satisfaction. Il conviendrait que ces amendements soient soumis au parlement dans les plus brefs délais car, en vertu de la présente législation, les travailleurs ne sont toujours pas autorisés à mettre fin à leur emploi sans l'assentiment de leur employeur.
En ce qui concerne les "kharkars", même si la Constitution interdit le travail forcé, le gouvernement pourrait jouer un rôle plus actif en procédant à des inspections du travail efficaces, particulièrement dans le secteur de la construction, afin d'assurer la mise en oeuvre de la législation pertinente. Il est vrai que les travailleurs peuvent s'adresser aux tribunaux pour protéger leurs droits, mais le gouvernement pourrait prendre des mesures préventives dans le cadre de l'inspection du travail.
S'agissant de la convention no 105, le gouvernement devrait communiquer à l'OIT tous nouveaux textes législatifs afin que les organes de contrôle puissent vérifier que ces nouveaux textes sont conformes aux conventions ratifiées. Le gouvernement devrait s'acquitter de cette tâche, aussi rapidement que possible, pour la nouvelle législation qui remplace l'ordonnance du Pakistan occidental sur la presse et les publications qui a été abrogée. Le gouvernement devrait réexaminer la loi sur la sécurité du Pakistan ainsi que la loi sur les partis politiques qui prévoient des peines d'emprisonnement rigoureux.
Pour ce qui est des minorités au Pakistan, le gouvernement a créé le ministère des Minorités chargé des questions de discrimination. Un ministère spécial a également été créé pour la promotion des femmes. Le gouvernement devrait prendre les mesures nécessaires pour mettre la législation et la pratique en conformité avec les conventions de l'OIT.
Les membres travailleurs se sont félicités que plusieurs lois critiquées en raison de leur non-conformité avec les conventions nos 29 et 105 aient été abrogées ou qu'elles le seront. De bonnes relations ainsi qu'un dialogue constructif doivent être établis avec le nouveau gouvernement. Si le gouvernement avait soumis les rapports demandés à la commission d'experts, la présente commission aurait pu porter des jugements et tirer des conclusions à la lumière des analyses de la commission d'experts. Si la loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels a été modifiée, abrogée ou remplacée par une autre loi, des informations complètes devraient être fournies à la commission d'experts.
Puisque, selon le représentant gouvernemental, la mission d'évaluation sectorielle du BIT sur les Kharkars est erronée, le gouvernement devrait, en tout état de cause, fournir des informations sur les mesures prises pour faire appliquer l'interdiction du travail forcé dans le domaine des contrats de travail. Le gouvernement devrait également fournir des informations détaillées sur les mesures prises ou envisagées en ce qui concerne tous les types d'exploitations des travailleurs tels que le travail forcé.
Quand à l'application de la convention no 105, la déclaration du représentant gouvernemental n'était pas très claire en ce qui concerne le sort de la loi sur la sécurité du Pakistan dont on ne sait pas très bien si elle à été abrogée ou remplacée. La commission d'experts a fait observer que la loi sur la sécurité du Pakistan contrevenait à l'article 1 a) de la présente convention. Tous textes remplaçant ces lois ou toutes modifications qui y sont apportées devraient être communiqués à la commission d'experts pour examen.
Les membres travailleurs ont relevé que le représentant gouvernemental a déclaré que l'amendement de l'ordonnance sur les relations professionnelles a consisté à remplacer la peine d'"emprisonnement" par celle d'"emprisonnement simple". Les membres travailleurs ont souligné que cela mérite des éclaircissements car l'ordonnance sur les relations professionnelles est totalement contraire à l'article 1 c) de la convention. Lors des années précédentes, le gouvernement a déclaré que personne n'avait été sanctionné en vertu de cette ordonnance. La commission d'experts a néanmoins fait observer que la simple existence de menace de sanctions prévues par la législation suffisait en elle-même à mettre ce texte en contradiction avec l'article 1 c). L'ordonnance sur les relations professionnelles devrait être modifiée de manière à être en conformité avec la convention no 105.
Quant à la loi sur la marine marchande, des informations sont également nécessaires pour déterminer si le Pakistan remplit ses obligations en vertu des articles 1 c) et 1 d) de la présente convention.
En ce qui concerne les infractions relevées à l'article 1 e), il conviendrait de savoir si les articles 298 B et C du Code pénal ont en fait été abrogés. Tant que demeurent en vigueur des ordonnances et arrêtés applicables à un groupe appartenant à une certaine . religion, l'on peut s'interroger sur le respect de la convention.
Des informations devraient être fournies à l'OIT sur toutes ces questions afin que la commission d'experts puisse procéder à une analyse en profondeur de ces cas et que la présente commission puisse se prononcer en connaissance de cause.
Les membres employeurs se sont félicités de l'évolution positive de la situation au Pakistan.
L'application des conventions nos 29 et 105 soulève six problèmes différents. Tout d'abord, en ce qui concerne la convention no 29, le représentant gouvernemental devrait préciser la date à laquelle interviendra la modification des dispositions législatives imposant des restrictions à la cessation de l'emploi. Deuxièmement, le gouvernement devrait fournir des informations étayant l'affirmation selon laquelle aucun entrepreneur n'a recours à des travailleurs asservis afin que la commission d'experts puisse vérifier la véracité de cette affirmation.
Troisièmement, eu égard à la convention no 105, il convient de souligner qu'il est nécessaire de soumettre des rapports écrits. Les déclarations du représentant gouvernemental au sujet de la modification de la loi sur la sécurité du Pakistan et de la loi sur les partis politiques ne démontrent pas clairement que, dans leur teneur modifiée, ces lois seront en conformité avec la convention no 105. Il s'agit toutefois d'un pas dans la bonne voie et les textes des nouvelles dispositions pourraient permettre à la commission d'experts d'évaluer la nouvelle situation.
Quatrièmement, en ce qui concerne la loi sur les relations professionnelles, que l'emprisonnement soit remplacé par un emprisonnement simple ne semble pas avoir d'incidence sur le fait que cette loi est en contradiction avec la convention. Des éclaircissements sont nécessaires en la matière.
Cinquièmement, les modifications à la loi sur la marine marchande, évoquées par le représentant gouvernemental, devraient être adoptées aussi rapidement que possible. Enfin, il convient d'approfondir l'examen des faits au sujet des sanctions pénales applicables aux activités des groupes islamiques. Les informations fournies par le représentant gouvernemental sont somme toute très positives et il faut espérer que le gouvernement continuera dans cette voie.
Le représentant gouvernemental a exprimé le souhait de pouvoir être en mesure de fournir des informations sur des mesures concrètes adoptées mais le nouveau gouvernement n'est en place que depuis six mois et la modification de la législation demande du temps. Le Cabinet a déjà décidé d'amender la loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels et le parlement est saisi de cet amendement. Les dispositions nécessaires seront prises pour mettre la loi de 1958 du Pakistan occidental sur le maintien des services essentiels en conformité avec la convention de l'OIT. Quant à la servitude pour dettes, la Constitution du Pakistan interdit le travail forcé. L'enlèvement d'enfants pour les contraindre à travailler est passible de la peine de mort. Le représentant gouvernemental a pris note de l'observation du membre travailleur du Pakistan et il a déclaré que l'inspection du travail serait améliorée.
L'ordonnance du Pakistan occidental sur la presse et les publications a été abrogée et tous nouveaux textes adoptés en la matière seront communiqués au Bureau.
Le représentant gouvernemental a réaffirmé que ni la loi sur les partis politiques, ni la loi sur la sécurité du Pakistan n'entraient dans le champ d'application de la convention no 105 car ces lois s'appliquaient à des infractions contre l'intégrité et la sécurité de l'Etat et les contrevenants pouvaient s'adresser aux tribunaux ordinaires et faire appel à la Cour suprême. Les tribunaux civils peuvent imposer la peine d'emprisonnement rigoureux, qualifié de travail forcé dans les cas appropriés et ces décisions peuvent faire l'objet d'un recours. Pour ce qui est de la loi sur les partis politiques, le gouvernement est tenu de soumettre toute décision de dissolution d'une association à la Cour suprême pour confirmation. La Cour suprême peut être saisie de recours pour inconstitutionnalité de dispositions législatives.
Le Cabinet a déjà décidé de modifier les articles 54 et 55 de la loi sur les relations professionnelles et ces amendements seront soumis au parlement. En ce qui concerne les articles 298 B et C du Code pénal, la Constitution du Pakistan garantit la liberté d'expression et de croyance religieuse. Cette liberté existe dans la mesure où elle ne porte pas préjudice à une autre communauté religieuse. Indépendamment de ses convictions religieuses, quiconque propage sa foi de manière qui heurte les sentiments d'une autre communauté sera sanctionné. Ces dispositions du Code pénal ont pour but d'éviter les problèmes qui pourraient surgir entre musulmans et ahmadis dans les lieux de culte et d'y garantir la paix et la tranquillité.
Les membres travailleurs ont évoqué à nouveau la loi sur la sécurité du Pakistan. Il semblerait que le représentant gouvernemental ait réaffirmé la position selon laquelle la condamnation judiciaire des contrevenants ne relevait pas de la convention. La commission d'experts a toutefois indiqué à de nombreuses reprises que le travail obligatoire, sous quelque forme que ce soit, y compris le travail pénitentiaire, qui découle d'une condamnation judiciaire prononcée pour l'expression d'opinions politiques, entrait dans le champ d'application de la convention. La commission d'experts a demandé à diverses reprises des informations sur l'application pratique de la loi sur la sécurité du Pakistan, le nombre des condamnations prononcées et les copies des décisions des tribunaux. Ces informations relatives à la loi sur la sécurité du Pakistan, ainsi que des informations concernant l'abrogation ou la modification de l'ordonnance sur les relations professionnelles, devraient être communiquées à la commission d'experts. Le représentant gouvernemental devrait faire connaître à son gouvernement l'opinion de la présente commission au sujet des divergences qui existent entre la loi sur la sécurité du Pakistan et l'article 1 a) de la convention.
Le représentant gouvernementale a déclaré que les commentaires de la présente commission concernant sa "grande préoccupation" étaient décourageants dans la mesure où des progrés potentiels avaient été notés sur plusieurs points.
La commission a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental. La commission a exprimé à nouveau sa grande préoccupation eu égard aux points déjà discutés en son sein au cours de précédentes sessions et elle a déploré qu'aucun rapport n'ait été reçu. La commission a toutefois pris acte avec satisfaction d'une évolution positive en ce qui concerne la mise en oeuvre des conventions nos 29 et 105 et, notamment, des progrès réalisés ou en cours dans le domaine législatif. La commission a prié le gouvernement de continuer à prendre, dans les plus brefs délais, toutes les mesures nécessaires afin de mettre la législation et la pratique en pleine conformité avec les conventions nos 29 et 105. La commission a prié, en particulier, le gouvernement de fournir les informations détaillées demandées par la commission d'experts et, à cette fin, d'envoyer les nouveaux textes législatifs, ainsi que les projets de lois, afin de pouvoir constater les progrès réalisés dans la pratique comme dans la législation. La commission a exprimé l'espoir que, lors de la prochaine Conférence, elle sera en mesure d'enregistrer des progrès réels dans les différents domaines des deux conventions.
Un représentant gouvernemental a indiqué que la position de son gouvernement se trouvait consignée dans le dernier rapport communiqué à la commission d'experts. Il a rappelé que la loi de 1952 sur le maintien des services essentiels a été maintenue en vigueur afin d'appliquer en cas d'urgence les dispositions sur les services essentiels uniquement. La politique de son gouvernement est de n'avoir recours à cette loi que dans des cas extrêmes. Parmi les entreprises industrielles visées par son application, certaines en ont été exclues et cette limitation du champ d'application se poursuit. Il n'y a pas de pénurie de main-d'oeuvre spécialisée ou non spécialisée au Pakistan; aussi le gouvernement n'a-t-il aucune obligation économique de garder un employé dans un emploi forcé contre sa volonté. En pratique, la possibilité de mettre fin à un emploi après trois mois de préavis n'a jamais été restreinte. En ce qui concerne les commentaires de la commission d'experts relatifs aux allégations de servitude pour dettes, son gouvernement a déclaré sans équivoque dans son rapport qu'aucun camp de travail n'existe au Pakistan. Toute tentative d'avoir recours au travail forcé conduirait à des poursuites judiciaires aux termes de la loi.
Les membres travailleurs ont observé que les explications du représentant gouvernemental sont décevantes car elles sont identiques à celles données au cours de précédentes sessions. Lors de sa dernière session, la commission avait décidé de mentionner ce cas dans un paragraphe spécial de son rapport dans l'espoir que le gouvernement serait en mesure de fournir des informations détaillées sur ces questions. Cette année encore, le rapport de la commission d'experts se réfère à nouveau à la mission d'évaluation sectorielle du BIT de 1986 dont les conclusions sont en contradiction avec les déclarations du gouvernement. Les membres travailleurs ont constaté que les explications fournies par le représentant gouvernemental du Pakistan sont décevantes et ne permettent pas à la présente commission de noter des progrès.
Les membres employeurs ont déclaré que les informations fournies par le représentant gouvernemental sont en étrange contradiction avec l'historique du cas. Depuis plus de trente ans, certaines lois au Pakistan interdisent aux travailleurs de mettre fin à leur emploi sans le consentement de l'employeur. Cette situation s'apparente sans aucun doute à du travail forcé. En outre, ces lois couvrent une large part des services publics, y compris les entreprises publiques. Ce sont là les constatations de la commission d'experts. Il est nécessaire de modifier ces lois et la présente commission a déjà déclaré qu'il n'était pas suffisant d'entendre dire chaque année que la pratique au Pakistan est différente de la législation, que la main-d'oeuvre est suffisante et que les travailleurs peuvent quitter leur emploi après un préavis de trois mois. Si tel était le cas, ceci devrait être inscrit dans la législation et la situation serait ainsi plus claire. Au contraire, il n'y a eu aucun changement et les déclarations du gouvernement du Pakistan deviennent stéréotypées. En outre, les commentaires du gouvernement ne fournissent aucune réponse aux questions de la commission d'experts concernant le recours au travail forcé pour la construction de canaux et de digues. Les membres employeurs ont partagé l'opinion des membres travailleurs et exprimé leur réception devant ce manque de progrès.
Le représentant gouvernemental a répondu que sa brève déclaration a en fait couvert tous les points soulevés par la commission d'experts. Son gouvernement n'a pas recours à la loi sur le maintien des services essentiels et cette loi est maintenue pour en appliquer les dispositions en cas d'urgence uniquement. Il a rappelé à nouveau que son gouvernement ne recourt à cette loi qu'en cas d'extrême nécessité et qu'un comité a été créé par le gouvernement pour examiner les dix-huit établissements couverts par cette loi. Au cours de cet examen, cinq établissements ont été exclus du champ d'application de la loi si bien qu'une minorité négligeable de travailleurs sont couverts par cette loi. Dans la mesure où il n'y a pas pénurie de main-d'oeuvre au Pakistan, le gouvernement n'a aucune obligation économique de maintenir un travailleur dans un emploi forcé contre sa volonté. Il a rappelé énergiquement que les camps de travail et le travail forcé n'existent pas, sont interdits par la loi et que toute tentative d'avoir recours au travail forcé serait passible de poursuites. Le rapport de la commission d'experts se base uniquement sur des allégations et il n'existe pas de preuve de l'existence des camps de travail au Pakistan.
Les membres travailleurs ont noté que la présente commission maintenant se trouve dans une situation très difficile, dans la mesure où les déclarations du représentant gouvernemental sont en contradiction avec les observations de la commission d'experts qui correspondent aux résultats de la mission du BIT. Ces questions n'ont pas été abordées dans le détail par le représentant du gouvernement. Il n'est pas suffisant de déclarer que ces conclusions sont inexactes. Les membres travailleurs ont rappelé la très grande importance qu'ils attachent au paragraphe 2 de l'observation concernant les informations relatives à l'utilisation de la servitude pour dettes dans les camps "Kharkar" qu'on ne peut écarter par une simple dénégation. La situation demeure non satisfaisante. Au cours des deux dernières sessions, la commission de la Conférence a décidé de mentionner ce cas dans un paragraphe spécial. Il est peut-être temps d'envisager des mesures différentes pour presser le gouvernement à faire des progrès sur cette question à l'avenir.
La commission a noté les explications fournies par le représentant gouvernemental. S'agissant de points discutés à plusieurs reprises au cours de précédentes sessions, la commission a exprimé à nouveau sa grave préoccupation et a prié le gouvernement de prendre dans les plus brefs délais les mesures nécessaires, afin de mettre la législation et la pratique en conformité avec la convention, et de fournir les informations détaillées demandées par la commission d'experts. La commission a décidé de mentionner ce cas dans un paragraphe spécial de son rapport général.
Un représentant gouvernemental réitère la position de son gouvernement au sujet de la convention, à savoir le recours limité aux lois sur le maintien des services essentiels, et souligne que certains établissements industriels, qui entraient dans le champ d'application de la loi, ont été exclus. Ce processus va se poursuivre jusqu'au moment où l'application de cette loi ne sera plus nécessaire, à la suite de quoi les établissements restants seront également exclus. Cette loi s'applique à un groupe microscopique de travailleurs et n'est en aucune façon considérée comme une réglementation courante. Il s'agit en réalité d'un loi habilitante concernant, entre autres, la cessation volontaire de la relation d'emploi en cas d'urgence. Il souligne qu'il n'y a pas de pénurie de main-d'oeuvre qualifiée ou non qualifiée au Pakistan, et que, par conséquent il n'existe aucune obligation économique d'avoir recours au travail forcé ou de contraindre un travailleur de rester dans son emploi. Dans la pratique, les travailleurs sont libres de résilier leur contrat de travail et bon nombre de travailleurs ont même quitté leur emploi au sein de services essentiels tels que des raffineries de pétrole pour partir à l'étranger; on constate donc une totale liberté de mouvement d'un emploi à l'autre dans les secteurs couverts par cette loi. Le représentant gouvernemental estime que la discussion portait sur une situation hypothétique puisque la loi ne viole en aucune manière le droit des travailleurs de quitter leur emploi de leur plein gré. Néanmoins, le gouvernement se réserve le droit d'appliquer cette loi en cas d'urgence à certains services essentiels dont l'interruption mettrait en danger la sécurité et le bien-être de la plus grande partie de la population et la sécurité de l'Etat. Il estime que la commission doit tenir compte de la situation économique et politique de son pays.
Quant aux observations de la commission d'experts au sujet des "Kharkars", il affirme qu'il n'existe au Pakistan aucun camp de travail autorisé et dans lequel on assiste au travail forcé. Toute tentative de faire appel à une main-d'oeuvre forcée est sanctionnée par la loi, et le programme en cinq points présenté par le Premier ministre s'engage à éliminer tout type d'exploitation de la main d'oeuvre et toute forme de travail forcé.
Se référant aux observations sur la convention no 105, le représentant gouvernemental considère que les sentences des tribunaux pour certains délits spécifiques sanctionnés d'emprisonnement rigoureux n'entraînent pas un travail forcé au sens strict du terme puisqu'il ne s'agit pas de travail pénitentiaire obligatoire tel que la construction de routes, de barrages ou de galeries souterraines, ou encore l'abattage d'arbres. Cette pratique a en réalité pour objectif d'instruire et de former les prisonniers à des métiers et à leur donner certaines qualifications pendant leur séjour pénitentiaire. Ces qualifications, telles que le tissage, la menuiserie, l'ébénisterie et autres travaux d'artisanat, sont destinées à aider la réinsertion des prisonniers dans la société, et bon nombre d'entre eux sont réhabilités du fait de l'aspect réformateur de cet emprisonnement rigoureux. Il déclare qu'aucune sanction n'a été infligée en vertu de l'ordonnance sur les relations professionnelles durant les dernières années, et que les sanctions prises contre des travailleurs en vertu de cette ordonnance se limitent à des mesures administratives telles que le licenciement, des avertissements ou le blocage d'une augmentation, mais ne revêtent pas la forme d'un emprisonnement. Le travail forcé au sens propre du terme est interdit par la Constitution et n'existe nulle part au Pakistan.
Les membres travailleurs notent que cette déclaration orale n'apporte aucun élément nouveau par rapport à l'année dernière et que ces deux conventions sont au centre des discussions depuis 1970. La commission fait preuve d'énormément de patience puisqu'on lui a signalé que le pays connaît une situation extraordinaire et qu'il y avait une loi martiale. Il semble que la loi martiale ait été levée en 1986 mais il n'y a aucune communication officielle à ce propos. Pourtant, nous nous trouvons face aux mêmes contradictions; d'un côté, il est dit que le travail forcé n'existe pas, qu'aucune sanction n'est prise lorsqu'un travailleur quitte son emploi; mais d'un autre côté, on déclare que certaines mesures doivent être maintenues dans des situations d'urgence. Cette attitude est étrange, estiment les membres travailleurs, et elle ne répond pas aux demandes formulées jusqu'à présente. En 1986, une tentative a été entreprise en vue d'aider le gouvernement; la commission avait alors exprimé ses préoccupations dans un paragraphe spécial pour demander au gouvernement de soumettre des rapports détaillés concernant les conventions nos 29 et 105 et de conformer la législation nationale aux dispositions desdites conventions. Ainsi, la déclaration orale que nous venons d'entendre de la part du représentant gouvernemental, et selon laquelle les dispositions de la loi n'étaient pas appliquées, ne peut donner satisfaction ni à la commission d'experts ni à la présente commission. Il y avait eu des demandes spécifiques adressées au gouvernement afin qu'il abroge et qu'il modifie certains textes législatifs mais, en contradiction avec les conventions sur le travail forcé, ces demandes sont restées insatisfaites. En outre, ce problème très sérieux touche un certain nombre de minorités dans le pays, qui semblent soumises au travail obligatoire ou forcé, comme moyen de discrimination religieuse; des indications claires sont demandées au gouvernement à ce sujet. Le nouveau gouvernement démocratique du Pakistan pourrait être aidé mais cela implique aussi une fois pour toutes la mise en pratique d'une convention pour laquelle la commission plaide déjà depuis fort longtemps.
Les membres employeurs s'alignent sur le point de vue des travailleurs pour dire que la déclaration orale entendue n'a apporté aucun fait nouveau. Bien que ces questions aient été le sujet de discussions en 1984 et 1986, le fond de la question n'a pratiquement pas évolué: la loi de 1952 sur le maintien des services essentiels contenait toujours un certain nombre de restrictions concernant la cessation de la relation de travail incompatibles avec les dispositions de la convention no 29, et la commission d'experts estime que cette loi comporte un champ d'application trop large. Puisque le représentant gouvernemental dit que la loi n'est pas appliquée, il serait donc facile de la modifier. Le représentant gouvernemental a déclaré qu'une telle loi doit exister pour les cas d'urgence, toutefois cela n'est pas compatible avec les conventions. La commission d'experts s'est également référée à un mémoire présenté par la Commission internationale des juristes aux Nations Unies faisant allusion à des cas de travail forcé. Toutefois, cela n'a pas été mentionné par le représentant gouvernemental.
En ce qui concerne la convention no 105, il existe toute une série de lois relatives à différentes formes de sanctions, y compris des formes de travail forcé, imposées en cas d'expression d'opinions politiques, de discipline de travail ou de grèves; ces pratiques ne sont pas en conformité avec les dispositions de la convention. Le représentant gouvernemental a dit que les prisonniers recevaient ainsi une formation professionnelle, mais cela ne répond pas à la question; il n'y a pas d'indication concernant la volonté du gouvernement de modifier cette loi ou de restreindre de manière plus grande le champ de son application, tel que l'a suggéré la commission d'experts à maintes reprises. Les membres employeurs estiment qu'il y a là de sérieuses raisons pour exprimer leurs préoccupations et que cela doit être reflété encore plus énergiquement que les années précédentes dans les conclusions de la commission.
Le représentant gouvernemental déclare que les problèmes de sécurité auxquels son pays a dû faire face au cours de nombreuses années existent toujours du fait de la situation géopolitique du Pakistan. Son gouvernement était par conséquent obligé de maintenir la loi sur le maintien des services essentiels. Il avait espéré entendre certaines appréciations concernant les efforts fournis par son gouvernement en vue de limiter l'application de ladite loi. Il déclare que chaque cas sera examiné à l'avenir avant la reconduction et l'application de cette loi afin d'en restreindre le champ aux secteurs tout à fait indispensables. Il estime que cette façon de procéder est pragmatique et pratique et qu'elle conduirait graduellement à une réduction optimale du champ d'application. Le représentant gouvernemental déclare que le concept d'emprisonnement "rigoureux" fait partie de la législation nationale depuis de nombreuses décennies; ce concept existe dans d'autres pays qui ont le même système juridique mais qui n'ont pas à répondre du fait qu'ils n'ont pas ratifié la convention no 105. Il donne l'assurance que ces questions seront examinées de façon plus précise.
Le membre travailleur du Pakistan rappelle que le gouvernement a ratifié d'importantes conventions comme celles qui sont examinées ici grâce à l'insistance des travailleurs et que les travailleurs ont également insisté pour que ces conventions soient appliquées dans l'esprit et dans la lettre. Les travailleurs ont demandé de façon pressante au gouvernement de remédier aux contradictions existantes entre les conventions et la loi. Cette insistance a eu pour résultat, entre autres, la mise en place en 1986 d'une commission nationale tripartite du bien-être des travailleurs, ainsi que la visite d'une mission multidisciplinaire du BIT. L'un des avantages les plus importants pour les travailleurs a été la levée de la loi martiale et le rétablissement d'un gouvernement constitutionnel au cours des 18 derniers mois, ainsi que le rétablissement de certains droits fondamentaux et droits d'appel à la Haute Cour. Beaucoup reste encore à faire. Dans son étude d'ensemble de 1979, la commission d'experts a indiqué que le travail obligatoire sous toutes ses formes, y compris le travail pénitentiaire obligatoire, entre dans le champ d'application de la convention dès lors qu'il est exigé dans l'un des cinq cas énoncés à l'article 1 de la convention no 105, et que, dans le cas de personnes condamnées pour avoir exprimé certaines idées politiques, l'intention de les éduquer par le travail est contraire à la convention.
Le représentant gouvernemental souligne que le membre travailleur du Pakistan a reconnu certains changements positifs, ces deux dernières années, dans l'attitude du gouvernement, en ce qui concerne le droit des travailleurs. Il déclare que le droit d'appel auprès des instances supérieures a été réinstitué mais qu'il n'est pas possible de changer d'un jour à l'autre un héritage si lourd.
Les membres travailleurs soulignent que, tant que la législation de base n'est pas modifiée, le droit d'appel à la Haute Cour ne peut servir à rien. Le fait qu'il existe dans d'autres pays des lois sur l'éducation dans les prisons ne justifie pas la situation discutée au sein de la présente commission. Finalement, les raisons de sécurité ne peuvent justifier le maintien de certaines lois n'assurant pas les droits fondamentaux prévus par les conventions.
Les membres employeurs notent que le représentant gouvernemental s'en tient à sa Position, à savoir que des sanctions comme l'emprisonnement et le travail forcé seraient maintenus puisque cela sert de formation professionnelle. Ils notent également qu'ils n'ont entendu ici aucune annonce d'un changement particulier à venir. Ils demandent donc au représentant gouvernemental de fournir un exemplaire des modifications restreignant le champ d'application de la loi sur le maintien des services essentiels afin qu'ils puissent examiner l'étendue de ces restrictions. Pour le reste, ils notent que le gouvernement semble maintenir ses positions.
Le représentant gouvernemental s'engage à fournir ces informations dans le rapport qui sera bientôt soumis au Bureau; ces informations comprendront les noms des entreprises industrielles exclues récemment du champ d'application des lois sur le maintien des services essentiels dans leur teneur Modifiée, ainsi que le nombre exact des travailleurs concernés.
La commission a décidé d'inclure ses conclusions sur ce cas dans un paragraphe spécial de son rapport. (Voir sous convention no 111.).
La commission prend note de la communication envoyée par la Fédération des travailleurs du Pakistan (PWF) le 30 juillet 2010, qui contient des commentaires sur l’application de la convention par le Pakistan. Elle note que cette communication a été transmise au gouvernement en août 2010 afin qu’il fournisse ses commentaires à leur sujet. La commission espère que le gouvernement communiquera ses commentaires dans son prochain rapport afin que la commission puisse les examiner à sa prochaine session.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention
A. Servitude pour dettes
Commentaires des organisations de travailleurs. Dans les commentaires qu’elle formule depuis un certain nombre d’années, la commission relève les difficultés de mise en œuvre de la loi de 1992 sur l’abolition du système de travail en servitude (BLSA). A cet égard, la commission s’est référée aux commentaires de la Fédération nationale des syndicats du Pakistan (APFTU), de la Fédération syndicale du Pakistan (APTUF) et de la Confédération syndicale internationale (CSI). Dans sa dernière communication du 29 août 2008, la CSI a observé que, quinze ans après l’adoption de la loi sur l’abolition du système de travail en servitude (BLSA) et six ans après l’approbation du plan d’action national (2001), le travail forcé et la servitude pour dettes sont très répandus dans de nombreux secteurs à travers le pays. A cet égard, la CSI s’est référée aux études d’évaluation rapide conduites à l’initiative du ministère du Travail, en collaboration avec le BIT, dans neuf secteurs (briqueteries, agriculture, tissage de tapis, exploitation minière, fabrication de verroterie, tanneries, construction, travail domestique et mendicité). Selon la CSI, la BLSA n’est pas pleinement appliquée et les employeurs peuvent recourir au travail forcé en toute impunité. L’Institut pakistanais pour le travail, l’éducation et la recherche (PILER) a indiqué que seulement 8 530 personnes ont été libérées entre 1990 et 2005; sur ce chiffre, 5 166 personnes ont été libérées au terme d’une action judiciaire à laquelle étaient associés des organisations non gouvernementales et des fonctionnaires des gouvernements locaux, seulement 563 personnes ont été libérées grâce à l’intervention de l’Etat. Selon la CSI, les comités de vigilance établis dans le cadre de la BLSA n’ont pas rempli leurs fonctions de recenser et de libérer les travailleurs asservis et n’ont pas été restructurés tel que prévu par le plan d’action national. L’absence de services d’inspection du travail appropriés explique fondamentalement pourquoi les travailleurs asservis n’ont pas été recensés ni libérés de ce système.
Mise en œuvre de la politique et du plan d’action national pour l’abolition du travail en servitude. Dans ses commentaires précédents, la commission a pris note d’un certain nombre d’initiatives prises par le gouvernement dans le cadre de la politique et du plan d’action nationaux de 2001 pour l’abolition du travail en servitude et pour la réinsertion des personnes affranchies. Ces mesures comprennent, notamment, la tenue d’ateliers de formation pour les fonctionnaires principaux de district et autres parties prenantes concernées dans le but d’accroître leur capacité et de leur permettre d’élaborer des programmes, à l’échelle du district, visant à identifier les travailleurs asservis et à activer les comités de vigilance de district, d’intégrer la question du travail en servitude dans les programmes d’études juridiques et les programmes des instituts de formation de la police et du service public, afin de sensibiliser à cette question les fonctionnaires des services judiciaires, de l’application des lois et du service public et tenue de séminaires de renforcement des capacités. La commission a également noté l’indication du gouvernement selon laquelle, dans le cadre de la loi BLSA, les fonctions d’inspection dans le domaine du travail en servitude ont été confiées à l’inspection ordinaire du travail, ainsi qu’aux fonctionnaires principaux et aux départements de police à l’échelle locale. Dans son dernier rapport, le gouvernement fait référence à un certain nombre d’études conduites avec l’assistance technique du BIT au sujet du travail en servitude dans différents secteurs au Pakistan.
Tout en prenant note des initiatives du gouvernement pour combattre le travail en servitude, la commission exprime le ferme espoir que le gouvernement poursuivra vigoureusement ses efforts pour garantir la pleine application de la politique et du plan d’action nationaux de 2001, et qu’il communiquera des informations détaillées sur les progrès accomplis et les résultats concrets obtenus, y compris copie de tout rapport pertinent concernant l’ensemble des activités, projets, institutions et mandats auxquels se réfère le plan d’action. La commission demande au gouvernement de fournir, notamment, des informations sur les activités de la Commission nationale pour l’abolition du travail en servitude et la réinsertion des travailleurs affranchis, établie pour coordonner la mise en œuvre du plan et pour examiner l’application de la loi BLSA, et de communiquer copies des rapports de suivi/évaluation concernant le fonctionnement des comités de vigilance. Prière de fournir également des informations sur les activités du fonds établi dans le cadre du règlement de la BLSA, auxquelles le gouvernement fait référence dans son rapport de 2005. La commission prie également le gouvernement d’indiquer les mesures prises ou envisagées pour identifier et traiter les causes de la servitude pour dettes.
Servitude pour dettes: mesures visant à collecter les données permettant d’évaluer la nature et l’étendue du problème. La commission a précédemment pris note du rapport intitulé «Etudes d’évaluation rapide du travail en servitude dans différents secteurs au Pakistan», contenant les résultats et les conclusions de plusieurs études d’évaluation rapide qu’ont menées des équipes de chercheurs sociaux, à l’initiative du ministère du Travail et du BIT, sous les auspices du Forum de recherche sur le travail en servitude, dans l’objectif d’enquêter sur l’existence et la nature du travail en servitude dans dix secteurs (agriculture, construction, tissage de tapis, briqueteries, pêcheries marines, exploitation minière, fabrication de verroterie, tanneries, travail domestique et mendicité). Le projet constitue la première phase d’un programme plus ample de recherches et vise à préparer la voie à des études sectorielles détaillées et à une enquête nationale pour déterminer l’ampleur du travail en servitude partout dans le pays, comme le prévoit le plan national d’action du gouvernement. Cependant, aucune enquête nationale n’a été conduite à ce jour et, à cet égard, le gouvernement fait état de difficultés rencontrées dans le recensement des travailleurs asservis.
Prenant note de cette information, la commission indique une fois encore qu’il est essentiel de disposer d’informations exactes pour que soient mis en place les systèmes les plus efficaces pour combattre le travail en servitude et une base de données concrètes qui servira à évaluer l’efficacité de ces systèmes. Par conséquent, la commission exprime le ferme espoir que le gouvernement donnera suite à la phase préliminaire du programme de recherches susmentionné et, conformément au mandat de la politique et du plan d’action nationaux de 2001, mènera une étude statistique sur le travail en servitude dans tout le pays en utilisant une méthodologie valide, en collaboration avec les organisations d’employeurs et de travailleurs et avec les organisations et les institutions de défense des droits de l’homme, et qu’il fournira des informations sur les progrès accomplis à cet égard.
B. Traite des personnes
La commission a précédemment pris note de la promulgation de l’ordonnance de 2002 (PCHTO) sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes. Elle a également noté que, selon le rapport de l’Organisation internationale pour les migrations intitulé «Data and research on human trafficking: A global survey», le Pakistan continue d’être un pays de destination important pour les femmes qui sont victimes de traite, ainsi qu’un pays de transit pour les personnes venant du Bangladesh et allant dans les pays du Moyen-Orient, où les femmes sont victimes d’exploitation sexuelle. Le rapport souligne qu’il est urgent de mener à l’échelle nationale des études de référence complètes afin d’élaborer une base de données sur la traite des personnes en Asie du Sud.
La commission espère une fois encore que le gouvernement entreprendra une étude nationale de référence sur la traite des personnes, en coopération avec les organisations d’employeurs et de travailleurs, et avec d’autres organisations et institutions intéressées, et qu’il indiquera les progrès accomplis à cet égard. Prière également de communiquer des informations sur l’application pratique de l’ordonnance de 2002 (PCHTO) sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes susmentionnée et, d’une manière plus générale, sur les politiques et les mesures visant à l’élimination effective de la traite des personnes, en communiquant les statistiques disponibles et les documents d’orientation pertinents.
C. Restrictions à la liberté de quitter son emploi
La commission a précédemment pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle un projet de modification de la loi de 1952 sur les services essentiels (maintien) – loi qui prévoit que les fonctionnaires qui mettent unilatéralement terme à leur emploi sans le consentement de l’employeur sont passibles d’une peine d’emprisonnement – devait être examiné par une commission tripartite chargée de la consolidation, de la simplification et de la rationalisation de la législation du travail. Etant donné que le dernier rapport du gouvernement ne contient pas de nouvelle information sur cette question, la commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour rendre conformes à la convention les lois fédérales et provinciales sur les services essentiels, et qu’il fournira des informations sur les progrès réalisés à cet égard.
Article 25. Imposition de sanctions adéquates en cas de recours au travail forcé ou obligatoire.
La commission prend note des indications du gouvernement concernant le nombre d’infractions signalées en matière de traite dans le cadre de l’application de l’ordonnance de 2002 (PCHTO) sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes, le nombre de poursuites engagées et le nombre de condamnations prononcées pour la période 2007-2009. La commission prend également note des indications du gouvernement concernant les sanctions imposées à ceux qui ont recouru au travail forcé.
La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations actualisées sur l’application de l’ordonnance de 2002, en indiquant le nombre d’infractions signalées en matière de traite, les poursuites engagées, les condamnations prononcées et les sanctions imposées, en communiquant copies des décisions de justice pertinentes et en indiquant les sanctions minimales imposées. Rappelant que l’article 25 de la convention dispose que le fait d’exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales réellement efficaces et strictement appliquées, la commission prie une nouvelle fois le gouvernement de transmettre des informations sur les poursuites judiciaires qui ont été engagées contre les employeurs de personnes réduites en servitude dans le cadre de la loi BLSA, de communiquer copie des décisions de justice démontrant l’efficacité des dispositions de cette loi et d’indiquer les sanctions imposées.
La commission note avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente, qui était conçue dans les termes suivants:
La commission note avec regret qu’aucun commentaire n’a été reçu du gouvernement en réponse aux communications suivantes reçues des organisations de travailleurs, qui contiennent des observations sur l’application de la convention par le Pakistan: communications en date des 31 août et 19 septembre 2006 reçues de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), désormais Confédération syndicale internationale (CSI), communication en date du 30 mars 2007 reçue de la Fédération des syndicats unis du Pakistan (APFUTU) et communication en date du 2 mai 2007 reçue de la Fédération des travailleurs du Pakistan (PWF) – communications qui ont été transmises au gouvernement en septembre et octobre 2006 et en mai et juin 2007. La commission note également que deux nouvelles communications ont été reçues de la CSI (en date du 29 août 2008) et de la PWF (en date du 21 septembre 2008), qui ont été transmises au gouvernement en septembre et octobre 2008, pour tout commentaire qu’il souhaiterait formuler à cet égard. La commission espère que le gouvernement fournira ses commentaires à cet égard avec son prochain rapport afin que la commission puisse les examiner à sa prochaine session.
I. Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention
1. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note des difficultés de mise en œuvre de la loi de 1992 sur l’abolition du système de travail en servitude (BLSA). La commission prend note des communications de la Confédération des syndicats du Pakistan (APFTU) et de la Fédération syndicale du Pakistan (APTUF), en date des 26 avril et 14 mai 2005, respectivement. Ces communications, qui contiennent des commentaires sur l’application de la convention, ont été transmises en juin et en juillet 2005 au gouvernement pour qu’il puisse formuler les observations qu’il souhaiterait sur les questions soulevées dans les communications. Entre autres, l’APTUF a fait observer que la loi sur l’abolition du système de travail en servitude n’est pas appliquée et l’APFTU a également indiqué que les lois, y compris celles relatives au travail en servitude, ne sont pas appliquées, faute d’un système approprié d’inspection du travail. Dans la mesure où les commentaires du gouvernement sur ces communications n’ont pas été reçus à ce jour, la commission espère qu’il les fournira dans son prochain rapport.
2. La commission note la politique et le plan nationaux d’action du gouvernement pour l’abolition du travail en servitude et pour la réinsertion des personnes affranchies de 2001 que le gouvernement a communiqués avec son dernier rapport. La commission note que, dans le cadre du plan d’action, une commission nationale pour l’abolition du travail en servitude et la réinsertion a été instituée pour coordonner l’application du plan, avec les fonctions spécifiques suivantes:
– examiner l’application de la loi BLSA et du plan d’action;
– superviser l’action des comités de vigilance de district qui ont été mis en place en vertu de l’article 15 de la loi BLSA et du règlement de 1995 sur l’abolition du système de travail en servitude;
– répondre aux préoccupations des entités nationales et internationales qui s’occupent du travail en servitude et du travail forcé.
La commission prend note de l’indication du ministère du Travail qui figure dans son projet de politique sur la protection des travailleurs de 2005 selon laquelle la politique et le plan d’action nationaux de 2001 énoncent clairement les intentions et l’engagement du gouvernement d’appliquer pleinement la convention. Toutefois, la commission note que, selon la déclaration du ministère du Travail qui figure dans son document du 23 septembre 2002 sur la politique du travail, les objectifs et activités prévus dans la politique et le plan nationaux d’action de 2001 doivent être mis en œuvre activement.
Mise en œuvre de la politique et du plan nationaux d’action pour l’abolition du travail en servitude
3. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement fait état d’initiatives récentes qu’il prend ou qu’il envisage de prendre pour lutter contre le travail en servitude, apparemment dans le cadre de la politique et du plan nationaux d’action de 2001, parmi lesquelles:
– la création d’une unité de service d’aide juridique au sein des départements du travail de Punjab et NWFP – ligne d’appel gratuit destinée à fournir orientations et aide juridique aux victimes de travail en servitude; par ailleurs il est envisagé d’engager des experts juridiques pour fournir une assistance juridique;
– le lancement d’un programme de construction de logements à prix modérés pour les familles affranchies du travail en servitude dans le secteur agricole de Sindh, initiative qui facilitera aussi la réadaptation de ces familles;
– la tenue d’ateliers de formation pour les fonctionnaires principaux de district et d’autres personnes intéressées afin d’accroître leurs capacités et de leur permettre d’élaborer des programmes, à l’échelle du district, pour identifier les travailleurs soumis à la servitude et activer les comités de vigilance de district; et
– l’incorporation de la question du travail en servitude dans les programmes d’études juridiques et les programmes des instituts de formation de la police et du service public, afin de sensibiliser à cette question les fonctionnaires des services judiciaires, de l’application des lois et du service public; et tenue de séminaires de renforcement des capacités.
4. La commission note que le gouvernement indique que, dans le cadre de la loi BLSA, les fonctions d’inspection dans le domaine du travail en servitude ont été confiées à l’inspection ordinaire du travail, ainsi qu’aux fonctionnaires principaux et aux départements de police à l’échelle locale. La commission note également, à la lecture du document de 2001 sur le plan d’action, que le fonds créé en vertu du règlement de la BLSA a été mis en place et qu’un dépôt initial de 100 millions de roupies a été effectué. De plus, le gouvernement indique dans son rapport sur l’application de la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, reçu en janvier 2005, que la mise en place du fonds de lutte contre le travail en servitude a commencé, et qu’est en cours d’élaboration un projet de manuel à l’intention des agents d’exécution qui contient des orientations en vue de l’élaboration de propositions de financement du projet.
5. Tout en reconnaissant les initiatives du gouvernement pour tenter de combattre le travail en servitude, la commission espère que les mesures nécessaires sont prises ou envisagées pour garantir la pleine application de la politique et du plan nationaux d’action de 2001 pour l’abolition du travail en servitude et pour la réinsertion des personnes affranchies. La commission espère que, dans son prochain rapport, le gouvernement fournira des informations détaillées sur les progrès accomplis et les résultats obtenus dans la pratique – y compris copie des rapports pertinents sur l’ensemble des activités, institutions et mandats dont il est question dans le plan d’action. La commission prie également le gouvernement de préciser la situation actuelle des comités de vigilance de district, leur rôle dans l’inspection du travail, et leur lien avec l’inspection du travail. Prière également d’indiquer les mesures que les magistrats de district et les comités de vigilance de district prennent pour garantir l’application effective de la loi BLSA, et l’accomplissement de leurs autres fonctions prévues dans la loi BLSA et le règlement de 1995, et de communiquer copie des rapports de suivi et d’évaluation élaborés par la Commission nationale pour l’abolition du travail en servitude et pour la réinsertion des personnes affranchies.
Programme spécial d’action pour lutter contre le travail forcé et le travail en servitude
6. La commission note que, dans son rapport sur l’application de la convention (no 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, qui a été reçu en janvier 2005, le gouvernement indique que depuis 2002 il mène avec l’assistance technique du BIT un programme spécial d’action de lutte contre le travail forcé et le travail en servitude. Le gouvernement indique que, dans le cadre de ce programme, le BIT, entre autres, dispense une formation, sur les droits de l’homme et les questions ayant trait au travail en servitude, aux Nazims de district, aux membres des comités de vigilance et aux fonctionnaires du pouvoir judiciaire et de l’application des lois. Le BIT aide aussi le gouvernement à élaborer des partenariats avec les personnes intéressées, les employeurs et les travailleurs, fournit des services consultatifs en vue de la création d’un organisme national de haut niveau pour la lutte contre le travail forcé, et contribue au lancement de projets pilotes destinés à évaluer la faisabilité des approches qui ont été approuvées pour lutter contre ce problème. La commission prie le gouvernement de communiquer, dans son prochain rapport, des informations plus détaillées et plus complètes sur ce programme et son application, y compris copie des plus récents rapports d’évaluation des activités et résultats des programmes.
Servitude pour dettes: mesures visant à collecter les données permettant d’évaluer la nature et l’étendue du problème
7. La commission note que, dans le cadre de la politique et du plan nationaux d’action de 2001, une étude nationale visant à évaluer l’ampleur du travail en servitude devait être entamée avant janvier 2002. Elle note que, dans son dernier rapport, le gouvernement indique que cette étude quantitative n’a pas été réalisée.
8. La commission prend note d’un rapport de 2004 sur une initiative du ministère du Travail et du BIT intitulé «Etudes d’évaluation rapide du travail en servitude dans différents secteurs au Pakistan». Ce rapport contient les résultats et les conclusions de plusieurs études d’évaluation rapide qu’ont menées d’octobre 2002 à janvier 2003 des équipes de chercheurs sociaux, sous les auspices du Forum de recherche sur le travail en servitude. Le forum a pour objectif d’enquêter sur l’existence et la nature du travail en servitude dans dix secteurs – agriculture, construction, tissage de tapis, briqueterie, pêcheries marines, exploitation minière, fabrication de verroterie, tanneries, travail domestique et mendicité – et d’en tirer des conclusions préliminaires. Le projet constituait la première phase d’un programme plus ample de recherches et était destiné à préparer la voie à des études sectorielles détaillées et à une enquête nationale pour déterminer l’existence du travail en servitude partout dans le pays, comme le prévoit le plan national d’action du gouvernement. Les études d’évaluation rapide ont mis essentiellement l’accent sur la servitude pour dettes mais ont aussi examiné d’autres formes de travail en servitude, et de travail forcé non lié à une dette.
9. La commission prend note de la conclusion du rapport, à savoir que l’examen des secteurs en question permet d’avoir des informations récentes sur le fonctionnement du système peshgi (avance de salaires) et sur son éventuel lien avec le travail en servitude et d’autres formes de travail forcé. Le rapport établit que le lien est «relativement faible» dans certains secteurs mais qu’il existe dans d’autres. Le rapport souligne aussi qu’il ressort de l’enquête qu’il existe «d’autres formes de travail en servitude et de coercition qui ne sont pas clairement liées au système pesghi».
10. La commission exprime à nouveau l’espoir que le gouvernement, pour donner suite à la phase préliminaire du programme de recherche susmentionné, et conformément au mandat de la politique et du plan nationaux de 2001, mènera une étude statistique sur le travail en servitude dans tout le pays en utilisant une méthodologie valide, en collaboration avec les organisations d’employeurs et de travailleurs et avec les organisations et les institutions de défense des droits de l’homme, et qu’il fournira des informations sur les progrès accomplis à cet égard.
Travail en servitude dans l’agriculture
11. Dans son observation précédente, la commission avait noté que, de l’avis du gouvernement, la législation du travail comportait des lacunes en ce qui concerne la main-d’œuvre du secteur agricole. La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir d’autres informations sur cette question, de même que sur les mesures prises ou envisagées pour remédier à cette situation, dans le cadre de l’élimination du travail en servitude dans l’agriculture.
12. La commission prend note de la promulgation de l’ordonnance de 2002 (PCHTO) sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes. Cette ordonnance, qui est entrée en vigueur en octobre 2002, sanctionne notamment la traite des personnes, qu’elle définit en partie comme étant les actes coercitifs qui visent à obtenir un bénéfice ou à exploiter des personnes à des fins de divertissement, d’esclavage ou de travail forcé (art. 2(h) et 3); prévoit des sanctions en cas de traite des personnes, notamment des peines d’emprisonnement allant jusqu’à sept ans et, dans le cas de traite de femmes, jusqu’à dix ans, ainsi que des amendes (art. 3); prévoit des sanctions spécifiques en cas de traite perpétrée par des associations organisées de malfaiteurs (art. 4), et en cas de récidives (art. 5); prévoit le versement de dommages et intérêts aux victimes (art. 6); et prévoit que les tribunaux peuvent entendre de ces cas et prendre des sanctions (art. 8 et 10). La commission demande au gouvernement de communiquer dans son prochain rapport copie des dernières réglementations qui ont été promulguées pour mettre en œuvre l’ordonnance sur la prévention et la lutte contre la traite de personnes.
Traite des personnes: mesures visant à collecter les données permettant d’évaluer la nature et l’étendue du problème
13. La commission prend note du rapport de 2005 de l’Organisation internationale pour les migrations intitulé «Data and Research on Human Trafficking: A Global Survey» (Données et recherches sur la traite des êtres humains: enquête mondiale). Ce rapport indique que le Pakistan continue d’être un important pays de destination pour les femmes qui sont victimes de traite, ainsi qu’un important pays de transit pour les personnes venant du Bangladesh et allant dans les pays du Moyen-Orient. Parmi ces personnes, des femmes sont victimes d’exploitation sexuelle. Le rapport indique que les hommes sont rarement considérés comme des «victimes de traite» mais, plus souvent, comme des migrants en situation irrégulière, et que cette lacune fait que l’on dispose d’un volume restreint de connaissances et de données sur la traite des hommes en Asie du Sud. Le rapport souligne que, alors que ces études contribuent à comprendre les causes, sources, destinations et conséquences de la traite des personnes, les statistiques actuelles sont dépassées ou relèvent de l’anecdote, et qu’il est urgent de mener à l’échelle nationale des études de référence complètes afin d’élaborer une base de données sud-asiatiques sur la traite des personnes. Compte tenu de ces indications, la commission espère que le gouvernement entreprendra une étude nationale de référence sur la traite des personnes, en coopération avec les organisations d’employeurs et de travailleurs, et avec d’autres organisations et institutions sociétales, et qu’il indiquera les progrès accomplis à cet égard.
Mesures destinées à l’élimination effective de la traite des personnes
14. La commission note que le gouvernement collabore avec l’OIM dans le cadre d’un programme d’action sur les questions relatives aux migrations, et qu’un des volets importants du programme est la question de la traite des personnes. La commission note qu’au douzième Sommet de l’Association sud-asiatique de coopération régionale (ASACR), qui s’est tenu en janvier 2004 à Islamabad, le gouvernement a approuvé la Déclaration d’Islamabad qui, entre autres, demande aux Etats Membres d’aller dans le sens d’une ratification prompte de la Convention de l’ASACR sur la prévention et l’élimination de la traite des femmes et des enfants à des fins de prostitution, convention qui a été adoptée en 2002 (paragr. 19). La commission note aussi qu’en mai 2005 des représentants du gouvernement et d’autres participants de la cinquième Conférence ministérielle sud-asiatique ont adopté la Déclaration d’Islamabad sur la révision des mesures prises et sur l’action à mener. Entre autres, ils ont reconnu les déficiences et les difficultés d’application dans plusieurs domaines, y compris l’insuffisance de l’engagement, de la sensibilisation, des mesures et des ressources pour lutter contre la violence à l’égard des femmes (paragr. 5(g)); et le manque de coopération et d’initiatives régionales de partenariat pour résoudre les problèmes, à l’échelle régionale, tels que la traite des femmes (paragr.5(q)). La commission espère que le gouvernement continuera de développer des politiques et de prendre des mesures pour éliminer effectivement la traite des personnes en droit et dans la pratique, conformément à la convention, et qu’il fournira dans son prochain rapport des informations détaillées à cet égard.
II. Restrictions à la liberté de quitter son emploi
15. Dans ses commentaires précédents, la commission s’était référée aux informations fournies par le représentant gouvernemental devant la Commission de la Conférence en juin 1999, selon lesquelles une commission tripartite chargée de la consolidation, de la simplification et de la rationalisation de la législation du travail devait examiner un projet de modification de la loi de 1952 sur les services essentiels (maintien), loi qui prévoit que les fonctionnaires qui mettent unilatéralement terme à leur emploi sans le consentement de l’employeur sont passibles d’une peine d’emprisonnement. Le gouvernement avait indiqué dans son rapport de 2000 que le rapport final de cette commission était attendu pour fin septembre 2000. Etant donné que le dernier rapport du gouvernement ne contient pas de nouvelles informations sur cette question, la commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer copie du rapport de la commission tripartite. La commission exprime le ferme espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour rendre conformes à la convention les lois fédérales et provinciales sur les services essentiels, et qu’il fournira des informations sur les progrès réalisés à cet égard.
16. La commission souhaiterait à nouveau que le gouvernement fournisse copie des textes complets des ordonnances suivantes qui ont été adoptées en 2000: l’ordonnance no XVII du 27 mai sur le retrait du service (facultés spéciales); l’ordonnance (modificatrice) no XX du 1er juin sur la fonction publique; et l’ordonnance (modificatrice) no LXIII du 6 décembre sur le service obligatoire dans les forces armées.
III. Article 25. Imposition de sanctions adéquates en cas d’exaction de travail forcé ou obligatoire
Application de la loi de 1992 sur l’abolition du système de travail en servitude
17. La commission avait précédemment pris note des allégations contenues dans les communications de 2001 de la CISL selon lesquelles la loi de 1992 sur l’abolition du système de travail en servitude n’avait pas été appliquée dans la pratique dans la mesure où peu de fonctionnaires l’appliquent car ils craignent la colère des propriétaires fonciers, si bien que ces derniers recourent au travail forcé en toute impunité. Rappelant que l’article 25 de la convention dispose que le fait d’exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales réellement efficaces et strictement appliquées, la commission prie une nouvelle fois le gouvernement de transmettre des informations sur le nombre d’inspections qui ont été réalisées dans le cadre de la loi susmentionnée, et sur les poursuites en justice qui ont été intentées contre les employeurs de personnes réduites en servitude, y compris copie des décisions de justice sur ces cas.
Application de l’ordonnance de 2002 sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes
18. A propos de l’application de l’ordonnance de 2002 (PCHTO) sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes, la commission prend note d’une déclaration devant la presse, en juin 2005, du ministre de l’Intérieur selon laquelle, de 2003 à mai 2005, 888 plaintes pour traite des personnes, dans le cadre de l’application de l’ordonnance susmentionnée, ont été enregistrées par l’Agence fédérale d’investigation; 737 auteurs présumés de traite ont été arrêtés; dans 336 de ces cas, les enquêtes qui ont été menées ont débouché sur des poursuites en justice, et ces poursuites ont abouti à 85 condamnations et quatre acquittements, les autres cas n’ayant pas encore été jugés. La commission note aussi à la lecture du rapport du secrétariat du Premier ministre, en date du 29 août 2005, intitulé «One Year Performance of the Government, August 2004 - August 2005» (Bilan du gouvernement pour août 2004 - août 2005), qu’une section sur la lutte contre la traite des personnes, contenue dans le chapitre intitulé «Improving Law and Order» (Améliorer la législation et l’ordre), indique ce qui suit:
Le gouvernement, par le biais de l’Agence fédérale d’investigation, a pris des mesures sévères pour lutter contre la traite des personnes … En vue d’une action soutenue contre la traite des personnes, des unités de lutte contre la traite des personnes (ATU) ont été mises en place au siège de l’Agence fédérale d’investigation et dans les directions de zone. Ces unités sont chargées de faire appliquer la législation sur la prévention de la traite des personnes, à destination et en provenance du Pakistan. Afin d’obtenir l’appui de la société civile, des organisations non gouvernementales de premier plan ont aussi été mises à contribution pour fournir des informations et une assistance.
La commission prend aussi note de l’indication qui figure dans le rapport annuel de 2005 de la division juridique du ministère de la Loi, de la Justice et des Droits de l’homme selon laquelle, alors que le gouvernement a promulgué une ordonnance qui incrimine la traite des personnes, beaucoup doit être fait pour mettre en œuvre effectivement l’ordonnance.
19. La commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations récentes sur l’application de l’ordonnance PCHTO, y compris des statistiques (nombre de plaintes pour traite de personnes qui ont été enregistrées, nombre de personnes qui ont été arrêtées, poursuites en justice intentées, condamnations obtenues, sanctions infligées et indemnisations versées aux victimes) et copie de toutes les décisions de justice pertinentes. D’une manière plus générale, la commission espère que le gouvernement, conformément à l’article 25 de la convention, s’efforcera de déterminer si les sanctions prévues dans le cadre de l’ordonnance susmentionnée en cas de traite de personnes sont réellement appropriées, et de veiller à ce qu’elles le soient. La commission espère aussi que le gouvernement mettra tout en œuvre pour que l’ordonnance PCHTO soit strictement appliquée, et qu’il fournira des informations à cet égard – entre autres, informations récentes sur l’évolution du système des unités de lutte contre la traite des personnes et évaluation des points forts et des points faibles de ce système.
La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un très proche avenir.
En outre, la commission note avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente, qui était conçue dans les termes suivants:
La commission espère que le gouvernement ne manquera pas de prendre les mesures nécessaires dans un proche avenir.
La commission a pris note des communications suivantes reçues des organisations de travailleurs, qui contiennent des observations concernant l’application de la convention par le Pakistan: communications en date des 31 août et 19 septembre 2006 reçues de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) (désormais Confédération syndicale internationale (CSI)), communication en date du 30 mars 2007 reçue de la Fédération des syndicats du Pakistan (APFUTU) et communication en date du 2 mai 2007 reçue de la Fédération des travailleurs du Pakistan (PWF). La commission note que ces communications ont été transmises au gouvernement en septembre et octobre 2006 et en mai et juin 2007 pour tout commentaire qu’il aurait souhaité formuler sur les points qu’elles soulèvent. La commission espère que le gouvernement fournira ses commentaires avec son prochain rapport afin que la commission puisse les examiner à sa prochaine session.
La commission note par ailleurs que le rapport du gouvernement ne contient pas de réponse à ses commentaires antérieurs. Elle est donc conduite à renouveler son observation précédente, qui était conçue dans les termes suivants:
Mise en œuvre de la politique et du plan nationaux d’action pour l’abolition du travail en servitude. 3. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement fait état d’initiatives récentes qu’il prend ou qu’il envisage de prendre pour lutter contre le travail en servitude, apparemment dans le cadre de la politique et du plan nationaux d’action de 2001, parmi lesquelles:
5. Tout en reconnaissant les initiatives du gouvernement pour tenter de combattre le travail en servitude, la commission espère que les mesures nécessaires sont prises ou envisagées pour garantir la pleine application de la politique et du plan nationaux d’action de 2001 pour l’abolition du travail en servitude et pour la réinsertion des personnes affranchies. La commission espère que, dans son prochain rapport, le gouvernement fournira des informations détaillées sur les progrès accomplis et les résultats obtenus dans la pratique – y compris copie des rapports pertinents sur l’ensemble des activités, institutions et mandats dont il est question dans le plan d’action. La commission demande aussi au gouvernement de préciser la situation actuelle des comités de vigilance de district, leur rôle dans l’inspection du travail, et leur lien avec l’inspection du travail. Prière également d’indiquer les mesures que les magistrats de district et les comités de vigilance de district prennent pour garantir l’application effective de la loi BLSA, et l’accomplissement de leurs autres fonctions prévues dans la loi BLSA et le règlement de 1995, et de communiquer copie des rapports de suivi et d’évaluation élaborés par la Commission nationale pour l’abolition du travail en servitude et pour la réinsertion des personnes affranchies.
Programme spécial d’action pour lutter contre le travail forcé et le travail en servitude. 6. La commission note que, dans son rapport sur l’application de la convention (no 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, qui a été reçu en janvier 2005, le gouvernement indique que depuis 2002 il mène avec l’assistance technique du BIT un programme spécial d’action de lutte contre le travail forcé et le travail en servitude. Le gouvernement indique que, dans le cadre de ce programme, le BIT, entre autres, dispense une formation, sur les droits de l’homme et les questions ayant trait au travail en servitude, aux Nazims de district, aux membres des comités de vigilance et aux fonctionnaires du pouvoir judiciaire et de l’application des lois. Le BIT aide aussi le gouvernement à élaborer des partenariats avec les personnes intéressées, les employeurs et les travailleurs, fournit des services consultatifs en vue de la création d’un organisme national de haut niveau pour la lutte contre le travail forcé, et contribue au lancement de projets pilotes destinés à évaluer la faisabilité des approches qui ont été approuvées pour lutter contre ce problème. La commission demande au gouvernement de communiquer, dans son prochain rapport, des informations plus détaillées et plus complètes sur ce programme et son application, y compris copie des plus récents rapports d’évaluation des activités et résultats des programmes.
Servitude pour dettes: mesures visant à collecter les données permettant d’évaluer la nature et l’étendue du problème. 7. La commission note que, dans le cadre de la politique et du plan nationaux d’action de 2001, une étude nationale visant à évaluer l’ampleur du travail en servitude devait être entamée avant janvier 2002. Elle note que, dans son dernier rapport, le gouvernement indique que cette étude quantitative n’a pas été réalisée.
Travail en servitude dans l’agriculture. 11. Dans son observation précédente, la commission avait noté que, de l’avis du gouvernement, la législation du travail comportait des lacunes en ce qui concerne la main-d’œuvre du secteur agricole. La commission demande de nouveau au gouvernement de fournir d’autres informations sur cette question, de même que sur les mesures prises ou envisagées pour remédier à cette situation, dans le cadre de l’élimination du travail en servitude dans l’agriculture.
Travail en servitude des enfants. 12. Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur les progrès enregistrés dans le cadre de l’accord entre le Programme international pour l’abolition du travail des enfants (OIT/IPEC) et l’Association pakistanaise des fabricants et exportateurs de tapis (PCMEA), et dans le cadre de l’accord que le gouvernement a conclu en 1997 avec la Commission européenne et l’OIT en vue de l’adoption de mesures pour éliminer le travail des enfants en servitude. A propos de cette question et du problème général des enfants réduits en servitude, la commission constate que le gouvernement a ratifié la convention (no 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999. L’article 3 a) de cette convention indique que l’expression «les pires formes de travail des enfants» comprend «toutes les formes d’esclavage ou pratiques analogues, telles que la vente et la traite des enfants, la servitude pour dettes et le servage ainsi que le travail forcé ou obligatoire». La commission estime que ce problème peut être examiné plus spécifiquement dans le cadre de la convention no 182. La protection des enfants est renforcée par le fait que cette convention oblige les Etats qui la ratifient à prendre des mesures immédiates et efficaces pour assurer l’interdiction et l’élimination des pires formes de travail des enfants et ce, de toute urgence. Par conséquent, la commission demande au gouvernement de se reporter à ses commentaires sur l’application de la convention no 182.
13. La commission prend note avec intérêt de la promulgation de l’ordonnance de 2002 (PCHTO) sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes. Cette ordonnance, qui est entrée en vigueur en octobre 2002, sanctionne notamment la traite des personnes, qu’elle définit en partie comme étant les actes coercitifs qui visent à obtenir un bénéfice ou à exploiter des personnes à des fins de divertissement, d’esclavage ou de travail forcé (art. 2(h) et 3); prévoit des sanctions en cas de traite des personnes, notamment des peines d’emprisonnement allant jusqu’à sept ans et, dans le cas de traite de femmes, jusqu’à dix ans, ainsi que des amendes (art. 3); prévoit des sanctions spécifiques en cas de traite perpétrée par des associations organisées de malfaiteurs (art. 4), et en cas de récidives (art. 5); prévoit le versement de dommages et intérêts aux victimes (art. 6); et prévoit que les tribunaux peuvent entendre de ces cas et prendre des sanctions (art. 8 et 10). La commission demande au gouvernement de communiquer dans son prochain rapport copie des dernières réglementations qui ont été promulguées pour mettre en œuvre l’ordonnance sur la prévention et la lutte contre la traite de personnes.
Traite des personnes: mesures visant à collecter les données permettant d’évaluer la nature et l’étendue du problème. 14. La commission prend note du rapport de 2005 de l’Organisation internationale pour les migrations intitulé «Data and Research on Human Trafficking: A Global Survey» (Données et recherches sur la traite des êtres humains: enquête mondiale). Ce rapport indique que le Pakistan continue d’être un important pays de destination pour les femmes qui sont victimes de traite, ainsi qu’un important pays de transit pour les personnes venant du Bangladesh et allant dans les pays du Moyen-Orient. Parmi ces personnes, des femmes sont victimes d’exploitation sexuelle. Le rapport indique que les hommes sont rarement considérés comme des «victimes de traite» mais, plus souvent, comme des migrants en situation irrégulière, et que cette lacune fait que l’on dispose d’un volume restreint de connaissances et de données sur la traite des hommes en Asie du Sud. Le rapport souligne que, alors que ces études contribuent à comprendre les causes, sources, destinations et conséquences de la traite des personnes, les statistiques actuelles sont dépassées ou relèvent de l’anecdote, et qu’il est urgent de mener à l’échelle nationale des études de référence complètes afin d’élaborer une base de données sud-asiatiques sur la traite des personnes. Compte tenu de ces indications, la commission espère que le gouvernement entreprendra une étude nationale de référence sur la traite des personnes, en coopération avec les organisations d’employeurs et de travailleurs, et avec d’autres organisations et institutions sociétales, et qu’il indiquera les progrès accomplis à cet égard.
Mesures destinées à l’élimination effective de la traite des personnes. 15. La commission note avec intérêt que le gouvernement collabore avec l’OIM dans le cadre d’un programme d’action sur les questions relatives aux migrations, et qu’un des volets importants du programme est la question de la traite des personnes. La commission note qu’au douzième Sommet de l’Association sud-asiatique de coopération régionale (ASACR), qui s’est tenu en janvier 2004 à Islamabad, le gouvernement a approuvé la Déclaration d’Islamabad qui, entre autres, demande aux Etats Membres d’aller dans le sens d’une ratification prompte de la Convention de l’ASACR sur la prévention et l’élimination de la traite des femmes et des enfants à des fins de prostitution, convention qui a été adoptée en 2002 (paragr. 19). La commission note aussi qu’en mai 2005 des représentants du gouvernement et d’autres participants de la cinquième Conférence ministérielle sud-asiatique ont adopté la Déclaration d’Islamabad sur la révision des mesures prises et sur l’action à mener. Entre autres, ils ont reconnu les déficiences et les difficultés d’application dans plusieurs domaines, y compris l’insuffisance de l’engagement, de la sensibilisation, des mesures et des ressources pour lutter contre la violence à l’égard des femmes (paragr. 5(g)); et le manque de coopération et d’initiatives régionales de partenariat pour résoudre les problèmes, à l’échelle régionale, tels que la traite des femmes (paragr.5(q)). La commission espère que le gouvernement continuera de développer des politiques et de prendre des mesures pour éliminer effectivement la traite des personnes en droit et dans la pratique, conformément à la convention, et qu’il fournira dans son prochain rapport des informations détaillées à cet égard.
Traite des enfants. 16. La commission a pris note des allégations précédentes de la CISL, ainsi que des indications des rapports de l’OIM susmentionnés, selon lesquelles la traite d’enfants reste un problème grave au Pakistan. A propos de la traite d’enfants, comme elle l’a indiqué précédemment en ce qui concerne les enfants réduits en servitude, la commission demande au gouvernement de se référer à ses commentaires sur l’application de la convention no 182.
17. Dans ses commentaires précédents, la commission s’était référée aux informations fournies par le représentant gouvernemental devant la Commission de la Conférence en juin 1999, selon lesquelles une commission tripartite chargée de la consolidation, de la simplification et de la rationalisation de la législation du travail devait examiner un projet de modification de la loi de 1952 sur les services essentiels (maintien), loi qui prévoit que les fonctionnaires qui mettent unilatéralement terme à leur emploi sans le consentement de l’employeur sont passibles d’une peine d’emprisonnement. Le gouvernement avait indiqué dans son rapport de 2000 que le rapport final de cette commission était attendu pour fin septembre 2000. Etant donné que le dernier rapport du gouvernement ne contient pas de nouvelles informations sur cette question, la commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer copie du rapport de la commission tripartite. La commission exprime le ferme espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour rendre conformes à la convention les lois fédérales et provinciales sur les services essentiels, et qu’il fournira des informations sur les progrès réalisés à cet égard.
18. La commission demande de nouveau au gouvernement de fournir copie des textes complets des ordonnances suivantes qui ont été adoptées en 2000: l’ordonnance no XVII du 27 mai sur le retrait du service (facultés spéciales); l’ordonnance (modificatrice) no XX du 1er juin sur la fonction publique; et l’ordonnance (modificatrice) no LXIII du 6 décembre sur le service obligatoire dans les forces armées.
III. Article 25
Imposition de sanctions adéquates en cas d’exaction de travail forcé ou obligatoire
Application de la loi de 1992 sur l’abolition du système de travail en servitude. 19. La commission avait précédemment pris note des allégations contenues dans les communications de 2001 de la CISL selon lesquelles la loi de 1992 sur l’abolition du système de travail en servitude n’avait pas été appliquée dans la pratique dans la mesure où peu de fonctionnaires l’appliquent car ils craignent la colère des propriétaires fonciers, si bien que ces derniers recourent au travail forcé en toute impunité. Rappelant que l’article 25 de la convention dispose que le fait d’exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales réellement efficaces et strictement appliquées, la commission demande de nouveau des informations sur le nombre d’inspections qui ont été réalisées dans le cadre de la loi susmentionnée, et sur les poursuites en justice qui ont été intentées contre les employeurs de personnes réduites en servitude, y compris copie des décisions de justice sur ces cas.
Application de l’ordonnance de 2002 sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes. 20. A propos de l’application de l’ordonnance de 2002 (PCHTO) sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes, la commission prend note d’une déclaration devant la presse, en juin 2005, du ministre de l’Intérieur selon laquelle, de 2003 à mai 2005, 888 plaintes pour traite des personnes, dans le cadre de l’application de l’ordonnance susmentionnée, ont été enregistrées par l’Agence fédérale d’investigation; 737 auteurs présumés de traite ont été arrêtés; dans 336 de ces cas, les enquêtes qui ont été menées ont débouché sur des poursuites en justice, et ces poursuites ont abouti à 85 condamnations et quatre acquittements, les autres cas n’ayant pas encore été jugés. La commission note aussi à la lecture du rapport du secrétariat du Premier ministre, en date du 29 août 2005, intitulé «One Year Performance of the Government, August 2004 - August 2005» (Bilan du gouvernement pour août 2004 - août 2005), qu’une section sur la lutte contre la traite des personnes, contenue dans le chapitre intitulé «Improving Law and Order» (Améliorer la législation et l’ordre), indique ce qui suit:
21. La commission demande au gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations récentes sur l’application de l’ordonnance PCHTO, y compris des statistiques (nombre de plaintes pour traite de personnes qui ont été enregistrées, nombre de personnes qui ont été arrêtées, poursuites en justice intentées, condamnations obtenues, sanctions infligées et indemnisations versées aux victimes) et copie de toutes les décisions de justice pertinentes. D’une manière plus générale, la commission espère que le gouvernement, conformément à l’article 25 de la convention, s’efforcera de déterminer si les sanctions prévues dans le cadre de l’ordonnance susmentionnée en cas de traite de personnes sont réellement appropriées, et de veiller à ce qu’elles le soient. La commission espère aussi que le gouvernement mettra tout en œuvre pour que l’ordonnance PCHTO soit strictement appliquée, et qu’il fournira des informations à cet égard – entre autres, informations récentes sur l’évolution du système des unités de lutte contre la traite des personnes et évaluation des points forts et des points faibles de ce système.
- examiner l’application de la loi BLSA et du plan d’action;
- superviser l’action des comités de vigilance de district qui ont été mis en place en vertu de l’article 15 de la loi BLSA et du règlement de 1995 sur l’abolition du système de travail en servitude;
- répondre aux préoccupations des entités nationales et internationales qui s’occupent du travail en servitude et du travail forcé.
- la création d’une unité de service d’aide juridique au sein des départements du travail de Punjab et NWFP - ligne d’appel gratuit destinée à fournir orientations et aide juridique aux victimes de travail en servitude; par ailleurs il est envisagé d’engager des experts juridiques pour fournir une assistance juridique;
- lancement d’un programme de construction de logements à prix modérés pour les familles affranchies du travail en servitude dans le secteur agricole de Sindh, initiative qui facilitera aussi la réadaptation de ces familles;
- tenue d’ateliers de formation pour les fonctionnaires principaux de district et d’autres personnes intéressées afin d’accroître leurs capacités et de leur permettre d’élaborer des programmes, à l’échelle du district, pour identifier les travailleurs soumis à la servitude et activer les comités de vigilance de district; et
- incorporation de la question du travail en servitude dans les programmes d’études juridiques et les programmes des instituts de formation de la police et du service public, afin de sensibiliser à cette question les fonctionnaires des services judiciaires, de l’application des lois et du service public; et tenue de séminaires de renforcement des capacités.
5. Tout en reconnaissant les initiatives du gouvernement pour tenter de combattre le travail en servitude, la commission espère que les mesures nécessaires sont prises ou envisagées pour garantir la pleine application de la politique et du plan nationaux d’action de 2001 pour l’abolition du travail en servitude et pour la réinsertion des personnes affranchies. La commission espère que, dans son prochain rapport, le gouvernement fournira des informations détaillées sur les progrès accomplis et les résultats obtenus dans la pratique - y compris copie des rapports pertinents sur l’ensemble des activités, institutions et mandats dont il est question dans le plan d’action. La commission demande aussi au gouvernement de préciser la situation actuelle des comités de vigilance de district, leur rôle dans l’inspection du travail, et leur lien avec l’inspection du travail. Prière également d’indiquer les mesures que les magistrats de district et les comités de vigilance de district prennent pour garantir l’application effective de la loi BLSA, et l’accomplissement de leurs autres fonctions prévues dans la loi BLSA et le règlement de 1995, et de communiquer copie des rapports de suivi et d’évaluation élaborés par la Commission nationale pour l’abolition du travail en servitude et pour la réinsertion des personnes affranchies.
Programme spécial d’action pour lutter contre le travail forcé et le travail en servitude. 6. La commission note que, dans son rapport sur l’application de la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, qui a été reçu en janvier 2005, le gouvernement indique que depuis 2002 il mène avec l’assistance technique du BIT un programme spécial d’action de lutte contre le travail forcé et le travail en servitude. Le gouvernement indique que, dans le cadre de ce programme, le BIT, entre autres, dispense une formation, sur les droits de l’homme et les questions ayant trait au travail en servitude, aux Nazims de district, aux membres des comités de vigilance et aux fonctionnaires du pouvoir judiciaire et de l’application des lois. Le BIT aide aussi le gouvernement à élaborer des partenariats avec les personnes intéressées, les employeurs et les travailleurs, fournit des services consultatifs en vue de la création d’un organisme national de haut niveau pour la lutte contre le travail forcé, et contribue au lancement de projets pilotes destinés à évaluer la faisabilité des approches qui ont été approuvées pour lutter contre ce problème. La commission demande au gouvernement de communiquer, dans son prochain rapport, des informations plus détaillées et plus complètes sur ce programme et son application, y compris copie des plus récents rapports d’évaluation des activités et résultats des programmes.
8. La commission prend note d’un rapport de 2004 sur une initiative du ministère du Travail et du BIT intitulé «Etudes d’évaluation rapide du travail en servitude dans différents secteurs au Pakistan». Ce rapport contient les résultats et les conclusions de plusieurs études d’évaluation rapide qu’ont menées d’octobre 2002 à janvier 2003 des équipes de chercheurs sociaux, sous les auspices du Forum de recherche sur le travail en servitude. Le forum a pour objectif d’enquêter sur l’existence et la nature du travail en servitude dans dix secteurs - agriculture, construction, tissage de tapis, briqueterie, pêcheries marines, exploitation minière, fabrication de verroterie, tanneries, travail domestique et mendicité - et d’en tirer des conclusions préliminaires. Le projet constituait la première phase d’un programme plus ample de recherches et était destiné à préparer la voie à des études sectorielles détaillées et à une enquête nationale pour déterminer l’existence du travail en servitude partout dans le pays, comme le prévoit le plan national d’action du gouvernement. Les études d’évaluation rapide ont mis essentiellement l’accent sur la servitude pour dettes mais ont aussi examiné d’autres formes de travail en servitude, et de travail forcé non lié à une dette.
Travail en servitude des enfants. 12. Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur les progrès enregistrés dans le cadre de l’accord entre le Programme international pour l’abolition du travail des enfants (OIT/IPEC) et l’Association pakistanaise des fabricants et exportateurs de tapis (PCMEA), et dans le cadre de l’accord que le gouvernement a conclu en 1997 avec la Commission européenne et l’OIT en vue de l’adoption de mesures pour éliminer le travail des enfants en servitude. A propos de cette question et du problème général des enfants réduits en servitude, la commission constate que le gouvernement a ratifié la convention (nº 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999. L’article 3 a) de cette convention indique que l’expression «les pires formes de travail des enfants» comprend «toutes les formes d’esclavage ou pratiques analogues, telles que la vente et la traite des enfants, la servitude pour dettes et le servage ainsi que le travail forcé ou obligatoire». La commission estime que ce problème peut être examiné plus spécifiquement dans le cadre de la convention no 182. La protection des enfants est renforcée par le fait que cette convention oblige les Etats qui la ratifient à prendre des mesures immédiates et efficaces pour assurer l’interdiction et l’élimination des pires formes de travail des enfants et ce, de toute urgence. Par conséquent, la commission demande au gouvernement de se reporter à ses commentaires sur l’application de la convention no 182.
21. La commission demande au gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations récentes sur l’application de l’ordonnance PCHTO, y compris des statistiques (nombre de plaintes pour traite de personnes qui ont été enregistrées, nombre de personnes qui ont été arrêtées, poursuites en justice intentées, condamnations obtenues, sanctions infligées et indemnisations versées aux victimes) et copie de toutes les décisions de justice pertinentes. D’une manière plus générale, la commission espère que le gouvernement, conformément à l’article 25 de la convention, s’efforcera de déterminer si les sanctions prévues dans le cadre de l’ordonnance susmentionnée en cas de traite de personnes sont réellement appropriées, et de veiller à ce qu’elles le soient. La commission espère aussi que le gouvernement mettra tout en œuvre pour que l’ordonnance PCHTO soit strictement appliquée, et qu’il fournira des informations à cet égard - entre autres, informations récentes sur l’évolution du système des unités de lutte contre la traite des personnes et évaluation des points forts et des points faibles de ce système.
1. La commission a pris note du rapport du gouvernement. Elle a également pris note de deux communications parvenues en septembre et novembre 2002, émanant, pour la première, de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) et, pour la seconde, de la Fédération des syndicats du Pakistan (APFTU), qui contiennent des observations sur l’application de la convention par le Pakistan. Elle note que ces communications ont été transmises au gouvernement en octobre et décembre 2002 pour que celui-ci puisse faire à ce propos les commentaires qu’il juge appropriés. Elle exprime l’espoir que le gouvernement fournira ses commentaires avec son prochain rapport de manière à permettre à la commission de les examiner à sa prochaine session.
2. Dans ses précédents commentaires, la commission avait pris note des difficultés de mise en œuvre de la loi de 1992 sur l’abolition du système du travail en servitude (BLSA). Elle se référait aux allégations qui avaient fait l’objet de communications de la CISL reçues en 2001 selon lesquelles le travail en servitude, bien qu’interdit par la loi, reste généralisé dans la pratique. La CISL citait à l’appui une estimation du Programme international pour l’abolition travail des enfants (IPEC) de l’OIT selon laquelle au Pakistan plusieurs millions de travailleurs, dont une forte proportion d’enfants, restent en servage. La commission avait également pris note d’indications de la CISL selon lesquelles la servitude pour dettes et la réduction au servage d’adultes et d’enfants demeurent pratique courante dans l’agriculture, dans la construction en milieu rural, dans les briqueteries et dans la fabrication de tapis. Les estimations du nombre total de travailleurs forcés varient considérablement, mais il n’est pas contesté que, dans de nombreuses parties du Pakistan, la servitude pour dettes et le servage sont encore très courants et ont une longue histoire. De l’avis de la CISL, la loi BLSA, qui interdit le travail en servitude, reste inefficace face aux problèmes existant dans la pratique. La CISL maintient ce point de vue dans une communication plus récente parvenue en 2002. Ce point de vue est également partagé par l’APFTU dans sa communication de 2002, mentionnée plus haut.
3. La commission avait noté que, dans ses communications de 2001 et 2002, la CISL se référait à certaines études menées par un organisme non gouvernemental - le Pakistan Institute for Labour Education and Research (PILER) - estimant à plus de 1,8 million le nombre de métayers en situation de servitude pour dettes dans l’ensemble du pays en 2000. Cette même étude indique que, en se basant sur une définition large de la servitude (imposition de travail forcé non payé ou payé seulement de manière insignifiante par le propriétaire sur sa ferme ou sa maison (begar), sans considération du montant de la dette), ce chiffre pourrait même atteindre 6,8 millions pour l’année 2000 dans l’ensemble du pays. La CISL allègue que ni les comités de vigilance ni les magistrats de district n’ont réussi à identifier ni à libérer des travailleurs en servitude, alors que ces fonctions leur avaient été attribuées par la loi.
4. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique que la politique et le plan national d’action pour l’abolition du travail en servitude et pour la réinsertion des personnes affranchies ont été approuvés par le Cabinet fédéral en septembre 2001. Elle prie le gouvernement de communiquer copie de ce document et de fournir des informations sur son application dans la pratique. La commission a également pris note des indications succinctes du gouvernement concernant les inspections systématiques menées par la Direction du travail assistée par des commissions consultatives tripartites, pour vérifier la situation du travail des d’enfants et du travail en servitude, ainsi que des informations concernant la composition et les fonctions des comités de vigilance de district chargés d’observer l’action déployée dans le cadre de la politique et du plan national susvisés. Se référant aux allégations de la CISL selon lesquelles les comités de vigilance, bien qu’ayant été constitués théoriquement dans le milieu des années quatre-vingt-dix, sont en réalité inexistants, la commission exprime l’espoir que le gouvernement donnera des éclaircissements sur ce point et décrira les mesures prises ou envisagées pour assurer que les comités de vigilance fonctionnent effectivement.
5. Tout en prenant note de la déclaration du gouvernement selon laquelle la loi BLSA est difficile à appliquer parce qu’il est difficile d’identifier les travailleurs en servitude, la commission souligne que des données précises sont un élément déterminant à la fois pour mettre au point les systèmes les plus efficaces de lutte contre le travail en servitude et pour disposer d’une véritable base d’évaluation de l’efficacité de tels systèmes. Elle exprime donc l’espoir que le gouvernement procèdera à une étude statistique sur le travail en servitude dans l’ensemble du pays, en s’appuyant sur une méthodologie valable et en coopérant avec les organisations d’employeurs et de travailleurs et avec les organismes et institutions s’occupant des droits de l’homme, et qu’il fournira des informations sur les progrès accomplis dans ce domaine. Notant également que, de l’avis du gouvernement, la législation du travail comporte des lacunes par rapport à la main-d’œuvre du secteur agricole, la commission exprime l’espoir que le gouvernement fournira de nouvelles informations sur cette question, de même que sur les mesures prises ou envisagées pour remédier à la situation dans le contexte de l’éradication du travail forcé dans l’agriculture.
6. Dans ses précédents commentaires, la commission demandait au gouvernement de fournir des informations sur les progrès enregistrés dans le cadre de l’accord entre le Programme international pour l’abolition du travail des enfants (IPEC) et l’Association pakistanaise des fabricants et exportateurs de tapis (PCMEA) et dans le cadre de l’accord signé par le gouvernement en 1997 avec la Commission européenne et l’OIT en vue de l’adoption de mesures pour l’éradication du travail d’enfants en servitude. La commission s’était déclarée préoccupée devant l’inaction du gouvernement quant à la collecte de statistiques fiables sur le nombre d’enfants travaillant en servitude.
7. Tout en prenant note des indications succinctes fournies par le gouvernement dans son rapport sur les mesures prises en application de la loi sur l’emploi des enfants, comme le nombre des inspections menées, les poursuites exercées, les affaires jugées et les amendes infligées, la commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur les progrès obtenus quant à la mise en œuvre des accords susvisés et sur les résultats pratiques obtenus. Prière également de fournir un rapport exhaustif contenant des statistiques à jour sur le nombre d’enfants en servitude. Dans le rapport reçu en 2000, le gouvernement indiquait qu’une enquête basée sur les établissements serait prochainement menée par le Bureau fédéral de statistiques pour mesurer l’incidence du travail des enfants dans les métiers dangereux. La commission exprime l’espoir que le gouvernement fournira des informations sur cette enquête et ses résultats, notamment en ce qui concerne l’incidence du travail des enfants en servitude.
8. La commission avait précédemment noté que, selon les allégations de la CISL, la traite de personnes, y compris d’enfants, est un problème grave au Pakistan. La CISL alléguait en effet que, selon certaines sources, plus de 100 femmes seraient introduites clandestinement chaque jour du Bangladesh au Pakistan et vendues pour être prostituées ou exploitées à d’autres formes de travail forcé. Selon ces sources, il y aurait également des femmes venant du Myanmar, d’Afghanistan, de Sri Lanka et d’Inde pour être vendues, pour la plupart, dans des magasins et des maisons closes de Karachi. Plusieurs centaines de milliers de femmes seraient victimes d’un tel trafic au Pakistan et ce chiffre atteindrait même, selon certains rapports, 1,2 million. La CISL indiquait également que, pour ce qui est des enfants soumis à la prostitution au Pakistan, les estimations sont variables mais ce chiffre se situerait aux alentours de 40 000.
9. La commission prend également note des indications de la CISL selon lesquelles plusieurs centaines de garçonnets auraient été enlevés au Pakistan pour être envoyés dans les Etats du golfe Persique comme jockeys de chameau. Selon ces allégations, l’esclavage et la traite d’enfants au Pakistan seraient un problème majeur, les enlèvements d’enfants étant pratiqués pour obtenir une rançon, par vengeance contre la famille ou simplement pour perpétuer l’esclavage. Dans certaines zones rurales, les enfants seraient placés en servitude pour dettes en échange d’argent ou de terres.
10. La commission demande au gouvernement de répondre dans son prochain rapport aux allégations contenues dans les communications de la CISL.
11. Dans ses précédents commentaires, la commission se référait aux informations fournies par le représentant gouvernemental devant la Commission de la Conférence en juin 1999 selon lesquelles une modification de la loi sur les services essentiels (maintien), en vertu de laquelle des employés des services publics mettant unilatéralement terme à leur emploi sans consentement de l’employeur sont passibles d’une peine d’emprisonnement, devait être étudiée par une commission tripartite chargée de la consolidation, de la simplification et de la rationalisation de la législation du travail. Le gouvernement indiquait dans son rapport de 2000 que le rapport final de cette commission était attendu pour fin septembre 2000. Le dernier rapport du gouvernement ne contenant aucune information à ce sujet, la commission le prie à nouveau de communiquer copie de ce rapport. Elle exprime le ferme espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour rendre les lois fédérales et provinciales sur les services essentiels (maintien) conformes à la convention et qu’il fournira des informations sur les progrès réalisés à cet égard.
12. La commission demande à nouveau que soit communiqué le texte intégral des ordonnances suivantes, adoptées en 2000: l’ordonnance no XVII du 27 mai sur le retrait du service (pouvoirs spéciaux); l’ordonnance (modificatrice) no XX du 1er juin 2000 sur la fonction publique; l’ordonnance no LXIII du 6 décembre 2000 sur le service obligatoire dans les forces armées (amendement).
13. La commission avait pris note des allégations contenues dans une communication de la CISL de 2000 selon lesquelles la loi de 1992 sur l’abolition du système de travail en servitude n’a pas été appliquée dans la pratique, peu de fonctionnaires étant portés à l’appliquer par crainte des propriétaires fonciers, tant et si bien que ces derniers recourent au travail forcé en toute impunité. La commission avait demandé des informations sur le nombre d’inspections menées, de poursuites exercées et de condamnations prononcées en vertu de la loi de 1991 sur l’emploi d’enfants, du règlement de 1995 sur l’emploi d’enfants, de la loi de 1992 sur le système de travail en servitude (abolition) et du règlement de 1995 sur le système de travail en servitude (abolition). Tout en prenant note des données communiquées par le gouvernement dans son rapport en ce qui concerne la loi sur l’emploi d’enfants, la commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur chacune des lois pertinentes et pour chacune des provinces. Elle souhaiterait également que, d’une manière plus générale, le gouvernement fournisse des informations sur l’application des lois tendant à réprimer l’imposition illégale de travail forcé ou obligatoire (comme l’article 374 du Code pénal) et sur les mesures prises pour assurer que les sanctions pénales imposées par la loi sont réellement efficaces et strictement appliquées, comme prévu par la convention.
I. La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente sur les points suivants:
Travail en servitude pour dettes 1. La commission a pris note des communications de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), datées du 29 août 2001 et du 18 septembre 2001, présentant des commentaires sur le respect de la convention, dont copie a été transmise au gouvernement, respectivement le 18 octobre 2001 et le 25 octobre 2001, pour tout commentaire qu’il jugerait opportun de formuler sur les points soulevés dans les communications. Dans sa communication du 18 septembre 2001, la CISL allègue que le travail forcé est interdit par la loi mais qu’il est très répandu en pratique. La CISL s’est référée à une estimation du programme focal sur le travail des enfants (IPEC) de l’OIT selon laquelle il y a plusieurs millions de travailleurs en servitude au Pakistan, dont un pourcentage important sont des enfants. La CISL mentionne que des études de syndicats ont dénombré 200 000 familles faisant du travail en servitude dans la seule industrie des fours à briques. Elle indique que la loi de 1992 sur l’abolition du système du travail en servitude interdit le travail en servitude, mais est inefficace pour résoudre les problèmes en pratique. 2. La commission note également les indications de la CISL selon lesquelles la servitude pour dettes et le travail en servitude, par des adultes comme par des enfants, se retrouvent le plus souvent dans l’agriculture, la construction en zones rurales, les fours à briques et la manufacture de tapis. Les estimations du nombre de travailleurs forcés sont très variées, mais il n’est pas contesté que dans de nombreuses parties du Pakistan, la pratique de la servitude pour dettes et du travail en servitude existe depuis de nombreuses années et est toujours très fréquente. La CISL allègue que, même si les efforts fournis par des organisations non gouvernementales, telles que le «Bonded Labour Liberation Front», ont permis de libérer des milliers de travailleurs en servitude, ce n’est pourtant qu’une toute petite proportion par rapport au nombre total de travailleurs en servitude, et le problème reste endémique. La CISL allègue qu’en raison du manque d’alternatives certaines personnes libérées de la servitude pour dettes seraient retournées au travail en servitude. 3. La commission note la communication de la CISL du 29 août 2001, dans laquelle un rapport d’Anti-Slavery International indique que des études récentes par l’organisation non gouvernementale «Pakistan Institute for Labour Education and Research» (PILER) estiment le nombre de métayers en servitude pour dettes pour l’ensemble du pays à plus de 1,8 million de personnes, pour l’année 2000. Selon le rapport, cette estimation n’inclut pas le travail forcé demandé par le propriétaire à ses locataires. Les études estiment que la limite supérieure de gens dans cette forme de servitude - utilisant la définition au sens large «d’imposition de travail forcé non payé ou seulement de manière insignifiante, par le propriétaire sur sa ferme ou sa maison (begar) indépendamment de l’importance de la dette»- serait de 6,8 millions de personnes à travers le Pakistan pour l’année 2000. 4. Le rapport communiqué par la CISL indique également que PILER a aussi fait une étude sur des groupes de hari en servitude dans la province de Sindha, dont 1 000 individus ont répondu (représentant plus de 6 000 personnes). Le rapport indique que les personnes qui ont répondu à l’étude indiquent que 2 226 hommes, femmes et enfants ont été sujets à des restrictions dans leur liberté de mouvement et que plus de 608 hommes et femmes ont été enchaînés. Selon le rapport, les informations démontrent clairement que le travail en servitude affecte des millions de personnes au Pakistan et est accompagné d’autres violations des droits de l’homme extrêmement sérieuses. 5. La commission note les indications du rapport d’Anti-Slavery International rapportant qu’en avril 2001 le gouvernement a publié une version révisée de l’avant-projet sur la politique nationale et plan d’action pour l’abolition du travail en servitude et la réhabilitation des travailleurs en servitude ayant été libérés. Le rapport indique qu’il s’agit d’un avant-projet et qu’il doit être approuvé par le cabinet fédéral. La commission prie le gouvernement de fournir une copie de l’avant-projet ainsi que des informations sur son approbation finale et sur l’application de la politique et la mise en œuvre du plan d’action. 6. La commission espère que le gouvernement présentera ses commentaires sur les points soulevés dans les rapports communiqués par la CISL. Accords spécifiques portant sur l’élimination du travail des enfants en servitude 7. Dans son observation précédente, la commission a demandé au gouvernement de fournir des informations sur les progrès dans la mise en œuvre de l’accord entre le Programme international de l’OIT pour l’abolition du travail des enfants (IPEC) et l’Association pakistanaise des fabricants et exportateurs de tapis (PCMEA), notamment à l’égard du but, à court terme, de retirer progressivement quelque 8 000 enfants du travail dans l’industrie du tapis sur une période de trente-six mois. La commission a également demandé au gouvernement de communiquer des informations sur les progrès de la mise en œuvre de l’accord signé en 1997 avec la Commission européenne et l’OIT concernant l’élimination du travail des enfants en servitude. La commission exprime de nouveau son inquiétude face à l’inaction du gouvernement en ce qui a trait à la collecte de données statistiques fiables sur le nombre d’enfants travaillant en servitude. 8. La commission prie de nouveau le gouvernement de fournir des informations sur le progrès dans la mise en œuvre de ces accords et sur les résultats obtenus, ainsi qu’un rapport contenant des données statistiques sur le nombre d’enfants travaillant en servitude. Dans son rapport, le gouvernement a indiqué qu’une étude empirique sera bientôt menée par le bureau fédéral des statistiques afin de déterminer le nombre d’enfants affectés à des travaux dangereux. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur les résultats de l’étude, notamment sur l’incidence du travail en servitude. Traite de personnes 9. La commission note les allégations de la CISL selon lesquelles la traite de personnes, comprenant la traite d’enfants, est un problème sérieux au Pakistan. La confédération affirme que certains rapports semblent indiquer que plus de 100 femmes font l’objet d’un trafic entre le Pakistan et le Bangladesh chaque jour, et sont vendues à des fins de prostitution ou à d’autres formes de travail forcé. D’après ces allégations, il a été reporté que des femmes arrivent également de Birmanie, d’Afghanistan, de Sri Lanka et d’Inde, et beaucoup d’entre elles sont achetées et vendues dans des commerces et maisons de tolérance de Karachi. Le nombre de femmes faisant l’objet d’un trafic au Pakistan est estiméà plusieurs centaines de milliers, et selon certains rapports leur nombre pourrait atteindre 1,2 million. La CISL indique également que les estimations du nombre d’enfants prostitués au Pakistan varient, mais que selon la plupart il se chiffrerait autour de 40 000. 10. La commission note les allégations de la CISL selon lesquelles il y aurait également des rapports indiquant que plusieurs centaines d’enfants pakistanais ont été kidnappés et envoyés dans les Etats du Golfe persique pour travailler comme jockeys de chameaux. D’après ces allégations, l’esclavage et le trafic d’enfants au Pakistan sont un problème majeur, et l’enlèvement d’enfants survient soit pour une rançon, soit à titre de revanche contre la famille de l’enfant ou simplement à des fins d’esclavage. Dans quelques régions rurales, des enfants sont vendus en servitude pour dette en échange d’argent ou de terre. 11. La commission espère que le gouvernement présentera ses commentaires sur les allégations à ce sujet contenues dans les rapports communiqués par la CISL. Restrictions à la liberté de quitter son emploi 12. Dans sa précédente observation, la commission a noté que le représentant gouvernemental a informé la Commission de la Conférence en juin 1999 que l’amendement de la loi sur les services essentiels, en vertu de laquelle les personnes au service du gouvernement qui mettent fin à leur emploi sans le consentement de leur employeur se rendent passibles de peines d’emprisonnement, devait être examiné par la Commission tripartite sur la consolidation, la simplification et la rationalisation des lois du travail. La commission note que le rapport du gouvernement indique que le rapport final de la Commission était attendu pour la fin de septembre 2000. La commission prie le gouvernement de fournir une copie du rapport. La commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires afin de rendre les lois fédérales et provinciales sur les services essentiels conformes à la convention, et le prie de fournir des informations sur les progrès réalisés vers cet objectif. 13. A cet égard, la commission demande également au gouvernement de fournir le texte complet des textes législatifs suivants adoptés en 2000: l’ordonnance no XVII du 27 mai 2000 sur le renvoi du service (pouvoirs spéciaux); l’ordonnance no XX du 1er juin 2000 sur les fonctionnaires publics (amendements); et l’ordonnance no LXIII du 6 décembre 2000 sur le service obligatoire dans les forces armées (amendement). Article 25 de la convention 14. La commission note l’allégation contenue dans le rapport d’août 2001 communiqué par la CISL, selon laquelle la loi de 1992 sur l’abolition du système du travail en servitude n’a pas été mise en œuvre, peu de fonctionnaires étant disposés à appliquer la loi de peur de s’attirer la colère des propriétaires, ce qui permet à ces derniers de faire usage de travail forcé en toute impunité. La commission note également l’allégation de la CISL contenue dans son communiqué du 18 septembre 2001 selon laquelle, malgré l’adoption de règlements d’application en 1995, la loi de 1992 sur l’abolition du système du travail en servitude n’est pas parvenue à s’attaquer efficacement au problème dans la pratique. 15. La commission a précédemment exprimé sa préoccupation en ce qui a trait aux inspections, poursuites et condamnations de contrevenants en vertu de la loi de 1991 sur le travail des enfants, du règlement de 1995 sur le travail des enfants, de la loi de 1992 sur l’abolition du système de travail en servitude et du règlement de 1995 sur l’abolition du système de travail en servitude. Dans son observation précédente, la commission a demandé des informations sur les mesures prises pour renforcer l’efficacité des comités de vigilance, sur les méthodes de coopération et de communication entre les comités de vigilance et les magistrats, et sur le rôle des magistrats dans le processus d’identification, de libération et de réhabilitation des travailleurs en servitude. Dans son rapport, le gouvernement a indiqué qu’il était en consultation avec les secrétaires en chef provinciaux afin d’obtenir de plus amples informations sur ces questions. La commission en a pris bonne note et prie le gouvernement de faire suivre les informations sur chacune de ces questions. 16. La commission avait exprimé sa préoccupation à l’égard du rôle des magistrats dans le processus d’identification, de libération et de réhabilitation des travailleurs en servitude. Elle note qu’aucune information à ce sujet n’a été communiquée et demande, par conséquent, de nouveau au gouvernement de fournir des informations à ce sujet. 17. La commission a demandé précédemment des données statistiques sur le nombre d’inspections, de poursuites et de condamnations des contrevenants en vertu de la loi de 1991 sur le travail des enfants, du règlement de 1995 sur le travail des enfants, de la loi de 1992 sur l’abolition du système de travail en servitude et du règlement de 1995 sur l’abolition du système de travail en servitude. La commission note que les données fournies par le gouvernement dans son rapport ne concernent que la province de Sindha et n’indiquent pas en vertu de quelle loi les poursuites ont été prises. La commission demande au gouvernement de fournir des informations concernant chacune des provinces ainsi que sur chacune des lois concernées. Elle demande également que le gouvernement fournisse des informations sur la mise en application des lois ayant pour but la répression du travail forcé ou obligatoire et sur les mesures prises pour assurer que les sanctions pénales soient adéquates et strictement appliquées, tel que requis par la convention. La commission exprime l’espoir que le gouvernement présentera ses commentaires en réponse aux questions soulevées dans les rapports communiqués par la CISL.
Travail en servitude pour dettes
1. La commission a pris note des communications de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), datées du 29 août 2001 et du 18 septembre 2001, présentant des commentaires sur le respect de la convention, dont copie a été transmise au gouvernement, respectivement le 18 octobre 2001 et le 25 octobre 2001, pour tout commentaire qu’il jugerait opportun de formuler sur les points soulevés dans les communications. Dans sa communication du 18 septembre 2001, la CISL allègue que le travail forcé est interdit par la loi mais qu’il est très répandu en pratique. La CISL s’est référée à une estimation du programme focal sur le travail des enfants (IPEC) de l’OIT selon laquelle il y a plusieurs millions de travailleurs en servitude au Pakistan, dont un pourcentage important sont des enfants. La CISL mentionne que des études de syndicats ont dénombré 200 000 familles faisant du travail en servitude dans la seule industrie des fours à briques. Elle indique que la loi de 1992 sur l’abolition du système du travail en servitude interdit le travail en servitude, mais est inefficace pour résoudre les problèmes en pratique.
2. La commission note également les indications de la CISL selon lesquelles la servitude pour dettes et le travail en servitude, par des adultes comme par des enfants, se retrouvent le plus souvent dans l’agriculture, la construction en zones rurales, les fours à briques et la manufacture de tapis. Les estimations du nombre de travailleurs forcés sont très variées, mais il n’est pas contesté que dans de nombreuses parties du Pakistan, la pratique de la servitude pour dettes et du travail en servitude existe depuis de nombreuses années et est toujours très fréquente. La CISL allègue que, même si les efforts fournis par des organisations non gouvernementales, telles que le «Bonded Labour Liberation Front», ont permis de libérer des milliers de travailleurs en servitude, ce n’est pourtant qu’une toute petite proportion par rapport au nombre total de travailleurs en servitude, et le problème reste endémique. La CISL allègue qu’en raison du manque d’alternatives certaines personnes libérées de la servitude pour dettes seraient retournées au travail en servitude.
3. La commission note la communication de la CISL du 29 août 2001, dans laquelle un rapport d’Anti-Slavery International indique que des études récentes par l’organisation non gouvernementale «Pakistan Institute for Labour Education and Research» (PILER) estiment le nombre de métayers en servitude pour dettes pour l’ensemble du pays à plus de 1,8 million de personnes, pour l’année 2000. Selon le rapport, cette estimation n’inclut pas le travail forcé demandé par le propriétaire à ses locataires. Les études estiment que la limite supérieure de gens dans cette forme de servitude - utilisant la définition au sens large «d’imposition de travail forcé non payé ou seulement de manière insignifiante, par le propriétaire sur sa ferme ou sa maison (begar) indépendamment de l’importance de la dette»- serait de 6,8 millions de personnes à travers le Pakistan pour l’année 2000.
4. Le rapport communiqué par la CISL indique également que PILER a aussi fait une étude sur des groupes de hari en servitude dans la province de Sindha, dont 1 000 individus ont répondu (représentant plus de 6 000 personnes). Le rapport indique que les personnes qui ont répondu à l’étude indiquent que 2 226 hommes, femmes et enfants ont été sujets à des restrictions dans leur liberté de mouvement et que plus de 608 hommes et femmes ont été enchaînés. Selon le rapport, les informations démontrent clairement que le travail en servitude affecte des millions de personnes au Pakistan et est accompagné d’autres violations des droits de l’homme extrêmement sérieuses.
5. La commission note les indications du rapport d’Anti-Slavery International rapportant qu’en avril 2001 le gouvernement a publié une version révisée de l’avant-projet sur la politique nationale et plan d’action pour l’abolition du travail en servitude et la réhabilitation des travailleurs en servitude ayant été libérés. Le rapport indique qu’il s’agit d’un avant-projet et qu’il doit être approuvé par le cabinet fédéral. La commission prie le gouvernement de fournir une copie de l’avant-projet ainsi que des informations sur son approbation finale et sur l’application de la politique et la mise en œuvre du plan d’action.
6. La commission espère que le gouvernement présentera ses commentaires sur les points soulevés dans les rapports communiqués par la CISL.
Accords spécifiques portant sur l’élimination du travail des enfants en servitude
7. Dans son observation précédente, la commission a demandé au gouvernement de fournir des informations sur les progrès dans la mise en œuvre de l’accord entre le Programme international de l’OIT pour l’abolition du travail des enfants (IPEC) et l’Association pakistanaise des fabricants et exportateurs de tapis (PCMEA), notamment à l’égard du but, à court terme, de retirer progressivement quelque 8 000 enfants du travail dans l’industrie du tapis sur une période de trente-six mois. La commission a également demandé au gouvernement de communiquer des informations sur les progrès de la mise en œuvre de l’accord signé en 1997 avec la Commission européenne et l’OIT concernant l’élimination du travail des enfants en servitude. La commission exprime de nouveau son inquiétude face à l’inaction du gouvernement en ce qui a trait à la collecte de données statistiques fiables sur le nombre d’enfants travaillant en servitude.
8. La commission prie de nouveau le gouvernement de fournir des informations sur le progrès dans la mise en œuvre de ces accords et sur les résultats obtenus, ainsi qu’un rapport contenant des données statistiques sur le nombre d’enfants travaillant en servitude. Dans son rapport, le gouvernement a indiqué qu’une étude empirique sera bientôt menée par le bureau fédéral des statistiques afin de déterminer le nombre d’enfants affectés à des travaux dangereux. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur les résultats de l’étude, notamment sur l’incidence du travail en servitude.
Traite de personnes
9. La commission note les allégations de la CISL selon lesquelles la traite de personnes, comprenant la traite d’enfants, est un problème sérieux au Pakistan. La confédération affirme que certains rapports semblent indiquer que plus de 100 femmes font l’objet d’un trafic entre le Pakistan et le Bangladesh chaque jour, et sont vendues à des fins de prostitution ou à d’autres formes de travail forcé. D’après ces allégations, il a été reporté que des femmes arrivent également de Birmanie, d’Afghanistan, de Sri Lanka et d’Inde, et beaucoup d’entre elles sont achetées et vendues dans des commerces et maisons de tolérance de Karachi. Le nombre de femmes faisant l’objet d’un trafic au Pakistan est estiméà plusieurs centaines de milliers, et selon certains rapports leur nombre pourrait atteindre 1,2 million. La CISL indique également que les estimations du nombre d’enfants prostitués au Pakistan varient, mais que selon la plupart il se chiffrerait autour de 40 000.
10. La commission note les allégations de la CISL selon lesquelles il y aurait également des rapports indiquant que plusieurs centaines d’enfants pakistanais ont été kidnappés et envoyés dans les Etats du Golfe persique pour travailler comme jockeys de chameaux. D’après ces allégations, l’esclavage et le trafic d’enfants au Pakistan sont un problème majeur, et l’enlèvement d’enfants survient soit pour une rançon, soit à titre de revanche contre la famille de l’enfant ou simplement à des fins d’esclavage. Dans quelques régions rurales, des enfants sont vendus en servitude pour dette en échange d’argent ou de terre.
11. La commission espère que le gouvernement présentera ses commentaires sur les allégations à ce sujet contenues dans les rapports communiqués par la CISL.
Restrictions à la liberté de quitter son emploi
12. Dans sa précédente observation, la commission a noté que le représentant gouvernemental a informé la Commission de la Conférence en juin 1999 que l’amendement de la loi sur les services essentiels, en vertu de laquelle les personnes au service du gouvernement qui mettent fin à leur emploi sans le consentement de leur employeur se rendent passibles de peines d’emprisonnement, devait être examiné par la Commission tripartite sur la consolidation, la simplification et la rationalisation des lois du travail. La commission note que le rapport du gouvernement indique que le rapport final de la Commission était attendu pour la fin de septembre 2000. La commission prie le gouvernement de fournir une copie du rapport. La commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires afin de rendre les lois fédérales et provinciales sur les services essentiels conformes à la convention, et le prie de fournir des informations sur les progrès réalisés vers cet objectif.
13. A cet égard, la commission demande également au gouvernement de fournir le texte complet des textes législatifs suivants adoptés en 2000: l’ordonnance no XVII du 27 mai 2000 sur le renvoi du service (pouvoirs spéciaux); l’ordonnance no XX du 1er juin 2000 sur les fonctionnaires publics (amendements); et l’ordonnance no LXIII du 6 décembre 2000 sur le service obligatoire dans les forces armées (amendement).
Article 25 de la convention
14. La commission note l’allégation contenue dans le rapport d’août 2001 communiqué par la CISL, selon laquelle la loi de 1992 sur l’abolition du système du travail en servitude n’a pas été mise en œuvre, peu de fonctionnaires étant disposés à appliquer la loi de peur de s’attirer la colère des propriétaires, ce qui permet à ces derniers de faire usage de travail forcé en toute impunité. La commission note également l’allégation de la CISL contenue dans son communiqué du 18 septembre 2001 selon laquelle, malgré l’adoption de règlements d’application en 1995, la loi de 1992 sur l’abolition du système du travail en servitude n’est pas parvenue à s’attaquer efficacement au problème dans la pratique.
15. La commission a précédemment exprimé sa préoccupation en ce qui a trait aux inspections, poursuites et condamnations de contrevenants en vertu de la loi de 1991 sur le travail des enfants, du règlement de 1995 sur le travail des enfants, de la loi de 1992 sur l’abolition du système de travail en servitude et du règlement de 1995 sur l’abolition du système de travail en servitude. Dans son observation précédente, la commission a demandé des informations sur les mesures prises pour renforcer l’efficacité des comités de vigilance, sur les méthodes de coopération et de communication entre les comités de vigilance et les magistrats, et sur le rôle des magistrats dans le processus d’identification, de libération et de réhabilitation des travailleurs en servitude. Dans son rapport, le gouvernement a indiqué qu’il était en consultation avec les secrétaires en chef provinciaux afin d’obtenir de plus amples informations sur ces questions. La commission en a pris bonne note et prie le gouvernement de faire suivre les informations sur chacune de ces questions.
16. La commission avait exprimé sa préoccupation à l’égard du rôle des magistrats dans le processus d’identification, de libération et de réhabilitation des travailleurs en servitude. Elle note qu’aucune information à ce sujet n’a été communiquée et demande, par conséquent, de nouveau au gouvernement de fournir des informations à ce sujet.
17. La commission a demandé précédemment des données statistiques sur le nombre d’inspections, de poursuites et de condamnations des contrevenants en vertu de la loi de 1991 sur le travail des enfants, du règlement de 1995 sur le travail des enfants, de la loi de 1992 sur l’abolition du système de travail en servitude et du règlement de 1995 sur l’abolition du système de travail en servitude. La commission note que les données fournies par le gouvernement dans son rapport ne concernent que la province de Sindha et n’indiquent pas en vertu de quelle loi les poursuites ont été prises. La commission demande au gouvernement de fournir des informations concernant chacune des provinces ainsi que sur chacune des lois concernées. Elle demande également que le gouvernement fournisse des informations sur la mise en application des lois ayant pour but la répression du travail forcé ou obligatoire et sur les mesures prises pour assurer que les sanctions pénales soient adéquates et strictement appliquées, tel que requis par la convention. La commission exprime l’espoir que le gouvernement présentera ses commentaires en réponse aux questions soulevées dans les rapports communiqués par la CISL.
II. La commission note une communication reçue en septembre 2002 de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), qui contient des indications concernant l’application de la convention par le Pakistan. Elle note que cette communication a été envoyée au gouvernement, en octobre 2002, pour tout commentaire qu’il jugerait opportun de faire sur les points soulevés. Elle espère que les commentaires du gouvernement seront fournis dans son prochain rapport, afin que la commission puisse les examiner lors de sa prochaine session.
La commission a pris note du rapport du gouvernement.
2. La commission note également les indications de la CISL selon lesquelles la servitude pour dettes et le travail en servitude, par des adultes comme par des enfants, se retrouvent le plus souvent dans l’agriculture, la construction en zones rurales, les fours à briques et la manufacture de tapis. Les estimations du nombre de travailleurs forcés sont très variées, mais il n’est pas contesté que dans de nombreuses parties du Pakistan, la pratique de la servitude pour dettes et du travail en servitude existe depuis de nombreuses années et est toujours très fréquente. La CISL allègue que, même si les efforts fournis par des organisations non gouvernementales, telles que le «Bonded Labour Liberation Front», ont permis de libérer des milliers de travailleurs en servitude, ce n’est pourtant qu’une toute petite proportion par rapport au nombre total de travailleurs en servitude, et le problème reste endémique. La CISL allègue qu’en raison du manque d’alternatives certaines personnes libérées de la servitude pour dette seraient retournées au travail en servitude.
5. La commission note les indications du rapport d’Anti-Slavery International rapportant qu’en avril 2001 le gouvernement a publié une version révisée de l’avant-projet sur la politique nationale et plan d’action pour l’abolition du travail en servitude et la réhabilitation des travailleurs en servitude ayant été libérés. Le rapport indique qu’il s’agit d’un avant-projet et qu’il doit être approuvé par le cabinet fédéral. La commission prie le gouvernement de fournir une copie de l’avant-projet ainsi que des informations sur son approbation finale et sur l’application de la politique et la mise en oeuvre du plan d’action.
6. La commission espère que le gouvernement présentera ses commentaires sur les points soulevés dans les rapports communiquées par la CISL.
7. Dans son observation précédente, la commission a demandé au gouvernement de fournir des informations sur les progrès dans la mise en oeuvre de l’accord entre le Programme international de l’OIT pour l’abolition du travail des enfants (IPEC) et l’Association pakistanaise des fabricants et exportateurs de tapis (PCMEA), notamment à l’égard du but, à court terme, de retirer progressivement quelque 8 000 enfants du travail dans l’industrie du tapis sur une période de trente-six mois. La commission a également demandé au gouvernement de communiquer des informations sur les progrès de la mise en oeuvre de l’accord signé en 1997 avec la Commission européenne et l’OIT concernant l’élimination du travail des enfants en servitude. La commission exprime de nouveau son inquiétude face à l’inaction du gouvernement en ce qui a trait à la collecte de données statistiques fiables sur le nombre d’enfants travaillant en servitude.
8. La commission prie de nouveau le gouvernement de fournir des informations sur le progrès dans la mise en oeuvre de ces accords et sur les résultats obtenus, ainsi qu’un rapport contenant des données statistiques sur le nombre d’enfants travaillant en servitude. Dans son rapport, le gouvernement a indiqué qu’une étude empirique sera bientôt menée par le bureau fédéral des statistiques afin de déterminer le nombre d’enfants affectés à des travaux dangereux. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur les résultats de l’étude, notamment sur l’incidence du travail en servitude.
14. La commission note l’allégation contenue dans le rapport d’août 2001 communiqué par la CISL, selon laquelle la loi de 1992 sur l’abolition du système du travail en servitude n’a pas été mise en oeuvre, peu de fonctionnaires étant disposés à appliquer la loi de peur de s’attirer la colère des propriétaires, ce qui permet à ces derniers de faire usage de travail forcé en toute impunité. La commission note également l’allégation de la CISL contenue dans son communiqué du 18 septembre 2001 selon laquelle, malgré l’adoption de règlements d’application en 1995, la loi de 1992 sur l’abolition du système du travail en servitude n’est pas parvenue à s’attaquer efficacement au problème dans la pratique.
1. Faisant suite à ses commentaires précédents, la commission prend note des discussions qui ont eu lieu au sein de la Commission de l'application des normes de la Conférence en juin 1999. De plus, la commission note que la Confédération internationale des syndicats libres a soumis des informations et des commentaires sur l'application de la convention. Cette communication a été envoyée au gouvernement pour commentaires et la commission espère que le gouvernement les inclura dans son prochain rapport.
Travail d'enfants en servitude.
2. La commission rappelle la gravité des problèmes du travail d'enfants en servitude qui ont fait l'objet de discussions détaillées au sein de cette commission et de la Commission de la Conférence depuis de nombreuses années.
3. La commission a précédemment noté avec intérêt l'accord qui a été signé entre le Programme international de l'OIT pour l'abolition du travail des enfants (IPEC) et l'Association pakistanaise des fabricants et exportateurs de tapis (PCMEA) du 22 octobre 1998. La commission note, comme le représentant gouvernemental l'a indiqué à la Commission de la Conférence, que cet accord visait à créer un projet pour, à l'origine, réduire progressivement les quelque 8 000 enfants dans la manufacture des tapis sur une période de 36 mois. L'accord comporte également un objectif général d'atteindre la limite fixée à la fin de 2010 dans la Déclaration de Male (Maldives) de l'Association de l'Asie du Sud pour la coopération régionale (SAARC) sur l'élimination du travail des enfants. En outre, il fixe des objectifs pour prévenir l'entrée supplémentaire d'enfants dans l'industrie.
4. La commission note qu'aucun détail n'a été fourni à la Commission de la Conférence sur les progrès de la mise en oeuvre de cet accord. Notant particulièrement le but à court terme du projet de retirer progressivement 8 000 enfants en 36 mois, la commission demande au gouvernement de fournir des renseignements sur les progrès et les résultats de la mise en oeuvre de cet accord.
5. La commission note également l'information fournie par le représentant gouvernemental à la Commission de la Conférence en 1997, selon laquelle un accord a été signé le 21 mai 1997 avec la Commission européenne et l'OIT pour accroître la sensibilisation sur les pratiques d'exploitation de travail des enfants, l'emploi dans des occupations dangereuses et sur le travail d'enfants en servitude; pour augmenter la capacité de sortir les enfants de la servitude et de prévenir leur entrée dans la servitude; pour cibler le petit groupe d'enfants en servitude et leurs familles, avec l'objectif majeur de leur réhabilitation. La commission note qu'aucun détail n'a été fourni à la Commission de la Conférence sur les progrès de l'application de cet accord et demande au gouvernement de fournir des renseignements sur les progrès accomplis dans la mise en oeuvre de cet accord et sur les résultats pratiques obtenus.
Ampleur du problème
6. Faisant suite à sa précédente observation, la commission exprime à nouveau sa préoccupation quant à l'absence continue d'action pratique de la part du gouvernement pour collecter des statistiques fiables sur le nombre d'enfants travaillant en servitude, une préoccupation qui a été réitérée par la Commission de la Conférence. La commission se réfère à nouveau à l'étude sur le travail des enfants réalisée avec l'assistance technique de l'IPEC qui indiquait qu'il y avait entre 2,9 et 3,6 millions d'enfants au travail (de l'âge de 5 ans à celui de 14 ans) dans le pays. La commission prend note de l'information fournie par le représentant gouvernemental à la Commission de la Conférence selon laquelle l'étude de l'IPEC était considérée comme ayant inclus tous les enfants qui travaillent, y compris ceux qui travaillent en servitude. Le représentant indiquait également que la seule entité, en dehors du gouvernement, capable de fournir un état du nombre de travailleurs en servitude était la Commission des droits de l'homme du Pakistan. Le représentant avança alors que le nombre de travailleurs en servitude, enfants et adultes, était de 5 000 à 7 000 et que le problème existait presque exclusivement dans la province du Sindh et dans certaines régions du Punjab. Le représentant déclara qu'aucune enquête n'avait été menée jusqu'à l'étude de l'IPEC et que les chiffres qu'il avait donnés étaient une estimation du gouvernement fondée sur une enquête indépendante et représentaient une évaluation réaliste.
7. Tout en reconnaissant les difficultés liées à l'établissement de chiffres précis sur la quantité de travailleurs en servitude en raison de la nature cachée de celle-ci et des efforts de ses utilisateurs pour dissimuler la servitude, la commission prie le gouvernement de fournir un rapport contenant une appréciation statistiquement valable des chiffres du travail d'enfants en servitude et du travail d'adultes en servitude. Ce rapport devait comprendre tous rapports ou statistiques pertinents sur cette question disponibles auprès de la Commission des droits de l'homme du Pakistan. L'obtention de données réalistes est essentielle pour concevoir un schéma approprié afin de lutter contre le problème ainsi que pour évaluer son efficacité.
Le travail en servitude, en général
8. Une autre préoccupation, déjà précédemment exprimée par la commission, a trait au processus d'inspection, de jugement et de condamnation des contrevenants en vertu de la loi de 1991 sur le travail des enfants, du règlement de 1995 sur le travail des enfants, de la loi de 1992 sur l'abolition du système du travail en servitude et du règlement de 1995 sur l'abolition du système du travail en servitude. Il y a eu deux aspects majeurs de préoccupation, le premier quant aux dispositions administratives générales, le second quant aux données statistiques fiables concernant la mise en oeuvre.
9. S'agissant des premières préoccupations, de nature administrative, la commission a demandé des informations sur les mesures prises pour renforcer l'efficacité des comités de vigilance et demandé aussi des renseignements sur la coopération et la communication entre les comités de vigilance et les magistrats. Ces mêmes sujets ont également été discutés au sein de la Commission de la Conférence, où le représentant gouvernemental a indiqué que le gouvernement partageait également ces préoccupations. Des indications ont été données par le représentant sur des difficultés provenant du fait que les questions du travail sont soumises à la fois à la compétence provinciale et fédérale et, alors que des mesures ont été prises au niveau fédéral pour coopérer avec les organes de contrôle, des délais sont survenus s'agissant des 106 districts et de leurs comités de vigilance respectifs. La commission note également le fait que la Commission de la Conférence a renforcé la préoccupation de la commission, à l'égard en particulier du processus visant à identifier, libérer et réhabiliter les travailleurs en servitude, qui relève du rôle des autorités. La commission demande au gouvernement de fournir des renseignements sur chacune de ces questions déjà soulevées précédemment et également sur tous progrès effectués pour assurer la mise en oeuvre efficace de la législation.
10. En second lieu, la commission a demandé précédemment des données statistiques sur le nombre d'inspections, de jugements et de condamnations de contrevenants. Le représentant gouvernemental à la Commission de la Conférence a fourni certaines données statistiques, mais a aussi indiqué que certaines données sont encore en train d'être compilées, que d'autres données ne sont pas complètes et qu'elles seraient fournies à cette commission avec le prochain rapport du gouvernement. En conséquence, la commission attend la communication de ces renseignements dans le prochain rapport du gouvernement.
La Cour de la Shariah
11. Concernant les requêtes pendantes devant la Cour fédérale de la Shariah demandant que certains articles de la loi de 1992 sur l'abolition du travail en servitude soient déclarés comme ultra vires par rapport aux ordonnances islamiques, la commission prend note de la déclaration du représentant gouvernemental selon laquelle le gouvernement défendrait la loi et que son application ne serait pas affectée par les requêtes auprès de la Cour. La commission demande au gouvernement d'envoyer une copie de la décision de la Cour aussitôt qu'elle sera adoptée.
Restrictions à la liberté de quitter son emploi.
12. La commission se réfère à ses précédentes observations relatives aux lois fédérale et provinciale sur les services essentiels qui contiennent des dispositions rendant passibles de peines d'emprisonnement les personnes au service du gouvernement qui mettent fin à leur emploi sans le consentement de leur employeur. Ce sujet fut également abordé au sein de la Commission de la Conférence, où le représentant gouvernemental a indiqué que le gouvernement n'était "pas fier de cette partie de la législation" et qu'il y était recouru seulement lorsque les situations avaient atteint un "degré extrême". Le représentant a répété aussi l'information précédemment donnée à cette commission selon laquelle la portée de cette loi a progressivement été restreinte à cinq catégories. Le représentant a également informé la Commission de la Conférence de ce que l'amendement de la loi serait examiné par la Commission tripartite sur la consolidation, la simplification et la rationalisation des lois du travail, nouvellement établie, et que le rapport de cette commission serait disponible en temps utile.
13. La commission se réfère à l'observation qu'elle a faite sur le même sujet au titre de la convention no 105 et à la gravité du maintien de la législation telle qu'elle existe. La commission veut croire que la commission tripartite prendra pleinement en compte ces questions, et demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires dès que possible pour rendre la loi conforme à la convention. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur tout progrès vers cet objectif.
14. En conclusion, la commission demande au gouvernement de fournir des commentaires détaillés sur chacun des sujets ci-dessus abordés dans le contexte de ses précédentes observation et demande directe pour qu'elle puisse les examiner pleinement à sa prochaine session.
La commission prend note des rapports du gouvernement.
Dans ses précédentes demandes directes, la commission demandait au gouvernement de fournir des informations sur les conditions d'engagement et de démission du personnel militaire de carrière du service actif. Dans ses rapports, le gouvernement répète les indications déjà prises en considération par la commission dans ses précédents commentaires.
La commission appelle donc à nouveau l'attention du gouvernement sur son étude d'ensemble de 1979 sur le travail forcé, notamment sur les paragraphes 33 et 68 à 72 de ce texte, où elle rappelle que les dispositions de l'article 2, paragraphe 2 a), de la convention, qui concernent le service militaire obligatoire, ne s'appliquent pas aux militaires de carrière et ne sauraient donc être invoquées pour priver des personnes qui se sont volontairement engagées du droit de quitter le service en temps de paix au terme d'un délai raisonnable, soit à des intervalles raisonnables, soit moyennant un préavis approprié, compte tenu des conditions qui peuvent être exigées normalement pour garantir la continuité du service. En ce qui concerne le coût de la formation du personnel qualifié, la commission a évoqué la possibilité d'un remboursement proportionnel qui pourrait être exigé, dans des délais spécifiques, en cas de démission.
Pour être en mesure d'apprécier la conformité de la législation nationale avec la convention, la commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer copie des dispositions régissant les conditions de service des forces armées, en ce qui concerne les conditions d'engagement et de démission, ainsi que toutes dispositions applicables en cas de formation acquise aux frais de l'Etat.
La commission prie également le gouvernement de communiquer copie de l'ordonnance no XXXI de 1971 sur le service obligatoire dans les forces armées.
1. La commission prend note des rapports du gouvernement en rapport avec l'article 1, paragraphe 1, et l'article 2, paragraphes 1 et 2, de la convention. Elle prend également note des discussions à la Commission de la Conférence en juin 1997 ainsi que des commentaires de la Fédération des syndicats du Pakistan (APFUTU), parvenus en mai 1997. Elle prend également note des informations provenant du Programme international de l'OIT pour l'abolition du travail des enfants (IPEC).
Travail d'enfants en servitude
2. La commission rappelle la gravité des problèmes qui ont été soulevés dans ses précédentes observations et qui ont été abordés plusieurs fois par la Commission de la Conférence. Elle relève que cette dernière a pris note, en 1997, d'informations détaillées présentées par le représentant gouvernemental et qu'un débat approfondi a eu lieu en son sein. Elle a également noté que le gouvernement a pris un certain nombre de mesures tendant à l'élimination du travail forcé, mais qu'un grand nombre de questions restent en suspens quant à l'incidence pratique des mesures prises.
3. A cet égard, la commission note avec intérêt que, peu après sa précédente session, le gouvernement a conclu un accord avec le Bureau international du Travail et l'IPEC tendant à l'élimination du travail des enfants dans la manufacture des tapis. Elle espère que, dans son prochain rapport, le gouvernement donnera des informations précises sur les mesures prises dans le cadre de cet accord.
4. Ampleur du problème. Faisant suite à ses précédents commentaires, la commission prend note des informations communiquées par le gouvernement dans ses rapports et à la Commission de la Conférence, notamment sur l'étude du travail des enfants réalisée avec l'assistance technique de l'IPEC. Elle note que, d'après les statistiques contenues dans cette étude et les chiffres détaillés fournis par le gouvernement, le pays compte entre 2,9 et 3,6 millions d'enfants au travail (de l'âge de 5 ans à celui de 14 ans). Le gouvernement, bien qu'ayant déclaré que les estimations concernant le travail d'enfants en servitude auxquelles la commission se référait étaient exagérées, n'a pas avancé de chiffres lui-même. La commission prie le gouvernement de continuer de communiquer des chiffres fiables collectés au niveau du district, de la province ou du niveau fédéral, que ce soit par l'intermédiaire d'organismes gouvernementaux ou d'organisations, sur les inspections réalisées, les procédures ouvertes et les condamnations prononcées sur la base de la loi de 1991 et du règlement de 1995 sur l'emploi des enfants, de même que sur les inspections réalisées, procédures ouvertes et condamnations prononcées sur la base de la loi de 1992 et du règlement de 1995 tendant à l'abolition du système de travail en servitude. Elle exprime l'espoir que le gouvernement, qui déclare avoir pris un certain nombre de mesures pour donner effet à ces instruments, est désormais en position de fournir des informations complètes, détaillées et documentées quant à leur application pratique.
5. La commission note avec intérêt que le gouvernement a pris différentes mesures, de sa propre initiative et en coopération avec l'IPEC, le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), l'Union européenne, de même que des organisations non gouvernementales internationales et nationales, en vue d'éliminer le travail des enfants, y compris leur travail en servitude. Elle prend note en particulier des diverses campagnes et autres opérations de sensibilisation déjà réalisées. Elle note que, selon ce qu'il ressort du rapport du gouvernement tout comme d'autres sources, la convention no 29 et les textes légaux sur le travail des enfants et le travail en servitude ont été traduits en urdu et en sindhi. Elle exprime l'espoir que le gouvernement communiquera d'autres informations sur les mesures prises, au niveau fédéral comme à celui des provinces, pour sensibiliser davantage et plus largement le public en général et les différents secteurs de l'économie, en vue de l'élimination du travail des enfants et du travail en servitude.
6. Dans sa précédente observation, la commission notait que la loi de 1992 portant abolition du travail en servitude était la cible de recours devant les tribunaux de la Charia. Des actions avaient été engagées afin qu'il soit déclaré que les articles 6 et 8 de la loi outrepassent les ordonnances islamiques. Selon le représentant gouvernemental devant la Commission de la Conférence en 1997, l'arrêt rendu par la Cour suprême en 1988, en qualifiant d'inconstitutionnel le travail en servitude, garantissait que la loi de 1992 continuerait d'être appliquée. D'après le rapport du gouvernement, il semblerait que les recours soient toujours en instance et qu'aucune décision n'ait été prise par les tribunaux. Le gouvernement déclare qu'il lui appartient de défendre la législation en vigueur. La commission prie le gouvernement d'indiquer si les recours en instance risquent d'avoir une incidence sur l'application de la loi de 1992 et de communiquer copie des jugements dès qu'ils auront été publiés.
7. La commission note qu'un Comité consultatif sur le travail des enfants et le travail en servitude a été constitué, qu'il comprend des représentants des ministères du Travail, des Affaires étrangères, du Commerce et du Secteur privé, et qu'il a pour mission d'assurer le suivi des décisions prises et de formuler des avis sur les plans globaux d'action dans ce domaine. La commission prie le gouvernement de communiquer tous rapports ou autres documents que ce comité viendrait à adopter, notamment en ce qui concerne les opérations de suivi, ainsi que des précisions quant à son mandat et à son influence.
8. Dans sa précédente demande adressée directement au gouvernement, la commission demandait au gouvernement de communiquer copie des rapports de la Commission des droits de l'homme du Pakistan et de la Commission nationale pour l'enfance et le développement. De telles informations ne lui étant pas parvenues, la commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer copie des plus récents rapports de ces deux instances, ou des extraits pertinents des rapports concernant le travail des enfants et le travail en servitude.
9. La commission note qu'une série de règles a été élaborée avec l'assistance technique de l'IPEC en vue de faciliter l'application de la loi de 1991 sur l'emploi des enfants et de la loi de 1992 portant abolition du travail en servitude. Des consignes ont été données, au niveau fédéral et à celui des provinces, afin que les magistrats, y compris les magistrats et magistrats supplétifs de district soient habilités à engager des procédures en application de ces lois. Le gouvernement indique cependant que l'administration du district ne peut avoir connaissance des délits que si les comités de vigilance (voir ci-après) sont saisis de plaintes. Le gouvernement est prié d'expliquer selon quelles modalités les comités de vigilance et les magistrats coopèrent et de fournir des informations précises sur le nombre et la nature des procédures engagées par les magistrats de district. Prière d'indiquer également quelles sont les mesures prises afin que des enquêtes soient ouvertes et des procédures engagées à l'encontre de ceux qui -- en quelque capacité que ce soit -- perpétuent les pratiques de travail en servitude.
10. La commission note que, après l'adoption du règlement de 1995 sur l'abolition du travail en servitude, la composition des comités de vigilance, constitués pour veiller à ce que les objectifs de la loi soient respectés, a été élargie et renforcée. Devant la Commission de la Conférence, en 1997, le représentant gouvernemental a indiqué que certains de ces comités n'étaient pas très efficaces et devraient sans doute être renforcés, mais constituaient néanmoins au niveau des provinces, un cadre institutionnel utile pour l'investigation et le suivi du travail en servitude. Dans son plus récent rapport, le gouvernement déclare que, selon les gouvernements des provinces, les comités de vigilance fonctionnent bien, leur action étant supervisée par les départements aux affaires intérieures des provinces. En outre, le ministère du Travail a constitué quatre équipes chargées d'évaluer le fonctionnement des institutions s'occupant du travail des enfants et du travail en servitude dans l'ensemble du pays et de fournir au gouvernement un retour d'information. Les équipes ont tenu des réunions avec les secrétaires au travail et les secrétaires aux affaires intérieures des provinces et avec les comités de vigilance de district et se sont rendues dans des centres de réadaptation. Des représentants d'organisations de travailleurs et d'employeurs ont assisté à ces réunions. Deux équipes, du Baluchistan et de la province frontalière du nord-ouest, ont soumis leur rapport, tandis que les deux autres étaient en train de rédiger le leur lorsque le gouvernement a soumis son rapport. La commission prie le gouvernement d'indiquer les mesures prises pour renforcer les comités de vigilance afin de rendre leur action plus efficace et de communiquer les rapports des équipes précitées.
11. Faisant suite à sa précédente observation en la matière, la commission note que les membres travailleurs de la Commission de la Conférence ont appelé le gouvernement à inclure des représentants d'organisations d'employeurs et d'organisations de travailleurs, ainsi que d'organisations non gouvernementales se consacrant à l'élimination du travail en servitude, dans les mécanismes opérant au niveau du district et au niveau local pour mettre en oeuvre la loi de 1992 tendant à l'abolition du travail en servitude. La commission note également que l'APFUTU a demandé, dans ses commentaires, que les syndicats soient associés directement aux comités de vigilance. Elle note que des représentants d'organisations de travailleurs et d'organisations d'employeurs ont été associés aux réunions des groupes de suivi. Elle demande au gouvernement de présenter ses commentaires sur la participation d'organisations de travailleurs et d'employeurs à l'application de la loi de 1992 et du règlement de 1995, compte tenu du fait que l'efficacité des comités de vigilance est subordonnée à la participation de tous afin d'assurer la coordination et la diligence dans le traitement de ce grave problème.
12. La commission invite également le gouvernement à se reporter à l'observation qu'elle formule au titre de la convention (no 59) sur l'âge minimum (industrie) (révisée), 1937.
13. La commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations détaillées sur les mesures prises pour éliminer le travail en servitude des adultes, qui semble persister dans de vastes proportions. Se référant à sa précédente observation, elle prend note des informations fournies par le gouvernement à la Commission de la Conférence ainsi que dans son plus récent rapport, en ce qui concerne les inspections réalisées, le nombre de travailleurs libérés de leur servitude et les centres de réadaptation. Elle prie le gouvernement de communiquer, dans son prochain rapport, des informations détaillées, au niveau fédéral, de la province, du district et au niveau local, sur la découverte, la libération et la réadaptation de travailleurs -- adultes ou enfants -- en servitude, en application de la loi de 1992 tendant à l'abolition du travail en servitude, ainsi que des données précises, notamment des exemples de sanctions prises à l'égard des coupables, conformément à l'article 14 de la loi et à l'article 107 du Code pénal (article 25 de la convention).
14. Faisant suite à sa précédente observation au sujet des lois fédérales et provinciales sur les services essentiels, la commission rappelle que certaines dispositions de ces instruments rendent passible d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à un an toute personne au service du gouvernement qui met fin à son emploi sans le consentement de l'employeur, nonobstant toute condition expresse ou tacite de son contrat prévoyant la démission avec préavis. Ces dispositions peuvent être étendues à d'autres catégories d'emploi (loi de 1952 sur les services essentiels, art. 2 et 3, paragr. 1) b) et explication 2, art. 7, paragr. 1); loi de 1958 sur les services essentiels au Pakistan oriental (encore vigueur au Baluchistan et dans la province frontalière du nord-ouest); loi de 1958 sur les services essentiels (au Pendjab et au Sindh). La commission prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle l'application de ces lois a été à nouveau restreinte, et le nombre des institutions considérées comme capitales pour la sécurité de l'Etat et le bien-être de la population a lui aussi été encore restreint. Elle note que la liste mentionnée par un représentant gouvernemental devant la Commission de la Conférence, en 1998, dans le cadre de la discussion sur la convention no 87, a été réduite à cinq catégories -- trois concernant l'énergie électrique et les deux autres les laboratoires de recherche de Kahuta et la société d'imprimerie des titres du Pakistan, à Karachi.
15. La commission prend note de la déclaration du gouvernement, réitérée dans son plus récent rapport, à l'effet que les mesures nécessaires seront prises pour satisfaire aux exigences de la convention. Elle rappelle que le gouvernement a affirmé de manière répétée son intention de modifier les dispositions de la loi afin qu'un salarié puisse mettre fin à son emploi conformément aux conditions expresses ou tacites de son contrat, de manière à éliminer toute restriction à la liberté, pour les travailleurs, de quitter leur emploi. Elle rappelle que, dans son rapport de 1996, le gouvernement indiquait que cette question avait été examinée par un groupe de travail tripartite qui avait saisi le Cabinet d'un rapport et que des recommandations étaient alors activement étudiées par le gouvernement. Aucune information à ce sujet n'a été donnée ni devant la Commission de la Conférence, qui a examiné l'application de la présente convention en 1997, ni dans le plus récent rapport du gouvernement. La commission prie donc à nouveau le gouvernement d'indiquer quelles sont les mesures envisagées ou prises pour modifier la loi sur les services essentiels de manière à la rendre conforme à la convention. (La commission formule également des commentaires sur les services essentiels, en rapport avec les mêmes lois, au titre des conventions nos 87 et 105.)
16. La commission adresse par ailleurs directement au gouvernement une demande sur certains autres points.
Se référant également à son observation au titre de cette convention, la commission prend note de la réponse du gouvernement à sa précédente demande directe.
1. La commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer copie des rapports annuels, depuis 1992, de la Commission des droits de l'homme du Pakistan (HRCP) ainsi que des plus récents rapports de la Commission nationale du bien-être et du développement de l'enfance (NCCWD).
2. La commission demande depuis 1981 au gouvernement de fournir des informations sur le statut des militaires de carrière et, en particulier, sur les conditions d'engagement et de démission des personnels en service actif.
Dans son dernier rapport, le gouvernement déclare, comme il l'a fait précédemment, que le service militaire au Pakistan est un service volontaire et, en tant que tel, ne rentre pas dans le champ d'application des normes de l'OIT, notamment de la convention no 29, ratifiée par le Pakistan. Pour ce qui est de la liberté, pour les militaires, de quitter l'armée en temps de paix sous réserve d'un préavis raisonnable, le gouvernement fait observer que les officiers et autres personnels des forces armées du Pakistan bénéficient d'une formation approfondie qui met le budget de l'Etat à forte contribution, de sorte que ce pays, avec ses ressources modestes, ne peut se permettre d'accorder la possibilité à ces officiers et autres personnels de quitter l'armée de leur propre initiative même en temps de paix. Néanmoins, un membre des forces armées peut être admis à démissionner sous réserve qu'il justifie de raisons convaincantes et qu'il puisse expliquer les causes de sa demande de libération anticipée. Le gouvernement fait en outre observer qu'aux termes de l'article 2, paragraphe 2 a), de la convention tout travail ou service exigé en vertu des lois sur le service militaire obligatoire et affecté à des travaux de caractère purement militaire ne rentre pas dans le champ d'application de cet instrument. Il estime, par conséquent, qu'il n'y a pas lieu, pour lui, de fournir les informations demandées en ce qui concerne les dispositions concernant les conditions de service dans les forces armées, notamment celles régissant les conditions d'engagement et de démission.
La commission prend bonne note de ces indications. Elle se réfère à nouveau aux explications développées aux paragraphes 33 et 68 à 72 de son étude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, dans lesquels elle indique que les dispositions de l'article 2, paragraphe 2 a), de la convention se rapportent au service militaire obligatoire et ne s'appliquent pas, par conséquent, aux militaires de carrière et ne sauraient donc être invoquées pour priver les personnes engagées volontairement du droit de quitter l'armée en temps de paix dans des délais raisonnables, soit à des intervalles déterminés, soit moyennant préavis, sous réserve des conditions qui peuvent être normalement exigées pour assurer la continuité du service. Pour ce qui est du coût de la formation des personnels qualifiés, la commission a mentionné la possibilité d'un remboursement proportionnel de cette formation, qui peut être exigé pendant un certain délai en cas de démission.
Pour pouvoir apprécier la conformité de la législation nationale avec la convention, la commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer copie des dispositions régissant les conditions de service dans les forces armées, en particulier en ce qui concerne les conditions d'engagement et de démission, ainsi que toute disposition s'appliquant au cas d'une formation reçue aux frais de l'Etat. Elle le prie également de communiquer copie de l'ordonnance no XXXI de 1971 sur le service militaire obligatoire dans les forces armées.
1. Se référant à ses précédentes observations, la commission prend note du dernier rapport du gouvernement concernant les mesures prises pour assurer le respect de la convention. Elle a également pris note de la discussion ayant eu lieu au sein de la Commission de la Conférence sur l'application des conventions et recommandations en juin 1996 à propos des questions soulevées dans sa précédente observation. Elle a, d'autre part, pris note des observations sur l'application de la convention présentées par le Congrès néo-zélandais des syndicats (NZCTU) dans une communication datée du 18 juin 1996 comportant un rapport de 1996 d'Anti-Slavery International sur la servitude pour dettes au Pakistan, intitulé "This menace of bonded labour", qui a été transmis pour commentaires au gouvernement le 26 juin 1996. Le gouvernement n'a pas répondu à ces observations. Enfin, la commission a pris note du rapport du Groupe de travail sur les formes contemporaines d'esclavage de la Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités des Nations Unies sur sa 21e session (document des Nations Unies E/CN.4/Sub.2/1996/24 daté du 19 juillet 1996).
I. Travail en servitude Ampleur du problème
2. Dans ses précédents commentaires, la commission a pris note des allégations portées devant les Nations Unies selon lesquelles 20 millions de personnes, dont 7 millions d'enfants, travaillaient en servitude. La commission a noté que, de l'avis du gouvernement, ces chiffres étaient irréalistes, appréciation partagée par la Fédération des syndicats du Pakistan. Cependant, tout en mettant en rapport les chiffres allégués avec des données statistiques concernant la main-d'oeuvre et la population totale du Pakistan, le gouvernement n'a, lui-même, avancé aucun chiffre quant au nombre de travailleurs en servitude. La commission note toutefois les indications données dans la monographie présentée par le gouvernement au Séminaire régional asien sur les enfants en servitude (Islamabad, novembre 1992). Ce document indique que le travail des enfants au Pakistan perdure essentiellement à cause de la pauvreté, de la non-sensibilisation du public, des carences du système éducatif et de la servitude pour dettes des parents. Dans les régions où les parents (paysans et journaliers) sont contraints de fournir leurs prestations à des propriétaires ou autres employeurs, leurs enfants sont souvent eux-mêmes prisonniers du système de servitude pour dettes. Souvent, les parents contractent un emprunt pour faire face à des besoins urgents. Les débiteurs doivent ensuite rembourser leur dette par le travail. Dans la pratique, la dette ne se résorbe jamais mais, bien au contraire, elle s'accroît. L'ensemble de la famille se trouve réduit de manière permanente à la servitude et le créancier exige un remboursement de la part des générations suivantes. Ainsi, les enfants sont généralement promis comme travailleurs à titre de contribution au remboursement de la dette. Ils peuvent également être asservis de manière séparée, notamment lorsque les parents les envoient travailler sur le domaine d'un propriétaire ou d'un créancier. Ils peuvent y rester de nombreuses années, sans savoir pour combien de temps ni même connaître le montant de la dette qu'ils sont en train de rembourser. La commission note en outre que, dans son observation datée du 13 octobre 1994, la Fédération des syndicats du Pakistan a indiqué que des personnes sont assujetties au travail forcé sous le système de servitude pour dettes par les potentats locaux dans des régions rurales et moins développées mais aussi dans certaines mines de charbon et briqueteries.
3. La commission note que, selon le rapport d'Anti-Slavery International communiqué par le NZCTU en juin 1996:
Au cours des vingt dernières années, c'est l'industrie de la briqueterie qui a été la plus notoirement connue pour recourir au travail en servitude. Ce phénomène s'est développé rapidement pendant les dernières décennies, les briqueteries se multipliant en grand nombre avec l'expansion de l'urbanisme. Ces dernières années, l'implication d'enfants travaillant en servitude à la production de tapis noués à la main destinés à l'exportation a également fait l'objet d'une publicité considérable hors du Pakistan. Il existe bien d'autres secteurs de l'emploi dans lesquels le travail en servitude est la norme plutôt que l'exception. Parallèlement au travail des enfants, le travail en servitude est prédominant dans le secteur industriel "informel". Il est notable dans l'agriculture, où des travailleurs n'ayant pas de terre sont liés à des propriétaires terriens à la fois par des dettes et par une forme d'esclavage. On le signale également dans le secteur de la pêche.
Visibilité et perception du problème
4. Dans son rapport reçu en novembre 1995, le gouvernement, en évaluant l'ampleur du problème du travail des enfants en servitude, a relevé que les cas de travail d'enfants en servitude ne sont pas visibles. Comme la commission l'a fait observer dans son rapport à la 83e (1996) session de la Conférence, l'absence de visibilité ou de perception semble constituer plus généralement une difficulté à s'attaquer au problème du travail en servitude, difficulté qui n'a pas encore été surmontée par les institutions en place.
Législation et institutions traitant du travail en servitude
5. Le rapport sur la servitude pour dettes au Pakistan, établi par Anti-Slavery International et communiqué par le NZCTU en juin 1996, formule, sur la situation sur le plan législatif et administratif, les commentaires suivants:
a) Le Bhatta Mazdoor Mohaz (BMM), Syndicat des travailleurs des briqueteries, a été constitué en 1967. Sa plate-forme était initialement axée sur la conquête des droits fondamentaux des ouvriers à travers la reconnaissance des ouvriers des briqueteries en cette qualité, telle que définie par la loi de 1934 sur les fabriques. En 1988, le mouvement ayant commencé avec des ouvriers des briqueteries s'est étendu à tous les autres travailleurs en servitude, avec la création du Front de libération de la main-d'oeuvre en servitude (BLLF). L'action du BLLF restait néanmoins centrée sur les préoccupations des ouvriers des briqueteries. En 1988, une pétition d'un groupe d'ouvriers des briqueteries déboucha sur une sentence décisive de la Cour suprême qui, s'appuyant sur l'article 11 de la Constitution, déclara le travail en servitude inconstitutionnel et l'interdit. Cette sentence contraignit le gouvernement à modifier la législation. Un projet de loi élaboré en 1989 fut finalement adopté en mars 1992 sous le titre de loi sur l'abolition du système de travail en servitude.
b) La loi de 1992 recueillit initialement les suffrages des activistes des droits de l'homme et des militants contre le travail en servitude au Pakistan. Elle abolit le "système de travail en servitude", c'est-à-dire les pratiques et traditions liées au peshgi, en particulier l'idée selon laquelle celui qui a accepté une avance est contraint de travailler jusqu'à ce qu'il l'ait remboursée (article 4 de la loi). Elle dispose que quiconque se trouve en situation de servitude n'est désormais plus sous l'obligation de rembourser quelque partie que ce soit de la dette (article 6). Elle instaure une sanction (revêtant la forme d'une amende ou d'une peine d'emprisonnement allant de deux à cinq ans, ou les deux) à l'encontre de celui qui imposerait une servitude pour dettes en obligeant son débiteur à travailler pour lui (article 11), et la même peine frappe celui qui contraint un membre de sa propre famille à travailler en servitude pour dettes (par exemple, les parents qui acceptent un prêt en retour de l'engagement de leur enfant à travailler pour autrui). Dans ces domaines, la nouvelle loi n'est pas allée beaucoup plus loin que les instruments précédents qui, comme la loi de 1933 interdisant de gager des enfants, ont manqué leur but et sont tombés en désuétude.
c) Cependant, à l'instar d'une loi adoptée par un pays voisin en 1976 contre le travail en servitude, cette nouvelle loi inclut des dispositions qui sont destinées à garantir son application. Aux termes de son article 9, le gouvernement doit conférer aux magistrats de district le pouvoir de "garantir que les dispositions de la loi sont appliquées comme il convient", en particulier de "s'efforcer d'améliorer le sort de la main-d'oeuvre libérée de sa servitude en établissant et protégeant les intérêts économiques de cette main-d'oeuvre" (article 10). Les magistrats de district, dans la pratique des administrateurs nommés par le gouvernement au niveau du district, ont été investis de deux responsabilités décisives: établir l'existence d'une main-d'oeuvre en servitude dans leur juridiction et, une fois les faits constatés, prendre des mesures pour assurer la libération et la réinsertion.
d) Toujours à l'instar du même modèle, l'article 15 de la loi prévoit la création de "comités de vigilance" dans chaque district du pays pour épauler le magistrat et l'administration de ce district dans leurs efforts d'identification, de libération et de réinsertion des travailleurs en servitude. Constitués de personnalités connues dans chaque district - membres de l'administration ou autres, notamment juristes et journalistes -, ces comités doivent donner leur avis sur l'application de la législation en général et, en particulier, contribuer à la réinsertion des travailleurs libérés et leur fournir une assistance. La loi dispose que les comités de vigilance incluent des "représentants de l'administration de district, des associations du Barreau, de la presse, des services sociaux et départements du travail reconnus du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux". A ces égards donc, la loi de 1992 est considérablement plus dynamique que toute législation antérieure contre la servitude pour dettes aussi bien des adultes que des enfants au Pakistan. Si elle était appliquée, la nouvelle loi constituerait un cadre d'action au niveau local permettant d'éradiquer cette forme de violation des droits de l'homme et d'empêcher sa réintroduction.
e) Selon le même rapport, pendant les trois années qui ont suivi à l'adoption de la loi sur l'abolition du système de servitude, le gouvernement n'a pris aucune mesure pour assurer sa mise en oeuvre. Toutefois, en juillet 1995, le gouvernement fédéral, en l'occurrence le ministère du Travail, de la Main-d'oeuvre et des Nationaux à l'étranger, a édicté un règlement d'application tel que prévu par l'article 21 de la loi de 1992 "pour la réalisation des objectifs" de cet instrument. Ceci a été la première d'une série de mesures essentielles que le gouvernement central devait prendre pour assurer l'application de la loi sur le travail en servitude. La publication de ce règlement dans la Government Gazette n'a pas attiré l'attention du public dans le pays. Cependant, le fait qu'il ait été publié signifie qu'au niveau de la province ou du district les fonctionnaires peuvent commencer à appliquer certaines dispositions de la loi de 1992 s'ils en ont la volonté.
f) Le règlement adopté de juillet 1995 donne pour instruction aux gouvernements des provinces de déléguer aux magistrats de district certains pouvoirs prévus par la loi sur l'abolition du système de servitude pour dettes, en particulier celui de procéder à des inspections des lieux de travail suspects, d'utiliser une telle main-d'oeuvre et de diligenter des enquêtes sur toute information à ce sujet (règle 4). Il donne également pour instruction aux gouvernements des provinces d'ordonner aux magistrats de district de constituer des comités de vigilance conformément à l'article 15 de la loi de 1992 (règle 6).
g) Contrairement à la loi elle-même, le règlement est beaucoup plus précis quant à la composition des comités de vigilance. La règle 6 désigne 18 catégories différentes de personnes pouvant appartenir à un comité. La plupart sont étroitement liées aux autorités elles-mêmes: un juge à la retraite, un fonctionnaire de police de rang supérieur, un membre de l'Assemblée provinciale, des représentants des départements administratifs s'occupant de la main-d'oeuvre, de l'agriculture ou de l'enseignement. Toutefois, il est également prévu d'inclure des représentants d'un "organe reconnu de travailleurs" (un syndicat), ou d'une "ONG" (organisation non gouvernementale) enregistrée ou reconnue, oeuvrant pour la protection des droits de l'homme, ainsi qu'un journaliste ayant "de l'expérience dans le domaine des droits de l'homme". De telles personnes devraient normalement être relativement indépendantes des pouvoirs locaux administrant le district, mais ceci n'est pas assuré par le règlement puisqu'il prévoit que ces personnes sont désignées par des fonctionnaires du gouvernement local ou central. En outre, la disposition prévoyant l'inclusion d'un seul représentant d'un syndicat ou d'une autre organisation représentant les travailleurs signifie que chaque comité de vigilance est voué à être complètement dominé par les nantis locaux.
h) Contrairement au règlement adopté par le Pakistan en juillet 1995 en application de la loi de 1992, le règlement d'application de la législation correspondante adoptée en 1976 dans un pays voisin non seulement définit de manière détaillée la composition des comités de vigilance, mais aussi précise comment la loi doit être appliquée, avec délivrance de certificats de libération aux travailleurs libérés et tenue d'un registre contenant des données précises sur toutes ces personnes. En outre, il fixe des orientations pour le processus déterminant de la réinsertion, sans lequel la plupart des travailleurs libérés resteraient soumis à des pressions telles qu'ils contracteraient vraisemblablement à brève échéance de nouveaux emprunts entraînant leur retour à la servitude.
i) L'insuffisance des règles de juillet 1995 réside essentiellement dans la faiblesse des dispositions concernant la réinsertion des travailleurs libérés. La règle 9 traite de la "création d'un fonds" qui est destiné à "la réinsertion et au bien-être des travailleurs libérés de la servitude". Il est censé s'alimenter de contributions initiales que le gouvernement fédéral ou celui de la province peut faire, conjointement à toutes contributions d'organisations nationales ou internationales. Dans la pratique, le gouvernement ne semble avoir alloué aucun crédit à cette fin dans ses récents budgets et, dans la pratique, aucune ressource ne semble avoir été dégagée pour financer la réinsertion, sous quelque forme que ce soit - alors que des sommes, certes limitées, ont été spécifiquement allouées à la réinsertion de certains enfants au titre de la loi sur le travail des enfants. Il convient également de noter que, contrairement aux règles adoptées ailleurs, les règles adoptées au Pakistan en 1995 ne donnent aux fonctionnaires de district aucune indication quant aux procédures de libération et n'instaurent non plus une procédure formelle d'enregistrement des données concernant chaque travailleur libéré de la servitude, avec consignation de toutes sommes perçues pour leur réinsertion. Ceci veut dire qu'aucune statistique n'est établie sur le nombre de libérations ou de cas de réinsertion opérés et que, par conséquent, le gouvernement ne dispose d'aucune information précise permettant d'apprécier le succès - ou l'échec - de la loi en termes de nombre de libérations et de cas de réinsertion.
j) Pour conclure, le rapport considère que, si le règlement de juillet 1995 était appliqué au niveau du district, il permettrait d'obtenir la libération d'un grand nombre de travailleurs en servitude. Cependant, en édictant ce règlement sans aucune publicité, et au moment où le Front de libération de la main-d'oeuvre en servitude (BLLF), principale organisation non gouvernementale représentant ces personnes, a fait l'objet d'une série de mesures de répression de la part des organes de sécurité du gouvernement lui-même, les autorités ont assuré de manière efficace que les fonctionnaires au niveau de la province ou du district fassent peu, voire rien, pour l'appliquer.
La commission prend bonne note de ces indications. Elle note que les allégations quant au manque de publicité et d'attention accordée à la loi par les autorités correspondent à l'absence de toute information sur le règlement de juillet 1995, aussi bien dans le rapport du gouvernement de novembre 1995 que dans sa déclaration faite à la Conférence en juin 1996 et dans le dernier rapport du gouvernement sur l'application de cette convention, qui couvre la période du 1er juillet 1994 au 30 juin 1996.
6. Attaques dirigées contre la loi. Selon le rapport sur la servitude pour dettes au Pakistan établi par Anti-Slavery International et communiqué par le NZCTU en juin 1996, la loi de 1992 sur l'abolition du système de travail en servitude n'a pas tardé d'être la cible des hommes d'affaires utilisant cette forme de main-d'oeuvre et risquant de perdre l'argent engagé dans des prêts peshgi. Ils choisirent d'attaquer la nouvelle loi devant les tribunaux de la Charia ("loi islamique"), en arguant que les dispositions (des articles 6 et 8 de la loi) affranchissant les travailleurs en servitude de leur obligation de rembourser leur emprunt étaient "non islamiques". L'un des premiers recours contre la nouvelle loi a été déposé en septembre 1992 devant le tribunal fédéral islamique par un certain Ghulam Khana Bangash, propriétaire d'une briqueterie. Pour autant qu'on le sache, le tribunal ne s'est pas encore prononcé de manière définitive sur ce recours ou d'autres analogues, et les employeurs prennent prétexte de cette situation pour prétendre que la loi ne doit pas encore être appliquée. La commission espère que le gouvernement répondra à ces allégations et communiquera copie de la décision du tribunal en question dès qu'elle aura été rendue.
Pratique en matière d'investigation des faits et de mise en oeuvre de la loi
7. Dans ses rapports sur l'application de la convention pour la période 1992-1994, le gouvernement indiquait qu'un seul cas de travail en servitude avait été constaté dans la province du Pendjab et que, selon les données dont il disposait, la direction de l'entreprise avait fait l'objet de poursuites. Dans le document intitulé "bilan consolidé concernant l'application de la loi de 1991 sur l'emploi des enfants et de la loi de 1992 sur l'abolition du système de travail en servitude", reçu du gouvernement en novembre 1995, le nombre des inspections, poursuites et condamnations en application de la loi de 1992 sur l'abolition du système de travail en servitude est nul pour chacune des quatre provinces. A titre d'explication, ce document indiquait que les rapports communiqués par les magistrats de district du Baloutchistan ne faisaient état d'aucun cas de travail en servitude dans la province et que les comités de vigilance présidés par les vice-commissaires des districts de la NWFP (Province frontalière du Nord-Ouest) et du Sindh n'avaient relevé aucun cas de travail en servitude. En ce qui concerne le Pendjab, il était expliqué qu'en application de l'article 15 de la loi de 1992 des comités de vigilance avaient été constitués dans presque tous les districts, que la loi ne confère à ces comités qu'un rôle consultatif et de supervision et qu'"il est constaté, de manière générale, que les victimes ne s'adressent pas aux comités de vigilance mais préfèrent s'en remettre à la juridiction de la Haute Cour pour obtenir un redressement rapide". A cet égard, la commission a souligné dans sa précédente observation qu'aux termes de l'article 15 de la loi les comités de vigilance devant être constitués au niveau du district doivent non seulement conseiller l'administration du district sur les questions ayant trait au respect effectif de la loi, mais encore assurer sa mise en oeuvre de manière appropriée et fournir aux travailleurs en servitude toute assistance qui peut être nécessaire pour atteindre les objectifs de la loi, ce qui ne semblait pas encore avoir été fait.
8. La commission note que, selon les indications données par un représentant du gouvernement à la Commission de la Conférence en 1996, tandis qu'un seul cas de travail en servitude avait été identifié dans l'ensemble du pays entre 1992 et 1994, depuis 1995 des descentes ont été opérées contre ce qu'il est convenu d'appeler des prisons privées: dans le district du Sanghar, le 17 novembre 1995, 96 personnes ont été libérées et le responsable a été inculpé en vertu de l'article 11 de la loi de 1992. Une autre prison privée du district d'Umerkot a fait l'objet de deux descentes, le 1er juin 1995 et le 14 janvier 1996, entraînant la libération de 70 personnes. Onze responsables ont été inculpés, dont deux ont été placés en détention et les autres ont été laissés en liberté sous caution par la Haute Cour du Sindh et le tribunal d'instance d'Umerkot. Une autre descente a été effectuée dans le district d'Umerkot par le juge sous-divisionnaire et l'adjoint au superintendant de la police; elle a permis la libération de dix familles de paysans et l'inculpation formelle du responsable. Dans les quatre autres cas, aucune preuve de travail en servitude n'a pu être trouvée dans les locaux supposés abriter des travailleurs en servitude. Le représentant gouvernemental a estimé que les efforts cités ont démontré amplement que le gouvernement est résolument déterminé à s'attaquer au problème des enfants en servitude et du travail en servitude. Concédant que le gouvernement n'a pas été en mesure d'éliminer complètement le problème, le représentant a assuré qu'il progresse néanmoins dans la bonne direction et que les résultats de son action seront visibles dans quelques années.
9. Dans son dernier rapport, qui couvre la période du 1er juillet 1994 au 30 juin 1996, le gouvernement indique que la mise en oeuvre effective de la loi de 1992 portant abolition du système de travail en servitude est envisagée à travers la création de comités de vigilance constitués de représentants élus, de membres des associations du barreau, de journalistes, de membres de l'administration du district et d'ONG, et que ces comités ont déjà été constitués au Pendjab, au Sindh, dans la NWFP et au Baloutchistan. Dans les provinces, l'application de la loi est du ressort des magistrats de district, qui sont également les présidents des comités de vigilance de district et qui ont autorité pour signaler toute violation et veiller attentivement à l'application de la loi. Le gouvernement déclare que, à la suite de l'adoption de la loi de 1992 sur l'abolition de la servitude pour dettes, la servitude à des enfants a elle aussi été réduite en principe, où qu'elle existe, et que l'application de la loi est poursuivie avec énergie par les gouvernements des provinces. En application de la loi, les gouvernements des quatre provinces ont nommé des inspecteurs qui visitent régulièrement les établissements industriels et commerciaux de leur juridiction pour veiller au respect de la loi.
10. Le gouvernement ajoute que la situation au regard de l'application de la loi, telle que présentée par les gouvernements des quatre provinces, est la suivante: au Pendjab, 329 descentes ont été effectuées et 172 travailleurs ont été libérés. Au Sindh, jusqu'en août 1996, 20 descentes ou inspections ont été effectuées et 335 travailleurs ont été libérés, 11 dossiers ont été ouverts et 16 personnes ont été arrêtées (avant d'être toutes remises en liberté par le tribunal), et le nombre de condamnations est néant. Pour la NWFP et le Baloutchistan, la seule indication donnée est qu'aucun cas de travail en servitude n'a été signalé.
11. La commission prend bonne note de ces indications. Elle note également que le rapport de 1996 sur la servitude pour dettes au Pakistan établi par Anti-Slavery International et communiqué par le NZCTU contient les observations détaillées suivantes sur la mise en oeuvre de la législation:
a) Pour que la loi de 1992 sur l'abolition du système de travail en servitude ait une incidence appréciable au Pakistan, le gouvernement devait en faire connaître largement les dispositions puis habiliter les magistrats de district à prendre des mesures pour garantir la libération et la réinsertion des travailleurs en servitude. Les magistrats de district ne sont pas, contrairement à ce que leur titre donne à croire, des membres de l'appareil judiciaire. Ce sont en fait des représentants du gouvernement (sous-commissaires) dans les districts où ils nommés. Ils reçoivent leurs ordres de leur hiérarchie propre et, en général, attendent que des instructions leur parviennent de l'échelon supérieur avant de prendre quelque mesure que ce soit. L'article 9 de la loi prescrit aux gouvernements des provinces de conférer ces pouvoirs aux magistrats de district. Or, les gouvernements des provinces ont eux-mêmes tendance à attendre les instructions du gouvernement fédéral, lequel est investi, en vertu de l'article 21 de la loi, du pouvoir d'"établir des règles pour réaliser les objectifs" de la loi, mais ne l'a fait qu'en juillet 1995. Maintenant qu'un ensemble de règles a été établi, il importe que le gouvernement y donne suite rapidement, en donnant instruction aux magistrats de district de traduire ces règles en action.
b) Les magistrats de district ne sont pas les seuls fonctionnaires censés faire appliquer la loi. L'article 15 prévoit la création de comités de vigilance "selon les modalités prévues". Comme il s'est écoulé trois années avant que le gouvernement n'ordonne "selon les modalités prévues" de constituer de tels comités, bien peu l'ont été. On signale que, dans certains districts où des comités de vigilance ont été constitués, siègent en leur sein des hommes d'affaires qui emploient encore des travailleurs en servitude.
c) C'est vers la fin de 1993 que l'on a eu la première preuve tangible de la mesure dans laquelle la loi n'est pas appliquée, lorsque la Cour suprême a été à nouveau saisie d'une affaire de travail en servitude, cette fois-ci dans l'industrie du tapis. En novembre 1993, M. Anwar Sadiq, un juriste, accompagné de plusieurs militants étrangers des droits de l'homme et d'un magistrat local, s'est rendu dans une fabrique de tapis, près de Kasur, où l'on avait signalé que 300 enfants travaillaient. Cette démarche avait pour but de constater les infractions à la législation et d'obtenir la libération des enfants. Anwar Sadiq a subséquemment fait l'objet de menaces, et son frère a été arrêté. Pour protester autant contre l'emploi d'enfants que contre le harcèlement de cet homme de loi, deux personnes ont écrit de Suède à la Cour suprême du Pakistan pour attirer l'attention de cette instance sur ces abus. Comme elle l'avait fait en 1988, la Cour suprême a décidé de traiter cette communication comme une pétition constitutionnelle (affaire 3-L de 1993) et a ordonné au magistrat du district de Kasur, au Département du travail local et au Département de sécurité sociale du Pendjab de fournir des informations sur les faits. Les réponses parvenues au début de 1994 démontrent que la loi de 1992 sur l'abolition du système de travail en servitude reste virtuellement sans effet: le Département du travail indique que les administrations de district du Pendjab n'ont reçu qu'en août 1993, soit 17 mois après l'adoption de la loi, l'instruction de constituer des comités de vigilance. Le magistrat du district de Kasur, quant à lui, est absolument catégorique quant au fait qu'aucun comité de cette nature n'a été constitué dans sa juridiction. Il fait également observer que la loi de 1992 n'a pas connu une grande publicité, les dispositions de cet instrument sont par conséquent inconnues, et ni les employeurs ni les travailleurs ne savent que les peshgi ne doivent plus désormais être remboursés. Ce magistrat s'interroge également sur le fondement même de la loi de 1992, laquelle, selon lui, ne bénéficie pas d'un appui populaire. A sa connaissance, aucun magistrat judiciaire n'a été habilité à instruire des cas d'infraction à la loi, et aucune règle n'a été élaborée sur les modalités d'application de la loi. Lui-même se déclare non disposé à prendre des mesures pour assurer la libération et la réinsertion des travailleurs en servitude, comme l'exige l'article 10 de la loi.
Le Département des affaires sociales du Pendjab a fait savoir à la Cour suprême qu'il ne s'estimait aucunement responsable de l'application de la loi sur le travail en servitude, bien que la loi exige qu'il s'engage dans les comités de vigilance. Le Département du travail a indiqué qu'il était au premier chef concerné par l'application de la loi de 1991 sur l'emploi des enfants. La Cour suprême, bien qu'ayant reçu cette information par la voie officielle au début de 1994, ne semble pas avoir pris d'autres mesures pour enjoindre aux pouvoirs publics de faire respecter la loi de 1992, quand bien même il était clair que la loi était bafouée.
d) Dans le district de Kasur, comme dans d'autres où des enquêtes ont été menées pour le compte d'Anti-Slavery International au début de 1995, le doyen du barreau local n'a jamais entendu dire que son association devrait faire partie d'un comité de vigilance. D'autres districts pour lesquels Anti-Slavery International a eu confirmation, au premier semestre de 1995, que les hommes de loi n'avaient pas connaissance de la création de comités de vigilance comprennent les districts de Goujarat, Lahore et Sheikhupura.
e) Ailleurs dans le pays, des éléments encore plus récents attestent qu'il n'a pas été constitué de comités de vigilance. Dans la Province frontalière du Nord-Ouest (NWFP), le Département provincial du travail aurait convoqué, au premier semestre de 1995, un comité au niveau provincial constitué de quatre fonctionnaires du gouvernement de la province, onze représentants de l'Association des propriétaires de briqueterie et cinq représentants du Syndicat des travailleurs des briqueteries. Fin avril 1995, ce comité ne s'était pas réuni. Au niveau des districts, certains magistrats de district auraient constitué des comités de vigilance, mais ceci a manifestement été laissé à l'initiative individuelle plutôt que mené systématiquement.
f) Le rapport conclut que:
- les fonctionnaires du gouvernement local n'ont pas été obligés de mettre en oeuvre la loi sur l'abolition du système de travail en servitude;
- peu de comités de vigilance ont été constitués dans les districts et, lorsqu'ils le sont, leur composition n'est conforme ni à la lettre ni à l'esprit de la loi;
- il n'existe pas de système pour recenser les cas de travail en servitude ou le nombre de travailleurs libérés;
- les juges n'ont pas été investis des pouvoirs de poursuivre les employeurs qui continuent de proposer des avances contre un travail en servitude;
- quelque 2 000 actions en justice engagées entre mars 1992 et le début de 1995 par des travailleurs en servitude en invoquant la loi sur l'abolition du système de travail en servitude ont été rejetées par les tribunaux qui se déclaraient incompétents au motif que le gouvernement n'avait pas mis en oeuvre les articles 9 et 16 de ladite loi. Au cours de la même période, près de 250 actions auraient été engagées par des travailleurs en servitude auprès des tribunaux du travail, mais la suite réservée à ces procédures n'est pas connue.
12. La commission a pris note de ces allégations détaillées, qui sont restées sans réponse et qui correspondent au champ limité et aux résultats limités de l'action concrète signalée par le gouvernement et reflétée aux points 7 à 10 ci-avant. Elle rappelle l'observation sur l'application de la convention formulée par la Fédération des syndicats du Pakistan dans une communication datée du 31 décembre 1993 (transmise au gouvernement pour commentaires et restée, elle aussi, sans réponse) selon laquelle la classe féodale du pays a une mainmise étroite sur l'administration, laquelle a toujours été utilisée pour protéger le système de servitude pour dettes, et tous les efforts tentés pour faire disparaître ce système se sont toujours heurtés à une forte résistance. La commission note en outre que, dans sa communication de juin 1996, le NZCTU a relevé la préoccupation des membres travailleurs de la Commission de la Conférence de juin 1996 devant le fait que le gouvernement déploie plus d'énergie à attaquer ceux qui, comme le BLLF, oeuvrent pour la libération des travailleurs en servitude plutôt qu'à appliquer les lois interdisant cette forme d'exploitation.
Mesures à prendre
13. La commission note que, dans sa communication, le NZCTU conclut, avec Anti-Slavery International, sur la base des carences constatées, que les mesures suivantes sont nécessaires pour donner effet à la loi sur l'abolition du travail en servitude:
a) Le gouvernement central devrait insister pour que tous les gouvernements des provinces prennent des mesures pour donner effet aux articles 9 et 10 de la loi, c'est-à-dire pour conférer aux magistrats de district "tels pouvoirs et leur attribuer telles missions" que la loi nécessite pour être appliquée.
b) Le gouvernement central devrait requérir de chaque gouvernement provincial qu'il habilite un ou plusieurs magistrats à connaître des délits qualifiés et punis par la loi, comme le prescrit l'article 16 de la loi.
c) Pour assurer l'application de la loi de 1992 et du règlement de 1995, le gouvernement central devrait donner l'instruction aux gouvernements des provinces de constituer des comités de vigilance dans chaque district dans un délai déterminé, et d'observer les premières sessions de ces comités pour s'assurer que leurs réunions, prévues en théorie, aient effectivement lieu.
d) Le gouvernement central devrait veiller à ce que, au niveau provincial, les budgets soient établis de manière à financer la réinsertion. Les ressources appropriées devraient être dégagées pour de telles opérations et elles devraient être assorties des garanties nécessaires à leur bonne utilisation.
e) Les règles ou autres instructions pour l'application de la loi de 1992 devraient être révisées ou complétées afin de préciser ce qui suit:
i) Les magistrats de district devraient recevoir des directives sur la libération des travailleurs en servitude. Les règles devraient notamment prévoir la consignation sur un registre des données concernant chaque travailleur libéré, ainsi que des données concernant sa réinsertion. Ceci permettrait aux gouvernements des provinces comme au gouvernement central d'opérer un suivi de ce processus de libération et de publier des informations de fait sur le nombre des libérations effectivement réalisées.
ii) Comme aussi bien la loi de 1992 que le règlement de 1995 précisent quelle doit être la composition des comités de vigilance et que, néanmoins, on a signalé que certains comités constitués comptent parmi leurs membres des personnalités locales influentes qui, en fait, emploient de la main-d'oeuvre en servitude, il conviendrait de réviser ces règles afin de préciser qu'aucune personne susceptible d'employer de la main-d'oeuvre en servitude ne puisse siéger dans un tel comité de vigilance.
iii) Les magistrats de district et les comités de vigilance devraient avoir une idée plus claire des initiatives qu'ils sont censés prendre pour enquêter afin de découvrir s'il existe, dans leur juridiction, des travailleurs victimes de servitude pour dette. Ils devraient en particulier être informés du minimum de mesures à prendre. Manifestement, il faudrait préciser qu'il ne suffit pas d'attendre que les travailleurs en servitude portent plainte sur leur situation ni, simplement, de demander à un travailleur s'il est en servitude ou non: dans l'un et l'autre cas, la victime risque d'être intimidée au point qu'elle ne révélera pas sa situation de servitude.
iv) Il conviendrait également de préciser quelles sont les mesures minimales incombant aux magistrats de district ou aux comités de vigilance pour la réinsertion des travailleurs libérés (l'article 10 de la loi dit que les fonctionnaires au niveau du district "s'efforceront, dans la mesure du possible, d'améliorer la situation du travailleur libéré de sa servitude afin que celui-ci ne se retrouve ni en position ni en situation de contracter à nouveau une dette entraînant son retour à la servitude").
14. Selon la même communication du NZCTU, les mesures complémentaires suivantes sont nécessaires pour que la loi sur l'abolition du travail en servitude soit effectivement mise en oeuvre:
a) Publicité. Aucun changement sur ce plan ne semble être intervenu avec la publication en juillet 1995 du règlement d'application de la loi, étant donné que ceci semble avoir reçu peu de publicité ou d'attention de la part des fonctionnaires concernés. Il est donc vital que le gouvernement procède à une relance efficace de cette loi, par une campagne d'information publique conçue pour la porter à l'attention des employeurs comme des travailleurs. De nombreux employeurs de main-d'oeuvre en servitude ne sont pas conscients de commettre à la fois un délit puni par la loi et une violation des droits de l'homme. En fait, ils déclarent souvent qu'en accordant des avances ils font preuve de charité et accordent leurs bienfaits à ceux qui sont plus pauvres qu'eux. La campagne d'information du public doit donc être centrée sur les mentalités populaires, autant qu'elle doit donner des informations purement techniques sur les dispositions de la loi.
b) Programme intégré d'action juridique et sociale. Les recours engagés devant les tribunaux de la Charia contre la loi de 1992 devraient être traités rapidement, afin que les affaires en instance ne puissent plus être invoquées comme prétexte pour retarder l'application de la loi. Même lorsque la loi sur l'abolition du travail en servitude sera pleinement appliquée, une série de programmes devront être parallèlement mis en oeuvre pour aider les personnes libérées de la servitude et leurs familles à réorganiser leur existence. Ceci est particulièrement important pour les enfants, lesquels doivent avoir accès à un enseignement primaire adéquat. L'expérience faite dans d'autres pays a démontré que les magistrats de district et les comités de vigilance ne sont vraisemblablement pas en mesure de faire face à un tel défi sans le soutien et le financement du gouvernement.
c) Arrêt du harcèlement et de la répression dirigés contre les militants. Depuis le début du mois de juin 1995, les militants faisant campagne contre le travail en servitude au Pakistan ont été la cible d'une série d'arrestations et d'inculpations par les autorités, notamment par l'Agence fédérale d'investigation (FIA), organe de sécurité du Pakistan. Ehsan Ullah Khan, dirigeant de la principale organisation militant contre le travail en servitude, le BLLF, a été accusé d'espionnage pour le compte d'un Etat voisin alors qu'il se trouvait à l'étranger et a dû rester hors du pays pour éviter d'être arrêté. Quels que puissent être les motifs ou les justifications de tels actes de répression, le message implicite que le gouvernement a adressé au public est que le militantisme contre le travail en servitude est contraire à l'intérêt public et expose à des sanctions. Le gouvernement doit maintenant renverser sa politique, qui revient actuellement à "punir le messager", et s'engager à soutenir ceux qui, comme la Commission des droits de l'homme du Pakistan ou le Front de libération de la main-d'oeuvre en servitude, ont fait publiquement campagne pour la fin de la servitude pour dette au Pakistan.
15. La commission a pris note des allégations et conclusions communiquées par le NZCTU dans ses commentaires sur l'application de la convention. Elle espère que le gouvernement communiquera des commentaires détaillés sur les allégations formulées et indiquera toute mesure prise ou envisagée qui correspondrait aux recommandations énoncées aux points 13 et 14 ci-avant.
16. La commission exprime à nouveau l'espoir que les mesures nécessaires vont être prises pour assurer la mise en oeuvre effective de la loi de 1992 sur l'abolition du travail en servitude, en ce qui concerne l'identification, la libération et la réinsertion des travailleurs asservis, de même que la stricte punition de ceux qui ont violé la loi, y compris, comme le prévoient l'article 14 de la loi et l'article 107 du Code pénal, la punition de tout fonctionnaire public et de toute autre personne qui, par action, omission illégale ou dissimulation délibérée d'un élément de preuve qu'ils ou elles étaient tenus de révéler, ont délibérément aidé ou favorisé la perpétration d'une infraction à la loi. La commission prie le gouvernement de fournir des informations complètes sur les mesures prises à cet effet, sur toute mesure prise en application des règles de 1995, pour inclure effectivement dans les instances aux niveaux local et de district des représentants des syndicats et des associations d'employeurs, de même que des représentants de la Commission nationale des droits de l'homme, du Front de libération de la main-d'oeuvre en servitude et de toutes autres organisations non gouvernementales engagées dans la tâche de porter secours aux travailleurs en servitude, ainsi que sur les résultats obtenus, notamment sur le nombre de travailleurs en servitude identifiés, libérés et réinsérés, et sur les poursuites exercées, les condamnations prononcées et les sanctions infligées, dans le cadre des affaires évoquées aux points 8 et 10 ci-avant et de toute autre affaire signalée.
II. Le travail des enfants au-delà du travail en servitude
17. Dans son rapport pour la période 1994-1996, le gouvernement a fourni des informations détaillées sur les mesures prises en réponse au problème du travail des enfants. Il mentionne notamment la création de divers organes administratifs et commissions spécialisées; la réalisation d'une enquête nationale sur le travail des enfants, l'attachement des pouvoirs publics à la scolarisation primaire de tous les enfants: constitution de 17 centres polyvalents s'adressant aux enfants qui travaillent, dont 14 auprès de briqueteries, pour offrir à un total de 500 enfants une éducation informelle, un enseignement religieux et une récréation; le lancement d'un projet national axé sur 35 centres de réinsertion des enfants qui travaillent; la planification d'une campagne de sensibilisation du public et, dernier élément mais non le moindre, la mise en oeuvre, en coopération avec l'OIT, de treize programmes d'action dans le cadre du Programme international pour l'abolition du travail des enfants (IPEC) au cours de la période 1994-95.
18. La commission a pris note de ces indications avec intérêt. Elle relève que certains programmes et projets mentionnés par le gouvernement concernent les enfants en servitude ou les industries à forte intensité de main-d'oeuvre en servitude. En ce qui concerne les formes de travail des enfants qui ne constituent pas un travail en servitude, dans sa précédente observation, la commission a soulevé la question, au regard de l'article 2, paragraphe 1, de la convention, de savoir si un mineur peut être considéré comme s'étant offert de plein gré pour un travail ou service et, dans l'affirmative, dans quelles conditions; si le consentement des parents est nécessaire ou même suffisant à cet égard et, dans l'affirmative, dans quelles conditions; et quelles sont les sanctions en cas de refus. Se référant également à son observation au titre de la convention (révisée) (no 59) sur l'âge minimum (industrie), 1937, la commission espère que le gouvernement sera bientôt en mesure de faire état de progrès et de résultats concrets pour les divers programmes et projets visant l'abolition du travail des enfants.
III. Restrictions à la liberté de quitter son emploi
19. La commission a formulé depuis un grand nombre d'années des commentaires sur les dispositions de la loi de 1952 sur le maintien des services essentiels du Pakistan en vertu desquelles toute personne au service du gouvernement fédéral, quel que soit l'emploi qu'elle exerce, est passible d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à un an si elle met fin à son emploi sans le consentement de l'employeur, nonobstant toute condition expresse ou tacite de son contrat prévoyant la démission avec un préavis. Ces dispositions peuvent être étendues à d'autres catégories d'emplois (art. 2, 3(1)(b) et explication no 2, art. 7(1); et art. 3). La loi de 1958 du Pakistan oriental sur les services essentiels, telle qu'en vigueur au Baloutchistan et dans la Province frontalière du Nord-Ouest (NWFP), et les lois correspondantes de 1958 du Pendjab et du Sindh comportent des dispositions similaires.
20. Le gouvernement a exprimé à plusieurs reprises son intention de modifier les dispositions de la loi du Pakistan sur les services essentiels de manière qu'un travailleur puisse mettre fin à son emploi conformément aux conditions expresses ou tacites de son contrat. Dans son rapport pour la période de 1993-94, reçu le 30 mai 1995, et dans son dernier rapport, le gouvernement a déclaré que cette loi est rendue applicable temporairement aux emplois essentiels dans le seul but de garantir la défense ou la sécurité du pays ainsi que le maintien des approvisionnements et des services essentiels à la vie de la collectivité. Il ajoute que la liste des emplois essentiels couverts par cette loi est minimale et qu'il a d'ailleurs pour politique de maintenir cette liste constamment à l'examen. Dans sa déclaration à la Commission de la Conférence en juin 1996, un représentant du gouvernement a indiqué que le champ d'application de la loi sur les services essentiels a encore été réduit. Alors que cet instrument couvrait encore neuf établissements ou catégories en 1995, il ne s'applique plus désormais qu'aux catégories suivantes, qui jouent un rôle déterminant pour la sécurité du pays et la vie de la collectivité: i) la production, transmission, distribution et fourniture de l'électricité; ii) certains organismes pétroliers et gaziers dont le nombre a été réduit de 17 à neuf; iii) la société imprimant les titres et autres documents officiels du Pakistan; iv) les laboratoires de recherche Kahuta; v) la Direction de l'aviation civile; vi) la Régie de l'électricité de Karachi; vii) le port de Karachi et la Direction de Port Qasim.
21. La commission prend bonne note de ces indications. En ce qui concerne la déclaration réitérée du gouvernement selon laquelle la loi de 1952 n'est rendue applicable que temporairement et à des catégories d'emplois limitées, la commission doit relever une fois de plus que les lois sur les services essentiels s'appliquent de manière permanente à tout emploi, quelle que soit sa nature, relevant du gouvernement fédéral, ainsi qu'à tout emploi relevant d'un gouvernement de province ou d'un organisme créé par lui ou par une autorité locale, et à tous services ayant trait aux transports ou à la défense civile. En outre, le champ d'application de ces lois peut être étendu, par notification des gouvernements des provinces, aux emplois de tout établissement scolaire indépendant et, par notification du gouvernement fédéral, pour des périodes spécifiques et renouvelables de six mois, à d'autres emplois ou catégories d'emplois que le gouvernement considère essentiels.
22. Dans son rapport reçu le 30 mai 1995, le gouvernement déclare, en ce qui concerne l'incidence sur l'emploi de la loi du Pakistan sur les services essentiels, que le droit d'association reste dans de tels cas inaltéré et que seuls les grèves et les lock-out sont interdits parce que le gouvernement considère que si les services essentiels sont perturbés, la vie de la collectivité dans son ensemble est en péril. Toutefois, en toutes circonstances, le droit des travailleurs de recourir à une instance appropriée (la Cour nationale des relations professionnelles, le NIRC) pour obtenir réparation de leurs griefs leur reste ouvert. Le gouvernement ajoute qu'il a également délibéré en vue de modifier les dispositions de cette loi de manière à permettre à un employé de mettre fin à son emploi conformément aux conditions expresses ou tacites de son contrat. Mais il réitère que l'application de cette législation à certains secteurs est inévitable en raison du caractère critique des fonctions assurées. Il en a en outre décidé ainsi parce que l'intérêt national exige des restrictions appropriées dans ces cas. Il a néanmoins décidé que cette loi ne devrait pas être étendue, à l'avenir, à quelque industrie que ce soit sans que cela ne soit pleinement justifié. La possibilité pour les employés couverts par la loi de 1952 sur les services essentiels de mettre fin unilatéralement à leur emploi et l'exclusion de certains établissements du champ d'application de la loi ont été examinées par un groupe de travail tripartite qui a soumis son rapport au Cabinet, en tenant compte des avis exprimés par les groupes travailleurs et employeurs. Le Cabinet a constitué une commission chargée d'examiner ce rapport de manière plus approfondie, et le BIT sera informé de tout développement dans le domaine. Dans son plus récent rapport, reçu dix-huit mois plus tard, le gouvernement répète les mêmes déclarations, en ajoutant que les recommandations des groupes de travail sont activement étudiées et que les informations concernant les derniers développements seront communiquées dès que la nouvelle politique du travail sera annoncée par le gouvernement.
23. La commission constate l'absence de progrès visible quant au rétablissement, pour les salariés couverts par la loi de 1952 sur les services essentiels, du droit de mettre fin unilatéralement à leur emploi. S'agissant de l'affirmation du gouvernement selon laquelle le droit d'association reste inaltéré et que seuls les grèves et les lock-out sont interdits, la commission, se référant également au point 3 de son observation concernant l'application au Pakistan de la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957, doit souligner une fois de plus que, même dans les services véritablement essentiels, dont l'interruption peut mettre en péril la vie, la sécurité ou la santé de la personne, la liberté pour tout travailleur de mettre fin à son emploi moyennant un préavis raisonnable reste un droit inaliénable. C'est ce droit que les lois fédérales et provinciales sur les services essentiels dénient à un groupe beaucoup plus large de salariés. La commission rappelle que les lois sur les services essentiels font, depuis un grand nombre d'années, l'objet de commentaires au titre de la convention, ratifiée par le Pakistan en 1957, et que le gouvernement avait donné l'assurance, à la Commission de la Conférence en 1989, qu'il avait d'ores et déjà décidé de donner effet aux exigences de la convention en modifiant la loi de 1952 et que les projets d'amendement allaient être soumis à l'Assemblée nationale. Rappelant également que la Fédération des syndicats du Pakistan a fait observer, dans sa communication datée du 13 octobre 1994, que ces lois doivent être abolies compte tenu des conventions nos 105 et 29, ratifiées par le Pakistan, et notant qu'en 1996 la Commission de la Conférence a exprimé le ferme espoir que le gouvernement prendra dans un très proche avenir toutes les mesures nécessaires pour garantir qu'aussi bien la législation nationale que la législation des provinces sur les services essentiels soient modifiées afin de supprimer les restrictions à la liberté des travailleurs de quitter leur emploi, la commission espère que ceci sera finalement fait et que le gouvernement sera prochainement en mesure de communiquer copie de la législation adoptée à cette fin.
[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 85e session et de communiquer un rapport détaillé en 1997.]
1. La commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer copie des rapports annuels, depuis 1992, de la Commission des droits de l'homme du Pakistan (HRCP) ainsi que des plus récents rapports de la Commission nationale du bien-être et du développement de l'enfance (NCCND).
Dans son dernier rapport, le gouvernement déclare, comme il l'a fait précédemment, que le service militaire au Pakistan est un service volontaire et, en tant que tel, ne rentre pas dans le champ d'application des normes de l'OIT, notamment de la convention no 29, ratifiée par le Pakistan. Pour ce qui est de la liberté, pour les militaires, de quitter l'armée en temps de paix sous réserve d'un préavis raisonnable, le gouvernement fait observer que les officiers et autres personnels des forces armées du Pakistan bénéficient d'une formation approfondie qui met le budget de l'Etat à forte contribution, de sorte que ce pays, avec ses ressources modestes, ne peut se permettre d'accorder la possibilité à ces officiers et autres personnels de quitter l'armée de leur propre initiative même en temps de paix. Néanmoins, un membre des forces armées peut être admis à démissionner sous réserve qu'il justifie de raisons convaincantes et qu'il puisse expliquer les causes de sa demande de libération anticipée. Le gouvernement fait en outre observer qu'aux termes de l'article 2 a) de la convention tout travail ou service exigé en vertu des lois sur le service militaire obligatoire et affecté à des travaux de caractère purement militaire ne rentre pas dans le champ d'application de cet instrument. Il estime, par conséquent, qu'il n'y a pas lieu, pour lui, de fournir les informations demandées en ce qui concerne les dispositions concernant les conditions de service dans les forces armées, notamment celles régissant les conditions d'engagement et de démission.
La commission prend bonne note de ces indications. Elle se réfère à nouveau aux explications développées aux paragraphes 33 et 68 à 72 de son étude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, dans lesquels elle indique que les dispositions de l'article 2 2) a) de la convention se rapportent au service militaire obligatoire et ne s'appliquent pas, par conséquent, aux militaires de carrière et ne sauraient donc être invoquées pour priver les personnes engagées volontairement du droit de quitter l'armée en temps de paix dans des délais raisonnables, soit à des intervalles déterminés, soit moyennant préavis, sous réserve des conditions qui peuvent être normalement exigées pour assurer la continuité du service. Pour ce qui est du coût de la formation des personnels qualifiés, la commission a mentionné la possibilité d'un remboursement proportionnel de cette formation, qui peut être exigé pendant un certain délai en cas de démission.
1. La commission prend note des rapports du gouvernement pour les périodes du 1er juillet 1992 au 30 juin 1993 et du 1er juillet 1993 au 30 juin 1994, ainsi que de la documentation supplémentaire relative aux "derniers développements concernant l'approche du problème du travail des enfants et de la main-d'oeuvre en servitude", reçu du gouvernement en novembre 1995.
La commission prend également note des observations sur l'application de la convention formulées par la Fédération des syndicats du Pakistan dans une communication datée du 13 octobre 1994, qui a été transmise pour commentaire au gouvernement le 11 novembre 1994. Celui-ci n'a pas répondu à ces observations.
I. Le travail des enfants, sous l'angle de la convention sur le travail forcé
2. Dans ses précédentes observations, la commission évoquait de manière assez détaillée les problèmes de travail en servitude et de travail d'enfants en servitude. Dans le supplément de documentation reçu en novembre 1995, sur la question de l'étendue du problème du travail des enfants en servitude, le gouvernement indique que: "il existe une grande différence entre le travail des enfants et le travail des enfants en servitude. Le problème du travail des enfants existe au Pakistan, mais dans une mesure limitée. Il est visible dans certains cas et invisible dans d'autres. Le travail des enfants est visible essentiellement dans les petites unités industrielles, les ateliers, les restaurants, etc. Le travail des enfants invisible peut exister sous la forme d'une aide, dans le cadre familial, à des activités industrielles à domicile et dans l'agriculture. Les cas de travail d'enfants en servitude ne sont pas non plus visibles."
3. La commission prend bonne note de ces indications. Avant d'examiner de manière plus approfondie la question de la visibilité comme aspect clé du problème du travail en servitude, elle souhaite s'arrêter sur la différence, sur un plan plus conceptuel, entre le travail des enfants et le travail d'enfants en servitude aux fins de la convention.
4. Travail forcé, travail en servitude, enfants en servitude. Aux termes de la convention, le gouvernement s'est engagé à supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire, qui est défini à l'article 2, paragraphe 1, de la convention, comme "tout travail ou service exigé d'un individu sous la menace d'une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s'est pas offert de plein gré". Le travail en servitude, tel que le définit l'article 2 e) de la loi no III de 1992 du Pakistan sur l'abolition du système de travail en servitude, ne constitue qu'une forme de travail forcé rentrant dans la définition donnée à l'article 2, paragraphe 1, de la convention. Le travail d'enfants en servitude constitue un aspect caractéristique et intrinsèque du système de travail en servitude, comme le reconnaît l'article 2 e) de la loi précitée, qui se réfère au travail imposé à tout membre de famille ou personne à charge du "débiteur" ou prétendu débiteur. Le travail en servitude, y compris le travail d'enfants en servitude, sera examiné dans le cadre de la partie II ci-après.
5. Travail des enfants en situation autre que de servitude. Pour les formes de travail d'enfants autres que le travail en servitude, la question se pose, au regard de l'article 2, paragraphe 1, de la convention, de savoir si un mineur peut être considéré comme s'étant offert de plein gré pour un travail ou service et, dans l'affirmative, dans quelles conditions; si ou dans quelles conditions le consentement des parents est nécessaire ou même suffisant à cet égard, et quelles sont les sanctions en cas de refus. Dans ce contexte, il convient de tenir également présent à l'esprit que, en réglementant le recours au travail obligatoire pendant une période transitoire suivant l'entrée en vigueur de la convention (le 1er mai 1932), la Conférence a disposé expressément, à l'article 11 de cet instrument, qu'aucune personne de moins de 18 ans ne pouvait être assujettie à un tel travail.
6. Dans ses rapports sur l'application de la convention et dans la documentation supplémentaire relative aux récents développements intervenus, le gouvernement a fourni des informations sur une série d'activités et de programmes concernant le travail des enfants, y compris la signature, en juin 1994, d'un protocole d'accord tendant à l'élimination du travail des enfants dans le pays et la mise en oeuvre de 14 programmes d'action, dans le cadre du Programme international d'élimination du travail des enfants (IPEC); la création d'un "comité national sur les droits de l'enfant" et de "cellules spéciales sur le travail des enfants" au sein du ministère du Travail, de la Main-d'oeuvre et des Ressortissants pakistanais à l'étranger et auprès des départements du travail des gouvernements des provinces; la réalisation, au cours de l'année écoulée, de près de 3 000 inspections, ayant donné lieu à des poursuites dans près d'un millier de cas, en application de la loi de 1991 sur l'emploi des enfants, qui interdit l'emploi de personnes n'ayant pas 14 ans révolus dans une gamme limitée d'emplois (liés aux chemins de fer, aux ports et à la vente de feux d'artifice) et dans 14 procédés de travail énumérés (y compris les procédés de production utilisant des métaux ou autres substances toxiques), sauf dans les entreprises familiales et les établissements scolaires reconnus par l'Etat. Cette loi prévoit des peines d'amende ou d'emprisonnement en cas d'infraction. La commission fait observer que la loi de 1934 sur les fabriques, telle que modifiée en 1977, interdit déjà d'une manière plus générale le travail des enfants n'ayant pas 14 ans révolus dans toute fabrique comptant dix travailleurs ou plus et dans les mines, mais aucune donnée relative au contrôle de l'application de cette loi n'a été fournie.
7. Se référant au document sur la "situation globale concernant l'application de la loi de 1991 sur l'emploi des enfants et de la loi de 1992 sur l'abolition de système de travail en servitude", reçu du gouvernement en novembre 1995, la commission note qu'en application de la loi de 1991 sur l'emploi des enfants, 1 351 inspections ont été réalisées au Pendjab, qui ont donné lieu à 699 poursuites avec, provisoirement, 48 condamnations; au Sindh, 407 inspections ont donné lieu à 47 poursuites, n'ayant encore débouché sur aucune condamnation; dans la Province limitrophe du nord-ouest (NWFP), 1 576 inspections ont permis de constater 270 irrégularités ayant donné lieu à 16 actions en justice; au Baloutchistan, des mesures concernant 1 921 enfants de moins de 14 ans travaillant dans différents établissements sont sur le point d'être prises. La commission apprécie les efforts déployés par le gouvernement pour éloigner les enfants d'une série d'occupations parmi les plus dangereuses ou nocives. Mais, en l'absence de détails supplémentaires concernant les cas cités par le gouvernement, qui ont été soulevés en application de la loi de 1991 sur l'emploi des enfants, la commission n'est pas en mesure d'évaluer leur incidence sur l'application de la convention sur le travail forcé, ni d'apprécier ce qui reste à faire pour protéger les enfants, d'une manière plus générale, contre l'exploitation de leur travail. En revanche, il apparaît clairement à la commission que les efforts déployés à ce jour sur le plan pratique ne se sont pas attaqués au problème des enfants en servitude ni, en fait, à celui du travail en servitude en tant que tel.
II. Travail en servitude
8. Ampleur du problème. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté des allégations portées devant les Nations Unies selon lesquelles 20 millions de personnes, dont sept millions d'enfants, travaillaient en servitude. La commission a noté l'indication du gouvernement selon laquelle ces chiffres étaient irréalistes, appréciation partagée par la Fédération des syndicats du Pakistan. Cependant, tout en mettant en rapport les chiffres allégués avec des données statistiques concernant la main-d'oeuvre et la population totale du Pakistan, le gouvernement n'a, lui-même, avancé aucun chiffre quant au nombre de travailleurs en servitude. La commission note toutefois les indications données dans la monographie présentée par le gouvernement au Séminaire régional asien sur les enfants en servitude (Islamabad, novembre 1992). Ce document indique que le travail des enfants au Pakistan perdure essentiellement à cause de la pauvreté, de la non-sensibilisation du public, des carences du système éducatif et de la servitude pour dettes des parents. Dans les régions où les parents (paysans et journaliers) sont contraints de fournir leurs prestations à des propriétaires ou autres employeurs, leurs enfants sont souvent eux-mêmes prisonniers du système de servitude pour dettes. Souvent, les parents contractent un emprunt pour faire face à des besoins urgents. Les débiteurs doivent ensuite rembourser leur dette par le travail. Dans la pratique, la dette ne décroît jamais mais, bien au contraire, elle s'accroît. L'ensemble de la famille se trouve réduit de manière permanente à la servitude et le créancier exige un remboursement de la part des générations suivantes. Ainsi, les enfants sont généralement promis comme travailleurs à titre de contribution au remboursement de la dette. Ils peuvent également être asservis de manière distincte. Les parents peuvent les envoyer travailler sur le domaine d'un propriétaire ou d'un créancier. Ils peuvent y rester de nombreuses années, sans savoir pour combien de temps ni même connaître le montant de la dette qu'ils sont en train de rembourser. La commission note en outre que, dans son observation datée du 13 octobre 1994, la Fédération des syndicats du Pakistan a indiqué que des personnes sont assujetties au travail forcé sous le système de servitude pour dettes par des seigneurs féodaux dans des régions rurales et moins développées mais aussi dans certaines mines de charbon et briqueteries.
9. Pratique en matière d'investigation et mesures prises pour faire respecter la loi. Dans ses rapports sur l'application de la convention pour la période 1992-1994, le gouvernement indique qu'un seul cas de travail en servitude a été constaté, dans la province du Pendjab, et que, selon ce qu'il lui a été dit, la direction de l'entreprise a fait l'objet de poursuites. Dans la "situation globale concernant l'application de la loi de 1991 sur l'emploi des enfants et de la loi de 1992 sur l'abolition du système de travail en servitude", document reçu du gouvernement en novembre 1995 et mentionné au paragraphe 7 ci-avant, le nombre des inspections, poursuites et condamnations en application de la loi de 1992 est nul pour chacune des quatre provinces. A titre d'explication, ce document indique que les rapports communiqués par les magistrats de district du Baloutchistan ne font état d'aucun cas de travail en servitude dans la province et que les comités de vigilance présidés par les vice-commissaires des districts de la NWFP et du Sindh n'ont relevé aucun cas de travail en servitude. En ce qui concerne le Pendjab, il est expliqué qu'en application de l'article 15 de la loi de 1992 des comités de vigilance ont été constitués dans presque tous les districts, que la loi ne confère aux comités de vigilance qu'un rôle consultatif et de supervision et qu'"il est constaté, de manière générale, que les victimes ne s'adressent pas aux comités de vigilance mais préfèrent s'en remettre à la juridiction de la Haute Cour pour obtenir un redressement rapide".
10. Visibilité et perception du problème. Dans sa déclaration notée au paragraphe 2 ci-avant, le gouvernement, appréciant l'ampleur du problème du travail des enfants en servitude, a relevé que les cas de travail en servitude d'enfants ne sont pas visibles. L'absence de visibilité - ou de perception - semble constituer, d'une manière plus générale, une difficulté à s'attaquer au problème du travail en servitude, difficulté qui n'a pas encore été surmontée par les mécanismes mis en place, à l'exception du cas unique où des travailleurs en servitude ont été en mesure de se syndiquer et de saisir, de leur propre initiative, la juridiction de la Haute Cour.
11. Le rôle des magistrats de district et des comités de vigilance. La commission rappelle qu'aux termes de l'article 9 de la loi de 1992 sur l'abolition du système de travail en servitude, le gouvernement d'une province peut conférer à un magistrat de district les pouvoirs et les attributions qu'il juge nécessaires pour assurer une application adéquate des dispositions de cette loi. En outre, aux termes de l'article 15 de la loi, les comités de vigilance devant être constitués au niveau du district doivent non seulement conseiller l'administration du district sur les questions ayant trait au respect effectif de la loi, mais encore assurer sa mise en oeuvre de manière appropriée et fournir aux travailleurs en servitude toute assistance qui peut être nécessaire pour atteindre les objectifs de la loi. Cela ne semble pas encore avoir été fait.
12. Observations des syndicats. La commission rappelle les observations relatives à l'application de la convention formulées par la Fédération unie des syndicats du Pakistan dans une communication datée du 31 décembre 1993, transmise pour commentaires au gouvernement le 21 janvier 1994. Dans ces observations, la fédération, se référant à la composition des comités de vigilance, a déclaré que les propriétaires féodaux du pays ont une forte emprise sur les rouages de l'administration, qui sont toujours utilisés pour protéger le système de travail en servitude, et que tout effort qui a été entrepris pour l'élimination de ce système s'est heurté à une forte résistance. La fédération a demandé qu'une représentation des syndicats dans les comités de vigilance - qui n'est pas jusqu'à présent prévue par la loi - soit rendue obligatoire. La commission note que le gouvernement n'a pas répondu à ces observations.
13. Mesures à prendre. La commission espère que les mesures nécessaires vont maintenant être prises pour assurer la mise en oeuvre effective de la loi de 1992 sur l'abolition du travail en servitude, en ce qui concerne l'identification, la libération et la réhabilitation des travailleurs asservis, de même que la stricte punition de ceux qui ont violé la loi, y compris, comme le prévoient l'article 14 de la loi et l'article 107 du Code pénal, la punition des fonctionnaires publics ou autres personnes qui, par action, omission illégale ou dissimulation délibérée d'un élément de preuve qu'ils ou elles étaient tenus de révéler, ont délibérément aidé ou favorisé la perpétration d'une infraction à la loi. La commission prie le gouvernement de fournir des indications complètes sur les mesures prises à cet effet, sur toute mesure prise ou envisagée pour inclure dans les mécanismes en place des représentants des syndicats et des associations d'employeurs, de même que des représentants de la Commission nationale des droits de l'homme et de toutes autres organisations non gouvernementales engagées dans la tâche de porter secours aux travailleurs en servitude, et sur les résultats obtenus, notamment sur le nombre de travailleurs en servitude identifiés, libérés et réhabilités et sur les poursuites exercées, les condamnations prononcées et les sanctions infligées.
III. Restrictions à la liberté de quitter l'emploi
14. La commission formule des commentaires depuis un grand nombre d'années sur les dispositions de la loi de 1952 sur le maintien des services essentiels du Pakistan, en vertu desquelles toute personne au service du gouvernement fédéral, quel que soit l'emploi qu'elle exerce, est passible d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à un an si elle met fin à son emploi sans le consentement de l'employeur, nonobstant toute condition expresse ou tacite de son contrat prévoyant la démission avec un préavis. Ces dispositions peuvent être étendues à d'autres catégories d'emploi (art. 2, 3 1) b) et explication no 2, art. 7 1) et art. 3). La loi de 1958 du Pakistan occidental sur les services essentiels, telle qu'en vigueur au Baloutchistan et dans la Province limitrophe du nord-ouest, et les lois correspondantes de 1958 du Pendjab et du Sindh comportent des dispositions similaires.
15. Le gouvernement a exprimé à plusieurs reprises son intention de modifier les dispositions de la loi du Pakistan sur les services essentiels de manière qu'un travailleur puisse mettre fin à son emploi conformément aux conditions expresses ou tacites de son contrat. Dans son dernier rapport, le gouvernement déclare que cette loi est rendue applicable temporairement aux emplois essentiels, dans le seul but de garantir la défense ou la sécurité du pays ainsi que le maintien des approvisionnements et des services essentiels à la survie de la collectivité. Si le droit d'association reste, dans de tels cas, inaltéré, seuls les grèves et lock-out sont interdits du fait que le gouvernement estime que, si des services essentiels sont interrompus, la vie de la collectivité dans son ensemble est mise en péril. Toutefois, en toutes circonstances, le droit des travailleurs de recourir à une instance appropriée (le NIRC) pour obtenir réparation de leurs griefs leur reste ouvert. Le gouvernement ajoute que la liste des emplois essentiels visés par la loi est minimale; il a d'ailleurs pour politique de maintenir cette liste constamment à l'examen. Il a également délibéré en vue de modifier les dispositions de cette loi de manière à permettre à un employé de mettre fin à son emploi conformément aux conditions expresses ou tacites de son contrat, mais réitère que l'application de cette législation à certaines industries est inévitable en raison du caractère critique des fonctions assurées. En outre, cela a été fait parce que l'intérêt national exige des restrictions appropriées dans ces cas. Le gouvernement a néanmoins décidé que cette loi ne devrait pas être étendue, à l'avenir, à quelque industrie, à moins que cela ne soit pleinement justifié. Toutefois, la possibilité pour les employés couverts par la loi de 1952 sur les services essentiels de mettre fin unilatéralement à leur emploi et l'exclusion de certains établissements du champ de la loi ont été examinées par un groupe de travail tripartite qui a soumis son rapport au Cabinet, en tenant compte des avis exprimés par les groupes travailleurs et employeurs. Le Cabinet a constitué une commission chargée d'examiner ce rapport de manière plus approfondie et le BIT sera informé de tout développement dans ce domaine.
16. La commission prend dûment note de ces diverses explications. En ce qui concerne la déclaration réitérée du gouvernement selon laquelle la loi de 1952 est rendue applicable temporairement à des emplois essentiels seulement, la commission doit relever une fois de plus que les lois sur les services essentiels s'appliquent de manière permanente à tout emploi, de quelque nature que ce soit, sous le gouvernement fédéral, ainsi qu'à tout emploi sous un gouvernement de province ou tout organisme créé par lui ou par une autorité locale, et tout service ayant trait aux transports ou à la défense civile. En outre, le champ d'application des lois peut être étendu, par notification des gouvernements des provinces, aux emplois dans tout établissement scolaire indépendant et, par notification du gouvernement fédéral, pour des périodes spécifiques et renouvelables de six mois, à d'autres emplois ou catégories d'emplois que le gouvernement considère essentiels.
17. En ce qui concerne l'indication du gouvernement selon laquelle le droit d'association reste inaltéré et que seuls les grèves et lock-out sont interdits, la commission, se référant également au point 4 de son observation sur l'application de la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957, au Pakistan, doit une fois de plus souligner que, même dans les services véritablement essentiels, dont l'interruption mettrait en danger la vie, la santé ou la sécurité de la personne, la liberté, pour chaque travailleur, de mettre fin à sa relation d'emploi par un préavis d'une durée raisonnable reste un droit inaliénable; aux termes des lois fédérale et provinciales sur les services essentiels, ce droit est dénié à un ensemble beaucoup plus vaste de travailleurs.
18. Pour ce qui est de l'indication du gouvernement selon laquelle la possibilité de rétablir le droit des employés couverts par la loi de 1952 sur les services essentiels de mettre fin unilatéralement à leur relation d'emploi fait l'objet d'un examen plus approfondi par une commission du Cabinet, sur la base d'un rapport d'un groupe de travail tripartite, la commission note également que la Fédération des syndicats du Pakistan fait observer, dans sa communication datée du 13 octobre 1994, que ces lois devraient être abrogées à la lumière des conventions nos 105 et 29, ratifiées par le Pakistan. Rappelant que les lois sur les services essentiels font, depuis un grand nombre d'années, l'objet de commentaires au titre de la convention, ratifiée par le Pakistan en 1957, et que le gouvernement avait donné l'assurance, à la Commission de la Conférence en 1989, qu'il avait déjà décidé de donner effet aux exigences de la convention en modifiant la loi de 1952 et que les projets d'amendement allaient être soumis à l'Assemblée nationale, la commission veut croire que cela va maintenant être fait, qu'une action similaire va être entreprise pour les lois correspondantes des provinces, et que le gouvernement fera rapport sur les dispositions adoptées à cette fin.
Se référant à son observation sous la convention, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les points suivants:
1. La commission note que la création d'un comité national des droits de l'enfance, qui serait chargé de veiller à l'application de la législation pertinente, est à l'étude. Elle souhaiterait que le gouvernement fournisse des informations sur la création d'un tel comité et sur son mandat.
2. La commission prie le gouvernement de communiquer, avec son prochain rapport, copie des rapports annuels pour 1992 et 1993 de la Commission des droits de l'homme du Pakistan (HRCP) ainsi que du plus récent rapport de la Commission nationale du bien-être et du développement de l'enfance (NCCND).
3. La commission note que la Commission législative du Pakistan examine actuellement la législation nationale concernant la protection de l'enfance par rapport au travail. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées dans ce domaine.
4. La commission demande depuis 1981 au gouvernement de fournir des informations sur le statut des militaires de carrière et, en particulier, sur les conditions d'engagement et de démission des personnels en service actif.
Le gouvernement a déclaré antérieurement considérer que le service militaire étant volontaire, il échappe à la convention, que les personnels militaires ne rentrent pas dans la définition des travailleurs de l'industrie, et que les officiers et autres personnels employés dans les forces armées bénéficient d'une formation approfondie, de sorte que le pays ne peut leur permettre de quitter le service à leur libre choix, ledit service rentrant dans le cadre prévu à l'article 2, paragraphe 2 a), de la convention et étant de ce fait exclu de ses effets.
Pour pouvoir apprécier la conformité de la législation nationale avec la convention, la commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer copie des dispositions régissant les conditions de service dans les forces armées, en particulier en ce qui concerne les conditions d'engagement et de démission ainsi que toute disposition s'appliquant au cas d'une formation reçue aux frais de l'Etat.
La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement dans un rapport de juin 1993 couvrant la période du 1er juillet 1991 au 30 juin 1992.
La commission constate que le gouvernement n'a pas communiqué de rapport pour la période se terminant en juin 1993, ni de réponse aux plus récents commentaires de la commission de mars 1993.
La commission a pris note des observations concernant l'application de la convention formulées par la Fédération nationale des syndicats du Pakistan, la Fédération des syndicats du Pakistan et la Fédération des syndicats unis du Pakistan, dans leurs communications datées respectivement des 5 octobre, 11 octobre et 31 décembre 1993, qui ont été transmises pour commentaires au gouvernement respectivement les 15 octobre et 1er novembre 1993 et le 21 janvier 1994. La commission note que le gouvernement n'a pas encore répondu à ces observations.
La commission relève que dans une allocution à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies, le 1er février 1994, le Premier ministre a déclaré que le premier objectif de son gouvernement est d'assurer une vie de dignité à son peuple et que ce gouvernement s'efforce de garantir les droits des femmes et leur pleine participation dans la société, d'assurer une protection complète des enfants et de préserver les droits fondamentaux des minorités.
1. Servitude pour dettes
Dans ses précédents commentaires, la commission a noté la promulgation, le 11 mars 1992, de la loi no III abolissant le système de servitude pour dettes, qui proclame tout travailleur jusque-là asservi libre et dégagé de toute obligation d'exécuter un travail asservi. La commission notait entre autres que cette loi dispose que nul ne fera d'avances (peshgi) entraînant la servitude pour dettes ni n'obligera qui que ce soit à se livrer à un travail en servitude ou à toute autre forme de travail forcé (art. 4). Les gouvernements des provinces peuvent investir les magistrats de district des pouvoirs et attributions nécessaires à l'application de la loi. Les magistrats de district devront s'efforcer de promouvoir, autant que possible, les conditions d'existence du travailleur libéré en protégeant les intérêts économiques de ce dernier de telle sorte qu'il n'ait plus ni l'occasion ni de motif de retomber dans la servitude pour dettes (art. 9 et 10). La commission a noté que l'asservissement de travailleurs pour dettes ou la contrainte à la servitude dans le cadre de ce système est passible d'une peine d'emprisonnement de deux à cinq ans ou d'une amende de 50.000 roupies, ou des deux à la fois (art. 11 et 12).
La commission a prié le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises ou envisagées pour appliquer cette loi dans la pratique.
La commission note les indications communiquées par le gouvernement dans son rapport de juin 1993 au sujet de l'estimation du nombre de travailleurs asservis, en réponse à l'observation antérieure de la commission (en 1992) qui faisait état d'allégations portées devant les Nations Unies, selon lesquelles 20 millions de personnes seraient en état de servitude pour dettes, dont 7 millions d'enfants. Le gouvernement juge ces chiffres irréalistes. Il indique que, selon le Bureau fédéral de statistiques et le ministère des Finances, le total de la population active est de 33,82 millions, le total des personnes employées de 32,76 millions, dont 16,76 millions dans l'agriculture et 11,99 millions dans l'industrie. Le gouvernement ajoute que si les chiffres cités plus haut devaient être retenus, il en résulterait que 60 pour cent de la population employée travaillerait en servitude ou bien, si ces chiffres étaient ajoutés au nombre de personnes employées, alors le total de la population active s'élèverait à 53 millions, soit près de 45 pour cent de la totalité de la population. En ce qui concerne les enfants, le gouvernement déclare que le chiffre cité n'est probablement même pas celui du total des enfants qui travaillent.
La commission note que, dans ses observations, la Fédération des syndicats du Pakistan estime elle aussi que les chiffres cités dans ces allégations ne reflètent pas la réalité, mais qu'il existe des cas de servitude dans les régions les moins peuplées, oû des travailleurs médiocrement rémunérés vivent sous le joug du féodalisme, hérité du passé colonial du pays. La fédération ajoute que les moyens modernes d'information, l'amélioration des communications entre les différentes parties du pays et la tenue d'élections à intervalles réguliers suscitent un large éveil des consciences en faveur des groupes les plus défavorisés et de l'abolition de toutes les formes de servitude et de travail des enfants. Néanmoins, la simple promulgation de la loi abolissant la servitude pour dettes ne résoudra pas les problèmes considérables auxquels sont confrontés les travailleurs ni les souffrances des enfants si des ressources financières ne sont pas consacrées au développement social de ces catégories de la population et à l'amélioraton de la formation professionnelle et des moyens de formation. La fédération souligne également la nécessité de créer des commissions tripartites.
La commission note également les observations de la Fédération nationale des syndicats du Pakistan, qui souligne la nécessité d'une action gouvernementale tendant à l'application stricte de la loi de 1992 abolissant le système de servitude pour dettes.
La commission note également les observations de la Fédération des syndicats unis du Pakistan, qui évoque le mouvement lancé en collaboration avec les syndicats des travailleurs de la fabrication de briques contre le travail forcé des hommes, des femmes et des enfants dans ce secteur. La fédération affirme que la pratique des avances y a toujours cours, en dépit de son interdiction par la loi de 1992 sur l'abolition de la servitude pour dettes. La fédération se réfère également à l'article 15 de la loi, qui concerne la création de comités de vigilance devant être composés "de représentants élus de la circonscription, de représentants de l'administration du district, de l'Association du barreau, de la presse, des services sociaux officiels et des départements du travail du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux". La fédération se déclare préoccupée par l'emprise de certains milieux sociaux et politiques sur l'appareil administratif qui, selon elle, font barrage à l'élimination du système de servitude pour dettes. La fédération réclame en conséquence que les syndicats soient également représentés dans ces comités de vigilance.
La commission prend note des déclarations de la fédération selon lesquelles le système "Jammada/jammadarni" (système de contrôle; intermédiaire entre le travailleur et l'employeur) se perpétue dans le secteur de la fabrication de briques alors qu'il devrait être aboli en vertu de la loi de 1992. Cette fédération affirme également que les travailleurs de ce secteur perçoivent des salaires qui sont en deçà des minima prescrits; à cet égard, la commission se réfère à son observation sur l'application de la convention no 81 sur l'inspection du travail.
La commission a également noté que la Commission des droits de l'homme du Pakistan a recommandé, en janvier 1994, une application stricte de la loi abolissant la servitude pour dettes, aussi bien dans l'industrie que dans l'agriculture.
Constatant que plus de deux années se sont écoulées depuis la promulgation, en mars 1992, de la loi abolissant la servitude pour dettes, la commission exprime le ferme espoir que les mesures nécessaires seront prises pour assurer la libération effective de tous les travailleurs soumis à ce système. Elle prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises pour faire appliquer cette loi et, en particulier, sur les aspects suivants: le nombre de travailleurs asservis pour dettes qui ont été affranchis depuis la promulgation de la loi; le nombre d'inculpations et de condamnations d'exploiteurs et de sanctions prises; les mesures prises par les magistrats de district pour promouvoir les conditions d'existence des travailleurs libérés; le nombre des comités de vigilance créés, leur composition et le travail qu'ils ont accompli. Elle rappelle à cet égard que les fonctions des comités de vigilance sont de conseiller l'administration de district sur les questions tendant à une application effective de la loi, d'aider à la réinsertion des travailleurs affranchis, d'exercer un contrôle sur l'application de la loi, de fournir aux travailleurs affranchis l'assistance nécessaire à la réalisation des objectifs de la loi.
La commission prie le gouvernement de fournir des informations complètes en réponse aux allégations de la Fédération des syndicats unis du Pakistan.
2. Enfants en servitude
Dans ses précédents commentaires, la commission a noté que les participants au Séminaire régional asien sur la servitude des enfants, qui s'est tenu au Pakistan du 23 au 26 novembre 1992, ont formulé et adopté un programme d'action contre la servitude des enfants. Selon les termes de ce programme, la lutte contre la servitude des enfants exige un engagement politique ferme, une politique nationale d'ensemble et un programme d'action prévoyant des réformes législatives, une application effective et un système d'enseignement obligatoire et gratuit, soutenus par une mobilisation de la collectivité et des campagnes d'information. La commission a prié le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises ou envisagées pour abolir la servitude des enfants et pour assurer l'application effective de la loi de 1992 sur l'abolition de la servitude pour dettes en ce qui concerne les enfants.
La commission note que le Programme national d'action concernant l'enfance et le développement pour les années 1990 (NPA) prévoit que "des efforts seront déployés pour faire reculer de manière appréciable le travail des enfants" ... qui constitue "sous ses différentes formes une menace pour la santé des enfants, diminue leurs chances d'accéder à l'instruction primaire et les prive d'un temps de loisirs d'une importance capitale pour leur croissance et leur épanouissement. Ce travail des enfants contribue également au chômage et aux bas salaires chez les adultes, phénomène qui perpétue lui-même la pauvreté et le travail des enfants ... On estime que les enfants qui travaillent sont de 8 à 10 millions. Ils sont généralement employés dans l'agriculture, dans la fabrication de briques, dans la confection de tapis, par les sous-traitants des grandes industries, par de petites entreprises non déclarées et souvent dangereuses, comme gens de maison, pour la collecte des ordures ménagères, dans le secteur informel et dans les milieux sordides de la clandestinité ... Il est impératif de mettre en oeuvre, de toute urgence, des programmes globaux permettant d'éviter aux enfants d'être mis trop tôt au travail." Le NPA "a pour objectif de faire disparaître la séquestration et le travail forcé".
La commission note également les informations contenues dans un rapport établi conjointement par le gouvernement et l'UNICEF (Analyse de la situation des enfants et des femmes au Pakistan) qui constate que, "en milieu urbain, une grande majorité d'enfants travaillent dans le secteur informel, dans des petites entreprises non déclarées. Un quart au moins des enfants qui travaillent dans les villes ont moins de 10 ans, plus de la moitié travaillent onze heures par jour ou plus, et neuf sur dix travaillent plus de huit heures."
Le rapport fait ressortir le travail des enfants comme employés de maison, dont beaucoup sont des fillettes, indiquant que "il y a lieu de croire que ces enfants sont très vulnérables à l'exploitation et aux sévices, y compris aux sévices sexuels". Le rapport ajoute que "il pourrait y avoir des milliers d'enfants séquestrés et contraints au travail forcé, essentiellement sur les chantiers de construction; des dizaines de milliers d'enfants travaillent avec leurs familles dans la fabrication de briques" ...
Des enfants doivent travailler, au-delà de leurs capacités physiques, dans des emplois mettant en danger leur santé, leur sécurité, leur développement physique et psychique, pendant de longues heures, ce qui compromet leur éducation et ne leur laisse ni loisirs ni repos, et bien souvent pour un salaire de misère sans commune mesure avec la quantité de travail fournie; des enfants travaillent dans des conditions d'exploitation n'ayant aucun rapport avec une relation libre de travail. Ils sont exploités parce qu'ils sont jeunes et sans défense; ils sont privés du droit à une enfance normale, privés d'éducation, privés d'un avenir.
Se référant à l'article 25 de la convention, la commission exprime le ferme espoir que le gouvernement veillera à ce que les sanctions prévues par la loi pour exaction de travail forcé ou obligatoire sont réellement efficaces et strictement appliquées, et qu'il fournira des informations détaillées sur les mesures prises pour garantir que la convention soit appliquée dans la pratique. A cet égard, elle le prie à nouveau de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour faire appliquer effectivement la loi de 1992 abolissant la servitude pour dettes en ce qui concerne les enfants.
3. Restrictions à la cessation de l'emploi
La commission formule des commentaires depuis un grand nombre d'années sur les dispositions de la loi de 1952 sur le maintien des services essentiels, en vertu desquelles toute personne au service du gouvernement central, quel que soit l'emploi qu'elle exerce, est passible d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à un an si elle met fin à son emploi sans le consentement de son employeur, nonobstant toute condition expresse ou tacite de son contrat prévoyant la démission avec un préavis. Ces dispositions peuvent être étendues à d'autres catégories d'emplois (art. 2, 3 1) b) et explication no 2, art. 7 1) et art. 3). La loi de 1958 du Pakistan occidental sur les services essentiels comporte des dispositions similaires.
Le gouvernement a précédemment indiqué son intention de modifier les dispositions de la loi de 1952 de manière qu'un travailleur puisse mettre fin à son emploi conformément aux conditions expresses ou tacites de son contrat.
La commission note que le gouvernement se réfère, dans son rapport, à l'article 2, paragraphe 2 a), de la convention et déclare que, le service militaire étant exclu du champ d'application de la convention, il n'est pas nécessaire de modifier les instruments susmentionnés.
La commission fait observer que les dispositions de la loi de 1952 sur le maintien des services essentiels et la loi de 1958 du Pakistan occidental ayant le même objet s'appliquent aux personnes occupant un emploi de quelque nature que ce soit au service du gouvernement central et ne sont pas limitées, quant à leurs effets, au "service militaire". En outre, en ce qui concerne le service militaire, il convient de rappeler que les dispositions de la convention concernant le service militaire obligatoire ne s'appliquent pas aux militaires de carrière. La commission a souligné, aux paragraphes 33 et 67 à 73 de son Etude d'ensemble de 1979 sur le travail forcé ou obligatoire, que le fait que le service militaire obligatoire ne soit pas couvert par la convention ne saurait être invoqué pour priver des militaires de carrière du droit de quitter le service de leur propre initiative dans des délais raisonnables soit à des intervalles déterminés, soit moyennant préavis.
La commission prend note des observations de la Fédération nationale des syndicats du Pakistan selon lesquelles les organisations de travailleurs du pays expriment avec fermeté et constance le désir que ces lois soient abrogées. La fédération fait observer que ces lois sont imposées en temps ordinaire de manière perpétuelle et pour des périodes indéfinies, au préjudice des travailleurs concernés. Elle indique que ces lois ne devraient s'appliquer qu'en situation d'urgence, par exemple en temps de guerre, en cas de troubles civils, en cas de péril en mer, de tremblement de terre, et pour une période de six mois pouvant éventuellement être prolongée en fonction de la gravité des événements.
La commission note également que, dans ses observations, la Fédération des syndicats du Pakistan appelle instamment le gouvernement à abroger ces lois, les travailleurs devant avoir la liberté de quitter leur emploi.
La commission prie le gouvernement de fournir des informations en réponse aux observations formulées par les organisations de travailleurs ainsi que sur les mesures prises pour rendre les dispositions de la loi de 1952 sur le maintien des services essentiels et de la loi de 1958 du Pakistan occidental ayant le même objet conformes à la convention. La commission exprime le ferme espoir que les mesures nécessaires à cette fin seront prises prochainement.
[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé pour la période se terminant le 30 juin 1994.]
La commission a demandé depuis 1981 au gouvernement de communiquer des informations sur les conditions de service des militaires de carrière, notamment en ce qui concerne les conditions d'engagement et de démission du service actif.
La commission avait noté la déclaration du gouvernement dans son rapport pour la période se terminant le 30 juin 1987, selon laquelle il considère que le service militaire, étant volontaire au Pakistan, ne tombe pas dans le champ d'application de la convention. Se référant aux explications données aux paragraphes 33 et 67 à 73 de son Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, de même qu'au point 2 de son observation au titre de cette convention, la commission a rappelé que, bien que dans certains cas l'emploi soit à l'origine le résultat d'un accord conclu librement, le travailleur ne saurait aliéner son droit au libre choix de son travail et qu'en conséquence il doit avoir la possibilité de quitter le service en temps de paix dans des délais raisonnables.
Dans son rapport pour la période se terminant en juin 1989, le gouvernement a ajouté que les militaires, outre le fait qu'ils sont volontaires, ne tombent pas sous la définition des travailleurs de l'industrie et ne sont par conséquent couverts par aucune loi du travail. La commission a observé que la protection de la convention ne se limite pas aux travailleurs de l'industrie mais couvre toutes les personnes.
Le gouvernement a déclaré dans son rapport pour la période se terminant en juin 1990 que les officiers et les autres personnels des forces armées reçoivent une formation approfondie et que le pays ne peut leur permettre de quitter le service à leur libre choix. Toutefois, pour une cause valable et justifiée, la démission ou la libération du service pourrait être accordée.
Dans son dernier rapport, le gouvernement se réfère aux dispositions de l'article 2, paragraphe 2, a), de la convention selon lequel le "travail forcé ou obligatoire" ne comprendra pas tout travail ou service exigé en vertu des lois sur le service militaire obligatoire et affecté à des travaux d'un caractère purement militaire". La commission se réfère à nouveau au paragraphe 33 de l'Etude d'ensemble de 1979 précitée, selon lequel le fait que le service militaire obligatoire soit exempté du champ d'application de la convention ne saurait être invoqué pour priver des militaires de carrière du droit de quitter le travail soit à des intervalles raisonnables, soit moyennant un préavis approprié.
La commission se réfère de nouveau aux paragraphes 55 à 62 et 67 à 73 de son Etude d'ensemble de 1979 sur l'aboliton du travail forcé, où la question du service obligatoire lié à la formation reçue est examinée, de même que les restrictions imposées à la liberté des travailleurs de quitter leur emploi, et prie une fois de plus le gouvernement de fournir des informations sur la durée du service des différentes catégories de militaires de carrière, en relation avec la nature et la durée de la formation, et sur la possibilité pour eux de quitter le service en temps de paix en remboursant les dépenses de formation. La commission espère que le gouvernement communiquera copie des dispositions pertinentes ainsi que, plus généralement, de toute disposition législative ou réglementaire régissant le service dans les forces armées, notamment en ce qui concerne les conditions d'engagement et de démission.
La commission note les informations fournies par le gouvernement dans son rapport. Elle note aussi les observations faites par la Fédération des syndicats du Pakistan sur l'application de la convention.
Servitude pour dettes
1. La commission note avec satisfaction que, le 11 mars 1992, a été promulguée la loi no III de 1992 abolissant le système de servitude pour dettes. En vertu de cette loi, ce système est aboli et tout travailleur asservi est déclaré libre et dégagé de toute obligation d'exécuter un travail asservi. Nul ne fera d'avances (peshgi) entraînant la servitude pour dettes ni n'obligera qui que soit à se livrer à un travail asservi ou à toute autre forme de travail forcé (art. 4). La loi rend nulle et non avenue toute coutume, tradition ou pratique d'un contrat, accord ou autre instrument, qu'il ait été conclu ou exécuté avant ou après l'entrée en vigueur de la loi, en vertu de laquelle une personne - ou un membre de sa famille - serait contrainte d'exécuter un travail ou de rendre un service en tant que travailleur asservi (art. 5). L'obligation d'un travailleur asservi de rembourser en totalité ou en partie une dette contractée dans ces conditions et qui n'aurait pas été remboursé immédiatement avant l'entrée en vigueur de la loi s'éteint. Aucun procès ou autre poursuite ne peut être engagé devant une juridiction civile, un tribunal ou toute autre autorité en vue du recouvrement d'une dette contractée par un travailleur asservi ou d'une partie de cette dette (art. 6). Les gouvernements provinciaux peuvent conférer aux magistrats locaux pouvoir et devoir d'assurer l'application de la loi. Ces magistrats doivent, autant que possible, s'engager à promouvoir le niveau de vie du travailleur libéré en assurant et protégeant ses intérêts économiques, de sorte qu'il ne puisse avoir ni occasion ni raison de contracter aucune autre dette (art. 9 et 10).
La loi prévoit que l'asservissement des travailleurs en vertu du système de servitude pour dettes est passible d'une peine d'emprisonnement de deux à cinq ans ou d'une amende de 50.000 roupies, ou des deux à la fois (art. 11 et 12).
La loi prévoit des mesures spéciales de mise en application, notamment la constitution de comités de vigilance au niveau local comprenant des élus du district et des représentants de l'administration, d'associations de juristes, de la presse, de services sociaux agréés et des ministères du Travail du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux. Ils ont pour fonctions de conseiller l'administration locale sur les questions relatives à la mise à exécution effective et appropriée de la loi, d'aider à la réinsertion des travailleurs asservis qui ont recouvré la liberté, de veiller à la bonne application de la loi dans la pratique et d'offrir aux intéressés toute l'assistance nécessaire pour qu'en soient atteints les objectifs (art. 15).
La commission note les commentaires de la Fédération des syndicats du Pakistan selon lesquels des mesures sont requises pour appliquer la loi dans sa lettre et son esprit afin d'éliminer l'exploitation du labeur, en établissant les comités de vigilance chargés de relever les exactions de travail forcé et de sanctionner quiconque viole les dispositions en vigueur. Davantage de ressources devraient être consacrées à l'éducation et à la formation des travailleurs et de leurs enfants victimes du travail forcé.
La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises ou envisagées pour appliquer la loi dans la pratique. Elle espère que le gouvernement communiquera en particulier des informations sur les points suivants: nombre de travailleurs asservis ayant recouvré la liberté depuis la promulgation de la loi; les poursuites engagées contre les personnes utilisant des travailleurs en servitude et les sanctions infligées; toutes mesures prises par des magistrats locaux pour promouvoir le niveau de vie des travailleurs asservis ayant recouvré la liberté, et le nombre de comités de vigilance créés, leur composition et les activités accomplies par leurs soins.
2. La commission relève que le BIT a organisé, en collaboration avec le Centre des Nations Unies pour les droits de l'homme et le gouvernement du Pakistan, un Séminaire régional asien sur la servitude des enfants, tenu à Islamabad du 23 au 26 novembre 1992. Venus du Bangladesh, de l'Inde, du Népal, du Pakistan, de Sri Lanka et de la Thaïlande, les participants étaient des magistrats, des juristes, des fonctionnairess des ministères du Travail, ainsi que des représentants d'organisations d'employeurs et de travailleurs et d'organisations non gouvernementales nationales et régionales engagées dans la lutte contre la servitude. Les participants ont élaboré et adopté un Programme d'action contre l'exploitation des enfants en situation servile.
Ce programme se réfère à l'asservissement de millions d'enfants en situation servile dans plusieurs pays de la région. Ces enfants sont souvent victimes de fléaux sociaux qui touchent des catégories ou groupes plus larges de la population, en particulier leurs parents. Ils travaillent dans toutes sortes de secteurs et d'activités, notamment dans l'agriculture, le tissage des tapis, les briqueteries, les carrières de pierres et la construction. Ils sont parfois contraints de travailler seuls, séparés de leur famille; ils travaillent soustraits aux regards comme domestiques; on les "recrute" pour les faire travailler dans les plantations; on les enlève à leur famille; on les enferme dans des ateliers-bagnes ou des maisons de prostitution; on les envoie dans d'autres pays comme prostitué(e)s ou comme jockeys pour la monte des dromadaires; on les mutile délibérément et on les oblige à se livrer à la mendicité ou à d'autres trafics organisés par des bandes de malfaiteurs. Ce sont, dans le monde du travail, les êtres les plus isolés, les plus vulnérables, ceux dont le sort est le plus tragique.
Le programme souligne que la lutte contre l'asservissement des enfants requiert un engagement politique ferme, une prise de position claire et sans ambiguïté contre l'asservissement reposant, au plan national, sur une politique d'ensemble et un programme d'action comprenant des réformes législatives, la stricte application de la loi et l'éducation gratuite et obligatoire et s'appuyant sur la mobilisation de la communauté et des campagnes d'information.
La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises ou envisagées pour l'abolition de la servitude des enfants et pour l'application effective de la loi de 1992 portant abolition de la servitude pour dettes en ce qui concerne les enfants asservis.
Restrictions à la cessation de l'emploi. 3. La commission s'est prononcée depuis un grand nombre d'années au sujet de la loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels, en vertu de laquelle toute personne au service du gouvernement central, quel que soit l'emploi qu'elle exerce, est passible d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à un an si elle met fin à son emploi sans le consentement de son employeur, nonobstant toute condition expresse ou tacite de son contrat prévoyant la démission avec préavis. Ces dispositions peuvent être étendues à d'autres catégories d'emploi (art. 2, 3(1)(b) et explication no 2, art. 7(1) et art. 3). Des dispositions semblables figurent dans la loi de 1958 du Pakistan occidental aux mêmes fins.
Le gouvernement avait précédemment indiqué son intention de modifier les dispositions de la loi de 1952 de manière qu'un travailleur puisse mettre fin à son emploi, conformément aux conditions expresses ou tacites de son contrat. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement renouvelle son intention de modifier les dispositions en cause. Notant aussi les commentaires de la Fédération des syndicats du Pakistan selon lesquels les assurances gouvernementales tendant à procéder aux modifications susmentionnées des lois de 1952 et de 1958 afin de les mettre en harmonie avec la convention doivent encore être mis à exécution, la commission exprime le ferme espoir que les mesures nécessaires en ce sens seront bientôt adoptées.
La commission a demandé depuis 1981 au gouvernement de communiquer des informations sur les conditions de service des militaires de carrière, notamment en ce qui concerne les conditions d'engagement et de démission du service actif. La commission avait noté la déclaration du gouvernement dans son rapport pour la période se terminant le 30 juin 1987 selon laquelle il considère que le service militaire, étant volontaire au Pakistan, ne tombe pas dans le champ d'application de la convention. Se référant aux explications données aux paragraphes 33 et 67 à 73 de son Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, de même qu'au point 2 de son observation sous la convention, la commission rappelle que, bien que dans certains cas l'emploi soit à l'origine le résultat d'un accord conclu librement, le travailleur ne saurait aliéner son droit au libre choix de son travail et qu'en conséquence il doit avoir la possibilité de quitter le service en temps de paix dans des délais raisonnables.
Dans son dernier rapport, le gouvernement réitère sa déclaration selon laquelle le service volontaire ne tombe pas dans le champ d'application de la convention et que ces travailleurs ne sont pas couverts par l'ordonnance sur les relations professionnelles. A cet égard, la commission ne peut que se référer aux commentaires qu'elle formule ci-dessus et portant sur le droit de tout travailleur de mettre fin à son emploi moyennant un préavis raisonnable ainsi que sur le champ d'application de la convention qui couvre toutes les personnes.
La commission note la déclaration du gouvernement dans son rapport selon laquelle les officiers et les autres personnels des forces armées reçoivent une formation approfondie et que le pays ne peut se permettre de quitter le service à leur libre choix. Toutefois, pour une cause valable et justifiée, la démission ou la libération du service pourrait être accordée.
La commission se réfère aux paragraphes 55 à 62 et 67 à 73 de son Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé où la question du service obligatoire lié à la formation reçue est examinée, de même que les restrictions imposées à la liberté des travailleurs de quitter leur emploi. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur la durée du service des différentes catégories de militaires de carrière ainsi que sur la nature et la durée des formations et sur la possibilité pour ces personnels d'un remboursement des dépenses de formation. La commission espère que le gouvernement communiquera une copie des dispositions pertinentes ainsi que de toute disposition législative ou réglementaire régissant le service dans les forces armées, notamment en ce qui concerne les conditions d'engagement et de démission du service.
La commission note les informations communiquées par le gouvernement dans son rapport et la discussion qui a eu lieu à la Commission de la Conférence en 1991. La commission prend note également des observations de la Fédération nationale des syndicats pakistanais sur l'application de la convention.
Servitude pour dettes. 1. Dans ses commentaires précédents, la commission s'était référée aux allégations selon lesquelles des entrepreneurs connus sous le nom de "Kharkars" avaient recours, pour la construction de digues et de canaux d'irrigation, à des travailleurs asservis et elle avait noté qu'un rapport du BIT mentionnait l'emploi d'enfants illégalement asservis dans des "camps Kharkars" où ils étaient obligés de creuser de nuit des tunnels d'irrigation dans des régions rurales éloignées.
La commission avait aussi noté que le rapport du Groupe de travail des Nations Unies sur les formes contemporaines d'esclavage de la Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités s'était reféré, au cours de sa quatorzième session, aux informations contenues dans le rapport du Séminaire de l'Asie du Sud sur la servitude des enfants (1989) selon lequelles une exploitation à grande échelle de travailleurs asservis se pratique dans la briqueterie, le tissage des tapis, le nettoyage et l'emballage du poisson, la fabrication de chaussures, la fabrication de bidis, la réparation de voitures, l'agriculture, les mines, les carrières et le concassage des pierres.
La commission avait noté dans un autre rapport soumis au groupe de travail par le président du Front de libération de la main-d'oeuvre asservie du Pakistan (également président de la Bhatta Mazdoor Mahaz (le Front des travailleurs de la briqueterie) que, d'après les estimations de son organisation, environ 20 millions de personnes, parmi lesquelles 7,5 millions d'enfants, tombent dans la catégorie des travailleurs asservis, dont 2 millions de familles travaillant dans les briqueteries comme de vrais esclaves; la plupart de ces personnes n'existent pas dans les registres du gouvernement, ni dans le recensement - elles n'ont donc pas le droit de vote -, ni dans les registres nationaux - elles ne possèdent donc pas de cartes d'identité.
La commission avait noté également qu'au cours des discussions du groupe de travail l'observateur du Pakistan, se référant à l'existence de la servitude pour dettes dans son pays, avait déclaré que le gouvernement était pleinement conscient de ces maux sociaux et était déterminé à les éliminer.
La commission avait pris note de trois décisions rendues par la Cour suprême du Pakistan dans le cas no 1 de 1988 (concernant l'application des droits constitutionnels fondamentaux aux travailleurs asservis dans les briqueteries): la décision datée du 18 septembre 1988 (qui n'était pas définitive) en vertu de laquelle pour la première fois les travailleurs des briqueteries étaient considérés comme des travailleurs asservis, la décision intérimaire du 23 novembre 1988 et la décision définitive du 22 mars 1989.
La commission avait exprimé l'espoir que, à la suite des décisions de la Cour suprême sur les travailleurs asservis dans les briqueteries, les mesures nécessaires seraient prises pour supprimer le travail forcé et la servitude pour dettes, aussi bien dans la pratique que dans la législation, tant dans les briqueteries que dans d'autres branches d'activité, et que le gouvernement fournirait des indications détaillées sur les mesures prises ou envisagées à cette fin.
La commission note que le rapport du gouvernement ne contient aucune information sur les mesures qui ont été prises pour supprimer le travail forcé et le travail asservi dans la pratique, conformément aux décisions de la Cour suprême.
2. La commission a pris note du rapport du Groupe de travail sur les formes contemporaines d'esclavage à sa seizième session, 1991, qui se réfère aux informations soumises par Anti-Esclavage International indiquant que, en dépit de l'interdiction du travail des enfants, 50.000 enfants entre 4 et 12 ans travaillent dans de petits ateliers de tissage de tapis subventionnés par l'Etat et environ 500.000 dans des ateliers privés; à Karachi et Hyderabad 50 pour cent de ces enfants mouraient de fatigue et de maladie. Il est dit aussi que le statut des travailleurs asservis s'est aggravé après l'arrivée des réfugiés afghans, adultes et enfants, dont le nombre serait supérieur à un demi-million, qui étaient prêts à travailler en tant que travailleurs asservis. Le rapport attire l'attention sur la pratique consistant à vendre et à acheter des travailleurs asservis dans l'agriculture, au Mardam et au Surabi, les victimes étant appelées "Gehna Makhelooq" (créatures hypothéquées).
La commission espère que le gouvernement fournira des informations en relation avec ces allégations et sur les mesures prises ou envisagées à cet égard.
3. Tout en relevant que le rapport du gouvernement ne contient aucune information sur l'application pratique de la convention pour ce qui est du travail forcé et du travail asservi, la commission note cependant avec intérêt les informations figurant dans le rapport du gouvernement pour la période se terminant en juin 1991 selon lesquelles un projet de loi prévoyant l'abolition du système de servitude pour dettes a été soumis au Parlement.
La commission note qu'en vertu de l'article 4 1) du projet de loi le système de servitude pour dettes sera déclaré aboli, que tout travailleur asservi sera déclaré libre et dégagé de toute obligation d'exécuter un travail asservi et que nul ne fera d'avances (peshgi) entraînant la servitude pour dettes ni n'obligera qui que ce soit à se livrer à un travail asservi ou à toute autre forme de travail forcé (art. 4).
Le projet de loi rend nulle et non avenue toute coutume, tradition ou pratique d'un contrat, accord ou autre instrument, qu'il ait été conclu ou exécuté avant ou après l'entrée en vigueur de la loi, en vertu de laquelle une personne, ou un membre de sa famille, est contrainte d'exécuter un travail ou de rendre un service en tant que travailleur asservi (art. 5). L'obligation d'un travailleur asservi de rembourser en totalité ou en partie une dette contractée dans ces conditions, et qui n'a pas été remboursée immédiatement avant l'entrée en vigueur de la loi, s'éteint. Aucun procès ou autre poursuite ne peut être engagé devant une juridiction civile, un tribunal ou toute autre autorité en vue du recouvrement d'une dette contractée par un travailleur asservi ou d'une partie de cette dette (art. 6).
Le projet de loi prévoit des mesures spéciales de mise en application, notamment la constitution de comités de vigilance au niveau du district comprenant des représentants élus de la région, des représentants de l'administration du district, d'associations de juristes, de la presse, de services sociaux officiels et des ministères du Travail des gouvernements fédéraux et provinciaux. Ils ont pour fonction de conseiller l'administration du district sur les questions relatives à la mise en application effective de la loi et d'aider à la réinsertion des travailleurs asservis qui ont recouvré la liberté, de surveiller la bonne application de la loi et d'offrir aux travailleurs asservis toute l'assistance nécessaire pour atteindre les objectifs de la loi (art. 15).
L'asservissement des travailleurs en vertu du système de servitude pour dettes est passible d'une peine d'emprisonnement allant de deux à cinq ans ou d'une amende de 50.000 roupies ou des deux à la fois (art. 11 et 12).
La commission a pris connaissance d'informations selon lesquelles le projet de loi a été adopté par l'Assemblée nationale en février 1992.
La commission espère que le gouvernement communiquera un exemplaire de la loi lorsque celle-ci aura reçu l'assentiment du président, ainsi que des informations détaillées sur les mesures prises ou envisagées pour appliquer la loi dans la pratique.
4. La commission a pris note avec intérêt de la loi no V de 1991 interdisant l'emploi des enfants dans certaines professions et réglementant les conditions de travail des enfants, à laquelle le représentant gouvernemental s'est référé dans sa déclaration à la Commission de la Conférence en 1991.
Restrictions à la cessation de l'emploi. 5. La loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels et la loi de 1958 du Pakistan occidental sur le maintien des services essentiels font l'objet de commentaires de la part de la commission et de discussions à la Commission de la Conférence depuis un grand nombre d'années. En vertu des articles 2, 3, paragraphe 1 b), ainsi que de l'explication 2 et de l'article 7, paragraphe 1, de la loi du Pakistan sur le maintien des services essentiels, toute personne travaillant pour le gouvernement central, quel que soit l'emploi qu'elle exerce, est passible d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à un an si elle met fin à son emploi sans le consentement de son employeur, nonobstant toute condition expresse ou tacite de son contrat prévoyant la démission avec préavis. Aux termes de l'article 3 de ladite loi, ces dispositions peuvent être étendues à d'autres catégories d'emploi. Des dispositions analogues figurent dans la loi du Pakistan occidental pour ce qui est des personnes travaillant pour le gouvernement du Pakistan occidental, pour une institution créée par lui, pour une autorité locale ou pour un service concernant les transports ou la défense civile.
La commission avait noté l'indication fournie par le gouvernement dans son rapport pour la période se terminant en juin 1989, et dans son rapport à la Commission de la Conférence en 1989 et en 1990, selon laquelle le gouvernement avait décidé de se conformer aux exigences de la convention en modifiant la loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels, de manière qu'un travailleur d'un établissement tombant dans le champ d'application de la loi puisse mettre fin à son emploi, conformément aux conditions expresses ou tacites de son contrat d'engagement, et que l'amendement proposé serait soumis à l'Assemblée nationale.
La commission prend note des indications fournies par le gouvernement à la Commission de la Conférence en 1991 et dans son rapport selon lesquelles la loi est en cours de modification dans le sens indiqué ci-dessus.
La commission espère fermement que les mesures nécessaires seront bientôt adoptées pour mettre la loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels et la loi de 1958 du Pakistan occidental sur le maintien des services essentiels, en conformité avec la convention, et que le gouvernement indiquera les mesures prises.
[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 79e session et de communiquer un rapport détaillé pour la période se terminant le 30 juin 1992.]
La commission exprime à nouveau l'espoir que le gouvernement fournira dans son prochain rapport des informations détaillées sur le service dans les forces armées, en y joignant copie des lois et règlements régissant les conditions de service, notamment en ce qui concerne les conditions d'engagement et de démission du service.
La commission note qu'aucun rapport n'a été reçu du gouvernement. Elle a toutefois pris note des discussions qui ont eu lieu à la Commission de la Conférence en 1990 sur l'application de la convention par le Pakistan.
Servitude pour dettes. 1. Dans ses commentaires précédents, la commission s'était référée aux allégations selon lesquelles des entrepreneurs connus sous le nom de Kharkars avaient recours, pour la construction de digues et de canaux d'irrigation, à des travailleurs asservis et avait noté dans le rapport présenté au gouvernement du Pakistan par une mission d'évaluation sectorielle du BIT (juillet-août 1986) une référence à l'emploi d'enfants illégalement asservis dans des camps Kharkar obligés de creuser de nuit des tunnels d'irrigation dans des régions rurales éloignées. Rappelant la déclaration du gouvernement à la Commission de la Conférence en 1987, selon laquelle le programme en cinq points présenté par le Premier ministre s'engageait à l'élimination totale de tout type d'exploitation de la main-d'oeuvre, tel le travail forcé, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures concrètes prises ou envisagées à cet égard.
La commission a noté que, dans sa déclaration à la Commission de la Conférence en 1989, le représentant du gouvernement a nié l'existence de tout camp Kharkar ainsi que l'existence de toute main-d'oeuvre asservie dans le pays. De même, dans son rapport sur l'application de la convention reçu en mars 1990, le gouvernement déclarait qu'il n'avait connaissance d'aucun camp Kharkar et qu'aucun travail des enfants n'est permis; en vue de dissiper les appréhensions à cet égard, le gouvernement indiquait qu'il se proposait d'introduire une loi devant le Parlement en vertu de laquelle toute forme d'exploitation des travailleurs, y compris la servitude pour dettes, constituera une infraction punissable conformément à la loi, et que le projet de loi sur l'abolition de la servitude pour dettes était en préparation.
La commission note les informations communiquées par le gouvernement à la Commission de la Conférence en 1990, selon lesquelles il a décidé d'abolir la servitude pour dettes au moyen d'une loi qui garantira une totale liberté aux travailleurs asservis. Le projet de loi a été approuvé par le Cabinet et devrait bientôt être promulgué. En vertu de cette loi, les travailleurs asservis seraient libérés de tout travail obligatoire; la loi disposerait que seraient nuls et non avenus tous les contrats, coutumes, traditions, pratiques ou ententes créant des obligations pour les travailleurs asservis ou leurs familles, qu'ils aient été conclus ou en vigueur avant ou après l'entrée en vigueur de la loi. Par ailleurs, toute obligation faite aux travailleurs asservis de rembourser une dette ou une partie de celle-ci serait réputée éteinte et non exécutoire. Les infractions à la loi seraient punies par des amendes substantielles et des sanctions pénales. Les travailleurs asservis travaillant après l'entrée en vigueur de la loi seraient payés au taux prescrit et des comités locaux de surveillance contrôleraient l'application de la loi.
La commission note ces indications avec intérêt. Elle espère que le gouvernement communiquera des informations sur les mesures prises à cet égard.
2. La commission rappelle qu'elle avait précédemment pris note des discussions au sein du Groupe de travail des Nations Unies sur les formes contemporaines d'esclavage de la Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, au cours de sa quatorzième session qui s'est déroulée en août 1989.
La commission avait noté que le rapport du Groupe de travail (document E/CN.4/Sub.2/1989/39 du 28 août 1989) se référait aux informations fournies par Anti-Esclavage International concernant le travail des enfants lié à la servitude pour dettes dans les pays de l'Asie du Sud; ces informations sont présentées dans le rapport du Séminaire de l'Asie du Sud sur la servitude des enfants qui s'est tenu en juin-juillet 1989 et auquel ont participé des représentants d'organisations non gouvernementales de cinq pays. Pour ce qui est du Pakistan, le rapport indique qu'une exploitation à grande échelle de travailleurs asservis se pratique dans la briqueterie, le tissage des tapis, le nettoyage et l'emballage du poisson, la fabrication de chaussures, la fabrication de bidis, la réparation de voitures, l'agriculture, les mines, les carrières et le concassage des pierres.
Dans un autre rapport sur la pratique de la servitude pour dettes au Pakistan soumis au groupe de travail, un représentant de Anti-Esclavage International a mentionné des travailleurs des briqueteries qui ont été identifiés comme étant des travailleurs asservis dans une décision rendue par la Cour suprême du Pakistan le 18 septembre 1988. Ce représentant, président de la Bhatta Mazdoor Mahaz (le Front des travailleurs de la briqueterie) et du Front de libération de la main-d'oeuvre asservie du Pakistan créé après l'adoption de la décision de la Cour suprême, a estimé qu'environ 20 millions de personnes, parmi lesquelles 7,5 millions d'enfants, tombent dans la catégorie des travailleurs asservis, dont 2 millions de familles travaillant dans les briqueteries comme de vrais esclaves; la majorité de ces personnes n'existent pas dans les registres du gouvernement, ni dans le recensement - elles n'ont donc pas le droit de vote -, ni dans les registres nationaux - elles ne possèdent donc pas de cartes d'identité. Il a indiqué qu'un enfant né dans une famille de Bhatta Mazdoor (travailleurs des briqueteries) est contraint de commencer à travailler avant d'apprendre à jouer. Son maigre travail peut aider sa famille à rembourser le Peshgi (montant de l'avance ayant entraîné la servitude) que son père et ses aïeux sont censés avoir reçu du propriétaire de la Bhatta pour assurer leur survie. Même les femmes enceintes ou relevant de couches sont contraintes de travailler pour s'acquitter du Peshgi. Mais le système est si ingénieux qu'en dépit de toute sa bonne volonté le travailleur est incapable de s'acquitter du Peshgi dont le montant ne fait que s'accroître. Pour récupérer le Peshgi, le propriétaire de la Bhatta impose le travail forcé à toute la famille, leur versant seulement une somme insignifiante en tant qu'indemnité de subsistance, qui maintient en vie le travailleur et sa famille à un niveau moins qu'humain. Si un travailleur réclame tout son salaire ou désire quitter son travail, le propriétaire le bat cruellement et le torture, pratiques qui peuvent s'étendre à sa femme et à ses enfants. Il n'est pas rare que des femmes soient enlevées ou que le travailleur soit enfermé ou qu'on l'implique dans de fausses affaires criminelles.
Après la décision de la Cour suprême du 18 septembre 1988 ayant identifié les Bhatta Mazdoors comme travailleurs asservis, des milliers de familles ont quitté la Bhatta pour des régions de leur choix à la recherche d'un meilleur emploi. La liberté offerte aux travailleurs des briqueteries par la décision de la Cour suprême a donné une lueur d'espoir à d'autres travailleurs asservis occupés dans la fabrication de tapis, les pêcheries, le concassage de pierres, la fabrication de chaussures, le tissage mécanique, le ramassage du papier et l'agriculture, etc.; ils ont rejoint les rangs du Front des travailleurs des briqueteries et ont constitué le Front de libération de la main-d'oeuvre asservie du Pakistan (BLLFP). Le BLLFP a installé des antennes à travers le pays et fait des efforts soutenus, malgré ses faibles ressources, pour résoudre les problèmes de la servitude pour dettes et pour réhabiliter les travailleurs. Trois mille travailleurs occupés dans l'agriculture, 1.000 dans le concassage des pierres, 500 dans la fabrication de tapis et 500 tisserands sur métiers mécaniques, pêcheurs et ramasseurs de papier ont été libérés.
Le BLLFP avait déjà demandé au gouvernement d'adopter une législation abolissant le système de la servitude pour dettes et de prendre des mesures immédiates pour la réhabilitation des travailleurs asservis.
La commission a noté également qu'au cours des discussions du Groupe de travail des Nations Unies sur les formes contemporaines d'esclavage l'observateur du Pakistan, se référant à l'existence de la servitude pour dettes dans son pays, a déclaré que le gouvernement était pleinement conscient de ces maux sociaux et est déterminé à les éliminer. Il a souligné le ferme engagement du gouvernement d'éliminer la servitude pour dettes sous toutes ses formes et a déclaré que le travail forcé ou Kharkari ne serait pas autorisé. Il a relevé que le Pakistan est tenu de se conformer aux normes internationales du travail et a souligné qu'en vertu de l'article 11 de la Constitution l'esclavage et toutes les formes de travail forcé et de traite des êtres humains sont interdits, de même que le travail des enfants âgés de moins de 14 ans dans les fabriques, les mines ou autres travaux dangereux; le recours illégal au travail des enfants est réprimé par des peines sévères, aux termes de la loi de 1933 relative à l'interdiction du louage des services des enfants et de la loi no 26 de 1988 sur l'emploi des enfants. En cas de violation de la Constitution et de la législation du pays, les victimes ont accès aux tribunaux, comme l'atteste le jugement de la Cour suprême du Pakistan du 18 septembre 1988 sur les travailleurs asservis dans les briqueteries.
La commission avait pris note également de trois décisions rendues par la Cour suprême du Pakistan dans le cas no 1 de 1988 (concernant l'application des droits constitutionnels fondamentaux: travailleurs asservis dans les briqueteries): la décision datée du 18 septembre 1988 qui n'était pas définitive, la décision du 23 novembre 1988 et la décision définitive du 22 mars 1989. Celles-ci disposent notamment ce qui suit:
i) Peshgi. Le système peshgi (avance entraînant la servitude pour dettes) doit être interrompu sans délai, à l'exception des avances accordées par le propriétaire aux travailleurs contre reçu en bonne et due forme jusqu'à concurrence du salaire estimé d'une semaine. Les peshgis antérieurs non remboursés accordés aux travailleurs par les propriétaires des briqueteries ne seront pas pour le moment considérés comme nuls et irrécouvrables. Les travailleurs sont tenus légalement de rembourser la totalité de ces peshgis, et les propriétaires sont autorisés à les recouvrer par des moyens légaux et non par des méthodes coercitives ou le recours à la police. Un maximum de 5.000 Rs par ménage accordés dans le passé aux travailleurs par les propriétaires sous forme de prêts en bonne forme ou de subventions pour mariages, fêtes religieuses, traitement médical ou cérémonies funèbres ne seront pas recouvrables et devront être considérés comme des donations; ces concessions seront accordées seulement aux travailleurs qui retourneront et reprendront volontairement leur travail. En vertu de la décision du 18 septembre 1988, la question de savoir si le recouvrement des peshgis antérieurs devrait être annulé entièrement et si une législation devrait être adoptée, semblable à celle adoptée en Inde, a été reportée de six mois pour le moment. Cet aspect doit être reconsidéré à la lumière du fonctionnement des mesures susmentionnées.
ii) Retour au travail. Un avis/instruction doit être donné à tous les travailleurs de retourner au travail et de se présenter aux propriétaires de leur Bhatta respective qui leur donneront l'assurance par écrit qu'ils n'utiliseront aucune méthode coercitive ou n'auront pas recours aux forces de police pour les ramener ou les retenir. Cependant, dans le cas où un travailleur ne veut pas retourner, ou, étant retourné, veut quitter son travail dans la Bhatta d'un propriétaire, ou trouver un travail ailleurs dans la Bhatta d'un autre propriétaire, il ne sera pas retenu par la force, à condition que, sur demande faite au juge du district concerné ou au juge civil, il ait obtenu un certificat à cet effet.
iii) Paiement des salaires et exclusion des intermédiaires. Les salaires devront être payés aux travailleurs sur une base journalière, hebdomadaire, par quinzaine, mensuelle comme convenu; aucune déduction ne sera faite pour dommages ou pertes aux briques causés par la pluie; le système existant Jamadar-Jamadarni doit cesser immédiatement, aucun paiement ne leur sera fait au nom des travailleurs ou ne sera recouvrable ou ajustable. Selon la décision du 18 septembre 1988, le paiement des salaires doit s'effectuer en espèces et un reçu en double exemplaire doit être établi - un à l'intention de chaque partie.
iv) Usage de la force contre les membres de la famille du travailleur. Les propriétaires ne devront pas directement ou indirectement demander à un travailleur ou faire pression sur lui en vue d'employer les femmes ou les enfants. Cependant, si les travailleurs le font à leurs propres risques, aucune plainte ne sera présentée contre les propriétaires de la Bhatta à ce sujet. Le chef de ménage qui emploie l'une des femmes contre sa volonté ou les enfants pourra, dans des cas appropriés, faire l'objet de poursuites.
v) Communication. Selon la décision du 18 septembre 1988, chaque cas enregistré quelque part au Punjab par la police, qui a trait de manière directe ou indirecte à la pratique de la servitude pour dettes dans les briqueteries, doit être communiqué au procureur général avec un rapport de police dans les vingt-quatre heures. Le procureur général soumettra dans les vingt-quatre heures une photocopie du rapport de police et tout autre document éventuel, avec ses propres commentaires, à la Cour suprême.
La commission a exprimé l'espoir que, à la suite des décisions de la Cour suprême sur les travailleurs asservis dans les briqueteries, les mesures nécessaires seraient prises pour supprimer le travail forcé et la servitude pour dettes, aussi bien dans la pratique que dans la législation, tant dans les briqueteries que dans d'autres branches d'activité, et que le gouvernement fournirait des indications détaillées sur les mesures prises ou envisagées à cette fin. En particulier, la commission avait demandé des informations sur les questions suivantes:
a) les mesures prises pour l'adoption d'une législation pour abroger le recouvrement des peshgis antérieurs et, de manière plus générale, pour abolir le système de la servitude pour dettes et pour prévoir des dispositions relatives à la réadaptation des travailleurs asservis aussi bien dans les briqueteries qu'ailleurs;
b) l'application des décisions de la Cour suprême sur la servitude pour dettes dans les briqueteries, y compris les informations détaillées suivantes:
i) l'application dans la pratique de l'exigence selon laquelle les travailleurs désirant quitter les propriétaires de leur Bhatta respective doivent présenter une demande au juge du district ou au juge civil en vue d'obtenir un certificat à cette fin, et les incidences sur la liberté des travailleurs concernés;
ii) la situation en droit et en pratique concernant l'exigence, figurant dans la décision du 18 septembre 1988 mais omise plus tard, que les salaires seront payés en espèces et les reçus délivrés en deux exemplaires;
iii) la situation en droit et en pratique concernant les cas appropriés dans lesquels des personnes employant des femmes contre leur volonté et/ou des enfants ont fait l'objet de poursuites;
iv) les mesures d'application, y compris des copies de documents soumis au procureur général et à la Cour suprême dans le cadre de l'exigence de communication prévue dans la décision du 18 septembre 1988 mais omise plus tard;
c) des informations détaillées sur les mesures prises par la police, le procureur général, les tribunaux et l'inspection du travail pour appliquer l'interdiction du travail forcé aussi bien dans les briqueteries qu'ailleurs, en y joignant des copies des derniers rapports de la Commission des droits de l'homme ayant trait à la servitude pour dettes.
La commission espère que le gouvernement communiquera les informations en question.
Restrictions à la cessation de l'emploi. 3. La loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels et la loi de 1958 du Pakistan occidental sur le maintien des services essentiels ont fait l'objet de commentaires de la part de la commission et de discussions à la Commission de la Conférence depuis un grand nombre d'années. En vertu des articles 2, 3, paragraphe 1 b), ainsi que de l'explication 2 et de l'article 7, paragraphe 1, de la loi du Pakistan sur le maintien des services essentiels, toute personne occupée par le gouvernement central (dans quelque emploi que ce soit) est passible d'une peine d'emprisonnement jusqu'à un an si elle met fin à son emploi sans le consentement de l'employeur, nonobstant toute condition expresse ou tacite de son contrat prévoyant la démission avec préavis. Aux termes de l'article 3 de ladite loi, ces dispositions peuvent être étendues à d'autres catégories d'emploi. Des dispositions analogues figurent dans la loi du Pakistan occidental pour ce qui est des personnes au service du gouvernement du Pakistan occidental, de toute institution créée par lui, d'une autorité locale ou d'un service concernant les transports ou la défense civile.
La commission avait noté l'indication du gouvernement à la Commission de la Conférence en 1989 selon laquelle le gouvernement avait décidé de se conformer aux exigences de la convention en modifiant la loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels, de manière qu'un travailleur d'un établissement tombant dans le champ d'application de la loi puisse mettre fin à son emploi, conformément aux conditions expresses ou tacites de son contrat d'emploi, et que l'amendement proposé serait soumis à l'Assemblée nationale. La commission a noté les indications du gouvernement dans son rapport pour la période se terminant en juin 1989 ainsi qu'à la Commission de la Conférence en juin 1990 selon lesquelles la loi sera modifiée en ce sens.
La commission espère fermement que les mesures nécessaires seront bientôt adoptées pour mettre la loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels de même que la loi de 1958 du Pakistan occidental sur le maintien des services essentiels en conformité avec la convention, et que le gouvernement indiquera les mesures adoptées à cet égard.
La commission a demandé depuis 1981 au gouvernement de communiquer des informations sur les conditions de service des militaires de carrière, notamment en ce qui concerne les conditions d'engagement et de démission du service actif. La commission avait noté la déclaration du gouvernement dans son rapport pour la période se terminant le 30 juin 1987 selon laquelle il considère que le service militaire, étant volontaire au Pakistan, ne tombe pas dans le champ d'application de la convention. Se référant aux explications données aux paragraphes 33 et 67 à 73 de son Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, de même qu'au point 1 de son observation sous la convention, la commission rappelle que, bien que dans certains cas l'emploi soit à l'origine le résultat d'un accord conclu librement, le travailleur ne saurait aliéner son droit au libre choix de son travail et qu'en conséquence il doit avoir la possibilité de quitter le service en temps de paix dans des délais raisonnables.
Dans son dernier rapport, le gouvernement ajoute que les militaires, outre le fait qu'ils sont volontaires, ne tombent pas sous la définition des travailleurs de l'industrie et ne sont par conséquent couverts par aucune loi du travail. La commission observe que la protection de la convention ne se limite pas aux travailleurs de l'industrie mais couvre toutes les personnes.
La commission exprime l'espoir que le gouvernement fournira dans son prochain rapport des informations détaillées sur le service dans les forces armées, en y joignant copie des lois et règlements régissant les conditions de service, notamment en ce qui concerne les conditions d'engagement et de démission du service.
La commission note les informations communiquées par le gouvernement dans son rapport. Elle a également noté les discussions qui ont en lieu à la Commission de la Conférence en 1989.
1. Servitude pour dettes. Dans ses commentaires précédents, la commission s'est référée aux allégations selon lesquelles des entrepreneurs connus sous le nom de "Kharkars" avaient recours pour la construction de digues et de canaux d'irrigation à des travailleurs asservis et avait noté dans le rapport présenté au gouvernement du Pakistan par une mission d'évaluation sectorielle du BIT (juillet-août 1986) une référence à l'emploi d'enfants illégalement asservis dans des camps "Kharkar" obligés de creuser de nuit des tunnels d'irrigation dans des régions rurales éloignées. Rappelant la déclaration du gouvernement à la Commission de la Conférence en 1987 selon laquelle le programme en cinq points présenté par le Premier ministre s'engageait à l'élimination totale de tout type d'exploitation de la main-d'oeuvre, telle que le travail forcé, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures concrètes prises ou envisagées à cet égard.
La commission note que dans sa déclaration à la Commission de la Conférence en 1989 le représentant du gouvernement a nié l'existence de tout camp "Kharkar" ainsi que l'existence de toute main-d'oeuvre asservie dans le pays. De même, dans son rapport sur l'application de la convention, le gouvernement déclare qu'il n'a connaissance d'aucun camp "Kharkar" et qu'aucun travail des enfants n'est permis; en vue de dissiper les appréhensions à cet égard, le gouvernement se propose d'introduire une loi devant le Parlement en vertu de laquelle toute forme d'exploitation des travailleurs, y compris la servitude pour dettes, constituera une infraction punissable conformément à la loi. Le projet de loi sur l'abolition de la servitude pour dettes est en préparation.
La commission note avec intérêt ces indications. Elle a également pris note des discussions au sein du Groupe de travail des Nations Unies sur les formes contemporaines d'esclavage de la Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, au cours de sa quatorzième session qui s'est déroulée en août 1989.
La commission note que le rapport du Groupe de travail (document E/CN.4/Sub.2/1989/39 du 28 août 1989) se réfère aux informations fournies par la Société antiesclavagiste pour la protection des droits de l'homme concernant le travail des enfants lié à la servitude pour dettes dans les pays de l'Asie du Sud; ces informations sont présentées dans le rapport du Séminaire de l'Asie du Sud sur la servitude des enfants qui s'est tenu en juin-juillet 1989 et auquel ont participé des représentants d'organisations non gouvernementales de cinq pays; pour ce qui est du Pakistan, le rapport indique qu'une exploitation à grande échelle de travailleurs asservis se pratique dans la briqueterie, le tissage des tapis, le nettoyage et l'emballage du poisson, la fabrication de chaussures, la fabrication de cigarettes, la réparation de voitures, l'agriculture, les mines, les carrières et le concassage des pierres.
Dans un autre rapport sur la pratique de la servitude pour dettes au Pakistan soumis au groupe de travail, un représentant de la Société antiesclavagiste a mentionné des travailleurs des briqueteries qui ont été identifiés comme étant des travailleurs asservis dans une décision faisant date, rendue par la Cour suprême du Pakistan le 18 septembre 1988. Ce représentant, président de la Bhatta Mazdoor Mahaz (le Front des travailleurs de la briqueterie) et du Front de libération de la main-d'oeuvre asservie du Pakistan créé après l'adoption de la décision de la Cour suprême, a estimé qu'environ 20 millions de personnes, parmi lesquelles 7,5 millions d'enfants, tombent dans la catégorie des "travailleurs asservis", dont 2 millions de familles travaillant dans les briqueteries comme de vrais esclaves; la majorité de ces personnes n'existent pas dans les registres du gouvernement, ni dans le recensement - elles n'ont donc pas le droit de vote -, ni dans les registres nationaux - elles ne possèdent donc pas de cartes d'identité.
Il a indiqué qu'un enfant né dans une famille de "Bhatta Mazdoor" (travailleurs des briqueteries) est contraint de commencer à travailler avant d'apprendre à jouer. Son maigre travail peut aider sa famille à rembourser le "Peshgi" (montant de l'avance ayant entraîné la servitude) que son père et ses aïeux sont censés avoir reçu du propriétaire de la Bhatta pour assurer leur survie. Même les femmes enceintes ou relevant de couches sont contraintes de travailler pour s'acquitter du "Peshgi". Mais le système est si ingénieux qu'en dépit de toute sa bonne volonté le travailleur est incapable de s'acquitter du "Peshgi" dont le montant ne fait que s'accroître. Pour récupérer le Peshgi, le propriétaire de la Bhatta impose le travail forcé à toute la famille, leur versant seulement une somme insignifiante en tant qu'indemnité de subsistance, qui maintient en vie le travailleur et sa famille à un niveau moins qu'humain. Si un travailleur réclame tout son salaire ou désire quitter son travail, le propriétaire le bat cruellement et le torture, pratiques qui peuvent s'étendre à sa femme et à ses enfants. Il n'est pas rare que des femmes soient enlevées ou que le travailleur soit enfermé ou qu'on l'implique dans de fausses affaires criminelles.
Après la décision de la Cour suprême du 18 septembre 1988 ayant identifié les "Bhatta Mazdoors" comme travailleurs asservis, des milliers de familles ont quitté la Bhatta pour des régions de leur choix à la recherche d'un meilleur emploi. La liberté offerte aux travailleurs des briqueteries par la décision de la Cour suprême a donné une lueur d'espoir à d'autres travailleurs asservis occupés dans la fabrication des tapis, les pêcheries, au concassage des pierres, dans la fabrication des chaussures, aux métiers à tisser mécaniques, au ramassage du papier et dans l'agriculture, etc. qui ont rejoint les rangs du Front des travailleurs des briqueteries et ont constitué le "Front de libération de la main-d'oeuvre asservie du Pakistan" (BLLFP). Le BLLFP a installé des antennes à travers le pays et fait des efforts soutenus, malgré ses faibles ressources, pour résoudre les problèmes de la servitude pour dettes et pour réhabiliter les travailleurs. Jusqu'à présent, 3.000 travailleurs occupés dans l'agriculture, 1.000 dans le concassage des pierres, 500 dans la fabrication des tapis et 500 aux métiers à tisser mécaniques, dans les pêcheries et dans le ramassage du papier ont été libérés.
La commission a pris bonne note de ces indications. Elle note également avec intérêt qu'au cours des discussions du Groupe de travail des Nations Unies sur les formes contemporaines d'esclavage l'observateur du Pakistan, se référant à l'existence de la servitude pour dettes dans son pays, a déclaré que le gouvernement est pleinement conscient de ces maux sociaux et est déterminé à les éliminer. Il a souligné le ferme engagement du nouveau gouvernement d'éliminer la servitude pour dettes sous toutes ses formes et a déclaré que le travail forcé ou "Kharkari" ne serait pas autorisé. Il a relevé que le Pakistan est tenu de se conformer aux normes internationales du travail et a souligné qu'en vertu de l'article 11 de la Constitution l'esclavage et toutes les formes de travail forcé et de traite des êtres humains sont interdits de même que le travail des enfants âgés de moins de 14 ans dans les usines, les mines ou d'autres travaux dangereux; le recours illégal au travail des enfants est réprimé par des peines sévères aux termes de la loi de 1933 relative à l'interdiction du louage des services des enfants et de la loi no 26 de 1988 sur l'emploi des enfants. En cas de violation de la Constitution et de la législation du pays, les victimes ont accès aux tribunaux, comme l'atteste le jugement de la Cour suprême du Pakistan du 18 septembre 1988 sur les travailleurs asservis dans les briqueteries.
La commission a pris note de trois décisions rendues par la Cour suprême du Pakistan dans le cas no 1 de 1988 (concernant l'application des droits constitutionnels fondamentaux: travailleurs asservis dans les briqueteries): la décision datée du 18 septembre 1988 qui n'était pas définitive, la décision du 23 novembre 1988 et la décision définitive du 22 mars 1989. Celles-ci disposent notamment ce qui suit:
i) Peshgi. Le système peshgi (avance entraînant la servitude pour dettes) doit être interrompu sans délai, à l'exception des avances accordées par le propriétaire aux travailleurs contre reçu en bonne et due forme jusqu'à concurrence du salaire estimé d'une semaine. Les peshgis antérieurs non remboursés accordés aux travailleurs par les propriétaires des briqueteries ne seront pas pour le moment considérés comme nuls et irrécouvrables. Les travailleurs sont tenus légalement de rembourser la totalité de ces peshgis, et les propriétaires sont autorisés à les recouvrer par des moyens légaux et non par des méthodes coercitives ou le recours à la police. Un maximum de 5.000 Rs par ménage accordés aux travailleurs par les propriétaires dans le passé sous forme de prêts en bonne forme ou de subventions pour mariages, festivals religieux, traitement médical ou cérémonies funèbres ne seront pas recouvrables et devront être considérés comme donations; ces concessions seront seulement accordées à ceux des travailleurs qui retourneront et reprendront volontairement leur travail. En vertu de la décision du 18 septembre 1988, la question de savoir si le recouvrement des peshgis antérieurs devrait être annulé entièrement et si une législation devrait être adoptée, semblable à celle adoptée en Inde, a été reportée de six mois pour le moment. Cet aspect doit être reconsidéré à la lumière du fonctionnement des mesures susmentionnées.
ii) Retour au travail. Un avis/instruction doit être donné à tous les travailleurs de retourner au travail et de se présenter aux propriétaires de leur Bhatta respective qui leur donneront l'assurance par écrit qu'ils n'utiliseront aucune méthode coercitive ou n'auront pas recours aux forces de police pour les ramener ou les retenir. Cependant, dans le cas où un travailleur ne veut pas retourner, ou, étant retourné, veut quitter son travail dans la Bhatta d'un propriétaire, ou trouver un travail ailleurs dans la Bhatta d'un autre propriétaire, il ne sera pas retenu par la force, à condition que, sur demande faite au juge du district concerné/juge civil, il ait obtenu un certificat à cet effet.
iii) Le paiement des salaires et l'exclusion des intermédiaires. Les salaires devront être payés aux travailleurs sur une base journalière/hebdomadaire/par quinzaine/mensuelle comme convenu; aucune déduction ne sera faite pour dommages/pertes aux briques causés par la pluie; le système existant Jamadar/Jamadarni doit cesser immédiatement, aucun paiement ne leur sera fait au nom des travailleurs ou recouvrable/ajustable. Selon la décision du 18 septembre 1988, le paiement des salaires doit s'effectuer en espèces et un reçu en double exemplaire doit être établi - un à l'intention de chaque partie.
iv) L'usage de la force contre les membres de la famille du travailleur. Les propriétaires ne devront pas directement ou indirectement demander à un travailleur ou faire pression sur lui en vue d'employer les femmes ou les enfants. Cependant, si les travailleurs le font à leurs propres risques, aucune plainte ne sera présentée contre les propriétaires de la Bhatta à ce sujet. "Le chef de ménage qui emploie l'une de ses femmes contre sa volonté et/ou les enfants pourra, dans des cas appropriés, faire l'objet de poursuites."
v) Communication. Selon la décision du 18 septembre 1988, chaque cas enregistré quelque part au Punjab par la police, qui a trait de manière directe ou indirecte à la pratique de la servitude pour dettes dans les briqueteries, doit être communiqué à l'avocat général avec un rapport de police dans les vingt-quatre heures. L'avocat général soumettra dans les vingt-quatre heures une photocopie du rapport de police et tout autre document éventuel, avec ses propres commentaires, à la Cour suprême.
La commission espère que, à la suite des décisions de la Cour suprême sur les travailleurs asservis dans les briqueteries, les mesures nécessaires seront prises pour supprimer le travail forcé et la servitude pour dettes, aussi bien dans la pratique que dans la législation, tant dans les briqueteries que dans d'autres branches d'activité, et que le gouvernement fournira des indications détaillées sur les mesures prises ou envisagées à cette fin. En particulier, la commission espère recevoir des informations sur les questions suivantes:
a) les mesures prises pour l'adoption d'une législation pour abroger le recouvrement des peshgis antérieurs et, de manière plus générale, pour éradiquer le système de la servitude pour dettes et pour prévoir des dispositions relatives à la réadaptation des travailleurs asservis aussi bien dans les briqueteries qu'ailleurs;
i) l'application dans la pratique de l'exigence selon laquelle les travailleurs désirant quitter les propriétaires de leur Bhatta respective doivent présenter une demande au juge du district/juge civil en vue d'obtenir un certificat à cette fin, et les incidences sur la liberté des travailleurs concernés;
iii) la situation en droit et en pratique concernant les "cas appropriés" dans lesquels des personnes employant des femmes contre leur volonté et/ou des enfants ont fait l'objet de poursuites;
iv) les mesures d'application, y compris des copies de documents soumis à l'avocat général et à la Cour suprême dans le cadre de l'exigence de communication prévue dans la décision du 18 septembre 1988 mais omise plus tard;
c) de même des informations détaillées sur les mesures prises par la police, l'avocat général, les tribunaux et l'inspection du travail pour appliquer l'interdiction du travail forcé aussi bien dans les briqueteries qu'ailleurs, en y joignant des copies des derniers rapports de la Commission des droits de l'homme ayant trait à la servitude pour dettes.
2. Restrictions à la cessation de l'emploi. La loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels et la loi de 1958 du Pakistan occidental sur le maintien des services essentiels ont fait l'objet de commentaires de la part de la commission et de discussions à la Commission de la Conférence depuis un grand nombre d'années. En vertu des articles 2, 3, paragraphe 1 b), ainsi que de l'explication 2 et de l'article 7, paragraphe 1, de la loi du Pakistan sur le maintien des services essentiels, toute personne occupée par le gouvernement central (dans quelque emploi que ce soit) est passible d'une peine d'emprisonnement jusqu'à un an si elle met fin à son emploi sans le consentement de l'employeur, nonobstant toute condition expresse ou tacite de son contrat prévoyant la démission avec préavis. Aux termes de l'article 3 de ladite loi, ces dispositions peuvent être étendues à d'autres catégories d'emploi. Des dispositions analogues figurent dans la loi du Pakistan occidental pour ce qui est des personnes au service du gouvernement du Pakistan occidental, de toute institution créée par lui, d'une autorité locale ou d'un service concernant les transports ou la défense civile.
La commission note avec intérêt l'indication du gouvernement à la Commission de la Conférence en 1989 selon laquelle le gouvernement a décidé de se conformer aux exigences de la convention en modifiant la loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels, de manière qu'un travailleur d'un établissement tombant dans le champ d'application de la loi puisse mettre fin à son emploi, conformément aux conditions expresses ou tacites de son contrat d'emploi, et que l'amendement proposé serait soumis à l'Assemblée nationale. La commission note les indications du gouvernement dans son dernier rapport que la loi sera modifiée en ce sens. La commission espère fermement que les mesures nécessaires seront bientôt adoptées pour mettre la loi de 1952 du Pakistan sur le maintien des services essentiels de même que la loi de 1958 du Pakistan occidental sur le maintien des services essentiels en conformité avec la convention, et que le gouvernement indiquera les mesures adoptées à cet égard. [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 77e session et de communiquer un rapport détaillé pour la période se terminant le 30 juin 1990.]