ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil > Profils par pays >  > Commentaires > Tous les commentaires

Afficher en : Anglais - Espagnol

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2024, Publication : 112ème session CIT (2024)

Informations écrites communiquées par le gouvernement

Suite aux observations de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations concernant la violation du droit syndical, il y a lieu de signaler que la Tunisie n’a jamais failli à ses obligations vis-à-vis de l’OIT concernant l’application effective des conventions internationales du travail. C’est ainsi qu’elle s’est toujours attelée à assurer une bonne application des conventions ratifiées qui sont actuellement au nombre de 64 dont la convention no 87, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971.
Nous affirmons également, dans ce cadre, l’adhésion de notre pays aux principes et droits fondamentaux au travail et leur consécration sur le terrain, et le respect des dispositions de la législation nationale relative au droit syndical contenues dans la Constitution tunisienne, le Code du travail, les conventions collectives cadres et sectorielles ainsi que les prérogatives et facilités accordées aux délégués syndicaux.
Il convient également de noter que le ministère des Affaires sociales traite sur le même pied d’égalité avec tous les partenaires sociaux, y compris les organisations et les syndicats professionnels, tout en respectant la neutralité, la transparence et la préservation de la paix sociale, dans le cadre de la consolidation du droit syndical et du respect de la loi, dans un climat de travail exempt de violence, de pressions et de menaces de toutes sortes et cela en faveur de l’intérêt national.

I. Concernant l’arrestation du secrétaire général du syndicat des agentsde la Société Tunisie Autoroutes (STA) Anis El Kaabi

Le secrétaire général du syndicat des agents de la Société Tunisie Autoroutes (STA), Anis El Kaabi, qui a été arrêté le 31 janvier 2023 et placé en détention dans le cadre d’une enquête ouverte pour «exploitation d’un fonctionnaire public de sa qualité en vue de porter préjudice à l’administration, ou l’entente pour faire obstacle à l’exercice d’un service public, par démission collective» et ce, conformément aux dispositions des articles 96 et 107 du Code pénal, a été libéré jeudi 18 avril 2024. C’est ainsi que la chambre d’accusation de la Cour d’appel de Tunisie a décidé de le libérer et de le renvoyer dans l’état dans lequel il se trouve, libre, avec interdiction de voyager et que la Cour de cassation a annulé le 5 mars 2024 la décision de la chambre d’accusation de renvoyer Anis El Kaabi devant la chambre criminelle.

II. Concernant la liste des services essentiels

L’article 381 ter du Code du travail a repris la définition de la notion de «service essentiel» adoptée par le Comité de la liberté syndicale à savoir: «Pour déterminer les cas dans lesquels une grève pourrait être interdite, le critère à retenir est l’existence d’une menace évidente et imminente pour la vie, la sécurité et la santé dans tout ou partie de la population.» Ainsi l’article 381 ter dispose que «Est considéré comme service essentiel, le service où l’interruption du travail mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé des personnes dans l’ensemble ou dans une partie de la population». Cette définition n’a soulevé en pratique aucun problème, ni difficulté, grâce notamment à la tradition bien ancrée qui consiste au règlement des conflits collectifs du travail, ainsi que toutes les questions qui s’y rapportent, par le dialogue social et le consensus. Cette démarche consensuelle, qui est le fait des partenaires sociaux (patronat, syndicats des travailleurs, pouvoirs publics), a constamment abouti à la conclusion d’accords entre les employeurs et les travailleurs sur l’accomplissement d’un travail minimum dans les services essentiels notamment dans les services publics (hôpitaux, services d’approvisionnement en eau et électricité, etc.). Cette pratique a permis de ne pas recourir à l’arbitrage obligatoire prévu dans l’article 381 ter du Code du travail, ni à la réquisition mentionnée dans l’article 389 du même code.

III. Concernant la modification du Code du travail

Notre pays connaît actuellement une révolution législative dans le domaine du travail et des relations professionnelles dans le but de modifier progressivement la législation du travail, de renforcer les conditions de travail et les droits fondamentaux des travailleurs, d’éliminer toutes les formes de travail précaire et de renforcer la stabilité au travail qui font partie actuellement de nos priorités absolues. Dans ce cadre, et conformément aux instructions du Président de la République tunisienne, M. Kais Saied (février 2024) et dans le but d’offrir des conditions de travail décentes aux travailleurs des secteurs public et privé et d’éliminer les emplois précaires tout en assurant la continuité et la durabilité des institutions, le ministère des Affaires sociales a commencé à réaliser un inventaire actualisé et urgent des entreprises de soustraitance et à intensifier les campagnes sur le travail précaire à travers le contrôle du respect des principes de travail décent, dans le but de préparer des visions sur les mécanismes et les réformes juridiques capables de faire face à ce type d’emploi. À cet effet, deux commissions ont été nommées au niveau de la présidence du gouvernement et du ministère des Affaires sociales, chargées de préparer un projet de loi portant modification du Code du travail pour mettre fin à toutes les formes de travail précaire.
1. Concernant l’affiliation des enfants aux syndicats
Concernant le deuxième alinéa de l’article 242 du Code du travail qui dispose que: «Les mineurs de plus de 16 ans peuvent adhérer à un syndicat sauf si leur père ou tuteur s’y oppose», il convient de noter que l’âge légal de la majorité a été unifié dans la législation tunisienne à 18 ans. De même, le législateur a adopté l’âge de 18 ans comme point de départ à la majorité dans un certain nombre de domaines, à l’instar du mariage qui est de 18 ans pour les deux sexes, selon l’article 5 du Code de statut personnel (CSP), ou pour l’obtention du permis de conduire et de la carte d’identité. Il est à signaler encore que les normes internationales du travail ratifiées ont contribué à la construction progressive d’un système de protection du travail des enfants porteur des valeurs du droit humanitaire. Ce système trouve son cadre original dans le Code du travail (1966), dont les dispositions, à certains égards, sont devenues plus robustes grâce à la Constitution de 2022, et se sont également davantage intégrées à d’autres dispositions inclues dans des textes parfois d’application générale. De même les normes internationales du travail ratifiées sont parfaitement introduites en droit tunisien. Le Code du travail, par ailleurs, a permis à l’enfant d’intégrer la vie active, avec des conditions de protection spécifiques, et dans ce cadre, il est à signaler que l’affiliation aux syndicats pour les enfants de moins de 18 ans ne constitue pas une restriction considérant que la législation constitue un tout indivisible et ne peut pas comprendre des dispositions contradictoires. C’est ainsi que le législateur a exigé la qualité de travailleur pour s’affilier à un syndicat et l’article 242 du Code du travail dispose que «des syndicats ou associations professionnels de personnes exerçant la même profession, des métiers similaires ou des professions connexes concourant à l’établissement de produits déterminés ou la même profession libérale, peuvent se constituer». Considérant que cet article n’inclut pas les conditions d’adhésion d’un travailleur à un syndicat selon lesquelles il doit être âgé d’au moins 18 ans, mais donne plutôt la possibilité aux mineurs de moins de 18 ans d’adhérer à un syndicat à moins que leur père ou le tuteur ne s’y oppose, et compte tenu du fait que si la personne n’atteint pas l’âge légal de la majorité, la plupart de ses obligations sont considérées comme invalides et inappropriées tant qu’elle n’a pas encore la capacité juridique. Il s’agit ici d’un bénéfice au profit du mineur n’ayant pas atteint l’âge de la puberté et de la maturité légale. De même, le Code du travail classe cette catégorie d’enfants parmi les jeunes travailleurs, car il les considère, au sens de l’article 353 du Code du travail, comme des apprentis et non pas comme des travailleurs. Ils perçoivent une indemnité et non pas un salaire. Selon l’article 353: «Toute personne convaincue, d’avoir employé sciemment, en qualité d’apprenti, d’ouvrier ou d’employé, des jeunes gens de moins de 18 ans n’ayant pas rempli les engagements de leur contrat d’apprentissage, ou n’étant pas régulièrement déliés, est passible d’une indemnité prononcée au profit du chef d’établissement ou d’atelier abandonné.» Conformément à ce qui précède, la législation nationale est tout à fait harmonieuse dans ce cadre et conforme à l’intérêt du mineur et à la protection de l’enfant.
2. Concernant l’accès des étrangers aux fonctions de dirigeants syndicaux
Concernant l’aval préalable qui doit être accordé aux ressortissants étrangers pour exercer des fonctions syndicales, il y a lieu de signaler à ce sujet que cela ne constitue pas pour les étrangers une limitation au droit syndical puisqu’ils peuvent être membres du syndicat et exercer le droit de grève au même titre que les Tunisiens, même s’ils n’ont pas la possibilité de participer à la direction des syndicats. De même, le Code du travail a fixé à travers le chapitre II les conditions d’emploi de la maind’œuvre étrangère. L’article 258 dispose que: «Les dispositions du présent chapitre fixent les conditions d’emploi des étrangers en Tunisie compte tenu des conventions conclues entre la République tunisienne et les pays étrangers et des dispositions légales spécifiques.» En outre, l’article 278 du Code de travail dispose que la déclaration d’établissement doit comporter obligatoirement la nationalité des travailleurs étrangers occupant des emplois, ce qui exige la vérification des numéros de la carte de séjour, la date de sa délivrance et la durée de sa validité. Ces articles visent à protéger les travailleurs étrangers contre tout abus et nonrespect des principes de travail décent, d’une part, et de maintenir l’ordre général et la paix sociale, d’autre part. De même, le gouvernement estime que le délai de cinq ans prévu au premier alinéa de l’article 251 du Code du travail est un délai raisonnable. Le même délai est requis, par exemple, pour les citoyens de l’Union européenne pour obtenir le droit de séjour permanent dans un autre pays de l’Union européenne après y avoir vécu légalement et sans interruption pendant cinq ans.
3. Concernant les restrictions au droit de grève
Il est à signaler dans ce contexte, que la législation tunisienne est conforme aux conventions internationales du travail, notamment à la convention no 87, même si elle n’a pas explicitement prévu le droit de grève. C’est ainsi que les dispositions de l’article 3, alinéa 1, de la convention sont conçues de manière tellement générale, qu’elles sont sujettes à une large interprétation. D’ailleurs, ces dispositions ne traitent pas expressément des conditions d’exercice du droit de grève mais elles traitent essentiellement des droits des organisations des travailleurs et des employeurs d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d’élire librement leurs représentants et d’organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme d’action. Il est à signaler que la législation nationale a consacré la liberté syndicale et a tenté de combler cette lacune. Elle comprend même des dispositions qui dépassent celles contenues dans les conventions nos 87 et 98. C’est ainsi que la liberté syndicale dans notre pays s’élève au niveau des libertés constitutionnelles, et la Constitution garantit le droit syndical et le droit de grève. L’article 21 dispose que: «Les citoyens et les citoyennes sont égaux en droits et en devoirs. Ils sont égaux devant la loi sans discrimination. L’État garantit aux citoyens et aux citoyennes les libertés et les droits individuels et collectifs». En outre, l’article 40 de la Constitution exige que «la liberté de constituer des partis politiques, des syndicats et les associations est garantie. Les partis politiques, les syndicats et les associations s’engagent dans leur statut et leurs activités à respecter les dispositions de la Constitution et de la loi, ainsi que la transparence financière et le rejet de la violence». Tant le droit syndical que le droit de grève sont garantis par l’article 41 qui dispose que: «Le droit syndical, y compris le droit de grève est garanti». On peut dire alors que la question de la protection du droit de grève ne pose aucun problème au niveau de la législation nationale ou de la pratique, et considérant que la Tunisie a adhéré au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, conformément à la loi no 30 du 29 novembre 1968, qui consacre dans son article 8 que le droit de grève est garanti, à condition qu’il soit exercé conformément à la législation du pays concerné. De même, le Code du travail a codifié ce droit à travers des dispositions, en parfaite harmonie avec celles stipulées dans la convention no 87, en particulier l’article 3 de la convention qui dispose que: «Les organisations de travailleurs et d’employeurs ont le droit […] d’organiser leur gestion et leurs activités, et formuler leurs programmes d’action», et l’article 8 qui dispose que: «La législation nationale ne devra porter atteinte ni être appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues par la présente convention». Quant à l’approbation par la centrale syndicale des travailleurs d’une grève ou d’une interdiction de travail, le gouvernement n’a reçu, à ce jour, aucun commentaire ni plainte de la part des organisations professionnelles d’employeurs et de travailleurs actifs en Tunisie, même les lois internes des organisations d’employeurs et de travailleurs incluent l’exigence que leur autorité centrale approuve les grèves ou les interdictions de travail, ce qui est en harmonie avec le Code du travail. Par conséquent, la grève dans notre pays ne pose aucun problème et la législation nationale ne viole donc pas les dispositions de cette convention, qui n’a pas consacré, comme mentionné précédemment, le droit de grève, ce qui a ouvert la voie à de nombreuses interprétations dans ce contexte, et, pour éviter ce vide et cette ambiguïté, le Conseil d’administration du BIT a décidé de soulever la question devant la Cour internationale de Justice pour obtenir son avis consultatif sur cette question. Ainsi, le gouvernement considère que les articles 376 bis, 376 ter, 387 et 388 du Code du travail sont conformes à l’intérêt des organisations professionnelles d’employeurs et de travailleurs présentes en Tunisie.

IV. Concernant les critères de représentativité

Le gouvernement (ministère des Affaires sociales) collabore avec les partenaires sociaux pour développer une vision d’un système de représentation syndicale compatible avec les partis sociaux, et en adéquation avec les particularités de la réalité économique et sociale et le système des relations professionnelles, avec le soutien du Bureau international du Travail en Tunisie. Dans le cadre de fixation des normes de représentativité syndicale, et afin de combler le vide juridique de la législation en matière de définition de ces normes et de régulation du pluralisme syndical, et conformément aux dispositions de la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, et suite aux séminaires organisés avec le BIT sur les normes de représentativité susceptibles d’être adoptées, le ministère – en vue de garantir que la détermination des organisations représentatives au niveau des secteurs et des entreprises est fondée sur des critères clairs, préétablis, objectifs et adoptés après consultation de toutes les organisations de travailleurs et d’employeurs concernées – a invité par écrit les organisations professionnelles, à savoir: l’Union tunisienne de l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat (UTICA), l’Union générale tunisienne du Travail (UGTT), l’Union tunisienne de l’Agriculture et de la Pêche (UTAP), l’Organisation tunisienne du Travail (OTT), la Fédération tunisienne des compagnies d’assurances, la Fédération tunisienne des directeurs de journaux, l’Association professionnelle tunisienne des banques et établissements financiers, l’organisation professionnelle des propriétaires d’entreprises de Tunisie, le syndicat tunisien des agriculteurs (SYNAGRI), la Confédération générale tunisienne du travail (CGTT), l’union tunisienne des travailleurs (UTT), la Confédération des Entreprises citoyennes de Tunisie (CONECT), la fédération tunisienne des hôtels, la fédération tunisienne des travailleurs, l’union des syndicats du transport de Tunis et le syndicat national des journalistes tunisiens, afin d’examiner des normes proposées à cet effet et à exprimer leur avis. Nos services ont reçu quelques réponses à cet effet des organisations professionnelles suivantes (CONECT, UTAP, SYNAGRI, OTT, UTT, CGTT), l’union des syndicats du transport de Tunis, l’organisation professionnelle des propriétaires d’entreprises de Tunis), tandis que le reste n’a pas fourni de réponse. De même, le ministère a invité les organisations les plus représentatives pour assister à une réunion de travail à cet effet, mais elles n’y ont pas assisté. Pour faire face à cette situation, le ministère pense actuellement à relancer le dialogue avec toutes les parties impliquées dans la question, avec le soutien du BIT en Tunisie et en s’appuyant sur de nombreuses expériences comparatives programmées lors des prochains programmes de formation (nous avons examiné dernièrement et échangé des documents et des études sur l’expérience algérienne en ce qui concerne la législation sur la représentativité syndicale).

Discussion par la commission

Président – J’invite la représentante du gouvernement de la Tunisie, la présidente du Comité général du travail et des relations professionnelles au sein du ministère des Affaires sociales, à prendre la parole.
Interprétation de l’arabe: Représentante gouvernementale – D’emblée, je souhaiterais remercier la commission de nous donner la possibilité d’intervenir dans cette salle. C’est la première fois que la Tunisie apparaît devant cette commission, dont nous connaissons l’importance, et nous nous félicitons d’avoir l’occasion de fournir des éclaircissements relatifs aux observations faites et d’apporter des éclaircissements relatifs à nos pratiques et notre législation qui sont pleinement conformes aux normes internationales du travail, et particulièrement celles ayant trait aux droits fondamentaux au travail et au travail décent.
La Tunisie respecte ses engagements pris vis-à-vis de l’OIT tant en droit que dans la pratique. Elle met en œuvre les conventions de l’OIT et respecte ses obligations à cet égard. Elle a pour but d’appliquer les 64 conventions qu’elle a ratifiées en toute bonne foi, y compris la convention, la convention no 98 et la convention no 135. Nous essayons de veiller à ce que notre législation soit conforme aux normes de l’OIT dans tous les domaines.
La Tunisie défend les droits fondamentaux au travail et garantit que, sur le terrain, on applique ces principes inscrits dans notre législation nationale en matière de liberté syndicale. Ce droit est clairement inscrit dans la Constitution de la Tunisie, et il n’y a pas de lois qui sapent ou restreignent ces principes. Cela est garanti dans notre Code du travail et par les négociations collectives et les accords-cadres.
La Constitution garantit clairement les droits inscrits dans la convention. Les travailleurs peuvent constituer un syndicat sans autorisation préalable ou s’y affilier. J’aimerais rappeler que l’article 8 de la convention prescrit que les travailleurs et leurs organisations sont tenus de respecter la légalité, dans l’exercice de leurs droits. J’insiste sur le fait que l’exercice de ces droits ne doit pas interférer avec l’ordre public.
S’agissant de l’arrestation de M. Anis El Kaabi, secrétaire général du syndicat des agents de la STA, les détails de cette arrestation sont trop vastes et nous n’allons pas nous y arrêter ici. Nous avons fourni tous les détails avec toutes les informations pertinentes à la commission. L’entreprise concernée, et pour la protection du droit public, a déposé une plainte pour «exploitation d’un fonctionnaire public de sa qualité en vue de porter préjudice à l’administration, ou l’entente pour faire obstacle à l’exercice d’un service public, par démission collective». Ce cas a été porté devant les organes judiciaires conformément à la loi du pays et nous n’en aurions pas entendu parler sans une demande concernant les détails de l’arrestation. J’aimerais rappeler à votre attention le fait que M. El Kaabi a été libéré le jeudi 18 avril 2024.
S’agissant du droit de grève, je souhaiterais vous informer qu’en 2023, 47 924 travailleurs ont participé à des grèves dans différentes branches en Tunisie sans avoir fait l’objet de poursuite.
S’agissant de la révision du Code du travail, notre pays s’efforce actuellement d’investir dans les institutions du travail et de promouvoir un modèle de travail décent et durable. En outre, nous nous attachons à utiliser judicieusement les transformations numériques pour améliorer le bienêtre des travailleurs. Notre approche consiste à amender la loi progressivement pour améliorer les conditions de travail et les droits fondamentaux des travailleurs. Notre grande priorité est de garantir et renforcer la stabilité, ainsi que de garantir la santé et la sécurité au travail. Le Président de la République a demandé une révolution législative en se concentrant sur la législation du travail et de la justice sociale. Des conditions de travail décentes doivent être garanties pour les travailleurs, tant dans le secteur public que privé, en éliminant toutes les formes précaires d’emploi. Un inventaire sur la situation de la soustraitance des entreprises a débuté et les campagnes contre l’emploi précaire ont augmenté. Les exigences de travail décent sont surveillées de près et la Tunisie envisage une approche juridique qui pourrait être adoptée pour lutter contre ces formes d’emploi. Un comité a été créé dans le but d’examiner un projet de loi amendant le Code du travail d’une manière qui renforcerait le travail décent compte tenu de la transformation structurelle qui existe dans l’environnement du travail et les nouvelles formes d’emploi.
S’agissant de l’affiliation des mineurs aux syndicats, le paragraphe 2 de l’article 242 du Code du travail dispose que les mineurs de plus de 16 ans peuvent adhérer à un syndicat, sauf si leur père ou tuteur s’y oppose. Il convient de noter que l’âge légal de la majorité a été unifié dans la législation tunisienne à 18 ans. Ainsi, la législation nationale est cohérente et protège les intérêts des enfants et des mineurs conformément aux conventions internationales. Les activités syndicales sont des activités importantes, qui induisent de grandes responsabilités, si bien que les gens qui s’engagent dans de telles activités doivent savoir comment agir et comment prendre des décisions circonstanciées. C’est pourquoi la législation prévoit qu’une autorisation doit être obtenue des parents ou des tuteurs pour que leurs enfants s’affilient. Ensuite, ces mineurs pourront endosser de grandes responsabilités.
S’agissant du droit de grève, notre législation est alignée sur les conventions de l’OIT à cet égard, notamment la convention no 87, même si cette dernière ne porte pas précisément le droit de grève et que cette question a été renvoyée à la Cour internationale de Justice. La liberté syndicale est également inscrite dans notre législation nationale qui contient des dispositions qui vont au-delà de celles contenues dans les conventions nos 87 et 98. La liberté syndicale est au cœur des principes fondamentaux et du droit du travail en Tunisie et constitue une condition préalable à la justice sociale. C’est un droit garanti par la Constitution. La Constitution garantit à tous les individus l’exercice des libertés publiques, le droit de s’affilier à un syndicat ou d’en constituer, ainsi que le droit de grève. De plus, la législation tunisienne garantit l’exercice du droit de grève sans limite en évitant d’en définir précisément le terme, autorisant ainsi une interprétation large, et d’en limiter les objectifs. Les syndicats peuvent donc décider de la durée d’une grève. L’objectif de l’obligation d’indiquer la durée d’une grève, en vertu de la législation du travail et du Code du travail, vise à éviter une cessation d’activité d’une branche particulière et à donner la possibilité aux deux parties de régler leurs différends de façon pacifique.
S’agissant de l’approbation des grèves par les autorités centrales syndicales, le gouvernement n’a reçu aucune observation ou plainte de la part des organisations professionnelles de travailleurs au sujet de la condition d’approbation des grèves par leurs autorités centrales. Au contraire, leurs règlements intérieurs comprenaient de telles conditions d’approbation. Ces conditions sont-elles aussi considérées comme étant une entrave à l’exercice des droits de grève de la part des syndicats eux-mêmes?
À propos des ressortissants étrangers pouvant exercer une fonction syndicale, cela ne se limite pas au droit d’organisation étant donné qu’ils peuvent être membres d’un syndicat et exercer leur droit à la grève de la même façon que les Tunisiens. Les ressortissants étrangers peuvent occuper des postes de dirigeants cinq ans après avoir acquis la nationalité tunisienne. Après quoi, ils peuvent exercer d’autres postes sous la supervision du ministères des Affaires sociales. Ces conditions sont conçues pour protéger les ressortissants étrangers d’abus et de non-conformités avec les principes de travail décent et aussi pour protéger les travailleurs de toute exploitation en vue d’objectifs qui n’ont rien à voir avec les syndicats et l’exercice des droits syndicaux. C’est la raison pour laquelle le gouvernement vérifie le statut des travailleurs étrangers qui souhaitent occuper des fonctions de direction au sein d’un syndicat, pour protéger la stabilité et la sécurité du pays.
Dans le contexte de l’établissement de normes pour la représentativité syndicale, et pour combler une lacune de la législation pour définir ces éléments, la réglementation du pluralisme syndical notamment, et conformément aux dispositions de la convention no 144 sur les consultations tripartites et à la suite de séminaires organisés avec l’OIT sur la représentativité potentielle et leurs normes, le ministère a organisé un cycle de négociations avec l’ensemble des organisations de travailleurs et d’employeurs en les invitant à fournir leur opinion. Jusqu’à présent, nous n’avons reçu que quelques réponses. Pour cette situation, le ministère envisage un dialogue avec toutes les parties concernées avec l’appui de l’OIT en Tunisie, et nous avons également partagé un document d’autres syndicats. Le ministère des Affaires sociales, y compris le représentant des syndicats, comme étant l’un des domaines de coopération prioritaire avec le bureau régional de l’OIT, nous avons reçu une lettre le 19 mai dernier confirmant l’approbation de ces priorités par le bureau régional et déclarant sa volonté de poursuivre la coopération technique. Je m’en tiendrai là parce que je n’ai pas suffisamment de temps et j’interviendrai tout à l’heure.
Membres travailleurs – Nous avons à connaître du cas de la Tunisie concernant le respect de la convention no 87. Nous avons encore en mémoire l’interdiction faite l’année passée à la Confédération syndicale internationale (CSI) et à la Confédération européenne des syndicats (CES) de visiter le pays pour assister leurs membres. Cette interdiction n’est pas conforme aux articles 5 et 6 de la convention.
La commission d’experts a relevé une série d’éléments constituant une ingérence dans les activités syndicales. Nous avons par exemple en mémoire le fait que, en 2021, un tribunal a décidé d’annuler une décision de convocation du congrès de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT). Le gouvernement a pu expliquer que la cour d’appel a invalidé ce jugement. Il nous semble néanmoins que cette procédure judiciaire témoigne d’un déficit de protection de l’autonomie dont doivent jouir les organisations syndicales.
Ce précédent nous indique qu’il est, somme toute, assez aisé de remettre en question devant les tribunaux le fonctionnement des organisations syndicales. L’existence de la possibilité de faire appel et la décision qui a été finalement prise par la cour ne sont pas de nature à atténuer ce constat. En effet, l’existence d’une procédure d’appel n’empêche pas que le mal soit fait et que l’organisation syndicale soit entravée dans l’exercice de ses activités.
La situation que nous déplorons ne se limite pas seulement à cela. Comme le relève la commission d’experts, plusieurs dirigeants syndicaux ont fait, et continuent de faire, l’objet de mesures d’intimidation et d’arrestations. À cela s’ajoutent des poursuites pénales et des sanctions administratives. D’autres intervenants illustreront en détail plusieurs de ces faits. Toutefois, à ce stade, je me permettrai d’insister sur le lien inextricable qu’il y a entre la liberté syndicale, d’une part, et les libertés civiles, d’autre part.
Je tiens à rappeler, à ce titre, le contenu de la résolution adoptée par la Conférence internationale du Travail à sa 54e session. Celle-ci insistait notamment sur le droit à la liberté et à la sûreté de la personne ainsi qu’à la protection contre les arrestations et les détentions arbitraires. Plus que jamais, il faut réaffirmer que les droits syndicaux ne peuvent prospérer que dans un climat exempt de violence et d’intimidation.
La commission d’experts a également émis une série d’observations s’agissant de certaines dispositions légales qui devraient être réformées. Il est essentiel que le gouvernement s’attèle à cet exercice et engage un processus de réforme. Cette réforme doit, bien entendu, se dérouler dans le cadre d’un vrai dialogue social associant les organisations syndicales et les employeurs, et ce dialogue est actuellement absent. Nous déplorons que le gouvernement ne procède plus à de vraies consultations sociales depuis plusieurs années. Cette situation est bien entendu dommageable. Elle nourrit l’instabilité et empêche que les droits des travailleurs soient protégés.
Nous invitons le gouvernement à saisir l’opportunité de la discussion que nous avons aujourd’hui pour réactiver les instances et les mécanismes de dialogue inclusif.
Membres employeurs – Le cas de la Tunisie traite de l’application en droit et dans la pratique de la convention nº 87. Il s’agit d’une convention fondamentale ratifiée par la Tunisie en 1957. La commission d’experts a formulé des observations à six reprises sur ce cas: en 2011, 2012, 2015, 2018, 2022 et 2023. Toutefois, c’est la première fois que ce cas fait l’objet d’une discussion au sein de cette commission.
Nous avons pris note des informations écrites et orales soumises par le gouvernement concernant ce cas. Les dernières observations de la commission d’experts portent principalement sur trois domaines.
En premier lieu, l’arrestation et la poursuite pénale du secrétaire général du syndicat des agents de la STA. Nous notons cependant l’information du gouvernement selon laquelle le secrétaire général a depuis été libéré le 10 avril 2024 à l’issue d’une procédure judiciaire en Tunisie.
En second lieu, les observations portent sur le Code du travail. Ici, la commission d’experts a mis en avant trois articles du Code du travail qui ne sont pas conformes à la convention, en particulier à ses articles 2 et 3, du moins selon la commission d’experts.
Il s’agit d’abord de l’article 242 du Code du travail, qui exige que les enfants ayant atteint l’âge d’admission à l’emploi obtiennent le consentement de leurs parents ou tuteurs pour exercer leurs droits syndicaux.
Ensuite, l’article 251 du Code pénal ne permet pas aux étrangers d’accéder aux fonctions de dirigeants syndicaux, même après une période raisonnable de résidence dans le pays. Comme vous l’avez entendu, ils doivent être dans le pays depuis cinq ans.
Le troisième point concerne les articles 376bis, 376ter, 387 et 388 sur le droit de grève.
Les membres employeurs partagent l’avis de la commission d’experts selon lequel les dispositions légales qui empêchent les mineurs d’exercer leurs droits syndicaux, alors qu’ils sont en mesure de travailler légalement, ne sont pas conformes à la convention. Nous avons pris note de l’information du gouvernement selon laquelle l’âge légal d’admission à l’emploi a été revu à 18 ans, et que les travailleurs en dessous de cet âge ne sont considérés que comme des apprentis et non comme des travailleurs au sens propre. Toutefois, dans la mesure où les apprentis effectuent un travail en tant que travailleurs et devraient bénéficier de droits syndicaux, nous demandons au gouvernement de veiller à ce que les dispositions du Code du travail soient harmonisées avec la convention.
Au sujet des travailleurs étrangers, nous prenons note de la réponse du gouvernement indiquant que l’exigence légale de cinq ans pour pouvoir occuper les postes de dirigeants syndicaux n’est pas contraire à la convention. Dans la mesure où le gouvernement pourrait bénéficier de l’assistance technique du BIT pour harmoniser ses lois avec la convention, notamment en ce qui concerne le caractère raisonnable de ce délai, nous le prions instamment de solliciter cette assistance.
S’agissant des dispositions relatives aux grèves, les membres employeurs souhaitent rappeler qu’ils ne partagent pas le point de vue de la commission d’experts concernant la convention et le droit de grève. Ils souhaitent souligner que ni la convention no 87 ni aucune autre convention de l’OIT ne contient de règles sur le droit de grève. Les membres gouvernementaux ont mis ce fait en évidence dans leur prise de position de mars 2015, précisant que la portée et les conditions de ce droit sont réglementées à l’échelle nationale. Par conséquent, les gouvernements peuvent légitimement déterminer leur approche du droit de grève, librement guidée par leurs besoins et priorités nationaux, et ne sont pas tenus de suivre les recommandations de la commission d’experts. C’est dans cette optique que les membres employeurs abordent le cas de la Tunisie.
Le troisième point de l’observation porte sur la représentativité des organisations de travailleurs. Sur ce point, le gouvernement indique que le processus de consultation est toujours en cours. La commission d’experts a énoncé clairement que des critères «clairs, préétablis et objectifs» étaient requis pour déterminer la représentativité d’une organisation. La position du gouvernement est que, dans l’attente d’un éventuel consensus sur cette question qui ressortirait de la consultation, la question de la représentativité de toute organisation de travailleurs doit encore être déterminée par le secrétaire d’État à la Jeunesse, aux Sports et aux Affaires sociales, conformément à l’article 39 du Code du travail. Bien que cela puisse avoir un effet déterminant dans un conflit particulier, ce n’est malheureusement pas conforme à ce qui est requis et nous prions donc instamment le gouvernement d’accélérer le processus de consultation, ainsi que la révision du Code du travail, pour s’assurer que les questions de représentativité des organisations sont déterminées ou réglées au moyen de critères clairs, préétablis et objectifs.
Interprétation de l’arabe: Membre travailleur, Tunisie – Je voudrais tout d’abord remercier la commission d’avoir accepté le rapport de l’UGTT sur les violations des droits syndicaux en Tunisie. Nous aurions aimé que ce cas soit traité l’année dernière pour empêcher les violations qui se sont aggravées au cours de cette année.
Dans ce contexte, nous souhaitons vous rappeler que le mouvement syndical tunisien est né il y a deux siècles sur des principes de liberté et d’indépendance. Notre mouvement a participé à la bataille nationale pour l’indépendance de la Tunisie, puis, pendant la période postindépendance, nous avons participé à de nombreux combats pour la défense de la liberté syndicale, de l’indépendance de l’UGTT et de la démocratie. La classe ouvrière tunisienne représentée par ses dirigeants syndicaux a payé un lourd tribut en termes de martyrs, de prisonniers qui ont été torturés et ont perdu leur travail. Nous avons appris de ces expériences, malgré les victimes et les tragédies, que la liberté syndicale est l’atout le plus important pour les travailleurs et que la sécurité, la stabilité et le progrès d’un pays dépendent entièrement de l’existence de syndicats forts qui tiennent à leur liberté, à leur indépendance, quel que soit le régime politique ou l’étiquette des gouvernements qui se succèdent.
Partant de là, l’UGTT a joué un rôle majeur dans la Révolution de la dignité de décembre 2010 à janvier 2011, qui a renversé la dictature. Ensuite, l’UGTT a assumé de grandes responsabilités pour assurer le processus de transition démocratique pacifique; et nous avons aussi mené, comme vous le savez, le dialogue national en Tunisie au cours de l’année 2013 entre toutes les composantes politiques et sociales, ce qui a permis de sauver la Tunisie et de l’épargner du danger des conflits et de la guerre civile, ce qui a permis aussi au peuple tunisien de choisir ses représentants et son président par le biais d’élections libres dont le monde entier a été témoin en 2011, 2014 et enfin en 2019.
L’UGTT et ses partenaires ont supervisé le dialogue national et ont reçu le prix Nobel de la paix en 2015. Ceci constitue une preuve de l’appréciation et du soutien du monde entier à l’égard de notre rôle dans la consolidation des valeurs de la démocratie, des droits de l’homme et de la justice sociale en Tunisie.
De nombreuses réalisations ont été faites dans le domaine de la liberté d’expression, du droit syndical et du développement des législations et des pratiques conformes aux normes internationales dans le domaine des libertés et des droits de l’homme.
Le dialogue social a également connu un développement important au cours de cette période, car il a été institutionnalisé à travers le Conseil national pour le dialogue social, et ses domaines ont été élargis pour inclure les questions sociales, économiques et de développement en général.
Les partenaires sociaux ont également respecté les dates fixées pour la révision des salaires, la modification des accords paritaires et la résolution des conflits du travail. Tout cela s’est fait dans les délais, sur la base de la négociation, du dialogue et d’un désir sincère de trouver des solutions.
Cependant, depuis quelques années, le dialogue social en Tunisie connaît un véritable recul, un sérieux déclin et une perte de ce qui a été acquis au cours des décennies de persévérance, de lutte et de sacrifices. Ce déclin a coïncidé avec des violations flagrantes des droits syndicaux et de graves restrictions à la liberté syndicale. L’UGTT et ses cadres ont été ciblés et ses structures ont été mises en difficulté.
Permettez-moi d’énumérer quelques atteintes au droit du dialogue et à la négociation, aux droits syndicaux, en violation flagrante des traités internationaux, et notamment les conventions nos 87 et 98.
Tout d’abord, le Conseil national tripartite a été gelé. C’est un conseil qui s’occupait du dialogue social et il lui a été impossible de reprendre ses travaux après le refus du gouvernement de publier les noms de ses représentants comme le prévoit la loi. Le Conseil national pour le dialogue social, créé avec le soutien de l’OIT, est toujours interdit, et ce depuis octobre 2021, ce qui impacte le dialogue social, la politique de consultation et de participation, et ce qui ouvre aussi la voie à des décisions unilatérales que prend le gouvernement.
Deuxièmement, le gouvernement a publié la circulaire no 20, en date du 9 décembre 2021, qui impose des restrictions sévères et injustifiées à la négociation collective, au dialogue social, au sein des institutions en compliquant délibérément les procédures et en exigeant l’accord préalable du Premier ministre avant de tenir toute séance de négociation entre les institutions et le syndicat et la direction de l’institution, ce qui a pratiquement rendu la négociation impossible d’un point de vue pratique. Ces restrictions et complications de la circulaire du gouvernement publiée en décembre 2021 sont en fait des restrictions imposées au droit syndical. Elles violent le droit syndical et la convention no 87, elles portent atteinte à la négociation collective, comme énoncé dans la convention no 98, ratifiée par le gouvernement tunisien en 1957.
Troisièmement, le non-respect par le gouvernement tunisien de ses engagements et des accords conclus avec l’UGTT. Le gouvernement a violé bon nombre de ces obligations contenues dans un certain nombre d’accords, notamment les accords de 2015, d’octobre 2020, du 6 février 2021 et du 15 septembre 2022. Ce dernier accord comporte sept points dont deux seulement ont été appliqués. Les accords conclus entre de nombreux ministères et établissements publics, et les groupements syndicaux sectoriels affiliés à l’UGTT ont également été gelés. Ces accords ont été conclus à la suite de luttes syndicales, après de longues discussions avec les parties concernées, mais ils ont ensuite été abandonnés et aucun engagement n’a été pris pour les mettre en œuvre. Le gouvernement entend saper la crédibilité du travail syndical auprès de la base syndicale, susciter des sentiments de frustration parmi les syndicalistes et saper la crédibilité du dialogue social.
Quatrièmement, le gouvernement apporte unilatéralement des amendements et des modifications à la législation du travail sans impliquer ni consulter l’UGTT.
Cinquièmement, outre le fait qu’il n’y a pas de consultation, le gouvernement a pris des décisions unilatérales qui limitent la liberté syndicale et refuse de répondre à l’appel de l’UGTT. Le gouvernement essaye donc d’étouffer le travail syndical et ne permet pas le règlement des conflits. Un exemple à cela est le déni de toutes les règles que l’État devrait prendre en considération pour faciliter le travail syndical et qui étaient garanties depuis des décennies. La liberté d’opinion est bafouée. Tous les règlements et toutes les restrictions ont bloqué le travail syndical. Nous avons des documents qui prouvent que des syndicalistes ont été arrêtés de manière arbitraire, comme M. Anis El Kaabi, le secrétaire général du syndicat des agents de la STA, qui a été finalement mis en liberté. De la même façon, une autre personne a été arrêtée le lendemain du discours du Président de la République dans l’usine dans laquelle elle travaillait et a été jugée. Les violations du droit syndical, malheureusement, portent atteinte à l’indépendance et s’inscrivent malheureusement dans le contexte d’une violation générale des libertés et des droits qui a commencé il y a quelques temps et qui continue à porter atteinte à l’expérience démocratique tunisienne qui était pionnière dans la région. Nous avons soutenu l’initiative visant à la corriger et l’enraciner au service des enjeux socioéconomiques et qui ont mené à la révolution, à la liberté et à la dignité en Tunisie. Il est également important de souligner que l’UGTT a contribué à la bataille de la libération, elle a reçu le soutien des syndicats américains et africains pour encourager le droit des peuples à l’autodétermination et c’est l’organisation qui a contribué à un dialogue national sauvant ainsi le pays de la guerre. L’UGTT a remporté le prix Nobel de la paix et, malheureusement, elle est aujourd’hui punie parce qu’elle défend les droits et les libertés et qu’elle soutient les avocats, les journalistes, les blogueurs, et les prisonniers d’opinion.
Voici le contexte général que nous vous présentons dans notre rapport sur les violations des libertés syndicales en Tunisie et nous soutenons toutes les délégations syndicales dans le monde qui sont attaquées et restreintes, et j’aimerais vous appeler tous, encore une fois, et appeler le gouvernement à s’en tenir aux conventions internationales, à mettre nos lois en conformité avec ces conventions et à rouvrir le dialogue.
Interprétation de l’arabe: Membre employeur, Tunisie – Les cas concernant la convention no 87 constituent la majorité des cas qui sont présentés à cette commission. Cela démontre que le dialogue tripartite sur le plan international n’a pas porté ses fruits et n’a pas atteint ses objectifs. Cet échec même est concrétisé par l’incapacité de cette commission internationale à régler la question du droit de grève et, par conséquent, le Conseil d’administration du BIT a saisi la Cour internationale de Justice de la question du droit de grève, alors qu’il s’agit là d’une question tripartite concernant les mandants.
En effet, la convention ne mentionne rien sur le droit de grève et l’interdiction de travail ou le lock-out. Il n’y a également aucune norme internationale concernant l’exercice de ce droit de grève, les droits connexes ou alors les obligations vis-à-vis d’autrui lors de l’exercice du droit de grève. C’est pour cela que cette question est soumise à la jurisprudence, aux interprétations, et que les seules sources de référence sont les législations nationales et les accords bilatéraux ou trilatéraux conclus entre États.
Le plus difficile et le plus délicat dans cette question est de ne pas faire la confusion entre le droit syndical, d’une part, – droit des employeurs et des employés – et, d’autre part, le droit pénal et le droit civil. La plupart des cas qui sont présentés à cette commission, lors de cette session et de nombreuses sessions précédentes, concerne les modalités d’exercice du droit de grève et d’interdiction de travail. Cela prouve qu’il est indispensable de définir le cadre juridique et pratique qui permettrait de réaliser l’équilibre entre la liberté syndicale, le droit d’exprimer pacifiquement ses positions et de défendre ses intérêts et, d’autre part, la nécessité de ne pas entraver la liberté de travail et d’activité des personnes qui ne sont pas concernées par la grève et également le fait de garantir la liberté d’accès des citoyens à leur lieu de travail et aux services publics. Sans oublier qu’il ne faudrait pas que l’exercice de ce droit entraîne des activités non pacifiques ou l’occupation des lieux de travail.
C’est là que résident le rôle et l’importance du dialogue social tripartite dans cette instance. En effet, c’est ce dialogue qui permet de parvenir à l’équilibre entre les droits, d’une part, et les obligations, d’autre part. C’est également ce dialogue qui permet de définir la limite entre l’exercice du droit syndical et, d’autre part, les activités politiques. Il faudrait également, lors de ce dialogue, établir la nécessité de soumettre les acteurs d’infraction à la reddition de comptes.
Pour ce qui est de la position des entreprises, nous n’avons pas de problème avec le pluralisme représentatif et la représentativité dans les syndicats. Il est vrai que l’UGTT est le syndicat le plus représentatif du tissu économique et qu’elle est notre partenaire principal dans les relations professionnelles. Il y a toutefois d’autres syndicats avec lesquels nous avons des relations dans différents secteurs tels que l’Union tunisienne du commerce, de l’industrie et de l’artisanat et d’autres unions et syndicats dans les domaines des agences de voyage, de l’hôtellerie, des pharmacies, des agences d’assurance, des banques et également pour les avocats. Cela garantit donc un véritable pluralisme dans la représentation syndicale. Le gouvernement a effectué des consultations avec nous et avec l’UGTT depuis 2016 concernant le pluralisme dans l’activité syndicale et la représentativité syndicale. Une étude a été effectuée à propos de cette question, étude sous les auspices de l’OIT et réalisée par un expert international. Un atelier a également été organisé par l’OIT avec les représentants du dialogue social en mars 2017. Une commission tripartite a été établie, chargée de rédiger un projet d’accord sur la représentativité syndicale. Malheureusement, le COVID-19 a mis un terme à tous ces efforts.
Pour ce qui est de l’affiliation des enfants aux syndicats sur autorisation parentale, nous ne voyons pas là une entrave à l’activité syndicale et au droit syndical, et nous n’avons reçu aucune plainte à ce propos. Nous pensons que la décision d’adhésion à un syndicat devrait être liée à l’âge légal de la majorité, qui est de 18 ans en Tunisie, conformément à la décision prise en 2010.
Concernant l’approbation par la centrale syndicale d’une décision de grève ou d’interdiction de travail, nous n’avons reçu aucune réserve ou plainte à ce propos de la part de l’UGTT. Les partenaires sociaux considèrent que la centrale syndicale, qui représente les travailleurs et les employeurs, est une garantie des activités de grève et de supervision. En ce qui concerne la période de préavis, cette période, à notre avis, est une opportunité de conciliation et de médiation. Nous confirmons que les trois quarts des conflits sociaux sont encadrés par la centrale syndicale, et ces conflits sont réglés de manière pacifique et à l’amiable.
Après avoir entendu les différents intervenants et après avoir pris connaissance des observations de la commission d’experts et des réponses du gouvernement, nous voulons dire ce qui suit.
Premièrement, nous sommes extrêmement heureux que le secrétaire général, M. Anis El Kaabi, ait été relâché par décision de justice le 18 avril 2024. Toutefois, malgré les nombreuses données qui nous ont été communiquées, nous n’entrerons pas dans ce débat concernant le cas de M. Anis El Kaabi ou d’autres représentants syndicaux, car nous considérons que cette commission n’est pas une salle d’audience dans laquelle il faudrait présenter des plaidoiries, et nous sommes convaincus que les questions concernant la justice tunisienne sont du ressort du système judiciaire tunisien et sont réglées conformément au droit tunisien. Enfin, nous sommes étonnés que la Tunisie ait été incluse dans la liste des cas individuels concernant la convention no 87, car les points présentés à notre avis ne constituent pas une violation des droits fondamentaux des travailleurs. Nous pensons que les lacunes peuvent être réglées par le dialogue et par les consultations sociales.
Membre travailleur, Italie – Je prends la parole au nom des confédérations syndicales italiennes: la Confédération générale italienne du travail, la Confédération italienne des syndicats de travailleurs (CISL) et l’Union italienne du travail (IUL), ainsi qu’au nom des confédérations syndicales françaises: la Confédération française démocratique du travail (CFDT) et la Confédération générale du travail (CGT).
La commission d’experts a noté avec préoccupation les observations de l’UGTT et de la CSI faisant état de violations des droits syndicaux et de l’homme par les autorités, en particulier d’arrestations arbitraires, de menaces et d’intimidations, de poursuites pénales et administratives à l’encontre des syndicalistes.
En 2021, le gouvernement tunisien a encore restreint les libertés publiques, et a harcelé et persécuté des dirigeants syndicaux. Les autorités ont adopté et appliqué avec rigueur le décret no 54, dont l’UGTT a demandé le retrait à plusieurs reprises. Cette loi sanctionne toute expression de désaccord, de protestation ou de revendication par une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à cinq ans et des amendes administratives. Avec cette sanction, les militants syndicaux qui osent exercer leurs fonctions habituelles sont exposés à un risque permanent d’arrestation et de condamnation à des peines sévères.
Les travailleurs italiens et français sont profondément préoccupés par les peines d’emprisonnement et la prise pour cible des syndicalistes, ainsi que par la multiplication des harcèlements judiciaires contre les activistes de la société civile et les membres des syndicats.
Ces pratiques perpétuent un climat de peur et portent atteinte aux droits fondamentaux des travailleurs d’organiser leur activité et de défendre leurs intérêts sans intervention ni intimidation, au mépris total des dispositions de la convention.
Outre l’absence totale de dialogue social en Tunisie, nous sommes également préoccupés par les violations persistantes des droits de négociation collective, les graves violations des libertés publiques et le déni du droit à la solidarité syndicale internationale.
C’est dans ce contexte répressif que M. Anis El Kaabi, secrétaire général du syndicat des agents de la STA, a été arrêté dans le cadre d’une grève organisée en janvier 2023. À la fin de cette même année, dans le district de Sfax, des dizaines de syndicalistes ont été interpellés et au moins quatre membres de l’UGTT ont été arrêtés, parmi eux, le secrétaire général régional du syndicat, M. Youssef Aouadni.
Ces incidents, qui s’ajoutent à d’autres, ont valu à la Tunisie de figurer parmi les dix pires pays du monde pour les travailleurs, selon l’Indice CSI 2023 des droits dans le monde. Le 29 février 2024, M. Taher Mezzi, secrétaire général adjoint en charge du secteur privé à l’UGTT, a été arrêté avant un mouvement de protestation planifié à La Kasbah dans le but évident d’affaiblir et de menacer le mouvement syndical indépendant.
Nous prions instamment le gouvernement tunisien d’abandonner toutes les charges et de cesser le recours à l’emprisonnement politique des syndicalistes et des militants qui exercent leurs droits et libertés fondamentaux.
Interprétation de l’arabe: Membre gouvernementale, Arabie saoudite – L’Arabie saoudite souhaite saluer les progrès réalisés par la Tunisie en ce qui concerne la mise en œuvre des conventions ratifiées par ce pays, conformément aux normes internationales du travail. Nous saluons également la coopération de la Tunisie avec les mécanismes de contrôle. En outre, nous applaudissons les efforts déployés par le pays pour renforcer les droits fondamentaux des travailleurs ainsi que ses efforts pour créer des conditions de travail décentes dans les secteurs publics et privés.
En outre, nous sommes heureux de constater que le pays cherche à promouvoir la justice sociale en mettant en place une législation qui tient dûment compte des politiques sociales et protège les droits des travailleurs. Pour conclure, nous remercions encore le gouvernement de la Tunisie pour tout ce qu’il entreprend.
Interprétation de l’arabe: Membre travailleur, Bahreïn – Je prends la parole au nom de la fédération de travailleurs du Bahreïn, du Maroc et de la Libye. Je représente tous ces travailleurs et nous sommes bien sûr solidaires de nos frères de Tunisie.
La convention no 87 est fondamentale pour des syndicats libres, indépendants et démocratiques, des syndicats qui respectent les choix des travailleurs tout en garantissant la sûreté et la sécurité des syndicalistes et de leurs organisations.
En Tunisie aujourd’hui, le mouvement syndical, et plus particulièrement l’UGTT, est un mouvement qui a une fière histoire de lutte, et c’est un mouvement qui est aujourd’hui attaqué en tant qu’organisation. Les membres de cette organisation sont accusés de manière répétée d’avoir commis des actes répréhensibles qui les empêchent de travailler de façon à favoriser l’essor des activités syndicales dans le pays.
Membre gouvernementale, Nicaragua – Le gouvernement de réconciliation et d’unité nationale de la République du Nicaragua a pris note des informations fournies par les autorités tunisiennes et les en remercie. Il prend également note des efforts déployés, des actions menées et des avancées obtenues par la République tunisienne quant aux obligations qui lui incombent vis-à-vis de l’OIT en matière d’application des conventions internationales du travail, d’harmonisation de sa législation nationale sur les normes internationales du travail et de pleine coopération avec les organes de contrôle de l’OIT.
Le Nicaragua constate que la Tunisie a modifié sa législation du travail, y compris le Code du travail, afin de promouvoir les droits fondamentaux des travailleurs, de fournir des conditions de travail décentes aux travailleurs des secteurs public et privé, et d’éliminer toutes les formes d’emploi précaire.
La justice sociale est l’une des principales priorités du gouvernement, qui œuvre à sa promotion en élaborant des textes de loi et en mettant en œuvre des politiques sociales préservant les droits des travailleurs. Sur le plan international, la Tunisie confirme cette perspective, car elle a rejoint la Coalition mondiale pour la justice sociale lancée par l’OIT.
Nous remercions la Tunisie pour les actions qu’elle mène et les efforts qu’elle déploie en œuvrant, main dans la main avec l’OIT, à la réglementation du pluralisme syndical en définissant des critères de représentation syndicale.
Nous félicitons la Tunisie pour son engagement constant en faveur de la justice sociale, au bénéfice du respect des droits au travail des travailleurs et du peuple tunisien.
Membre travailleuse, Espagne – Je prends la parole au nom des syndicats espagnols suivants: la Confédération syndicale des commissions ouvrières (CCOO) et l’Union générale des travailleurs (UGT). Aujourd’hui, nous présentons à la commission la situation de la Tunisie qui se caractérise par la violation de la convention, ratifiée en 1957, et en particulier du paragraphe 2 de l’article 3, qui dispose que les autorités publiques doivent s’abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l’exercice légal.
En 2023, le gouvernement a expulsé la secrétaire générale de la CES alors qu’elle s’était rendue en Tunisie pour manifester son soutien à l’UGTT. D’autres camarades syndicalistes d’Europe ont connu le même sort et ont été reconduits à la frontière. En outre, une délégation de la CSI a été informée qu’elle ne pouvait pas se rendre en Tunisie.
Une campagne de diffamation a été lancée contre les dirigeants de l’UGTT. Ils ont été accusés de chercher un soutien étranger, ce qui témoigne de l’ignorance des valeurs de la solidarité internationale et du droit des organisations syndicales de se soutenir, de nous soutenir mutuellement, en temps de crise. Cela fragilise les dispositions de la convention qui prévoient la non-ingérence dans les affaires des organisations syndicales et la protection du droit syndical.
Les autorités tunisiennes sont tenues de protéger le droit syndical et de faciliter, autant que possible, les activités des syndicats. Elles ont néanmoins retiré à l’UGTT le droit de permettre à ses dirigeants de se consacrer pleinement aux activités syndicales, ce qui les oblige à exécuter leurs fonctions habituelles au lieu de se consacrer au travail syndical, alors qu’il s’agit d’une pratique en vigueur depuis plus de cinquante ans. L’État tunisien ne s’est pas arrêté là et a traduit nombre de dirigeants syndicaux en justice. Beaucoup de dirigeants syndicaux ont été démis de leurs fonctions.
Les violations commises par le gouvernement pour isoler l’UGTT étant nombreuses, nous ne pouvons que demander à l’OIT d’intervenir aussi fermement que possible en l’espèce afin de s’attaquer aux manquements graves à la feuille de route que la société civile s’est proposé de suivre, dans le cadre d’une transition démocratique exemplaire, désormais avortée, qui fut un exemple dans le monde entier, à tel point qu’elle a mérité un prix Nobel de la paix.
L’OIT doit ainsi garantir la participation des organisations syndicales et sociales concernées et redonner au peuple tunisien l’espoir d’un avenir meilleur.
Membre gouvernemental, Pakistan – Le Pakistan comprend que la Tunisie s’engage auprès de l’OIT dans la mise en œuvre de la convention. Nous encourageons le gouvernement à développer sa coopération dans le cadre tripartite de l’OIT. Nous insistons sur le fait que le dialogue et l’engagement restent les meilleurs moyens d’aborder les préoccupations et de promouvoir les normes et droits du travail. Nous sommes convaincus que la collaboration continue entre la Tunisie et l’OIT favorisera la mise en place de solutions à l’amiable.
Membre travailleur, Afrique du Sud – Je prends la parole au nom des travailleurs d’Afrique du Sud pour informer la commission que le mouvement syndical est exposé à une attaque majeure, injustifiée et sans précédent de la part du pouvoir exécutif en Tunisie, qui a été planifiée par le biais de textes juridiques: le décret no 117 du 22 septembre 2021 et le décret no 54 de 2022. Ces décrets restreignent l’activité syndicale et les libertés en général et entraînent la constitution de dossiers contre les syndicalistes, l’isolement de beaucoup d’entre eux, la suppression des plans de carrière de certains et la suspension du statut de ceux qui se consacrent au travail syndical pour le compte de tous les dirigeants des organisations nationales, régionales et sectorielles.
Nous ne doutons pas de la férocité de l’attaque menée par les autorités contre l’UGTT. Nous avons suivi cette situation à travers de nombreux rapports reçus, depuis que l’UGTT et les trois organisations nationales ont annoncé le lancement d’une initiative nationale pour trouver des solutions et un consensus entre les différentes parties, en vue de faire face à l’approche unilatérale et autoritaire du chef de l’autorité exécutive, qui a réuni entre ses mains tous les pouvoirs, qu’ils soient législatifs, exécutifs ou judiciaires, afin de surmonter la crise économique étouffante qui a jeté une ombre sur les conditions sociales des Tunisiens.
Après cette annonce, le camarade Anis El Kaabi, secrétaire général du syndicat des agents de la STA, a été jeté en prison pour atteinte aux intérêts de la société après une grève de deux jours les 30 et 31 janvier 2023. Il est resté en détention pendant quatorze mois, ce qui est la durée maximale de la suspension judiciaire. Malgré sa libération provisoire, l’affaire est toujours en instance et sa liberté est toujours menacée, car il pourrait être à nouveau condamné à une lourde peine de prison.
Par ailleurs, 16 camarades du secteur des transports, menés par le secrétaire général du syndicat des transports, le camarade Wajih Al-Zaidi, ont été emmenés devant le bureau du ministre sous prétexte d’y semer le chaos. Le camarade Wajih a également été traduit en justice pour violation du décret no 54, qui tient pour responsable toute personne qui formule des déclarations critiques à l’égard de l’autorité exécutive dans les médias ou par l’intermédiaire des médias et des réseaux sociaux.
Depuis plusieurs mois, le camarade Senki Assoudi, secrétaire général de l’Union régionale du travail de Kasserine, est en prison pour des accusations malveillantes. Il a été arrêté juste après la visite du chef de l’État à l’établissement où il travaille. Le chef de l’État a prononcé un discours dans lequel il a directement accusé Senki Assoudi sans aucune preuve.
Le camarade Youssef Al-Awadni, secrétaire général de la fédération régionale de Sfax, a fait l’objet d’enquêtes de sécurité et de procès à plusieurs reprises en raison de grèves, de mouvements de protestation et de conflits du travail, et avec lui plus de 80 syndicalistes ont été déférés devant les tribunaux en raison de leur activité syndicale.
Cette année, le camarade Abdel Salam Al-Atawi, secrétaire général du syndicat des affaires religieuses, est décédé alors qu’il était contraint de se réfugier en Algérie après les abus dont il a fait l’objet avec 16 dirigeants syndicaux de ce secteur. Ils ont été expulsés de leur travail et certains d’entre eux ont été jugés sur la base d’accusations malveillantes, et le cas du dirigeant syndical décédé fait toujours l’objet d’un suivi de la part du Haut-Commissaire des Nations Unies. Il s’agit là de l’exemple même des violations de la convention.
Interprétation du chinois: Membre gouvernementale, Chine – Nous remercions la représentante du gouvernement de la Tunisie pour sa présentation. Nous avons lu le rapport de la commission d’experts avec attention et avons pris note des informations complémentaires soumises par le gouvernement.
Le gouvernement s’est engagé à remplir ses obligations conformément aux conventions pertinentes de l’OIT, à intégrer les normes internationales du travail, à mettre en œuvre la convention, à prendre au sérieux les recommandations de la commission d’experts et à fournir en temps utile les informations requises. Il a réalisé des progrès significatifs et nous apprécions sa coopération et ses initiatives proactives.
Le gouvernement a revu la législation du travail pour protéger les droits fondamentaux des travailleurs et leur offrir des environnements et conditions de travail décents. Il a entretenu une communication étroite avec le secrétariat de l’OIT, s’est engagé dans une collaboration étendue avec les partenaires sociaux et a établi des normes pour la représentation syndicale. Il a échangé avec les pays voisins concernant les pratiques en matière de législation syndicale et a accordé de l’importance à l’assistance technique du BIT. En ce qui concerne la promotion de la justice sociale en tant que priorité, le gouvernement continue de faire progresser la législation et la mise en œuvre de politiques sociales qui protègent également les droits des travailleurs.
Nous sommes heureux de voir que le gouvernement a rejoint la Coalition mondiale pour la justice sociale. Nous nous réjouissons de la coopération étroite et de l’engagement actif du gouvernement dans la promotion de la justice sociale avec les parties prenantes concernées. Nous prions instamment le Secrétariat de l’OIT d’améliorer la communication et les échanges avec le gouvernement de la Tunisie, de renforcer la compréhension mutuelle et la coopération, de fournir l’assistance technique nécessaire au gouvernement, d’aider le pays à renforcer sa capacité à respecter la législation et de promouvoir davantage son développement économique et social.
Membre travailleur, Brésil – Je souhaiterais tout d’abord exprimer toute ma solidarité aux travailleuses et aux travailleurs de Tunisie. Nous savons combien les pratiques autoritaires d’un gouvernement peuvent nuire à la démocratie, et en particulier au mouvement syndical.
En Tunisie, une campagne d’intimidation et de harcèlement est menée contre les syndicats: arrestations, poursuites pénales et mesures administratives. On peut mentionner par exemple l’arrestation de M. Anis El Kaabi, pour une grève légitime et légale, le licenciement de dirigeants syndicaux et le recours aux forces de l’ordre pour contrôler et restreindre l’activité syndicale.
Les observations et les préoccupations formulées par la commission d’experts, en particulier l’arrestation du camarade Anis El Kaabi, ont été confirmées par le gouvernement, dans son rapport, et représentent de graves violations des droits syndicaux.
La Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale contient plusieurs paragraphes sur cette question, notamment les paragraphes 76, 124 et 127.
Il convient d’insister sur le fait que la persécution de représentants concerne non seulement les dirigeants syndicaux du pays, mais aussi des étrangers chefs de file de l’opposition, avocats, juges, militants et journalistes.
L’arrestation des avocats Me Sonia Dahmani et Me Mehdi Zagrouba, au siège de l’Ordre national des avocats tunisiens, par exemple, constitue un cas extrêmement grave dont on pourrait parler jusqu’à la fin de la Conférence sans pour autant parvenir à examiner toutes les violations commises. C’est pour cela que je me concentre sur l’élément que nous considérons comme le plus cruel parmi les pratiques du gouvernement: les arrestations et les détentions.
La privation de liberté d’un être humain emprisonné pour ses convictions et ses pratiques politiques syndicales est un acte des plus répréhensibles qui constitue indéniablement l’une des formes de persécution les plus perverses. Séparer un individu de la société, de la proximité de ses proches et amis, en raison d’opinions politiques divergentes, contrevient à tous les traités internationaux relatifs aux droits de l’homme.
En guise de conclusion, compte tenu du niveau de réprobation exprimé ici, nous demandons que soit recommandée une mission de haut niveau, afin d’instaurer un environnement propice au dialogue social et d’examiner les divergences entre la législation et le respect des normes internationales du travail.
Membre gouvernemental, Indonésie – Le gouvernement de l’Indonésie prie instamment l’OIT de reconnaître et de saluer les progrès substantiels accomplis par la Tunisie dans la mise en œuvre de la convention. La Tunisie a fait preuve d’un engagement indéfectible en faveur des normes internationales du travail en procédant à des réformes législatives approfondies et en coopérant étroitement avec les organes de contrôle de l’OIT. Les efforts de la Tunisie pour aligner les lois nationales sur les normes internationales, associés à l’engagement actif des partenaires sociaux, soulignent son approche proactive de la défense des droits des travailleurs.
En donnant la priorité aux initiatives de justice sociale, la Tunisie donne un exemple louable aux autres nations. En outre, sa réglementation sur le pluralisme syndical et la garantie constitutionnelle du droit de grève soulignent l’engagement du pays en faveur d’un environnement de travail inclusif et équitable. Ces mesures reflètent l’engagement profond de la Tunisie à protéger les droits fondamentaux du travail et à veiller à ce que les voix des travailleurs soient respectées dans le cadre juridique.
Le gouvernement indonésien estime que les efforts de la Tunisie méritent une reconnaissance positive et un soutien continu de la part de l’OIT. Les progrès de ce pays en matière de renforcement des normes du travail et de promotion d’un environnement de travail équitable sont conformes aux valeurs fondamentales et à la mission de l’OIT.
Les mesures proactives et la détermination de la Tunisie à améliorer les conditions de travail constituent un exemple précieux pour les autres États Membres, démontrant les avantages de l’alignement de la législation nationale sur les normes internationales du travail et de la promotion de relations de collaboration avec les partenaires sociaux.
En conclusion, le gouvernement de l’Indonésie réitère son ferme soutien aux efforts de la Tunisie dans la mise en œuvre de la convention et encourage l’OIT à reconnaître ses progrès significatifs, en accordant une assistance et une reconnaissance continues à la Tunisie dans son processus de promotion et de protection des droits du travail.
Membre travailleuse, Norvège – Je m’exprime au nom des syndicats des pays nordiques et de Solidarnosc en Pologne. Nous avons tous été fiers lorsque le Quartet du dialogue national tunisien, composé d’organisations de travailleurs et d’employeurs, aux côtés des Avocats et de la Ligue des droits de l’homme, a reçu le prix Nobel de la paix en 2015 pour sa contribution décisive à la construction d’une démocratie pluraliste en Tunisie à la suite de la révolution du jasmin de 2011. Nous espérions une démocratie respectueuse des droits de l’homme et du travail, s’appuyant sur le dialogue social pour créer une société nouvelle et meilleure.
En février 2023, la Confédération norvégienne des syndicats et l’Organisation norvégienne des employeurs ont accueilli une délégation tripartite de Tunisie, dont deux ministres, afin d’échanger des expériences sur les structures tripartites et le dialogue social. Cependant, le dialogue et le travail constructifs pour surmonter les défis communs en Tunisie et consolider la confiance établie à Oslo n’ont pas été poursuivis et la situation s’est malheureusement détériorée.
Nous sommes extrêmement déçus de constater que la situation a évolué dans le mauvais sens. Récemment, des syndicalistes ont fait l’objet d’arrestations, d’accusations, de poursuites pénales et de mesures administratives. Le dialogue social est rompu et l’organisation syndicale UGTT ainsi que l’organisation des employeurs, la Confédération tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (UTICA), sont exclues du processus de modification des lois nationales. Malheureusement, le gouvernement actuel de la Tunisie a également décidé d’imposer des restrictions au libre fonctionnement des syndicats, y compris au droit de réunion et aux actions syndicales.
Le droit de s’organiser, de négocier collectivement et de mener leur activité sans intervention gouvernementale constitue des éléments clés du mandat de l’OIT, essentiels pour faire progresser la justice sociale et la prospérité partagée. En outre, un dialogue social qui fonctionne bien profite à l’économie et au pays, car il permet aux employeurs et aux syndicats de participer à la réglementation des relations professionnelles et il favorise l’harmonie, la productivité et la stabilité dans le monde du travail.
Nous prions instamment le gouvernement tunisien de prendre les mesures nécessaires pour se conformer à la convention, en s’assurant que ses lois et pratiques respectent la convention. Il est impératif que les syndicats puissent exercer pleinement leur droit d’organisation et de négociation collective et leur droit de mener leur activité sans intervention gouvernementale.
Enfin, nous appelons le gouvernement à revoir le dialogue social en Tunisie.
Interprétation de l’arabe: Membre gouvernementale, Libye – Nous soutenons les réformes entreprises par la Tunisie pour mettre en œuvre ses obligations au titre des conventions de l’OIT qu’elle a ratifiées, notamment la convention no 87 et la convention no 98. L’État de Libye salue les mesures prises par le gouvernement tunisien pour modifier progressivement sa législation du travail afin d’accorder aux travailleurs leurs droits fondamentaux et d’offrir des conditions de travail décentes dans les secteurs privé et public, ainsi que pour éradiquer toutes les formes de travail précaire et mettre en place un comité chargé de préparer un projet de loi visant à éliminer l’externalisation et à adopter des mécanismes juridiques qui permettraient d’éradiquer toutes les formes de travail précaire. Tous ces changements visent à garantir plus de libertés et sont conformes aux droits et principes consacrés par la Constitution tunisienne et par les normes de l’OIT.
Nous félicitons également la Tunisie de s’être inspirée des expériences et études comparatives des pays voisins. Nous saluons les nouvelles réformes entreprises et sa pleine coopération avec les organes de contrôle de l’OIT qui se traduit par la fourniture de réponses et de clarifications et la prise en compte des observations de la commission d’experts. Nous demandons le retrait du cas de la Tunisie de la liste des cas individuels, compte tenu des progrès réalisés dans la garantie des normes du travail.
Membre gouvernemental, Türkiye – La Türkiye se félicite de la révision de la définition du concept de services essentiels dans le Code du travail tunisien, par le biais d’un dialogue social et d’un consensus. Cette initiative, adoptée par les partenaires sociaux, a permis la signature d’accords entre employeurs et travailleurs sur la fourniture d’un service minimum dans les services essentiels, ce qui constitue une évolution importante.
Nous considérons comme une étape importante le travail initié par le ministère des Affaires sociales et la création de deux comités chargés de l’exécution de ce travail, afin d’éliminer les emplois précaires pour les travailleurs des secteurs public et privé, dans des conditions de travail décentes. La Türkiye salue les efforts entrepris par le gouvernement pour modifier progressivement sa législation du travail, afin d’améliorer les droits fondamentaux des travailleurs et d’offrir des conditions de travail décentes.
Nous apprécions le fait que le gouvernement travaille avec l’OIT, en coopération avec les partenaires sociaux, pour réglementer le pluralisme syndical en définissant des critères pour la représentation syndicale.
La Türkiye partage le point de vue de la Tunisie selon lequel le droit de grève n’est pas clairement inclus dans la convention. Nous reconnaissons l’importance de préserver le droit de grève en tant qu’élément intégral des droits et principes du travail dans la Constitution et les lois pertinentes.
Interprétation de l’arabe: Membre gouvernemental, Algérie – Nous avons écouté avec attention l’intervention du gouvernement concernant la mise en œuvre de la convention. Le gouvernement a fait savoir très clairement qu’il était décidé à appliquer les dispositions de cette convention et à travailler étroitement avec l’OIT, notamment pour définir les critères de la représentativité syndicale, et aussi ses obligations. Nous saluons effectivement cette coopération avec les organes de contrôle grâce aux informations qui ont été soumises, et notamment sur la base des recommandations de la commission d’experts.
Nous voyons d’un bon œil la diligence du gouvernement pour pouvoir se mettre en conformité avec les normes de l’OIT pour renforcer les droits fondamentaux au travail et prévoir des conditions de travail décentes dans le secteur public et privé, mais aussi toutes les tentatives de supprimer le travail précaire dans le cadre d’une plus grande justice sociale.
Le gouvernement a également mis sur pied un comité chargé de rédiger un projet de texte pour revoir le Code du travail et mettre effectivement un terme à toutes les formes d’externalisation du travail. Nous saluons cette coopération avec l’OIT et le dialogue avec les partenaires sociaux pour savoir quels seront les critères du pluralisme syndical en faisant intervenir un certain nombre d’associations professionnelles, notamment les plus représentatives, et nous pensons que ce dialogue général qui sera lancé par le gouvernement nous permettra d’atteindre le résultat souhaité.
Concernant le droit de grève, la Tunisie est pionnière en la matière et prévoit un certain nombre de garanties: cela figure dans la Constitution qui a été adoptée en 2022 et qui garantit ce droit et sa mise en œuvre sans obstacles. Elle a adopté les lois qui s’imposent. Il doit y avoir plus de dialogue avec le gouvernement pour renforcer encore les résultats obtenus à ce stade en matière de justice sociale en Tunisie.
Interprétation de l’arabe: Membre gouvernemental, Liban Le Liban se félicite de l’intervention de l’État frère de la Tunisie et nous souhaiterions la remercier pour le rapport qu’elle a fourni concernant la mise en œuvre de la convention. Nous voudrions saluer ses efforts et son engagement à respecter les normes de l’OIT et à aligner sa législation nationale sur les conventions de l’OIT et leurs dispositions, ainsi que sur les recommandations des différentes commissions de l’OIT, à savoir cette commission et la commission d’experts. Nous saluons également les efforts déployés pour améliorer son environnement de travail et instaurer une justice pour tous les partenaires sociaux. Cela fait partie intégrante du dialogue constructif et de la coopération de la Tunisie avec l’OIT qui visent à déterminer les mesures juridiques et administratives nécessaires pour améliorer les droits et principes fondamentaux au travail dans les secteurs public et privé et à garantir le droit de grève et la liberté syndicale dans un environnement de travail sain conformément à la Constitution de la Tunisie adoptée en 2022. En conclusion, nous saluons les progrès réalisés jusqu’à présent par la Tunisie dans la mise en place d’un environnement de travail décent et nous lui souhaitons beaucoup de succès dans ses efforts.
Interprétation de l’arabe: Membre gouvernemental, République arabe syrienne – La délégation de la République arabe syrienne remercie la délégation de la Tunisie pour les informations fournies. Nous saluons le fait que la Tunisie s’acquitte de ses obligations au titre des conventions de l’OIT et qu’elle mette pleinement en œuvre les dispositions de ces conventions en alignant sa législation nationale sur les normes de l’OIT.
Nous saluons également la pleine coopération de la Tunisie avec les organes de contrôle de notre institution, qui se traduit par la fourniture des réponses et clarifications requises et par la prise en compte des observations des commissions, notamment la commission d’experts. Nous devrions tous saluer et apprécier la modification progressive par la Tunisie de sa législation du travail afin de garantir les droits fondamentaux des travailleurs, d’offrir des environnements de travail décents dans les secteurs public et privé et d’éliminer toutes les formes de travail précaire. En outre, la Tunisie déploie des efforts considérables pour parvenir à la justice sociale, comme le montre clairement son adhésion précoce à la Coalition mondiale pour la justice sociale lancée par l’OIT en juin dernier. La délégation de la République arabe syrienne soutient la position du gouvernement tunisien qui est basée sur l’esprit de consensus, de coopération et de dialogue pour obtenir les résultats souhaités. Cette attitude sera positive pour toutes les parties concernées. Elle protégera les intérêts nationaux tunisiens conformément à sa souveraineté, à ses législations et à ses lois et garantira l’application des conventions de l’OIT conformément à la législation nationale tunisienne et en coopération avec l’OIT.
Membre gouvernemental, Philippines – À ce jour, la Tunisie reste déterminée dans son engagement à respecter ses obligations à l’égard de l’OIT. Nous avons observé la mise en œuvre diligente des conventions internationales du travail, de l’harmonisation de la législation nationale avec les normes internationales du travail et sa pleine coopération avec les organes de contrôle de l’OIT, comme en témoigne son engagement actif auprès de la commission d’experts.
Nous prenons note des efforts déployés par la Tunisie pour modifier progressivement sa législation du travail afin de renforcer les droits fondamentaux des travailleurs, de garantir des conditions de travail décentes et d’éliminer l’emploi précaire. Il convient de noter qu’un comité spécialisé est en train de réviser le Code du travail pour traiter la question de la sous-traitance et élaborer des cadres juridiques pour de meilleures conditions de travail.
En réponse aux observations de la commission d’experts, la Tunisie collabore avec l’OIT et les partenaires sociaux pour réglementer le pluralisme syndical. Nous constatons que la Tunisie a consulté les organisations professionnelles sur les critères de représentation syndicale, invitant les plus représentatives à une séance de travail. Nous encourageons le gouvernement à poursuivre le dialogue avec toutes les parties prenantes, avec le soutien de l’OIT.
Nous prenons également note des efforts déployés par la Tunisie pour tirer parti des expériences comparatives en échangeant des études avec les pays voisins sur la législation relative à la représentation syndicale. Nous faisons observer que, en veillant à ce que ce point reste une priorité dans le cadre de sa coopération avec l’OIT, la Tunisie a demandé et bénéficiera d’une assistance technique dans ce domaine.
En ce qui concerne le droit de grève, bien que la convention ne prévoie pas explicitement ce droit et que son interprétation soit actuellement soumise à la Cour internationale de Justice, la Tunisie a été pionnière dans la garantie et l’organisation de ce droit. La Constitution du 25 juillet 2022 consacre la liberté syndicale et le droit de grève. Le gouvernement s’abstient de promulguer des lois générales restrictives, ce qui permet aux parties d’exercer librement le droit de grève.
Membre gouvernemental, Gabon – Le Gabon remercie la Tunisie pour les informations qu’elle a bien voulu fournir à la commission concernant l’application de la convention.
Mon pays salue l’engagement du gouvernement à respecter ses obligations vis-à-vis de l’OIT qui se traduit entre autres par sa pleine et entière coopération avec ses organes de contrôle. À cet égard, nous apprécions le travail réalisé avec le BIT, en concertation avec les partenaires sociaux, pour donner suite aux observations de la commission d’experts sur la question de la représentativité syndicale.
Nous encourageons le gouvernement à relancer le dialogue avec les partenaires sociaux pour régler la question, en commençant par établir les critères de représentativité. Mon pays demande au Bureau de lui apporter l’assistance technique nécessaire à cette fin.
Par ailleurs, nous notons avec satisfaction que le droit de grève est inscrit dans la Constitution du 25 juillet 2022, en son article 41, ce qui est une avancée majeure, démontrant ainsi la volonté de ce pays à promouvoir les principes et droits fondamentaux au travail.
Enfin, ma délégation invite le gouvernement à poursuivre ses efforts en vue de la réalisation de la justice sociale, en concertation avec les partenaires sociaux et pour le bien-être de tous les Tunisiens.
Interprétation de l’arabe: Membre gouvernemental, Égypte – La délégation de l’Égypte se félicite de la déclaration du gouvernement de la Tunisie sur la mise en œuvre de la convention. Nous saluons son engagement réaffirmé à respecter ses obligations internationales et à mettre en œuvre les conventions de l’OIT, ainsi que son étroite coopération avec les organes de contrôle de l’OIT.
La Tunisie a parcouru un long chemin en termes de réformes et a réformé ses législations. Elle s’efforce de modifier progressivement et lentement sa législation du travail afin de renforcer les droits fondamentaux des travailleurs dans les secteurs privé et public et d’éliminer le travail et l’emploi précaires. À cet égard, la Tunisie a mis en place un comité chargé de réviser son Code du travail afin de mettre un terme à la sous-traitance. Nous saluons la coopération de la Tunisie avec l’OIT, en consultation avec les partenaires sociaux, s’agissant du renforcement de la liberté syndicale. Nous notons que la Tunisie a consulté des associations professionnelles et a appelé les associations les plus représentatives à participer à ce dialogue qui aura lieu prochainement.
Le pays s’appuie sur des études comparatives et des expériences des pays voisins en matière de législation sur la représentativité syndicale. Il veille à ce que la représentativité syndicale fasse partie intégrante de ses domaines de coopération avec l’OIT et soit une priorité. La Tunisie a été pionnière en matière de garantie du droit de grève. Elle a inscrit le droit de grève et la liberté syndicale dans sa Constitution de 2022. Le gouvernement a veillé à ne pas intervenir dans le droit de grève ou à le restreindre. En conclusion, nous saluons les efforts déployés par l’État tunisien et nous apprécions ses efforts pour se conformer aux normes de l’OIT. Nous espérons que la commission prendra en considération tous les efforts déployés lorsqu’elle formulera ses conclusions.
Membre gouvernementale, Nigéria – Le Nigéria souhaite soutenir fermement les efforts déployés par la Tunisie pour mettre en œuvre la convention et répondre aux observations de la commission d’experts. L’OIT est invitée à rappeler que les États Membres mettent en œuvre les conventions ratifiées en fonction des spécificités nationales et des plans de développement, ce que la Tunisie s’est engagée à faire. L’OIT est donc invitée à reconnaître les progrès accomplis par la Tunisie et son engagement à revoir ses lois et législations en vue de promouvoir les principes et droits fondamentaux au travail, le travail décent pour ses travailleurs, ainsi que les principes de la justice sociale.
La Tunisie, à cet égard, pourrait souhaiter se prévaloir d’une assistance technique du BIT, ce qui lui permettrait de réaliser son objectif de mettre effectivement en œuvre cette convention. Nous invitons la Tunisie à maintenir son engagement à respecter les meilleures pratiques dans son système d’administration du travail, en s’associant avec ses partenaires sociaux.
Membre gouvernementale, Cameroun – Le gouvernement a ratifié la convention no 87, tout comme la convention no 98 et la convention no 135. La ratification de ces conventions fondamentales est en général un indicateur de l’engagement de l’État à veiller au respect du droit humain fondamental de base qu’est la liberté dans le monde du travail.
La liberté étant un droit humain inaliénable, le gouvernement, à travers la Cour d’appel de la Tunisie, a décidé de libérer, et la cour de cassation a annulé le 5 mars 2024 la décision de la chambre d’accusation de renvoyer Anis El Kaabi, secrétaire général du syndicat des agents de la STA, devant la chambre criminelle.
La révision du Code du travail est une activité qui nécessite un long processus. En effet, outre les consultations de tous les acteurs du monde du travail, il est important de tenir compte des influences et des évolutions du monde moderne. La Tunisie a amorcé le processus dans le but de modifier progressivement la législation du travail, de renforcer les conditions de travail et les droits fondamentaux des travailleurs, d’éliminer toutes les formes de travail précaire en faisant de tous ces droits des priorités nationales. Ces efforts se traduisent par la mise en place de deux commissions au niveau de la présidence du gouvernement et le ministère des Affaires sociales chargé de préparer un projet de loi portant modification du Code du travail pour mettre fin à toutes les formes de travail précaire.
La convention no 138 fixe l’âge minimum d’accès à l’emploi à 16 ans et l’article 242 du Code du travail tunisien dispose que les mineurs de plus de 16 ans peuvent adhérer à un syndicat sauf si leur père ou tuteur s’y oppose. Il convient de noter que l’âge légal de la majorité a été unifié dans la législation tunisienne à 18 ans.
Il est important de poursuivre le dialogue social afin de garantir l’accès des étrangers aux fonctions de dirigeants syndicaux. Nous exhortons donc l’OIT à poursuivre un accompagnement de proximité et invitons le gouvernement à multiplier les plateformes de dialogue social nécessaires ainsi que les concertations pertinentes afin de rassurer toutes les parties prenantes du monde du travail et de garantir la préservation de la justice sociale.
Interprétation de l’arabe: Membre gouvernementale, Soudan – Le gouvernement du Soudan souhaite faire écho à la déclaration de la représentante de la Tunisie en réaffirmant que le pays honore effectivement ses engagements au titre des conventions qu’il a ratifiées, y compris cette convention. La convention no 87 régit la liberté syndicale et la protection du droit syndical, et c’est une convention que la Tunisie honore et respecte. Le Soudan salue également la coopération de la Tunisie avec les mécanismes de contrôle. Le pays soumet des rapports, fournit les informations demandées et coopère également avec la commission d’experts. Nous saluons les mesures prises par le gouvernement pour modifier le Code du travail afin de renforcer les droits fondamentaux des travailleurs et de garantir leur droit à un travail décent. Toutes ces mesures, prises ensemble, renforcent les libertés et le respect de la loi et sont pleinement conformes aux normes internationales du travail. La Tunisie a fait plus que cela, elle a appris de l’expérience d’autres pays. Elle a mis en commun des données et des informations avec eux et a partagé son expérience avec eux. Le droit de grève est actuellement examiné par la Cour internationale de Justice. Par conséquent, nous encourageons et invitons l’OIT à ne pas intervenir sur cette question, mais à continuer à fournir une assistance technique à la Tunisie pour le traitement des cas individuels.
Observateur, IndustriALL Global Union (IndustriALL) – Je prends la parole au nom d’IndustriALL, de la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) et de l’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (IBB).
Nous suivons de près l’évolution de la situation en Tunisie et la lutte de l’UGTT pour un véritable dialogue social et le respect de la liberté syndicale. Le gouvernement tunisien a indirectement suspendu les travaux du Conseil national du dialogue social depuis 2021 en ne nommant pas ses propres représentants au conseil.
Il a publié la circulaire no 20 en 2021, qui a entraîné de sérieuses restrictions à l’exercice de la négociation collective dans les secteurs, ainsi que la non-application des accords conclus entre les syndicats sectoriels et les ministères concernés. Ces mesures restrictives affectent environ 40 syndicats sectoriels. En outre, le gouvernement n’a pas mis en œuvre le contenu des accords de février 2021 et de septembre 2022. Par ailleurs, il a commencé à modifier unilatéralement la législation du travail et a exclu l’UGTT des discussions.
En ce qui concerne la liberté syndicale et la limitation du travail syndical, le gouvernement a annulé les concessions comme prévu dans les conventions et accords nationaux et internationaux, qui autorisaient les travailleurs occupant une fonction syndicale à travailler à temps plein pour l’UGTT (syndicalistes à temps plein). De plus, il a demandé aux syndicalistes de payer d’énormes compensations financières. C’est ce qui ressort des cas de Tahar Berberi, Bassam Ben Treka et Mohamed Bedera. Tahar Berberi, qui a été vice-président d’IndustriALL et est actuellement secrétaire général adjoint de l’UGTT pour le secteur privé, est poursuivi en justice et il lui est également interdit de voyager à l’étranger en raison de ses activités syndicales.
En Tunisie, des dirigeants syndicaux subissent des licenciements et des mutations en raison de leurs activités syndicales. Ils font l’objet de procès montés de toutes pièces en raison de leurs activités syndicales, et certains ont été emprisonnés. Le cas du confrère Anis El Kaabi du secteur des transports, qui a passé quatorze mois en prison, est un exemple flagrant de ces violations.
N’oublions pas non plus les restrictions et les attaques contre les actions de solidarité syndicale. L’année dernière, la consœur Esther Lynch, secrétaire générale de la CES, a reçu l’ordre du gouvernement de quitter le pays après avoir participé à une manifestation contre la répression des syndicats et des droits des travailleurs. Esther Lynch s’était rendue en Tunisie dans le cadre d’une délégation de dirigeants syndicaux internationaux pour manifester sa solidarité avec l’UGTT, dont les membres font l’objet d’une campagne de harcèlement de la part du gouvernement du pays.
Nous appelons le gouvernement à mettre en œuvre tous les accords signés entre le gouvernement et l’UGTT et les partenaires sociaux, à mettre fin à toutes les formes de harcèlement des dirigeants syndicaux, à respecter les accords nationaux et internationaux et les pratiques nationales bien établies en matière de représentation syndicale.
Par conséquent, il serait impératif que l’OIT prenne des mesures urgentes à haut niveau dans le pays et rencontre les partenaires sociaux pour s’assurer que les droits à la liberté syndicale et à la négociation collective sont respectés.
Président – J’ai l’honneur de donner la parole à la représentante du gouvernement de la Tunisie pour ses remarques finales.
Interprétation de l’arabe: Représentante gouvernementale – Je tiens à remercier tous les intervenants et je prends note avec satisfaction que la plupart des contributions ont salué les efforts consentis par la Tunisie afin de développer les législations en termes de travail, liberté syndicale et consacrer ces principes en droit et dans la pratique. Cela reflète l’intérêt à suivre le parcours stable de la Tunisie visant à créer un environnement syndical qui encourage le dialogue.
À cet égard, je tiens à éclaircir la position ferme de la Tunisie à traiter toutes les personnes sur un pied d’égalité avec le respect de l’indépendance judiciaire. Nous sommes tous objet de suivi judiciaire, syndicaliste ou pas. Être un syndicaliste ne dispense pas la personne d’un suivi judiciaire pour avoir commis des actes qui ne sont pas liés à ses activités syndicales. Donc l’examen de ces cas est lié et fait sur la base de l’acte et non pas l’identité de la personne. Ces procédures sont ouvertes dans tous les domaines, même dans le domaine des organisations syndicales. Un syndicaliste peut être poursuivi s’il a violé le règlement d’un syndicat. Pouvonsnous dans ce cas interpréter cette procédure comme étant un harcèlement et un suivi contre les syndicalistes? Non, parce que l’organisation syndicale est régie par des lois et des règles, et l’organisation a le droit de créer un mécanisme de défense contre toutes les personnes qui peuvent ne pas respecter le règlement. Voilà pourquoi l’État tunisien garantit le droit de grève et le droit de travail sur un pied d’égalité. La poursuite judiciaire des personnes qui commettent des abus, à savoir interdire la liberté de travail, n’a rien à voir avec la violation du droit syndical, mais s’inscrit dans la liberté individuelle dans le travail. Voilà pourquoi, toutes les interventions qui surviennent, surviennent pour la poursuite d’actes qui sont interdits au niveau pénal. Il est nécessaire d’éclaircir la différence entre deux situations. D’un côté, le droit syndical et le droit à la grève, et de l’autre un abus du règlement et de l’ordre public et le fait de saper la liberté de travail. En ce qui concerne le dialogue social, comme à l’accoutumée, le gouvernement a mené des négociations avec l’UGTT sur la hausse des salaires en 2021, 2022 2023 et 2024 concernant les travailleurs du secteur public et privé. Ceci est gage de l’existence d’un dialogue social. Dans le même contexte, nous avons élaboré 42 mesures dans le cadre d’une convention-cadre entre le gouvernement et les syndicats, nous avons également revu un nombre d’autres accords et nous avons commencé des négociations concernant ces accords comme des accords dans le domaine du textile, et d’autres secteurs aussi. Comme indice de dialogue social en Tunisie, je tiens à vous présenter quelques chiffres qui ont une implication et donnent une idée de l’existence du dialogue social. En 2023, nous avons enregistré 380 préavis de grève, 215 préavis ont été retirés par le dialogue entre les partenaires sociaux par le biais de la négociation. Ceci prouve qu’il y a un dialogue social en Tunisie.
En ce qui concerne l’application du décret no 21, je tiens à vous informer que ce décret est relatif aux institutions publiques uniquement. Cela n’a jamais sapé la négociation collective dans les institutions publiques et n’a jamais imposé des restrictions sur le travail syndical. En 2023, nous avons reçu 152 préavis de grèves de l’UGTT dans le secteur public concernant le décret no 21. Nous avons pu retirer 65 pour cent de ces préavis de grève, ce qui prouve que ce décret n’a pas eu un impact sur la négociation et le dialogue social. Le but de ce décret est plutôt de garantir la mise en œuvre des conventions signées entre l’administration et les syndicats.
Pour conclure, il est utile de rappeler que la plupart des intervenants dans cette Conférence et au niveau de toutes les commissions se sont mis d’accord sur les changements que connaît le monde à des niveaux différents, notamment le monde au travail par l’émergence de nouvelles formes de travail et l’impact que cela a sur les rapports de travail, et sans oublier l’impact des changements démographiques, la migration, le changement climatique qui auront des répercussions sur toutes les sociétés, tous les travailleurs et toutes les institutions. Ces défis nécessitent de respecter la législation du travail, de consacrer les éléments d’un travail décent et durable, les droits et principes fondamentaux au travail, et de faire face au modèle de travail précaire et d’assurer une protection sociale à tous les travailleurs, conformément aux normes internationales du travail. Cela confirme qu’il est urgent de formuler un nouveau contrat social surtout à la lumière des transformations importantes que connaissent de nombreux pays dans notre pays. Et la Tunisie, à l’instar d’autres pays, est impactée par toutes ces transformations. Elle a, par exemple, a connu de profondes transformations sociales et politiques qui ont conduit actuellement à une période de construction. Nous élaborons une vision qui établit le concept et le rôle de l’État dans la prospérité sociale. Cette vision inclut des efforts visant à répondre aux besoins économiques, sociaux, sanitaires et culturels des individus. De plus, il faut mentionner la difficulté de la situation actuelle et la volonté du gouvernement d’assurer une protection sociale appropriée aux groupes vulnérables. Cela nécessite de donner la priorité à l’aspect social comparé aux autres aspects. Cet effort comprend le ciblage des groupes les plus vulnérables, la lutte contre le chômage, l’amélioration des conditions de vie, le fait de donner aux citoyens les ressources nécessaires pour vivre dignement en mettant l’être humain au centre de l’attention, et ce de façon durable. Nous sommes conscients de ces enjeux. Voilà pourquoi nous étions, et ce malgré la situation difficile, parmi les premiers à adhérer à la Coalition mondiale pour la justice sociale. Cela reflète notre volonté d’aller de l’avant vers la recherche de l’équilibre difficile entre les affaires économiques et les affaires sociales d’une manière qui sert les fondements et les principes de la justice sociale et consacre les droits de l’homme dans toutes leurs dimensions. Nous saluons toutes les interventions qui ont été faites lors de cette séance et les orientations que nous pouvons prendre en considération dans notre parcours vers l’établissement de la justice sociale. Nous comptons énormément sur le soutien technique du BIT dans ce domaine.
Membres employeurs – Nous voudrions, une fois de plus, remercier la représentante du gouvernement tunisien pour les informations écrites et orales qu’elle a fournies, mais aussi pour l’engagement exprimé ici aujourd’hui de se prévaloir de l’assistance technique du BIT afin de progresser sur les défis que nous avons tous évoqués. Cette initiative est louable. S’agissant des observations de la commission d’experts, les membres employeurs souhaiteraient recommander au gouvernement de revoir les points suivants du Code du travail en vue de l’harmoniser avec la convention: i) les droits syndicaux des travailleurs mineurs qui ont atteint l’âge d’admission à l’emploi; ii) la capacité des travailleurs étrangers à accéder à des fonctions de dirigeants syndicaux après une période raisonnable de résidence dans le pays; et iii) la garantie que les questions de représentativité des organisations de travailleurs soient réglées à l’aide de critères objectifs, préétablis et clairs.
Membres travailleurs – Nous remercions le gouvernement pour les explications qu’il a apportées à notre commission. Nous avons pris note des observations faites par les employeurs concernant le droit de grève. Nous nous limiterons à rappeler que nous ne partageons pas cette analyse et renvoyons à nos positions en la matière.
Nous invitons le gouvernement à donner suite aux différents points soulevés, tant par la commission d’experts que durant notre discussion d’aujourd’hui. Il est fondamental que le gouvernement assure un climat exempt d’intimidation qui est une condition sine qua non pour réaliser la liberté syndicale. Pour donner une nouvelle impulsion au dialogue social dans le pays, nous l’invitons à accepter une mission de haut niveau.
Afin de faciliter la tenue et l’organisation de cette mission, nous invitons le gouvernement à assurer la présence sur place des organisations représentant les travailleurs et les employeurs, la CSI et l’Organisation internationale des employeurs. Ces organisations pourraient par conséquent assister leurs affiliés dans ce cadre.
Je terminerai en rappelant que le syndicalisme en Tunisie a toujours participé aux grandes étapes de l’histoire du pays. Que ce soit lors du combat pour l’indépendance ou lors des autres moments marquants, il a toujours été une force constructive. Nous invitons le gouvernement à s’appuyer sur cette force pour construire la prospérité du pays.

Conclusions de la commission

La commission a pris note des informations écrites et orales fournies par le gouvernement et de la discussion qui a suivi.
La commission a pris note avec une profonde préoccupation des informations relatives aux arrestations effectuées, aux accusations portées, aux poursuites pénales engagées et aux mesures administratives prises à l’encontre de syndicalistes pour avoir exercé des activités protégées par la convention.
Prenant en compte la discussion qui a eu lieu, la commission a instamment prié le gouvernement de la Tunisie, en consultation avec les partenaires sociaux, de:
  • rétablir un environnement propice à l’exercice de la liberté syndicale sans intimidations, menaces et arrestations arbitraires;
  • veiller à ce que les organisations de travailleurs et d’employeurs puissent organiser leur gestion et leurs activités et formuler leur programme d’action en toute liberté, conformément à la convention;
  • veiller à ce que les représentants d’organisations de travailleurs et d’employeurs indépendantes internationales soient autorisés à soutenir leurs affiliés conformément aux articles 5 et 6 de la convention;
  • veiller à mettre le Code du travail en conformité avec la convention;
  • veiller à ce que la détermination des organisations représentatives au niveau du secteur et de l’entreprise soit fondée sur des critères clairs, préétablis et objectifs.
La commission a invité le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du BIT, si nécessaire, pour mettre en œuvre les recommandations susmentionnées.
La commission a prié le gouvernement de faire rapport à la commission d’experts sur l’ensemble des mesures prises et les progrès accomplis dans la mise en œuvre des recommandations de la commission et sur toutes les informations manquantes demandées par la commission d’experts avant le 1er septembre 2024.
Représentante gouvernementale – D’emblée, j’aimerais remercier les membres de la commission pour leur professionnalisme et leur neutralité dans l’examen des différents cas qui ont été présentés et soumis pendant cette session.
Nous nous félicitons des recommandations adoptées concernant la mise en œuvre de la liberté syndicale et du droit syndical. Nous suivrons les recommandations en coopération avec les partenaires sociaux. Bien que nos opinions puissent diverger, nous partageons tous le même sens d’attachement national, et nous voulons édifier un pont consensuel grâce à un dialogue consensuel qui respectera la diversité de nos rôles respectifs.
En Tunisie, nous pensons tous que le dialogue doit être un choix. Nous devons pratiquer cette option, nous devons la choisir dans un engagement renouvelé. Cela ne doit pas être imposé par la contrainte. Nous nous engageons en faveur du dialogue, et nous considérons que l’OIT est notre partenaire historique, partenaire avec qui nous avons partagé beaucoup de préoccupations et beaucoup de souhaits, notamment construire un monde du travail meilleur, plus prospère, où les droits humains d’une manière large sont respectés sur la base du concept de monde de travail et de partage de responsabilités. C’est la raison pour laquelle nous aimerions saluer toute offre d’assistance technique par cette Organisation qui a toujours répondu présente lorsque nous avions besoin d’elle.

Observation (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

La commission prend note des observations de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) et de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues le 30 août et le 1er septembre 2023, respectivement, alléguant des violations des droits syndicaux de la part des autorités. L’UGTT et la CSI allèguent, en particulier, des arrestations, des accusations et poursuites pénales et mesures administratives prises à l’encontre des syndicalistes. La commission note avec préoccupation l’arrestation du secrétaire général du syndicat des agents de la Société Tunisie Autoroutes, M. Anis Kaâbi, dans le cadre d’une grève organisée les 30 et 31 janvier 2023 pour avoir causé des «pertes financières» dues à l’ouverture de voies gratuitement pendant la grève; selon l’UGTT, M. Kaâbi est toujours en détention. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires en réponse à ces observations.
Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de fournir le jugement attendu de la Cour d’appel concernant le Congrès extraordinaire non-électif de l’UGTT. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle la plainte contre l’UGTT a été déposée par un groupe de syndicalistes visant à faire annuler le congrès extraordinaire non-électif de l’UGTT et que le pouvoir exécutif n’est pas impliqué dans cette décision ayant entrainé l’annulation du Congrès. Il s’agit d’une question interne à un syndicat. Le gouvernement informe qu’en date du 13 octobre 2022 la Cour d’appel de Tunis a statué en faveur de la validation du congrès extraordinaire non-électif de l’UGTT, annulant ainsi le jugement de première instance émis en novembre 2021.
Articles 2 et 3 de la convention. Modifications législatives. Dans ses commentaires précédents, la commission avait instamment prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires en vue de modifier les articles suivants du Code du travail:
  • article 242, afin de garantir que les mineurs ayant atteint l’âge minimum légal d’admission à l’emploi (16 ans selon l’article 53 du Code) peuvent exercer leurs droits syndicaux sans autorisation parentale ou du tuteur;
  • article 251, afin de permettre aux travailleurs étrangers d’accéder aux fonctions de dirigeants syndicaux, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays d’accueil; et
  • articles 376bis, 376ter, 387 et 388 qui concernent des restrictions à l’exercice du droit de grève (approbation de la centrale syndicale pour déclencher la grève; mention obligatoire de la durée de la grève dans le préavis; et possibilité d’imposer des sanctions pénales en cas de grève illégale);
La commission note à nouveau avec un profond regret que le gouvernement ne fait état d’aucun progrès concernant la mise en conformité de la législation avec la convention et se borne à indiquer qu’une révision au Code du travail exige des consultations avec les partenaires sociaux, et qu’aucune modification législative ne peut être effectuée unilatéralement sans la participation des organisations concernées. La commission, une fois encore, prie instamment le gouvernement de prendre les mesures qui s’imposent, en réponse à ses recommandations de longue date et en consultation avec les partenaires sociaux, afin de donner pleinement effet aux dispositions de la convention.
La commission avait aussi prié le gouvernement de faire état de l’adoption du décret prévu par l’article 381ter du code (détermination de la liste des services essentiels par décret). En l’absence d’informations fournies par le gouvernement,la commission prie instamment le gouvernement de faire état de l’adoption du décret et d’acheminer une copie dès son adoption.
Droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d’action sans intervention des autorités publiques. Dans son commentaire précédent, la commission avait pris note de l’arrêté du 26 septembre 2018 portant fixation des critères de représentativité syndicale à l’échelle nationale et avait prié le gouvernement de préciser la périodicité et le mécanisme de mesure de l’audience syndicale aux fins de la désignation des membres du Conseil national du dialogue social. La commission avait aussi prié le gouvernement d’engager des consultations inclusives avec toutes les organisations de travailleurs et d’employeurs concernées, afin de garantir que la détermination des organisations représentatives au niveau des secteurs et des entreprises soit également fondée sur des critères clairs, préétablis et objectifs. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle, en vertu de l’article 39 du Code du travail, au cas où un différend s’élèverait au sujet du caractère de la plus grande représentativité d’une ou plusieurs organisations syndicales, la question est réglée par arrêté du secrétaire d’État à la jeunesse, aux sports et aux affaires sociales après avis du Conseil nationale du dialogue social et n’est pas soumis à une périodicité définie. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle, dans l’attente d’un consensus entre les organisations des travailleurs et des employeurs représentés au sein du Conseil national du dialogue social, l’article 39 n’a pas encore été amendé. La commission prie une nouvelle fois le gouvernement d’indiquer toutes les mesures prises afin de garantir que la détermination des organisations représentatives au niveau des secteurs et des entreprises soit fondée sur des critères clairs, préétablis et objectifs.Elle veut croire que ces critères seront adoptés dans un avenir très proche, après consultation de toutes les organisations de travailleurs et d’employeurs concernées.

Observation (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues le 1er septembre 2022 qui contiennent des allégations d’ingérence dans les activités syndicales, concernant i) l’annulation par le Tribunal de première instance de Tunis, en décembre 2021, de la décision du Conseil national de de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) de convoquer un congrès extraordinaire non électif, et ii) des atteintes au droit de grève dans le secteur de la radiodiffusion, avec le déploiement important de forces de l’ordre et la conduite d’interrogatoires. La commission prend note de la réponse du gouvernement, datée du 28 octobre 2022, qui indique à cet égard que l’UGTT a fait appel de la décision du tribunal de première instance et que les forces de police n’ont été déployées que dans le but de veiller au maintien de l’ordre public. La commission prend également note de la réponse du gouvernement aux observations formulées par la CSI en 2018 concernant des allégations d’intimidations et de menaces à l’encontre de l’UGTT. La commission note que le gouvernement indique ne pas avoir officiellement reçu de réclamations à cet égard de la part de l’UGTT et que de telles allégations n’ont pas non plus été évoquées lors de réunions avec ses membres, ni à l’occasion de négociations sociales ni dans les réunions du Conseil national du dialogue social (CNDS). Au vu de ce qui précède, la commission souhaite rappeler l’obligation qui incombe aux États, aux termes de la convention, de veiller à ce que les dirigeants des organisations syndicales et leurs membres puissent développer leurs activités sans entrave dans un climat exempt de violence, de pressions et de menaces de toutes sortes. S’agissant en particulier de l’annulation du Congrès extraordinaire non électif de l’UGTT, la commission prie le gouvernement de fournir le jugement de la Cour d’appel, dès que celui-ci sera rendu.
Articles 2 et 3 de la convention. Modifications législatives. La commission note avec un profondregretque le gouvernement ne fait état d’aucun progrès concernant la mise en conformité de la législation avec la convention et qu’il ne fait en réalité que reprendre les explications déjà transmises en réponse aux recommandations que la commission formule depuis fort longtemps. La commission se voit obligée de rappeler ci-après l’essentiel de ses recommandations et, une fois encore, prie instamment le gouvernement de prendre les mesures qui s’imposent afin de donner pleinement effet aux dispositions de la convention.
–Droit des travailleurs sans distinction d’aucune sorte de constituer des organisations et de s’y affilier.La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 242 du Code du travail, afin de garantir que les mineurs ayant atteint l’âge minimum légal d’admission à l’emploi (16 ans selon l’article 53 du Code) peuvent exercer leurs droits syndicaux sans autorisation parentale ou du tuteur.
–Droit des organisations d’élire librement leurs représentants. La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessairespour modifier l’article 251 du Code du travail afin de permettre aux travailleurs étrangers d’accéder aux fonctions de dirigeants syndicaux, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays d’accueil.
–Droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d’action.La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de modifier les articles suivants du Code du travail qui concernent des restrictions à l’exercice du droit de grève: article 376bis (approbation de la centrale syndicale pour déclencher la grève); article 376ter (mention obligatoire de la durée de la grève dans le préavis); et articles 387 et 388 (possibilité d’imposer des sanctions pénales en cas de grève illégale). S’agissant de l’article 381ter du Code (détermination de la liste des services essentiels par décret), la commission prie à nouveau le gouvernement de faire état de l’adoption du décret prévu par cet article.
Droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d’action sans intervention des autorités publiques. La commission prend note de l’arrêté du 26 septembre 2018 portant fixation des critères de représentativité syndicale à l’échelle nationale, qui comprennent: i) le nombre d’adhérents jusqu’à la fin de 2017; ii) la date de la tenue du dernier congrès électoral de l’organisation syndicale; iii) le nombre des structures sectorielles de l’organisation syndicale et la nature de son activité; et iv) le nombre des structures locales et régionales de l’organisation concernée. La commission note les indications du gouvernement selon lesquelles, en application de l’arrêté susmentionné, le ministre en charge des affaires sociales a désigné les organisations suivantes comme étant les plus représentatives à l’échelle nationale pour la nomination des membres du CNDS, à savoir: l’UGTT pour les organisations de travailleurs; l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (UTICA), pour les organisations d’employeurs du secteur non agricole; et l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (UTAP), pour les organisations d’employeurs du secteur agricole. Observant que la représentativité syndicale a été arrêtée en prenant en compte le nombre d’adhérents à la fin de l’année 2017, la commission prie le gouvernement de préciser dans son prochain rapport la périodicité et le mécanisme de mesure de l’audience syndicale aux fins de la désignation des membres du CNDS. À l’instar du Comité de la liberté syndicale dans le cadre du cas no 2994 (400e rapport, novembre 2022, paragr. 70), la commission prie aussi le gouvernement d’engager des consultations inclusives avec toutes les organisations de travailleurs et d’employeurs concernées, afin de garantir que la détermination des organisations représentatives au niveau des secteurs et des entreprises soit également fondée sur des critères clairs, préétablis et objectifs.La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute mesure prise à cet égard.
[Le gouvernement est prié de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2023.]

Observation (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues le 1er septembre 2018. Elle prie le gouvernement de fournir sa réponse à cet égard. Rappelant les allégations graves reçues précédemment de la CSI concernant des intimidations et menaces proférées via des appels anonymes à l’encontre de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) et de ses dirigeants, et en l’absence de réponse à cet égard, la commission prie instamment le gouvernement d’indiquer sans délai toute enquête diligentée et toutes mesures éventuellement prises pour la protection des dirigeants de l’UGTT afin que l’organisation syndicale puisse développer ses activités sans entrave.
Articles 2 et 3 de la convention. Modifications législatives. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait noté l’indication du gouvernement selon laquelle il étudiait la possibilité de mettre certaines dispositions du Code du travail en conformité avec la convention comme demandé par la commission. A cet égard, la commission note avec regret que le gouvernement se borne pour l’essentiel à fournir les explications déjà transmises dans ses précédents rapports en réponse aux recommandations de modification. En conséquence, la commission se voit obligée de les réitérer et prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires à cet égard afin de donner pleinement effet à la convention.
Droit des travailleurs sans distinction d’aucune sorte de constituer des organisations et de s’y affilier. La commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 242 du Code du travail qui prévoit que les mineurs âgés de plus de 16 ans peuvent adhérer aux syndicats, sauf opposition de leur père ou tuteur. La commission note que le gouvernement réitère de nouveau que la sauvegarde instaurée n’est motivée que par des considérations juridiques relatives à l’exercice de l’autorité du parent ou du tuteur conformément à l’article 93bis du Code des obligations et des contrats. Le gouvernement indique de nouveau que l’article 242 du Code du travail n’a pas fait l’objet de contestation par l’organisation représentative des travailleurs. La commission se voit obligée de rappeler une nouvelle fois que toute distinction en matière d’affiliation syndicale, impliquant l’autorisation parentale lorsque les mineurs ont atteint l’âge d’accès à l’emploi, est contraire à l’article 2 de la convention. En conséquence, la commission prie une nouvelle fois le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 242 du Code du travail afin de garantir que les mineurs ayant atteint l’âge minimum légal d’admission à l’emploi (16 ans selon l’article 53 du Code du travail) peuvent exercer leurs droits syndicaux sans autorisation parentale ou du tuteur.
Droit des organisations d’élire librement leurs représentants. La commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 251 du Code du travail de façon à garantir aux organisations de travailleurs le droit d’élire librement leurs représentants, y compris parmi les travailleurs étrangers, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays. Elle note que le gouvernement réitère qu’il ne s’agit nullement d’une limitation du droit syndical des étrangers qui peuvent adhérer librement à des syndicats et exercer tous les droits y relatifs. Cependant, le gouvernement confirme que ces derniers ne peuvent participer à la direction des syndicats en question. La commission se voit obligée de rappeler que, conformément à l’article 3 de la convention, la législation nationale devrait permettre aux travailleurs étrangers d’accéder aux fonctions de dirigeants syndicaux, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays d’accueil, et elle prie une nouvelle fois le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 251 du Code du travail dans le sens indiqué.
Droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d’action. La commission avait demandé au gouvernement de modifier les articles 376bis, alinéa 2, 376ter, 381ter, 387 et 388 du Code du travail. La commission note que le gouvernement réitère que les dispositions en question visent à permettre aux employeurs d’être informés de la grève et à engager des procédures de conciliation permettant d’éviter le conflit, et que les sanctions prévues visent à éviter tout recours anarchique à la grève qui risque de mettre en péril l’avenir de l’entreprise, le climat social ou l’intérêt du pays. En ce qui concerne les peines encourues par les grévistes en cas de grève illégale, le gouvernement indique qu’il appartient au juge saisi d’apprécier la gravité des infractions commises et que ce dernier a toute latitude de prononcer une simple amende au lieu d’une peine d’emprisonnement. La commission prie le gouvernement de revoir ces dispositions en consultation avec les partenaires sociaux concernés en vue de leur éventuelle modification et de faire état de toute mesure prise à cet égard.
S’agissant de l’alinéa 2 de l’article 376bis du Code du travail, le gouvernement précise que, lors de consultations menées en 1994 et 1996 sur la réforme du Code du travail, les organisations représentatives d’employeurs et de travailleurs ont indiqué vouloir maintenir cette disposition qui, selon elles, permettrait à l’organisation faîtière d’être toujours informée préalablement à toute grève ou tout lock-out, cela en vue d’un règlement plus efficace du conflit. Le gouvernement ajoute que les syndicats de base insistent souvent sur l’intervention d’une organisation faîtière pour consolider l’exercice du droit de grève. A cet égard, la commission estime utile de rappeler que l’exigence d’obtenir l’approbation préalable de la grève par une organisation syndicale de degré supérieur ne constituerait pas en soi une entrave à la liberté des syndicats concernés d’organiser leurs activités si cette exigence émane du libre choix des syndicats concernés, par exemple lorsqu’elle figure dans les statuts de l’organisation faîtière auxquels ont librement adhéré lesdits syndicats. En revanche, la commission est d’avis qu’une telle exigence contenue dans la législation nationale – comme en l’espèce – constitue une violation de l’article 3 de la convention. En conséquence, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 376bis, alinéa 2, du Code du travail dans le respect du principe rappelé ci-dessus.
S’agissant de ses commentaires précédents relatifs à l’article 381ter du Code du travail, la commission note la réponse du gouvernement qui indique que la définition du service essentiel contenue dans cet article, reprenant celle des organes de contrôle de l’OIT, et la démarche consensuelle qui caractérise la détermination des services minima avec les partenaires sociaux ont toujours permis d’éviter le recours à l’arbitrage prévu. La commission prie à nouveau le gouvernement de faire état, le cas échéant, de l’adoption du décret prévu par cet article du Code du travail.
Droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d’action sans intervention des autorités publiques. La commission prend note de l’adoption de la loi n° 2017-54 du 24 juillet 2017 portant création du Conseil national du dialogue social et fixant ses attributions et les modalités de son fonctionnement. La commission note également l’indication du gouvernement selon laquelle, afin de faciliter la nomination des membres dudit conseil, le ministère du Travail est en train d’accomplir les procédures d’adoption d’un arrêté portant fixation des critères de représentativité syndicale à l’échelle nationale. Ces critères comprennent: i) le nombre d’adhérents jusqu’à la fin de 2017; ii) la date du dernier congrès électoral; iii) les structures sectorielles et leur nature; et iv) les structures locales et régionales. Le gouvernement ajoute qu’il informera le Bureau de l’adoption de cet arrêté qui permettra de désigner l’organisation la plus représentative à l’échelle nationale qui sera représentée au Conseil national du dialogue social. Tout en notant ce progrès tangible vers la détermination de critères de la représentativité syndicale qu’elle demande au gouvernement depuis plusieurs années, la commission souligne toutefois que ses commentaires rappelaient également la nécessité pour le gouvernement d’engager dans ce sens des consultations tripartites inclusives, à savoir dans un cadre qui comprend l’ensemble des organisations concernées par la question. En outre, la commission relève que, aux termes de l’article 8 de la loi no 2017-54, l’assemblée générale du conseil se compose d’un nombre égal de représentants du gouvernement, de représentants des organisations les plus représentatives des travailleurs et de représentants des organisations les plus représentatives des employeurs dans les secteurs agricole et non agricole. La commission croit comprendre que la représentation des partenaires sociaux comprendra les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives, cela en fonction des résultats des élections qui se dérouleront sur la base des critères de représentativité retenus dans l’arrêté gouvernemental. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur tout fait nouveau à cet égard, d’indiquer notamment les consultations tripartites tenues sur les critères de représentativité, de fournir copie de l’arrêté gouvernemental une fois adopté et de l’informer, le cas échéant, sur la composition du Conseil national du dialogue social.

Observation (CEACR) - adoptée 2015, publiée 105ème session CIT (2016)

La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues en 2013 et 2014 ainsi que celles reçues le 1er septembre 2015. La commission note que ces observations portent pour l’essentiel sur des questions d’ordre législatif déjà soulevées par la commission, mais également sur des intimidations et menaces proférées via des appels anonymes à l’encontre de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) et de ses dirigeants. Tout en notant les éléments de réponse fournis par le gouvernement en 2014 sur certaines questions législatives soulevées, la commission prie instamment le gouvernement de fournir ses commentaires à l’égard des graves allégations de menaces envers l’UGTT, et d’indiquer notamment les mesures éventuellement prises pour la protection de ses dirigeants afin que l’organisation syndicale puisse développer ses activités sans entrave. La commission prend également note des observations de caractère général de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) reçues le 1er septembre 2015.
Articles 2 et 3 de la convention. Modifications législatives. La commission avait précédemment exprimé l’espoir que, dans le cadre des réformes législatives qui devaient accompagner l’adoption d’une nouvelle Constitution, les questions faisant l’objet de ses commentaires depuis de nombreuses années seraient prises en compte. La commission note que, dans ses rapports successifs de 2014 et de 2015, le gouvernement indique que la nouvelle Constitution de la Tunisie, adoptée le 26 janvier 2014, consacre le droit syndical et qu’il étudie désormais la possibilité de mettre certaines dispositions du Code du travail en conformité avec la convention. A cet égard, tout en notant les explications fournies sur certaines dispositions qui faisaient l’objet de commentaires, la commission se voit obligée de rappeler au gouvernement la nécessité de modifier les dispositions suivantes du Code du travail pour donner pleinement effet à la convention.
Droit des travailleurs sans distinction d’aucune sorte de constituer des organisations et de s’y affilier. La commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 242 du Code du travail qui prévoit que les mineurs âgés de plus de 16 ans peuvent adhérer aux syndicats, sauf opposition de leur père ou tuteur. La commission note que le gouvernement réitère de nouveau que la sauvegarde instaurée n’est motivée que par des considérations juridiques relatives à l’exercice de l’autorité du parent ou du tuteur conformément à l’article 93bis du Code des obligations et des contrats. Le gouvernement indique également de nouveau que l’article 242 du Code du travail n’a pas fait l’objet de contestation par l’organisation représentative des travailleurs. La commission se voit obligée de rappeler une nouvelle fois que toute distinction fondée sur l’âge en matière d’affiliation syndicale est contraire à l’article 2 de la convention. En conséquence, la commission prie une nouvelle fois le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 242 du Code du travail afin de garantir que les mineurs ayant atteint l’âge minimum légal d’admission à l’emploi (16 ans selon l’article 53 du Code du travail) peuvent exercer leurs droits syndicaux sans autorisation parentale ou du tuteur.
Droit des organisations d’élire librement leurs représentants. La commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 251 du Code du travail de façon à garantir aux organisations de travailleurs le droit d’élire librement leurs représentants, y compris parmi les travailleurs étrangers, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays. Elle note que le gouvernement réitère qu’il ne s’agit nullement d’une limitation du droit syndical des étrangers qui peuvent adhérer librement à des syndicats et exercer tous les droits y relatifs. Cependant, le gouvernement confirme que ces derniers ne peuvent participer à la direction des syndicats en question. La commission se voit obligée de rappeler que, conformément à l’article 3 de la convention, la législation nationale devrait permettre aux travailleurs étrangers d’accéder aux fonctions de dirigeants syndicaux, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays d’accueil, et elle prie une nouvelle fois le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 251 du Code du travail dans le sens indiqué.
Droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d’action. La commission avait demandé au gouvernement de modifier les articles 376bis, alinéa 2, 376ter, 381ter, 387 et 388 du Code du travail. La commission note que le gouvernement réitère que les dispositions en question visent à permettre aux employeurs d’être informés de la grève et à engager des procédures de conciliation permettant d’éviter le conflit, et que les sanctions prévues visent à éviter tout recours anarchique à la grève qui risque de mettre en péril l’avenir de l’entreprise, le climat social ou l’intérêt du pays. En ce qui concerne les peines encourues par les grévistes en cas de grève illégale, le gouvernement indique qu’il appartient au juge saisi d’apprécier la gravité des infractions commises et que ce dernier a toute latitude de prononcer une simple amende au lieu d’une peine d’emprisonnement. La commission prie le gouvernement de revoir ces dispositions en consultation avec les partenaires sociaux concernés en vue de leur éventuelle modification et de faire état de toute mesure prise à cet égard.
S’agissant de l’alinéa 2 de l’article 376bis du Code du travail, le gouvernement précise que, lors de consultations menées en 1994 et 1996 sur la réforme du Code du travail, les organisations représentatives d’employeurs et de travailleurs ont indiqué vouloir maintenir cette disposition qui, selon elles, permettrait à l’organisation faîtière d’être toujours informée préalablement à toute grève ou tout lock-out, cela en vue d’un règlement plus efficace du conflit. Le gouvernement ajoute que les syndicats de base insistent souvent sur l’intervention d’une organisation faîtière pour consolider l’exercice du droit de grève. A cet égard, la commission estime utile de rappeler que l’exigence d’obtenir l’approbation préalable de la grève par une organisation syndicale de degré supérieur ne constituerait pas en soi une entrave à la liberté des syndicats concernés d’organiser leurs activités si cette exigence émane du libre choix des syndicats concernés, par exemple lorsqu’elle figure dans les statuts de l’organisation faîtière auxquels ont librement adhéré lesdits syndicats. En revanche, la commission est d’avis qu’une telle exigence contenue dans la législation nationale – comme en l’espèce – constitue une violation de l’article 3 de la convention. En conséquence, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 376bis, alinéa 2, du Code du travail dans le respect du principe rappelé ci-dessus.
S’agissant de ses commentaires précédents relatifs à l’article 381ter du Code du travail, la commission note la réponse du gouvernement qui indique que la définition du service essentiel contenue dans cet article, reprenant celle des organes de contrôle de l’OIT et la démarche consensuelle qui caractérise la détermination des services minima avec les partenaires sociaux ont toujours permis d’éviter le recours à l’arbitrage prévu. La commission prie le gouvernement de faire état, le cas échéant, de l’adoption du décret prévu par cet article du Code du travail.
Droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d’action sans intervention des autorités publiques. S’agissant de la détermination de la représentativité des organisations syndicales et de l’élaboration, à cet effet, de critères objectifs pour déterminer la représentativité des partenaires sociaux en application de l’article 39 du Code du travail, la commission note les informations relatives à l’assistance technique du Bureau à cet égard, et notamment l’organisation d’une réunion technique tripartite sur la représentativité syndicale en janvier 2014. La commission note en outre l’indication du gouvernement selon laquelle un comité tripartite national présidé par le ministre des Affaires sociales s’est réuni à plusieurs reprises à ce sujet et que l’assistance du Bureau se poursuit à travers l’élaboration d’une étude comparative. La commission veut croire que cette assistance technique pourra conduire rapidement à la détermination, dans le cadre de consultations tripartites inclusives, de critères objectifs de la représentativité syndicale et encourage le gouvernement à continuer de fournir des informations détaillées à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

La commission prend note des commentaires de l’Organisation internationale des employeurs (OIE), en date du 29 août 2012, qui concernent le droit de grève et sont traités dans le rapport général de la commission. Elle prend également note des commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI), en date du 31 juillet 2012, qui se réfèrent à des questions d’ordre législatif déjà soulevées par la commission, ainsi qu’à des violations dans la pratique des droits syndicaux, notamment à des obstacles à l’activité syndicale des journalistes. La commission prie le gouvernement de fournir ses observations en réponse aux commentaires de la CSI.
Dans sa dernière observation, la commission avait pris note de l’élection d’une assemblée constituante, le 23 octobre 2011, avec pour mandat, notamment, de rédiger une nouvelle Constitution, et avait exprimé l’espoir que, dans le mouvement de réformes législatives qui devrait accompagner l’adoption d’une nouvelle Constitution, les questions faisant l’objet de ses commentaires depuis de nombreuses années seraient prises en compte. A cet égard, la commission note avec regret que le gouvernement ne fait pas état dans son rapport de progrès dans la modification de la législation. Elle se voit donc obligée de réitérer les commentaires qu’elle formule depuis de nombreuses années.
Article 2 de la convention. Droit des travailleurs sans distinction d’aucune sorte de constituer des organisations et de s’y affilier. S’agissant de sa demande d’information relative à la manière dont le gouvernement assure que les magistrats bénéficient des garanties prévues par la convention, la commission note que le gouvernement indique que les magistrats ont créé le 18 mars 2011 un syndicat indépendant regroupant plus de 1 200 magistrats de l’ordre judiciaire et que les juges de l’ordre administratif ont entamé une procédure pour fonder leur propre syndicat.
S’agissant de sa demande relative à la nécessité de modifier l’article 242 du Code du travail qui prévoit que les mineurs âgés de plus de 16 ans peuvent adhérer aux syndicats, sauf opposition de leur père ou tuteur, la commission note que le gouvernement indique que, l’âge de la majorité ayant été réduit en 2010 de 20 à 18 ans, la question ne se pose que pour les mineurs âgés de 16 à 18 ans, et que la sauvegarde instaurée n’est motivée que par des considérations juridiques relatives à l’exercice de l’autorité du parent ou du tuteur conformément à l’article 93bis du Code des obligations et des contrats. Le gouvernement signale également que les dispositions de l’article 242 du Code du travail n’ont soulevé ni contestation ni problème dans la pratique. Rappelant la nécessité de garantir que les mineurs ayant l’âge minimum légal d’admission à l’emploi (16 ans selon l’article 53 du Code du travail) puissent exercer leurs droits syndicaux sans autorisation parentale ou du tuteur, la commission prie instamment le gouvernement de modifier en ce sens l’article 242 du Code du travail.
Article 3. Droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d’action sans intervention des autorités publiques. S’agissant de la question de la détermination de la représentativité des organisations syndicales dans le secteur de l’enseignement supérieur, la commission note que, dans le cadre du cas no 2592 par le Comité de la liberté syndicale (358e rapport), le gouvernement avait indiqué avoir entrepris des démarches pour élaborer des critères objectifs pour déterminer la représentativité des partenaires sociaux en application de l’article 39 du Code du travail. Le gouvernement avait précisé que, en l’absence de critère préétabli, en cas de différend sur la représentativité des syndicats, le critère relatif au nombre d’adhérents était utilisé pour déterminer la représentativité en vue de la négociation collective. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les démarches qu’il indique avoir entreprises et leur résultat.
Droit des organisations d’élire librement leurs représentants. S’agissant de sa demande de modifier l’article 251 du Code du travail de façon à garantir aux organisations de travailleurs le droit d’élire librement leurs représentants, y compris parmi les travailleurs étrangers, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays, la commission note que le gouvernement indique que l’article 263 du Code du travail consacre expressément dans le domaine du travail le principe de l’égalité de traitement entre les travailleurs étrangers et les travailleurs nationaux et que l’institution de l’approbation par les autorités publiques de la désignation ou de l’élection des travailleurs étrangers à un poste d’administration ou de direction d’un syndicat constitue une simple technique de contrôle administratif a priori de leur éligibilité compte tenu de l’accomplissement par le travailleur étranger d’une période raisonnable de résidence dans le pays. Le gouvernement signale en outre que la condition d’obtention de cet agrément n’a pas été utilisée et que les organisations d’employeurs et de travailleurs n’ont pas formulé d’observations concernant l’application de cette condition. Pour autant, la commission se voit obligée de prier à nouveau le gouvernement de modifier l’article 251 du Code du travail afin de garantir que le principe rappelé ci-dessus soit respecté tant dans la législation que dans la pratique.
Droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d’action. La commission rappelle qu’elle formule depuis de nombreuses années des commentaires relatifs à certaines restrictions à l’exercice du droit de grève, notamment: approbation de la centrale syndicale pour déclencher la grève (art. 376bis, alinéa 2, du Code du travail), mention obligatoire de la durée de la grève dans le préavis (art. 376ter du Code du travail), détermination de la liste des services essentiels par décret (art. 381ter du Code du travail) et possibilité d’imposer des sanctions pénales en cas de grève illégale (art. 387 et 388 du Code du travail). La commission note que le gouvernement indique dans son rapport que: l’alinéa 2 de l’article 376bis du Code du travail ne pose pas de difficulté dans la pratique, et les organisations de travailleurs n’ont pas formulé d’observations concernant son application; aucun seuil de durée n’étant fixé dans l’article 376ter du Code du travail, les protagonistes de la grève ont toute la liberté de choisir la durée de la grève et de la reconduire à leur guise; le décret visé au dernier alinéa de l’article 381ter n’est pas encore adopté; l’imposition des peines prévues par l’article 388 du Code du travail dépend de l’appréciation du tribunal et du degré de gravité des infractions. La commission prie le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires pour modifier ces articles du Code du travail afin de garantir le respect des principes de la liberté syndicale auxquels elle se réfère depuis de nombreuses années.
La commission prie le gouvernement de faire état, dans son prochain rapport, des progrès réalisés dans la modification de la législation. La commission rappelle la possibilité pour le gouvernement de faire appel à l’assistance technique du Bureau sur ces questions.

Observation (CEACR) - adoptée 2011, publiée 101ème session CIT (2012)

La commission prend note des commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI), en date du 4 août 2011, relatifs à l’application de la convention.
La commission est également informée de la création de la Confédération générale tunisienne du travail (CGTT), dont elle demandait la reconnaissance, à l’instar du Comité de la liberté syndicale (cas no 2672), depuis plusieurs années.
En outre, la commission prend note qu’une Assemblée constituante a été élue, le 23 octobre 2011, avec pour mandat, notamment, de rédiger une nouvelle Constitution. Dans ce contexte, la commission espère que, dans le mouvement de réformes législatives qui devrait accompagner l’adoption d’une nouvelle Constitution, les questions qui font l’objet de ses commentaires depuis de nombreuses années seront prises en compte afin d’assurer la pleine conformité de la législation tunisienne avec la convention.
A cet égard, la commission rappelle que ces questions portaient sur les points suivants:
Article 2 de la convention
  • -la nécessité d’assurer que les magistrats bénéficient des garanties prévues par la convention;
  • -la nécessité de modifier l’article 242 du Code du travail pour garantir que l’âge minimum de libre affiliation à un syndicat soit le même que celui fixé par le Code du travail pour l’admission à l’emploi (16 ans selon l’article 53 du Code du travail).
Article 3
  • -la question de la détermination de la représentativité des organisations syndicales dans le secteur de l’enseignement supérieur;
  • -la nécessité de modifier l’article 251 du Code du travail de façon à garantir aux organisations de travailleurs le droit d’élire librement leurs représentants, y compris parmi les travailleurs étrangers, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays;
  • -la nécessité d’abroger l’alinéa 2 de l’article 376 bis du Code du travail de manière à garantir aux organisations de travailleurs, quel que soit leur niveau, la possibilité d’organiser librement leurs activités en vue de la promotion et de la défense des intérêts de leurs membres;
  • -la nécessité de modifier l’article 376 ter du Code du travail de manière à supprimer toute obligation légale de spécifier la durée d’une grève, ceci afin de garantir aux organisations de travailleurs la possibilité de déclarer une grève à durée indéterminée si elles le désirent;
  • -la possibilité de supprimer le dernier alinéa de l’article 381 ter qui prévoit que la liste des services essentiels est fixée par décret; la commission considère en effet qu’il est peu souhaitable – et d’ailleurs impossible – de prétendre dresser une liste complète et immuable des services pouvant être considérés comme essentiels (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 159);
  • -la nécessité de modifier l’article 387 du Code du travail en tenant compte du principe selon lequel des sanctions devraient pouvoir être infligées pour faits de grève uniquement dans les cas où les interdictions qui ont été enfreintes sont conformes à la convention (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 177); or, l’approbation du déclenchement de la grève par la centrale syndicale, telle qu’elle est rendue obligatoire par l’alinéa 2 de l’article 376 bis du Code du travail, n’est pas conforme à l’article 3 de la convention;
  • -la nécessité de revoir les sanctions prévues à l’article 388 qui prévoit notamment des peines d’emprisonnement pour participation à une grève illégale: à cet égard, la commission rappelle qu’un travailleur ayant fait grève d’une manière pacifique ne doit pas être passible de sanctions pénales et qu’ainsi aucune peine de prison ne peut être encourue; que de telles sanctions ne sont envisageables que si, à l’occasion de la grève, des violences contre les personnes ou les biens, ou d’autres infractions graves de droit pénal, sont commises, et ce en application des textes punissant de tels faits, notamment du Code pénal.
La commission prie le gouvernement de faire état, dans son prochain rapport, des progrès réalisés dans la mise en conformité de la législation nationale, et notamment du Code du travail, avec les dispositions de la convention. Elle rappelle la possibilité pour le gouvernement de faire appel à l’assistance technique du Bureau sur ces questions.

Observation (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente, qui était conçue dans les termes suivants:

La commission a pris note des observations relatives à des mesures de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de membres de l’Association des magistrats tunisiens (AMT). La commission a noté que le gouvernement n’a pas fourni d’informations relatives à la situation de l’AMT. Elle rappelle que les normes contenues dans la convention s’appliquent aux magistrats qui devraient pouvoir constituer des organisations de leur choix destinées à promouvoir et à défendre les intérêts de leurs membres. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur la manière dont il assure que les magistrats bénéficient des garanties prévues par la convention.

S’agissant des observations concernant la reconnaissance d’un syndicat du personnel enseignant universitaire, le gouvernement indique avoir toujours privilégié le dialogue, ajoute que certains syndicats d’enseignement supérieur ont rencontré des problèmes internes d’organisation en mentionnant à cet effet la création d’une Fédération générale de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique (FGESRS) contestée en justice par des syndicats de base qui ont à leur tour fondé un syndicat indépendant. La commission note aussi que, dans sa réponse de novembre 2008, le gouvernement nie toute discrimination à l’encontre d’enseignants en raison de leur appartenance et activités syndicales. Le gouvernement a indiqué enfin que la FGESRS n’a cessé d’être présente au sein de la délégation de l’UGTT pour négocier avec le gouvernement en 2007 et 2008 sur les revendications qu’elle a présentées. La commission a également pris note des conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale concernant une plainte présentée par la fédération citée (voir cas no 2592, 350e rapport). La commission demande au gouvernement de faire état dans son prochain rapport de tout fait nouveau sur la question de la détermination de la représentativité des organisations syndicales dans le secteur de l’enseignement supérieur.

En ce qui concerne le refus de reconnaissance d’une nouvelle centrale syndicale, nommément la Confédération générale tunisienne du travail (CGTT), la commission a noté la réponse du gouvernement, qui se borne à rappeler que les formalités de dépôt des statuts d’une organisation syndicale se font sans l’intervention du ministère de l’Intérieur et récuse ainsi les observations de la CSI. La commission veut croire que, dans la mesure où les formalités requises par la législation sont accomplies, il sera donné suite favorablement et rapidement à la demande d’enregistrement de la CGTT.

Changements législatifs. La commission a rappelé qu’elle formule depuis de nombreuses années des commentaires relatifs à certaines dispositions du Code du travail qui ne sont pas en conformité avec la convention. La commission a noté à cet égard que, dans son bref rapport, le gouvernement a indiqué qu’il étudierait la possibilité de mettre en conformité les dispositions qui font l’objet de commentaires. La commission rappelle que celles-ci portent sur les points suivants.

Article 2 de la convention.Droit des travailleurs sans distinction d’aucune sorte de constituer des organisations et de s’y affilier.Article 242 du Code du travail. La commission rappelle que l’âge minimum de libre affiliation à un syndicat devrait être le même que celui fixé par le Code du travail pour l’admission à l’emploi (16 ans selon l’article 53 du Code du travail) et qu’il ne devrait pas dépendre d’une autorisation parentale ou tutoriale. Elle prie le gouvernement de modifier l’article 242 du Code du travail en ce sens.

Article 3.Droit des organisations d’élire librement leurs représentants. Article 251 du Code du travail. S’agissant de cette disposition qui prévoit que les étrangers peuvent accéder à des postes d’administration ou de direction d’un syndicat, à condition d’avoir obtenu l’agrément du Secrétaire d’Etat à la jeunesse, aux sports et aux affaires sociales, la commission rappelle que l’imposition de telles conditions aux étrangers constitue une ingérence des autorités publiques dans les affaires internes d’un syndicat, ce qui est incompatible avec l’article 3 de la convention. La commission demande au gouvernement de modifier l’article 251 du Code du travail de façon à garantir aux organisations de travailleurs le droit d’élire librement leurs représentants, y compris parmi les travailleurs étrangers, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays.

Article 3.Droit des organisations de travailleurs d’exercer librement leurs activités et de formuler leur programme d’action.a)Article 376bis, alinéa 2, du Code du travail. La commission rappelle depuis de nombreuses années que le fait pour un syndicat de base de devoir obtenir, aux termes de l’article 376bis, alinéa 2, du Code du travail, l’approbation de la centrale syndicale pour le déclenchement d’une grève n’est pas conforme à la convention. La commission souligne qu’une disposition législative qui prévoit l’approbation préalable de la centrale syndicale d’une grève entrave le libre choix des organisations de base d’exercer le droit de grève. Une telle restriction ne serait envisageable que si elle est incorporée volontairement dans les statuts des syndicats intéressés, et non imposée par la législation. La commission demande au gouvernement d’abroger l’alinéa 2 de l’article 376bis du Code du travail de manière à garantir aux organisations de travailleurs, quel que soit leur niveau, la possibilité d’organiser librement leurs activités en vue de la promotion et de la défense des intérêts de leurs membres, ceci conformément à l’article 3 de la convention.

b)Article 376ter du Code du travail. S’agissant de cette disposition qui prévoit que le préavis de grève doit fournir une indication sur la durée de la grève, la commission prie le gouvernement de modifier l’article 376ter du Code du travail de manière à supprimer toute obligation légale de spécifier la durée d’une grève, ceci afin de garantir aux organisations de travailleurs la possibilité de déclarer une grève à durée indéterminée si elles le désirent.

c) Article 381ter du Code du travail. En ce qui concerne les services essentiels, dont la liste est fixée par décret en vertu de l’article 381ter du Code du travail, la commission prie le gouvernement d’indiquer si le décret en question a été adopté et, le cas échéant, de communiquer la liste des services essentiels ainsi établie.

d) Articles 387 et 388 du Code du travail. Dans ses observations antérieures, la commission avait contesté les dispositions suivantes: a) l’imposition des peines prévues par l’article 388 du Code du travail, rendant toute personne ayant participé à une grève illégale passible d’une peine d’emprisonnement de trois à huit mois et d’une amende de 100 à 500 dinars, dépendait de l’appréciation par le tribunal pénal du degré de gravité des infractions concernées; b) l’article 387 du Code du travail en vertu duquel est considérée comme illégale, notamment, une grève dont le déclenchement n’aurait pas respecté les dispositions relatives à la conciliation et à la médiation, au préavis et à l’approbation obligatoire de la centrale syndicale (ce point relatif à l’article 376bis du code fait par ailleurs l’objet de commentaires de la commission); et c) l’article 53 du Code pénal, qui permet aux tribunaux d’imposer une peine inférieure au minimum prévu par l’article 388, voire à convertir une peine d’emprisonnement en une amende. La commission rappelle qu’un travailleur ayant fait grève d’une manière pacifique ne doit pas être passible de sanctions pénales et qu’ainsi aucune peine de prison ne peut être encourue. De telles sanctions ne sont envisageables que si, à l’occasion de la grève, des violences contre les personnes ou les biens, ou d’autres infractions graves de droit commun sont commises, et ce en application des textes punissant de tels faits. Toutefois, même en l’absence de violence, si les modalités de la grève l’ont rendue illicite, des sanctions disciplinaires proportionnées peuvent être prononcées contre les grévistes. La commission prie le gouvernement de modifier les articles 387 et 388 du Code du travail en tenant compte du principe énoncé.

Rappelant que ses commentaires sont formulés depuis de nombreuses années, la commission veut croire que le prochain rapport du gouvernement fera état de progrès notables dans la mise en conformité du Code du travail aux prescriptions de la convention. Elle rappelle aussi la possibilité pour le gouvernement de faire appel à l’assistance technique du Bureau sur ces questions.

La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un proche avenir.

Enfin, la commission note les commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI) du 24 août 2010 concernant l’application de la convention, et en particulier de sérieuses allégations d’actes de violence antisyndicaux. La commission rappelle que la liberté syndicale ne peut s’exercer que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l’homme. La commission regrette que le gouvernement n’ait pas répondu à ces allégations malgré leur gravité et le prie de transmettre ses observations à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 2008, publiée 98ème session CIT (2009)

Dans sa précédente observation, la commission avait pris note des observations de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) en date du 10 août 2006 qui faisaient notamment état de risques d’atteinte au droit de grève déjà soulevés par la commission, d’agressions et de répressions violentes de grévistes, ainsi que de mesures de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de membres de l’Association des magistrats tunisiens (AMT) et du Syndicat des journalistes tunisiens (SJT). La commission prend note, par ailleurs, des observations en date du 29 août 2008 de la Confédération syndicale internationale (CSI) relatives à des questions législatives déjà soulevées par la commission et des violations de la convention dans la pratique, notamment les ingérences des autorités empêchant les organisations syndicales de communiquer sur leurs activités, la fermeture de locaux de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) et le refus de reconnaissance d’une nouvelle centrale syndicale. La commission prend note des réponses du gouvernement reçues en novembre 2006 et novembre 2008.

En ce qui concerne les observations relatives à des mesures de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de membres de l’AMT et du SJT, le gouvernement indique que les fondateurs du SJT n’ont pas accompli les formalités de dépôt des statuts exigées par le Code du travail dans la constitution du syndicat et ne peuvent donc pas se prévaloir d’une existence légale du syndicat. Dans sa réponse de novembre 2008, le gouvernement précise en outre que le SJT a été refondé depuis septembre 2007 sous l’appellation de Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), que ce dernier exerce désormais ses activités de manière libre et entière, qu’il est enfin autonome et indépendant vis-à-vis de l’UGTT. La commission note que le gouvernement ne fournit pas d’informations relatives à la situation de l’AMT. Elle rappelle que les normes contenues dans la convention s’appliquent aux magistrats qui devraient pouvoir constituer des organisations de leur choix destinées à promouvoir et à défendre les intérêts de leurs membres. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur la manière dont il assure que les magistrats bénéficient des garanties prévues par la convention.

S’agissant des observations concernant la reconnaissance d’un syndicat du personnel enseignant universitaire, le gouvernement indique avoir toujours privilégié le dialogue, ajoute que certains syndicats d’enseignement supérieur ont rencontré des problèmes internes d’organisation en mentionnant à cet effet la création d’une Fédération générale de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique (FGESRS) contestée en justice par des syndicats de base qui ont à leur tour fondé un syndicat indépendant. La commission note aussi que, dans sa réponse de novembre 2008, le gouvernement nie toute discrimination à l’encontre d’enseignants en raison de leur appartenance et activités syndicales. Le gouvernement précise enfin que la FGESRS n’a cessé d’être présente au sein de la délégation de l’UGTT pour négocier avec le gouvernement en 2007 et 2008 sur les revendications qu’elle a présentées. La commission prend également note des conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale concernant une plainte présentée par la fédération citée (voir cas no 2592, 350e rapport). La commission demande au gouvernement de faire état dans son prochain rapport de tout fait nouveau sur la question de la détermination de la représentativité des organisations syndicales dans le secteur de l’enseignement supérieur.

En ce qui concerne le refus de reconnaissance d’une nouvelle centrale syndicale, nommément la Confédération générale tunisienne du travail (CGTT), la commission note la réponse du gouvernement, qui se borne à rappeler que les formalités de dépôt des statuts d’une organisation syndicale se font sans l’intervention du ministère de l’Intérieur et récuse ainsi les observations de la CSI. La commission veut croire que, dans la mesure où les formalités requises par la législation sont accomplies, il sera donné suite favorablement et rapidement à la demande d’enregistrement de la CGTT.

La commission regrette de noter qu’en ce qui concerne les observations de la CISL de 2006 relatives aux cas d’agressions de syndicalistes et de répressions violentes de grévistes, et les observations de la CSI de 2008 relatives à la fermeture de locaux de l’UGTT, le gouvernement ne fournit aucun élément d’information. A cet égard, la commission rappelle que les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et il appartient au gouvernement de garantir le respect de ce principe.

Changements législatifs. La commission rappelle qu’elle formule depuis de nombreuses années des commentaires relatifs à certaines dispositions du Code du travail qui ne sont pas en conformité avec la convention. La commission note à cet égard que, dans son bref rapport, le gouvernement indique étudier la possibilité de mettre en conformité les dispositions qui font l’objet de commentaires. La commission rappelle que celles-ci portent sur les points suivants.

Article 2 de la convention. Droit des travailleurs sans distinction d’aucune sorte de constituer des organisations et de s’y affilier. Article 242 du Code du travail. La commission rappelle que l’âge minimum de libre affiliation à un syndicat devrait être le même que celui fixé par le Code du travail pour l’admission à l’emploi (16 ans selon l’article 53 du Code du travail) et qu’il ne devrait pas dépendre d’une autorisation parentale ou tutoriale. Elle prie le gouvernement de modifier l’article 242 du Code du travail en ce sens.

Article 3.Droit des organisations d’élire librement leurs représentants. Article 251 du Code du travail. S’agissant de cette disposition qui prévoit que les étrangers peuvent accéder à des postes d’administration ou de direction d’un syndicat, à condition d’avoir obtenu l’agrément du Secrétaire d’Etat à la jeunesse, aux sports et aux affaires sociales, la commission rappelle que l’imposition de telles conditions aux étrangers constitue une ingérence des autorités publiques dans les affaires internes d’un syndicat, ce qui est incompatible avec l’article 3 de la convention. La commission demande au gouvernement de modifier l’article 251 du Code du travail de façon à garantir aux organisations de travailleurs le droit d’élire librement leurs représentants, y compris parmi les travailleurs étrangers, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays.

Article 3.Droit des organisations de travailleurs d’exercer librement leurs activités et de formuler leur programme d’action.a) Article 376bis, alinéa 2, du Code du travail. La commission rappelle depuis de nombreuses années que le fait pour un syndicat de base de devoir obtenir, aux termes de l’article 376bis, alinéa 2, du Code du travail, l’approbation de la centrale syndicale pour le déclenchement d’une grève n’est pas conforme à la convention. La commission souligne qu’une disposition législative qui prévoit l’approbation préalable de la centrale syndicale d’une grève entrave le libre choix des organisations de base d’exercer le droit de grève. Une telle restriction ne serait envisageable que si elle est incorporée volontairement dans les statuts des syndicats intéressés, et non imposée par la législation. La commission demande au gouvernement d’abroger l’alinéa 2 de l’article 376bis du Code du travail de manière à garantir aux organisations de travailleurs, quel que soit leur niveau, la possibilité d’organiser librement leurs activités en vue de la promotion et de la défense des intérêts de leurs membres, ceci conformément à l’article 3 de la convention.

b) Article 376ter du Code du travail. S’agissant de cette disposition qui prévoit que le préavis de grève doit fournir une indication sur la durée de la grève, la commission prie le gouvernement de modifier l’article 376ter du Code du travail de manière à supprimer toute obligation légale de spécifier la durée d’une grève, ceci afin de garantir aux organisations de travailleurs la possibilité de déclarer une grève à durée indéterminée si elles le désirent.

c) Article 381ter du Code du travail. En ce qui concerne les services essentiels, dont la liste est fixée par décret en vertu de l’article 381ter du Code du travail, la commission prie le gouvernement d’indiquer si le décret en question a été adopté et, le cas échéant, de communiquer la liste des services essentiels ainsi établie.

d) Articles 387 et 388 du Code du travail. Dans ses observations antérieures, la commission avait relevé que: a) l’imposition des peines prévues par l’article 388 du Code du travail, rendant toute personne ayant participé à une grève illégale passible d’une peine d’emprisonnement de trois à huit mois et d’une amende de 100 à 500 dinars, dépendait de l’appréciation par le tribunal pénal du degré de gravité des infractions concernées; b) aux termes de l’article 387 du Code du travail, était considérée comme illégale, notamment, une grève dont le déclenchement n’aurait pas respecté les dispositions relatives à la conciliation et à la médiation, au préavis et à l’approbation obligatoire de la centrale syndicale (ce point relatif à l’article 376bis du code fait par ailleurs l’objet de commentaires de la commission); et c) l’article 53 du Code pénal, qui permet aux tribunaux d’imposer une peine inférieure au minimum prévu par l’article 388, voire à convertir une peine d’emprisonnement en une amende, ne suffit pas à conférer aux sanctions prévues un caractère proportionné. La commission prie le gouvernement de modifier les articles 387 et 388 du Code du travail, de manière à conférer aux sanctions prévues en cas de participation à une grève illégale un caractère proportionné à la gravité d’une telle infraction.

Rappelant que ses commentaires sont formulés depuis de nombreuses années, la commission veut croire que le prochain rapport du gouvernement fera état de progrès notables dans la mise en conformité du Code du travail aux prescriptions de la convention. Elle rappelle aussi la possibilité pour le gouvernement de faire appel à l’assistance technique du Bureau sur ces questions.

Observation (CEACR) - adoptée 2006, publiée 96ème session CIT (2007)

La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle regrette cependant que certaines dispositions du Code du travail continuent à poser des problèmes de conformité avec la convention, en dépit des commentaires qu’elle formule depuis de nombreuses années.

La commission prend note des commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) en date du 10 août 2006, qui font notamment état de risques d’atteinte au droit de grève, de cas d’agressions et de répressions violentes de grévistes, ainsi que de mesures de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de membres de syndicats de magistrats et de journalistes. La commission prend note de la communication du gouvernement (reçue pendant la session de la commission), qui répond aux commentaires de la CISL. La commission examinera les commentaires de la CISL et la réponse du gouvernement à leur égard lors de sa prochaine session

Article 2 de la convention.Droit des travailleurs sans distinction d’aucune sorte de constituer des organisations et de s’y affilier. La commission note que le rapport du gouvernement ne répond pas à ses commentaires concernant la fixation, par l’article 242 du Code du travail, de l’âge minimum pour adhérer à un syndicat à 16 ans, sauf opposition du père ou tuteur. Rappelant que l’âge minimum de libre affiliation à un syndicat devrait être le même que celui fixé pour l’admission à l’emploi et qu’il ne devrait pas dépendre d’une autorisation parentale, la commission prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures qui s’imposent pour modifier l’article 242 en ce sens.

Article 3. Droit des organisations de travailleurs d’organiser leur gestion et leurs activités. 1. Depuis de nombreuses années, la commission n’a eu de cesse de souligner que le fait pour une centrale syndicale de base de devoir obtenir, au titre de l’alinéa 2 de l’article 376 bis du Code du travail, l’approbation de la centrale syndicale pour le déclenchement d’une grève n’est pas conforme à la convention. A cet égard, le gouvernement indique dans son rapport que les dispositions précitées n’ont pas soulevé de problèmes en pratique et n’ont pas fait l’objet d’observations ou de plaintes de la part de l’organisation centrale des travailleurs. Le gouvernement ajoute qu’il appartient aux centrales syndicales d’approuver ou non la grève, et que ces dernières ont toute latitude pour insérer dans leurs statuts ou règlements intérieurs des dispositions qui en fixent les modalités d’exécution. La commission se doit de rappeler une fois encore que l’imposition législative de l’approbation préalable de la centrale syndicale constitue une entrave au libre choix des organisations de base pour l’exercice du droit de grève. Une telle restriction n’est envisageable que si elle est incorporée volontairement dans les statuts des syndicats intéressés, et non imposée par la législation. La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour abroger l’alinéa 2 de l’article 376 bis du Code du travail, afin de garantir aux organisations de travailleurs, quel que soit leur niveau, la possibilité d’organiser librement leurs activités en vue de la promotion et de la défense des intérêts de leurs membres, conformément à l’article 3 de la convention.

2. Dans ses observations antérieures, la commission avait relevé: a) que l’imposition des peines prévues par l’article 388 du Code du travail, rendant toute personne ayant participé à une grève illégale passible d’une peine d’emprisonnement de trois à huit mois et d’une amende de 100 à 500 dinars, dépendait de l’appréciation, par le tribunal pénal, du degré de gravité des infractions concernées; b) que, aux termes de l’article 387 du Code du travail, était considérée comme illégale, notamment, une grève dont le déclenchement n’aurait pas respecté les dispositions relatives à la conciliation et à la médiation, au préavis et à l’approbation obligatoire de la centrale syndicale – point critiqué au paragraphe 1 ci-dessus; et c) que l’article 53 du Code pénal, qui permet aux tribunaux d’imposer une peine inférieure au minimum prévu par l’article 388, voire à convertir une peine d’emprisonnement en une amende, ne suffisait pas à conférer aux sanctions prévues un caractère proportionné. La commission note que le gouvernement ne fait que réitérer dans son rapport que la nature de la peine encourue dépend de l’appréciation du tribunal et du degré de gravité de l’infraction. Regrettant l’absence d’avancées dans ces domaines, et considérant que la peine applicable à toute personne ayant participé à une grève illégale risque d’être sans commune mesure avec la gravité de l’infraction, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures qui s’imposent pour modifier les articles 387 et 388 du Code du travail, de manière à les rendre compatibles avec l’article 3 de la convention.

3. Concernant la disposition 376 ter du Code du travail, qui prévoit que le préavis de grève doit fournir une indication sur la durée de la grève, la commission, à plusieurs reprises, a rappelé que le fait de soumettre les travailleurs et leurs organisations à l’obligation de spécifier la durée d’une grève était de nature à restreindre le droit des organisations de travailleurs d’organiser leur gestion et leurs activités et de formuler leur programme d’action. La commission note que le rapport du gouvernement se borne à signaler que la disposition en question a fait l’objet d’une concertation au sein d’une commission tripartite, et que les représentants des organisations professionnelles concernées n’ont émis aucune objection à ce sujet. La commission prie fermement le gouvernement de modifier sa législation de manière à assurer qu’aucune obligation légale de spécifier la durée de la grève n’est imposée aux organisations de travailleurs.

4. S’agissant des services essentiels, dont la liste est fixée par décret en vertu de l’article 381 ter du Code du travail, la commission rappelle que l’article précité permet au Premier ministre de soumettre un conflit à l’arbitrage dans le seul cas où le conflit concerne un service essentiel au sens strict du terme. La commission prie le gouvernement d’indiquer si le décret en question a finalement été adopté et, le cas échéant, de lui communiquer la liste des services essentiels ainsi établie avec son prochain rapport.

5. Enfin, dans ses précédents commentaires, la commission avait appelé l’attention du gouvernement sur la nécessité de modifier l’article 251 du Code du travail qui prévoit que les étrangers peuvent accéder à des postes d’administration ou de direction d’un syndicat, à condition d’avoir obtenu l’agrément du secrétaire d’Etat à la Jeunesse, aux Sports et aux Affaires sociales. La commission note, là encore, que le gouvernement se limite à signaler que cette condition n’a pas suscité de commentaire particulier de la part des organisations professionnelles. La commission rappelle une fois de plus que l’imposition de telles conditions aux étrangers constitue une ingérence des autorités publiques dans les affaires internes d’un syndicat, ce qui est incompatible avec l’article 3 de la convention. La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires en vue de modifier l’article 251, de façon à garantir aux organisations de travailleurs le droit d’élire librement leurs représentants, y compris parmi les travailleurs étrangers, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays d’accueil.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2004, publiée 93ème session CIT (2005)

Article 2 de la conventionDroit des travailleurs sans distinction d’aucune sorte de constituer des organisations et de s’y affilier. La commission note que le rapport du gouvernement ne contient aucune réponse aux commentaires formulés lors de son précédent commentaire concernant la fixation, par l’article 242 du Code du travail, de l’âge minimum pour adhérer à un syndicat à 16 ans, sauf opposition du père ou tuteur. La commission rappelle donc qu’elle estime que l’âge minimum de libre affiliation à un syndicat devrait être le même que celui fixé pour l’admission à l’emploi, et ceci ne devrait pas dépendre d’une autorisation parentale. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de modifier l’article 242, afin de garantir le droit syndical aux mineurs ayant atteint l’âge légal de travailler, même en tant qu’apprentis, sans que l’autorisation parentale soit nécessaire.

Article 3Droit des organisations de travailleurs d’élire librement leurs représentants et d’organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme d’action. 1. La commission prend note des observations formulées par le gouvernement dans son rapport concernant la limitation du droit d’accès des étrangers aux fonctions de dirigeants syndicaux par le biais de l’article 251 du Code du travail, qui prévoit que ceux-ci peuvent accéder à des postes d’administration ou de direction d’un syndicat s’ils obtiennent l’autorisation du secrétaire d’Etat à la Jeunesse, aux Sports et aux Affaires sociales. Le gouvernement indique en effet que cet article ne constitue pas une limitation au droit syndical puisque les étrangers peuvent être membres d’un syndicat et exercer le droit de grève au même titre que les Tunisiens. La commission rappelle que le droit prévu à l’article 3 de la convention implique que la législation nationale devrait permettre aux travailleurs étrangers d’accéder librement aux fonctions de dirigeants syndicaux, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays d’accueil, et que le fait de conditionner cet accès à l’agrément d’une autorité publique risque de le rendre difficile et arbitraire. La commission rappelle aussi que l’imposition de telles conditions aux étrangers constitue une ingérence des autorités publiques dans les affaires internes d’un syndicat, ce qui est également incompatible avec l’article 3 de la convention. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de modifier l’article 251 de façon à garantir aux organisations de travailleurs le droit d’élire librement leurs représentants, y compris parmi les travailleurs étrangers, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays d’accueil.

2. Concernant la disposition 376ter du Code du travail, qui prévoit que le préavis de grève doit donner une indication de la durée de la grève, la commission note que le dernier rapport du gouvernement ne contient aucune indication à cet égard. La commission rappelle que le fait de soumettre les travailleurs et leurs organisations à l’obligation de spécifier la durée d’une grève pourrait restreindre le droit des organisations de travailleurs d’organiser leur gestion et leur activité et de formuler leur programme d’action. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de modifier sa législation de manière à s’assurer qu’aucune obligation légale de spécifier la durée de la grève ne soit imposée aux organisations de travailleurs.

3. S’agissant de la liste des services essentiels fixée par décret en vertu de l’article 381ter du Code du travail, la commission note que le dernier rapport du gouvernement indique qu’aucune liste n’a encore été fixée. Tout en notant l’indication du gouvernement qu’aucun acte de réquisition dans le cas d’une grève portant atteinte à un service essentiel (art. 389 du Code du travail) n’a été pris à cause de l’absence d’une telle liste, la commission observe qu’aucune information n’a été fournie quant à l’exercice, par le Premier ministre, du pouvoir qui lui est conféré par l’article 381ter du Code du travail. Rappelant que l’article précité du Code du travail permet au Premier ministre de soumettre un conflit à l’arbitrage dans le seul cas où un conflit concerne un service essentiel au sens strict du terme et constatant que le dernier rapport du gouvernement ne fournit aucune indication à ce propos, la commission demande au gouvernement de préciser concrètement les cas dans lesquels le Premier ministre a fait usage de son pouvoir de soumettre un conflit à l’arbitrage, en vertu de l’article 381ter du Code du travail.

Observation (CEACR) - adoptée 2004, publiée 93ème session CIT (2005)

La commission prend note du rapport du gouvernement.

Article 3 de la conventionDroit des organisations de travailleurs d’organiser leur gestion et leur activité. 1. La commission souligne que l’incompatibilité entre la convention et l’obligation d’obtenir l’approbation de la centrale syndicale pour le déclenchement d’une grève par une organisation syndicale de base, prévue à l’alinéa 2 de l’article 376 bis du Code du travail, a été rappelée sans discontinuité au gouvernement depuis 1977. La commission note que le gouvernement indique dans son rapport que la nécessité d’obtenir l’approbation de la centrale syndicale ne peut être considérée comme une limitation aux droits des organisations syndicales puisque cette approbation émane de l’organisation syndicale et non d’une instance administrative extérieure. Le gouvernement indique également que la circulaire no 7 de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) prévoit une liste de membres de la centrale syndicale habilités à signer l’autorisation de déclencher la grève qui inclut tous les secrétaires généraux des unions régionales, lesquelles sont en contact direct et permanent avec les syndicats de base dans les entreprises. Finalement, le gouvernement indique n’avoir reçu aucune plainte émanant des syndicats de base considérant que l’approbation préalable de la grève par la centrale syndicale limitait leur droit d’organiser leurs activités.

La commission signale une fois de plus que l’assujettissement de l’exercice du droit de grève à l’approbation de la centrale syndicale restreint, par sa nature même, le droit des organisations syndicales de base d’organiser leur action et de défendre les intérêts des travailleurs en toute liberté. Comme la commission l’a soulignéà maintes reprises, l’imposition législative de cette exigence préalable constitue une entrave au libre choix des organisations concernées puisque les empêchant, pour l’exercice du droit de grève, d’agir indépendamment de l’organisation de degré supérieur que constitue la centrale syndicale. Elle rappelle qu’une telle restriction est possible uniquement si elle est incorporée volontairement dans les statuts des syndicats intéressés et non imposée par la législation. La commission insiste donc à nouveau pour que le gouvernement abroge l’alinéa 2 de l’article 376 bis du Code du travail afin de garantir aux organisations de travailleurs, quel que soit leur niveau, la possibilité d’organiser librement leurs activités en vue de la promotion et de la défense des intérêts de leurs membres, conformément à l’article 3 de la convention.

2. La commission note que le rapport du gouvernement indique que l’imposition des peines prévues par l’article 388 du Code du travail, rendant toute personne ayant participéà une grève illégale passible d’une peine d’emprisonnement de trois à huit mois et d’une amende de 100 à 500 dinars, dépendra de l’appréciation, par le tribunal pénal, du degré de gravité des infractions concernées. Le gouvernement indique aussi que l’article 53 du Code pénal permet aux tribunaux d’imposer une peine inférieure au minimum prévu par l’article 388 et même de convertir une peine d’emprisonnement en une amende.

La commission note que le rapport du gouvernement ne répond pas à ses précédents commentaires concernant l’incompatibilité de l’article 387 du Code du travail, qui énonce notamment qu’est illégale une grève dont le déclenchement n’aurait pas respecté les dispositions relatives à la conciliation et à la médiation au préavis et à l’approbation obligatoire de la centrale syndicale, avec la convention. La commission attire l’attention du gouvernement sur le fait que des sanctions devraient pouvoir être infligées pour fait de grève uniquement dans les cas où les interdictions en question sont conformes à la convention, ce qui n’est pas le cas en ce qui concerne l’approbation obligatoire par la centrale syndicale mentionnée sous l’article 387 du Code du travail. En outre, s’agissant du caractère disproportionné des peines prévues à l’article 388 du Code du travail, la commission ne croit pas que la latitude d’appréciation du tribunal et l’existence de l’article 53 du Code pénal suffisent à leur conférer un caractère proportionné. A cet égard, la commission précise que le non-respect, en particulier, des dispositions relatives à la conciliation du conflit et au préavis de grève n’est pas d’une gravité telle qu’il justifie la possibilité d’une peine d’emprisonnement. En conséquence, la commission prie le gouvernement de revoir les articles 387 et 388 du Code du travail, de manière à les rendre compatibles avec l’article 3 de la convention.

La commission adresse en outre une demande directe au gouvernement sur un certain nombre d’autres points.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2003, publiée 92ème session CIT (2004)

Article 2 de la convention. Droit des travailleurs sans distinction d’aucune sorte de constituer des organisations et de s’y affilier. La commission note que, en vertu de l’article 242 du Code du travail, «… les mineurs âgés de 16 ans peuvent adhérer aux syndicats, sauf opposition de leur père ou tuteur…». La commission estime que l’âge minimum de libre affiliation à un syndicat devrait être le même que celui fixé pour l’admission à l’emploi. La commission prie le gouvernement de modifier l’article 242, afin de garantir le droit syndical aux mineurs, même en tant qu’apprentis, sans que l’autorisation parentale soit nécessaire.

Article 3Droit des organisations de travailleurs d’élire librement leurs représentants et d’organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme d’action. La commission note que l’article 251 dispose que les étrangers peuvent accéder à des postes d’administration ou de direction d’un syndicat, à condition d’avoir obtenu l’agrément du Secrétaire d’Etat à la jeunesse, aux sports et aux affaires sociales. La commission rappelle que la législation nationale devrait permettre aux travailleurs étrangers d’accéder aux fonctions de dirigeants syndicaux, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays d’accueil; conditionner cet accès à l’agrément de l’autorité publique risque de le rendre difficile et arbitraire. En outre, ceci constitue une ingérence des autorités publiques dans les affaires internes d’un syndicat, qui est incompatible avec l’article 3 de la convention. La commission prie le gouvernement de modifier l’article 251 sur ce point, de façon à garantir aux organisations de travailleurs le droit d’élire librement leurs représentants, y compris parmi les travailleurs étrangers, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays d’accueil.

La commission note que, aux termes de l’article 376ter du Code du travail, le préavis de grève doit donner une indication de la durée de la grève. La commission considère que le fait de soumettre les travailleurs et leurs organisations à l’obligation de spécifier la durée d’une grève pourrait restreindre le droit des organisations de travailleurs d’organiser leur gestion et leur activité et de formuler leur programme d’action. Bien qu’aux termes de l’article 376ter du Code du travail le préavis doive seulement contenir une indication de la durée de la grève, la commission prie le gouvernement de modifier sa législation de manière à assurer qu’aucune obligation légale de spécifier la durée de la grève ne soit imposée aux organisations de travailleurs.

S’agissant de la liste des services essentiels fixée par décret en vertu de l’article 381ter du Code du travail, la commission note que le dernier rapport du gouvernement ne contient aucune indication à cet égard. La commission rappelle que l’article précité du Code du travail permet au Premier ministre de soumettre un conflit à l’arbitrage dans le seul cas où le conflit concerne un service essentiel au sens strict du terme. Dans un rapport antérieur, le gouvernement avait indiqué qu’une copie du décret fixant la liste des services essentiels serait communiquée au Bureau dès son adoption. La commission demande donc au gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport si ce décret a été adopté et, le cas échéant, de lui en fournir une copie. Dans le cas où aucun décret n’a été adoptéà ce jour, la commission demande au gouvernement de préciser concrètement les cas dans lesquels le Premier ministre a fait usage de son pouvoir de soumettre un conflit à l’arbitrage, en vertu de l’article 381ter du Code du travail.

Observation (CEACR) - adoptée 2003, publiée 92ème session CIT (2004)

La commission prend note du rapport du gouvernement.

Article 3 de la convention. Droit des organisations de travailleurs d’organiser leur gestion et leur activité. La commission attire l’attention du gouvernement depuis de nombreuses années sur l’incompatibilité avec la convention de l’obligation d’obtenir l’approbation de la centrale syndicale pour le déclenchement d’une grève, qui est prévue à l’alinéa 2 de l’article 376bis du Code du travail. Dans son dernier rapport, le gouvernement fait état d’arguments qu’il avait soumis dans ses rapports antérieurs pour justifier une telle obligation. Ainsi, selon le gouvernement, les organisations syndicales tiennent volontairement au maintien de cette approbation qui est utile tant pour maintenir la centrale syndicale constamment informée de toute grève envisagée que pour l’efficacité de toute démarche visant au règlement pacifique du conflit. Par ailleurs, le gouvernement indique que ni l’administration ni les tribunaux n’ont été saisis de la moindre plainte par les syndicats de base, au motif que cette procédure limiterait leur droit d’organiser leurs activités.

La commission rappelle que l’assujettissement de l’exercice du droit de grève à l’approbation de la centrale syndicale restreint, par sa nature même, le droit des organisations syndicales de base d’organiser leur action et de défendre les intérêts des travailleurs en toute liberté. Comme la commission l’a déjà souligné, les conditions préalables à l’exercice du droit de grève doivent être régies par les statuts et règles des organisations syndicales concernées. En l’espèce, ceci signifie que l’approbation du déclenchement de la grève par la centrale syndicale doit être inscrite dans les statuts des organisations de base ainsi que dans ceux des organisations de degré supérieur comme condition d’affiliation des organisations de base. La commission rappelle à cet égard qu’une telle inscription constitue une approche conforme à l’article 3 de la convention puisqu’elle est fondée sur le libre choix des organisations concernées et que, notamment, les organisations de base qui souhaitent agir indépendamment de l’organisation de degré supérieur peuvent toujours se désaffilier de cette dernière. La commission prie donc une fois de plus le gouvernement d’abroger l’alinéa 2 de l’article 376bis susvisé afin de garantir aux organisations de travailleurs, quel que soit leur niveau, la possibilité d’organiser librement leurs activités en vue de la promotion et la défense des intérêts de leurs membres, conformément à l’article 3 de la convention.

Par ailleurs, la commission note qu’en vertu de l’article 388 du Code du travail quiconque aura participéà une grève illégale sera passible d’une peine d’emprisonnement de trois à huit mois et d’une amende de 100 à 500 dinars. Aux termes de l’article 387 du Code du travail, est considérée comme illégale notamment une grève dont le déclenchement n’aurait pas respecté les dispositions relatives à la conciliation et à la médiation, au préavis et à l’approbation obligatoire de la centrale syndicale. La commission rappelle, en premier lieu, que des sanctions devraient pouvoir être infligées pour faits de grève uniquement dans les cas où les interdictions en question sont conformes à la convention (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 177). Il résulte des considérations qui précèdent que l’approbation du déclenchement de la grève par la centrale syndicale, telle qu’elle est rendue obligatoire par l’alinéa 2 de l’article 376bis du Code du travail, n’est pas conforme à l’article 3 de la convention. En second lieu, même si les interdictions relatives à la grève sont conformes à la convention, la commission souligne que les sanctions prévues ne devraient pas être disproportionnées par rapport à la gravité des infractions (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 177 et 178); cette considération s’applique tout particulièrement aux peines d’emprisonnement. De l’avis de la commission, le non-respect, en particulier, des dispositions relatives à la conciliation du conflit et au préavis de grève n’est pas d’une gravité telle qu’il justifie l’application d’une peine d’emprisonnement. Dans ces circonstances, la commission prie le gouvernement de revoir les sanctions prévues à l’article 388, de manière à les rendre compatibles avec l’article 3 de la convention.

En outre, une demande relative à certains autres points est adressée directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2002, publiée 91ème session CIT (2003)

La commission note avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle espère qu’un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu’il contiendra des informations complètes sur les points soulevés dans sa précédente demande directe, qui était conçue dans les termes suivants:

Dans ses commentaires antérieurs relatifs à l’article 251 du Code du travail qui prévoit la disqualification pénale pour les fonctions de direction ou d’administration des syndicats professionnels sauf pour infraction inspirée pour un motif d’ordre politique ou syndical, la commission prend bonne note des informations communiquées par le gouvernement dans son dernier rapport selon lesquelles aucun cas n’a été enregistré en pratique concernant les cas d’inhabilitations ou de disqualifications survenus en relation avec les dispositions de l’article 251 du Code du travail. Le gouvernement avait répété que cet article avait expressément exclu les infractions inspirées par un mobile d’ordre politique ou syndical ou pour blessures ou homicides involontaires, ce qui est de nature àéviter tout abus dans l’application de ces dispositions. Tout en prenant note de ces informations, la commission rappelle qu’elle est d’avis que les cas d’inhabilitation ou de disqualification aux fonctions de dirigeant syndicat devraient être limités aux personnes condamnées pour des actes qui mettent en cause l’intégrité de l’intéressé. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de continuer de la tenir informée dans ses prochains rapports de toute évolution à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 2002, publiée 91ème session CIT (2003)

La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit obligée de renouveler son observation précédente, qui était conçue dans les termes suivants:

Article 3 de la convention. Droit des organisations de travailleurs d’organiser leur gestion et leur activité. Se référant à ses commentaires antérieurs concernant l’obligation d’obtenir l’approbation de la centrale syndicale préalablement au déclenchement d’une grève, prévue à l’alinéa 2 de l’article 376bis du Code du travail, la commission avait noté que le gouvernement indiquait dans son dernier rapport que l’expression «centrale syndicale»était entendue dans un sens large et qu’en vertu d’une circulaire de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) datant de 1989 et se rapportant à l’exercice du droit de grève tous les membres du bureau exécutif élargi de cette organisation étaient habilités à signer le préavis de grève. Ce bureau comprend, conformément à l’article 16 du règlement intérieur de l’UGTT, en plus des membres du bureau exécutif, tous les secrétaires généraux des unions régionales de l’organisation, lesquelles comprennent des représentants des organisations syndicales de base professionnelles et sont en contact direct et permanent avec les syndicats de base dans les entreprises. Le gouvernement indiquait également que l’administration n’a été saisie d’aucune plainte émanant des syndicats de base et considérant que l’approbation préalable de la grève par la centrale syndicale limite leur droit d’organiser leurs activités. Tout en prenant note de ces informations, la commission estime néanmoins que cette disposition peut être de nature à limiter le droit des organisations syndicales de base d’organiser leurs activités et de promouvoir et défendre les intérêts des travailleurs, et prie donc le gouvernement d’abroger cette disposition afin de rendre sa législation pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale.

S’agissant de la liste des services essentiels prévue à l’article 381ter du Code du travail, la commission avait pris note de la déclaration du gouvernement dans un rapport antérieur selon laquelle une copie du décret fixant cette liste serait communiquée au Bureau dès son adoption. La commission demande à nouveau au gouvernement de lui communiquer dans son prochain rapport la liste des services essentiels prévue à l’article 381ter du Code du travail.

La commission adresse en outre une demande directe au gouvernement sur un point.

La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un très proche avenir.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2000, publiée 89ème session CIT (2001)

Dans ses commentaires antérieurs relatifs à l’article 251 du Code du travail qui prévoit la disqualification pénale pour les fonctions de direction ou d’administration des syndicats professionnels sauf pour infraction inspirée pour un motif d’ordre politique ou syndical, la commission prend bonne note des informations communiquées par le gouvernement dans son dernier rapport selon lesquelles aucun cas n’a été enregistré en pratique concernant les cas d’inhabilitations ou de disqualifications survenus en relation avec les dispositions de l’article 251 du Code du travail. Le gouvernement répète que cet article a expressément exclu les infractions inspirées par un mobile d’ordre politique ou syndical ou pour blessures ou homicides involontaires, ce qui est de nature àéviter tout abus dans l’application de ces dispositions. Tout en prenant note de ces informations, la commission rappelle qu’elle est d’avis que les cas d’inhabilitation ou de disqualification aux fonctions de dirigeant syndicat devraient être limités aux personnes condamnées pour des actes qui mettent en cause l’intégrité de l’intéressé. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de continuer de la tenir informée dans ses prochains rapports de toute évolution à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 2000, publiée 89ème session CIT (2001)

La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement.

Article 3 de la convention. Droit des organisations de travailleurs d’organiser leur gestion et leur activité. Se référant à ses commentaires antérieurs concernant l’obligation d’obtenir l’approbation de la centrale syndicale préalablement au déclenchement d’une grève, prévue à l’alinéa 2 de l’article 376bis du Code du travail, la commission note que le gouvernement indique dans son dernier rapport que l’expression «centrale syndicale» est entendue dans un sens large et qu’en vertu d’une circulaire de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) datant de 1989 et se rapportant à l’exercice du droit de grève tous les membres du bureau exécutif élargi de cette organisation sont habilités à signer le préavis de grève. Ce bureau comprend, conformément à l’article 16 du règlement intérieur de l’UGTT, en plus des membres du bureau exécutif, tous les secrétaires généraux des unions régionales de l’organisation, lesquelles comprennent des représentants des organisations syndicales de base professionnelles et sont en contact direct et permanent avec les syndicats de base dans les entreprises. Le gouvernement indique également que l’administration n’a été saisie d’aucune plainte émanant des syndicats de base et considérant que l’approbation préalable de la grève par la centrale syndicale limite leur droit d’organiser leurs activités. Tout en prenant note de ces informations, la commission estime néanmoins que cette disposition peut être de nature à limiter le droit des organisations syndicales de base d’organiser leurs activités et de promouvoir et défendre les intérêts des travailleurs, et prie donc le gouvernement d’abroger cette disposition afin de rendre sa législation pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale.

S’agissant de la liste des services essentiels prévue à l’article 381ter du Code du travail, la commission avait pris note de la déclaration du gouvernement dans un rapport antérieur selon laquelle une copie du décret fixant cette liste serait communiquée au Bureau dès son adoption. La commission demande à nouveau au gouvernement de lui communiquer dans son prochain rapport la liste des services essentiels prévue à l’article 381ter du Code du travail.

La commission adresse en outre une demande directe au gouvernement sur un point.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1998, publiée 87ème session CIT (1999)

La commission prend bonne note des informations communiquées par le gouvernement dans son rapport selon lesquelles aucun cas n'a été enregistré en pratique concernant les cas d'inhabilitations ou de disqualifications survenus en relation avec les dispositions de l'article 251 du Code du travail.

A cet effet, la commission rappelle l'importance qu'elle attache au principe selon lequel une condamnation pour un acte qui, par sa nature, ne met pas en cause l'intégrité de l'intéressé et ne présente pas de risques véritables pour l'exercice des fonctions syndicales ne doit pas constituer un motif de disqualification. La commission est d'avis que les cas d'inhabilitations ou de disqualifications aux fonctions de dirigeant syndical devraient être limités aux personnes condamnées pour des actes qui mettent en cause l'intégrité de l'intéressé et présentent des risques véritables pour l'exercice des fonctions syndicales. La commission prie le gouvernement de la tenir informée dans ses prochains rapports de toute évolution à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 1998, publiée 87ème session CIT (1999)

La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement.

Se référant à ses commentaires antérieurs concernant l'obligation d'obtenir l'approbation de la centrale syndicale préalablement au déclenchement d'une grève, la commission note que le gouvernement reprend de nouveau ses déclarations selon lesquelles les organisations syndicales ont insisté pour le maintien des dispositions actuelles de l'alinéa 2 de l'article 376bis du Code du travail estimant que l'approbation requise par la Centrale syndicale ouvrière en cas de grève constituait une procédure utile pour l'information de la centrale et l'efficacité des actions de conciliation et les démarches visant la résolution des questions objet des conflits. La commission note également les indications du gouvernement selon lesquelles l'administration n'a été saisie d'aucune plainte émanant des syndicats de base et considérant que l'approbation préalable de la grève par la centrale syndicale limite leur droit d'organiser leurs activités. A cet égard, la commission ne peut que reprendre ses commentaires précédents et souligner de nouveau que cette disposition peut être de nature à limiter le droit des organisations syndicales de base d'organiser leurs activités (article 3 de la convention) et de promouvoir et défendre les intérêts des travailleurs (article 10), et prie donc le gouvernement d'abroger cette disposition afin de rendre sa législation plus conforme aux principes de la liberté syndicale.

Concernant la liste des services essentiels prévue à l'article 381ter du Code du travail, la commission prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle une copie du décret fixant cette liste sera communiquée au Bureau dès qu'il sera adopté.

La commission adresse en outre une demande directe au gouvernement sur un point.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1997, publiée 86ème session CIT (1998)

La commission avait précédemment relevé qu'aux termes de l'article 251 du Code du travail les fonctions de direction et d'administration de tout syndicat professionnel sont interdites aux individus condamnés à une peine supérieure à trois mois d'emprisonnement. Tout en notant que cette disposition ne s'applique pas aux infractions inspirées par un mobile d'ordre politique ou syndical, la commission souhaite néanmoins que le gouvernement lui fournisse, dans ses prochains rapports, des informations sur des cas d'inhabilitations ou de disqualifications dans la pratique qui sont survenus en relation avec cette disposition.

Observation (CEACR) - adoptée 1997, publiée 86ème session CIT (1998)

La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement.

Se référant à ses commentaires précédents concernant l'obligation d'obtenir l'approbation de la centrale syndicale préalablement au déclenchement d'une grève, la commission note les déclarations du gouvernement selon lesquelles les organisations syndicales ont insisté pour le maintien des dispositions actuelles de l'alinéa 2 de l'article 376 bis du Code du travail estimant que l'approbation requise par la Centrale syndicale ouvrière en cas de grève constituait une procédure utile pour l'information de la centrale, l'efficacité des actions de conciliation et les démarches visant la résolution des questions objet des conflits. La commission souligne toutefois de nouveau que cette disposition peut être de nature à limiter le droit des organisations syndicales de base d'organiser leurs activités (article 3 de la convention) et de promouvoir et défendre les intérêts des travailleurs (article 10) et prie donc le gouvernement d'abroger cette disposition afin de rendre sa législation plus conforme aux principes de la liberté syndicale.

La commission prie le gouvernement d'indiquer si, en application de l'article 381ter du Code du travail dans sa teneur modifiée, une liste des services essentiels a été fixée par décret et, dans l'affirmative, d'en communiquer le texte.

Observation (CEACR) - adoptée 1996, publiée 85ème session CIT (1997)

La commission note que le rapport du gouvernement n'a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente.

La commission a noté que la loi no 94-29 du 21 février 1994 portant modification de certaines dispositions du Code du travail dispose en son article 381ter que le Premier ministre peut soumettre un conflit à l'arbitrage dans le seul cas où le conflit concerne un service essentiel au sens strict du terme, à savoir un "service où l'interruption du travail mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé des personnes dans l'ensemble ou dans une partie de la population". Observant que la liste des services essentiels doit être fixée par décret, la commission prie le gouvernement de communiquer tout décret qui viendrait à être adopté en la matière. En outre, la commission a constaté que l'article 376bis, alinéa 2, qui prévoit que la grève doit être approuvée par la centrale syndicale ouvrière sous peine d'illégalité (art. 387 (nouveau)), ne semble pas avoir été modifié. La commission souligne à nouveau que cette disposition est de nature à limiter le droit des organisations syndicales de base d'organiser leurs activités (article 3 de la convention) et de promouvoir et défendre les intérêts des travailleurs (article 10). La commission prie à nouveau le gouvernement d'abroger cette disposition pour rendre sa législation plus conforme aux principes de la liberté syndicale, en laissant aux statuts syndicaux le soin de régler ce genre de question, et de communiquer dans son prochain rapport des informations sur tout développement à cet égard.

La commission espère que le gouvernement s'efforcera de prendre les mesures nécessaires dans un proche avenir.

Observation (CEACR) - adoptée 1995, publiée 82ème session CIT (1995)

Se référant aux commentaires qu'elle formule depuis de très nombreuses années, la commission prend note avec satisfaction des modifications législatives introduites par la loi no 94-29 du 21 février 1994 portant modification de certaines dispositions du Code du travail. Elle note en particulier que l'article 381ter permet au Premier ministre de soumettre un conflit à l'arbitrage dans le seul cas où le conflit concerne un service essentiel au sens strict du terme, à savoir un "service où l'interruption du travail mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé des personnes dans l'ensemble ou dans une partie de la population". Observant que la liste des services essentiels doit être fixée par décret, la commission prie le gouvernement de communiquer tout décret qui viendrait à être adopté en la matière.

La commission constate cependant que l'article 376bis, alinéa 2, qui prévoit que la grève doit être approuvée par la centrale syndicale ouvrière sous peine d'illégalité (art. 387 (nouveau)) ne semble pas avoir été modifié. La commission souligne à nouveau que cette disposition est de nature à limiter le droit des organisations syndicales de base d'organiser leurs activités (article 3 de la convention) et de promouvoir et défendre les intérêts des travailleurs (article 10). La commission prie à nouveau le gouvernement d'abroger cette disposition pour rendre sa législation plus conforme aux principes de la liberté syndicale, en laissant aux statuts syndicaux le soin de régler ce genre de question, et de communiquer dans son prochain rapport des informations sur tout développement à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 1993, publiée 80ème session CIT (1993)

Comme suite à sa demande d'information sur les progrès accomplis dans la révision du Code du travail de manière à rendre cet instrument pleinement conforme à la convention, la commission note avec intérêt, dans le rapport du gouvernement, que le projet de loi portant révision du Code du travail renferme la même définition du concept de services essentiels que celle qu'elle-même et le Comité de la liberté syndicale ont recommandée. Aux termes de l'article 381 ter du projet de loi, "est considéré comme service essentiel tout service dont l'interruption peut mettre en péril la vie, la sécurité individuelle ou la santé d'une partie ou de l'ensemble de la population".

La commission note toutefois que le rapport du gouvernement reste muet quant à l'observation qu'elle avait formulée antérieurement sur la nécessité d'une autorisation préalable de l'organisation syndicale centrale pour l'organisation d'une grève (article 376 bis). Le gouvernement avait indiqué dans son précédent rapport que ce principe serait maintenu et ne ferait pas place à l'obligation d'obtenir un vote majoritaire de tous les travailleurs de l'entreprise, le maintien de ce système étant souhaité par l'UGTT et l'UTICA.

La commission souligne à nouveau que cette disposition porte préjudice au droit des organisations syndicales à tout niveau d'appeler à la grève pour défendre les intérêts professionnels de leurs membres. Toutefois, si tel est le désir des travailleurs, cette question doit être tranchée non par des moyens législatifs mais par les instruments réglementaires adoptés par les organisations syndicales concernées, à la base. A cet égard, le comité rappelle qu'aux termes de l'article 8, paragraphe 2, de la convention la législation nationale ne devra porter atteinte ni être appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues par la convention.

La commission exprime l'espoir qu'il sera tenu compte de ses observations dans le projet de loi, de sorte que ce dernier donne pleinement effet à la convention. Elle prie le gouvernement de lui communiquer des informations sur tout nouveau développement à cet égard et de lui faire parvenir un exemplaire du Code du travail une fois que ce dernier aura été adopté.

Observation (CEACR) - adoptée 1991, publiée 78ème session CIT (1991)

1. En réponse à sa demande d'information sur l'évolution du processus de normalisation de la vie syndicale, la commission note avec intérêt que les travaux de la Commission syndicale nationale chargée du renouvellement des structures syndicales de base sont achevés, et qu'en avril 1989 s'est tenu un congrès extraordinaire de l'UGTT qui a vu l'élection d'un bureau exécutif regroupant des sensibilités syndicales différentes; en outre, les biens immobiliers de l'UGTT lui ont été restitués et de nombreux syndicalistes ont pu bénéficier de la nouvelle loi d'amnistie no 89-63 du 3 juillet 1989.

2. Au sujet du projet de révision du Code du travail qui prévoit le remplacement des notions "d'intérêt national" et "d'intérêt vital de la nation" par la notion de services essentiels, la commission note avec intérêt, d'après le rapport du gouvernement, que le recours à l'arbitrage obligatoire (art. 384 à 386) et la procédure de réquisition des travailleurs en grève (art. 389) n'auraient lieu qu'en cas de grève dans des services essentiels. La commission veut croire que la notion de services essentiels où la grève peut être limitée, voire interdite, sera circonscrite aux cas de grève dans les services dont l'interruption pourrait mettre en danger, dans l'ensemble ou une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne.

La commission note, par ailleurs, toujours d'après le rapport du gouvernement, que l'autorisation préalable de la Centrale syndicale ouvrière pour déclencher une grève (art. 376 bis) sera maintenue et non pas remplacée par l'obligation d'un vote majoritaire de l'ensemble des travailleurs d'une entreprise, comme il en avait été question dans un précédent rapport du gouvernement, et que ce maintien est souhaité par l'UGTT et l'UTICA (Union tunisienne de l'industrie du commerce et de l'artisanat).

La commission rappelle que cette disposition est de nature à porter atteinte au droit des organisations syndicales, quel que soit leur niveau, de recourir à la grève pour défendre les intérêts professionnels de leurs membres. Toutefois, si tel est le souhait des travailleurs, il conviendrait que cette question ne soit pas décidée par voie législative mais qu'elle fasse l'objet de dispositions statutaires adoptées entre organisations syndicales de base concernées; à cet égard, la commission rappelle qu'aux termes de l'article 8 2) de la convention la législation nationale ne doit pas porter atteinte aux garanties prévues par la convention.

La commission veut croire que le Code du travail, dans sa teneur modifiée, sera adopté dans un proche avenir et qu'il sera tenu compte de ses commentaires dans les amendements projetés. La commission prie le gouvernement de fournir toute information sur les progrès réalisés afin de mettre sa législation en pleine conformité avec la convention.

Observation (CEACR) - adoptée 1989, publiée 76ème session CIT (1989)

La commission a pris note du rapport du gouvernement. Elle a également pris connaissance des conclusions du Comité de la liberté syndicale relatives à des plaintes contre la Tunisie (cas no 1327) approuvées par le Conseil d'administration à ses 236e et 239e sessions, mai-juin 1987 et février-mars 1988, respectivement.

1. Dans son observation précédente, la commission avait insisté auprès du gouvernement pour que des mesures soient prises conformément aux recommandations du Comité de la liberté syndicale en vue de rétablir pleinement une situation syndicale conforme aux garanties prévues par la convention.

Réintégration des travailleurs licenciés

0a commission note avec intérêt, d'après le rapport du gouvernement, que l'accord conclu entre l'UGTT et le gouvernement, en date du 25 mai 1988, prévoit la réintégration de tous les travailleurs du secteur public qui ont été licenciés pour des motifs syndicaux et que la loi no 88-98 du 18 août 1988 prévoit, en son article premier, l'amnistie des personnes condamnées pour crime ou délit lors de leur appartenance à une organisation syndicale. Le décret devant établir la liste des personnes bénéficiant de cette amnistie est en cours de publication.

La commission demande au gouvernement de la tenir informée de la mise en oeuvre des mesures visant la réintégration et l'amnistie des personnes concernées.

Normalisation de la vie syndicale

La commission note qu'une commission syndicale nationale regroupant les diverses sensibilités a été constituée le 1er mai 1988 en vue du renouvellement des structures de base et de la tenue d'un congrès extraordinaire de l'UGTT, conformément aux principes de la liberté syndicale. Afin de faciliter les travaux en cours, le gouvernement a autorisé, par une circulaire du Premier ministre no 62 du 15 août 1988, la tenue de congrès sur les lieux des entreprises publiques et l'utilisation à cette fin des salles de réunion de ces entreprises. Par ailleurs, une circulaire du Premier ministre no 66 du 22 août 1988 autorise les administrations et les entreprises publiques à procéder à la retenue à la source des cotisations syndicales à la demande des fonctionnaires et agents publics qui désirent adhérer à l'UGTT. La commission note également la reprise du dialogue entre le gouvernement et les travailleurs qui, par le biais de la commission syndicale nationale de l'UGTT, ont été associés à l'élaboration du Pacte national signé le 7 novembre 1988 et qui voient le nombre de leurs représentants au sein du Conseil économique et social passer de 6 à 10, conformément à la loi organique no 88-12 du 7 mars 1988.

La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises visant à améliorer la vie syndicale ainsi que sur les travaux de la commission syndicale nationale ci-dessus mentionnée.

2. Dans son observation précédente, la commission avait exprimé l'espoir que le projet de loi visant à modifier le Code du travail serait adopté dans un proche avenir afin de mettre les dispositions du Code du travail concernant le droit de grève, objet de commentaires depuis plusieurs années, en conformité avec la convention, à savoir:

- les articles 376 bis et 387 du code selon lesquels la Centrale syndicale ouvrière doit donner son approbation pour déclencher une grève;

- les articles 384 à 386 du code qui prévoient la possibilité d'imposer l'arbitrage obligatoire pour faire cesser une grève risquant d'affecter l'intérêt national;

- l'article 389 qui prévoit la possibilité de réquisitions quand une grève est considérée comme étant de nature à porter atteinte à un intérêt vital de la nation.

La commission note, d'après le rapport du gouvernement, que ledit projet de loi après avoir fait l'objet de larges consultations sera examiné par thème par le Conseil des ministres pour être ensuite adopté par la Chambre des députés. Ainsi, après avoir examiné le projet de loi concernant la représentation du personnel dans les entreprises, le Conseil des ministres devrait s'intéresser à la question de l'harmonisation de la législation nationale avec les normes internationales du travail.

Dans ce contexte, la commission tient à rappeler que, si les modifications envisagées des dispositions du Code du travail sur lesquelles elle s'était déjà prononcée dans des commentaires antérieurs vont dans le sens d'une meilleure application de la convention, l'amendement projeté de recueillir la majorité absolue des travailleurs concernés pour déclencher une grève devrait encore être modifié pour permettre à une majorité simple des votants (à l'exclusion des travailleurs n'ayant pas pris part au vote) dans une entreprise de décider de recourir à la grève. Elle attire à nouveau l'attention du gouvernement sur la nécessité de modifier l'article 389 du code afin de limiter le pouvoir des autorités de réquisitionner des travailleurs aux seuls cas où la grève affecterait des services essentiels au sens strict du terme, à savoir des services dont l'interruption pourrait mettre en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne.

La commission veut croire que le projet de loi relatif aux dispositions ci-dessus mentionnées pourra être réexaminé à la lumière de ses commentaires et pourra être adopté dans un proche avenir. Elle demande au gouvernement de fournir des informations sur les progrès réalisés afin de mettre sa législation en harmonie avec la convention.

© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer