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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2021, Publication : 109ème session CIT (2021)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - Kiribati (Ratification: 2009)

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2021-KIR-182-Fr

Informations écrites communiquées par le gouvernement

Article 3 de la convention. Pires formes de travail des enfants. Alinéa b). Utilisation, recrutement ou offre d’un enfant à des fins de prostitution

Le gouvernement de Kiribati, en ratifiant la convention en 2009, a souligné qu’il était fermement résolu à éliminer dans le pays toutes les pires formes de travail des enfants.

En 2015, le projet de loi sur l’emploi et les relations professionnelles a été adopté par le Parlement et publié récemment au journal officiel en 2019.

Le ministère de l’Emploi et des Ressources humaines, qui est chargé de l’application de cette loi, a confié cette tâche à quatre inspecteurs. Ces derniers ont effectué en tout 526 inspections du travail entre 2017 et 2020. Parmi ces inspections, 303 ont mis en évidence une non-conformité constante aux conditions d’emploi – heures de travail, salaires non versés, licenciements abusifs. Au cours des inspections, les inspecteurs ont élaboré un calendrier d’inspections pour toutes les entreprises de Kiribati. Les listes des entreprises enregistrées sont fournies par le ministère du Commerce, de l’Industrie et des Coopératives. Les inspecteurs du travail collaborent avec le Département de la police pour engager des poursuites dans le cas des infractions les plus graves. À ce jour, la police indique, de même que les dossiers judiciaires, qu’il n’y a toujours pas de cas de poursuites pour travail des enfants.

Par ailleurs, les partenaires sociaux et les acteurs concernés, en collaboration avec le gouvernement, sont conscients de la nécessité cruciale de mieux coordonner la lutte contre les pires formes de travail des enfants.

Alinéa c). Utilisation, recrutement ou offre d’un enfant aux fins d’activités illicites, notamment pour la production et le trafic de stupéfiants

Le gouvernement indique que l’on manque de mécanismes d’application pour lutter contre les pires formes de travail des enfants. L’adoption de règlements sur les listes de travaux légers et de travaux dangereux aidera à combattre les activités liées aux pires formes de travail des enfants. De même, à l’avenir, la formation et le renforcement des capacités des inspecteurs du travail permettront de garantir la compétence des agents en ce qui concerne les activités visant à faire connaître les activités interdites par le Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles (EIRC) et la mise en œuvre/application effective du code.

Alinéa d) et article 4. Travaux dangereux et détermination des types de travaux dangereux

Le gouvernement prend acte des conclusions des études menées et des rapports soumis qui indiquent que les pires formes de travail des enfants existent à Kiribati; il est en train de finaliser le texte visant à modifier l’âge minimum et de préparer la séance de lecture du projet de loi, l’objectif étant d’adopter cette modification lors de la prochaine session du Parlement en août 2021, laquelle sera suivie par la finalisation du règlement sur la liste de travaux dangereux et de travaux légers pour les enfants. Les conclusions susmentionnées serviront de base à ces initiatives de réforme législative; le gouvernement partage la préoccupation des parties prenantes quant à la situation difficile des enfants qui travaillent dans ces conditions et cet environnement difficiles, et quant aux conséquences que cela aura pour les enfants s’ils ne sont pas protégés comme il convient.

Les inspections du travail n’ont pas été étendues aux secteurs privé et informel ni aux secteurs qui, selon les études et les rapports, sont les lieux où le risque de travail illégal des enfants est élevé – entre autres, bateaux de pêche, bars «kava», vente ambulante, travaux domestiques et boîtes de nuit. Les discussions récentes avec les partenaires sociaux lors des réunions du Conseil consultatif sur le travail décent en 2019 20 indiquent qu’il faut une assistance technique appropriée pour élaborer des outils et des réglementations afin de lutter contre les pires formes de travail des enfants dans ces secteurs. Il faut aussi renforcer comme il se doit les capacités des inspecteurs du travail pour ce type d’inspection afin que ces activités soient clairement définies pour garantir le succès des poursuites.

Les travaux domestiques, tels que la coupe des feuilles de palmier, la préparation des fruits de mer et le travail avec des animaux soumis à aucun contrôle, font partie des activités normales dans un cadre domestique traditionnel des sociétés et des familles de Kiribati. La réglementation de ces travaux pour les jeunes enfants sera préjudiciable à l’ensemble des compétences dont ces jeunes ont besoin pour survivre sur un atoll, en particulier ceux qui vivent dans les îles extérieures, en milieu rural, et constituera une rupture avec les normes culturelles de Kiribati. C’est pourquoi, lors des réunions du Conseil consultatif pour le travail décent (DWAB), au sujet des règlements sur les listes des travaux dangereux et des travaux légers que le gouvernement a mentionnés précédemment, les partenaires sociaux ont estimé qu’il fallait une consultation plus approfondie pour s’assurer qu’ils sont applicables au contexte de Kiribati.

Le gouvernement réaffirme toutefois la nécessité de renforcer les capacités des inspecteurs du travail et d’apporter l’assistance technique voulue pour élaborer un système et une procédure d’inspection efficaces et adaptés à la situation, et spécifiquement destinés à combattre les pires formes de travail des enfants.

Article 5. Mécanismes de surveillance

Le ministère de l’Emploi et des Ressources humaines a déjà entamé des discussions, avec la police de Kiribati et le ministère des Femmes, de la Jeunesse, des Sports et des Affaires sociales (MWYSSA), sur un programme d’inspection conjointe des activités et lieux considérés comme très risqués. Il s’agit notamment des bars «kava», des boîtes de nuit et de la prostitution sur les navires de pêche étrangers. Les inspections dans ces activités et lieux très risquées n’ont toutefois pas commencé. Le gouvernement note qu’il est crucial d’adopter les règlementations pertinentes et d’assurer la formation et le renforcement nécessaires des capacités avant d’entamer ces inspections.

Article 7, paragraphe 1. Sanctions

Le gouvernement prend note de la recommandation de la commission concernant les sanctions imposées en vertu de l’EIRC pour les cas de pires formes de travail des enfants, et il veille dans ces cas à l’application de sanctions de détention suffisamment efficaces et dissuasives. Le gouvernement mènera des consultations sur cette recommandation avec le DWAB et fournira des informations actualisées au cours du prochain cycle de présentation de rapports.

Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces devant être prises dans un délai déterminé. Alinéas a) et b). Empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants, soustraire les enfants des pires formes de travail des enfants et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. Exploitation sexuelle à des fins commerciales

Le MWYSSA élabore actuellement un système d’orientation aux fins de la protection de l’enfance qui sera coordonné par le Groupe de travail sur la protection de l’enfance (CPWG), lequel est composé des principaux ministères concernés, des services de police de Kiribati, des organisations non gouvernementales et des communautés. Cette procédure sera fondamentale pour la protection des enfants à Kiribati. Les organismes qui interviennent jouent un rôle essentiel dans l’octroi d’une protection et d’une assistance immédiate. Le gouvernement n’a pas encore approuvé le CPWG.

Actuellement, il n’y a pas de cas connu d’enfants soustraits à l’exploitation sexuelle à des fins commerciales et ayant bénéficié d’une réadaptation et d’une intégration sociale.

Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces devant être prises dans un délai déterminé. Alinéa a). Empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants. Accès à une éducation de base gratuite

La loi sur l’éducation de Kiribati dispose que les enfants en âge de scolarité obligatoire ont droit à la gratuité de l’inscription et à une éducation gratuite dans les écoles primaires et secondaires du premier cycle. La loi oblige également les parents à inscrire leurs enfants à l’école chaque année pendant les périodes de scolarité obligatoire. L’inscription d’enfants ne peut pas être refusée pour des motifs discriminatoires tels que le sexe, la religion, la race ou le handicap. Le gouvernement mène des programmes essentiels pour garantir la mise en œuvre de ces dispositions, notamment le renforcement des capacités des enseignants dans les domaines de l’inclusion et du genre dans le cadre éducatif, ainsi que l’élaboration d’un programme national fondé sur l’éducation inclusive.

En outre, le programme AusAID pour l’amélioration de l’éducation à Kiribati, lancé en 2010, a commencé ses activités en 2011. Il a été réalisé en trois phases, et comprend la rénovation d’écoles primaires dans les îles extérieures, dans les îles de la Ligne et à Tarawa Sud. Certaines des activités couvrent également une assistance technique et un financement pour la réforme des programmes scolaires, et pour le renforcement des capacités des enseignants dans les instituts de formation d’enseignants de Kiribati, conformément à la politique d’éducation inclusive. La politique environnementale intégrée (KIEP) a également joué un rôle essentiel dans la construction d’écoles modèles à Tarawa Sud. Ces écoles sont conçues pour accueillir les enfants handicapés et leur donne la possibilité d’aller à l’école; les enseignants et le personnel sont spécifiquement formés pour répondre à leurs besoins.

Discussion par la commission

Représentant gouvernemental, secrétaire chargé de l’Emploi et des Ressources humaines – C’est un honneur pour moi de m’adresser à la Commission de l’application des normes, mais je regrette que ce soit pour présenter le cas de mon gouvernement relatif à la convention (nº 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999. Il est malheureux que la République de Kiribati soit considérée comme étant le théâtre de cas de pires formes de travail des enfants au niveau national. Des enquêtes ou des rapports nationaux publiés récemment illustrent la situation relative au travail des enfants dans notre pays. Toutefois, il importe de noter que certains des cas recensés, tels que la coupe des feuilles de palmier, constituent des pratiques culturelles intrinsèques qui sont essentielles pour former des citoyens résilients et créer des moyens durables de subsistance dans notre pays, qui est considéré comme l’un des pays les moins avancés de la région. Le fait d’interdire cette pratique aux jeunes enfants peut avoir de graves conséquences au sein des communautés de Kiribati.

En outre, le gouvernement condamne fermement toutes les autres formes de travail des enfants et s’emploie actuellement à améliorer les systèmes de contrôle applicables à ces types d’activités. C’est ce qui ressort du rapport soumis par le gouvernement de Kiribati, qui illustre certains des progrès accomplis, allant des réformes politiques et législatives à des systèmes d’intervention améliorés grâce à l’établissement de voies d’orientation, en passant par une meilleure coordination avec les parties prenantes.

Le gouvernement prend note des problèmes liés à la collecte d’informations et à la mise en place d’une base de données centralisée, de la nécessité de renforcer les capacités des services d’inspection du travail et des organismes de mise en œuvre associés, ainsi que de bénéficier d’une assistance technique pour renforcer la législation afin de garantir une meilleure mise en œuvre de la convention.

Le gouvernement souhaite saluer le soutien inconditionnel fourni par le bureau régional de l’OIT à Suva. Les conseillers techniques ont fait des efforts notables qui transparaissent, notamment, dans l’élaboration et l’adoption de notre Programme de travail national 2019-2022, l’assistance technique fournie dans le cadre de certaines de nos réformes législatives qui doivent encore être adoptées par le Parlement, et les activités de formation et de renforcement des capacités dispensées aux fonctionnaires qui participent à la mise en œuvre des conventions ratifiées.

Membres employeurs – Le présent cas porte sur l’application d’une convention fondamentale, à savoir la convention no 182, qui est la toute première convention de l’OIT à avoir été ratifiée de manière universelle par les 187 États Membres de l’Organisation. Il s’agit sans aucun doute d’une avancée historique que le groupe des employeurs salue et a toujours appuyée. Nous constatons en outre que ce débat a lieu au moment opportun, étant donné que nous célébrons en 2021 l’année internationale pour l’élimination du travail des enfants.

Cependant, et malheureusement, une ratification universelle n’est pas synonyme d’une application universelle automatique en droit et dans la pratique. C’est la première fois que la commission examine l’application de cette convention ratifiée par Kiribati en 2009.

La commission d’experts a formulé une observation et une demande directe afin de signaler les lacunes dans la conformité de Kiribati en 2020.

Nous sommes reconnaissants au gouvernement d’avoir soumis à la commission des informations supplémentaires portant clarification de certaines questions relatives à l’application de la convention. Nous regrettons toutefois que ces informations aient été transmises deux jours avant l’examen du présent cas.

Les observations formulées par la commission d’experts mettent en évidence des éléments d’inadéquation particulièrement graves concernant l’application de la convention à Kiribati. Permettez-moi de les résumer autour de deux axes.

En premier lieu, il convient de noter que l’alinéa b) de l’article 3 de la convention interdit l’utilisation, le recrutement ou l’offre d’un enfant à des fins de prostitution, de production de matériel pornographique ou de spectacles pornographiques. La commission a observé que l’article 118 f) du Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles de 2015 interdit l’utilisation, le recrutement ou l’offre d’un enfant à des fins de prostitution, et prévoit en cas d’infraction une peine d’amende d’un montant de 5 000 dollars des États-Unis, une peine de dix ans d’emprisonnement, ou les deux peines cumulées.

Nous constatons que le gouvernement a fourni des informations concernant les activités d’inspection du ministère de l’Emploi et des Ressources humaines effectuées par quatre inspecteurs: un total de 526 inspections réalisées entre 2017 et 2020. Nous sommes néanmoins surpris de ce que le gouvernement ait indiqué qu’il n’a pas été signalé d’affaire ni de condamnation liée à l’article 118 f) susmentionné du code de l’emploi.

Dans ses observations, la commission d’experts a identifié rigoureusement diverses sources qui apportent des preuves d’engagement d’enfants âgés de 10 à 17 ans dans des activités de prostitution. Ces sources sont notamment le programme TACKLE déployé par l’OIT à Fidji, le rapport du Comité des droits de l’enfant de mars 2020 et le rapport du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.

Les membres employeurs appuient les demandes formulées par la commission d’experts tendant à ce que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour veiller à ce que les personnes qui contreviennent à l’article 118 f) du Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles fassent l’objet d’une enquête et de poursuites appropriées et fournisse des informations concernant le nombre de violations de cette disposition.

En second lieu, les observations formulées par la commission d’experts sont liées aux dispositions des alinéas a) et b) du paragraphe 2 de l’article 7, qui visent à empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants, à soustraire aux pires formes de travail des enfants ceux qui y ont été engagés et à assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. Nous prenons note du fait que la commission d’experts avait prié le gouvernement d’intensifier ses efforts afin de prévenir l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales dans le pays et de fournir des informations sur les mesures prises pour soustraire à cette pire forme de travail des enfants ceux qui y avaient été engagés.

Le gouvernement a présenté et échangé il y a deux jours certaines informations pertinentes concernant les mesures prises à cet égard. Nous saluons ces efforts ainsi que l’engagement à lutter contre ces problèmes extrêmement graves. Nous encourageons le gouvernement à continuer de travailler avec les acteurs sociaux et les organisations internationales de coopération au développement afin de prévenir l’exploitation des enfants, même dans des circonstances socio-économiques défavorables.

Les membres employeurs encouragent également le gouvernement à continuer de mettre en œuvre en priorité les mesures relatives à la sensibilisation au travail des enfants et à la conscientisation de la population, ainsi qu’au renforcement des capacités des inspecteurs du travail, des travailleurs sociaux et des acteurs du secteur privé. Par ailleurs, compte tenu du rôle que joue l’éducation dans la prévention des pires formes de travail des enfants, les membres employeurs suggèrent au gouvernement d’intensifier ses efforts pour faciliter l’accès de tous les enfants, en particulier les filles, à une éducation de base gratuite, en augmentant les taux de scolarisation et en diminuant les taux d’abandon scolaire.

Les membres employeurs remercient une nouvelle fois le gouvernement pour les informations écrites et orales soumises à la Commission de l’application des normes. Nous notons que le Bureau propose un éventail de programmes à l’intention des pays où le travail des enfants est une réalité. Nous encourageons le gouvernement à solliciter l’assistance technique du BIT afin de renforcer les capacités des mandants tripartites en vue de mettre en œuvre des stratégies efficaces et d’éradiquer les pires formes de travail des enfants, après avoir consulté les partenaires sociaux de manière opportune et efficace.

En conclusion, nous soulignons que pour concrétiser la cible 8.7 des objectifs de développement durable, qui vise à éliminer le travail des enfants sous toutes ses formes d’ici à 2025, il est nécessaire que tous les gouvernements, toutes les organisations d’employeurs et de travailleurs et l’OIT elle-même continuent d’œuvrer en ce sens.

Membres travailleurs – Notre commission examine pour la toute première fois l’application de la convention no 182 par le gouvernement de Kiribati. Nous notons que le pays a ratifié la convention en 2009 et que, depuis son premier rapport sur l’application de la convention présenté en 2013, la commission d’experts soulève les mêmes préoccupations particulièrement graves concernant le problème persistant de l’utilisation, du recrutement et de l’offre d’un enfant à des fins de prostitution. La situation à Kiribati est source de préoccupations profondes alors même que l’exploitation sexuelle des filles subsiste.

Les membres d’équipage des bateaux de pêche étrangers sont en grande partie à l’origine de la demande d’enfants dans le secteur du commerce sexuel. Les filles concernées reçoivent généralement un appui financier – sous la forme de nourriture, d’alcool ou de biens – en échange de services sexuels avec des collaborateurs locaux. On ne dispose malheureusement que de très peu d’informations détaillées concernant la prostitution des enfants, étant donné que le gouvernement ne fournit pas suffisamment de données pour évaluer la situation. Il ressort de l’évaluation rapide sur le travail des enfants à Tarawa, réalisée dans le cadre du Programme international de l’OIT pour l’abolition du travail des enfants (IPEC) en 2012, que, sur les 61 enfants identifiés comme étant engagés dans le travail des enfants, 33 étaient victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales.

Nous notons avec préoccupation que l’article 118 (2) du Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles (2015), qui prévoit des sanctions en cas de pires formes de travail des enfants, établit une peine d’amende d’un montant de 5 000 dollars des États-Unis, une peine de dix ans d’emprisonnement, ou les deux peines cumulées, pour toute personne se livrant à l’utilisation, au recrutement ou à l’offre d’un enfant à des fins de prostitution, de production de matériel pornographique ou de spectacles pornographiques. Nous faisons écho aux commentaires formulés par la commission d’experts selon lesquels, compte tenu de la gravité de ces pires formes de travail des enfants et du caractère dissuasif que les sanctions devraient avoir, une législation prévoyant la possibilité d’infliger uniquement une amende ne peut être considérée comme efficace.

À la lumière des informations fournies par le gouvernement en 2020, les situations de prostitution des enfants tendent à ne pas être dénoncées parce qu’il est considéré que ces filles n’agissent pas sous la contrainte et que, d’une manière générale, la société n’a pas une perception claire du caractère illégal et dangereux de cette pratique. L’absence d’affaires signalées ou de condamnations relatives à l’utilisation, au recrutement ou à l’offre d’un enfant à des fins de prostitution, de production de matériel pornographique ou de spectacles pornographiques est d’autant plus préoccupante et met clairement en exergue de graves lacunes dans les mesures prises par le gouvernement pour empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants et pour punir les auteurs de ces actes.

En ce qui concerne les mesures de protection des enfants, nous notons l’information fournie par le gouvernement de Kiribati selon laquelle la police effectue des patrouilles de nuit afin d’empêcher que les enfants n’errent dans les rues, l’objectif étant de prévenir l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales et de soustraire à ces pratiques ceux qui y ont été engagés.

Nous prenons en outre note des activités de renforcement des capacités menées auprès des gérants et des membres des bars «kava» qui emploient de nuit des filles n’ayant pas l’âge légal de travailler, ainsi que de la mise sur pied d’un service de conseil s’adressant à ces enfants, qui leur fournit les moyens de se réinsérer dans la société, notamment par la scolarisation, et assure auprès d’eux une action de prévention de l’alcoolisme.

Nous notons également les services d’orientation en vue de la protection des enfants mis sur pied actuellement par le ministère des Femmes, de la Jeunesse, des Sports et des Affaires sociales. Nous saluons les efforts déployés pour améliorer l’éducation ainsi que le système et l’infrastructure d’enseignement, de façon à faciliter l’accès des enfants à l’éducation. Ces mesures revêtent une importance cruciale pour empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants, soustraire aux pires formes de travail ceux qui y ont été engagés et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale.

Toutefois, afin d’obtenir des résultats, il faut que ces mesures soient complétées par des mécanismes solides de contrôle et d’inspection. À ce propos, nous prenons note des informations communiquées par écrit par le gouvernement indiquant que seuls quatre inspecteurs sont chargés de la mise en œuvre du Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles et que ceux-ci n’ont pas la formation et les capacités nécessaires pour surveiller les problèmes liés au travail des enfants et éliminer cette forme de travail.

Nous prenons aussi note des discussions en cours entre le ministère de l’Emploi et les forces de police de Kiribati en vue d’effectuer des inspections conjointes là où le risque d’exposition aux pires formes de travail des enfants est particulièrement élevé, par exemple à bord de bateaux étrangers ainsi que dans les bars «kava» et les boîtes de nuit. Si nous saluons ces initiatives positives, nous souhaitons néanmoins souligner que des mesures de mise en œuvre renforcées sont attendues depuis longtemps et que le gouvernement de Kiribati doit agir sans délai pour garantir la mise en œuvre de la législation pertinente, notamment à la faveur de services d’inspection du travail suffisamment équipés et formés.

En ce qui concerne les travaux dangereux, nous sommes profondément inquiets de constater que, d’après l’Office national de la statistique de Kiribati, environ 15 pour cent des enfants âgés de 5 à 17 ans travaillent dans des conditions dangereuses. Nous nous référons à l’évaluation rapide réalisée en 2012 dans le cadre du programme OIT-IPEC, laquelle a révélé que des enfants étaient engagés dans des activités de manutention, de chargement et de déchargement des navires, dans certaines activités dangereuses liées à la pêche, dans des activités telles que la vente de marchandises sur la voie publique, le travail dans des ateliers de mécanique ou de réparation de bateaux, ou encore la préparation de ciment.

Nous observons que la liste des types de travaux dangereux interdits aux enfants de moins de 18 ans a été élaborée par le ministère de l’Emploi, avec l’appui du BIT, en attendant la prochaine session du Parlement en août 2021. Nous appelons le gouvernement à accélérer l’adoption de la liste des types de travaux dangereux, conformément à la convention, et à effectuer régulièrement des inspections du travail afin de détecter les cas de violation et d’imposer des sanctions dissuasives.

Membre travailleur, Kiribati – Je suis ici pour défendre la protection des droits des travailleurs, qui est tributaire non seulement d’une structure législative solide, mais aussi d’un mécanisme de mise en œuvre efficace.

Kiribati a ratifié la convention dont il est question en 2009. Au titre de l’article 118 f) du Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles (2015), l’utilisation, le recrutement et l’offre d’un enfant à des fins de prostitution sont interdits. En cas d’infraction, une peine d’amende d’un montant de 5 000 dollars des États-Unis, une peine de dix ans d’emprisonnement, ou les deux peines cumulées sont prévues.

Nous constatons que, dans plusieurs rapports, des institutions internationales telles que l’OIT, à travers le programme IPEC, et l’Équipe de pays des Nations Unies pour Fidji (qui couvre Kiribati) ont attiré l’attention sur l’engagement des enfants dans la prostitution, notamment à bord de bateaux étrangers, qui sont le lieu le plus fréquent de prostitution des enfants. Malheureusement, le gouvernement n’a signalé à la commission d’experts aucune affaire ou condamnation relative à l’article 118 f) du Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles (2015). Il est évident que le fait que le gouvernement n’ait transmis aucune information aux organes de contrôle de l’OIT constitue un manquement grave à ses responsabilités. Nous partageons en outre l’avis qu’un système d’inspection inefficace ne profite à personne.

De plus, il existe des lacunes dans le cadre juridique de Kiribati en ce qui concerne la protection adéquate des enfants contre les pires formes de travail des enfants, l’exercice de travaux dangereux, les activités interdites aux enfants, ainsi que la traite des enfants. Le pays n’a pas identifié les types de travaux dangereux interdits aux enfants, que ce soit dans sa législation ou dans sa réglementation nationale. Au titre de l’article 116 du Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles, les activités et les heures de travail hebdomadaire acceptables pour les enfants effectuant des travaux légers ne sont pas précisées. La loi ne dit rien non plus sur les conditions dans lesquelles les travaux légers peuvent être effectués. Les lois de Kiribati portant interdiction de la traite des enfants sont insuffisantes puisqu’elles n’interdisent pas spécifiquement la traite des enfants au niveau national.

Permettez-moi de donner quelques exemples concrets pour montrer combien la pratique des pires formes de travail des enfants à Kiribati est grave. De nos jours, il n’est pas rare d’aller faire des achats la nuit et de voir un ou deux enfants qui vendent des bijoux ou des produits locaux faits à la main. Ces enfants sont exploités par leurs tuteurs ou leurs parents. Dans les bars «kava», il arrive souvent de voir des enfants errer ou assis au bar avec des clients. En ce qui concerne l’exploitation sexuelle à des fins commerciales, des jeunes filles à partir de 14 ans montent à bord de bateaux de pêche étrangers amarrés au port et offrent leurs services aux membres de l’équipage, en échange de cadeaux ou d’argent.

Il est donc nécessaire que cette commission intervienne de toute urgence afin d’empêcher que des enfants ne soient engagés dans ces activités. Il faut porter un coup d’arrêt à l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales à Kiribati. Surtout, le gouvernement de Kiribati doit redoubler d’efforts pour prévenir les pires formes de travail des enfants. Le gouvernement doit prendre les mesures nécessaires pour soustraire aux pires formes de travail des enfants, y compris l’utilisation d’un enfant à des fins de prostitution, ceux qui y ont été engagés. Ces mesures consistent notamment à:

renforcer les services d’inspection du travail et conduire des inspections ciblées sur la base d’une analyse des données relatives aux secteurs à haut risque et aux schémas d’incidents graves;

établir un mécanisme afin de coordonner les mesures du gouvernement visant à lutter contre les pires formes de travail des enfants;

redoubler d’efforts afin d’éliminer les barrières à l’éducation et de garantir l’accès de tous les enfants à l’éducation;

mettre en œuvre des programmes sociaux afin de s’attaquer aux pires formes de travail des enfants, notamment dans les secteurs de la construction et du commerce ambulant;

veiller à ce que les personnes qui contreviennent à l’article 118 f) du Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles (2015) fassent l’objet d’une enquête et de poursuites; et

consulter les syndicats et les partenaires sociaux en vue d’élaborer un programme de mise en œuvre de ces mesures.

J’appelle le gouvernement de Kiribati à agir dans le respect de la convention.

Les travailleurs de Kiribati attendent de leur gouvernement qu’il respecte les engagements internationaux qu’il a pris en vertu de la ratification de la présente convention et d’autres conventions internationales du travail.

Membre gouvernemental, Portugal – J’ai l’honneur de m’exprimer au nom de l’Union européenne (UE) et de ses États membres. Les pays candidats – le Monténégro et l’Albanie –, la Norvège, pays de l’Association européenne de libre échange (AELE) et membre de l’Espace économique européen (EEE), ainsi que la République de Moldova, souscrivent à cette déclaration.

L’UE et ses États membres se sont engagés à promouvoir, à protéger, à respecter et à réaliser les droits de l’homme, y compris les droits des travailleurs, ainsi que la liberté syndicale et l’abolition du travail forcé ou obligatoire et du travail des enfants.

Nous mettons un point d’honneur à promouvoir la ratification universelle et la mise en œuvre des droits internationaux du travail revêtant un caractère fondamental, notamment la convention no 182 sur l’abolition des pires formes de travail des enfants. Nous appuyons l’OIT dans l’exercice de son rôle indispensable en vue de renforcer, de promouvoir et de superviser l’application des normes internationales du travail et des conventions fondamentales, en particulier.

Nous remercions le Bureau et souscrivons pleinement à son attachement constant à promouvoir les droits des travailleurs à Kiribati, l’égalité de traitement, ainsi que l’élimination de la discrimination, du travail forcé et du travail des enfants.

Nous notons avec un profond regret les informations qui témoignent de la persistance du travail des enfants, y compris sous ses pires formes, en particulier la prostitution d’enfants mineurs et l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales. Le gouvernement doit redoubler d’efforts pour éradiquer ces pires formes de travail des enfants.

Nous souscrivons aux observations formulées par la commission d’experts et exhortons le gouvernement à prendre les mesures nécessaires afin de veiller à ce que les personnes qui contreviennent aux dispositions du Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles, lequel interdit l’utilisation, le recrutement et l’offre d’un enfant à des fins de prostitution, fassent d’objet d’une enquête et de poursuites.

Nous appelons également le gouvernement à fournir des informations sur le nombre de violations recensées, de poursuites et de condamnations, et de sanctions imposées.

L’UE et ses États membres saluent la fourniture de services de conseil et d’orientation élargis afin de résoudre les problèmes liés à l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales, ainsi que les activités de renforcement des capacités menées par le ministère des Femmes, de la Jeunesse, des Sports et des Affaires sociales. Nous nous félicitons de la baisse signalée du nombre de filles travaillant dans les bars «kava».

Nous appelons instamment le gouvernement à continuer de prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher que des enfants ne soient victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales et à prendre les mesures qui s’imposent pour soustraire à cette pire forme de travail des enfants ceux qui y ont été engagés, assurer leur réadaptation et leur intégration sociale et économique, et faire en sorte que tous les enfants aient accès à une éducation obligatoire et gratuite aux niveaux primaire et secondaire.

Nous prions le gouvernement de fournir des informations sur les éléments susmentionnés, ainsi que sur le nombre d’enfants de moins de 18 ans qui ont été effectivement soustraits à l’exploitation sexuelle à des fins commerciales et ont bénéficié d’une prise en charge et d’une assistance appropriées.

En ce qui concerne la convention no 138 de l’OIT sur l’âge minimum liée au travail des enfants, nous nous félicitons de ce que Kiribati figure parmi les 173 pays Membres de l’OIT à avoir déjà ratifié cette convention cruciale, malgré les difficultés propres aux petits États insulaires. Nous espérons que, au vu du message positif que véhicule la ratification de la convention par Kiribati, les 14 États Membres de l’OIT restants soient encouragés à s’engager eux aussi sur la voie de la ratification de cette convention importante, afin de parvenir à une ratification universelle.

Nous appelons le gouvernement à renforcer sa législation et à garantir sa mise en œuvre efficace en vue d’éliminer le travail des enfants, y compris dans l’économie informelle. L’UE et ses États membres continueront d’appuyer le gouvernement de Kiribati dans cette entreprise.

Membre travailleur, Australie – La présente convention met en lumière les formes d’exploitation des enfants si flagrantes et si préjudiciables en ce qui concerne leurs effets qu’elles privent les jeunes de leur enfance. L’une des pires formes de travail des enfants est la prostitution des enfants. Culturellement, les enfants de Kiribati occupent une place centrale dans la société. Malgré leur importance sur le plan culturel, de nombreux enfants restent vulnérables et risquent de perdre leurs droits à cause de la prostitution dont ils sont victimes, en particulier dans les îles et régions les plus pauvres. L’évaluation rapide sur le travail des enfants menée à Tarawa en 2012 a montré que, sur les 61 enfants identifiés comme étant engagés dans le travail des enfants, 33 étaient victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales.

Le droit pénal actuel interdit le recrutement de filles âgées de moins de 18 ans à des fins de prostitution et interdit d’utiliser un enfant de moins de 15 ans, indépendamment du sexe, à des fins de prostitution. Dans les deux cas, la peine maximale encourue est de deux ans de prison. L’exploitation sexuelle des filles est un problème persistant, en ce sens que des filles âgées de 15 ans à peine sont exploitées à des fins de prostitution dans des bars «kava» et des hôtels locaux.

Les membres d’équipage des bateaux de pêche étrangers sont en grande partie à l’origine de la demande d’enfants dans le secteur du commerce sexuel. Les employés d’hôtels et de bars à proximité des quais facilitent l’exploitation des filles à des fins de traite sexuelle, en mettant à disposition un lieu où se livrer à la prostitution. Souvent, celui-ci se trouve à bord des bateaux de pêche.

En 2010, la délivrance d’une licence de pêche das les eaux au large de Kiribati a été subordonnée à «l’interdiction pour le personnel non autorisé de monter à bord des bateaux de pêche». La police effectuait des patrouilles sur les quais, mais la loi n’a pas été mise en œuvre de manière rigoureuse en vue d’identifier les cas de prostitution des enfants à bord des bateaux et de lutter contre ce fléau.

Il n’est un secret pour personne que la pauvreté est un moteur de l’exploitation sexuelle des filles à Kiribati. Les filles concernées reçoivent généralement un appui financier – sous la forme de nourriture, d’alcool ou de biens – en échange de services sexuels. Certains membres de la famille des victimes potentielles, que ce soient des femmes âgées ou des employés d’hôtels et de bars, facilitent l’exploitation des filles à des fins de traite sexuelle.

Nous nous associons à la commission d’experts en priant le gouvernement de garantir une mise en œuvre rigoureuse de la loi en ce qui concerne la traite et la prostitution des enfants. Il convient aussi que le gouvernement prenne des mesures pour soustraire les enfants à l’exploitation sexuelle à des fins commerciales et assurer la réadaptation des enfants qui ont été victimes de ce type de pratique.

Membre employeuse, Colombie – Avant toute chose, il me semble important d’affirmer le caractère fondamental que nous attachons, en tant qu’employeurs, à la convention, laquelle vise à protéger les enfants, à savoir les membres les plus vulnérables de la société. En adoptant cette convention, l’OIT a reconnu l’importance que revêt ce thème tant au niveau national qu’au niveau international. Cette norme vise à apporter une solution à un problème particulièrement aberrant, raison pour laquelle elle a été adoptée par l’OIT de façon rapide et unanime.

La convention porte sur les pires formes de travail des enfants et constitue un signal d’alarme clair et sans ambiguïté pour que tous les États Membres prennent des mesures urgentes et exhaustives. Conformément à l’article 7 de la convention, les gouvernements doivent prendre les mesures nécessaires pour assurer la mise en œuvre effective et le respect des dispositions de la ladite convention, en particulier moyennant l’application de sanctions pénales.

La commission d’experts a indiqué, dans son rapport sur le présent cas, que l’article 118 f) du Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles (2015) interdit l’utilisation, le recrutement et l’offre d’un enfant à des fins de prostitution et prévoit une peine d’amende de 5 000 dollars des États-Unis ou une peine de dix ans d’emprisonnement.

Cependant, aucune affaire ou condamnation relative à l’infraction de cette norme n’a été signalée à ce jour. Et ce même si le gouvernement a indiqué dans son rapport au Comité des droits de l’enfant de mars 2020 que des filles étaient bel et bien victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales dans le pays. Bien que la loi imposant une peine privative de liberté soit un pas positif vers le respect de la convention, rien ne prouve l’efficacité de cette mesure ni l’application d’une sanction, quelle qu’elle soit. Nous demandons donc au gouvernement de s’engager à mettre en œuvre et à respecter dans les faits le droit pénal et de fournir des informations qui témoignent de son application dans la pratique.

Enfin, nous prions le gouvernement de continuer à progresser, avec l’assistance technique du BIT et moyennant les différents mécanismes de coopération internationale existants, dans la mise en conformité de la législation et de la pratique avec les dispositions de la convention, afin de parvenir de toute urgence à l’éradication des pires formes de travail des enfants dans le pays.

Membre travailleur, Malte – La plainte dont nous sommes saisis a été déposée au titre de la seule convention de l’OIT dont la ratification est universelle, et il est d’une importance cruciale que, parce qu’elle a été si largement ratifiée, cette convention soit dûment mise en œuvre car, si une convention dont la ratification est universelle n’est pas correctement et pleinement mise en œuvre, cela met à mal la campagne à laquelle nous avons tous participé pour atteindre ce niveau de ratification.

De plus, le travail des enfants est l’une des pires formes d’exploitation, en ce sens qu’elle vole à la génération suivante ce qui devrait être une expérience d’apprentissage et de croissance. Pour cette raison, lorsqu’il s’agit d’exploitation sexuelle, nous devons aussi être conscients du fait que les violences sexuelles infligées aux mineurs constituent également un acte de violence, susceptible de provoquer des dommages physiques et mentaux qui peuvent laisser des séquelles à vie.

Je ne dois pas convaincre la présente commission que les violences sexuelles à l’égard de jeunes femmes constituent un acte odieux et inacceptable. Toutefois, dans ses conclusions, la commission doit être consciente qu’il est également inacceptable de se contenter d’identifier un problème sans s’y attaquer et que, pour s’attaquer à ce problème, il faut non seulement informer, faire respecter la loi et offrir des possibilités de réadaptation et d’intégration, notamment par l’éducation, mais aussi offrir d’autres sources de revenus en tant que facteur essentiel de l’élimination des pires formes de travail des enfants.

Je constate avec satisfaction que le gouvernement de Kiribati a au moins identifié le problème et a pris des mesures tant dans l’industrie de la pêche commerciale que dans le secteur hôtelier afin d’éduquer les employeurs. La méconnaissance de la loi ne constitue en rien une excuse, et le gouvernement de Kiribati semble avoir pris des mesures pour veiller à ce que la population soit désormais au fait de la loi. Toutefois, la connaissance de la loi n’est pas nécessairement synonyme de respect de la loi, et les jeunes femmes souffriront d’exploitation, d’abus et de violence tant que les lois ne sont pas mises en œuvre. Elles seront toujours la proie de ce genre de comportement jusqu’à ce que des solutions viables soient mises en œuvre pour s’assurer que ces jeunes apprennent et grandissent et qu’ils ne souffrent pas.

Mes collègues du mouvement syndical à Kiribati sont aussi désireux que nous de voir ces pratiques éradiquées, les employeurs qui les facilitent et les autorisent tenus responsables de leurs actes, et les auteurs de ces actes prévenus et punis. Ils ont un rôle, en tant qu’éducateurs, que défenseurs des droits des enfants, que parents et que tuteurs, d’abolir cette pire forme de travail des enfants.

Nous attendons du gouvernement qu’il prenne les mesures énoncées par la commission d’experts, et nous attendons de la Commission de la Conférence qu’elle recommande au gouvernement de Kiribati de donner suite aux avis formulés par la commission d’experts.

Membre employeur, Argentine – Nous observons que le gouvernement prend acte des résultats des études et des différents rapports témoignant de l’existence des pires formes de travail des enfants à Kiribati.

Nous saluons les informations soumises par le gouvernement concernant les inspections effectuées entre 2017 et 2020. Toutefois, nous regrettons qu’aucune information n’ait été fournie en ce qui concerne les affaires ou les condamnations liées à l’utilisation, au recrutement et à l’offre d’un enfant à des fins de prostitution, autant de pratiques sanctionnées en vertu de l’article 118 f) du Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles (2015).

En conséquence, nous nous faisons l’écho de l’appel lancé au gouvernement afin que celui-ci:

prenne les mesures nécessaires pour garantir, dans la pratique, que des enquêtes et des poursuites sont menées de manière rapide et approfondie; et

fournisse des informations, en temps utile, concernant le nombre de violations de cette disposition, de personnes poursuivies et condamnées, et de sanctions imposées.

En ce qui concerne la prévention des pires formes de travail des enfants et les mesures de réadaptation, nous soulignons l’importance des activités de sensibilisation menées au sein de la communauté, ainsi que des stratégies de renforcement des capacités déployées à l’intention des acteurs sociaux, des inspecteurs du travail et des travailleurs sociaux.

Nous faisons en outre écho aux propos du porte-parole des employeurs et encourageons le gouvernement à continuer de travailler de toute urgence avec les partenaires internationaux de développement et les acteurs sociaux afin d’empêcher l’exploitation des enfants, en particulier dans un environnement marqué par des conditions socio-économiques défavorables. Nous encourageons surtout le gouvernement à solliciter l’assistance du BIT, dont les experts ont développé des connaissances approfondies, acquis de l’expérience et accumulé des capacités dans ce domaine.

Enfin, nous espérons que l’engagement du gouvernement se traduira par des actions concrètes lorsqu’il fournira des informations sur les mesures prises pour changer la vie des enfants qui restent particulièrement exposés à ces pires formes de travail des enfants.

Observateur, Internationale de l’éducation (IE) – L’Internationale de l’éducation représente près de 400 syndicats de l’enseignement, y compris le syndicat des enseignants de Kiribati. Là où les partenaires sociaux, y compris les syndicats d’enseignants, participent pleinement aux initiatives visant à éradiquer le travail des enfants, et sont soutenus dans leur démarche, les résultats sont impressionnants et durables.

Dans le rapport de la commission d’experts, le ministère des Femmes, de la Jeunesse, des Sports et des Affaires sociales de Kiribati a souligné la nécessité d’assurer l’intégration des enfants qui travaillent, notamment par l’éducation. Nous appuyons la volonté du gouvernement d’instaurer un climat propice à la protection des enfants et des adolescents. La commission d’experts prie le gouvernement de continuer de prendre des mesures pour empêcher que des enfants ne soient engagés dans l’exploitation sexuelle à des fins commerciales. Elle prie aussi le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour soustraire aux pires formes de travail des enfants ceux qui y ont été engagés, ainsi que pour assurer leur réadaptation et leur intégration sociale.

Afin d’éradiquer le travail des enfants, il est crucial de garantir que tous les enfants jouissent pleinement de leur droit à l’éducation jusqu’à l’âge minimum de scolarité obligatoire. De concert avec le syndicat des enseignants de Kiribati, l’Internationale de l’éducation prie le gouvernement d’accroître les fonds destinés à l’éducation publique et d’inclure un volet sur la sensibilisation au travail des enfants dans les programmes de formation des enseignants, de sorte que les enseignants soient professionnellement formés, habilités et soutenus en vue d’accueillir à l’école des enfants qui ont été soustraits au travail des enfants, et qu’ils leur fournissent l’attention et le soutien dont ils ont besoin.

Nous demandons que le gouvernement élabore des programmes dédiés aux femmes afin de protéger activement les filles et les communautés défavorisées contre le piège des réseaux de prostitution. Il faut offrir de manière préventive aux filles et aux jeunes femmes des possibilités d’éducation et de formation professionnelle.

Enfin, nous recommandons que le BIT fournisse une assistance technique, notamment en poursuivant les initiatives OIT-IPEC menées dans le cadre du programme TACKLE.

Représentant gouvernemental – En conclusion, le gouvernement de Kiribati tient compte des recommandations formulées par le groupe des travailleurs, le groupe des employeurs et la commission. Le gouvernement prendra aussi en considération un appui administratif supplémentaire pour ce qui est des inspections du travail concernant le travail des enfants, afin d’éliminer ces types d’activités avant 2025.

Le gouvernement assurera en outre une meilleure coordination avec les instances gouvernementales, les partenaires sociaux et les organisations non gouvernementales concernés s’agissant du contrôle et de l’élimination du travail des enfants à Kiribati. À cette fin, il souhaite souligner qu’un appui est demandé au BIT en matière de renforcement des capacités et d’assistance technique en ce qui concerne les mesures et les outils efficaces et les plus appropriés pour lutter contre les pires formes de travail à Kiribati.

Membres travailleurs – Nous remercions le gouvernement de Kiribati pour les commentaires qu’il a transmis à l’oral et à l’écrit. Nous remercions également les intervenants qui ont pris la parole pour leurs contributions au débat.

Les membres travailleurs déplorent et condamnent la persistance des pires formes de travail des enfants à Kiribati, y compris l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales et l’utilisation, le recrutement et l’offre d’un enfant aux fins d’activités illicites, notamment pour la production et le trafic de stupéfiants. Nous regrettons aussi l’absence d’informations concrètes concernant l’ampleur des pires formes de travail des enfants dans le pays et les effets des mesures prises pour les contrer.

Nous rappelons que la commission d’experts exprime les mêmes préoccupations depuis huit ans et que, jusqu’à présent, peu de progrès ont été réalisés pour empêcher les enfants de tomber dans les pires formes de travail des enfants, pour les protéger et les soustraire à ces pires formes de travail, et pour poursuivre et condamner toute personne se livrant à ces pratiques.

Si nous saluons les efforts déployés par le gouvernement pour adopter un cadre juridique portant incrimination des pires formes de travail des enfants en 2015, nous constatons qu’en plus de six ans aucune affaire relative aux pires formes de travail des enfants n’a été signalée. Cela révèle de graves lacunes dans la mise en œuvre de la législation, auxquelles le gouvernement de Kiribati doit remédier de toute urgence.

Nous rappelons que, en l’absence de mesures de mise en œuvre solides et exhaustives, les dispositions juridiques adoptées resteront inefficaces. Nous appelons donc le gouvernement de Kiribati à renforcer ses mécanismes de contrôle et d’application, notamment en effectuant régulièrement des inspections là où le risque d’exposition aux pires formes de travail des enfants est particulièrement élevé, par exemple dans les bars «kava» et les boîtes de nuit. À cet égard, les services d’inspection du travail devraient disposer des effectifs adéquats et être suffisamment formés, et bénéficier des ressources dont ils ont besoin.

Nous appelons en outre le gouvernement à mener des enquêtes sur les auteurs des pires formes de travail des enfants, y compris la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, et à engager des poursuites à leur encontre, moyennant l’établissement de procédures officielles en vue d’identifier de manière proactive les victimes de traite au sein des populations vulnérables et de les signaler aux services de protection.

Nous invitons le gouvernement à revoir l’article 118(2) du Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles (2015) afin de veiller à ce que les sanctions imposées aux personnes impliquées dans les pires formes de travail des enfants soient suffisamment dissuasives.

Nous encourageons le gouvernement à poursuivre et à intensifier ses efforts afin de faciliter l’accès à une éducation de base gratuite, ainsi que ses campagnes d’éducation et de sensibilisation concernant la prostitution des enfants à Kiribati, en particulier dans les lieux de fréquentation bien connus des membres d’équipage étrangers. Enfin, nous appelons le gouvernement à adopter une liste des activités dangereuses interdites aux enfants, conformément à la convention.

Nous demandons au gouvernement de Kiribati de se prévaloir de l’assistance du BIT.

Membres employeurs – Dans leurs observations finales sur ce cas, les membres employeurs souhaitent rappeler que la Journée mondiale contre le travail des enfants a été célébrée samedi dernier. Les données mondiales récentes indiquent qu’à l’heure actuelle le travail des enfants touche 160 millions d’enfants, dont 63 millions de filles et 97 millions de garçons, ce qui correspond à près d’un enfant sur dix dans le monde. On estime que 9 millions d’enfants supplémentaires travailleront d’ici à 2022, sous l’effet de l’augmentation de la pauvreté due à la pandémie actuelle.

Nous sommes saisis d’accusations extrêmement graves en ce qui concerne le présent cas, et nous ne pouvons ignorer les pratiques liées au travail des enfants, et encore moins la persistance des cas relatifs aux pires formes de travail des enfants.

Les membres employeurs souhaitent remercier à nouveau le gouvernement et les travailleurs pour les informations utiles fournies concernant l’application de la convention. Nous souhaitons aussi remercier les délégué(e)s pour leur participation à l’examen du présent cas et pour leurs propositions. Nous sommes heureux d’apprendre que le gouvernement de Kiribati a pris des mesures pour faire face à ce problème grave et persistant.

Les membres employeurs espèrent que l’engagement du gouvernement continuera de se traduire par des mesures concrètes et efficaces susceptibles d’assurer la protection du nombre considérable d’enfants qui restent vulnérables à la traite et à l’exploitation sexuelle à des fins commerciales. Nous espérons en outre constater rapidement des progrès significatifs à cet égard.

À la lumière du débat, les membres employeurs invitent le gouvernement à redoubler d’efforts et à explorer de nouvelles voies pour lutter contre le travail des enfants et ses pires formes et pour s’attaquer aux causes profondes du problème. Nous recommandons au gouvernement d’intensifier ses efforts afin de garantir que toutes les formes de travail des enfants, y compris les pires formes, ne sont plus une réalité dans le pays et que des mesures efficaces sont prises pour: veiller à ce que toute infraction à l’article 118 f) du Code de l’emploi et des relations socioprofessionnelles donne lieu à une enquête et à des poursuites, en temps voulu et selon qu’il convient; empêcher que des enfants ne soient engagés dans l’exploitation sexuelle à des fins commerciale; et assurer la réadaptation et l’intégration sociale des victimes.

Nous invitons également le gouvernement à fournir à la commission des informations actualisées sur le nombre d’enquêtes, de poursuites, de condamnations et de sanctions imposées durant le cycle régulier de présentation des rapports et à se mettre à la disposition du BIT pour toute assistance technique qui pourrait s’avérer nécessaire afin de parvenir au plein respect de la convention.

Conclusions de la commission

La commission a pris note des informations que la représentante gouvernementale a fournies oralement et par écrit, et de la discussion qui a suivi.

La commission déplore profondément la persistance des pires formes de travail des enfants dans le pays, notamment l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales et l’utilisation, le recrutement ou l’offre d’un enfant aux fins d’activités illicites, notamment pour la production et le trafic de stupéfiants.

Prenant en compte la discussion, la commission prie instamment le gouvernement de Kiribati de prendre des mesures efficaces et dans un délai déterminé pour:

- redoubler d’efforts et assurer que toute pratique du travail des enfants et les pires formes de travail des enfants ne sont plus une réalité dans le pays, notamment en renforçant ses mécanismes de surveillance et d’application, y compris par des inspections régulières et suffisantes dans les zones où il existe un risque élevé de pires formes de travail des enfants;

- enquêter efficacement sur les personnes responsables de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants, et les poursuivre en justice, notamment en mettant en place des procédures formelles pour identifier suffisamment tôt les victimes, et les orienter vers des services de protection;

- réviser l’article 118 du Code de l’emploi et des relations socio-professionnelles (EIRC) de 2015 afin de s’assurer que les peines encourues par toute personne se livrant aux pires formes de travail des enfants sont suffisamment dissuasives;

- mettre tout en œuvre pour prévenir l’engagement des enfants dans l’exploitation sexuelle à des fins commerciales, et pour assurer la réadaptation et l’intégration sociale des victimes de cette pratique, notamment en continuant et en renforçant ses efforts pour faciliter l’accès à l’éducation de base;

- poursuivre et renforcer ses campagnes éducatives et de sensibilisation sur la question de la prostitution des enfants à Kiribati.

La commission invite le gouvernement à recourir à l’assistance technique pour assurer la pleine conformité avec la convention. La commission demande au gouvernement de fournir à la commission d’experts, avant sa prochaine réunion en 2021, des informations actualisées à cet égard, notamment le nombre d’enquêtes, de poursuites, de condamnations et de sanctions imposées.

Le gouvernement de Kiribati a transmis le message suivant.

Malheureusement, nos représentants gouvernementaux ne seront pas en mesure de participer à la séance d’adoption des conclusions en raison de circonstances imprévues. Le gouvernement de Kiribati remercie néanmoins l’OIT pour son appui continu ainsi que la Commission de la Conférence pour son rôle essentiel en vue d’aider le pays à recenser les moyens de mise en œuvre efficace des conventions ratifiées. Ces conventions revêtent une importance cruciale pour garantir le travail décent à Kiribati. Nous rappelons en outre que notre pays souhaite bénéficier d’une assistance et d’un appui technique, ainsi que d’activités de renforcement des capacités.

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