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Demande directe (CEACR) - adoptée 2011, publiée 101ème session CIT (2012)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - Tchad (Ratification: 1961)

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La commission note avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle espère qu’un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu’il contiendra des informations complètes sur les points soulevés dans sa précédente demande directe, qui était conçue dans les termes suivants:
Répétition
Article 1 a) de la convention. Imposition de peines de prison comportant l’obligation de travailler en tant que sanction pour la manifestation d’opinions politiques ou d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. La commission rappelle que la convention protège les personnes qui expriment certaines opinons politiques ou s’opposent à l’ordre politique, social ou économique établi en interdisant que, dans le cadre des activités qu’elles mènent à cette fin, des sanctions comportant du travail obligatoire leur soit infligées. A ce sujet, la commission a constaté que l’article 57 du décret no 371/77/CSM/MJ du 9 novembre 1977 portant statut des établissements pénitentiaires du Tchad précise que le travail est obligatoire pour tous les condamnés de droit commun. Dans la mesure où cette disposition se réfère aux condamnés de droit commun, la commission souhaiterait que le gouvernement indique de manière non équivoque si les personnes condamnées pour un délit politique sont exonérées de l’obligation de travailler en prison. Le cas échéant, prière de fournir des informations sur les délits qui seraient considérés comme étant de nature politique.
Dans sa précédente demande directe, la commission a pris connaissance de plusieurs textes réglementant l’exercice des libertés publiques, qui n’avaient jusqu’alors pas pu être examinés par la commission. Elle a constaté que la violation de certaines dispositions de ces textes est passible de peines de prison qui, comme indiqué ci-dessus, comportent une obligation de travailler. La commission prie une nouvelle fois le gouvernement de préciser si les textes cités ci-après, pour certains relativement anciens, sont toujours en vigueur. En outre, afin de pouvoir évaluer la portée des dispositions énumérées ci-dessous, la commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur la manière dont les juridictions font usage de ces dispositions (fréquence avec laquelle ces dispositions sont invoquées devant les juridictions, circonstances permettant de caractériser les infractions et nature des peines prononcées). En effet, la commission doit s’assurer qu’aucune peine de prison comportant du travail obligatoire n’est imposée, au titre de ces dispositions, aux personnes qui, sans recourir à la violence, expriment des opinions politiques ou s’opposent à l’ordre politique, social ou économique établi. Prière de fournir copie de toute décision judiciaire prononcée au titre de ces dispositions.
  • – Ordonnance no 27 du 28 juillet 1962 portant réglementation des associations: en vertu de l’article 6, les membres d’une association non déclarée sont passibles d’une peine de prison d’un mois à un an; sont passibles de la même peine les fondateurs, directeurs ou administrateurs d’une association dissoute pour nullité (art. 8); les peines prévues à l’article 6 seront doublées en cas de reconstitution illégale d’une association dissoute (art. 9).
  • – Ordonnance no 45 du 27 octobre 1962 relative aux réunions publiques: l’article 6 prévoit des peines de prison pour défaut de déclaration (quinze jours); tenue d’une réunion sur la voie publique (un mois à trois mois); tenue d’une réunion au-delà de l’heure normalement fixée pour sa fin (quinze jours à un mois); tenue d’une réunion sans désignation d’un bureau (quinze jours à deux mois); organisation d’une réunion interdite (un mois à trois mois).
  • – Ordonnance no 46 du 28 octobre 1962 relative aux attroupements: l’article 5, alinéa 1, permet de punir d’un emprisonnement de deux mois à un an toute personne non armée qui, faisant partie d’un attroupement non armé, ne l’aura pas abandonné après la première sommation; et l’article 7, alinéa 1, toute provocation directe d’un attroupement non armé, par des discours proférés publiquement ou par écrit, ou par des imprimés affichés ou distribués.
  • – Décret no 193/INT.-SUR du 6 novembre 1962 portant réglementation des manifestations sur la voie publique: l’article 4 prévoit différentes peines de prison pour déclaration incomplète ou inexacte sur les conditions de la manifestation projetée; organisation de la manifestation avant le dépôt de la déclaration ou après son interdiction; participation à l’organisation d’une manifestation non déclarée ou interdite ou y prendre part en connaissance de cause.
  • – Loi no 45/PR/94 du 14 décembre 1994 portant charte des partis politiques: en vertu de l’article 41, quiconque fonde, dirige ou administre un parti politique, en violation de la loi, encourt une peine d’emprisonnement de deux à dix-huit mois, et quiconque dirige, administre ou fait partie d’un parti politique qui se serait maintenu pendant sa suspension ou qui se serait reconstitué après sa dissolution encourt une peine de trois mois à trois ans.
Par ailleurs, la commission note que la loi no 029 du 12 août 1994 relative au régime de la presse au Tchad a été abrogée par l’ordonnance no 005/PR/2008 du 26 février 2008 du même nom. La commission note que cette ordonnance a été adoptée en vertu des pouvoirs exceptionnels accordés au Président de la République en période de crise par le décret no 194/PR/2008 du 14 février 2008. Elle constate avec regret que cette ordonnance a aggravé certaines peines et a apporté des restrictions à l’exercice de la liberté de la presse en introduisant de nouveaux délits, notamment les délits d’offense au Président de la République et d’offense envers les chefs d’Etats ou de gouvernements étrangers – délits pouvant être passibles d’une peine de prison de un à cinq ans (art. 48). Par conséquent, la commission prie également le gouvernement de fournir des informations sur la manière dont les juridictions font usage de l’article 48 de l’ordonnance (offense) ainsi que des articles 41 (diffusion de fausses nouvelles) et 43 et 44 (diffamation): fréquence avec laquelle ces dispositions sont invoquées devant les juridictions, circonstances permettant de caractériser les infractions et nature des peines prononcées.
En outre, la commission a pu prendre connaissance du texte du Code pénal adopté en 1967 (ordonnance no 12-67-PR-MJ). La commission relève que le Code pénal a abrogé la loi no 15 du 13 novembre 1959 tendant à réprimer les actes de résistance, de désobéissance et de manquement envers les membres du gouvernement, les députés et les autorités administratives et judiciaires, sur laquelle portaient les commentaires de la commission depuis de nombreuses années. Après examen de ce code, la commission souhaiterait que le gouvernement fournisse des informations sur la manière dont les juridictions font usage de l’article 100 aux termes duquel toute personne non armée faisant partie d’un attroupement non armé qui ne l’aura pas abandonné après la première sommation est passible d’une peine de prison de deux mois à un an, et de l’article 118 qui sanctionne d’une peine de prison de 15 jours à deux ans l’outrage envers un membre du gouvernement, de l’Assemblée nationale ou un magistrat dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions.
Article 1 d). Imposition de peines de prison comportant une obligation de travailler en tant que punition pour avoir participé à des grèves. La commission a précédemment relèvé que, selon l’article 131 du Code pénal, les fonctionnaires qui, par délibération, ont décidé de donner leur démission en vue d’empêcher ou de suspendre soit l’administration de la justice, soit l’administration d’un service quelconque seront punis d’une peine de prison de deux mois à deux ans. En vertu de l’article 157, l’usage de manœuvres frauduleuses pour amener ou maintenir, tenter d’amener ou de maintenir une cessation concertée de travail dans le but de forcer la hausse ou la baisse des salaires, ou de porter atteinte au libre exercice de l’industrie ou du travail, est puni d’un emprisonnement de six jours à trois ans. La commission souhaiterait que le gouvernement indique si ces dispositions ont été récemment utilisées par les juridictions dans le contexte d’un mouvement de grève, et de préciser les comportements qui ont été sanctionnés et les peines prononcées. Prière de communiquer copie des décisions de justice prononcées de manière à permettre à la commission d’évaluer la portée de ces dispositions et ainsi de s’assurer qu’aucune peine de prison comportant l’obligation de travailler ne pourra être imposée à l’égard de travailleurs qui exercent leur droit de grève de manière pacifique.
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