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Observation (CEACR) - adoptée 2011, publiée 101ème session CIT (2012)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - Sénégal (Ratification: 1961)

Autre commentaire sur C105

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Article 1 c) de la convention. Imposition de peines de prison comportant une obligation de travailler pour manquement à la discipline du travail. Dans ses précédents commentaires, la commission a souligné la nécessité de modifier les articles 624, 643 et 645 du Code de la marine marchande (loi no 2002-22 du 16 août 2002). Selon ces dispositions, l’absence irrégulière à bord, l’outrage par parole, geste ou menace envers un supérieur et le refus formel d’obéissance à un ordre concernant le service sont passibles de peines de prison – peines de prison qui comportent du travail pénitentiaire obligatoire, en vertu de l’article 692 du Code de procédure pénale et de l’article 32 du décret no 2001-362 du 4 mai 2001 relatif aux procédures d’exécution et d’aménagement des sanctions pénales. Dans la mesure où la portée de ces dispositions du Code de la marine marchande ne se limite pas aux cas dans lesquels le manquement à la discipline mettrait en danger le navire ou les personnes à bord, la commission a considéré ces dispositions comme contraires à la convention qui interdit le recours au travail forcé, y compris sous la forme de travail pénitentiaire obligatoire, en tant que mesure de discipline du travail.
A ce sujet, la commission a noté l’indication du gouvernement selon laquelle la marine marchande avait elle-même considéré comme excessives les sanctions prévues et les infractions pénalisées et, pour cette raison, dans la pratique le caractère pénal de la sanction était toujours écarté en cas de manquement à la discipline. Dans son dernier rapport, le gouvernement indique que la question de la modification des articles 642, 643 et 645 est toujours à l’étude et que des mesures seront prises pour que la législation reflète la pratique établie et soit en conformité avec la convention.
La commission rappelle qu’elle formule des commentaires sur ce point depuis plus de quarante ans. Elle a en outre constaté avec regret que le gouvernement n’avait pas saisi l’occasion de l’adoption du nouveau Code de la marine marchande en 2002 pour modifier les dispositions faisant l’objet de ses commentaires. Dans ces circonstances, la commission veut croire que le gouvernement pourra faire état, dans son prochain rapport, de la modification des articles 624, 643 et 645 du nouveau Code de la marine marchande, de manière à ce que les manquements à la discipline du travail qui ne mettent pas en danger le navire ou les personnes à bord ne puissent pas être sanctionnés par des peines de prison.
Article 1 d). Imposition de peines de prison comportant une obligation de travailler en tant que punition pour avoir participé à une grève. Dans ses précédents commentaires, la commission s’est référée à l’article L.276 du Code du travail qui permet à l’autorité administrative de réquisitionner des travailleurs des entreprises privées et des services et établissements publics qui occupent des emplois indispensables à la sécurité des personnes et des biens, au maintien de l’ordre public, à la continuité des services publics ou à la satisfaction des besoins essentiels de la nation. Tout travailleur n’ayant pas déféré à l’ordre de réquisition est passible d’une amende et d’une peine de prison de trois mois à un an ou de l’une de ces deux peines seulement (art. L.279 m)). La commission a également noté que le décret d’application de l’article L.276 devant établir la liste des emplois concernés était en cours d’adoption et que, dans cette attente, c’était le décret no 72-017 du 11 mars 1972 fixant la liste des postes, emplois ou fonctions dont les occupants peuvent faire l’objet de réquisition qui continuait à s’appliquer. Elle a également noté que, dans ses observations de 2006, la Centrale nationale des travailleurs du Sénégal (CNTS) indiquait que la réquisition de certains travailleurs constituait parfois un abus d’autorité pour briser les grèves déclenchées par les travailleurs, et que certains employeurs du secteur privé utilisaient ce procédé pour contraindre des travailleurs à rester en poste alors que la nécessité ne le justifiait pas.
Dans ce contexte, la commission s’est référée aux commentaires qu’elle formule au sujet de l’application de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, dans lesquels elle rappelle que le pouvoir de réquisition des travailleurs en cas de grève doit se limiter aux travailleurs nécessaires au maintien des services essentiels au sens strict du terme. Dans la mesure où les pouvoirs de réquisition peuvent s’exercer à l’égard de travailleurs dont le poste, l’emploi ou la fonction ne relève pas des services essentiels au sens strict du terme et que les travailleurs qui ne défèrent pas à l’ordre de réquisition sont passibles d’une peine de prison comportant l’obligation de travailler (art. L.279 m) du Code du travail), la commission a demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que le décret d’application de l’article L.276 du Code du travail, en cours d’adoption, soit conforme à la convention.
Dans son dernier rapport, le gouvernement confirme que les mesures nécessaires seront prises à cette fin. Il précise qu’une étude a récemment été menée pour identifier les cas de non-conformité de la législation nationale aux conventions fondamentales de l’OIT ratifiées par le Sénégal, ainsi que les solutions qui pourraient être apportées dans le contexte de la réforme du Code du travail et de certains de ces textes d’application. Le gouvernement souligne que cette réforme prendra du temps mais qu’il est résolument engagé à respecter ses obligations internationales. La commission prend dûment note de cet engagement et espère que toutes les mesures seront prises pour que le nouveau décret d’application de l’article L.276 du Code du travail soit adopté très prochainement et qu’il limite la liste des postes, emplois ou fonctions dont les occupants peuvent faire l’objet d’un ordre de réquisition aux postes, emplois ou fonctions strictement nécessaires pour assurer le fonctionnement des services essentiels au sens strict du terme. En outre, comme la commission l’a souligné au paragraphe 189 de son étude d’ensemble de 2007, «Eradiquer le travail forcé», dans tous les cas et indépendamment du caractère légitime de la grève, toute sanction imposée devrait être proportionnée à la gravité de la faute commise, et les autorités devraient exclure le recours à des mesures d’emprisonnement contre ceux qui organisent ou participent pacifiquement à une grève.
Enfin, la commission rappelle qu’elle avait souligné la nécessité de modifier les dispositions de l’article L.276, dernier alinéa, du Code du travail en vertu desquelles l’exercice du droit de grève ne peut s’accompagner d’occupation des lieux de travail ou de leurs abords immédiats, sous peine des sanctions prévues aux articles L.275 et L.279, l’article L. 279 prévoyant une peine de prison de trois mois à un an et une amende ou l’une de ces deux peines seulement. La commission veut croire que le gouvernement pourra indiquer, dans son prochain rapport, que les articles L.276, dernier alinéa, et L.279 du Code du travail ont été modifiés de telle sorte que les travailleurs grévistes qui occupent pacifiquement les lieux de travail ou leurs abords immédiats ne puissent faire l’objet de peines de prison comportant l’obligation de travailler.
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