National Legislation on Labour and Social Rights
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La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle prend note également des commentaires et des informations détaillés fournis par le Congrès des syndicats (TUC), dans une communication datée du 28 octobre 2010, dans laquelle il soulève un certain nombre de questions sur l’application de la convention dans la législation et la pratique qui font l’objet des commentaires de la commission depuis de nombreuses années. La commission prie le gouvernement de transmettre ses observations à cet égard dans son prochain rapport.
Article 3 de la convention. Droit des organisations de travailleurs d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs sans intervention de la part des autorités publiques. Les commentaires antérieurs de la commission portaient sur la nécessité d’assurer le droit des syndicats d’élaborer leurs règlements administratifs et de formuler leurs programmes sans intervention de la part des autorités, et en particulier lorsqu’ils ont l’intention d’exclure des individus au motif qu’ils appartiennent à un parti politique extrémiste dont les principes et les politiques déplaisent au syndicat. A la suite de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) rendu dans l’affaire Associated Society of Locomotive Engineers and Firemen (ASLEF) c. Royaume-Uni (27 mai 2007), lequel a conclu que l’article 174 de la loi (codifiée) sur les syndicats et les relations de travail, 1992 (TULRA), porte atteinte à l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’homme sur la liberté syndicale, en ce sens qu’il n’établit pas un équilibre adéquat entre les droits individuels des membres et ceux du syndicat concerné, le gouvernement avait informé la commission que les modifications pertinentes prévues dans le projet de loi sur l’emploi avaient été soumises au Parlement.
La commission avait également noté les commentaires détaillés formulés par le TUC qui émet des réserves au sujet des modifications proposées aussi bien au regard de ce qu’il considère comme un degré important d’incertitude concernant leur signification que de la complexité excessive de la nouvelle législation. La commission prend dûment note des observations détaillées formulées par le gouvernement dans son dernier rapport en réponse à ces préoccupations. Le gouvernement indique en particulier que l’article 19 de la loi de 2008 sur l’emploi a modifié l’article 174 de la loi de 1992 et a étendu de manière significative le champ d’action des syndicats en matière d’exclusion des individus au motif de leur affiliation à un parti politique. Le gouvernement déclare qu’il a tenté de réaliser un équilibre entre des droits humains concurrents, à savoir la liberté de croyance et la liberté syndicale, à l’occasion de l’élaboration de ces modifications. Il a donc prévu des garanties pour assurer la présence des éléments essentiels en matière d’équité, de conformité à la loi et de transparence, à savoir que: a) l’affiliation aux partis politiques concernés est contraire aux statuts ou aux objectifs du syndicat; b) le syndicat a pris la décision d’exclusion conformément à ses statuts; et c) le syndicat a suivi dans sa décision des procédures équitables, en veillant à ce que l’intéressé ne perde pas ses moyens de subsistance et ne se retrouve pas dans une situation de difficulté exceptionnelle du fait d’une telle exclusion. En ce qui concerne ce dernier point, le gouvernement indique que, du fait que l’affiliation syndicale obligatoire est de toute manière illégale dans le pays, la perte de l’affiliation syndicale ne peut en aucun cas entraîner une situation de difficulté extrême. Pour ce qui est de l’allégation du TUC selon laquelle la complexité de la nouvelle législation est de nature à entraîner des procès injustifiés et abusifs, le gouvernement indique qu’il n’existe aucune preuve que les litiges aient été induits par les modifications qui sont entrées en vigueur en avril 2009. Le gouvernement ajoute à ce propos qu’une indemnité compensatoire pour exclusion illégale ne s’appliquerait que lorsque le syndicat a refusé d’admettre ou de réadmettre l’individu et que l’affiliation au parti politique concerné n’est pas contraire aux statuts ou aux objectifs du syndicat alors que, de l’avis du gouvernement, les statuts ou les objectifs des syndicats britanniques spécifient souvent que l’affiliation à certains partis politiques, ou certains comportements ou des comportements xénophobes ou racistes associés à de tels partis, sont incompatibles avec l’affiliation syndicale. Le gouvernement conclut que ces modifications ne portent pas atteinte à la convention et sont nécessaires dans une société démocratique pour assurer la protection des droits et de la liberté d’autrui.
La commission prie le gouvernement de répondre aux nouvelles préoccupations exprimées par le TUC dans ses derniers commentaires et de communiquer toute information disponible sur l’application pratique des modifications apportées à l’article 174 de la loi TULRA.
Protection par rapport à la responsabilité civile en cas de grève ou autres actions revendicatives (art. 223 et 224 de la loi TULRA). Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait noté, selon le TUC, que la nature décentralisée du système des relations du travail fait qu’il est plus important pour les travailleurs de pouvoir s’engager dans une action revendicative contre des employeurs, qui sont plus aptes à saper l’action syndicale au moyen de structures d’entreprise complexes, ou en recourant au transfert du travail ou à l’essaimage. La commission a en général souligné la nécessité de protéger le droit des travailleurs d’engager une action revendicative en relation avec des questions qui les touchent même si, dans certains cas, l’employeur direct peut ne pas être partie au différend, et de participer à des grèves de solidarité à condition que la grève initiale qu’ils soutiennent soit elle-même légale. La commission prend note du fait que le gouvernement réitère qu’il n’envisage pas du tout de modifier la loi dans ce domaine. La commission souligne que la mondialisation de l’économie et la délocalisation des centres de travail peuvent avoir un impact grave sur le droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités de manière à défendre de façon effective les intérêts de leurs membres, dans le cas où une action revendicative légale est définie de manière trop restrictive. La commission rappelle donc que les travailleurs devraient pouvoir participer à des grèves de solidarité, à condition que la grève initiale qu’ils soutiennent soit elle-même légale, et mener des actions revendicatives en relation avec les questions sociales et économiques qui les touchent et demande au gouvernement de réexaminer les articles 223 et 224 de la loi TULRA, en consultant pleinement les partenaires sociaux, et de transmettre dans son prochain rapport de plus en plus d’informations sur le progrès réalisé pour assurer le respect de ce principe.
La commission rappelle de nouveau qu’elle avait constaté avec beaucoup de préoccupation, sur la base des commentaires de l’Association des pilotes de ligne britanniques (BALPA), de la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) et de la Centrale Unite the Union, des restrictions pratiques à l’exercice effectif du droit de grève par les travailleurs de la BALPA dans le cas en question. La commission avait observé que la menace omniprésente d’une action en dommages-intérêts comportant le risque de mener le syndicat dans une situation d’insolvabilité, éventualité aujourd’hui fort plausible, compte tenu de la jurisprudence Viking et Laval de la Cour de justice des communautés européennes (CJCE), crée une situation dans laquelle l’exercice des droits établis par la convention devient impossible. Tout en notant, d’après la déclaration du gouvernement, que l’impact des jugements de la CJCE est limité, la commission estime que de telles affaires risquent de devenir plus fréquentes dans le contexte actuel de la mondialisation, particulièrement dans certains secteurs d’emploi, tels que les transports aériens, et considère que la doctrine qui s’articule autour de ces jugements de la CJCE est de nature à avoir un effet restrictif important sur l’exercice du droit de grève dans la pratique, d’une manière contraire à la convention.
Dans son dernier rapport, le gouvernement souligne que, même si un différend syndical au Royaume-Uni a une dimension internationale, il n’est pas du tout évident que l’action revendicative en question risque de ne pas répondre aux prescriptions en matière de légitimité et de proportionnalité établies dans la jurisprudence de la CJCE. En tout état de cause, le gouvernement indique que, dans la mesure où des tests de proportionnalité peuvent s’appliquer à une action revendicative au Royaume-Uni, de tels tests découlent des traités de l’Union européenne, auxquels le gouvernement est tenu de donner effet. Le gouvernement estime donc que la modification de la loi TULRA ne devrait avoir aucun impact sur les tests de proportionnalité établis dans ces jugements. Pour ce qui est de la menace de dommages-intérêts illimités, le gouvernement estime qu’il n’a pas été prouvé que ces jugements de la CJCE auraient l’effet d’annuler les limites des dommages-intérêts en cas d’action revendicative illégale établies dans la loi TULRA, mais, même s’ils avaient un tel effet, le gouvernement maintient qu’il ne peut changer cet impact par une action unilatérale de sa part. Le gouvernement conclut que l’effet des jugements de la CJCE sur les actions revendicatives au Royaume-Uni n’a pas été établi, étant donné qu’aucune décision n’a été rendue par les tribunaux du Royaume-Uni dans ce domaine et que, en tout état de cause, tout effet serait probablement limité à une petite minorité de différends qui ont la dimension internationale requise. Pour ces raisons, le gouvernement considère qu’il n’est pas nécessaire de réviser la loi TULRA ou de prendre d’autres mesures nationales.
La commission rappelle qu’elle avait exprimé sa profonde préoccupation au sujet des circonstances qui ont entouré l’action revendicative proposée de la BALPA, contre laquelle les tribunaux ont ordonné une injonction en se basant sur la jurisprudence de Viking et Laval et, lorsque la compagnie a menacé, dans le cas où la grève aurait été effectivement déclenchée, de réclamer des dommages-intérêts d’un montant estimé à 100 millions de livres par jour. La commission rappelle à ce propos qu’elle souligne depuis plusieurs années la nécessité d’assurer pleinement la protection du droit des travailleurs d’exercer dans la pratique une action revendicative légitime et estime que les sauvegardes et protections adéquates en matière de responsabilité civile sont nécessaires pour assurer le respect de ce droit fondamental, qui est un corollaire intrinsèque du droit d’organisation. Tout en prenant dûment note des observations du gouvernement en relation avec ses obligations aux termes de la législation de l’Union européenne, la commission estime que la protection des actions revendicatives dans le pays, dans le contexte d’un impact hypothétique des jugements de la CJCE auquel se réfère le gouvernement (lequel a donné lieu à une insécurité juridique importante dans l’affaire BALPA), pourrait en effet être favorisée en limitant de manière effective les actions en dommages-intérêts de manière à ce que les syndicats ne soient pas confrontés aux menaces de faillite pour le seul fait d’avoir mené une action revendicative. La commission estime qu’un examen complet des problèmes en question avec les partenaires sociaux en vue de déterminer une action possible destinée à traiter les préoccupations soulevées aiderait à démontrer l’importance d’assurer le respect de ce droit fondamental. La commission demande en conséquence à nouveau au gouvernement de réexaminer la loi TULRA, en consultant pleinement les organisations concernées de travailleurs et d’employeurs, en vue de veiller à ce que la protection du droit des travailleurs d’exercer dans la pratique une action revendicative légitime soit pleinement effective, et d’indiquer toutes autres mesures prises à ce propos.
Réintégration des travailleurs ayant participé à une grève légale. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait rappelé que, pour que le droit de grève soit effectivement garanti, les travailleurs qui recourent à une grève légale devraient être en mesure de réintégrer leur emploi une fois la grève terminée. Le fait de rendre le retour au travail tributaire de certains délais et du consentement de l’employeur constitue, de l’avis de la commission, un obstacle à l’exercice effectif de ce droit, qui représente un moyen essentiel pour les travailleurs de promouvoir et défendre leurs intérêts. La commission avait en conséquence demandé au gouvernement d’indiquer toute mesure prise ou envisagée pour renforcer la protection dont disposent les travailleurs qui ont recours à une action revendicative officielle et organisée légalement.
La commission note que le gouvernement réitère que les personnes qui participent à une action revendicative organisée de manière légale sont protégées contre le licenciement dans le cas où la durée de la grève est inférieure à douze semaines. Le fait de licencier un travailleur pour participation à une grève au cours de cette période est considéré automatiquement comme injuste. Toutes les grèves au Royaume-Uni durent en principe moins de douze semaines et cette protection s’étend en conséquence en principe à tous les travailleurs qui participent à des grèves officielles et organisées de manière légale. Par ailleurs, et quelle que soit la durée de la grève, un employeur ne peut licencier un travailleur pour sa participation à une action revendicative si cet employeur n’a pas pris les mesures raisonnables en matière de procédure pour résoudre le différend avec le syndicat (par exemple procédures agréées de résolution des différends). Le gouvernement affirme cependant qu’il n’est pas approprié de soutenir l’avis selon lequel un employeur ne doit, dans aucune circonstance, licencier des travailleurs qui ont eu recours à une action revendicative. De toute manière, le licenciement de grévistes est très rare au Royaume-Uni.
La commission rappelle l’importance qu’il attache au maintien des relations d’emploi en tant que conséquence légale normale de la reconnaissance du droit de grève (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 139). Bien que des dispositions qui permettent aux employeurs de licencier les travailleurs au cours d’une grève, ou à l’occasion de celle-ci, au motif que l’action revendicative est illégitime ou illégale puissent être conformes aux dispositions de la convention, la commission estime que le fait de restreindre le droit de maintenir la relation d’emploi aux actions revendicatives dont la durée est inférieure à douze semaines place une limite arbitraire par rapport à la protection effective du droit de grève, et ce de manière contraire à la convention. La commission demande en conséquence au gouvernement de réexaminer la loi TULRA, en consultant pleinement les organisations concernées de travailleurs et d’employeurs, en vue de renforcer la protection dont disposent les travailleurs qui ont recours à une action revendicative officielle et organisée légalement, et de lui fournir des informations sur toute mesure prise à cet égard.
Prescriptions en matière d’avis de grève. Dans ses précédents commentaires, la commission avait pris note des commentaires formulés par le TUC selon lesquels les prescriptions en matière d’avis, nécessaires pour qu’une grève bénéficie de la protection de la loi, étaient excessivement lourdes. La commission note, d’après le rapport du gouvernement, que celui-ci a engagé des discussions avec le TUC au sujet de ces questions au cours de la période soumise au rapport mais qu’il n’a été parvenu à aucun accord sur la question. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les développements à ce propos, ainsi que tous rapports ou statistiques pertinents sur l’application pratique et les effets pratiques des prescriptions susmentionnées.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.