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Observation (CEACR) - adoptée 2016, publiée 106ème session CIT (2017)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Pologne (Ratification: 1958)
Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930 - Pologne (Ratification: 2017)

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La commission prend note des observations du Syndicat indépendant et autonome «Solidarność» du 29 août 2016 ainsi que des rapports du gouvernement.
Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. Vulnérabilité des travailleurs migrants à l’imposition de travail forcé. La commission note que, dans ses observations, le Syndicat indépendant et autonome Solidarność déclare que la Pologne est un pays de destination de filières par lesquelles des personnes – en majorité des migrantes – sont soumises à un travail forcé. Selon Solidarność, il existe en Pologne un système d’exploitation de ressortissants de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), qui sont soumis à un travail forcé. La commission note que, selon les indications de Solidarność, 239 travailleurs de la RPDC ont été admis légalement en Pologne en 2011 et 509 autres en 2012. Ces travailleurs doivent remettre à leur gouvernement une grande partie de leurs gains légitimes. La commission note que Solidarność se déclare préoccupé par les conditions de travail imposées à ces travailleurs, conditions qui peuvent être assimilées à du travail forcé. Solidarność ajoute que, il y a dix ans, des travailleurs de la RPDC avaient déjà été découverts dans une plantation de fruits proche de Sandomierz, sur les chantiers de construction du littoral. On versait à ces travailleurs un salaire de 20 dollars des Etats-Unis (dollars E.-U.) en lieu et place des 850 dollars E.-U. stipulés dans leur contrat; leurs passeports leur avaient été confisqués; ils travaillaient en moyenne 72 heures par semaine et ils étaient logés dans des baraquements dont ils avaient l’interdiction de s’éloigner.
La commission note que le gouvernement déclare dans sa communication datée du 7 octobre 2016 qu’au cours de cette année il a été procédé dans l’ensemble du pays à des contrôles approfondis de la légalité des conditions d’emploi des étrangers dans un certain nombre d’établissements connus pour employer des ressortissants de la RPDC. Ces contrôles n’ont révélé aucun cas d’emploi illégal mais ils ont révélé un certain nombre d’infractions aux dispositions de la loi sur la promotion de l’emploi et à celles de la loi sur le travail. Dans les établissements contrôlés, il n’a pas été constaté de cas de non-paiement du salaire ou de paiement d’un montant inférieur à celui qui était stipulé dans le permis de travail de l’intéressé. Les vérifications à cet égard ont été faites sur la base des bulletins de salaire présentés par les employeurs (preuves documentaires des virements bancaires et bulletins de versement dûment signés par les intéressés). Les informations communiquées par les inspections régionales du travail n’ont révélé aucune situation dans laquelle l’employeur ou l’entrepreneur emploierait un ressortissant de la République populaire démocratique de Corée dans des conditions pouvant laisser soupçonner un travail forcé.
La commission prend également note du rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée daté du 8 septembre 2015 (A/70/362), dans lequel le Rapporteur spécial signale que des ressortissants de ce pays sont envoyés à l’étranger par leur gouvernement pour travailler dans des conditions qui relèveraient du travail forcé (paragr. 24). Selon ce rapport, 50 000 ressortissants de la RPDC travailleraient dans des pays comme la Pologne, principalement dans les secteurs d’activité des industries extractives, de l’exploitation forestière, du textile et de la construction. S’agissant de leurs conditions de travail, la commission note que ces travailleurs ne connaissent pas les clauses de leur contrat de travail; ils gagnent en moyenne de 120 à 150 dollars E.-U. par mois mais leurs employeurs versent directement au gouvernement de la République populaire démocratique de Corée des sommes qui sont nettement plus élevées (les employeurs versent les montants correspondant aux salaires des travailleurs sur des comptes appartenant à des sociétés nord-coréennes); ces travailleurs sont forcés de travailler parfois jusqu’à vingt heures par jour, avec seulement un ou deux jours de repos par mois; les mesures concernant leur sécurité et la protection de leur santé sont souvent inadéquates; les autorités locales sont tenues dans l’ignorance des accidents du travail dont ils peuvent être victimes, ces situations étant gérées par des agents de sécurité; les rations alimentaires journalières qui leur sont distribuées sont insuffisantes; leur liberté de déplacement est excessivement restreinte; et ils sont constamment surveillés par des agents de sécurité et il leur est interdit de rentrer dans leur pays tant que dure leur affectation à l’étranger (paragr. 27); leurs passeports sont confisqués par les mêmes agents de sécurité; ces travailleurs sont menacés de rapatriement s’ils ne travaillent pas assez bien ou s’ils manquent aux règles qui leurs sont imposées et les autorités des pays d’accueil ne contrôlent jamais les conditions de travail auxquelles sont soumis les employés de la RPDC sur leur territoire. La commission note que le Rapporteur spécial considère que les entreprises qui font travailler des ressortissants nord-coréens dans de telles conditions se font les complices d’un système inacceptable de travail forcé alors qu’elles devraient dénoncer aux autorités locales les situations constitutives de violations des droits de l’homme dont elles sont témoins et qu’il incomberait auxdites autorités d’enquêter de manière approfondie sur ces situations et de mettre un terme à un partenariat ainsi conçu (paragr. 32).
La commission rappelle l’importance qui s’attache à ce que des mesures efficaces soient prises pour assurer que le système d’emploi de travailleurs migrants ne place pas ces travailleurs dans une situation de vulnérabilité accrue, comme notamment dans le cas où ils sont soumis à des pratiques abusives de la part de l’employeur, telles que la confiscation des passeports, la privation de liberté, le non paiement du salaire dû, la maltraitance. De telles pratiques sont de nature à transformer l’emploi des intéressés en une situation qui peut relever du travail forcé. En conséquence, la commission prie instamment le gouvernement d’intensifier ses efforts visant à ce que les travailleurs migrants soient pleinement protégés contre les pratiques abusives et les conditions de travail qui seraient constitutives de travail forcé, et de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard. Elle le prie de prendre des mesures concrètes pour identifier les situations de travail forcé dont peuvent être victimes des travailleurs migrants et d’assurer que les intéressés ne sont pas traités comme des criminels, mais comme des victimes. Enfin, elle prie le gouvernement de prendre des mesures immédiates et efficaces pour que les auteurs de ces pratiques soient poursuivis en justice et que des sanctions dissuasives et suffisamment efficaces leur soient imposées.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 106e session et de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2017.]
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