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Observation (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - République centrafricaine (Ratification: 2000)

Autre commentaire sur C182

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La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente, qui était conçue dans les termes suivants:

Article 3 de la convention. Pires formes de travail des enfants. Alinéa a). Toutes les formes d’esclavage ou de pratiques analogues. Recrutement forcé d’enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés. La commission avait précédemment noté que le Secrétaire général des Nations Unies, dans son rapport du 21 décembre 2007 sur les enfants et les conflits armés (A/62/609‑S/2007/757, paragr. 29 à 32), indique que de nombreux cas de recrutement d’enfants par le groupe rebelle de l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR), qui contrôle certaines zones du nord-est du pays, ont été signalés. Lors des attaques de l’UFDR contre les positions des Forces armées centrafricaines (FACA) et de l’armée française à Birao en mars 2007, des anciens élèves du collège de Birao ont été reconnus parmi les rebelles. De nombreux enfants âgés de 12 à 17 ans qui participaient à ces attaques y ont perdu la vie. De plus, selon le rapport, une mission conduite par l’UNICEF au mois de juin 2007 a permis de confirmer qu’environ 400 à 500 enfants associés aux groupes rebelles de l’Armée pour la restauration de la République et la démocratie (APRD) et du Front démocratique du peuple centrafricain (FDPC) participent à des opérations dans la région du nord-ouest. L’APRD et le FDPC ont de plus en plus souvent recours au recrutement forcé des enfants dans leurs zones d’influence. La commission avait relevé à cet égard que la législation nationale ne semble pas contenir de dispositions qui interdisent et sanctionnent le recrutement forcé d’enfants de moins de 18 ans en vue de leur utilisation dans les conflits armés et avait, en conséquence, prié le gouvernement de prendre des mesures, de toute urgence, pour adopter une telle législation.

La commission avait noté avec satisfaction que les articles 262 et 263 de la nouvelle loi no 09.004 portant Code du travail de la République centrafricaine (Code du travail de 2009), adoptée en janvier 2009, disposent que toutes formes d’esclavage ou pratiques analogues des enfants de moins de 18 ans, ainsi que leur travail forcé ou obligatoire, y compris le recrutement forcé ou obligatoire en vue de leur utilisation dans des conflits armés, sont interdits sur tout le territoire de la République centrafricaine. La commission avait noté également que des sanctions d’amendes et d’emprisonnement sont prévues en cas d’infractions relatives à cette disposition (art. 393).

Cependant, la commission avait noté que, selon les informations plus récentes relevées par le Secrétaire général des Nations Unies dans son rapport du 3 février 2009 sur les enfants et les conflits armés (S/2009/66, paragr. 26 à 36), l’APRD a récemment recensé 250 enfants qu’elle devait libérer et qui devaient être réintégrés, mais il se pourrait que les enfants associés à cette force soient encore plus nombreux. En novembre 2008, 100 enfants avaient été identifiés, âgés pour la plupart de 12 à 17 ans, voire même pour certains de 9 ou 10 ans. En outre, le Secrétaire général rapporte que beaucoup d’enfants ont été enlevés et enrôlés dans le sud-est du pays à l’issue des quatre attaques que l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) a perpétrées en février et mars 2008 contre des villages dans la région d’Obo. Une mission conjointe de l’ONU, du Bureau d’appui des Nations Unies pour la consolidation de la paix en République centrafricaine, du Bureau de la coordination des affaires humanitaires, du Département de la sûreté et de la sécurité et de l’UNICEF a fait ressortir que certains agresseurs auraient eu moins de 15 ans. D’après les 35 adultes qui avaient été enlevés puis remis en liberté par la LRA, les 55 enfants enlevés au cours des attaques sont désormais employés comme soldats ou pour remplir des tâches auxiliaires, et les filles sont réduites à l’état d’esclaves sexuelles. En outre, la commission avait noté que le Représentant du Secrétaire général, dans son rapport pour les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays du 17 mars 2008 (A/HRC/8/6/Add.1, paragr. 67), indique qu’il a lui-même pu constater qu’il y a des enfants parmi les rebelles qui patrouillent les territoires sous leur contrôle et qu’un peu moins d’un millier d’enfants seraient concernés.

En outre, la commission avait noté que le Secrétaire général indique que, en date du 13 octobre 2008, une loi d’amnistie générale couvrant les violations commises entre mars 2003 et octobre 2008 par les forces gouvernementales de sécurité et de défense et les rebelles a été promulguée (S/2009/66, paragr. 6). Cette amnistie est soumise à des conditions dont, notamment, le cantonnement, la démobilisation et le désarmement des forces combattantes dans les soixante jours de la promulgation de cette loi. Or, compte tenu de la brièveté de ce délai qui a particulièrement été contestée par l’APRD, une démarche graduelle a été adoptée début novembre 2008 et les activités de démobilisation devaient commencer début 2009. Le 25 octobre 2008, le gouvernement centrafricain a remis en liberté 12 combattants de l’APRD, de l’UFDR et du FDPC, conformément aux obligations lui incombant au titre de cet accord (S/2009/66, paragr. 6).

La commission avait constaté donc que le recrutement forcé d’enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés existe toujours dans le pays et que la situation demeure fragile. La commission avait exprimé à nouveau sa vive préoccupation face à la situation actuelle, d’autant plus que la persistance de cette pire forme de travail des enfants entraîne d’autres violations des droits de l’enfant, tels le meurtre et les violences sexuelles. Elle avait rappelé encore une fois au gouvernement que, en vertu de l’article 1 de la convention, les Etats Membres sont priés de prendre des mesures immédiates et efficaces pour assurer l’élimination des pires formes de travail des enfants, et ce de toute urgence. La commission prie donc le gouvernement de prendre des mesures immédiates et efficaces pour arrêter la pratique du recrutement forcé d’enfants de moins de 18 ans par les groupes armés, particulièrement au nord-est et nord-ouest du pays. Se référant au Conseil de sécurité qui, dans sa résolution no 1612 du 26 juillet 2005, rappelle «la responsabilité qu’ont tous les Etats de mettre fin à l’impunité et de poursuivre quiconque est responsable de génocide, de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre et autres crimes odieux commis sur la personne d’enfants», la commission prie instamment le gouvernement de prendre des mesures immédiates afin d’assurer, dans la pratique, la protection des enfants de moins de 18 ans contre le recrutement forcé en vue de leur utilisation dans des conflits armés, en assurant que des enquêtes et des poursuites sévères des contrevenants soient menées et que des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives soient imposées aux personnes reconnues coupables d’avoir utilisé des enfants de moins de 18 ans dans des conflits armés. Elle prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard.

Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces prises dans un délai déterminé. Alinéas b) et c). Aide directe pour soustraire les enfants des pires formes de travail et leur assurer l’accès à l’éducation de base gratuite et, lorsque cela est possible et approprié, à la formation professionnelle. Enfants soldats. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que, selon des informations de l’UNICEF, le gouvernement, l’UFDR et l’UNICEF ont signé, le 16 juin 2007, un accord pour réinsérer les enfants associés avec des groupes armés dans le nord-est du pays. A cet égard, elle avait noté que, selon le rapport du Secrétaire général des Nations Unies du 21 décembre 2007 sur les enfants et les conflits armés (A/62/609-S/2007/757, paragr. 29 à 32), dans le cadre de l’accord signé le 16 juin 2007, un premier groupe d’environ 200 enfants a été libéré. En avril et mai 2007, plus de 450 enfants associés à l’UFDR, dont 75 pour cent étaient des garçons âgés de 13 à 17 ans, ont été démobilisés. Selon le rapport, un dernier groupe de 450 à 500 enfants auraient été libérés et rendus à leurs communautés depuis septembre 2007, mais cette information n’a pu être vérifiée. S’agissant des enfants associés aux groupes rebelles de l’APRD et du FDPC qui participent à des opérations dans la région du nord-ouest, le rapport indique qu’aux mois de mars et juin 2007 l’APRD a demandé l’aide de l’Equipe de pays des Nations Unies afin de démobiliser les enfants soldats. Un dialogue informel a été engagé avec l’APRD pour qu’elle renonce à recruter des enfants et qu’elle démobilise ceux qui sont dans ses rangs en vue de leur réinsertion sociale. Le déroulement des négociations à caractère officiel est toutefois entravé par l’insécurité qui mine le nord-ouest du pays.

La commission avait en outre noté que, selon un rapport de l’UNICEF de 2008 intitulé «Action humanitaire de l’UNICEF», le conflit a provoqué des déplacements de la population et quelque 610 000 enfants et femmes souffrent du conflit. La commission avait également noté que l’UNICEF compte favoriser l’accès à l’éducation de base de 113 000 enfants victimes du conflit, notamment en appuyant une campagne intensive de rescolarisation dans les préfectures du nord. En outre, l’UNICEF compte favoriser la réinsertion de 1 000 enfants soldats dans leurs familles et collectivités.

La commission avait noté que, selon le rapport du Secrétaire général des Nations Unies du 3 février 2009 sur les enfants et les conflits armés (S/2009/66, paragr. 53), des partenariats stratégiques aux fins de la prévention du recrutement et de la libération et de la réintégration d’enfants dans les zones tenues par l’APRD et l’UFDR ont récemment été formellement conclus avec quatre organisations non gouvernementales à vocation humanitaire. Ce programme axé sur les communautés prévoit la fourniture d’une assistance pour la libération et la réintégration de centaines d’enfants associés à des groupes armés dans le nord du pays. Trois centres d’accueil provisoires sont en cours de construction dans les districts du nord-ouest et une structure d’accueil d’urgence est déjà opérationnelle dans le nord-ouest. La commission avait noté cependant que le Secrétaire général indique que, bien que des progrès aient été faits sur la voie de la libération des enfants se trouvant dans les rangs de l’APRD et de l’UFDR, l’impasse dans laquelle se sont retrouvés les pourparlers de paix puis le retrait en août 2008 des principales parties au conflit du dialogue général sur la paix ont retardé la concrétisation de l’engagement qui avait été pris de libérer les enfants. Selon le Secrétaire général, pour l’heure, relativement peu d’enfants ont effectivement été remis en liberté, et il se pourrait même que d’autres aient été recrutés.

La commission avait constaté donc à nouveau que, malgré la collaboration du gouvernement avec l’UNICEF, la situation actuelle du pays reste gravement préoccupante. La commission prie donc le gouvernement de redoubler d’efforts et de continuer sa collaboration avec l’UNICEF et d’autres organisations afin d’améliorer la situation des enfants victimes de recrutement forcé qui sont utilisés dans les conflits armés. Elle exprime l’espoir que le gouvernement négociera une fin au conflit armé pour que tous les enfants utilisés dans ce conflit soient démobilisés et réintégrés, notamment au nord-est et nord-ouest du pays. En outre, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre d’enfants soldats soustraits des groupes armés et réintégrés à l’aide d’une assistance appropriée en matière de réadaptation et d’intégration sociale, notamment par le biais des centres d’accueil. Elle prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard dans son prochain rapport.

La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un proche avenir.

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