National Legislation on Labour and Social Rights
Global database on occupational safety and health legislation
Employment protection legislation database
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Informations écrites communiquées par le gouvernement
Informations communiquées le 22 mai 2023
Évolution de la législation. La commission demande des informations sur l’impact de l’application du décret suprême no 014-2022-TR. À cet égard, le ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi (MTPE) joint des tableaux statistiques qui contiennent des chiffres définitifs sur les conflits du travail (grèves et/ou arrêts de travail dans le secteur privé) déposés et enregistrés en février 2023, ainsi qu’en janvier et février 2023, par rapport à janvier et février 2022, statistiques qui sont élaborées par le Bureau général de la statistique et de la technologie du MTPE.
Ces tableaux indiquent entre autres que le nombre de grèves (2022: 3; 2023: 1), de même que le nombre de travailleurs couverts par ces grèves (2022: 245; 2023: 23) et les heures de travail par personne perdues (2022: 234 320; 2023: 4 416), et que tous ces chiffres, sont beaucoup plus élevés que ceux rapportés pour les mêmes mois en 2023, lorsque le décret suprême no 014-2022-TR n’était pas encore en vigueur. Cela montre que le niveau de conflictualité a diminué à la suite de l’application du décret susmentionné.
Par ailleurs, au cours de 2022, à la suite de la décision des organisations professionnelles d’employeurs de suspendre leur participation au Conseil national du travail et de la promotion de l’emploi (CNTPE) et à ses espaces de dialogue, décision communiquée en juillet 2022, le MTPE s’est efforcé de renouer le dialogue, en convoquant les organisations d’employeurs à différentes réunions bilatérales avec le Cabinet ministériel, mais il n’a pas reçu de réponse positive.
Toutefois, dans le cadre de l’action du nouveau gouvernement actuel, des réunions bilatérales ont été organisées entre le Cabinet ministériel et des organisations d’employeurs telles que la Confédération nationale des institutions entrepreneuriales privées, la Société nationale des industries, la Chambre de commerce de Lima et l’Association des exportateurs, entre décembre 2022 et mai 2023, au cours desquelles les organisations d’employeurs ont fait part de leurs préoccupations au sujet du décret suprême no 014-2022-TR.
On espère poursuivre la volonté de dialogue qu’ont exprimée les organisations d’employeurs pendant ces dernières réunions et susciter un rapprochement avec les centrales syndicales, afin de rétablir la confiance et, ainsi, de rendre viable un quorum lors de la prochaine plénière du CNTPE et de reprendre les consultations tripartites dans les espaces qui leur sont consacrés.
Article 2 de la convention, reconnaissance du droit d’organisation du personnel de direction et de confiance de l’administration publique. Le MTPE indique que le décret suprême no 014-2022-TR, qui modifie le règlement de la loi sur les relations collectives du travail, et qui s’applique de manière supplétive au secteur public, dispose ce qui suit:
Le personnel de direction et de confiance n’est pas représenté par l’organisation syndicale; il n’est pas non plus pris en compte dans le nombre total des travailleurs de son secteur d’activité pour déterminer si la condition requise de majorité absolue visée à l’article précédent est remplie, à moins que les statuts de l’organisation syndicale n’admettent expressément son affiliation.
En d’autres termes, le droit à la liberté syndicale du personnel de direction et de confiance est reconnu en ce sens qu’il peut s’affilier à une organisation syndicale, pour autant que les statuts de l’organisation syndicale le permettent expressément.
De plus, il faut garder à l’esprit que l’article 4 du décret susmentionné dispose que l’État reconnaît et garantit aux travailleuses et aux travailleurs, sans distinction ni autorisation préalable, le droit de constituer les organisations syndicales de leur choix, de s’y affilier librement et de mener des activités syndicales pour défendre et promouvoir leurs intérêts économiques et sociaux.
En outre, le règlement ministériel no 92-2022-TR a ordonné la prépublication de l’avant-projet de Code du travail, Cet avant-projet contient une proposition de règlementation spécifique sur les activités de formation professionnelle, définit le prestataire de services comme étant un travailleur, et indique que les activités de formation professionnelle constituent des contrats de travail.
Le MTPE a proposé de lancer un processus de dialogue tripartite au sein du CNTPE pour examiner l’avant-projet; ainsi, lors de la session ordinaire no 127 du 13 mai 2022, la plénière du CNTPE a convenu que les partenaires sociaux se prononceraient au sujet d’un processus de dialogue, au terme de la période de prépublication, sur l’avant-projet de Code du travail.
Ainsi, il a été convenu – de manière tripartite – d’inscrire la définition des caractéristiques du processus de dialogue à l’ordre du jour de la session ordinaire no 128 de la plénière du CNTPE, qui s’est tenue le 18 juillet 2022. Toutefois, cette session ayant été suspendue – après trois heures de débat sur un autre sujet – il n’a pas été possible d’examiner l’avant-projet de Code du travail.
Un peu plus tard, le 26 juillet 2022, le secteur des employeurs a suspendu sa participation au CNTPE, et exprimé son désaccord au sujet des décrets suprêmes no 001-2022-TR (externalisation) et no 014-2022-TR (relations collectives).
Suite à cela, une session extraordinaire de la plénière du CNTPE a été convoquée pour le 3 novembre 2022, afin de définir le processus de dialogue sur le projet de Code du travail, mais, faute de quorum en raison de l’absence presque totale du secteur des employeurs – alors que l’ensemble du secteur des travailleurs a assisté à la session – seule une session d’information informative s’est tenue.
Dans le cadre de l’action du gouvernement actuel, entre décembre 2022 et mai 2023 des réunions bilatérales ont rassemblé le Cabinet ministériel, d’une part, et les organisations d’employeurs et les centrales syndicales, d’autre part.
À titre d’information complémentaire, il convient d’ajouter que, en avril 2023, les membres du Congrès de la République ont présenté le projet de loi no 4483/2022-CR (projet de loi de Code du travail), qui reprend entièrement la proposition de texte juridique de l’avant-projet de Code du travail, prépublié par le MTPE en avril 2022.
Par ailleurs, le pouvoir judiciaire souligne qu’il est important de prendre en compte que l’article 28 de la Constitution politique du Pérou dispose ce qui suit: «L’État reconnaît les droits de syndicalisation, de négociation collective et de grève. Il protège leur exercice démocratique: i) il garantit la liberté syndicale [...]». De même, l’article 153 de la Constitution interdit aux juges et aux procureurs de participer à la vie politique, de se syndiquer et de faire grève.
Ces interdictions figuraient aussi dans la Constitution de 1979, dans le chapitre relatif au pouvoir judiciaire, aujourd’hui inclus dans la Constitution en vigueur de 1993. L’objectif est que le pouvoir judiciaire et l’ensemble de l’appareil juridictionnel ne soient pas liés à la sphère politique, car rien n’est plus préjudiciable à l’activité juridictionnelle que l’exercice, par des juges et/ou des procureurs, d’une activité politique.
Or, s’il est vrai que la Constitution établit que ces fonctionnaires ne peuvent pas être affiliés à des syndicats, ces fonctionnaires peuvent néanmoins constituer des associations et s’y affilier, à condition qu’elles aient pour but de « défendre tous les aspects des intérêts professionnels de leurs membres et de mener des activités au service de la justice en général », comme l’indique l’alinéa 12 de l’article 35 de la loi no 29277, sur la carrière judiciaire:
Les juges ont le droit:
[...] de liberté syndicale. Les associations de juges sont constituées et déploient leurs activités conformément aux normes établies dans le Code civil, et sont réglementées conformément à leurs dispositions statutaires.
Manifestement, ni les juges ni les procureurs ne sont considérés comme des travailleurs dans le domaine du droit du travail car ils ne sont pas liés à leur employeur par un contrat de travail. De plus, l’employeur auquel ils fournissent leurs services n’est pas une personne mais l’État lui-même. Il faut également avoir à l’esprit que la liberté syndicale est efficace si elle s’accompagne des mesures qui la soutiennent habituellement et qui en constituent les véritables piliers: la négociation collective et la grève.
Les juges, les magistrats et les procureurs doivent conserver une impartialité à l’écart de positions susceptibles de rompre l’équilibre constitutionnel des pouvoirs.
Toutefois, les associations professionnelles, en tant que substituts des syndicats, ont jusqu’à présent rempli leur fonction, laquelle est de constituer un instrument approprié pour exprimer les préoccupations et les revendications de professionnels qui méritent autant ce droit que n’importe quel autre groupe.
Article 3. Détermination du caractère illégal de la grève. Conformément à ce qui est indiqué précédemment, dans le cadre de l’action du gouvernement actuel, entre décembre 2022 et mai 2023 des réunions bilatérales se sont tenues entre le Cabinet ministériel, d’abord avec les organisations d’employeurs, puis avec les centrales syndicales.
On espère que le dialogue reprendra afin de rendre viable un quorum lors de la prochaine session plénière du CNTPE et de rétablir ainsi les consultations tripartites dans les espaces qui leur sont consacrés.
[Tableaux non reproduits: Grèves déposées, résolues et en cours; travailleurs couverts et heures de travail par personne perdues dans le secteur privé du 1er au 28 février 2023; Tableau comparatif des grèves, des travailleurs couverts et des heures de travail par personne perdues dans le secteur privé par année, par activité économique,du 1er au 28 février 2022-2023; Tableau comparatif des grèves, des travailleurs couverts et des heures de travail par personne perdues dans le secteur privé par année, par mois de 2022-2023]
Informations supplémentaires que le gouvernement a adressées par écrit le 30 mai 2023
Article 2. Droit de tous les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations et de s’affilier à ces organisations. L’Autorité nationale de la fonction publique (SERVIR) souligne que le Pérou reconnaît le principe directeur de la convention, à savoir l’exercice de la liberté syndicale et de la négociation collective en tant que droits fondamentaux pour assurer la pleine et libre participation des travailleurs au marché du travail. Par conséquent, ce principe donne corps à la garantie de la démocratie et du progrès social. En ce sens, tous les aspects de la législation du travail qui peuvent être améliorés sont examinés dans le cadre du dialogue avec les organisations représentatives des travailleurs et de l’État. Toutefois, par principe, nous devons indiquer que, bien que la Constitution politique garantisse l’exercice du droit à la liberté syndicale, comme tout autre droit celui-ci n’est pas illimité mais soumis à certaines limites établies par des normes ayant rang de loi.
En ce sens, les garanties des droits des travailleurs se fondent sur le respect des normes internationales du travail, puisque le Pérou a ratifié les dispositions de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, qui traitent du droit syndical et d’organisation, en général. De plus, la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, protège, entre autres, le droit d’organisation des fonctionnaires, d’où découle le droit de grève. De même, l’article 42 de la Constitution politique dispose ce qui suit: «Les droits d’organisation et de grève des fonctionnaires sont reconnus [...]». De même, l’article 28 de la Constitution établit que l’État reconnaît les droits d’organisation, de négociation collective et de grève, et veille à leur exercice démocratique. Ces droits étant reconnus, le droit à la liberté syndicale et le droit de grève des fonctionnaires, entre autres, sont garantis.
En ce qui concerne le droit d’organisation dans le secteur public péruvien, il est important de souligner qu’il est régi par l’article 41 de la loi no 30057 (loi sur la fonction publique), qui précise que les fonctionnaires ont le droit de s’organiser pour défendre leurs intérêts. Les organisations de fonctionnaires doivent contribuer à l’amélioration constante du service public assuré aux citoyens et ne pas affecter le fonctionnement efficace de l’entité où elles sont en place ou de la prestation du service, et l’autorité ne doit pas promouvoir des actes qui limitent la constitution d’organisations syndicales ou l’exercice du droit d’organisation.
Il est également important de noter que le chapitre I du titre V du règlement général de la loi no 30057 sur la fonction publique, approuvé en application du décret suprême no 040-2014-PCM, réglemente l’exercice du droit d’organisation, et contient des dispositions relatives entre autres à la liberté syndicale , à la protection contre les actes de discrimination antisyndicale, à la protection contre les actes d’ingérence, à la constitution de syndicats, à l’enregistrement des syndicats et aux congés syndicaux.
Article 3. Droit des organisations d’organiser leur activité et de formuler leur programme d’action. Scrutin relatif à la grève. En ce qui concerne le droit de grève, la SERVIR signale qu’il est régi par les articles 79 à 85 du règlement général de la loi sur la fonction publique; ces articles disposent que l’une des conditions requises de la grève est que la décision soit adoptée de la manière expressément déterminée par les statuts, et qu’elle représente la volonté majoritaire des travailleurs qui relèvent de son champ d’application. De même, l’article 13.2 e) de la loi no 31188 sur la négociation collective dans le secteur public, indique que les travailleurs du secteur public peuvent déclarer une grève dans le cadre du Texte unique codifié (TUO) de la loi sur les relations collectives de travail, approuvé en vertu du décret suprême 010-2003-TR (TUO de la LRCT), et de son règlement. Enfin, pour ce qui est des aspects non réglementés dans les normes susmentionnées, le TUO de la LRCT et son règlement s’appliquent à titre supplétif.
Droit des organisations syndicales d’organiser des réunions et d’accéder aux lieux de travail. Le ministère de l’Éducation souligne que, conformément à l’article 66 de la loi no 28044 (loi générale sur l’éducation), l’établissement d’enseignement a pour but d’assurer l’apprentissage et la formation intégrale de ses étudiants. De même, concrètement, il met à disposition ses installations pour mener des activités extrascolaires et communautaires, assurant ainsi les buts et objectifs éducatifs, ainsi que les fonctions spécifiques des locaux institutionnels.
Le ministère se réfère à l’article 28 de notre Constitution, qui dispose que l’État garantit la liberté syndicale. La convention no 151 sur les relations de travail dans la fonction publique prévoit à l’article 6 que des facilités doivent être accordées aux représentants des organisations d’agents publics, de manière à leur permettre de remplir rapidement et efficacement leurs fonctions aussi bien pendant leurs heures de travail qu’en dehors de celles-ci, sans entraver le fonctionnement efficace de l’administration.
Dans ce contexte, après avoir examiné l’unique disposition complémentaire finale du décret suprême no 017-2007-ED, qui indique que le directeur ou le directeur adjoint de l’établissement public d’enseignement de base ordinaire doit garantir le fonctionnement de son centre éducatif et que, par conséquent, le fait de «mettre à disposition les locaux de l’école pour des réunions à caractère syndical» constitue une infraction grave, nous considérons que cette disposition est conforme à la Constitution et aux conventions internationales, étant donné que l’établissement d’enseignement est destiné à fournir un service éducatif, qui, conformément à la loi no 28988, constitue un service public essentiel.
Discussion par la commission
Président – J’invite maintenant le représentant gouvernemental du Pérou, Monsieur le ministre du Travail de ce pays, à prendre la parole.
Représentant gouvernemental, ministre du travail et de la promotion de l’emploi– C’est un honneur de prendre la parole à cette 111e session de la Conférence internationale du Travail et de vous transmettre le fraternel salut de la Présidente constitutionnelle de la République du Pérou, Mme Dina Ercilia Boluarte Zegarra, et du peuple péruvien.
Au fil des ans, l’État péruvien a assumé avec une grande responsabilité son engagement à défendre et promouvoir les droits fondamentaux au travail, en appliquant chaque fois que c’était le cas les recommandations formulées par les divers organes du système de contrôle des normes de l’Organisation internationale du Travail.
Dans cet esprit, nous allons fournir des informations en réponse aux observations contenues dans le rapport de la commission d’experts de 2023 dans le contexte de cette convention.
Le premier point abordé par la commission d’experts est sa demande d’informations sur l’impact de l’application du décret suprême no 014-2022-TR et le rétablissement du dialogue social au sein du Conseil national du travail et de la promotion de l’emploi (CNTPE) afin que l’on puisse débattre au sein de cette instance des questions qui touchent à cette norme et que tout problème qui entraverait le fonctionnement de cet organe soit résolu rapidement.
Nous indiquerons à ce propos que le ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi a fait parvenir à cette commission des statistiques sur les conflits du travail survenus au cours des mois de janvier et février 2023, soit après adoption du décret précité, notamment sur le nombre des grèves, des travailleurs concernés et des heures de travail perdues par personne.
S’agissant du rétablissement du dialogue social, qui est à l’arrêt depuis juillet 2022, qu’il me soit permis de dire ici que le changement de gouvernement s’est accompagné d’un renforcement des mécanismes propices à un rapprochement entre les partenaires sociaux, au gré de réunions bilatérales à l’initiative du ministère.
D’ores et déjà, sous ma mandature de ministre du Travail et de la Promotion de l’emploi, depuis le 24 avril 2023, nous avons organisé des réunions de travail bilatérales avec les centrales syndicales et avec les milieux patronaux, et ces contacts ont permis de poser certains jalons et de cerner les sujets d’inquiétude, tous les interlocuteurs s’accordant sur la nécessité de renforcer le dialogue social comme moyen d’améliorer progressivement les rapports.
C’est ainsi qu’à l’initiative du ministère, il s’est tenu huit autres réunions de travail avec les centrales syndicales comme la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP), la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), la Confédération des travailleurs du Pérou (CTP) et la Centrale autonome des travailleurs du Pérou (CATP), et avec les organismes patronaux comme la Confédération nationale des entreprises privées (CONFIEP), la Chambre de commerce de Lima (CCL), l’Association des exportateurs (ADEX) et la Société nationale des industries (SNI).
Il convient de signaler que les instances de dialogue social tripartite que sont le Conseil national de la sécurité et de la santé au travail (CONSSAT), le Comité directeur national pour la prévention et l’éradication du travail des enfants (CPETI) et la Commission nationale pour la lutte contre le travail forcé (CNLCTF) sont toujours opérationnelles et continuent de siéger comme le veulent les partenaires sociaux qui les constituent.
J’aborderai maintenant le deuxième point soulevé par la commission d’experts, dans lequel cette instance exprime l’espoir que l’avant-projet de code du travail fera l’objet de consultations tripartites et qu’il soit prévu, dans le cadre d’un tel processus, de réformer les textes de manière à ce qu’ils consacrent de manière formelle la liberté syndicale des travailleurs.
Permettez-moi de dire à ce sujet qu’en vertu de la résolution ministérielle no 232-2021-TR, une nouvelle commission sectorielle à caractère temporaire a été chargée d’élaborer une proposition d’avant-projet de code du travail, laquelle devra être soumise à un large processus de consultations tripartites au sein du Conseil national du travail, en prenant également en considération les éventuels apports de la société civile.
Au cours des réunions bilatérales que le gouvernement précédent a tenues avec les travailleurs et les employeurs, respectivement les 13 et 18 avril 2022, le ministère du Travail a porté à la connaissance des partenaires sociaux le contenu de cet avant-projet.
Par la suite, avec la résolution ministérielle no 92-2022-TR, il a été décidé de publier à titre préliminaire cet avant-projet, qui comporte une proposition de réglementation spécifique des modalités des relations sociales.
À sa 127e session ordinaire, du 13 mai 2022, le CNTPE réuni en séance plénière a décidé que le processus de dialogue relatif à l’avant-projet de code du travail serait évalué par les partenaires sociaux avant l’expiration du délai de prépublication.
Ainsi, la définition du processus de dialogue sur l’avant-projet a été inscrite à l’ordre du jour de la 128e session ordinaire de l’assemblée plénière du Conseil national du travail, qui s’est tenue le 18 juillet 2022; cependant, cette session a été suspendue et il n’a donc pas été possible d’aborder la question de l’avant-projet.
En lieu et place, c’est une session extraordinaire de l’assemblée plénière dudit conseil qui s’est tenue le 3 novembre 2022 pour définir le processus de dialogue sur l’avant-projet, mais cette session, faute d’atteindre le quorum, n’a comporté qu’une séance d’information.
Comme cela a été dit, il convient de tenir compte du fait que l’avant-projet n’a pas pu donner lieu à un débat au sein du CNTPE ni encore moins être approuvé en conseil des ministres, si bien qu’il ne constitue qu’une proposition normative qui n’en est qu’au stade de l’élaboration et de la validation et qui, à ce titre, ne fait pas partie intégrante de l’ordre juridique interne de l’État péruvien et ne peut donc donner lieu à une évaluation des éventuelles discordances qui pourraient exister entre ses articles 75 et 76 relativement à la reconnaissance de la liberté syndicale dans le contexte de la formation.
Nous nous déclarons cependant toujours disposés à poursuivre le dialogue instauré avec les milieux patronaux et avec les centrales syndicales dans le cadre des réunions bilatérales consacrées à cette question, afin qu’il s’avère viable de reprendre le dialogue tripartite au sein du CNTPE.
Dans un troisième point, la commission d’experts a appelé le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour que les dispositions pertinentes de son ordre juridique interne soient révisées de manière à assurer, en droit comme dans la pratique, l’exercice du droit d’organisation en ce qui concerne les juges et les procureurs ainsi que, de manière plus générale, les membres du personnel de direction et de confiance de l’administration publique.
On doit avoir présent à l’esprit que l’article 153 de la Constitution politique du Pérou dispose que «les juges et les procureurs ont l’interdiction de participer à la politique, de se syndiquer et de se déclarer en grève», de sorte qu’il faudrait modifier la loi fondamentale pour pouvoir accueillir l’observation de la commission d’experts.
Cela étant, le chiffre 12 de l’article 35 de la loi no 29277, dite loi de la carrière judiciaire, reconnaît le droit des juges à « la libre association. Les associations de juges se constituent et exercent leurs activités conformément aux normes établies dans le Code civil et se gouvernent conformément aux dispositions de leurs statuts».
D’un autre côté, on observera qu’aux termes de l’article 42 de la Constitution politique du Pérou, «les droits de se syndiquer et de faire grève sont reconnus aux fonctionnaires, à l’exclusion des fonctionnaires d’État ayant un pouvoir de décision et de ceux qui sont investis de fonctions de confiance ou de direction […]».
J’aborderai le quatrième point soulevé par la commission d’experts, selon lequel la détermination du caractère illégal de la grève dans le secteur privé n’est pas du ressort de l’administration du travail, mais d’un organe indépendant des parties qui recueille la confiance de celles-ci et où, de même, cette commission exprime l’espoir que la modification proposée dans l’avant-projet de code du travail donnera lieu à des consultations tripartites exhaustives.
L’article 84 du texte unique ordonné de la loi sur les relations collectives du travail, adopté par décret suprême no 010-2003-TR, énonce les critères d’illégalité de la grève. Ces critères sont en accord avec les dispositions de l’article 28 de la Constitution, en ce que l’État non seulement reconnaît le droit à la grève mais en outre veille à l’exercice démocratique de ce droit, faisant en sorte qu’il s’exerce en harmonie avec l’intérêt social.
La qualification de la grève se trouve dans la ligne de ce qui ressort du jugement rendu par le Tribunal constitutionnel faisant l’objet de la publication no 02211-2009-PA/TC, où il est dit que l’exercice du droit de grève n’est pas absolu mais peut être limité par la loi afin de s’exercer en harmonie avec l’intérêt public.
Ceci s’avère conforme au paragraphe 114 de l’avis consultatif no OC-27/21 de la Cour interaméricaine des droits de l’homme, aux termes duquel: «[…] l’exercice du droit à la liberté syndicale, la négociation collective et la grève ne peut être sujet aux limitations et restrictions prévues par la loi que dans la mesure où de telles limitations ou restrictions sont appropriées dans une société démocratique et sont nécessaires pour sauvegarder l’ordre public, protéger la santé ou la morale publique, ainsi que les droits et libertés des tiers. Cela étant, les restrictions qui peuvent être posées à l’exercice de ces droits doivent être interprétées de manière restrictive, en application du principe pro persona, et ces droits ne doivent pas être dépouillés de leur contenu essentiel ou être diminués à tel point qu’ils seraient dénués de toute portée pratique».
De ce point de vue, il serait fondé d’affirmer a priori que la qualification d’illégalité de la grève dans le secteur privé ne devrait pas être du ressort de l’administration du travail mais de celui d’un organe indépendant des parties et recueillant la confiance de celles-ci.
S’agissant du contenu de l’avant-projet, nous réitérons que ce texte a fait l’objet d’un débat au CNTPE mais n’a pas encore été approuvé au conseil des ministres, de sorte qu’il ne constitue qu’une proposition normative, se trouvant actuellement au simple stade de l’élaboration et de la validation et, à ce titre, ne faisant pas partie intégrante de l’ordre juridique interne de l’État péruvien.
De même, nous sommes toujours prêts à poursuivre le dialogue instauré avec les milieux patronaux et avec les centrales syndicales dans le cadre des réunions bilatérales consacrées à cette question, afin qu’il s’avère viable de reprendre le dialogue tripartite au sein du CNTPE.
J’aborderai maintenant la cinquième question soulevée par la commission d’experts, qui a trait d’une part, à la mise en place sans délai de la Commission d’appui à la fonction publique en tant qu’organe authentiquement indépendant et d’autre part, à ce que toutes divergences entre les parties quant au nombre et à la qualité des travailleurs à mobiliser pour assurer un service minimum dans les services publics essentiels devraient être non seulement examinées mais encore tranchées par un tel organe indépendant. Considérant qu’à ce jour ladite Commission d’appui à la fonction publique visée à l’article 86 du règlement général de la loi no 30057 dite loi de la fonction publique n’a toujours pas été mise en place, c’est le ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi qui serait compétent pour connaître des conflits ou des divergences qui pourraient surgir entre des organismes publics ou entre ces organismes et des fonctionnaires, conformément aux dispositions de la directive générale no 01-20216-MTPE/2/14 «réglant le fonctionnement de l’autorité administrative du travail dans le cadre de la négociation collective pour le secteur public» adoptée par résolution ministérielle no 156-2016-TR.
Il convient de souligner que, dans le contexte actuel, c’est à la Direction générale du travail du ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi qu’il incombe de régler toute divergence relative au service minimum dans le secteur public. À cette fin, cet organe est habilité à bénéficier de l’appui d’un organe indépendant. S’agissant de la sixième question soulevée par la commission d’experts, il est constant qu’aux termes de l’article 6 de la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, des facilités doivent être accordées aux représentants des organisations d’agents publics reconnues, de manière à leur permettre de remplir rapidement et efficacement leurs fonctions aussi bien pendant leurs heures de travail qu’en dehors de celles-ci et que l’octroi de telles facilités ne doit pas entraver le fonctionnement efficace de l’administration ou du service intéressé.
On retiendra qu’aux termes de l’article 66 de la loi no 28044, «[…] la finalité de l’institution éducative est d’être le lieu des apprentissages et de la formation intégrale des apprenants. […] L’institution éducative, en tant que structure physique et sociale, entretient des rapports avec les différents organismes de son entourage et met ses installations à disposition pour le déroulement des activités extracurriculaires et communautaires, sans préjudice des fins et objectifs de l’éducation ou des fonctions spécifiques des locaux de l’institution […]».
Dans ce domaine, nous veillons particulièrement à faire une interprétation pondérée et conventionnelle des règles en question, conformément à la quatrième disposition finale et transitoire de la Constitution politique du Pérou, selon laquelle les normes relatives aux droits et libertés que la Constitution reconnaît, comme le syndicalisme, s’interprètent conformément à la Déclaration universelle des droits de l’homme et aux traités et accords internationaux ratifiés par le Pérou portant sur ces matières.
Membres employeurs – Nous souhaitons intervenir à propos du fait que le décret suprême no 014-2022-TR publié le 24 juillet 2022 a modifié le règlement de la loi sur les relations collectives du travail au Pérou.
Le premier point auquel je voudrais me référer concerne la situation du dialogue social et de la consultation tripartite telle que le gouvernement du Pérou l’a reconnue lui-même dans ses explications à la commission d’experts. Dans ce pays, la réglementation des relations collectives du travail a subi une modification unilatérale, sans que soit respectée la procédure de dialogue et de consultation avec les organisations de travailleurs ni, surtout, avec les organisations d’employeurs.
Si le gouvernement du Pérou a prétendu justifier ses interventions en invoquant une situation prétendument grave concernant le droit syndical dans le pays, il convient de ne pas perdre de vue les éléments suivants: premièrement, dans aucun pays, le faible taux de syndicalisation ne saurait être invoqué pour justifier une atteinte aux normes internationales relatives à la consultation et au dialogue social et, deuxièmement, le gouvernement du Pérou n’a apporté aucun élément significatif qui prouverait que des modifications de la législation adoptées de manière unilatérale ou arbitraire seraient le moyen approprié et adapté de résoudre les prétendus problèmes identifiés.
Un principe fondamental du respect des normes internationales du travail réside dans la promotion effective et authentique de la consultation des acteurs représentatifs des travailleurs et des employeurs, principe ordonnateur qui est d’application immédiate du fait qu’il découle du caractère fondamental du tripartisme au sein de l’OIT.
Le dialogue et la confrontation des opinions entre les différents acteurs du monde salarial sont la clé de l’ouverture et de la démocratisation des relations socioprofessionnelles. Cela ne signifie pas, évidemment, que l’on devrait absolument parvenir à des accords dans tous les cas, mais qu’il doit exister une assurance mutuelle dans un climat de confiance et d’échanges de bonne foi qui soit de nature à déboucher sur de tels accords, qui garantisse un meilleur équilibre social dans le pays et qui confère la légitimité nécessaire aux normes qui règlent les relations socioprofessionnelles.
Cela étant, les employeurs du Pérou reconnaissent et saluent la volonté manifestée par l’actuelle équipe gouvernementale de renouer le dialogue et ils expriment l’espoir que ce dialogue permettra d’amender des normes dont la mise en œuvre peut s’avérer particulièrement complexe ou conflictuelle pour les employeurs.
Le deuxième point que nous aborderons concerne la liberté syndicale définie négativement, avec le décret suprême no 014-2022-TR qui comporte une disposition affectant les employeurs sur l’extension unilatérale des effets d’une convention collective conclue par un syndicat ne représentant pas la majorité des travailleurs du milieu considéré. L’exposé des motifs de ce décret prétend justifier cette mesure en faisant référence à l’opinion du Comité de la liberté syndicale selon laquelle la reconnaissance du syndicat le plus représentatif ne doit pas empêcher les syndicats minoritaires de fonctionner ou d’exprimer leurs revendications.
Sur cette question, il est évident qu’il n’y a pas de lien logique entre cette opinion du Comité de la liberté syndicale et le nouveau cadre réglementaire instauré. La grave déficience que présente ce raisonnement résulte de l’absence d’une réflexion adéquate dans le cadre du dialogue social entre les partenaires concernés. Mais, qui plus est, si l’on veut bien prendre un peu de recul, il apparaît paradoxal que les fondements de cette mesure soient la supposée incompatibilité de la norme antérieure avec le développement des droits à la liberté syndicale et la négociation collective.
Le gouvernement omet de faire référence aux avis que les employeurs ont exprimés sur l’extension d’une convention collective, extension dont les autres organes de contrôle ont retenu la validité. Il est faux que les organes de contrôle de l’application des normes internationales du travail considéreraient que l’extension à des travailleurs non syndiqués des effets d’une convention collective souscrite avec un syndicat minoritaire serait une pratique antisyndicale. Ce qui est clair et certain, c’est que forcer des travailleurs à se syndiquer pour accéder à des avantages économiques élémentaires tels qu’une augmentation générale des rémunérations affecte le droit des travailleurs à ne pas se syndiquer, ce qui est contraire à la convention.
La liberté syndicale se définit à la fois positivement et négativement. Positivement, en ce sens que l’on ne peut interdire aux travailleurs ou limiter le droit de ceux-ci de constituer des organisations de leur choix ou de s’affilier à de telles organisations et négativement, en ce qu’aucun travailleur ne peut être tenu de se syndiquer pour pouvoir travailler ou pour avoir accès aux avantages accordés par l’entreprise dans laquelle il travaille.
Nous souhaitons de même aborder ici le problème de l’inégalité arbitraire qui caractérise actuellement l’accès à l’arbitrage facultatif. Le décret pertinent habilite seulement les organisations syndicales à demander un arbitrage obligatoire – comme faculté optionnelle – et il exclut les employeurs de cette faculté, ce qui affecte clairement l’égalité entre les parties par un déséquilibre qui porte atteinte au caractère libre et volontaire de la négociation collective. Ceci est particulièrement grave si l’on veut bien considérer que l’arbitrage est en général un mécanisme auquel il est recouru en cas d’inadéquation quant au niveau de négociation, c’est-à-dire que le décret empêche les employeurs de recourir à ce mécanisme dans ce type de conflit, ce qui crée une situation telle que la modification du niveau de négociation ne peut être discutée ou remise en cause que par les travailleurs.
La norme favorise l’instauration d’un système incitatif selon lequel les entités syndicales pourraient arrêter de négocier collectivement en vue de parvenir à la satisfaction de leurs revendications dans le cadre de ce qui ne serait qu’une sorte de première instance, avec la certitude qu’ensuite elles pourraient recourir unilatéralement à l’arbitrage, dans l’espoir que le tribunal arbitral leur permettra d’obtenir des avantages plus grands, si bien que la négociation collective pourrait au final perdre de son sens et ne devenir qu’une simple formalité.
Enfin, un autre aspect que nous souhaitons aborder est le rapport à la grève. Le droit de recourir à la grève est une question sur laquelle la commission d’experts formule des commentaires de manière réitérée dans ce contexte. Nous considérons qu’il est très important de rappeler que la Constitution politique du Pérou et la législation du travail de ce pays reconnaissent le droit de grève dans le cadre de la négociation collective; cependant, nous souscrivons pleinement à la position que nous avons fait valoir de manière réitérée, en tant que groupe des employeurs et membre de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) chaque fois que cette question a été soulevée dans le cadre de la présente commission.
Voici ce que nous avons dit à ce sujet: les employeurs rappellent leur désaccord avec la commission d’experts à propos de la convention et du droit de grève. Ils tiennent à souligner que ni cette convention ni aucune autre convention de l’OIT ne contient de normes sur le droit de grève. Cet aspect a également été souligné par le groupe gouvernemental dans sa déclaration de position de mars 2015, aux termes de laquelle l’extension de la condition de ce droit se règle au niveau national.
En conséquence, les gouvernements déterminent légitimement pour eux-mêmes la portée du droit de grève, se guidant en cela librement sur leurs nécessités et sur les priorités nationales, sans être obligés de suivre les recommandations de la commission d’experts.
Pour cette raison, nous nous abstiendrons de faire plus de commentaires à ce sujet dans le cadre de la présente commission et eu égard à nos divergences par rapport à la réglementation envisagée dans le décret suprême no 014-2022-TR, et nous espérons pouvoir aborder cette question au Pérou, à la faveur de la volonté de dialogue manifestée par les autorités gouvernementales actuelles.
Membres travailleurs – Nous voudrions commencer par évoquer le souvenir de Carlos Ledezma, disparu récemment, qui était conseiller juridique de nos confédérations syndicales et qui s’occupait de la coordination entre les organisations affiliées de notre région des Amériques et la présente commission. Péruvien de naissance, il fut un compagnon généreux et un défenseur infatigable des droits syndicaux et des droits humains, ce pourquoi nous nous permettons de lui rendre hommage ici.
Le rapport de la commission d’experts fait ressortir en ce qui concerne le Pérou toute une série de situations préoccupantes touchant à la restriction de l’activité syndicale, qui doivent être abordées si l’on veut que l’exercice effectif des droits fondamentaux au travail protégés par la convention soit garanti. Le rapport identifie également certains aspects positifs qui doivent être plus particulièrement encouragés dans la présente conjoncture politique difficile que connaît le pays. Nous parlons, concrètement, de certains changements introduits par le décret suprême no 014-2022-TR du 24 juillet 2022 qui, entre autres choses, reconnaît expressément aux travailleuses et aux travailleurs le droit d’affiliation directe à des fédérations ou des confédérations. Le droit de former des syndicats de groupes d’entreprises, de chaînes de production ou encore de réseaux de sous-traitance, quant à lui, proscrit le remplacement, par des moyens directs ou indirects, de travailleurs exerçant leur droit de faire grève ainsi que toutes autres mesures visant à faire obstacle à l’exercice de ce droit.
La norme apporte une réponse pertinente aux observations qu’avaient formulées avec justesse les organes de contrôle de l’OIT par rapport à la législation et la pratique du Pérou dans le domaine des relations socioprofessionnelles.
L’aspect frappant de ce cas est la réaction que les employeurs ont eue devant cette nouvelle législation, en se montrant hostiles à celle-ci au motif qu’elle ferait progresser la syndicalisation.
Loin de toute vision négative, nous estimons au contraire que la promotion de l’activité syndicale est un moyen de développer des espaces démocratiques dans les sociétés modernes puisqu’elle permet de donner une voix aux intérêts des travailleurs dans les termes de l’article 10 de la convention.
Nous devons insister sur le point que des organisations syndicales fortes et indépendantes sont nécessaires pour compenser le déséquilibre affectant les travailleurs dans l’accès aux pouvoirs judiciaires et économiques. C’est donc portée par la voix de la raison que la commission d’experts exprime l’espoir que l’application de ce décret suprême – instrument qui, selon les indications du gouvernement, a vu le jour en raison de la situation préoccupante de la liberté syndicale dans le pays – contribuera à garantir l’exercice plein et entier des droits consacrés par la convention, et qu’elle prie le gouvernement de donner des informations sur l’impact de l’application de cet instrument.
S’agissant de l’aspect central dont nous voulons parler, le rapport de la commission d’experts fait observer qu’il existe dans la législation nationale toute une série de limitations à la reconnaissance de la liberté syndicale pour certaines catégories de travailleurs, comme c’est le cas de ceux qui suivent une formation, des juges, des procureurs et du personnel de direction et de confiance de l’administration publique.
Ce que nous savons c’est que la convention s’applique à toutes les travailleuses et tous les travailleurs sans distinction d’aucune sorte, et cela suffit à justifier que l’on exige le rétablissement du droit à la liberté syndicale pour les catégories de travailleurs qui en sont privées de manière illégitime.
Le rapport aborde également le problème du pouvoir limitatif du droit à la liberté syndicale dont l’autorité du travail est investie, du fait, en particulier, que cet organisme exerce un contrôle de la légalité des grèves, tant pour le secteur privé que pour le secteur public, alors que le gouvernement omet de procéder, depuis plus de six années, à la création de la Commission d’appui au service public, instrument qui conférerait au processus de déclaration et d’exercice de la grève l’impartialité qui en est attendue.
L’absence de garantie est telle que par exemple, d’après les données recueillies pour l’année 2020, l’administration a déclaré illégales 100 pour cent des grèves. Par ailleurs, le gouvernement péruvien maintient un système de règles qui est ambigu quant à la portée du jugement de l’organisme technique indépendant qui doit se prononcer en cas de divergence en matière de service minimum dans le contexte d’une grève.
L’incertitude et l’insécurité juridique qui en résulte sont telles qu’il est impossible de savoir clairement s’il existe une obligation positive de convocation de cet organisme par l’autorité du travail.
Nous sommes face à une question cruciale devant laquelle nous demandons instamment au gouvernement de s’engager à modifier la législation dans un sens propre à entourer l’exercice du droit fondamental de faire grève de garanties suffisantes. Pour mieux illustrer cette situation, nous pouvons citer à titre d’exemple le cas d’une entreprise du secteur des boissons dont l’organisation syndicale, le SITRACORLINSA, a engagé une procédure de contestation dans laquelle il attaque la détermination du service minimum, face à une politique de l’entreprise qui, d’année en année, n’a fait qu’accroître le nombre des postes classés comme rentrant dans le service minimum, au point que lors d’une grève, en 2022, à travers l’application de cette formule, plus de 70 pour cent des travailleurs de l’entreprise se trouvaient réquisitionnés, se trouvant ainsi privés de l’exercice du droit de grève au motif qu’ils occupaient des postes indispensables.
Ceci ainsi que d’autres restrictions de la liberté syndicale sont le fruit à la fois d’une ingérence démesurée de l’État dans l’activité syndicale, qui est contraire au principe d’autonomie consacrée par l’article 3 de la convention, et de la carence de celui-ci, lorsqu’il s’agit de prendre des dispositions qui permettraient de balayer ces problèmes, comme par exemple mettre en place la Commission d’appui au secteur public, qui ne s’est jamais matérialisée, ainsi que la détermination des services essentiels par un organisme indépendant.
Enfin, la présence du gouvernement devant la présente commission est l’occasion d’inciter celui-ci à réviser les dispositions finales du décret suprême no 017-2007-ED, qui définissent comme faute grave, pour un directeur ou un sous-directeur d’établissement d’enseignement, le fait de mettre à disposition un local scolaire pour des réunions à caractère syndical. À notre avis, il importe de ne pas entraver la liberté et l’autonomie des partenaires sociaux, qu’il s’agisse de chefs d’établissements d’enseignement ou de syndicats, sur la détermination des conditions d’utilisation de locaux pour l’exercice de l’activité syndicale, à peine, à défaut de cela, d’entraver le fonctionnement de certaines institutions.
Comme nous l’avons résumé succinctement, le cumul des atteintes à l’exercice de l’activité syndicale au Pérou appelle une série de mesures comprenant des modifications de la législation et l’activation de certains mécanismes qui sont prévus dans le droit positif, mais que le gouvernement s’abstient de concrétiser, si l’on veut parvenir à ce que le droit fondamental qu’est la liberté syndicale puisse s’exercer comme il convient.
Nous tenons à dire ici que nous soutenons la commission d’experts, c’est-à-dire que le groupe des travailleurs réaffirme la position de cette instance quant au droit de grève en ce que ce droit se trouve bien incorporé dans la convention, et que cette affirmation ne saurait être présentée dans cette instance comme une conception propre uniquement à notre groupe.
Membre employeuse, Pérou – Nous présenterons la position des employeurs du Pérou, représentés par la Confédération nationale des entreprises privées. Nous voudrions évoquer les atteintes à la convention auxquelles notre gouvernement s’est livré en adoptant le décret suprême no 014 de 2022 portant modification du règlement de la loi de relations collectives du travail, instrument qui a été adopté en faisant totalement fi de l’avis des employeurs, sans considération de ce que les matières qu’il régit sont incluses dans l’avant-projet de code du travail qui était alors en cours de discussion devant les partenaires sociaux réunis sous l’égide du CNTPE, comme le gouvernement l’a reconnu ici aujourd’hui.
Par ce procédé, le gouvernement non seulement a porté atteinte au dialogue social mais encore a manqué à l’engagement qu’il avait pris devant l’OIT dans un mémorandum promettant de réviser le Code du travail et de garantir un dialogue social constructif. Au rebours de cela, il est intervenu de manière arbitraire dans des questions qui se trouvaient alors pendantes devant une instance de concertation.
L’adoption unilatérale de cette norme a suscité la vive opposition des milieux employeurs, qui ont vu dans cette conduite aveugle du gouvernement la décrédibilisation pure et simple du CNTPE, raison pour laquelle les employeurs se sont vus obligés de se retirer de cette instance à titre de protestation.
Il est important de considérer que l’adoption de ce décret suprême n’a pas été une mesure isolée du gouvernement mais qu’elle s’inscrivait au contraire dans un agenda de mesures concrètes concertées exclusivement avec la partie travailleurs, c’est-à-dire qu’il s’agissait d’une politique par laquelle l’État non seulement a ignoré les employeurs mais en outre a nié le rôle de ceux-ci dans l’instauration du travail décent à travers le développement d’entreprises responsables et durables.
Le gouvernement a déclaré que l’absence de participation et de dialogue avec les organisations représentatives des employeurs se justifiait par le fait que cet instrument n’introduisait que des modifications accessoires portant sur des aspects de procédure, ce qui est absolument faux car les modifications introduites par cet instrument affectent 43 pour cent du règlement.
Il a également été dit qu’il était nécessaire de résoudre une prétendue incompatibilité de la réglementation antérieure avec les normes internationales du travail. En fait, on ne recense guère que deux observations, nettement circonscrites, de l’OIT relatives à notre réglementation: l’une sur l’enregistrement des syndicats et l’autre sur la dissolution des syndicats. Il est donc patent que ces deux observations ne sauraient avoir justifié la modification unilatérale et arbitraire de plus de 40 pour cent de notre réglementation des relations collectives du travail.
Au contraire, il y a eu régression par rapport aux progrès qui avaient été accomplis en réponse à des observations antérieures de l’OIT. En 2003, le Pérou a adopté une loi intitulée avec justesse «loi devant lever les observations du Comité de la liberté syndicale du BIT» par laquelle la réglementation des relations collectives du travail a été modifiée. Cette loi de 2003 avait fait l’objet d’une vaste discussion entre les partenaires sociaux. Le projet en avait été examiné au sein du Conseil national du travail, au cours de 13 séances ayant permis de recueillir un consensus sur 12 questions, ce qui est dire combien nous avions alors une réglementation qui était le produit du consensus et cette réglementation a été anéantie par un simple récrit du prince.
Nous reconnaissons les efforts que le gouvernement vient de déployer à travers l’actuel ministère du Travail en vue de rétablir le dialogue social. Nous nous félicitons de ce que, comme un premier pas, des instances de concertation bilatérale dans lesquelles nous participons activement ont été mises en place récemment. Cela étant, cet effort récent n’efface pas les lésions commises antérieurement à l’endroit du tripartisme à travers l’adoption du décret suprême no 014.
Pour cette raison, nous demandons l’abrogation de cet instrument ainsi que la réinitialisation de la discussion consacrée à la réglementation des relations collectives du travail et, pour cela, nous espérons pouvoir compter sur le ferme appui et l’assistance technique de l’OIT.
S’agissant des modifications introduites, il convient de souligner certains des points qui portent atteinte aux droits fondamentaux des employeurs comme des travailleurs.
En premier lieu, on a instauré une interdiction généralisée d’étendre les effets d’une convention collective signée avec un syndicat minoritaire aux travailleurs qui ne sont pas affiliés à ce syndicat. Dans un contexte économique international d’inflation élevée et de faible croissance économique, l’impossibilité d’étendre les bénéfices d’une convention collective à ceux des travailleurs qui ne sont pas syndiqués peut au final porter préjudice à ces travailleurs, qui sont une majorité au Pérou.
On s’attardera sur la gravité de la façon dont cette disposition affecte, au mépris total de la liberté syndicale et des principes de la convention, la liberté syndicale des travailleurs de s’affilier librement et de leur propre volonté, par le fait qu’elle prétend faire progresser le taux d’affiliation en obligeant les travailleurs à se syndiquer pour pouvoir prétendre à des avantages.
Il existe au Pérou depuis longtemps une règle selon laquelle une convention collective conclue par un syndicat minoritaire n’est applicable qu’aux travailleurs affiliés à ce syndicat, mais sans qu’il soit pour autant interdit d’étendre librement et volontairement les effets de cette convention collective au personnel qui n’est pas syndiqué, et cela a été une pratique fréquente, qui a été reconnue comme valide par les autres instances de cette organisation.
Y compris dans la jurisprudence nationale du travail, on avait établi comme critère majoritaire qu’une telle extension des avantages inclus dans une convention collective était indiscutablement possible. En interdisant désormais une telle extension, le gouvernement va à l’encontre de décisions formant la jurisprudence nationale ainsi que de celles de l’OIT. Nous tenons à souligner ici que le gouvernement précédent, confronté à n’importe quel problème, avait constamment pris le parti de recourir à l’interdiction ou à une restriction encore plus drastique.
Nous demandons à l’OIT de nous aider à analyser des solutions alternatives qui pourraient être apportées dans ce domaine, en faisant intervenir un spécialiste de niveau international connaissant des systèmes comparés de relations collectives du travail et pouvant agir comme facilitateur dans le processus de rétablissement progressif du dialogue social proposé par le gouvernement actuel.
Deuxièmement, il est alarmant que le décret suprême habilite les seules organisations syndicales à demander un arbitrage obligatoire, car cela confère un privilège injustifié à l’une des parties à la négociation. Il convient de rappeler que la législation péruvienne permet de recourir à un arbitrage obligatoire en tant que mécanisme de solution des conflits collectifs dans un très large spectre de domaines, notamment pour la détermination du niveau de négociation, contrairement à l’idée qu’un tel recours devrait être exceptionnel et n’intervenir que dans des situations extrêmes.
Dans ce contexte, il est évident que l’accès exclusif de la partie travailleurs à l’arbitrage porte atteinte à la négociation collective libre et volontaire. Comme on l’a exposé, il convient de souligner que nous ne visons pas dans nos critiques le fait que cette réglementation prétende accroître l’affiliation syndicale mais le caractère unilatéral de l’adoption des nouvelles règles ainsi que les lésions qu’elles portent aux droits fondamentaux des employeurs comme des travailleurs. L’objectif de faire progresser l’affiliation syndicale ne saurait en aucun cas justifier le déni de consultations tripartites et la lésion de droits fondamentaux.
Face à de telles atteintes à la liberté syndicale et au dialogue tripartite en tant que ciment du modèle démocratique des relations du travail, nous réitérons notre demande tendant à ce que les effets du décret suprême no 014 de 2022 soient suspendus, afin que les partenaires sociaux puissent renouer le dialogue, lequel doit être la base de toute réforme de notre système de relations du travail.
Membre travailleur, Pérou – Nous préciserons tout d’abord que le gouvernement actuel du Pérou n’est pas le gouvernement populaire et légitime qui a remporté les élections de 2021 et qu’il ne représente pas la continuité du changement structurel en faveur des plus pauvres à laquelle s’était engagé le Président Pedro Castillo, dont l’exercice a pris fin le 7 décembre 2022. Aujourd’hui, ceux qui gouvernent notre pays sont ceux qui ont renié leurs engagements à l’égard du peuple et se sont alliés à des formations politiques de droite et d’extrême droite qui avaient perdu les élections en 2021. Depuis les années quatre-vingt-dix, avec un régime de dictature similaire, ils nous ont imposé un cadre légal qui a généré une pauvreté généralisée et extrême, à travers des recettes capitalistes et des mesures néolibérales qui ont été instaurées à la faveur de discours trompeurs tissés de promesses sans suites de croissance économique, tandis que des millions de travailleurs se sont retrouvés à la rue et que leurs familles doivent renoncer à tout espoir d’une vie digne.
J’évoquerai ici plusieurs faits: à la fin des années quatre-vingt, non moins de 70 pour cent des travailleurs appartenaient à l’économie formelle et seulement 30 pour cent à l’économie informelle. Aujourd’hui, 75 pour cent appartiennent à l’économie informelle et seulement 25 pour cent à l’économie formelle. Le taux de syndicalisation est passé de 40 pour cent de la population économiquement active à seulement 5 pour cent dans le secteur privé. L’industrie nationale a continué d’être détruite. Nous sommes un pays principalement exportateur sans valeur ajoutée. La qualité de nos services de santé et d’éducation, l’anéantissement de notre pouvoir d’achat et l’étendue de la pauvreté économique nous placent aujourd’hui au dernier rang de tous les pays de la région des Amériques.
Au Pérou, le droit humain qu’est la liberté syndicale a été délibérément «flexibilisé» à travers des normes légales. L’État n’assume plus son rôle de garantie et de promotion du droit syndical de la classe ouvrière: au contraire, il annule des registres syndicaux par des décisions administratives.
On a instauré, sans dialogue social, des lois qui empêchent l’exercice de celui-ci, comme des régimes d’engagement spéciaux qui n’ont pas d’autre objet que de contourner ce droit. Par exemple, dans le secteur privé, nous avons les régimes de l’agro-industrie, d’exportation de produits non traditionnels et, dans le secteur public, nous avons par exemple des régimes de louage de services administratifs, des systèmes dénaturés d’engagement par des intermédiaires. On annule des affiliations syndicales par des décisions administratives et des millions d’hommes et de femmes se retrouvent soumis à des conditions de travail précaires, leur principale préoccupation devenant celle de conserver leur emploi et de procurer un moyen d’existence à leur foyer, sachant que s’ils cherchent à se syndiquer, ils courent le risque de perdre leur emploi.
Le droit de négociation collective est un autre pilier de la liberté syndicale que l’État péruvien ne garantit plus en promulguant sans dialogue social des lois qui permettent aux employeurs d’étouffer indéfiniment les revendications des travailleurs et de faire prévaloir son absence de volonté de trouver des solutions. L’État lui-même ainsi que ses institutions se sont constitués, à travers certaines lois, comme de simples observateurs de ce qui se produit entre les parties et n’exercent plus leur pouvoir d’intervenir et de résoudre les problèmes lorsque le dialogue se trouve bloqué par une position intransigeante des employeurs.
Le droit de grève a été délibérément dépouillé de ses effets pour les travailleurs en imposant dans ce domaine des conditions qui ne servent qu’à nier ce droit avec, par exemple, la désignation d’un nombre minimum de travailleurs essentiels et indispensables pour préserver la sécurité des installations et garantir la reprise normale des activités après la grève, règle que les employeurs détournent à leur profit pour qualifier ainsi n’importe quelle catégorie d’emplois, sans justification technique rationnelle, en plus de recourir au harcèlement des dirigeants syndicaux et des travailleurs syndiqués qui déclarent la grève et à des mesures de rétorsion lorsque la grève est effective.
Combien de temps faut-il à un employeur pour licencier un travailleur au Pérou? Le temps de signer la lettre de licenciement. Combien de temps faut-il à un travailleur pour obtenir justice et être réintégré? De cinq à six ans: le temps que nécessite une procédure judiciaire.
Quant à la légitimité du droit de contestation sociale, ce droit a été mis à mal dans mon pays lorsqu’il a été décidé de réprimer férocement des citoyens qui protestaient depuis le 7 décembre contre le régime actuel et qui exigeaient de manière solidaire la tenue de nouvelles élections générales à la présidence et au Parlement, en incluant dans ces élections une consultation en vue d’une nouvelle constitution.
La population la plus pauvre et la plus discriminée de mon pays s’est heurtée à une répression brutale, à travers un recours effréné à la force des formations policières et militaires qui a fait 70 morts, la plupart victimes de véritables exécutions extrajudiciaires résultant de tirs directs d’armes à feu et de bombes lacrymogènes sur les manifestants, comme cela est établi par des rapports émanant des Nations unies, de l’Organisation des États américains et d’Amnesty international.
Par ailleurs, effectivement, au Pérou, il n’y a pas de dialogue social. La législation qui régit les relations individuelles et collectives du travail a été essentiellement imposée sans dialogue ni consultation aucune pendant la décennie des années 1990, sous la dictature d’Alberto Fujimori. Ce fut une période marquée par les meurtres de dirigeants syndicaux, dont celui de Pedro Huilca, qui était secrétaire général de la CGTP, affaire dont la Cour interaméricaine des droits de l’homme a été saisie.
Depuis cette époque, aucune loi du travail n’a été le fruit du dialogue social. La loi de relations collectives est un décret-loi, c’est-à-dire une loi adoptée par le Président lui-même alors que celui-ci venait de dissoudre le Congrès, en 1992. La loi instaurant le système privé de pensions, qui a rendu possible un enrichissement éhonté de milieux employeurs en contrepartie du versement de pensions infinitésimales aux travailleurs retraités, n’a naturellement pas fait l’objet d’un dialogue social. Les lois instaurant les régimes spéciaux de travail, comme en 2000 dans le secteur agricole et en 2003 pour les micro et petites entreprises, qui ont marqué une régression des conditions de travail, n’ont pas fait l’objet d’un dialogue social elles non plus, pas plus d’ailleurs que la loi de 2007 sur la sous-traitance, qui a pourtant péjoré les conditions de travail de millions de personnes.
Pourquoi n’entendons-nous que maintenant les employeurs réclamer un dialogue social? Les travailleuses et les travailleurs péruviens ont une explication: parce que les travailleurs veulent pouvoir constituer des syndicats incluant des travailleurs en sous-traitance ou avec des travailleurs appartenant au même groupe d’entreprises; parce que les travailleurs veulent pouvoir s’affilier directement à des fédérations ou des confédérations; parce qu’ils veulent que les formalités bureaucratiques afférentes à l’enregistrement des syndicats soient abrogées et que leur droit à l’information en vue de la négociation collective soit officiellement consacré (entre autres raisons parmi celles que nous avons déjà détaillées).
Est-ce un hasard si toutes ces dispositions s’avèrent contraires aux principes affirmés à longueur de temps par la commission d’experts et par le Comité de la liberté syndicale? Les travailleuses et les travailleurs du Pérou veulent le dialogue social mais, comme le dit l’OIT, ils veulent un dialogue dans le plein respect de la liberté syndicale et des libertés civiles et politiques, parce qu’un dialogue dans un climat où l’on ne respecte pas ces droits fondamentaux n’est pas un dialogue social, c’est de l’autoritarisme à peine masqué.
C’est pourquoi nous demandons formellement la création d’une mission de contact au plus haut niveau, qui se rendra au Pérou dans les plus brefs délais pour:
- analyser in situ les innombrables violations de la liberté syndicale qui se sont produites au Pérou. Les centrales syndicales disposent de rapports techniques et de dossiers documentés mentionnant les employeurs responsables, documents dont certains ont été proposés pour illustrer nos commentaires dans les rapports relatifs à l’application de la présente convention ainsi que de la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949;
- analyser in situ les raisons pour lesquelles des procédures judiciaires accusent de tels délais; observer les procédés dilatoires auxquels recourent les parties que nous tenons pour en être à l’origine et constater la situation lamentable de la justice du travail au Pérou;
- enquêter sur les raisons pour lesquelles les observations faites par les organes de contrôle de l’OIT sont laissées sans suite par les gouvernements successifs;
- déterminer pourquoi la réforme intégrale de la législation du travail n’a pas pu être menée par le dialogue social, quelles sont les parties qui y ont fait obstacle ou qui ont mené une action dilatoire pour empêcher de parvenir à des résultats; et
- analyser et corroborer le rapport étroit qui existe entre les violations récentes des droits de l’homme, des droits politiques et des droits civils qui ont été documentées par des instances fiables et indépendantes comme, entre autres, la Commission interaméricaine des droits de l’homme et Amnesty international, violations qui ont été le fait du gouvernement actuel et qui ont été commises en lien avec le libre exercice de la liberté syndicale au Pérou.
Membre gouvernemental, Colombie, s’exprimant au nom d’une majorité significative de pays d’Amérique latine et des Caraïbes – Nous prenons acte des informations communiquées par la République du Pérou en lien avec les observations formulées par la commission d’experts sur l’application de cette convention.
Nous prenons acte en particulier des informations présentées par le gouvernement du Pérou sur le renforcement du dialogue social dans le pays avec les milieux employeurs et les centrales syndicales. Nous apprécions également les informations du gouvernement relatives à la conduite de réunions bilatérales dans le cadre desquelles les organismes représentatifs des employeurs et des travailleurs ont eu la possibilité de faire entendre leurs préoccupations en vue de parvenir à des solutions constructives. Nous relevons comme un effet positif que le gouvernement indique que ces actions ont eu un impact favorable en faisant reculer la conflictualité au travail et en consolidant les relations socioprofessionnelles.
S’agissant de la reconnaissance du droit de se syndiquer au personnel de direction et de confiance de l’administration au Pérou, nous reconnaissons, comme le gouvernement, l’importance qui s’attache à l’équilibre et l’impartialité dans l’exercice des fonctions des juges et des procureurs. Sur la base de ce qui a été dit précédemment, nous apprécions les informations concernant l’engagement de l’État péruvien à promouvoir le dialogue social et le tripartisme. Enfin, nous exhortons le secrétariat de l’OIT à continuer de fournir sa coopération technique au gouvernement du Pérou.
Membre gouvernemental, Suisse – La Suisse souhaite rappeler que la liberté syndicale et le dialogue social sont essentiels pour garantir les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs et pour contribuer au développement économique et social des pays. Le droit fondamental de constituer des organisations de leur choix, de manière libre, indépendante et autonome, devrait être garanti à tous les travailleurs, y compris les travailleurs en cours de formation, les juges et procureurs, et pour le personnel de direction et de confiance de l’administration publique.
La Suisse constate avec intérêt que le Pérou a engagé des modifications législatives encourageantes. Nous exprimons l’espoir que les organisations d’employeurs et de travailleurs seront consultées dans ces processus et que ces réformes seront effectivement appliquées.
La Suisse encourage le gouvernement du Pérou à continuer ses efforts et à suivre les recommandations de la commission d’experts en vue de garantir la liberté syndicale en droit et dans la pratique. Elle l’invite à fournir toutes les informations demandées et, si nécessaire, solliciter l’assistance technique du Bureau. Cela contribuera à la création d’un environnement propice au développement et à la promotion d’un dialogue social constructif.
Membre employeur, Colombie – Les normes internationales du travail et les observations réitérées de la commission d’experts se réfèrent, les unes comme les autres, à l’engagement de mener des consultations efficaces. Elles ont comme fondement le dialogue social, instrument essentiel pour l’élaboration de manière concertée, entre les travailleurs, les employeurs et les gouvernements, de propositions communes axées sur le progrès, la paix et le bien-être général.
Dans ce sens, pour parvenir à un véritable dialogue et, au final, au déploiement de consultations efficaces, il faut un climat de confiance reposant sur le respect des organisations patronales et syndicales. Il est préoccupant de constater, d’après ce qui précède, que le gouvernement du Pérou a adopté le décret suprême no 014-2022-TR modifiant intégralement le régime normatif régissant les relations collectives de travail en suivant une démarche unilatérale, éloignée de tout type de consultations tripartites ou de dialogue social.
Il est important de relever qu’aux termes de son préambule, ce décret a pour objet de «mettre les dispositions en vigueur […] en harmonie avec les observations de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations de l’OIT». Je souligne cela, considérant que pour tout un chacun il ne fait pas de doute que le tripartisme est l’un des principes essentiels de cette maison, de sorte qu’il paraît inadmissible d’invoquer les observations de la commission d’experts pour méconnaître, justement, l’importance du dialogue social avec les partenaires sociaux. En second lieu, ce même décret développe des aspects normatifs qui s’avèrent d’une importance vitale non seulement pour la négociation collective mais encore pour tous les scénarios possibles de dialogue social. Ce décret suprême régit les conditions de la reconnaissance, de l’exercice et du caractère impératif du droit d’association syndicale, la représentativité syndicale, les garanties syndicales, la portée des conventions collectives, l’arbitrage et d’autres aspects. Dans bon nombre de ses dispositions normatives, il impose des limitations à la liberté d’entreprendre, limitations qui, même si elles pourraient être raisonnables, n’en doivent pas pour autant être décidées de manière unilatérale par le pouvoir exécutif.
Compte tenu de ce qui précède, je souhaiterais faire ressortir que, dans un régime démocratique, la fin ne justifie pas les moyens. Au contraire, sous l’égide du tripartisme, le dialogue social est le moyen qui confère tout leur sens aux objectifs communs. C’est pourquoi l’absence de consultations tripartites ne saurait être légitimée par de prétendues fins louables, telle que peut l’être l’intention de faire progresser un taux de syndicalisation trop bas.
En dernier lieu, nous appelons à ce que toutes les propositions normatives donnent dûment lieu à des consultations au sein du Conseil national du travail et de la promotion de l’emploi du Pérou, afin que cette instance exerce pleinement ses prérogatives.
Membre travailleur, Portugal – La législation du travail du Pérou est en vigueur depuis plusieurs décennies. La matière faisant l’objet du présent cas est un décret suprême qui n’altère en rien la loi elle-même.
De fait, dans ce pays, avec le changement de gouvernement et la destitution illégale du Président élu, il est clair que le droit d’association se trouve remis en question. Sans le droit de faire grève, de manifester ou de s’associer librement, ce qui est remis en cause, c’est l’application de cette convention et le respect des principes du dialogue social. Nous savons que, ces derniers mois, des travailleurs ont été assassinés pendant des manifestations, des dirigeants syndicaux ont été poursuivis, des travailleurs ont été licenciés pour s’être affiliés à des syndicats ou ont été arrêtés pour avoir fait grève.
Nous savons également que le patronat de ce pays ne reconnaît pas le droit de négocier collectivement par branche d’activité, niant par le fait un droit fondamental des travailleurs péruviens. Nous savons également que malgré les efforts déployés par le Président Castillo pour tenter d’instituer une convention collective de travail dans le secteur public qui devait bénéficier à quelque 600 000 travailleurs, le gouvernement actuel laisse sans réponse les attentes des travailleurs sur ce plan et dénie à ceux-ci toute solution qui leur serait favorable.
Il nous paraît donc clair qu’on ne saurait considérer le dialogue social comme acquis dès lors que l’on ne respecte pas les accords mis en œuvre par le gouvernement précédent, ou que l’on ne garantit pas le droit à la négociation collective. Il nous paraît également clair que, en l’absence du droit de grève et de manifestation et en l’absence des droits des syndicats et de la liberté d’association, l’application de la convention n’est pas assurée.
Concrètement, il nous semble que l’on ignore des droits tels que le droit de grève et le droit de manifestation, les droits syndicaux et la reconnaissance effective du droit à la négociation collective. Pour cette raison, nous appelons à ce qu’il soit procédé à une analyse des diverses violations des droits syndicaux commises au Pérou, dans l’objectif ultime de contribuer au plein respect du droit à la liberté syndicale et à la liberté de négociation.
C’est pourquoi nous soutenons la demande formulée par les centrales syndicales péruviennes sous la conduite de la CGTP, tendant à ce qu’une mission de haut niveau soit menée par l’OIT au Pérou afin d’établir les faits en ce qui concerne les graves manquements commis au préjudice des travailleurs.
Membre employeur, Costa Rica – Selon ce qui a été expliqué dans cette instance, les relations collectives du travail devraient être réglées par voie de consensus par les partenaires sociaux dans le cadre du Conseil national du travail.
À ce titre, il paraît particulièrement grave que ce processus ait été rompu par effet d’une action normative unilatérale, menée sans consultation ni dialogue social. Nous devons souligner l’importance qui s’attache à ce que les systèmes de relations socioprofessionnelles se construisent par le jeu de mécanismes démocratiques incluant la consultation et le dialogue avec les employeurs et avec les travailleurs, en particulier dans des domaines aussi fondamentaux que la liberté syndicale et la négociation collective.
Dans ce contexte, nous considérons favorablement l’intérêt manifesté par l’actuel ministère du Travail du Pérou pour le rétablissement des mécanismes de dialogue social et nous espérons qu’ainsi tous les obstacles évoqués parviendront à être levés dans les délais les plus brefs et dans le respect du principe de bonne foi.
Comme on a pu l’apprécier, lorsqu’il est permis exclusivement à la partie travailleurs de recourir à l’arbitrage obligatoire en cas de conflit collectif du travail, nous avons clairement affaire à une situation manifestement incompatible avec les normes internationales du travail.
En dernier lieu, nous souhaitons appeler l’attention sur la nécessité d’éliminer toute restriction de la liberté syndicale des travailleurs définie négativement, notion qui entre, elle aussi, dans le champ de la protection de la convention. En aucun cas il ne faudrait confondre la promotion de la négociation collective avec la contrainte à l’affiliation syndicale.
Membre employeur, État plurinational de Bolivie – Dans cette instance, il a toujours été d’usage de soutenir le dialogue social et le développement du tripartisme en tant que moyen d’apporter des solutions abouties aux différents problèmes qui peuvent se poser, dans le sens des intérêts légitimes de toutes les parties prenantes, qu’il s’agisse des employeurs ou des travailleurs.
Dans ce contexte, il est en outre préoccupant que le gouvernement du Pérou ait décidé de modifier unilatéralement une norme qui était le produit précisément du dialogue social que l’on encourage et du consensus entre les employeurs et les travailleurs. Il est essentiel que cette situation soit assainie dans les plus brefs délais.
En outre, j’appelle l’attention sur le fait que, selon les explications données par la représentation des employeurs du Pérou, ce décret suprême interdit d’étendre aux travailleurs qui ne sont pas affiliés les avantages prévus par une convention collective conclue avec le syndicat minoritaire. Une telle situation est franchement inacceptable, puisqu’elle tend à obliger les travailleurs non syndiqués à s’affilier, ce qui porte atteinte au droit de choisir librement de se syndiquer ou non.
Si le gouvernement a adopté cette norme au motif que l’extension des avantages prévus par une convention collective à des travailleurs non syndiqués serait un acte antisyndical, le fait est qu’une telle conception est erronée puisque, comme on le sait, les organes de l’OIT ont déjà eu en d’autres circonstances l’occasion de se prononcer favorablement sur la légitimité pleine et entière de l’application de conventions collectives non seulement aux parties contractantes et leurs adhérents mais à tous les travailleurs qui entrent dans le champ d’action de ces instruments, même si ces travailleurs ne sont pas syndiqués, l’une ou l’autre option étant parfaitement légitime et pouvant être adoptée indifféremment par la législation nationale.
En outre, nous estimons important de souligner que s’il est assurément possible d’instaurer une règle générale à caractère d’orientation disposant qu’une convention collective peut étendre ou ne pas étendre ses effets aux travailleurs qui ne sont pas affiliés au syndicat considéré, une telle option ne saurait être détournée de son but pour tenter d’imposer une interdiction absolue de l’extension des effets d’une convention collective dans ces circonstances, car une telle façon d’agir porterait atteinte au principe du respect de la volonté des parties, tout autant que le ferait le déni de la faculté des employeurs de maintenir des structures salariales intégrales et des systèmes d’avantages équilibrés.
En conséquence, considérant que la modification de la législation dont il est question a été adoptée sans consultation ni participation des employeurs, il importe qu’elle soit déclarée sans effet et que la discussion à ce sujet soit renouée à travers le dialogue social.
Membre travailleur, Espagne – Depuis le début des années 1990, le Pérou a connu une période de plus de trente ans de réformes régressives du marché du travail. Le résultat de ce processus néfaste est un appauvrissement manifeste et l’extension de la précarisation, fruit d’une déréglementation radicale et de l’instauration de régimes spéciaux axés sur la restriction des droits sociaux et syndicaux.
En 2021, les organisations syndicales péruviennes ont présenté au gouvernement nouvellement installé une série de propositions tendant à réformer le cadre normatif dans ce pays. Le décret suprême no 014-2022-TR adopté en juillet 2022 a modifié le règlement de la loi de relations collectives du travail. La commission d’experts a relevé dans son rapport les progrès que le décret suprême tend à favoriser par rapport au droit de former des syndicats, ainsi que les améliorations apportées dans la garantie de l’exercice du droit de grève, toutes questions liées directement à la teneur de la convention.
Il importe de souligner que, comme l’a reconnu le gouvernement lui-même, le décret suprême no 014-2022-TR suscite certaines préoccupations sur la liberté syndicale dans ce pays. La commission d’experts a exprimé l’espoir que la mise en œuvre du décret suprême contribuera à garantir le plein exercice des droits consacrés par la convention, ce qu’il convient de souligner parce que la convention semble être expressément reniée à travers les commentaires des employeurs tels qu’ils sont reproduits dans le rapport de cette commission, lorsqu’il est dit littéralement que le décret suprême affectera les relations entre les travailleurs et les employeurs du fait qu’il élargit la forme de l’organisation syndicale.
En résumé, la position exprimée par les employeurs recèle une hostilité expresse à l’égard de l’élargissement de la forme de l’organisation syndicale. Ces mêmes employeurs ont également exprimé l’idée que le décret suprême leur interdirait d’étendre de manière unilatérale les avantages prévus par une convention collective aux travailleurs qui ne sont pas inclus dans le champ d’application de ladite convention, c’est-à-dire que les employeurs prétendent pouvoir décider de manière unilatérale d’étendre les effets de conventions collectives de manière à éviter l’affiliation syndicale.
Il est surprenant d’entendre, dans la maison même du tripartisme, revendiquer des droits unilatéraux ayant des effets antisyndicaux. Nous devons rappeler que de telles positions antisyndicales de la part des employeurs ont libre cours dans un pays comme le Pérou, où l’affiliation syndicale n’excède pas 5 pour cent et où le taux de couverture de la négociation collective n’excède pas 3 pour cent suivant les données d’ILOSTAT.
Pour les raisons exposées, nous demandons que la commission exige expressément du gouvernement l’application effective du décret suprême et le développement légitime des autres normes afférentes aux relations du travail qui font porter effet à la convention.
Enfin, je voudrais rappeler que la présente convention n’est pas la convention sur la liberté syndicale positive ou négative. C’est la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical – sans qualificatif – et cet instrument protège ce droit fondamental, qui doit être respecté.
Membre travailleur, République bolivarienne du Venezuela – La Centrale bolivarienne socialiste des travailleurs de la République bolivarienne du Venezuela (CBST) fait connaître ici sa position, dans le contexte de l’application de cette convention au Pérou, devant les graves violations qui se commettent actuellement au préjudice des travailleurs de ce pays, en particulier contre ceux de l’enseignement.
La Direction régionale du travail et de la promotion de l’emploi a annulé l’inscription de la Fédération nationale des travailleurs de l’éducation du Pérou (FENATE-PERÚ), inscription qui avait été acceptée le 22 juillet 2021.
On déclare des grèves illégales, on méconnaît l’organe indépendant au moyen d’un décret, foulant ainsi au pied la Constitution ainsi que la législation du travail; de même, on abroge le droit des organisations syndicales de tenir des réunions et de se rendre sur des lieux de travail; pire encore, on remplace des travailleurs dans leur poste lorsqu’ils se mettent en grève.
Les travailleurs de l’enseignement rejettent une initiative inacceptable qui prétend privatiser l’enseignement au Pérou à travers sa municipalisation.
Nous dénonçons le harcèlement et les arrestations subis par les travailleurs, les éducateurs, les paysans ou les travailleurs d’autres secteurs, surtout parce qu’ils sont affiliés à la FENATE-PERÚ.
Nous soutenons les travailleurs péruviens qui s’efforcent de s’organiser pour s’opposer aux violations des conventions nos 87 et 98 ainsi que de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958.
La situation actuelle de ceux qui président aux destinées du Pérou a pour conséquence la non-reconnaissance de la Constitution, des lois du travail et des conventions de l’OIT.
Nous appelons la présente commission à faire plus pour que les employeurs péruviens ainsi que les personnes qui dirigent actuellement ce pays appliquent les conventions nos 87, 98 et 111.
Aujourd’hui, on peut dire qu’au Pérou le droit de grève est bafoué. On bafoue le droit de protester et l’on bafoue aussi le Congrès et l’exécutif, qui sont «non légitimes», parce que le Président légitime du Pérou, c’est Pedro Castillo. On conclut des conventions par le dialogue en faisant venir 700 militaires afin que ceux-ci interviennent dans le dialogue contre le peuple péruvien, et c’est pourquoi nous nous dressons en face de ces personnes qui dirigent aujourd’hui l’État péruvien et agissent contre le peuple péruvien et l’ensemble de ses travailleurs.
Membre travailleur, Pays-Bas – La commission d’experts indique dans son rapport que les centrales syndicales péruviennes considèrent que le décret suprême no 014-2022-TR pourrait contribuer à remédier à la situation grave des droits syndicaux dans le pays et elle indique également que la reconnaissance expresse du droit de constituer des syndicats de groupes d’entreprises, de chaînes de production ou encore de réseaux de sous-traitance pourrait revêtir une importance particulière s’agissant des travailleurs en sous-traitance.
Nous sommes assurément d’accord, mais pour les travailleurs en sous-traitance, s’il est un fait qu’on leur reconnaît au niveau réglementaire le droit de constituer des organisations syndicales, dans la pratique, la loi n’est pas appliquée, ce qui constitue une violation non seulement du décret susnommé mais encore de la convention, qui a été ratifiée par le Pérou en 1960.
D’après une enquête récente menée au Pérou par la Fédération des syndicats chrétiens (CNV) des Pays-Bas, non moins de 46,3 pour cent des individus interrogés déclarent que leur contrat ne sera pas renouvelé s’ils se syndiquent; 63 pour cent déclarent ressentir de l’hostilité de la part de leurs supérieurs par rapport à l’affiliation syndicale et 49,6 pour cent déclarent ne pas être au bénéfice d’une convention collective.
Un groupe d’employeurs a intenté devant la justice péruvienne une action en nullité contre ce décret suprême. La procédure suit son cours et nous n’en connaissons pas encore l’issue mais nous pouvons dire dans le cas présent qu’une réponse énergique qui confirmera et confortera la légitimité et la pleine vigueur de cette norme est aujourd’hui attendue de la part du pouvoir judiciaire.
Précédemment, certains articles du décret suprême no 001 (sur les travailleurs en sous-traitance et leurs droits) ont été invalidés par la justice. Un de ces articles déclarés invalides aurait permis que les travailleurs en sous-traitance puissent accéder à une relation d’emploi permanente, ce qui aurait favorisé l’exercice du droit de se syndiquer chez cette catégorie de travailleurs, étant donné que les travailleurs en sous-traitance, n’ayant que des contrats temporaires – des contrats qui sont renouvelés tous les trois mois – ne se syndicalisent pas, même si le décret suprême no 014-2022-TR leur confère expressément ce droit.
La protection réelle et effective des droits des travailleurs syndiqués a été affaiblie par les processus qui ont été évoqués ici. Pour cette raison, il est important que le ministère du Travail s’attache à défendre l’application du décret suprême no 001 dans son intégralité et reste attentif à l’issue de la procédure judiciaire engagée à propos du décret suprême no 014-2022-TR.
Membre travailleur, Argentine – Le cas du Pérou illustre une fois de plus ce travers du «deux poids, deux mesures» qui, en matière de liberté syndicale, semble être une constante chez les employeurs, qui remettent en question fondamentalement le décret suprême no 014-2022-TR modifiant le règlement de la loi des relations collectives du travail (LRCT) adoptée par le Président Castillo.
Premièrement il y a lieu de rappeler que ce décret suprême incarne un progrès substantiel en matière de liberté syndicale au Pérou, et ce n’est pas là un point mineur si l’on veut bien considérer que depuis des années la commission d’experts met en exergue les graves lacunes de ce pays en matière de liberté syndicale.
Par exemple, le décret suprême reconnaît expressément aux travailleuses et aux travailleurs du Pérou le droit de s’affilier directement à des fédérations et confédérations ainsi que celui de former des syndicats de groupes d’entreprises, de chaînes de production ou encore de réseaux de sous-traitance, en parfait accord avec l’article 2 de la convention. De plus, il facilite le recouvrement des cotisations syndicales par les fédérations et confédérations et il abroge l’article 63 du règlement qui imposait une condition non prévue par la loi en ce qui concerne la déclaration d’une grève et ce, sous couvert de la défense des droits du travail. En outre, le décret interdit à un employeur de remplacer, directement ou indirectement, un travailleur en grève, de même qu’il interdit tout acte de nature à empêcher ou entraver l’exercice du droit de grève. Enfin, il simplifie la fourniture des pièces à produire dans la procédure administrative de déclaration d’une grève, et il étend et renforce la protection syndicale.
S’agissant du droit de grève, nous ne pouvons manquer de relever la contradiction dans laquelle se mettent les employeurs par rapport à la grève, en tant que droit protégé par la convention, en remettant régulièrement en question ce droit, ainsi que l’interprétation qu’ont donnée les experts à ce sujet. Malgré tout, les mêmes employeurs ne voient pas d’inconvénient à se mettre en contradiction avec eux-mêmes en se tournant vers la commission d’experts et en invoquant la convention lorsqu’il s’agit de défendre leurs intérêts.
Par ailleurs, comme l’ont souligné les centrales syndicales du Pérou, ce décret suprême pourrait contribuer à remédier à la situation actuelle en matière de droits syndicaux dans ce pays, et ces centrales soulignent entre autres que le fait de reconnaître expressément le droit de constituer des syndicats de groupes d’entreprises, de chaînes de production ou de réseaux de sous-traitance peut s’avérer d’une importance particulière en ce qui concerne les travailleurs en sous-traitance.
De son côté, la commission d’experts a exprimé l’espoir que l’application de ce décret suprême, qui a vu le jour en raison de la situation préoccupante de la liberté syndicale dans ce pays, contribuera à garantir le plein exercice des droits consacrés par la convention et elle a prié le gouvernement de donner des informations sur l’impact de cette application.
Ceux qui aujourd’hui se chargent ici de donner des informations sur les progrès accomplis en matière de liberté syndicale non seulement ont usurpé le pouvoir, mais ont en outre pratiqué une politique de régression en matière de liberté syndicale comme de négociation collective et de mépris des libertés publiques, politique qui a atteint son comble avec l’assassinat de 70 citoyens.
Observateur, IndustriALL Global Union – Au nom de l’IndustriALL Global Union, je traiterai ici des graves violations du droit de se syndiquer auxquelles sont confrontées les organisations syndicales du Pérou qui sont nos affiliées.
D’une part, nous tenons à dénoncer l’usage pervers qui a été fait de la relation d’emploi – en particulier avec la sous-traitance et les contrats temporaires – afin d’éluder les responsabilités à l’égard des travailleurs et des travailleuses.
Une organisation syndicale du secteur manufacturier qui nous est affiliée, la Fédération des travailleurs de l’industrie manufacturière et des activités apparentées du Pérou (FETRIMAP) doit affronter une hostilité inlassable dans sa démarche de syndicalisation dans les entreprises où la majorité des travailleurs sont temporaires, ayant été engagés sous le régime du décret-loi no 728, et sont rétifs à l’idée de se syndiquer, de peur que leur contrat ne soit pas renouvelé.
Ces violations sont encore plus évidentes dans le secteur du textile et de la confection, où opère une organisation syndicale qui nous est affiliée, la Fédération nationale des travailleurs du textile du Pérou (FNTTP). La loi sur lesdites «exportations non traditionnelles» (décret-loi no 22342) permet aux employeurs de traiter les travailleuses et les travailleurs comme s’ils étaient en période d’essai pendant toute la durée de leur emploi. Il y a des travailleurs qui, arrivés à l’âge de la retraite, ont signé plus de 200 contrats d’emploi dans le même poste de travail tout au long de leur vie active. Nous ne devons donc pas nous étonner qu’à peine 5 pour cent des travailleurs du secteur soient syndiqués.
Dans le secteur minier, les travailleurs en sous-traitance représentent 60 pour cent ou plus de la main-d’œuvre, y compris dans les activités centrales des entreprises. Coincés entre l’entreprise qui leur donne du travail et le sous-traitant qui les paye, les travailleurs n’ont pas vraiment la possibilité de s’affilier à un syndicat ou de négocier collectivement. En conséquence, ils sont considérés comme des individus de seconde classe et sont exposés à des risques d’accidents plus élevés, au point de se considérer eux-mêmes comme de la chair à canon.
D’autre part, nous tenons à signaler que cette dénaturation de la relation d’emploi a entraîné une exploitation non seulement des travailleurs temporaires mais aussi de la minorité de ceux qui ont un emploi fixe, car, pour des raisons évidentes, leurs syndicats n’ont que peu de pouvoir de négociation. Dès lors qu’ils s’avisent de se syndiquer, ils sont harcelés, soumis à des pressions, éventuellement licenciés et parfois même, poursuivis en justice devant les tribunaux pénaux, comme cela a été le cas du dirigeant de la Fédération minière.
Les organisations syndicales qui nous sont affiliées s’emploient inlassablement à faire modifier les lois. Elles ont saisi d’un nombre incalculable de plaintes le ministère du Travail, l’inspection du travail, la Direction nationale de l’inspection du travail (SUNAFIL) et les tribunaux. Mais, même lorsque les autorités ou les tribunaux se prononcent en faveur des travailleurs, il s’avère impossible d’appliquer leurs décisions, car les employeurs en font alors inlassablement appel.
Pour toutes ces raisons, l’IndustriALL Global Union appelle instamment le gouvernement du Pérou à redoubler d’efforts afin d’adapter la législation et les pratiques du Pérou aux normes internationales, notamment en ce qui concerne la liberté syndicale, et à prendre les mesures nécessaires pour que la législation du travail soit appliquée.
Représentant gouvernemental – Dans cette dernière intervention je rappellerai que le 7 décembre 2022 le Pérou a connu une tentative de coup d’État et qu’il y a eu sur le champ une réaction immédiate de la part des institutions démocratiques – pouvoir judiciaire, Tribunal constitutionnel, Congrès de la République et Défenseur du peuple, entre autres – qui ont repoussé de manière énergique la rupture de l’ordre constitutionnel. Qui a commis cette tentative de coup d’État doit assumer les responsabilités légales de sa félonie antidémocratique. Il s’est produit immédiatement un enchaînement parfaitement constitutionnel de décisions par lesquelles celle qui est aujourd’hui notre Présidente de la République, Dina Boluarte, a assumé ses fonctions et, au final, le gouvernement actuel du Pérou est légal, légitime, et bénéficie d’une large reconnaissance, tant nationale qu’internationale. Toute assertion contraire à cette réalité ne serait qu’un travestissement de la vérité.
Enfin, je tiens à témoigner de l’attachement profond du gouvernement du Pérou au processus de contrôle de l’application des normes. Tout au long de ce processus d’analyse de l’application de la convention, nous avons mis en lumière les progrès réalisés en matière de liberté syndicale, répondant à chacune des demandes d’informations qui nous ont été adressées par le BIT ces derniers mois.
De même, nous avons démontré notre volonté de poursuivre dans la voie d’une amélioration continuelle à travers un dialogue social tripartite. Dans cette optique, compte tenu de l’observation concernant la création de la Commission d’appui à la fonction publique, le gouvernement intensifiera les efforts déployés en vue de la prompte mise en place de cette institution. De plus, considérant la pertinence du décret suprême no 014-2022-TR, nous tenons à signaler qu’à ce jour, cet instrument fait l’objet de divers recours devant les juridictions compétentes, avec 85 actions en amparo et 5 actions populaires, ce qui signifie que l’opportunité existe de voir les parties parvenir à un consensus sur l’amélioration de la norme dans le cadre du Conseil national du travail et de la promotion de l’emploi.
Nous voulons croire en la reconnaissance, dans cette enceinte, des garanties que nous apportons de continuer d’aller de l’avant ensemble – employeurs, travailleurs et gouvernement.
Membres travailleurs – Le Pérou a fait un pas dans la bonne direction en promulguant le décret suprême no 014-2022-TR modifiant le règlement de la loi des relations collectives du travail.
La loi a intégré les recommandations que la commission d’experts formulait depuis des années au sujet des restrictions à la liberté syndicale et à la négociation collective.
Le décret suprême reconnaît expressément le droit des travailleurs de s’affilier directement à des fédérations et des confédérations; il permet la création de syndicats de groupes d’entreprises et de chaînes d’approvisionnement et il interdit aux employeurs de remplacer des travailleurs qui font grève. Il s’agit incontestablement de mesures importantes qui constituent une base dans la mise en œuvre de la convention, comme le reconnaît la commission d’experts.
Malgré ces mesures positives, qui sont devenues officielles avant décembre 2022, le groupe des travailleurs reste très préoccupé par les restrictions affectant dans la pratique l’exercice effectif au Pérou des droits et libertés consacrés par la convention. En premier lieu, nous avons mis en avant la nécessité de rétablir l’applicabilité de cet instrument à des catégories déterminées de travailleurs, comme les personnes en situation de formation ainsi que les juges, les procureurs et le personnel de direction ou de confiance de l’administration publique.
Puis nous avons évoqué les problèmes découlant de l’intervention abusive de l’autorité administrative du travail, étant incluses dans cette problématique l’absence de garantie pour les travailleurs affiliés à des syndicats et les diverses mesures prises par les autorités pour que des grèves soient frappées d’illégalité. L’ambiguïté des dispositions légales en vigueur, combinée à l’intervention abusive de la puissance publique, a abouti à saper l’activité syndicale et l’autonomie des organisations de travailleurs.
Enfin, nous avons exprimé nos préoccupations au sujet du décret suprême no 017-2017-ED, qui fait tomber sous le coup de la qualification de faute grave certaines mesures du ressort des directeurs et sous-directeurs des établissements d’enseignement comme celle de permettre des réunions syndicales ou des réunions à incidence politique dans leur établissement.
Compte tenu de ce que nous venons d’exposer, nous appelons le gouvernement à suivre la ligne de conduite suivante. Tout d’abord, continuer de promouvoir et approfondir l’application du décret suprême no 014-2022-TR, en particulier pour ce qui est des aspects évoqués concernant l’exercice de la liberté syndicale et la négociation collective.
S’agissant des ajustements devant être apportés à la législation, nous nous ferons l’écho de la commission d’experts en demandant instamment au gouvernement d’engager concrètement des mesures tendant à la révision de la législation dans un sens propre à ce que soit reconnue la liberté de se syndiquer aux travailleurs qui sont en formation.
De même, nous appuyons fermement la commission d’experts en ce que celle-ci prie instamment le gouvernement de procéder à une révision des dispositions pertinentes de son ordre juridique afin de garantir dans la loi et dans la pratique l’exercice du droit d’organisation pour les juges et les procureurs, ainsi que pour le personnel de direction et de confiance de l’administration publique.
Nous appelons le gouvernement à abroger certaines dispositions du décret suprême no 017-2007-TR, de telle sorte que les directeurs d’établissements d’enseignement puissent librement convenir, avec les organisations syndicales concernées, de modalités d’accès aux lieux de travail qui soient propres à ne pas entraver le fonctionnement efficace de ces établissements.
Enfin, compte tenu des dispositions de l’article 3 de la convention, le gouvernement doit prendre les mesures nécessaires pour garantir que la responsabilité de déterminer la légalité de la grève, dans le secteur public comme dans le secteur privé, incombe non pas à l’administration du travail mais à un organe neutre recueillant la confiance de toutes les parties concernées.
En notre qualité de mandant de l’OIT, nous appelons le gouvernement du Pérou à se donner pour guide les orientations avisées des organes de contrôle de l’OIT dans le cadre d’un dialogue avec les États Membres sur l’application des conventions et des recommandations, en l’occurrence sur l’application de la convention no 87.
Nous rappellerons que la déclaration du groupe gouvernemental de février 2015 sur le droit de grève est parfaitement claire en ce qu’elle fait valoir que «le groupe gouvernemental reconnaît que le droit de grève est lié à la liberté syndicale, que c’est un principe fondamental et un droit du travail de l’OIT».
Le groupe gouvernemental a reconnu spécifiquement que, sans la protection du droit de grève, la liberté syndicale, en particulier le droit de mener des activités destinées à promouvoir et protéger les intérêts des travailleurs, ne peut exister pleinement. Le gouvernement devrait s’en remettre aux orientations esquissées par la commission d’experts pour parvenir à ce que ses obligations au regard de la convention, y compris en ce qui concerne le droit de grève, soient pleinement remplies.
Au nom du groupe des travailleurs, nous appelons le gouvernement du Pérou à accepter une mission de contacts directs de l’OIT.
Membres employeurs – Considérant l’ensemble de ce qui a été exposé aujourd’hui, il ne fait aucun doute que le gouvernement du Pérou a adopté sans consultations et sans respecter le dialogue social un instrument législatif qui a modifié substantiellement la réglementation des relations collectives du travail.
Devant cette situation, nous soutenons les demandes exprimées par les employeurs du Pérou, en ce sens que nous recommandons: premièrement, de considérer sans effets le décret suprême no 014-2022-TR; et deuxièmement, de fournir au gouvernement du Pérou une assistance technique en la personne d’un spécialiste international maîtrisant les systèmes comparés de relations collectives et apte à agir comme facilitateur dans la démarche de rétablissement progressif du dialogue social favorisée par le gouvernement actuel.
S’agissant de la nécessité de laisser sans effets le décret suprême susvisé et de garantir que toute réforme de la réglementation des relations collectives du travail s’effectue dans le respect des principes du dialogue social et du tripartisme, nous rappelons que, dans son analyse du présent cas, la commission d’experts a souligné l’importance cruciale que revêtent le dialogue social et la consultation des groupes employeurs et travailleurs pour l’élaboration d’une législation sur les relations collectives du travail, et cette instance a exprimé le ferme espoir que le gouvernement assurerait la tenue de telles consultations dans un proche avenir.
De même, nous sommes en accord avec la commission d’experts en ce que nous espérons nous aussi que les préoccupations soulevées par le décret suprême seront examinées comme il convient dans le cadre d’un dialogue social tripartite au sein du Conseil national du travail et de la promotion de l’emploi.
Enfin, nous reconnaissons la volonté manifestée par l’actuelle équipe gouvernementale du Pérou de réengager le dialogue social, ce qui, nous l’espérons, contribuera à l’instauration d’un climat de confiance et de bonne foi. Cela étant, considérant qu’il existe actuellement au Pérou un avant-projet de code du travail, nous appelons à ce que, conformément à l’avis exprimé par la commission d’experts, il soit rappelé au gouvernement du Pérou que cet avant-projet doit donner lieu à des consultations tripartites exhaustives, consultations qui doivent porter non seulement sur cet avant-projet mais sur n’importe quelle question que celui-ci recouvre et qui pourrait faire l’objet d’une réglementation séparée ou indépendante.
Conclusions de la commission
La commission a pris note des informations écrites et orales fournies par le gouvernement et de la discussion qui a suivi.
La commission a fait bon accueil aux faits nouveaux en matière législative qui répondent à certaines observations précédentes de la commission d’experts mais a exprimé sa préoccupation devant les restrictions actuellement imposées, en droit et dans la pratique, au droit à la liberté syndicale et au droit d’organisation.
Prenant en compte la discussion qui a eu lieu, la commission prie instamment le gouvernement, en consultation avec les partenaires sociaux, de prendre des mesures assorties de délai pour:
- garantir que la législation actuelle et future soit conforme à la convention;
- garantir que les fonctionnaires, notamment les juges, les procureurs et les employés qui occupent un poste de confiance et de direction dans l’administration publique, sans aucune distinction, aient le droit de constituer des organisations de travailleurs de leur choix et de s’y affilier;
- garantir le bon fonctionnement du Conseil national du travail et de la promotion de l’emploi (CNTPE) en vue de faciliter le dialogue social et la consultation avec les partenaires sociaux sur la réforme du droit du travail; et
- garantir, en droit et dans la pratique, le droit des organisations de travailleurs et d’employeurs d’organiser leurs activités et d’élaborer leurs programmes en toute liberté.
La commission prie le gouvernement de fournir des informations, en consultation avec les partenaires sociaux, sur l’application de la convention, en droit et dans la pratique, d’ici au 1er septembre 2023.
La commission invite le gouvernement à accepter une mission de contacts directs afin de mettre pleinement en œuvre ces recommandations.
La Comisión invita al Gobierno a aceptar una misión de contactos directos para seguir plenamente estas recomendaciones.
Représentant gouvernemental, ministre du Travail et de la Promotion de l’emploi – Nous remercions cette commission pour les recommandations qu’elle a formulées et nous réaffirmons que le gouvernement du Pérou est disposé à renforcer le dialogue social avec les partenaires sociaux en vue de la réinstallation dans les plus brefs délais du Conseil national du travail et de la promotion de l’emploi. Nous sommes absolument certains que les centrales syndicales et les milieux patronaux, partenaires clé au sein de ce conseil tripartite, seront nos principaux alliés dans la poursuite de cet objectif.
De même, nous exprimons notre conviction pleine et entière que, grâce à un spécialiste des pays andins du bureau de l’OIT de Lima, il sera possible d’assurer le suivi de la concrétisation des recommandations proposées par la commission.