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Observation (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - Zimbabwe (Ratification: 1998)

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Article 1 a) de la convention. Sanctions comportant l’obligation de travailler punissant l’expression d’opinions politiques ou la manifestation d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. La commission a pris note, précédemment, d’une communication reçue en septembre 2009 du Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU) contenant des observations sur l’application de la convention par ce pays. Le ZCTU allègue notamment que la législation nationale (par exemple, la loi portant codification et réforme de la loi pénale) comporte des dispositions qui restreignent la liberté d’expression dès lors que l’on critique le Président ou la police, et que les travailleurs – et les citoyens, d’une manière générale – sont victimes de harcèlement s’ils expriment des opinions contraires à l’Etat. La commission prend également note des constatations, conclusions et recommandations de la commission d’enquête constituée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT pour examiner le respect par le gouvernement du Zimbabwe de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949. Elle note en particulier les allégations des parties plaignantes concernant notamment l’usage continuel que le gouvernement fait de la loi sur la sécurité et l’ordre public (POSA) et, plus récemment, de la loi de 2006 portant codification et réforme de la loi pénale pour réprimer l’exercice des libertés publiques et des droits syndicaux fondamentaux, ainsi que les conclusions de cette commission selon lesquelles l’usage qui est fait de la POSA par les autorités dans la pratique revient à interdire purement et simplement aux syndicats de manifester.

Dans ses précédents commentaires, la commission s’est référée aux dispositions suivantes de la législation nationale en vertu desquelles des peines d’emprisonnement (comportant l’obligation de travailler), conformément à l’article 76(1) de la loi sur les prisons (chap. 7:11) et à l’article 66(1) de la réglementation générale sur les prisons de 1996, peuvent être imposées dans des circonstances relevant de l’article 1 a) de la convention:

–           les articles 15, 16, 19(1)(b), (c) et 24 à 27 de la loi sur l’ordre et la sécurité publique (POSA) (chap. 11:17): publication ou diffusion de déclarations mensongères préjudiciables à l’Etat; déclarations mensongères concernant le Président; actes, paroles proférées ou diffusées par des écrits, affiches ou autres signes visibles exprimant des menaces, des injures ou des insultes dans l’intention de porter atteinte à l’ordre public; non-déclaration aux autorités de l’intention d’organiser un rassemblement public; violation de l’interdiction d’organiser un rassemblement public ou une manifestation publique, etc.;

–           les articles 31 et 33 de la loi de 2006 portant codification et réforme de la loi pénale (chap. 9:23), qui contiennent des dispositions similaires à celles de la POSA visées sous le point précédent en ce qui concerne la publication ou la diffusion de déclarations mensongères préjudiciables à l’Etat ou les déclarations mensongères concernant le Président, etc.;

–           les articles 37 et 41 de la loi de 2006 portant codification et réforme de la loi pénale (chap. 9:23), en vertu desquels des peines d’emprisonnement peuvent être imposées notamment en cas de participation à des réunions ou assemblées organisées dans l’intention de «perturber la paix, la sécurité ou l’ordre public», de même que pour des paroles proférées ou diffusées par des écrits, affiches ou autres signes visibles, qui ont un caractère menaçant, injurieux ou  insultant «et tendent, par le fait, à troubler l’ordre public», de même que toute conduite perturbatrice animée d’intentions similaires dans un lieu public, etc.

La commission rappelle que l’article 1 a) de la convention interdit le recours au travail forcé ou obligatoire en tant que sanction de l’expression de certaines opinions politiques ou de la manifestation d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. La commission se réfère, à cet égard, au paragraphe 154 de son étude d’ensemble, Eradiquer le travail forcé, dans lequel elle observe que la convention n’interdit pas d’appliquer des sanctions comportant du travail obligatoire aux personnes qui utilisent la violence, incitent à la violence ou préparent des actes de violence. Toutefois, les peines comportant du travail obligatoire sont incompatibles avec la convention dès lors qu’elles sanctionnent une interdiction d’exprimer pacifiquement des opinions critiquant la politique du gouvernement ou l’ordre politique établi, que cette interdiction soit imposée par la loi ou au moyen d’une décision administrative. Etant donné que des opinions et avis contraires à l’ordre établi peuvent s’exprimer non seulement par voie de presse ou d’autres médias mais aussi dans le cadre de diverses formes d’assemblées ou réunions, si ces assemblées ou réunions sont sujettes à autorisation préalable délivrée par les autorités à leur discrétion, et que les infractions dans ce cadre peuvent être punies par des sanctions comportant l’obligation de travailler, de telles dispositions relèvent du champ d’application de la convention (voir, par exemple, les explications données au paragraphe 162 de l’étude d’ensemble susmentionnée).

Tout en prenant dûment note des déclarations du gouvernement selon lesquelles les tribunaux se limitent à prononcer la peine de prison et que ce sont les autorités pénitentiaires qui déterminent l’aptitude du délinquant au travail pénitentiaire, la commission rappelle que la convention interdit de recourir à «toutes formes» de travail forcé ou obligatoire, y compris au travail pénitentiaire obligatoire, en tant que sanction à l’égard des personnes visées à l’article 1 a).

La commission exprime donc le ferme espoir que les mesures nécessaires seront prises afin que les dispositions susvisées de la loi sur la sécurité et l’ordre public et de la loi portant codification et réforme de la loi pénale soient modifiées ou abrogées, de manière à mettre la législation en conformité avec la convention. Dans l’attente de l’adoption de telles mesures, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’application de ces dispositions dans la pratique, en communiquant copie des décisions de justice pertinentes et en précisant les peines imposées.

Article 1 d). Sanctions pénales comportant l’obligation de travailler punissant la participation à des grèves. Dans ses précédents commentaires, la commission s’est référée à certaines dispositions de la loi sur le travail punissant la participation à des actions collectives illégales par des peines d’emprisonnement, peines qui comportent l’obligation de travailler en vertu de l’article 76(1) de la loi sur les prisons (chap. 7:11) et de l’article 66(1) de la réglementation générale des prisons de 1996. La commission note en particulier que l’article 104(2) et (3) de la loi sur le travail, telle que modifiée, interdit non seulement l’action de revendication collective dans les services essentiels et lorsque les parties ont soumis leur différend à arbitrage, mais prévoit également des restrictions d’ordre procédural au droit d’action de revendication collective, dont le non-respect est passible de peines d’emprisonnement (comportant l’obligation de travailler) en vertu des articles 109(1), (2) et 112(1) de la loi. Au surplus, il ressort de la formulation de l’article 102(b) de la loi que le ministre peut déclarer essentiels des services autres que ceux dont l’interruption mettrait en danger, pour tout ou partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé des personnes.

La commission rappelle que l’article 1 d) de la convention interdit le recours au travail forcé ou obligatoire en tant que punition pour avoir participé à des grèves. Elle note également que, dans les conclusions mentionnées plus haut, la commission d’enquête se déclare préoccupée par le fait que la législation en cause prévoit des sanctions disproportionnées en cas d’exercice illégal du droit de grève et définit trop largement les services essentiels, de sorte qu’un grand nombre de travailleurs n’ont pas le droit de faire grève.

La commission note que le gouvernement indique dans son rapport qu’il est envisagé de revoir l’article 109 de ladite loi dans le contexte de la réforme de la législation du travail, notamment en ce qui concerne les sanctions applicables en cas de participation à une action de revendication collective illégale.

La commission veut croire que les mesures nécessaires seront prises prochainement pour modifier les dispositions susvisées de la loi sur le travail qui imposent des restrictions au droit de grève et dont le non-respect est sanctionné par une peine comportant un travail pénitentiaire obligatoire, de manière à garantir qu’aucune sanction de cette nature ne puisse être imposée pour le simple fait d’avoir organisé des grèves ou y avoir participé, et ainsi rendre la législation conforme à la convention. Elle prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur les progrès réalisés à cet égard.

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