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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2003, Publication : 91ème session CIT (2003)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Colombie (Ratification: 1976)

Autre commentaire sur C087

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Un représentant gouvernemental a indiqué qu'il assistait pour la première fois à la commission et qu'il entendait faire une déclaration franche et directe pour permettre d'identifier les problèmes et les résoudre. S'agissant de la convention no 87, des 141 Etats qui l'ont ratifiée, 97 ont été inclus dans le rapport de la commission d'experts. Dans le cas de la Colombie, la commission d'experts formule des observations depuis le début des années quatre-vingt-dix. A ce moment, 20 divergences entre la convention et la législation peuvent être relevées. Par la suite, après l'adoption de la loi no 50, ces divergences se sont réduites à 13, fait qui a été reconnu par la commission d'experts en 1994. De plus, grâce à l'assistance technique de l'OIT et à la mission de contacts directs qui a eu lieu en 2000, la loi no 584 a été adoptée la même année et a fait l'objet, une fois de plus, de la reconnaissance des avancées de la part de la commission d'experts. A ce jour, il ne reste que trois aspects à résoudre. Néanmoins, le cas de la Colombie figure à l'agenda de l'OIT depuis plusieurs années en raison de la violence envers le mouvement syndical dans le pays. Le représentant gouvernemental a manifesté sa volonté d'exposer les résultats positifs réalisés par le gouvernement. En effet, alors que dans les cinq premiers mois de l'année 2002, 86 assassinats de syndicalistes ont eu lieu, seulement 14 peuvent être dénombrés pour la même période de cette année, ce qui indique une diminution de 84 pour cent. Le gouvernement croit à la nécessité de lutter de manière permanente contre la violence, indépendamment de son origine. A cette fin, le programme de la sécurité démocratique vient tout juste d'être complété, en parallèle avec le programme de protection du ministère de l'Intérieur et de la Justice. Ces deux programmes sont destinés à protéger des personnes en situation de danger. Le programme de la sécurité démocratique compte actuellement sur de meilleures ressources, ce qui a permis d'octroyer 1 357 mesures de sécurité. Ceci, ensemble avec la coopération franche et directe avec les syndicats, a contribué à l'obtention des résultas mentionnés. La violence en Colombie a touché des prêtres et des évêques, des maires et des gouverneurs, des ministres et des ex-ministres, des filles et des garçons, des employeurs et des travailleurs, syndicalistes ou non. Il a manifesté son engagement dans la lutte pour résoudre ce problème complexe et difficile. S'agissant de la solution pouvant être apportée au problème, le représentant gouvernemental s'est référé aux deux alternatives proposées par les Membres de l'OIT, à savoir, d'une part, le programme de coopération et, d'autre part, l'établissement d'une commission d'enquête. En ce qui concerne le programme de coopération, il a souligné qu'il doit être renforcé et amélioré et qu'il peut être considéré comme la véritable solution. Ainsi, son soutien et son financement contribueront à la résolution du problème en Colombie. Il est nécessaire de changer le discours et l'analyse des problèmes afin d'établir une collaboration réelle et effective.

En ce qui concerne la commission d'enquête, il a considéré que même si une telle commission avait été envoyée il y a quelques années, le nombre d'assassinats de syndicalistes n'aurait pas été différent. La commission d'enquête n'apporte pas de solution réelle au problème. Au contraire, il a estimé qu'elle complique l'analyse, dévie l'attention du problème véritable et retarde la solution. Il a souligné que, depuis cinq ans, ce thème est discuté tous les quatre mois, empêchant ainsi les travailleurs, les employeurs et le gouvernement d'offrir des alternatives de solutions. Il a déclaré que de grandes avancées auraient été faites si on avait agi au lieu de discuter. En effet, il a estimé que discuter de la pauvreté à Genève est différent que de la vivre et la supporter dans son pays. Il s'est demandé si certaines personnes ne préféraient pas discuter de la "problématique colombienne" au lieu de se compromettre dans la recherche de sa solution. Il a indiqué que l'on doit réfléchir sur l'apport réel de la discussion en termes de bénéfice pour les travailleurs et les employeurs. La responsabilité principale de la recherche de solutions appartient de toute façon aux Colombiens.

Il a appelé les dirigeants syndicaux de son pays à changer de discours et a reconnu que cela requiert du courage et un sacrifice politique; cela implique de penser au pays et aux personnes qui ont perdu la vie en espérant pouvoir éviter, par le biais d'un travail commun, des morts supplémentaires. Il a réitéré sa conviction que la vraie solution pour la Colombie réside dans les programmes de coopération et non dans une commission d'enquête ou d'investigation et de conciliation. Il a exprimé l'espoir que les discours, les analyses et les recommandations se transforment en actions et en aide effective pour la Colombie. Le pays nécessite plus que jamais des syndicats forts et démocratiques qui cessent d'être revendicatifs pour être plutôt participatifs. Il a demandé aux ONG, aux gouvernements et aux organismes multilatéraux qu'ils fournissent l'appui nécessaire aux syndicats afin que les employeurs et les gouvernements comprennent que, dans ce nouveau monde globalisé, le changement est une nécessité. Finalement, il a exprimé sa préoccupation face à la gestion de l'information par le Bureau.

Les membres travailleurs ont souligné que la Colombie figure une fois de plus dans la liste des cas examinés devant cette commission en raison de la situation dans le pays au regard de la liberté syndicale et de la protection du droit syndical. Ils ont rappelé que la commission d'experts signale encore et toujours de profondes divergences entre la convention no 87 et la législation du travail: les fédérations et confédérations n'ont toujours pas le droit d'appeler à la grève; la grève reste interdite dans des services qui ne sont pas essentiels au sens stricte du terme; le ministère du Travail s'arroge toujours le droit d'imposer le recours à l'arbitrage lorsqu'il estime qu'un conflit dure depuis trop longtemps.

Sur un plan plus pratique, les membres travailleurs ont rappelé qu'ils dénoncent continuellement les nombreuses atteintes aux libertés syndicales; la diminution du nombre des syndicats; la violence qui sévit plus particulièrement contre le milieu syndical; les divers obstacles suscités à l'exercice légitime du droit de grève et une certaine complicité des pouvoirs publics avec les formations paramilitaires contre les grévistes; l'impunité totale contre les auteurs d'assassinats; et, enfin, la non-application par le gouvernement des recommandations formulées par le Comité de la liberté syndicale.

Les membres travailleurs ont pris note des diverses initiatives annoncées par le gouvernement sur le plan institutionnel, mais ils considèrent que c'est au ministère du Travail d'un pays qu'il appartient au premier chef de faire respecter les principes de la convention no 87. Or la fusion de ce ministère avec celui de la Santé, en Colombie, ne leur paraît pas propice à une telle politique. Les membres travailleurs ont déclaré qu'à leurs yeux la persistance du climat de violence et surtout l'impunité totale des crimes perpétrés contre des syndicalistes sont la véritable expression de la réalité dure et cruelle mais aussi de la véritable position du gouvernement en matière de protection des libertés syndicales. Devant une situation où ces libertés sont bafouées de manière si flagrante, les membres travailleurs ont émis le souhait que les conclusions du présent cas figurent dans un paragraphe spécial du rapport et aussi qu'elles recommandent au Conseil d'administration de décider la mise en place d'une commission d'enquête. Ce dernier moyen est le seul, aux yeux des membres travailleurs, qui soit susceptible de faire évoluer la situation, de parvenir à une harmonisation de la législation du travail par rapport à la convention et aussi à une véritable reconnaissance des principes de la liberté syndicale dans la pratique.

Les membres employeurs, rappelant que le cas de la Colombie reste inscrit à l'ordre du jour de la Commission de la Conférence depuis longtemps, ont noté que l'observation de la commission d'experts contient deux éléments principaux: des commentaires portant sur les dispositions légales et des commentaires sur la violence qui prévaut dans le pays. En ce qui concerne les dispositions légales, les membres employeurs ont noté que le nombre de dispositions nationales critiquées par la commission d'experts a diminué considérablement au cours du temps. Pour des raisons bien connues, ils ne partagent pas l'opinion de la commission d'experts sur les trois dispositions restantes relatives au droit de grève qui, à leur sens, n'est pas contenu dans la convention no 87. La plupart des pays appelés devant la commission sur cette convention ont des problèmes beaucoup plus sérieux avec leur législation du travail. La raison pour laquelle la Colombie a été invitée à discuter à la Commission de la Conférence est liée à la deuxième partie de l'observation de la commission d'experts qui traite du problème de la violence continue et généralisée qui est au c ur de la situation actuelle. Le phénomène de la violence et de la contre-violence va bien au-delà de la question de la liberté syndicale et de la législation du travail. Les enlèvements, menaces de mort et meurtres sont des crimes particulièrement sérieux qui déstabilisent la société. Les membres employeurs ont exprimé leur plus profond regret à l'égard de chacune des victimes. Toutefois, la situation actuelle n'est pas due à l'existence de quelques dispositions légales. La situation est beaucoup plus complexe; cause et effet ne doivent pas être confondus.

En 2002, la commission a reçu l'engagement crédible du ministre colombien du Travail de l'époque, lui-même un syndicaliste, de combattre la violence, et la déclaration du représentant gouvernemental cette année est tout aussi crédible. L'annonce de la diminution du nombre de meurtres est notée, mais chaque nouvelle victime est à déplorer. Il faut espérer que les mesures prises pour améliorer la sécurité porteront bientôt leurs fruits. Le programme de coopération technique du BIT pour la Colombie doit être poursuivi et intensifié. Il est important que la Commission de la Conférence garde à l'esprit l'environnement politique du pays et qu'elle renforce la position du gouvernement qui s'est engagé à combattre la violence. Agir autrement jouerait en faveur des responsables de la violence. Le gouvernement devrait être exhorté à renouveler ses efforts, en particulier en ce qui concerne l'impunité.

Un membre travailleur de la Colombie a déclaré avoir écouté avec attention les informations apportées par le représentant gouvernemental. Loin de vouloir mettre le gouvernement dans une position critique, les membres travailleurs souhaitent aboutir à des solutions répondant aux préoccupations signalées par la commission d'experts dans son observation. En Colombie, le ministère du Travail, suite à des restructurations, a été fusionné avec celui de la Santé, ce qui risque d'avoir de graves conséquences sur l'action politique de l'un et l'autre ministères. Les politiques d'ajustement structurel ont également pour effet de mettre sérieusement à mal le syndicalisme.

Le gouvernement s'entend avec les milieux financiers pour procéder à des privatisations dans les secteurs clés de l'économie, comme ceux du pétrole et des télécommunications. Des secteurs moins prospères pâtissent des effets des réformes du travail, du système de pensions et du système fiscal. Les licenciements se multiplient et le taux de chômage augmente. Dans de telles circonstances, le ministère ne devrait pas faciliter les autorisations de licenciements.

L'intervenant a également jugé préoccupants les propos tenus le 4 juin 2003 par le Président de la République, suggérant que les divergences entre la législation du travail et les conventions internationales du travail pourraient être résolues à travers la dénonciation de ces derniers instruments. Les employeurs colombiens devraient adopter une nouvelle culture du travail, qui soit respectueuse des activités syndicales. Pour conclure, l'orateur estime que le gouvernement devrait considérer comme positif la proposition tendant à constituer une commission d'enquête, puisque ce moyen pourrait contribuer à résoudre les problèmes existants.

Un autre membre travailleur de la Colombie a dénoncé la persistance des violations des droits fondamentaux des travailleurs. Il a signalé que les menaces, déplacements forcés et intimidations de dirigeants syndicaux avaient toujours cours. De telles pratiques sont un obstacle à l'exercice des libertés syndicales. S'il est vrai que le nombre d'assassinats de syndicalistes a baissé, il n'en reste pas moins que 121 syndicalistes sont morts depuis la précédente session, en juin 2002, et que l'impunité généralisée met en cause les fondements de l'Etat. Il est préoccupant que le Président de la République ait déclaré, le 4 juin 2003, que les divergences entre la législation et les conventions pourraient être résolues par le biais d'une dénonciation des conventions, considérant qu'aucun pays ne peut méconnaître les droits fondamentaux des travailleurs et encore moins user du prétexte d'un hypothétique mandat populaire. Il serait souhaitable que le gouvernement fasse preuve de plus de volonté politique en mettant un terme à sa culture antisyndicale, et qu'il prenne des engagements clairs par rapport aux droits fondamentaux des travailleurs. Pour conclure, l'orateur s'est prononcé en faveur de la constitution d'une commission d'enquête et de l'inclusion des conclusions du présent cas dans un paragraphe spécial.

Un autre membre travailleur de la Colombie s'est associé aux déclarations des membres travailleurs précédents en soulignant que cela prouvait qu'il existe une pensée unitaire dans le syndicalisme colombien. L'orateur demande que la Commission de la Conférence: 1) prie le gouvernement d'appliquer immédiatement les conventions internationales du travail ratifiées, en conformité avec les recommandations de la commission d'experts et en particulier les conventions nos 87, 98, 151 et 154; 2) exige que le gouvernement mette un terme à la prérogative du pouvoir exécutif de juger de la légalité des grèves et que cette prérogative relève du pouvoir judiciaire; 3) demande au gouvernement de la Colombie qu'il n'approuve ni ne modifie la législation et en particulier les réformes constitutionnelles qui entrent en contradiction avec ces obligations internationales, tant dans le domaine du droit du travail que de celui des droits de l'homme; 4) demande au gouvernement d'appliquer les recommandations des organes de contrôle de l'OIT et en particulier celles du paragraphe 506 du rapport du Comité de la liberté syndicale présenté au Conseil d'administration en mars 2003; 5) exhorte le gouvernement de la Colombie de renforcer le programme de protection des syndicalistes et, pour ce faire, à mettre en uvre les recommandations dudit rapport; et 6) prie le gouvernement de renforcer la Commission interinstitutionnelle de promotion et de protection des droits de l'homme des travailleurs en la dotant des ressources nécessaires pour qu'elle mette en uvre le plan approuvé pour 2003.

L'orateur fait état de la nécessité de donner suite à la plainte déposée contre le gouvernement de la Colombie et de créer une commission d'enquête comme mécanisme idoine pour que la communauté internationale apporte sa contribution à la résolution des graves problèmes mentionnés dans cette plainte. Il exprime le souhait que cette question fasse l'objet d'une décision lors du prochain Conseil d'administration. Il se prononce pour l'adoption par la commission d'un paragraphe spécial relatif à l'application de la convention no 87.

Enfin, l'orateur fait observer que, le 4 juin 2003, lors d'une audience devant la Cour constitutionnelle de Colombie, qui avait pour objet de définir la constitutionnalité de la loi qui soumet au référendum une modification de la Constitution, le Président de la République a déclaré que les conventions ne sont pas perpétuelles et que, si par référendum le peuple approuvait une législation en contradiction avec les conventions de l'OIT, alors il estimerait que le peuple lui confie un mandat pour dénoncer ces conventions. L'orateur est d'avis qu'il en résulterait qu'en cas de contradiction entre une norme de droit interne avec le droit fondamental à la négociation collective, la convention internationale serait alors dénoncée. C'est pourquoi il se demande quel est le véritable engagement du gouvernement à respecter les principes et droits fondamentaux défendus par l'OIT.

La membre travailleuse de la Norvège, s'exprimant au nom des membres travailleurs des pays nordiques, a souligné que la Colombie demeure le pays le plus dangereux du monde pour les travailleurs qui veulent se syndiquer. Plus de 90 pour cent des syndicalistes tués chaque année le sont en Colombie, dont 184 pour la seule année 2002. Au cours de la première moitié de l'année 2003, le gouvernement, la police et les militaires ont été responsables d'un nombre croissant de violations des droits de l'homme contre des syndicalistes, incluant des violences contre des femmes syndicalistes en augmentation de 50 pour cent. Au cours des derniers mois, les paramilitaires ont pris pour cible les familles des syndicalistes, et Carlos Castaño, le leader d'une organisation paramilitaire, a annoncé publiquement que les enfants des dirigeants du syndicat pétrolier USO seraient tués. L'orateur en a voulu pour preuve le cas de deux tentatives d'enlèvement de la fille du chef du bureau des droits de l'homme de l'organisation nationale CUT.

L'intervenante a déclaré que le programme du gouvernement pour la protection des syndicalistes n'est pas fonctionnel, en raison d'un financement insuffisant, de la durée excessive du traitement des demandes de protection et du manque d'inspecteurs du travail - seulement 271 pour couvrir plus de 300 000 entreprises dans 1 097 municipalités. Le licenciement et la mise sur des listes noires de dirigeants syndicaux est monnaie courante. De plus, la loi colombienne viole la convention no 87 et favorise les travailleurs non syndiqués par rapport aux travailleurs syndiqués en permettant aux travailleurs non syndiqués et aux employeurs de signer des "accords collectifs". Les droits des travailleurs sont aussi menacés par la proposition de référendum sur la loi du travail, qui éliminerait les allocations dominicales et de congé, supprimerait les indemnités de licenciement, gèlerait les salaires dans le secteur public et rendrait la main-d' uvre plus flexible. L'intervenante a exhorté la commission à demander que la Colombie soit incluse dans un paragraphe spécial et que le Conseil d'administration établisse une commission d'enquête pour se rendre dans le pays.

Le membre travailleur des Etats-Unis a déclaré que ce cas constitue un grand défi pour la commission, car les violations de la convention par la Colombie défient l'autorité du BIT. Si la commission et le Conseil d'administration n'agissent pas avec efficacité et détermination, l'intégrité institutionnelle du BIT risque d'être compromise. Plus de syndicalistes sont assassinés en Colombie que dans tous les autres pays réunis (184 au cours de l'année 2002 et plus de 1 900 depuis 1991). Il a déploré l'argument du représentant gouvernemental selon lequel la situation s'améliore parce que l'on a pu constater une diminution relative des homicides au cours du premier quart de l'année 2003. L'augmentation relative du nombre d'agressions, de menaces de mort, d'enlèvements et de détentions illégales ainsi que les 32 assassinats de cette année ne peuvent pas être considérés comme un progrès. L'orateur a aussi rejeté l'argument selon lequel le gouvernement pourrait fuir ses responsabilités au titre de la convention au prétexte que les violations des droits de l'homme dont souffrent les syndicalistes sont la conséquence d'un climat général de violence qui affecte toutes les franges de la société. Cet argument doit être récusé pour plusieurs raisons. Premièrement, un grand nombre de crimes sont commis contre des syndicalistes et ces crimes se concentrent par secteurs. Il existe aussi un lien direct entre ces crimes et la négociation collective. Deuxièmement, le gouvernement est responsable des assassinats car les groupes paramilitaires opèrent avec le soutien non-dissimulé des forces armées. Troisièmement, dans les problèmes d'insécurité visant les syndicalistes et d'impunité des crimes, le gouvernement est directement responsable par omission ou par action. Le Haut Commissaire des Nations Unies pour les droits de l'homme a fait part publiquement de sa préoccupation concernant les retards dans le financement du Programme gouvernemental pour la protection des défenseurs des droits de l'homme et des syndicalistes, qui a un impact direct sur l'application efficace des mesures de sécurité. L'orateur a aussi rappelé que selon la commission d'experts les auteurs d'assassinats n'ont toujours pas été condamnés. Il est de notoriété publique que le Procureur de la République de Colombie a étouffé les poursuites dans des affaires très graves touchant aux droits de l'homme.

Les conclusions adoptées par la Commission de la Conférence en 2002 prévoient qu'au cas où le gouvernement ne tirerait pas pleinement partie du programme de coopération technique du BIT, la commission serait obligée d'envisager des options plus fermes. Selon les trois centrales syndicales colombiennes, le programme spécial de coopération technique de l'OIT n'a jamais été appliqué pleinement et ni le gouvernement ni les entrepreneurs colombiens n'ont témoigné d'un réel engagement envers ce programme. L'orateur s'est joint aux membres travailleurs pour demander un paragraphe spécial dans ce cas.

Le membre travailleur de l'Indonésie a exprimé une grande préoccupation devant l'extrême violence qui sévit contre les syndicalistes en Colombie, ainsi que devant l'ingérence du gouvernement dans les affaires des syndicats. Il a exprimé son soutien aux propositions faites par les autres membres travailleurs pour promouvoir la paix, la justice sociale et le respect de la convention no 87 en Colombie.

Le membre travailleur du Mexique a rappelé qu'à la 86e session de la Conférence (juin 1998) les travailleurs avaient saisi le BIT d'une plainte sur le fondement de l'article 26 de la Constitution de l'OIT pour violation des conventions nos 87 et 98 par la Colombie. La responsabilité de l'Etat dans ladite violation était invoquée en raison de l'action des agents de l'Etat et du défaut de garantie et de protection des droits fondamentaux. Le gouvernement attente à la liberté syndicale en désignant publiquement dans les médias le mouvement syndical comme responsable des crises économiques affectant les secteurs publics et privés. En outre, il impose un arbitrage obligatoire lors de conflits collectifs concernant des agents de services publics non essentiels. Enfin, l'autorité administrative s'arroge un droit discrétionnaire quant à la qualification de la légalité des grèves, ayant récemment déclaré illégale une grève dans le secteur de la production de bananes.

L'orateur a évoqué les actions antisyndicales dont le Syndicat des travailleurs du téléphone de Bogotá a fait l'objet lorsqu'il a voulu s'opposer à la privatisation: licenciements massifs, menaces contre les dirigeants et violations de toutes sortes des conventions nos 87, 98, 135 et 154. Ainsi, au mépris de la convention collective et de la convention no 154, le gouvernement a imposé un arbitrage obligatoire. Aujourd'hui, il veut restructurer une entreprise du secteur pétrolier afin de supprimer le droit syndical, en parfaite contradiction avec les conventions nos 87 et 98. Il interdit l'accès de la direction aux raffineries en postant l'armée dans les installations, ce qui a provoqué un mouvement de protestation patronale. Le Syndicat des travailleurs de Bavaria (SINALTRABVARIA) signale la résiliation des contrats d'emploi de plus de quarante dirigeants syndicaux, qui sont autant de licenciements sans juste cause. Le pacte collectif qui a été imposé par intimidation a été une offensive réussie contre l'organisation syndicale, laquelle est passée en trois ans de 3 500 à 300 adhérents. L'intervenant a appuyé la proposition tendant à ce que les conclusions du présent cas figurent dans un paragraphe spécial et il a appelé vivement le gouvernement à faire ce qui est en son pouvoir pour mettre un terme aux atteintes à la vie ou à l'intégrité physique des dirigeants syndicaux et des travailleurs.

Le membre travailleur de la Côte d'Ivoire s'est déclaré profondément préoccupé de voir que l'approbation d'une commission d'investigation et de conciliation piétine. Entre temps, la législation du travail reste en contradiction sur bien des points avec la convention no 87, le nombre de syndicats diminue, les dirigeants syndicaux font l'objet de licenciements programmés, les militants sont menacés d'assassinats. L'OIT peut agir, favoriser la création d'emplois décents et concourir à sauver des vies humaines en Colombie. Face à la violence, face aussi à la flexibilisation de la législation sociale et aux atteintes aux libertés syndicales, le moins que l'on puisse faire est d'appuyer la proposition d'une commission d'enquête en Colombie.

Le membre travailleur du Royaume-Uni a déclaré que le TUC suit avec grande attention la situation préoccupante en Colombie et a développé des relations étroites avec les confédérations nationales. Le TUC lancera bientôt un programme destiné à fournir un répit provisoire aux syndicalistes colombiens en danger d'être assassinés. Les travailleurs colombiens veulent une Colombie sociale, démocratique et pacifique, mais tous ceux qui plaident en faveur d'une telle alternative sont en danger. Il est exact que les syndicalistes ne sont pas les seules victimes, mais de même que les journalistes sont assassinés parce qu'ils écrivent la vérité et les procureurs parce qu'ils enquêtent sur les assassinats politiques, les dirigeants syndicaux et les syndicalistes sont assassinés précisément parce qu'ils prennent fait et cause en faveur des travailleurs colombiens. Toutes les victimes ont en commun qu'elles représentent un modèle pacifique et social alternatif pour le pays, une société basée sur le dialogue et le progrès à travers une participation démocratique.

L'orateur a déploré que le BIT ait été empêché de prendre les mesures nécessaires pour aider la Colombie à régler le problème de l'impunité. Le fait que le nombre de syndicalistes assassinés soit en baisse est un faible réconfort pour les familles des 32 collègues assassinés cette année. C'est principalement parce que les employeurs colombiens ont bloqué un consensus au sein du groupe des employeurs que le Conseil d'administration n'a pas pu trouver un accord en faveur d'une commission d'enquête pour accomplir la tâche dans laquelle l'Etat colombien a échoué. Il n'a pas non plus été possible de trouver un accord sur un paragraphe spécial l'année dernière, ni sur une commission d'enquête et de conciliation, alors que 184 collègues ont été assassinés. Selon l'orateur, ceci s'explique par le fait qu'un trop grand nombre d'entreprises sont impliquées dans la violence et la répression et que les gouvernements également coupables de violations graves des conventions fondamentales de l'OIT craignent d'être les suivants. De plus, certains gouvernements croient à l'idée selon laquelle la Colombie demeure une démocratie qui fonctionne normalement, un point de vue que l'orateur ne partage pas. Pour que la Colombie soit une démocratie qui fonctionne, elle a besoin de la paix et, pour trouver la paix, elle doit rompre le cycle de l'impunité. Comme l'Etat s'est montré incapable d'y parvenir seul, cette tâche nécessite toujours le soutien d'une commission d'enquête. Déclarant que ceux qui préfèrent la répression et la violence au dialogue et au compromis bénéficient de l'inaction de l'OIT, l'orateur a noté que 15 familles se partagent les richesses de la Colombie. Toutefois, l'OIT doit mettre les intérêts de ceux qui travaillent, ceux qui pensent librement, ceux qui aiment la démocratie et la paix, les pauvres et les sans emploi, les exclus de la société et les déplacés avant ceux des élites responsables du désastre depuis des décennies.

La membre gouvernementale des Etats-Unis a déclaré que son gouvernement est extrêmement préoccupé par la violence qui sévit contre les syndicalistes en Colombie et qu'il soutient les efforts en vue de trouver des solutions, notamment le programme spécial de coopération technique du BIT. Il est d'une importance urgente de protéger la vie des syndicalistes, de promouvoir le dialogue social, de combattre l'impunité, et de mettre la législation du travail colombienne et son application en pleine conformité avec la convention. Son gouvernement croit que le gouvernement colombien est engagé dans la restauration de la légalité et qu'il est déterminé à s'assurer que tous les membres de la société puissent exercer leurs droits dans des conditions qui garantissent leur sécurité personnelle. Il existe des signes que les efforts pour mettre en uvre cet engagement commencent à porter leurs fruits, mais beaucoup plus doit être fait. Le gouvernement colombien a été exhorté à continuer de coopérer avec le BIT et d'appliquer sans délai les recommandations de la commission d'experts.

La membre gouvernementale du Mexique a estimé que les informations apportées par le ministre de la Colombie traduisent non seulement le souci de répondre ponctuellement aux recommandations de la commission d'experts mais aussi une attitude constructive, au terme de laquelle tous les quatre mois et une fois par an des informations sont données sur les mesures prises et les efforts déployés pour garantir l'exercice des droits syndicaux conformément à la convention no 87. Si les résultats constatés peuvent ne pas entièrement répondre aux v ux de la commission, force est de reconnaître le caractère positif des éléments apportés par le représentant gouvernemental de la Colombie. L'intervenante a fait valoir également que l'on ne saurait méconnaître la situation du pays, qui rend difficile d'appliquer des mesures permettant le plein exercice des libertés syndicales. Tout en partageant les préoccupations des membres travailleurs sur les victimes de la violence, elle a jugé pertinente l'observation du représentant gouvernemental faisant valoir que la violence ne frappe pas seulement le monde syndical mais toutes les composantes de la société colombienne. L'intervenante considère que le programme spécial de coopération avec la Colombie est l'instrument idoine pour que l'OIT, dans le cadre de ses compétences et en collaboration étroite avec le gouvernement et les organisations de travailleurs et d'employeurs, parvienne à dégager une solution aux problèmes touchant le monde du travail en Colombie. Pour conclure, l'intervenante a déclaré que sa délégation juge inopportune une commission d'enquête, alors que le programme spécial est en cours d'application et commence à produire des résultats, grâce à l'octroi de moyens financiers de la part de l'OIT et d'autres donateurs et aussi grâce à la volonté manifestée par le gouvernement sur ce plan.

La membre gouvernementale du Danemark, s'exprimant également au nom des membres gouvernementaux de la Finlande, de l'Islande, de la Norvège et de la Suède, a regretté que le gouvernement n'ait pas adopté le projet de loi préparé par la mission de contacts directs en février 2000. Ceci soulève des interrogations sur la volonté et la capacité des autorités colombiennes à accomplir des progrès significatifs pour préserver le droit à la vie, à l'intégrité physique et la liberté syndicale des dirigeants syndicaux. Les pays nordiques continuent de contrôler étroitement l'application du Programme spécial de coopération pour la Colombie du BIT et reconnaissent le rôle important que le BIT peut jouer. Elle a regretté que le Conseil d'administration doive connaître de nouvelles allégations graves de violence, telles que rapportées dans le cas no 1787 du Comité de la liberté syndicale, tout en constatant dans le même temps un certain progrès au cours de l'année dernière. Toujours est-il que 14 syndicalistes assassinés sont 14 de trop. Elle a fermement condamné les meurtres et enlèvements continus de responsables et de membres de syndicats et a exhorté le gouvernement à prendre toute mesure à sa disposition pour renverser la situation d'impunité dont bénéficient les responsables de ces violations, conformément aux recommandations du rapport de juin 2002 du Comité de la liberté syndicale. Elle a fait sienne la suggestion de mentionner ce cas dans un paragraphe spécial.

Le membre gouvernemental de la République dominicaine s'est déclaré profondément consterné par les assassinats de syndicalistes et autres personnes en Colombie. Il a rappelé que ce cas a été examiné par la commission à de nombreuses reprises mais que le gouvernement fait preuve de sa bonne volonté en vue de mettre un terme aux violations de la convention no 87, à travers les informations qu'il a données sur les efforts déployés pour trouver une solution. L'intervenant a rappelé qu'il serait souhaitable que l'OIT continue de soutenir le programme spécial de coopération pour la Colombie, qui apparaît comme un moyen déterminant pour résoudre la problématique colombienne.

Le membre gouvernemental de l'Allemagne a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental et est d'avis que le climat de violence à l'encontre des dirigeants syndicaux est des plus préoccupants. Il a déclaré comprendre pourquoi les membres travailleurs ont pu interpréter les informations portant sur la diminution des assassinats comme empreintes de cynisme. Toutefois, il a noté que le représentant gouvernemental a exprimé des regrets sincères pour chaque victime. A propos de la question de l'impunité, il a souligné qu'aucun texte législatif ne permet aux coupables de crimes perpétrés contre les syndicalistes d'échapper à la rigueur de la loi. L'impunité est plutôt la conséquence de certaines pratiques, au nombre desquelles l'intimidation des juges. Rappelant que plusieurs orateurs ont demandé la création d'une commission d'enquête, il a estimé que cette question n'est pas du ressort de la Commission de la Conférence. En résumé, il est d'avis que la commission devrait tenir compte de l'attitude nettement différente du représentant gouvernemental par rapport à la représentante gouvernementale dans le cas du Bélarus traité auparavant, et par conséquent ne pas prendre une décision identique.

Le membre gouvernemental du Chili a remercié le représentant gouvernemental de la Colombie pour les informations fournies. Il a déploré et partagé l'inquiétude exprimée par le Groupe des Etats d'Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC) quant à la situation en Colombie. L'orateur a constaté que le programme spécial de coopération avec la Colombie est la meilleure forme d'assistance pour permettre l'application de la convention no 87 dans ce pays.

Le membre gouvernemental de l'Uruguay a souligné l'importance que l'on devait accorder aux informations fournies à la Commission de la Conférence par le ministre. Il déclare que si la situation reste complexe, il convient de souligner les progrès accomplis. Il est d'avis que la coopération de l'OIT joue un rôle fondamental dans la recherche de solutions concrètes à la situation difficile que connaît la Colombie.

La membre gouvernementale du Pérou (vice-ministre de la Promotion de l'emploi) a témoigné de sa solidarité avec la société et le gouvernement colombien face à la situation de violence interne et les pertes de vies de Colombiens et de Colombiennes de toutes origines sociales. L'oratrice a souligné la priorité donnée par le gouvernement de la Colombie à la protection des dirigeants syndicaux en allouant des ressources conséquentes dans cette optique. Elle a déclaré qu'il convient de renforcer le programme spécial de coopération de l'OIT avec la Colombie pour donner un nouvel élan à la mobilisation de toute la société en faveur de la paix.

Le membre gouvernemental de l'Italie a déclaré que la situation en Colombie est particulièrement préoccupante. Il a cependant estimé qu'il ne serait pas opportun de mettre en place une commission d'enquête. Un renforcement du programme de coopération technique avec l'OIT serait préférable. Le représentant a également souhaité obtenir des clarifications quant à ce que la législation colombienne prévoit en matière de droit de grève dans le secteur public.

La membre gouvernementale du Canada a déploré la persistance de la situation en Colombie, tout en reconnaissant que le gouvernement a enregistré, au cours de l'année écoulée, un certain progrès par rapport à la violence. Elle a appelé instamment le gouvernement à ne pas recourir à des mesures d'exception en tant que moyen de menace et de harcèlement des syndicalistes et à éviter d'accuser ces derniers de subversion, ce qui délégitime les activités syndicales et expose les syndicats aux attaques. Le gouvernement devrait également établir et consolider les institutions compétentes pour qu'il soit mis un terme à l'impunité des crimes. L'absence de poursuites impartiales et efficaces contribue à entretenir la violence. Le gouvernement devrait rendre la législation conforme aux normes internationales du travail en matière de droit syndical et veiller à son application. Le programme spécial de coopération technique de l'OIT est une initiative particulièrement positive, car le dialogue social et des mesures législatives appropriées vont dans le sens de la paix sociale. Le gouvernement de la Colombie est incité à coopérer pleinement avec l'OIT.

Le représentant gouvernemental a déclaré avoir pris note avec intérêt des déclarations formulées pendant la discussion qui toutes présentent des éléments intéressants et enrichissants. La compréhension que l'on peut en avoir implique que l'on tienne compte des circonstances particulières dans lesquelles ces informations ont été recueillies. A cet égard, l'orateur a constaté que certaines déclarations faisaient allusion à la saisine d'office de tribunaux d'arbitrage obligatoire. L'orateur a reconnu que l'on assiste à une augmentation de ce type de saisine mais que l'objectif poursuivi est précisément de limiter l'intervention directe de l'administration dans la solution des conflits. Ces tribunaux ont été saisis principalement à la demande des travailleurs: 47 des 50 recours devant les tribunaux d'arbitrage obligatoire l'ont été à la demande des travailleurs et le ministre n'a fait qu'entériner ces demandes. L'orateur a suggéré que les partenaires sociaux se consultent pour envisager avec l'OIT un moyen de trouver des solutions constructives à ces problèmes.

Le représentant gouvernemental a partagé pleinement l'inquiétude que suscite le climat de violence en Colombie. Son gouvernement souhaite tout particulièrement diminuer le nombre de manifestations de violence contre les syndicalistes. Il a tenu à souligner que l'enveloppe budgétaire destinée à la sécurité des dirigeants syndicaux est 15 fois plus élevée que celle consacrée à la sécurité des juges. Au vu des efforts déployés l'année dernière pour résoudre le problème de la sécurité, il ne fait aucun doute que la tendance positive perdurera.

L'orateur a rappelé aussi à la commission que les assassinats et les violences sont également dirigés contre les responsables politiques en Colombie - le père du Président de la République a été assassiné, le Vice-président a été séquestré et également les membres de la famille de la ministre de l'Education et de la ministre de la Culture. La liste des fonctionnaires y compris les magistrats qui ont fait l'objet d'actes de violence est considérable.

En ce qui concerne les observations de la commission d'experts en rapport avec les réformes législatives en instance, le représentant gouvernemental a souligné que l'on était passé progressivement de 20 points de divergence à 13, et que trois questions légales sont toujours en suspens.

Le représentant gouvernemental déclare que le gouvernement soutient pleinement l'OIT et que ses attentes sont importantes en termes de renforcement des programmes de coopération. Le gouvernement se félicite que les membres travailleurs et employeurs indépendamment de leur différence partagent la même confiance dans le potentiel de la Colombie et les engage à unir leurs efforts pour que les prochaines générations vivent dans un pays plus prospère.

Les membres travailleurs ont estimé que leur analyse avait été assez claire et que leur argumentation avait été suffisamment développée pour être entendue. Ils ont fait valoir que, pour qu'un dialogue social s'instaure et se poursuive, il faut des interlocuteurs de qualité et il faut en plus que ces interlocuteurs restent en vie. Les membres travailleurs rappellent qu'ils ont dénoncé de manière répétée le défaut d'adaptation de la législation du travail par rapport à la convention no 87, aggravé, qui plus est, par l'adoption d'une nouvelle législation particulièrement rétrograde. Dans la pratique, on constate en Colombie un recul du syndicalisme, la persistance des atteintes aux libertés syndicales et des obstacles à la négociation collective, la persistance d'une violence qui frappe plus particulièrement le milieu syndical et d'une impunité flagrante des crimes commis contre les travailleurs. Tout en restant conscient que la décision finale n'appartient pas à la Commission de la Conférence, les membres travailleurs demandent instamment que la proposition d'envoi d'une commission d'enquête dans le pays soit discutée au Conseil d'administration et que tout soit mis en uvre pour que cette proposition soit acceptée. Ce moyen, plutôt que la coopération technique, est le seul à leurs yeux qui soit susceptible d'aboutir à une amélioration de la situation. Enfin, ils ont demandé que les conclusions concernant ce cas figurent dans un paragraphe spécial du rapport.

Les membres employeurs ont déclaré que des améliorations dans différents domaines sont nécessaires dans le cas présent, principalement en ce qui concerne la violence prédominante, qui est au c ur du problème. En particulier, il faut s'attaquer à l'impunité, qui est un problème de pratique et non de législation, qui a plusieurs causes. Les membres employeurs ne soutiennent ni la proposition d'inclure un paragraphe spécial dans le rapport de la Commission de la Conférence ni l'établissement d'une commission d'enquête par le Conseil d'administration, ceci pour ne pas gêner la position du gouvernement dans sa résolution des problèmes de violence.

Les membres travailleurs ont tenu à faire valoir deux points. Tout d'abord, ils n'ont pas estimé opportun que l'on mentionne dans les conclusions que des avis divers ont été exprimés à propos des mesures à recommander au Conseil d'administration, et ils considèrent que la commission d'enquête reste le seul moyen de parvenir à mettre un terme au climat de violence dans le pays. Ensuite, la réticence des membres employeurs à condamner assez fermement une situation si destructrice, tant pour les milieux syndicaux que pour les milieux employeurs, leur paraît incompréhensible, surtout en rapportant la gravité de ce cas avec celle d'autres cas ayant donné lieu à un paragraphe spécial. Ils ont exprimé dans des termes les plus vifs que l'OIT ne peut pas avoir deux poids et deux mesures.

Les membres employeurs ont de nouveau souligné qu'ils ne soutiennent ni la proposition d'un paragraphe spécial, ni l'établissement d'une commission d'enquête par le Conseil d'administration parce qu'ils croient que la coopération technique constitue le meilleur instrument pour atteindre les objectifs. Ils ont répété que la position du gouvernement doit être consolidée, ce qui ne devrait surprendre personne puisqu'ils ont déjà exprimé ce point de vue l'année dernière. La situation ne peut pas simplement être améliorée en modifiant la législation, puisqu'il s'agit d'un problème beaucoup plus vaste et il convient de soutenir la coopération technique du BIT.

Suite à l'adoption des conclusions sur l'application de la convention no 87 en Colombie, les membres travailleurs ont souhaité faire une déclaration. Ils ont demandé que celle-ci soit transmise au Directeur général et reprise dans le compte rendu comme l'explication de leur adhésion, dans un esprit de coopération au sein de cette enceinte tripartite, aux conclusions de la discussion de ce cas.

Les membres travailleurs demeurent convaincus qu'il aurait été opportun, en dépit des déclarations du représentant gouvernemental, que le Conseil d'administration puisse demander au Bureau la mise en place d'une commission d'enquête en Colombie. Il ne s'agit en rien d'un acte hostile envers le gouvernement mais bien de la traduction d'une profonde préoccupation face à l'impunité, la violence et les assassinats dont sont victimes les militants et les dirigeants syndicaux. Il est regrettable que la politisation de l'affaire conduise à accepter que la perte continue de vies humaines, de vies de syndicalistes ne devienne chaque année qu'un point ordinaire à l'ordre du jour. Qu'il soit clair qu'il n'en sera jamais ainsi pour les membres travailleurs.

Les membres travailleurs ont vivement regretté que les conclusions adoptées ne soient pas reprises dans un paragraphe spécial. Avec ces conclusions, il semble y avoir deux poids deux mesures, ce qui sape l'autorité morale de cette commission et du système de contrôle. Qu'il s'agisse pour certains d'un objectif à peine dévoilé ne fait qu'aggraver, dans ce cas, l'incapacité de discernement de cette commission. Le défaut continu d'application réside dans l'absence d'adoption de mesures adéquates pour garantir le respect des libertés élémentaires, telles que le droit à la vie, qui sont une condition sine qua non de la liberté syndicale. Il s'agit d'un défaut continu qui coûte la vie à des centaines de personnes par an et affecte des milliers d'autres personnes dans leur vie professionnelle.

Les membres travailleurs ont salué l'engagement de tous ceux, syndicalistes mais aussi employeurs soucieux d'une production de biens et de services respectueuse des droits sociaux, fonctionnaires, politiciens, qui continuent à lutter contre le fléau de la violence, contre l'impunité et pour la liberté syndicale, la négociation collective et le droit de grève. Un paragraphe spécial aurait été, à juste titre, un encouragement, un acte de solidarité envers ceux et celles qui sur le terrain luttent au quotidien pour un autre monde. Un autre monde reste possible, sans doute aurait-il fallu le dire tout haut.

Les membres employeurs ont noté la déclaration faite par les membres travailleurs. Ils s'en sont tenus à leurs observations précédentes et ont considéré que certaines propositions concrètes faites la veille n'aideraient pas le gouvernement dans ses efforts pour améliorer la situation. Les mesures proposées par les employeurs étaient certainement plus appropriées étant donné la situation.

La commission a pris note des informations apportées par le représentant gouvernemental et du débat qui a fait suite. Elle a souligné que ses commentaires concernaient, d'une part, les innombrables assassinats et autres actes de violence visant des syndicalistes et l'impunité dont jouissent les auteurs de ces actes et, d'autre part, un certain nombre d'obstacles posés par la législation au droit des organisations de travailleurs de poursuivre librement leurs activités. La commission a pris note du fait que le Comité de la liberté syndicale a été saisi de plusieurs cas portant sur de tels assassinats et autres actes de violence à l'encontre de syndicalistes. Elle a pris note avec une profonde préoccupation du climat de violence particulièrement dramatique qui règne dans le pays.

La commission a condamné une fois de plus avec la plus grande fermeté les assassinats et enlèvements de syndicalistes et les enlèvements de travailleurs et d'employeurs, rappelant que les organisations de travailleurs et d'employeurs ne peuvent exercer librement et de manière significative leurs activités que dans un climat exempt de violence. A cet égard, la commission a demandé une fois de plus au gouvernement de consolider les institutions nécessaires pour qu'il soit mis un terme à cette situation d'impunité qui constitue un grave obstacle au libre exercice de la liberté syndicale garanti par la convention.

La commission a prié instamment le gouvernement de prendre de toute urgence les mesures nécessaires pour mettre un terme à cette situation d'insécurité afin que, à travers le rétablissement du respect des droits fondamentaux et, en particulier, le droit à la vie et à la sécurité, les organisations de travailleurs et d'employeurs puissent exercer pleinement les droits que leur reconnaît la convention.

Notant qu'en juin 1998 une plainte a été soumise sur le fondement de l'article 26 de la Constitution de l'OIT qui visait en particulier la situation de violence frappant les syndicalistes, la commission a exprimé l'espoir que le Conseil d'administration prendra les mesures adéquates - à propos desquelles des avis divers se sont exprimés - qui contribueront au rétablissement d'une situation propice à l'exercice plein et entier des droits syndicaux, dans un climat exempt de violence.

La commission a lancé un appel instant au gouvernement afin que celui-ci prenne immédiatement les mesures nécessaires pour garantir la pleine application de la convention, tant dans la législation que dans la pratique. Elle a demandé que celui-ci soumette un rapport détaillé (répondant de manière exhaustive aux commentaires formulés par les organisations syndicales) à la commission d'experts afin que celle-ci puisse réexaminer la situation à sa prochaine session et elle a exprimé l'espoir que des progrès tangibles pourront être constatés dans un très proche avenir.

Les membres travailleurs ont tenu à faire valoir deux points. Tout d'abord, ils n'ont pas estimé opportun que l'on mentionne dans les conclusions que des avis divers ont été exprimés à propos des mesures à recommander au Conseil d'administration, et ils considèrent que la commission d'enquête reste le seul moyen de parvenir à mettre un terme au climat de violence dans le pays. Ensuite, la réticence des membres employeurs à condamner assez fermement une situation si destructrice, tant pour les milieux syndicaux que pour les milieux employeurs, leur paraît incompréhensible, surtout en rapportant la gravité de ce cas avec celle d'autres cas ayant donné lieu à un paragraphe spécial. Ils ont exprimé dans des termes les plus vifs que l'OIT ne peut pas avoir deux poids et deux mesures.

Les membres employeurs ont de nouveau souligné qu'ils ne soutiennent ni la proposition d'un paragraphe spécial, ni l'établissement d'une commission d'enquête par le Conseil d'administration parce qu'ils croient que la coopération technique constitue le meilleur instrument pour atteindre les objectifs. Ils ont répété que la position du gouvernement doit être consolidée, ce qui ne devrait surprendre personne puisqu'ils ont déjà exprimé ce point de vue l'année dernière. La situation ne peut pas simplement être améliorée en modifiant la législation, puisqu'il s'agit d'un problème beaucoup plus vaste et il convient de soutenir la coopération technique du BIT.

Suite à l'adoption des conclusions sur l'application de la convention no 87 en Colombie, les membres travailleurs ont souhaité faire une déclaration. Ils ont demandé que celle-ci soit transmise au Directeur général et reprise dans le compte rendu comme l'explication de leur adhésion, dans un esprit de coopération au sein de cette enceinte tripartite, aux conclusions de la discussion de ce cas.

Les membres travailleurs demeurent convaincus qu'il aurait été opportun, en dépit des déclarations du représentant gouvernemental, que le Conseil d'administration puisse demander au Bureau la mise en place d'une commission d'enquête en Colombie. Il ne s'agit en rien d'un acte hostile envers le gouvernement mais bien de la traduction d'une profonde préoccupation face à l'impunité, la violence et les assassinats dont sont victimes les militants et les dirigeants syndicaux. Il est regrettable que la politisation de l'affaire conduise à accepter que la perte continue de vies humaines, de vies de syndicalistes ne devienne chaque année qu'un point ordinaire à l'ordre du jour. Qu'il soit clair qu'il n'en sera jamais ainsi pour les membres travailleurs.

Les membres travailleurs ont vivement regretté que les conclusions adoptées ne soient pas reprises dans un paragraphe spécial. Avec ces conclusions, il semble y avoir deux poids deux mesures, ce qui sape l'autorité morale de cette commission et du système de contrôle. Qu'il s'agisse pour certains d'un objectif à peine dévoilé ne fait qu'aggraver, dans ce cas, l'incapacité de discernement de cette commission. Le défaut continu d'application réside dans l'absence d'adoption de mesures adéquates pour garantir le respect des libertés élémentaires, telles que le droit à la vie, qui sont une condition sine qua non de la liberté syndicale. Il s'agit d'un défaut continu qui coûte la vie à des centaines de personnes par an et affecte des milliers d'autres personnes dans leur vie professionnelle.

Les membres travailleurs ont salué l'engagement de tous ceux, syndicalistes mais aussi employeurs soucieux d'une production de biens et de services respectueuse des droits sociaux, fonctionnaires, politiciens, qui continuent à lutter contre le fléau de la violence, contre l'impunité et pour la liberté syndicale, la négociation collective et le droit de grève. Un paragraphe spécial aurait été, à juste titre, un encouragement, un acte de solidarité envers ceux et celles qui sur le terrain luttent au quotidien pour un autre monde. Un autre monde reste possible, sans doute aurait-il fallu le dire tout haut.

Les membres employeurs ont noté la déclaration faite par les membres travailleurs. Ils s'en sont tenus à leurs observations précédentes et ont considéré que certaines propositions concrètes faites la veille n'aideraient pas le gouvernement dans ses efforts pour améliorer la situation. Les mesures proposées par les employeurs étaient certainement plus appropriées étant donné la situation.

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