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Demande directe (CEACR) - adoptée 2008, publiée 98ème session CIT (2009)

Convention (n° 81) sur l'inspection du travail, 1947 - Sénégal (Ratification: 1962)

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La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle prend également note des commentaires de la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal (CNTS) reçus au BIT le 1er septembre 2008.

Articles 3, paragraphe 1 a), 13, paragraphe 2 b), 18 et 21 e) de la convention. Contrôle de l’application de la législation relative à la sécurité et à la santé au travail et sanctions appropriées. Mesures immédiatement exécutoires en cas de danger imminent pour la santé et la sécurité des travailleurs. La commission note que plusieurs décrets concernant la sécurité et la santé au travail ont été adoptés en 2006 en application des dispositions de l’article L.168 et suivants du Code du travail. Elle note avec intérêt que le décret no 2006-1253 du 15 novembre 2006 institue une Inspection médicale du travail, au sein de la Direction du travail et de la sécurité sociale, chargée, entre autres, de veiller à l’application de la législation et de la réglementation en matière de santé et sécurité au travail, en liaison permanente avec les inspections régionales du travail. La commission saurait gré au gouvernement de fournir des informations sur le personnel et les moyens logistiques dont l’inspection médicale du travail est dotée ainsi que sur ses activités dans la pratique, en particulier sur les liens qu’elle entretient avec les inspecteurs et contrôleurs du travail au niveau des inspections régionales.

La commission prend également note avec intérêt de l’adoption du décret no 2006-1255 du 15 novembre 2006 relatif aux moyens juridiques d’intervention de l’inspection du travail dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail (observation, mise en demeure, référé, arrêt de travail et procès-verbal). Elle souhaiterait toutefois attirer l’attention du gouvernement sur certaines des dispositions de ce décret concernant les mesures immédiatement exécutoires en cas de danger imminent pour la santé et la sécurité des travailleurs. En vertu de ce texte, l’inspecteur du travail peut: i) soit saisir le juge des référés «en cas de danger grave ou imminent présentant un risque sérieux d’atteinte à l’intégrité physique d’un travailleur, résultant de l’inobservation des dispositions législatives et réglementaires relatives à la sécurité et à la santé au travail» (art. 18); ii) soit ordonner l’arrêt du travail «à l’encontre d’établissements dont le personnel exécute des travaux de bâtiment, des travaux publics et tous autres travaux concernant des immeubles», «lorsqu’il existe une cause de danger grave et imminent résultant d’un défaut ou d’une absence de protection» (art. 19 et 20). La commission prie par conséquent le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que, conformément à l’article 13, paragraphe 2 b), des mesures immédiatement exécutoires puissent être également ordonnées dans les cas de danger imminent pour la santé et la sécurité des travailleurs, sans qu’il soit nécessaire de rechercher l’existence d’une violation de dispositions législatives ou réglementaires, à l’encontre de tout établissement industriel et commercial, quel que soit le secteur d’activité concerné.

La commission note que le gouvernement ne fournit pas les informations demandées au sujet des sanctions applicables en cas de violation de la législation du travail et qu’il se réfère à cet égard aux décrets de 2006 relatifs à la sécurité et à la santé au travail. Elle relève toutefois que ces textes fixent seulement le montant maximum des amendes (18 000 francs CFA) et la peine maximum d’emprisonnement (dix jours) et renvoient à l’échelle des peines de simple police pour la détermination de la sanction encourue pour chaque infraction. Or cette échelle des peines, telle que fixée par le décret no 62-017 PC/MFPT/DGTSS/TMO du 22 janvier 1962 dont la commission a souligné le caractère obsolète dans ses précédents commentaires, ne permet pas d’identifier les infractions concernées ni la peine encourue pour chaque infraction. La commission estime en outre que l’amende maximale applicable (18 000 francs CFA, soit environ 28 euros) n’a pas le caractère dissuasif indispensable à la crédibilité et surtout à l’efficacité du système de protection des travailleurs. Comme elle l’a déjà rappelé dans ses précédents commentaires, les employeurs pourraient en effet préférer s’acquitter de faibles amendes plutôt que de prendre les mesures nécessaires pour se conformer aux prescriptions légales et assurer la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs. La commission prie par conséquent le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que le système de sanctions soit efficace, que les peines encourues soient appropriées et qu’elles soient définies compte tenu de la nature et de la gravité de l’infraction commise. Le gouvernement est prié de tenir le Bureau informé des mesures prises à cette fin et de fournir les données chiffrées disponibles sur les infractions constatées (nature des infractions et nombre d’observations écrites, de mises en demeure, de procès-verbaux, d’arrêts du travail et de procédures de référé) ainsi que sur les suites qui leur ont été réservées par les inspecteurs et par les tribunaux (sanctions imposées, etc.).

Article 5 a). Coopération entre les services d’inspection du travail et les organes judiciaires. La commission note avec intérêt que des réunions de travail ont été organisées, dans le cadre du projet ADMITRA/BIT, à l’intention des inspecteurs du travail et des magistrats afin de renforcer la coopération entre le système judiciaire et le système d’inspection du travail. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’impact de ces rencontres sur le fonctionnement de l’inspection du travail ainsi que sur le traitement des procès-verbaux d’infraction transmis par les inspecteurs aux tribunaux, traitement dont le gouvernement indique qu’il connaît quelques lenteurs.

Articles 5 a) et 18. Obstacles à l’exercice des missions d’inspection. Coopération des forces de l’ordre. La commission note que, selon le gouvernement, les inspecteurs du travail peuvent requérir l’assistance des forces de l’ordre dans l’exercice de leurs fonctions soit par courrier officiel, soit verbalement en cas d’urgence. Se référant à ses précédents commentaires qui concernaient non seulement le droit applicable mais surtout la pratique suivie en la matière, la commission prie le gouvernement d’indiquer si des actes d’obstruction à l’encontre des inspecteurs et contrôleurs du travail ont récemment été signalés à l’autorité centrale d’inspection et, le cas échéant, de préciser les suites qui leur ont été réservées, en particulier les sanctions infligées aux auteurs de ces infractions.

Articles 6, 7, 10 et 11. Personnel de l’inspection du travail: statut, qualifications, effectifs et moyens logistiques à sa disposition. Selon la CNTS, le personnel de l’inspection est insuffisant pour exercer efficacement ses fonctions et ne dispose pas de moyens de transport ni de locaux fonctionnels. Prenant note des indications du gouvernement selon lesquelles des efforts considérables sont déployés en matière de recrutement de personnel, la commission prie le gouvernement de fournir des informations aussi détaillées que possible sur le nombre d’inspecteurs et de contrôleurs du travail recrutés ou en cours de recrutement ainsi que sur l’effectif total du personnel ayant des fonctions d’inspection, telles que définies par la convention. Elle le prie également d’indiquer les mesures prises pour assurer que le personnel d’inspection bénéficie de conditions de service au moins aussi attractives que celles qui s’appliquent aux autres fonctionnaires publics ayant des responsabilités comparables, en particulier en ce qui concerne sa rémunération et ses perspectives de carrière, et qu’il dispose des moyens nécessaires à l’exercice de ses fonctions et le mettant à l’abri de toute influence extérieure indue.

Article 12, paragraphe 1 a) et 2. Prérogatives d’investigation des inspecteurs. Le gouvernement précise dans son rapport que, dans la législation comme dans la pratique, les inspecteurs et contrôleurs du travail ont le droit d’entrer librement à toute heure du jour comme de la nuit dans tous les établissements assujettis, qu’un travail collectif ou non y soit effectué, leur droit de pénétrer de nuit dans un établissement ne dépendant pas de la nature de l’activité qui y est menée. Or selon l’article L. 197 1°) et 2°) du Code du travail, «les inspecteurs du travail et de la sécurité sociale ont le pouvoir de pénétrer librement, à toute heure du jour, dans les établissements assujettis au contrôle de l’inspection […]» et «la nuit, dans les locaux où il est constant qu’il est effectué un travail collectif». La commission se voit donc contrainte de prier à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que la législation du travail soit mise en conformité avec l’article 12, paragraphe 1 a) de la convention, afin d’assurer que les inspecteurs puissent pénétrer librement dans les établissements assujettis au contrôle de l’inspection, quel que soit le type d’activité qui y est effectué, non seulement de jour, mais également de nuit.

Dans ses précédents commentaires, la commission avait également prié le gouvernement de modifier l’article L. 197 1°) in fine en vertu duquel «le chef d’entreprise ou d’établissement ou son suppléant pourra accompagner, au cours de sa visite, l’inspecteur du travail et de la sécurité sociale», cette disposition faisant obstacle à la liberté d’action dont l’inspecteur doit pouvoir jouir lors de sa visite. Tout en notant les indications du gouvernement selon lesquelles le fait de se faire accompagner lors des visites par l’employeur ou son représentant constitue une faculté offerte par la loi aux inspecteurs et contrôleurs du travail, la commission tient cependant à souligner que la rédaction actuelle de cet article du code offre la possibilité de choisir à l’employeur (ou son suppléant) et non à l’inspecteur. Or c’est à l’inspecteur que doit appartenir la décision de se faire accompagner ou non au cours de sa visite pour pouvoir exercer ses prérogatives, telles que prévues par la convention. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que le Code du travail soit modifié afin que l’inspecteur soit autorisé à décider si l’employeur peut ou non l’accompagner au cours de sa visite et qu’il puisse exercer son droit d’interroger seul le personnel, en vertu de l’article 12 c) i) de la convention, de manière à garantir le respect du principe de confidentialité à l’égard des travailleurs (article 15 c)). Enfin, notant que, selon le gouvernement, la liberté de l’inspecteur du travail implique celle de décider d’aviser l’employeur ou de s’en abstenir lors d’une visite, elle le prie également de veiller à ce qu’il soit donné une base légale à ce droit, tel que défini par l’article 12, paragraphe 2.

Articles 19, 20 et 21. Rapports périodiques et rapport annuel sur les activités des services d’inspection. Le gouvernement souligne à nouveau le manque de moyens de l’administration du travail pour effectuer la collecte et la communication des informations au niveau central et indique qu’aucun rapport annuel sur les activités des services d’inspection n’a pu être élaboré. Se référant à ses commentaires antérieurs, la commission veut croire que les fiches de contrôle servant de support aux visites d’entreprise, évoquées par le gouvernement dans son rapport, permettront de contribuer à établir, au niveau des services régionaux d’inspection, les rapports périodiques de leurs activités et que, conformément à l’article 19, ces rapports seront transmis à l’autorité centrale d’inspection. Elle espère que l’autorité centrale sera par conséquent bientôt en mesure d’élaborer un rapport annuel couvrant l’ensemble du pays et contenant les informations requises par l’article 21, au besoin avec l’assistance technique du BIT, et qu’elle s’inspirera le plus largement possible à cette fin des orientations contenues dans la Partie IV de la recommandation (no 81) sur l’inspection du travail, 1947. La commission prie le gouvernement de tenir le BIT informé de tout développement en ce sens.

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