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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2023, Publication : 111ème session CIT (2023)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Nicaragua (Ratification: 1967)

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2023-NIC-111-Fr

Discussion par la commission

Président – Je vous propose de passer à l’examen du cas suivant à l’ordre du jour qui concerne l’application par le Nicaragua de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958. Compte tenu que plus de 17 délégués sont inscrits sur la liste des orateurs, nous appliquerons la réduction du temps de parole de cinq à trois minutes aux autres délégués.

Représentante gouvernementale – Au nom du peuple travailleur et héroïque du Nicaragua, le gouvernement de réconciliation et d’unité nationale réitère ses salutations fraternelles à tous les participants à cette réunion.

En ce qui concerne le rapport 2023 de la commission d’experts, nous précisons que l’État du Nicaragua établit à l’article 27 de sa Constitution que «toutes les personnes sont égales devant la loi et ont droit à une protection égale. Il ne saurait y avoir de discrimination fondée sur la naissance, la nationalité, la croyance politique, la race, le sexe, la langue, la religion, l’opinion politique, l’origine, la fortune ou la condition sociale». La République du Nicaragua déclare qu’il est inacceptable que cette commission prenne note de rapports émanant d’organismes n’appartenant pas au monde du travail. Il est clair que l’on tente de rattacher une question qui n’a rien à voir avec l’objet et le contenu de la convention et avec les dispositions de la Constitution et du Règlement de l’OIT, ce qui démontre une fois de plus l’ingérence et la politisation de questions non liées au travail. Depuis 2007, le gouvernement applique des politiques de développement social et économique à tous les segments de la population, y compris les peuples autochtones et d’ascendance africaine. En conséquence, la région de la côte caraïbe est désormais considérée comme une zone spéciale de développement humain et socio-économique, ce qui permet de créer davantage d’emplois pour les familles autochtones et d’ascendance africaine. Les mesures de promotion sont notamment: extension de la couverture en matière d’éducation des peuples autochtones et d’ascendance africaine de la côte caraïbe grâce à cinq centres technologiques: Blufields, Heroes and Martyrs de Puerto Cabeza; Bernardino Díaz Ochoa de Siuna; Waspam, Corn Island, Bonanza et Rosita. Les programmes d’enseignement technique et de formation destinés aux différents groupes ethniques et à la population d’ascendance africaine, dans leur propre langue, sont mis en œuvre conformément au Plan national de lutte contre la pauvreté et pour le développement humain 2022-2026, lequel prévoit les mesures suivantes: système de santé interculturel dans les régions autonomes; sécurité juridique de la propriété; eau et assainissement; approvisionnement en électricité dans les territoires de la côte caraïbe; plans de développement des secteurs urbains et ruraux; formation des enseignants conformément au programme d’éducation bilingue interculturel des trois niveaux (enseignement initial, primaire et secondaire); aide aux familles pour la production d’aliments dans des jardins diversifiés avec des cultures autochtones de la côte caraïbe; transfert de technologies pour améliorer la productivité sur la côte caraïbe; capitalisation des familles à travers des plans d’investissement productif; renforcement des associations et de la gestion coopérative; financement à travers le programme de microcrédits pour promouvoir l’esprit d’entreprise sur la côte caraïbe; soutien des familles dans la promotion de systèmes agroforestiers avec des cultures stratégiques dans les zones tropicales humides; aide aux familles en matière de gestion des volailles et des porcs pour une production durable en harmonie avec la terre mère; fourniture de bons technologiques; et développement et construction d’infrastructures routières et productives (autoroutes, routes et ponts) qui relient la côte caraïbe à la zone du Pacifique. La République du Nicaragua intègre dans son système juridique des dispositions et des procédures visant à assurer le respect des politiques nationales de protection des droits des travailleuses et des travailleurs qui garantissent l’égalité et la non-discrimination sur le lieu de travail, qui favorisent l’harmonie, la paix et la sécurité sur le lieu de travail grâce à l’équité des genres et sans aucune discrimination en termes de race, de religion, de salaire et de handicap.

Nous tenons à préciser que le gouvernement a démontré, dans les rapports qu’il a dûment soumis à l’OIT au cours des dernières années, qu’il respectait la convention no 111, C’est pourquoi l’État du Nicaragua n’accepte pas que la commission ait soumis à l’examen et à la discussion de la Commission de la Conférence des questions qui ne correspondent pas au contenu de la convention. Nous dénonçons la manipulation de cette commission qui nous amène ici pour cette convention et la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, précédemment révisée, ce qui témoigne d’un parti pris politique et porte atteinte à la crédibilité de ce mécanisme.

Pour conclure, une fois de plus, nous réitérons notre position et rejetons tout type de signalements ou d’interventions dans les affaires intérieures qui menacent la paix, la souveraineté et la stabilité sociale et de l’emploi des familles nicaraguayennes.

Membres travailleurs – La commission d’experts a mis en évidence plusieurs éléments de discrimination pour lesquels elle a formulé des observations que je vais reprendre par ordre d’apparition dans le rapport. En premier lieu, le harcèlement sexuel: le Nicaragua a des dispositions légales contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail. Le Code du travail interdit toute forme de harcèlement sexuel et fournit une base juridique qui permet aux victimes de déposer des plaintes auprès du ministère du Travail. En outre, la loi contre la violence à l’égard des femmes prévoit des mesures pour prévenir, punir et éradiquer la violence basée sur le genre, y compris le harcèlement sexuel.

Nous prenons note des différentes initiatives prises par le gouvernement pour lutter contre le harcèlement sexuel. Selon les informations fournies par la commission d’experts, le ministère du Travail met en œuvre des procédures pour traiter les plaintes des travailleurs, y compris celles pour harcèlement contre des femmes sur le lieu de travail. Il s’agit notamment de mécanismes qui garantissent une action immédiate et une enquête rapide de l’inspection du travail, dans le plein respect de la législation du travail. Malgré les efforts entrepris pour combattre le harcèlement sexuel, les défis persistent. La sensibilisation et la compréhension limitée des employeurs, la crainte de représailles et des mécanismes de signalement inadaptés empêchent de résoudre efficacement le problème.

Les centres d’appel qui emploient actuellement plus de 11 700 travailleurs dans plus de 50 centres d’externalisation des services du pays en sont un exemple. La plupart des travailleurs des centres d’appels sont des femmes qui subissent une pression quotidienne pour atteindre des objectifs qui deviennent irréalisables au fil du temps. Selon les témoignages, dans de nombreux cas, les victimes sont renvoyées afin de protéger les auteurs de ces actes et d’éviter que toute affaire potentielle ne soit révélée au grand jour.

Dans le secteur des maquilas, qui emploie environ 140 000 travailleurs au Nicaragua, les syndicats font également état de multiples cas de harcèlement contre des femmes. Nous prions instamment le gouvernement d’améliorer l’infrastructure et le soutien nécessaires à la réalisation d’inspections du travail adaptées, en vue de faire appliquer la législation du travail et de promouvoir un milieu de travail sûr et salubre.

Le deuxième point porte sur la discrimination politique: la commission d’experts observe avec préoccupation la grave situation de discrimination politique au Nicaragua. La commission d’experts mentionne la résolution nº 49/3 adoptée par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU le 31 mars 2022 qui met en évidence différents points dont les graves préoccupations que représentent les atteintes aux droits civils et politiques commises dans le contexte des élections de 2021, et le recours à des dispositions juridiques limitant la participation politique et conduisant à la détention arbitraire de candidats de l’opposition, de journalistes et d’autres défenseurs des droits de l’homme. La commission d’experts note également que le Comité des droits de l’homme et le Comité des droits économiques, sociaux et culturels de l’ONU se disent préoccupés par la répression et la discrimination dont font l’objet les personnes critiques à l’égard du gouvernement.

Enfin, la commission d’experts prend note du communiqué de presse de la Commission interaméricaine des droits de l’homme qui met en évidence la recrudescence de la répression et de la persécution contre les opposants politiques. Concernant les violations spécifiques de la convention nº 111, les syndicats continueront à suivre la situation afin d’évaluer s’il y a eu discrimination dans l’emploi à l’encontre de travailleurs exprimant leurs opinions politiques depuis 2021. Nous prions instamment le gouvernement d’informer la commission d’experts de toute mesure prise pour éliminer la discrimination dans l’emploi et la profession fondée sur l’opinion politique et pour fournir une protection adéquate aux travailleurs en cas de discrimination fondée sur l’opinion politique, y compris les procédures légales et judiciaires mises en place et leurs résultats.

Le troisième point porte sur la discrimination raciale: la commission fait également référence à un récent rapport du Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination raciale faisant état d’actes de violence à l’égard des peuples autochtones et d’ascendance africaine au Nicaragua. Le comité a instamment prié le gouvernement de prendre des mesures immédiates pour protéger les droits de ces communautés et traduire en justice les personnes qui auront violé ces droits. Il a également souligné que le Nicaragua ne dispose pas de cadre législatif national interdisant la discrimination fondée sur la race conforme à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et que son Code pénal ne contient pas de dispositions sur ce point.

Malgré les efforts déployés par l’État pour restaurer les droits sociaux et culturels des peuples autochtones sur la côte caribéenne, ces communautés restent, en réalité, confrontées à une discrimination structurelle. Les taux de pauvreté, l’exclusion, la précarité et la violence constante les concernant en témoignent. Le comité a réitéré ses préoccupations concernant l’absence de protection et de reconnaissance légale explicites des peuples autochtones dans les régions du Pacifique, du Centre et du Nord. En outre, il s’est dit profondément préoccupé par les informations faisant état d’une régression de la protection et du respect des droits des peuples autochtones et d’ascendance africaine par l’État. Nous souscrivons à la recommandation du comité dans laquelle il prie le Nicaragua de mener des études indépendantes sur les impacts sociaux, environnementaux et culturels avant d’octroyer des permis à des projets de développement et d’exploitation de ressources naturelles dans des territoires des peuples autochtones ou d’ascendance africaine. Pour éviter que d’autres cas de discrimination et de violation des droits de l’homme ne se produisent, il est indispensable d’inclure les communautés autochtones touchées dans le processus de décision. À cet effet, et en vue remédier efficacement à la question de l’égalité des chances et de traitement, il est important d’obtenir le consentement du peuple autochtone avant d’octroyer des permis pour des développements sur son territoire. Compte tenu de la gravité de la situation, le Nicaragua doit adopter des mesures spéciales ou des actions positives pour éliminer la discrimination structurelle dont sont victimes les peuples autochtones et d’ascendance africaine.

Membres employeurs – J’espère que cette pause aura été propice à la réflexion, après avoir écouté toute la discussion et les échanges sur ces questions qui concernent le Nicaragua et qui, bien qu’elles correspondent à des conventions différentes, sont imbriquées. Ces questions relèvent d’une manière de s’acquitter de ces obligations et de les mettre en œuvre. La représentante gouvernementale a d’ailleurs mentionné la convention no 87 pendant sa dernière intervention: voilà qui nous facilitera la tâche et nous permettra d’envisager la situation comme un tout et non comme un cas isolé.

Ce cas porte sur l’application de la convention no 111 de l’OIT, que le Nicaragua a ratifiée en 1967. Le groupe des employeurs tient à souligner combien il est important de respecter ces conventions, en particulier celle-ci, car il s’agit de conventions fondamentales. Les conventions fondamentales le sont non pour des raisons arbitraires, mais en raison de leur importance et de leur sujet.

Dans le rapport de la commission d’experts de cette année, deux cas font l’objet d’une double note de bas de page au sujet du Nicaragua, le premier sur la convention no 87, qui a déjà été examiné, le second sur la convention no 111, que nous allons traiter maintenant. Voilà qui montre que nous examinons un cas qui est, à nos yeux, extrêmement grave.

Le présent cas porte sur le non-respect de la convention no 111. Compte tenu de ce qui a été dit au cours des différentes interventions, je voudrais lire une partie du texte de la convention pour que nous en comprenions le sujet. L’article 1 dispose que, aux fins de la convention, le terme «discrimination» comprend: «a) toute distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale, qui a pour effet de détruire ou d’altérer l’égalité de chances ou de traitement en matière d’emploi ou de profession». Selon le paragraphe 2, «les distinctions, exclusions ou préférences fondées sur les qualifications exigées pour un emploi déterminé ne sont pas considérées comme des discriminations». Mais le paragraphe 3 de l’article 1, qui est très pertinent, dit: «Aux fins de la présente convention, les mots emploi et profession recouvrent l’accès à la formation professionnelle, l’accès à l’emploi et aux différentes professions, ainsi que les conditions d’emploi.» Voilà donc, j’insiste, le sujet de notre discussion.

Je souhaiterais revenir sur deux aspects du rapport: l’un concernant la discrimination fondée sur l’opinion politique, et l’autre la discrimination fondée sur le sexe, le harcèlement sexuel, la discrimination fondée sur la race à l’encontre de populations autochtones et d’ascendance africaine, la politique d’égalité de chances et de traitement et le contrôle de l’application de la convention par l’inspection du travail, question qui figure dans le texte qui expose les explications de la commission d’experts.

La commission d’experts dit expressément qu’elle observe une grave situation de discrimination politique dans le pays, situation qui a été mise en évidence dans des rapports de diverses institutions des Nations Unies, comme le Conseil des droits de l’homme, dans sa résolution 49/3.

Cette résolution souligne l’existence de violations des droits civils et politiques dans le contexte du processus électoral, sans que soit garanti aux citoyens le droit de participer à la conduite des affaires publiques, de voter et d’être élu à des élections. On soulignera que le gouvernement a adopté des dispositions légales dans le but de restreindre la capacité des citoyens d’exercer leurs libertés fondamentales et de participer aux processus politiques.

Sont dénoncées aussi des arrestations arbitraires visant toutes sortes de citoyens; les membres travailleurs en ayant déjà fait mention, je ne développerai pas ici cette question. Selon les informations reçues, on craint également pour l’intégrité des détenus qui subissent des traitements susceptibles de constituer de la torture ou des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en particulier à l’encontre de personnes âgées, de filles et de femmes.

Les violations des droits de l’homme et les abus constatés dans les différentes informations communiquées semblent constituer un type de pratiques généralisé dans le pays, à tel point que la présidence des droits de l’homme a constitué une commission d’experts chargée d’enquêter sur la question.

En ce qui concerne le Pacte international des Nations Unies relatif aux droits civils et politiques, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels fait état de la discrimination fondée sur l’opinion politique à l’encontre des personnes qui s’opposent au gouvernement ou qui le critiquent, alors qu’elles en ont le droit. Tout cela figure dans le rapport.

Le gouvernement, pour sa part, a indiqué dans son rapport que la Constitution interdit la discrimination, que les actions en justice ne sauraient être l’objet de discrimination politique et que, entre 2020 et 2021 les tribunaux du travail n’ont pas été saisis de cas de violation de droits, ce qu’ont déjà indiqué les travailleurs: de toute évidence, on craint de dénoncer ces actes. Il existe donc un certain nombre de problèmes; à vrai dire, tout ce qui nous est rapporté, loin de nous rassurer, nous montre que le gouvernement ne reconnaît pas ou fait mine d’ignorer la gravité de la situation dans le pays alors que l’on signale de plus en plus de restrictions et de violations. Nous ne doutons pas que des personnes comme celles qui se trouvent ici ne sont pas l’objet de cette situation, mais d’autres le sont, comme l’ont relevé diverses institutions des Nations Unies.

Je voudrais rappeler au gouvernement que, parmi les droits de l’homme, il y en a qui sont tout à fait fondamentaux, à savoir les droits au travail, droits dont nous examinons ici l’exercice, et qui sont protégés par les conventions internationales, en particulier la convention no 111 et, bien sûr, la convention no 87.

La vérité, selon nous, c’est que les déclarations entendues ici ne correspondent pas à ce qui ressort des nombreuses informations, analyses et conclusions de toutes les personnes qui participent aux travaux des différents organes de l’OIT et d’autres institutions des Nations Unies.

Il faut prendre en compte le fait que la commission d’experts, après examen des éléments de preuves qui portent sur le présent cas, a estimé qu’il existe au Nicaragua un climat de violence, d’insécurité et d’intimidation qui entraîne et encourage des actes de discrimination dans l’emploi et la profession, en général à l’encontre de toutes les personnes qui sont en désaccord avec le gouvernement et qui expriment leur opinion publique.

Malheureusement, dans le rapport, ce n’est pas un exposé de la situation politique que nous trouvons, mais la mention d’actes de discrimination, actes auxquels j’ai déjà fait référence.

Les faits présentés témoignent – pardonnez-moi de le dire de la sorte – de l’extrême mépris du gouvernement à l’égard des demandes qui lui ont été adressées de reconnaître cette situation et de la corriger par des mesures claires, vérifiables et réparatrices, qui démontreront que le pays respecte les obligations qu’il a acceptées en ratifiant la convention. Dans la pratique, cette situation affecte les travailleurs, les employeurs et la population en général.

Nous ne voulons ni dramatiser ni exagérer mais, comme on peut le constater, et compte tenu du débat qui s’est tenu précédemment sur la convention no 87, il s’agit peut-être de l’un des cas les plus graves de non-respect de la convention que nous ayons examiné dans cette commission. Et il s’y ajoute une attitude de rejet que, vraiment, cette Organisation ne saurait accepter.

Dans les déclarations qui ont été formulées, la dernière fois que nous avons abordé ce cas, il y a un rejet définitif des éléments constitutifs de celui-ci, si bien qu’aucune des mesures qui avaient été demandées n’a abouti à des progrès. Nous espérons, et nous le lui demandons avec tout le respect qui se doit, que le gouvernement écoutera la communauté internationale, qu’il montrera qu’il se soucie de respecter le droit et qu’il ne se bornera pas à ne donner qu’une image différente de la réalité.

Nous serons très attentifs à l’évolution de ce débat et nous y reviendrons dans notre prochaine intervention.

Membre travailleur, Nicaragua – Je souhaiterais inviter le représentant des employeurs à manifester davantage de respect à l’égard des travailleuses et des travailleurs du Nicaragua. Cela fait longtemps que nous n’avons plus, et j’insiste, nous n’avons plus du tout peur et nous avons connu des situations qui nous ont même imposé des guerres. Et nous avons vaincu. Je vous prie donc de faire preuve de respect si vous souhaitez être respecté.

Comment expliquer qu’une double note de bas de page ait été mise pour notre pays, au sujet de deux conventions? Il n’y a qu’une réponse à cela: il s’agit d’une question politique et d’une agression de la part des partis politico-économiques qui mentent et se font passer pour des victimes afin de masquer leurs petits intérêts antipatriotiques.

S’il y a discrimination et atteinte aux droits des travailleuses et des travailleurs nicaraguayens, c’est de la part de ceux qui se sont hasardés à tenter un coup d’État financé et protégé par ceux qui se proclament défenseurs des droits de l’homme mais qui, tous les jours, les enfreignent par leur ingérence économique pour punir le peuple digne et souverain qu’est le Nicaragua.

Ce rapport contient des éléments absurdes ou de désinformation qui masquent les véritables intentions, telle l’agression contre notre pays. Si seulement nous pouvions répondre à tant de calomnies et de mensonges. Mais il est bon de répondre pour que les plus sensés aient une autre version que celle clamée par les médias et les organismes qui, publiquement, accusent, jugent et condamnent sans la moindre autorité morale.

On parle d’environnement de travail hostile. Il faut se demander qui en est responsale. Ces messieurs, hommes politiques à la casquette d’entrepreneurs, ont licencié plus de 225 000 travailleurs après leur tentative de coup d’État avortée. Ce sont eux qui refusent le droit d’organisation, qui maintiennent des salaires de misère et qui s’opposent au plein exercice de réclamation des droits au travail. Ce sont eux qui aujourd’hui détruisent le tissu social de l’État-providence dans nombre de pays européens, y compris dans un pays proche du siège de l’OIT.

Ce n’est donc pas le gouvernement qui développe un environnement hostile, mais ceux qui ne respectent pas les décisions convenues alors que nous, travailleuses et travailleurs, exigeons qu’elles le soient. La direction du patronat se plaint des inspections menées par le ministère du Travail pour protéger le droit du travail: il n’y a donc pas plus hypocrites qu’eux!

Précisons les choses, pour la culture juridique: la législation sur le travail considère que le harcèlement au travail doit être combattu et fixe la procédure selon la plainte. Le harcèlement ou le chantage sexuel est une infraction relevant de la voie judiciaire. Or cette commission n’est pas un tribunal qui peut examiner ces cas.

Ma question est donc la suivante: depuis quand la commission se penche-t-elle sur les processus électoraux de chaque pays? Je peux vous assurer que nombre de scandales électoraux dans les pays européens ou que l’on appelle du premier monde n’ont pas fait l’objet de questions de la part de la commission. Par conséquent, nous, travailleuses et travailleurs, devons décider de notre destin. Nous continuerons donc d’aller mettre notre bulletin dans l’urne pour garantir notre droit de renforcer notre démocratie et de continuer à élaborer un modèle de développement souverain et inclusif.

Quand, en 2018, les putschistes ont assassiné des dirigeants syndicaux, enlevé des travailleurs, violé des travailleuses, détruit des installations et des machines, ces organismes ne se sont pas élevés pour défendre ces victimes et leur famille, nous n’avons lu aucune condamnation, alors que des preuves des atrocités commises par leurs protégés étaient transmises. Ils n’ont donc aucune moralité leur permettant d’être une source crédible, car ils ne sont pas impartiaux.

Dans nos organisations syndicales, nous rassemblons les travailleuses et les travailleurs sans aucune discrimination fondée sur la race, le sexe, l’opinion politique partisane ou la conviction politique et nous respectons leur choix de vie, contrairement aux directions d’entreprises qui définissent la proposition de travail en fonction de ton nom de famille.

Il faudrait que ceux qui écrivent ces rapports se documentent mieux sur le développement et les avancées dans notre pays. Pour la première fois, il y a un gouvernement qui intègre pleinement la nation. Venez voir comment des titres fonciers ont été délivrés aux communautés autochtones, comment des routes, des hôpitaux, des centres de santé, des installations électriques, un accès à l’eau potable et des centres d’enseignement sont créés pour ces communautés. Nous pouvons l’affirmer, assurément et fièrement, parce que ce sont nous, travailleuses et travailleurs, qui avons construit ces projets garantis par l’investissement public mis en place par le gouvernement.

Comment ceux qui les violent au quotidien parlent des droits de l’homme et écrivent à leur sujet? Quelle morale ont ceux qui utilisent l’économie pour faire plier et soumettre à leur bon vouloir les peuples qui défendent leur souveraineté et leur autodétermination? Mesdames et messieurs les membres de la commission, nous vous invitons à lire les rapports d’organismes qui, tout en reconnaissant les avancées que le Nicaragua a accomplies en matière d’égalité et d’équité de genre, disent que le Nicaragua utilise au mieux les ressources financières pour élaborer des programmes au bénéfice de la population, en particulier des travailleurs. Allez marcher tranquillement dans les rues de nos villes, respirez l’air sans vous faire polluer par les mensonges et la désinformation véhiculés par les médias, à qui on a déjà transmis le script.

Nous réaffirmons que la vie de notre pays s’inscrit dans le cadre juridique. Quiconque aime le Nicaragua a sa place. Il n’y a pas la peine de mort au Nicaragua et la perpétuité n’est prononcée qu’à l’endroit des assassins qui ont commis un crime atroce.

En guise de conclusion, nous considérons que l’on peut construire la coopération et un appui inconditionnel dans un cadre empreint de respect et de bonnes relations. S’il y a un véritable intérêt pour les droits humains des Nicaraguayens et des Nicaraguayennes, que la commission demande à celles et ceux qui appliquent des sanctions économiques de les suspendre. Et peut-être qu’ainsi nous pourrons croire qu’il y a un véritable intérêt à rétablir l’harmonie et la compréhension.

Frères et sœurs travailleurs, notre Président, Daniel Ortega, encourage le dialogue social que nombre d’entre vous continuent d’exiger. Il respecte le droit de s’organiser en syndicats et encourage la participation des travailleurs dans la prise de décisions. Est-ce pour cela que la direction du patronat et les ennemis nous attaquent? Je crois que nous pouvons argumenter et que nous pouvons faire part de nombreux éléments qui attestent de la façon dont nous avons avancé sur la voie du rétablissement des droits humains des Nicaraguayens. Nous pouvons continuer à parler d’exemples concrets et précis concernant la façon dont nous sommes parvenus au bien-être. Bien entendu, toutefois, au cours des processus politiques et des élections, tout parti politique qui ne remplit pas les conditions fixées ou qui ne respecte pas les lois ne participe évidemment pas. C’est le cas partout dans le monde. Nous ne considérons donc pas qu’il y discrimination, mais plutôt que ceux qui continuent d’insister pour intervenir, agresser et, bien évidemment, ouvrir la voie aux troupes étrangères pour leur permettre de revenir y cherchent plus d’un intérêt.

Je regrette que l’on tienne des propos erronés au sein de cette commission. Je demande plus de respect à l’égard des travailleurs, car c’est nous qui construisons aujourd’hui ce Nicaragua libre, béni et toujours libre.

Membre employeur, Nicaragua – En venant ici et en prenant la parole dans cette enceinte, j’ai ressenti une pression, presque une persécution, en entendant les questions posées. Nous l’avons expliqué: nous sommes ici pour parler de notre réalité et non pour entendre des interventions de personnes dont certaines, comme je l’ai dit au délégué employeur, en 2019, ne connaissent même pas notre pays, mais enfilent comme des perles des horreurs et des réalités qui n’existent pas dans notre pays. Nous allons à présent parler de la convention no 111 que le Nicaragua n’appliquerait pas. Je tiens toutefois à préciser les choses ici pour mes collègues employeurs: on parle de la représentativité de certaines organisations et de certaines personnes qui, effectivement, étaient bien connues dans notre pays. Nous parlons de Chano Aguerri, président du Conseil supérieur de l’entreprise privée (COSEP). Précisons les choses: ce président n’était pas un chef d’entreprise. Il n’avait aucune entreprise. C’était simplement quelqu’un qui présidait cette organisation, bénéficiant de financements du grand capital au Nicaragua. Moi qui vous parle possède plusieurs entreprises au Nicaragua, entreprises qui opèrent depuis plus de trente ans dans le pays et auxquelles sont affiliées d’autres entreprises. Dans nos entreprises, les travailleurs et les travailleuses participent dans des conditions d’égalité: ce sont des professionnels aux fonctions et au salaire identiques, ce qui signifie que les effets de la discrimination dont on parle ne s’appliquent pas à notre cas. Nous, employeurs, appliquons une politique paritaire aux différents postes de nos entreprises et dans le secteur public, à tel point que le Nicaragua fait partie des sept premiers pays du monde connaissant une telle parité. Si nous devons parler de discrimination, eh bien je parlerai de notre expérience ici. Je peux mentionner ce que nous vivons ici, à l’OIT, où nous avons rencontré des difficultés en 2019, au moment d’autoriser des organisations prétendument représentatives, la perspective politique primant toujours. Même à distance, notre organisation n’a pas eu le droit de s’exprimer. Je saisis l’occasion qui m’est donnée aujourd’hui pour demander que cela ne se reproduise plus et que l’on puisse participer pleinement et présenter notre réalité, et qu’on nous aide à régler les problèmes en matière d’emploi et de salaires et à assurer des conditions de travail égales pour les hommes et les femmes, sans s’attarder sur d’autres sujets qui n’ont rien à voir avec la discrimination mais avec des perspectives politiques.

Je saisis également l’occasion qui m’est donnée pour solliciter l’appui de notre Organisation, l’OIT, l’appui des collègues employeurs. S’ils souhaitent des informations précises, qu’ils s’adressent à nous. Comme je l’ai dit, nous vous invitons dans notre pays, nous pouvons vous accompagner pour que vous voyez la réalité dans laquelle nous visons. Nous vous demandons de nous aider à faire tomber les sanctions préjudiciables imposées par certains pays, et vous savez de qui je veux parler. En effet, notre pays subit de formidables pressions de ces pays: on nous annule les financements extérieurs, ces investissements privés tellement nécessaires pour le développement économique et social de notre pays. Je saisis également l’occasion qui m’est donnée pour vous annoncer que nous allons intervenir en tant que secteur privé des entreprises auprès du gouvernement de la République du Nicaragua, auprès du ministère du Travail, pour proposer des dispositifs de rapprochement, de dialogue, afin de permettre que notre gouvernement, nos organisations entrent en contact et puissent tenir fidèlement les objectifs défendus ici afin que nous poursuivions notre chemin en ordre de marche.

Membre gouvernementale, Suède – Je m’exprime au nom de l’Union européenne (UE) et de ses États membres. L’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Macédoine du Nord, la République de Moldova, le Monténégro, la Serbie, pays candidats, la Géorgie, pays candidat potentiel, l’Islande et la Norvège, pays de l’AELE membres de l’Espace économique européen, se rallient à cette déclaration.

L’UE et ses États membres sont attachés à la promotion, à la protection, au respect et à la réalisation des droits de l’homme, y compris les droits au travail. Nous encourageons activement la ratification et la mise en œuvre universelles des normes internationales fondamentales du travail. Nous soutenons l’OIT dans son rôle indispensable d’élaboration, de promotion et de contrôle de l’application des normes internationales du travail ratifiées et des conventions fondamentales en particulier. Le principe d’égalité et de non-discrimination est un élément fondamental du droit international des droits de l’homme. Dans les traités fondateurs de l’UE et les Constitutions des membres de l’UE, l’interdiction de la discrimination est un principe central. La convention no 111 est la traduction de ce droit humain fondamental dans le monde du travail, dans l’emploi et dans la profession.

Malheureusement, le Nicaragua traverse une grave crise sociale, politique et des droits de l’homme depuis avril 2018, lorsque le gouvernement a réprimé des manifestations de masse contre une proposition de réforme de la sécurité sociale. Le gouvernement a systématiquement incarcéré, harcelé et intimidé des précandidats à l’élection présidentielle, des dirigeants de l’opposition, des autochtones, des étudiants et des dirigeants ruraux, des journalistes, des défenseurs des droits de l’homme, des syndicalistes et des représentants des milieux d’affaires. Depuis lors, les rapports du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH), de la Commission interaméricaine des droits de l’homme et, plus récemment, du groupe d’experts sur les droits de l’homme au Nicaragua font tous état de l’aggravation de la situation, avec l’érosion systématique de l’espace civique, ainsi que la persécution, la détention arbitraire et le déplacement forcé de ceux qui sont perçus comme des dissidents ou des opposants.

Nous saluons la libération de 222 prisonniers politiques le 9 février de cette année, mais nous déplorons la décision prise le même jour et le lendemain de les envoyer, ainsi que 94 autres dissidents, en exil apatride. Nous restons alarmés par les signalements de violations des droits de l’homme et d’abus, y compris la discrimination fondée sur le genre. Le renouvellement du mandat du groupe d’experts sur les droits de l’homme au Nicaragua par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies par le biais de la résolution 52/2 reflète l’engagement de la communauté internationale, y compris de l’UE, dans la défense de la démocratie, de l’état de droit et des droits de l’homme dans le pays.

Nous sommes profondément préoccupés par le climat de violence, d’intolérance, d’insécurité et d’intimidation, encore aggravé par certaines mesures, tant en droit que dans la pratique, qui est propice à de graves actes de discrimination dans l’emploi et la profession, à l’encontre de personnes qui expriment leur opinion politique. Nous nous associons pleinement à la commission d’experts quand elle demande au gouvernement de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour répondre à ses observations concernant la non-discrimination dans l’emploi et la profession et pour garantir l’élimination de la discrimination fondée sur l’opinion politique. Nous prions également instamment le gouvernement de traiter les questions soulevées dans les résolutions et observations adoptées par les organes des droits de l’homme susmentionnés et de se conformer aux demandes qui y sont formulées.

Nous prenons note des efforts déployés par la Cour suprême de justice qui ont pour objectif de prévenir, de traiter et d’éradiquer toute forme de violence sous forme de harcèlement sexuel et de harcèlement au travail dans toutes les instances du pouvoir judiciaire. Cependant, nous soutenons pleinement la commission d’experts quand elle demande des informations sur la mesure dans laquelle le Code du travail couvre un «environnement de travail hostile», sur les sanctions imposées dans les cas de plainte pour harcèlement sexuel et sur les actions en justice en matière de harcèlement sexuel ou de chantage sexuel.

Nous prions instamment le gouvernement, dans le droit fil du rapport de la commission d’experts, de prendre les mesures urgentes nécessaires pour garantir la protection et le respect effectifs des droits des peuples autochtones et d’ascendance africaine, particulièrement dans la région de la côte Atlantique. Cela inclut la promotion de l’inclusion sociale et la lutte contre la pauvreté et les inégalités au moyen de mesures ciblées visant à éliminer la discrimination structurelle qu’ils subissent encore. Nous déplorons l’exil forcé de plusieurs représentants de ces peuples, y compris d’experts invités par les Nations Unies à témoigner de la situation des peuples autochtones et d’ascendance africaine au Nicaragua. En outre, des efforts devraient être déployés pour lutter contre les diverses formes de discrimination à l’égard des femmes autochtones et d’ascendance africaine en intégrant une perspective de genre dans toutes les politiques et stratégies visant à éliminer la discrimination raciale. Nous soulignons qu’il est important de garantir l’égalité d’accès à tous leurs droits, y compris l’éducation, l’emploi et la santé, en tenant compte des spécificités et des différences culturelles et linguistiques et en les respectant pleinement.

L’UE continuera à suivre de près la situation et à soutenir le peuple du Nicaragua dans son aspiration légitime à la démocratie, au respect des droits de l’homme, y compris les droits au travail et à l’état de droit.

Membre travailleur, République bolivarienne du Venezuela – Le rapport du Front national des travailleurs nicaraguayens sur la convention no 111 indique ce qui suit: les cas de harcèlement au travail sont suivis par le secteur syndical et le ministère du Travail, car il s’agit d’une pratique que régit la loi; le harcèlement sexuel relève des tribunaux, chargés de mener les enquêtes. Au Nicaragua existe une loi qui respecte expressément la convention sur la non-discrimination et qui assure l’accès sur un pied d’égalité à l’emploi et aux fonctions qui en découlent. La loi dite 50/50 s’applique dans le domaine de l’emploi et de la fonction publique, mais aussi dans les fonctions électives. Les communautés autochtones sont respectées dans le cadre de la loi sur l’autonomie de la côte caraïbe, conformément à la mission de l’OIT, ce qui s’est traduit par la cession d’environ 50 000 kilomètres carrés de territoire.

En ce qui concerne le cas signalé par l’Organisation internationale des employeurs (OIE), en relation avec la question électorale du peuple nicaraguayen, nous estimons que les observations de cette commission constituent une ingérence ne relevant pas de sa compétence, puisqu’il s’agit d’une question inhérente au peuple nicaraguayen lui-même. L’organisation syndicale majoritaire des travailleurs de la République bolivarienne du Venezuela, ainsi que la délégation des travailleurs de la République de Cuba, partent du principe du respect de l’autodétermination des peuples, de la non-ingérence, de la souveraineté et de l’indépendance. Je souhaite pour finir faire quelques observations, par exemple: nous avons entendu aujourd’hui un employeur responsable dire qu’ils représentaient la majorité et que l’employeur nicaraguayen ne devrait pas se trouver dans cet espace. Il y a une contradiction: il demande la participation des autres employeurs, mais pas de celui-là. Il s’agit d’une démocratie où, à ce stade, dans la convention no 111, les masques sont tombés et la position politico-partisane de ces employeurs apparaît au grand jour, la même recette étant appliquée pour la Fédération de Russie, la Chine, la République islamique d’Iran, le Nicaragua, la République bolivarienne du Venezuela, Cuba et l’État plurinational de Bolivie. Mais ils ne disent pas, ou pas correctement, que les sanctions affectent les salaires, la santé, l’éducation, l’économie de ces pays. C’est pourquoi je considère que l’OIT doit développer, comme il se doit, avec les travailleurs et les employeurs, une structure adéquate et véritable où les conventions nos 87 et 111 sont respectées, et ne pas céder aux politiques-employeurs.

Membre gouvernemental, Cuba – Ma délégation a pris note des informations fournies par la délégation gouvernementale du Nicaragua au sujet de l’application de la convention. Elle a également analysé de près les observations de la commission d’experts. Nous estimons que la question qui nous occupe exige un plus grand dialogue entre l’OIT, les partenaires sociaux et les représentants du gouvernement, des travailleurs et des employeurs du Nicaragua. Nous souhaitons mettre en avant la coopération du gouvernement avec la commission d’experts, conformément à ses engagements à l’égard de l’Organisation. Par ailleurs, nous réaffirmons que l’on ne peut ignorer le fait qu’au Nicaragua, entre 2018 et 2021, 111 nouvelles organisations syndicales ont été constituées et qu’elles comptent 3 902 membres; les dossiers de 2 884 organisations, comptant 222 370 membres, ont été mis à jour, et le gouvernement a élaboré nombre de programmes sociaux en faveur du peuple et des travailleurs nicaraguayens. Une fois encore, nous refusons que les mécanismes de contrôle de l’OIT soient utilisés pour exprimer des allégations à caractère politique. Nous considérons qu’il faut analyser les politiques d’appui aux travailleurs mises en place par le gouvernement en toute impartialité. Comme nous l’avons déjà dit à d’autres reprises, il est extrêmement important de continuer à promouvoir le tripartisme et le dialogue social dans chaque pays, en vue de promouvoir l’esprit de dialogue et la coopération. Nous invitons la commission à adopter des conclusions objectives, techniques et équilibrées, fondées sur les informations fournies par les autorités du pays concerné.

Membre employeur, Honduras – Nous nous présentons cette fois-ci devant cette commission pour dénoncer la violation par le gouvernement nicaraguayen de la convention sur la discrimination fondée sur les opinions idéologiques, politiques et liées au travail. Ces aspects ont déjà été débattus au sein de cette commission et le gouvernement ne veut pas reculer, violant le droit sacré à la liberté d’opinion. Quiconque ose contredire la version officielle est sanctionné.

Le dialogue social est l’élément moteur de cette Organisation et chacun des membres du tripartisme a toujours eu pour objectif de promouvoir le consensus, qui est fondé sur les principes démocratiques du respect de l’opinion de nature idéologique des membres du tripartisme.

La démocratie se renforce lorsque les idées sont respectées, malgré les dissensions qui peuvent surgir, mais il n’est ni concevable ni acceptable qu’un gouvernement ne respecte pas l’opinion de ses citoyens et que cette opinion les conduise en prison ou à l’expulsion du pays où ils sont nés, en raison d’opinions ou de revendications professionnelles ou politiques, comme l’a souligné la commission d’experts.

Nous n’avons toujours pas reçu les informations que la commission d’experts a demandées au gouvernement l’année dernière. Il faudrait donc, pour chacune des sections du rapport de l’année 2023, indiquer un paragraphe spécial pour le non-respect de cette convention, le gouvernement ne montrant aucune volonté de se mettre en conformité.

Il est de notre devoir de lancer un appel fort pour défendre le dialogue social en tant que pilier de la démocratie et du respect des opinions sans aucune discrimination, en particulier dans le monde du travail Cette Organisation ne saurait tolérer aucune menace, d’ordre politique ou policière, parce que son opinion est différente de celle des fonctionnaires du gouvernement du Nicaragua. Nous nous associons à la proposition des membres employeurs.

Membre gouvernementale, République bolivarienne du Venezuela – Le gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela remercie la délégation du gouvernement du Nicaragua pour son exposé concernant le respect de la convention.

Nous avons pris note que le gouvernement a précisé que l’article 27 de la Constitution interdit tous les types de discrimination, notamment la discrimination fondée sur des motifs politiques, et que cette disposition est appliquée par le gouvernement à tous les citoyens, sans distinction, y compris les communautés autochtones.

À cet égard, compte tenu des arguments du gouvernement, il convient de noter que la convention vise à assurer le respect de l’égalité de chances ou de traitement en matière d’emploi et de profession.

Nous rappelons que l’article 4 de la convention est clair et catégorique sur le fait que la légalité doit être respectée et que, par conséquent, les mesures affectant une personne qui fait individuellement l’objet d’une suspicion légitime de se livrer à une activité préjudiciable à la sécurité de l’État ne doivent pas être considérées comme des discriminations et doivent être respectées si un tribunal compétent en décide ainsi, conformément à la législation et à la pratique nationales. Et c’est précisément le cas ici en ce qui concerne le Nicaragua.

Il est inquiétant que la commission d’experts, ou tout autre organe de contrôle de l’OIT, critique des décisions qui ont été rendues conformément à la loi dans le cadre constitutionnel et légal et dans le cadre de la compétence des tribunaux nationaux.

Nous apprécions le fait que la commission d’experts salue l’initiative de la Cour suprême de justice du Nicaragua concernant le protocole pour la prévention et la lutte contre le harcèlement au travail et le harcèlement sexuel au sein du pouvoir judiciaire nicaraguayen.

Nous apprécions également le fait que le ministère du Travail met en œuvre des procédures de traitement des plaintes, y compris celles relatives au harcèlement au travail, et que le gouvernement fournit des informations sur les mesures visant à protéger les populations autochtones et d’ascendance africaine contre la discrimination raciale en matière d’emploi et de profession.

Comme toujours, nous demandons aux organes de contrôle de l’OIT de se tenir à distance des considérations politiques, qui vont trop loin dans leurs commentaires, ce qui nuit à leur sérieux et à leur crédibilité ainsi qu’au noble objectif de l’OIT, et empiète sur la souveraineté des États.

Enfin, le gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela espère que les conclusions de cette commission seront objectives et équilibrées, afin que le gouvernement du Nicaragua puisse continuer à progresser et à renforcer le respect de la convention.

Membre gouvernemental, Bélarus – Nous saluons la participation active du Nicaragua, sa coopération avec l’OIT et la soumission de ses rapports aux organes de contrôle de cette organisation internationale. Nous rendons hommage au gouvernement pour ses efforts visant à garantir, à toutes les catégories de citoyens, des conditions favorables à la réalisation des droits inscrits dans la législation nationale: le droit au travail, la création active d’emplois et le développement dans le domaine de la culture et de l’éducation. Nous saluons les efforts entrepris par le gouvernement pour soutenir le peuple autochtone ainsi que l’interdiction de la discrimination dans le travail et l’emploi au niveau de l’État.

Les informations fournies par le gouvernement mettent en cause l’objectivité de l’OIT. Nous souhaiterions souligner qu’il est inacceptable pour des organisations internationales d’outrepasser leur mandat ou d’utiliser des approches et des évaluations clairement biaisées de la situation.

Membre gouvernemental, Chine – Nous remercions la représentante gouvernementale pour ces informations. Nous prenons bonne note du rapport de la commission d’experts. Le gouvernement s’est sincèrement acquitté des obligations au titre de la convention. L’article 27 de sa Constitution dispose clairement que les individus sont égaux devant la loi et qu’ils ont le même droit à la protection. Toute discrimination fondée sur la race, le sexe, la langue ou la religion est interdite.

Le gouvernement attache une grande importance au développement économique et social global de son pays. Il protège les droits des groupes vulnérables et améliore continuellement le niveau de vie, de travail, d’éducation, de culture et de santé de son peuple. En 2022, le pont Wawa a été construit sur la côte nord des Caraïbes, bénéficiant directement à plus de 48 000 personnes et, indirectement, à près de 150  000, ce qui crée des emplois et stimule la production. Cela prouve que le gouvernement accorde une grande attention au bien-être de sa population et qu’il a pris des mesures concrètes et efficaces.

Nous prions instamment la commission, lors de l’examen de ce cas et au moment de parvenir à des conclusions, de respecter les informations transmises par le gouvernement, de respecter son système juridique, de se concentrer sur le mandat de la commission et de l’OIT, et d’éviter d’inclure des termes qui interfèrent avec la souveraineté, le système juridique et les affaires intérieures du pays. Dans le cas contraire, la crédibilité du mécanisme de contrôle et la réputation de l’OIT seraient mises à mal.

Membre gouvernemental, Fédération de Russie – Nous remercions le gouvernement d’avoir fourni une explication concernant la convention. Les dispositions législatives en vigueur au Nicaragua sont reprises au plus haut niveau dans la Constitution politique du pays, qui interdit clairement toute forme de discrimination, y compris pour des motifs politiques. Ces normes sont mises en œuvre dans la pratique et permettent aux personnes, aux peuples autochtones et d’ascendance africaine de s’épanouir sur le marché du travail. En outre, des infrastructures sont développées dans le plein respect de la législation et des normes applicables. L’analyse de la situation du pays s’appuie largement sur des sources non gouvernementales et nous insistons sur le fait que cette approche n’est pas appropriée. Il est important de tenir compte de toutes les parties dans les documents de conclusion relatifs à ces questions. Autrement, l’objectivité et à l’approche impartiale de la commission seraient légitimement mises en doute.

Interprétation de l’arabe: Membre gouvernemental, République arabe syrienne – Partant des informations apportées par le gouvernement s’agissant des mesures et des procédures mises en œuvre dans le cadre de l’application de la convention, et eu égard à la coopération dont il a fait preuve avec cette Organisation, et sachant que le Nicaragua a apporté les réponses dans les délais impartis, notre délégation souscrit tout à fait aux observations du Nicaragua.

Nous estimons qu’il est nécessaire de renforcer la coopération avec le gouvernement et l’ensemble des partenaires sociaux. Il faut éviter de prendre des mesures qui finissent par politiser les activités de notre Organisation, ce qui n’est pas du tout conforme au respect du principe de la souveraineté et de la non-ingérence dans les affaires intérieures des États Membres, principe cardinal du système des Nations Unies.

Observateur, Confédération des travailleurs et des travailleuses des universités des Amériques (CONTUA) – Le mouvement syndical est fermement et résolument favorable à l’éradication de toute forme de discrimination dans le monde du travail et en dehors de celui-ci, sans oublier qu’il incombe aux États de garantir la non-discrimination, en ce qu’il s’agit d’un droit humain fondamental de toutes les personnes.

De la même manière, comme l’a fait la Cour interaméricaine des droits de l’homme dans son avis consultatif relatif à la liberté syndicale, la négociation collective et la grève, et leur relation avec d’autres droits, dans une perspective de genre, nous considérons que la convention no 111 et les autres conventions de l’OIT doivent être interprétées conformément au principe pro homine et en lien avec les normes du système interaméricain, d’autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et les avis et recommandations du Comité de la liberté syndicale et de la commission d’experts, afin de parvenir à une interprétation harmonieuse des obligations internationales.

Ainsi, nous souhaitons dire que nous comprenons la préoccupation de la commission d’experts face aux plaintes déposées, celles directement liées aux normes de l’OIT et celles qui concernent d’autres droits de l’homme concurrents. En effet, un organisme de sa nature doit nécessairement s’employer à vérifier que les conventions qui concernent directement les personnes sont appliquées. Cette discussion est donc extrêmement importante pour les travailleurs. Ici, le gouvernement et les acteurs sociaux peuvent exprimer leur position et la commission, moyennant les conclusions, avec le concours du Bureau, pourra dessiner une feuille de route pour une collaboration visant à trouver des solutions contribuant à la pacification des relations professionnelles qui, sans nul doute, participera à la pacification politique au Nicaragua.

Le Nicaragua est un pays jeune qui a récemment connu de violentes controverses entre secteurs en conflit. En Amérique latine, cela fait malheureusement longtemps que nous vivons avec des fractures, des positions antagonistes, des différences politiques extrêmes qui, dans certains cas, dégénèrent en situation violente, comme par exemple la récente prise du palais présidentiel au Brésil, phénomène dont le sud n’a pas l’exclusivité, si l’on se souvient du Capitole aux États-Unis, ainsi que d’autres événements, d’ampleur différente mais aux fondements identiques, en Europe.

Le mouvement syndical est convaincu que, en principe, en matière de travail, et avec d’autres institutions des Nations Unies, les acteurs sociaux, le groupe de gouvernements de notre région – le groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC) –, et le Bureau, nous pouvons et devons œuvrer ensemble pour contribuer à la pacification, au respect de la démocratie, à l’état de droit et à la garantie de non-discrimination sous toutes ses formes au Nicaragua.

Représentante gouvernementale – Une fois de plus, je réitère mes remerciements pour les interventions des pays qui favorisent un véritable dialogue et contribuent à l’esprit de travail de cette Organisation. Le gouvernement de la République du Nicaragua a mis en place des politiques sociales et du travail visant à rétablir, dans l’ensemble, les droits des femmes de façon à leur permettre de jouer un rôle dans le système éducatif et d’améliorer sans relâche leurs compétences professionnelles, et de bénéficier d’un système de santé et de sécurité sociale gratuit. Certaines conventions collectives prévoient des dispositions en faveur des travailleuses, par exemple le congé maternité de trois mois avant et après l’accouchement, l’allaitement maternel, les soins maternels et les maisons de maternité. Citons également les formations et les moyens mis en œuvre pour favoriser l’esprit d’entreprise par le biais de programmes et de projets destinés aux femmes et fondés sur la Constitution politique, le Code du travail et d’autres lois spéciales qui protègent et rétablissent les droits au travail des travailleuses en général, sans aucune forme de discrimination. Les femmes participent activement à la gestion de leur lieu de travail et font partie de fédérations, de confédérations, de syndicats et de commissions mixtes où elles jouent un rôle moteur, ce qui renforce le tripartisme et la liberté d’association. La participation des femmes nicaraguayennes au développement économique, social et politique est une base importante pour garantir l’égalité et l’équité des genres, avec des résultats non négligeables à l’échelle internationale, comme l’a reconnu le Forum économique mondial, qui a attribué au Nicaragua la septième place en matière d’égalité des genres, et la première place parmi les pays des Amériques, selon l’indice des inégalités entre hommes et femmes du Forum économique mondial. Le Nicaragua, par le biais de politiques nationales et de la loi no 648 sur l’égalité des droits et des chances, offre aux femmes des moyens et des capacités de formation professionnelle dans tous les domaines de l’activité économique, politique, sociale, culturelle et productive, dans le droit fil des progrès réalisés dans l’éradication de la pauvreté et le développement humain des familles nicaraguayennes. Ainsi, le Nicaragua est le pays qui compte le plus grand nombre de femmes occupant des postes de direction, tels que des postes ministériels, des postes de députés, maires, maires adjoints, conseillers et ministres. Par ailleurs, parler de harcèlement sexuel au Nicaragua revient à parler d’un délit: il est qualifié comme tel dans le Code pénal et il revient aux tribunaux de le poursuivre et de le condamner. De même, la loi spéciale no 779 porte sur la question de la discrimination politique; je crois savoir que, dans mon pays, cette question est traitée dans le cadre du processus électoral. La question politique des conditions permettant d’accéder au pouvoir, que prévoit la Constitution du Nicaragua, est définie par l’autorité électorale dans notre pays, ainsi que par sa loi électorale no 331.

D’autre part, le Nicaragua a répondu à toutes les questions de la commission. Le 15 mars, nous avons envoyé une réponse à la question concernant la dissolution du COSEP, une organisation qui n’était pas rattachée au ministère du Travail, mais qui se décrivait comme une organisation non gouvernementale, à but non lucratif, et qui semble-t-il n’était donc pas tenue de respecter la loi. Au Nicaragua, tout le monde doit respecter la loi; les privilèges ne peuvent être confondus avec les droits. De même, l’article 4 de la convention précise que les mesures affectant une personne qui fait individuellement l’objet d’une suspicion légitime de se livrer à une activité préjudiciable à la sécurité de l’État ne sont pas considérées comme des discriminations. Ces messieurs, déjà mentionnés à propos de l’activité criminelle de 2018 contre la sécurité de notre nation, ont mené et financé la tentative avortée de coup d’État au Nicaragua.

Nous demandons instamment que l’esprit de travail de la commission soit rétabli. Le gouvernement de réconciliation et d’unité nationale réaffirme sa vocation pour la paix, le travail et le bien commun de tous. Un dialogue authentique exige des conditions égales dans le cadre du respect et sans exigences susceptibles de porter atteinte à la souveraineté nationale. Toute ingérence visant à perturber la paix et la stabilité du travail au Nicaragua est inadmissible pour le Nicaragua. Le dialogue et le tripartisme, qui sont une réalité au Nicaragua, se poursuivront malgré les attaques financières et hégémoniques de certains membres de cette organisation. Le Nicaragua continuera toujours à lutter pour la paix, pour la sécurité sociale et surtout pour les droits des travailleuses et des travailleurs nicaraguayens.

Membres employeurs – Tout d’abord, je voudrais souligner que nos interventions sont toujours respectueuses. Nous n’intervenons pas à titre personnel et nous nous fondons sur les informations contenues dans les rapports. Ces informations proviennent de cette Organisation, à laquelle, me semble-t-il, nous avons toujours accordé le mérite d’agir avec professionnalisme et avec la meilleure intention de consigner les faits et les circonstances qui existent dans les différents États Membres de l’OIT. Nous respectons tous les participants, et les travailleurs en particulier. Ce que nous faisons ici depuis plusieurs heures, d’abord pendant l’examen de la convention no 87 et, maintenant, celui de la convention no 111, c’est précisément de veiller à ce que les travailleurs puissent exercer les droits qui découlent des conventions internationales qu’a ratifiées l’État Membre. Il me semble donc qu’il n’y a pas, de notre part, de plus grande preuve de respect et de participation dans le but de formuler des propositions.

Cette précision étant faite, je voudrais répéter que, à mon sens, ce cas, bien qu’il relève d’un autre domaine que celui de la convention no 87, devrait être analysé conjointement et non pas isolément. Il doit être résolu grâce à une action commune. La commission d’experts a établi que plusieurs droits violent ou restreignent l’exercice des droits des travailleurs. Certains de ces droits sont consacrés dans la convention no 87 et d’autres dans la convention no 111, mais, en fin de compte, on constate un ensemble d’actions et d’omissions dans les deux domaines à l’examen, ce qui doit être corrigé. Par conséquent, nous, membres employeurs, ne pouvons que nous faire l’écho de la commission d’experts et, à cet égard, nous proposons que les conclusions du présent cas soulignent la gravité de la situation. Nous proposons aussi de prier instamment le gouvernement de suivre pleinement les dernières recommandations qu’a formulées cette commission, c’est-à-dire d’agir immédiatement pour mettre un terme au climat de violence, d’insécurité et d’intimidation dans le pays, de mettre immédiatement fin aux détentions arbitraires pour des motifs de désaccord politique et pour des raisons fondées sur le genre et, dans son prochain rapport, d’informer la commission d’experts.

Nous lui demandons également d’accepter une mission de contacts directs et une assistance technique du Bureau, comme cela a été proposé. À ce sujet, je souhaiterais indiquer que nombre des intervenants qui ont participé à l’examen et le gouvernement lui-même insistent sur le fait qu’il n’y a ni violations de droits ni omissions qui entravent le libre exercice des droits à l’examen, qu’ils ont pris des mesures et que la situation a été rectifiée. Alors, quelle meilleure occasion de le constater non pas en nous proposant aimablement de nous rendre prochainement dans le pays, mais en ouvrant la porte à l’OIT, afin qu’elle puisse constater la situation en suivant les directives de l’Organisation.

À vrai dire, tous les pays qui ont bénéficié d’une assistance technique et reçu une mission de contacts directs ont pu créer de meilleures conditions pour appliquer les conventions, respecter les obligations et exercer les droits correspondants.

Je voudrais donc insister sur le fait que, si notre demande est acceptée et considérée comme un soutien et non comme une persécution, comme on l’a entendu, cela nous tranquillisera tous. Ce n’est pas moi seul qui le dis mais plusieurs intervenants. Nous insistons sur ce point qui revêt la plus grande importance.

Enfin, en raison de la gravité de la question, nous demandons formellement que les conclusions de ce cas fassent l’objet d’un paragraphe spécial dans le rapport de la commission.

Membres travailleurs – La commission d’experts a pris note des informations fournies par la représentante gouvernementale et nous l’en remercions. Nous avons également pris note de la discussion qui a suivi.

Les membres travailleurs réitèrent leur profonde préoccupation quant à la persistance du harcèlement sexuel et de la violence fondée sur le genre dans le pays, y compris dans les secteurs cités dans les remarques liminaires. La violence et le harcèlement n’ont pas leur place dans le monde du travail et le gouvernement doit redoubler d’efforts pour garantir qu’aucun travailleur ne subisse ces abus. À cet égard, nous sommes satisfaits de constater que le Nicaragua a ratifié la convention (nº 190) sur la violence et le harcèlement, 2019, et qu’il a pris des mesures pour garantir sa transposition en droit et dans la pratique.

Nous réitérons également notre profonde préoccupation concernant l’absence de cadre législatif national qui interdise la discrimination raciale conformément à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Il n’y a pas de place pour le racisme sur le lieu de travail ou dans la société dans son ensemble. Les Nicaraguayens d’ascendance africaine ont souffert et continuent de souffrir de la discrimination dans l’emploi et la profession dans la pratique. Le Nicaragua doit adopter sans tarder le cadre législatif adapté et investir les ressources nécessaires pour mettre fin à la discrimination dans la pratique. Nous prenons également note de la discrimination continue à l’encontre des personnes autochtones et nous prions instamment le gouvernement de consulter les peuples autochtones dans le cadre du processus de décision relatif au développement et à l’exploitation des ressources naturelles sur leurs territoires.

En dernier lieu, nous prenons note de l’environnement de discrimination politique, dans lequel des dirigeants politiques, des défenseurs de droits de l’homme, des journalistes, des représentants du monde paysan et étudiant, et des membres d’organisations de la société civile sont victimes de détention arbitraire. Une fois encore, nous devons répéter que les travailleurs ne peuvent accepter la discrimination fondée sur l’opinion politique. La véritable représentation des intérêts économiques et sociaux des organisations de travailleurs et d’employeurs peut être sérieusement compromise dans un environnement de discrimination politique et d’intolérance à l’encontre de l’expression d’opinions politiques différentes.

Nous prions instamment le gouvernement de renoncer à une telle discrimination et d’assurer véritablement la protection des travailleurs sur la base de leur opinion politique.

À la lumière de notre discussion, les membres travailleurs prient instamment le gouvernement:

- de fournir les informations demandées par la commission d’experts concernant le harcèlement sexuel et de prendre toutes les mesures pour garantir l’élimination, dans la pratique, de la violence et du harcèlement dans le monde du travail;

- de fournir les informations sur toutes les mesures adoptées ou envisagées pour protéger les peuples autochtones et d’ascendance africaine contre la discrimination raciale dans l’emploi et la profession, et de prendre des mesures spécifiques dans la pratique pour protéger les peuples autochtones et d’ascendance africaine contre la discrimination raciale dans l’emploi et la profession;

- de prendre des mesures immédiates pour mettre fin au climat de violence, d’insécurité et d’intimidation dans le pays et pour garantir l’élimination de la discrimination dans l’emploi fondée sur l’opinion politique. Nous prions instamment le gouvernement de fournir des informations actualisées à ce sujet, y compris sur les résultats des enquêtes menées dans le cadre de plaintes déposées auprès des autorités administratives ou judiciaires pour des actes de discrimination fondée sur l’opinion politique;

- de fournir des informations sur les résultats des nombreuses mesures prises dans le cadre de la politique nationale d’égalité de chances et de traitement, y compris la nature des violations constatées dans l’application de la convention, les mesures correctives prises et les sanctions imposées.

Enfin, les membres travailleurs rappellent au gouvernement qu’il peut bénéficier de l’assistance technique de qualité du BIT. Dès lors, nous l’encourageons à s’en prévaloir autant que possible.

Conclusions de la commission

La commission a pris note des informations que le gouvernement a fournies par écrit et oralement et de la discussion qui a suivi.

La commission a pris note avec une profonde préoccupation du climat de violence, d’insécurité et d’intimidation qui règne dans le pays et qui est propice à la commission d’actes de discrimination dans l’emploi et la profession fondée sur l’opinion politique.

Elle a également pris note des détentions arbitraires et du fait que des informations continuaient à faire état de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ceux-ci, y compris de discrimination fondée sur le genre.

Prenant en compte la discussion qui a eu lieu, la commission prie instamment le gouvernement, en consultation avec les partenaires sociaux:

- de prendre des mesures immédiates pour mettre un terme au climat de violence, d’insécurité et d’intimidation qui règne dans le pays;

- d’adopter les mesures nécessaires pour éliminer la discrimination dans l’emploi et la profession et d’apporter une protection adéquate aux travailleurs en cas de discrimination fondée sur l’opinion politique;

- de s’abstenir de discrimination fondée sur l’opinion politique, de faire en sorte qu’aucune sanction ne soit imposée et d’apporter une protection adéquate en cas de discrimination fondée sur l’opinion politique;

- de fournir des réparations adéquates, dont la réintégration dans la nationalité nicaraguayenne et la restitution des biens saisis, aux personnes ayant subi une discrimination motivée par l’opinion politique;

- de fournir des informations sur toute mesure supplémentaire prise pour éliminer la discrimination fondée sur des motifs politiques et sur le résultat de toute enquête menée comme suite à des plaintes adressées aux autorités administratives ou judiciaires pour des actes de discrimination fondée sur l’opinion politique;

- d’indiquer dans quelle mesure l’article 17(p) du Code du travail couvre également «l’environnement de travail hostile»; et

- de fournir des informations sur toute plainte administrative déposée ou toute action en justice intentée auprès des tribunaux du travail ou des juridictions pénales en vertu des dispositions du Code du travail ou du Code pénal en matière de harcèlement sexuel et de chantage sexuel, ainsi que sur les sanctions imposées dans les cas où les plaintes portées devant le ministère du Travail ont été acceptées et où des actes de harcèlement sexuel ont été constatés.

La commission prie également le gouvernement de continuer à:

- prendre toutes mesures pour garantir, dans la pratique, l’élimination de la violence et du harcèlement dans le monde du travail et fournir des informations à la commission d’experts sur toutes mesures adoptées concernant le harcèlement sexuel, y compris la sensibilisation et la prévention;

- prendre des mesures spécifiques, dans la pratique, pour protéger les peuples indigènes et d’ascendance africaine contre la discrimination raciale dans l’emploi et la profession et fournir des informations sur toutes mesures adoptées ou envisagées pour protéger les peuples indigènes et d’ascendance africaine contre la discrimination raciale dans l’emploi et la profession;

- fournir des informations sur les résultats des nombreuses actions entreprises en lien avec la politique nationale sur l’égalité de chances et de traitement; et

- fournir des informations sur le type de violations constatées dans le cadre de l’application de la convention, les mesures correctives prises et les sanctions imposées.

La commission rappelle au gouvernement qu’il peut se prévaloir de l’assistance technique du BIT si nécessaire.

La commission prie le gouvernement de faire part, en consultation avec les partenaires sociaux, des progrès accomplis dans l’application de la convention, d’ici au 1er septembre 2023.

Représentante gouvernementale – Nous avons dans ce cas aussi pris bonne note des conclusions de la commission.

Nous sommes inquiets de constater que la commission continue de déformer la réalité du Nicaragua. Au Nicaragua, on protège les femmes, les indigènes, les personnes d’ascendance africaine, toutes les personnes, et l’on veille sur toutes les personnes. Notre cadre juridique protège tout le monde, sans discrimination. Je le redis: nous n’acceptons ni l’interférence ni l’ingérence, ni l’inégalité de traitement. Les motivations politiques de ces conclusions fragilisent la convention et l’esprit de l’OIT, ce qui nous inquiète profondément.

Le Nicaragua continuera à protéger tous les Nicaraguayens en œuvrant à la stabilité professionnelle et à la paix, avec du travail et une vie digne.

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