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Observation (CEACR) - adoptée 2021, publiée 110ème session CIT (2022)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - République centrafricaine (Ratification: 1960)

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Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Violations commises dans le cadre des hostilités entre les groupes armés. Dans ses précédents commentaires, la commission a exprimé sa profonde préoccupation face à la persistance du recours au travail forcé et à l’esclavage sexuel par des groupes armés dans le cadre du conflit opposant le gouvernement à ces groupes. La commission a pris note des mesures visant à restaurer la paix et la sécurité dans le pays et de la mise en place d’une Commission Vérité et Réconciliation ainsi que d’une Cour pénale spéciale. Elle a instamment prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin aux violences perpétrées contre les civils dans le but de les contraindre au travail forcé, y compris l’esclavage sexuel, ainsi que pour lutter contre l’impunité des auteurs de ces crimes.
Le gouvernement indique dans son rapport qu’il poursuit ses efforts pour lutter contre toutes les formes de violences perpétrées sur les populations civiles, y compris les pratiques assimilées au travail forcé. Il précise qu’il a pris un certain nombre de mesures d’ordre sécuritaires et législatives en vue de faire face aux violences perpétrées sur les populations civiles par les groupes armés, y compris par le redéploiement des forces armées centrafricaines dans les villes jadis occupées par les groupes armés, afin d’assurer une protection adéquate des populations civiles. Le gouvernement indique en outre que les sessions de la Cour criminelle dédiées aux affaires de viols (infraction incriminée par l’article 87 du Code pénal), permettent de sanctionner pénalement, entre autres, des auteurs de viols appartenant aux groupes armés.
La commission prend note de ces informations. Elle prend note également de la signature le 6 février 2019, de l’Accord politique pour la Paix et la Réconciliation en République centrafricaine (APPR-RCA) par le gouvernement et 14 groupes armés, en vue de la cessation des hostilités entre les groupes armés et de toutes les exactions et violences sur les populations civiles. Elle note par ailleurs que, d’après son rapport du 24 août 2020, couvrant la période de juillet 2019 à juin 2020, l’Expert indépendant des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine indique que le délai fixé dans cet accord par les autorités nationales à la fin janvier 2020 pour conclure le désarmement et la démobilisation n’a pas été respecté. L’Expert indépendant souligne que de nombreux cas de violences sexuelles liées aux conflits, parmi lesquelles des viols et des cas d’esclavages sexuels, sont commis par les parties au conflit, particulièrement les groupes armés. Il précise que les victimes sont souvent réticentes à porter plainte, par peur de représailles et de la stigmatisation. En outre, les capacités de réponses médicale, judiciaire et psychosociale sont très limitées. Bien que la Cour pénale spéciale ait achevé des investigations relatives à une dizaine d’affaires, l’insécurité empêche l’accès à l’ensemble du territoire pour mener des enquêtes, et le fonctionnement partiel des juridictions de l’arrière-pays reste un sujet de préoccupation. Par ailleurs, l’Expert indépendant indique que la Commission vérité, justice, réparation et réconciliation (CVJRR), dont la mission est d’œuvrer à la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-récurrence, en complémentarité avec la Cour pénale spéciale, n’est pas encore pleinement opérationnelle (A/HRC/45/55, paragr. 47, 77, 78, 81). La commission note également que, dans ses observations finales de 2020, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies souligne que malgré la mise en place d’un dispositif de protection des témoins et des victimes au sein de la Cour pénale spéciale, aucune mesure n’a été prise pour rendre ce dispositif opérationnel, dont l’enclenchement est laissé à la discrétion des juges (CCPR/C/CAF/CO/3, paragr. 9).
La commission prend note du rapport conjoint du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) et la Mission des Nations Unies en République centrafricaine (MINUSCA) sur les violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire en République centrafricaine durant la période électorale, de juillet 2020 à juin 2021, d’après lequel la situation sécuritaire n’a cessé de s’aggraver dans le pays. Ce rapport fait également état d’enlèvements, de viols, et d’esclavage sexuel, de la part des forces armées et des groupes armés (paragr. 55, 80, 88). Le 4 mai 2021, un décret portant création d’une Commission d’enquête spéciale chargée d’enquêter sur les allégations de graves violations des droits humains et du droit international humanitaire commises par les forces armées nationales, les forces de sécurité intérieure et autres personnels de sécurité entre décembre 2020 et avril 2021, a été publié (paragr. 152). Tout en reconnaissant la complexité de la situation qui prévaut dans le pays, avec un contexte politico-sécuritaire qui demeure instable et la présence de groupes armés sur le territoire, la commission prie instamment le gouvernement de poursuivre ses efforts pour s’assurer qu’aucune personne ne puisse se voir imposer une quelconque forme de travail forcé, y compris l’esclavage sexuel. En outre, la commission exprime le ferme espoir que le gouvernement continue à prendre des mesures pour améliorer l’effectivité des voies de recours dont disposent les victimes, y compris en rendant opérationnels les mécanismes précités, et pour traduire en justice les auteurs de ces crimes. Elle prie le gouvernement de communiquer des informations sur les progrès réalisés à cet égard.
Article 25. Application de sanctions pénales efficaces. La commission a précédemment observé que si le Code du travail interdit le recours au travail forcé sous toutes ses formes, ni ce Code ni la législation pénale ne prévoient de sanctions pénales pour l’imposition de travail forcé (hormis pour la traite des personnes). Elle a prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que la législation contient des dispositions permettant aux autorités compétentes de poursuivre, juger et sanctionner les auteurs de toutes les formes de travail forcé et pas uniquement la traite des personnes.
Le gouvernement indique que les articles 8 et 9 du projet de loi portant Code du travail révisé prévoient l’interdiction du travail forcé ou obligatoire. La commission prend note de cette information et rappelle que, aux termes de l’article 25 de la convention, des sanctions pénales réellement efficaces et strictement appliquées doivent être prévues en cas d’exaction illégale du travail forcé. La commission exprime par conséquent l’espoir que le gouvernement prendra en compte les commentaires de la commission de façon à ce que la législation prévoit des sanctions pénales suffisamment efficaces et dissuasives à l’encontre des auteurs de toutes les formes de travail forcé, que ce soit dans le cadre du projet de Code du travail révisé ou de la législation pénale.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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