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Observation (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - Philippines (Ratification: 1960)

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La commission note que le rapport du gouvernement ne contient pas de réponse aux précédents commentaires.

1. Article 1 d) de la convention. Imposition de peines de prison comportant du travail obligatoire comme sanction pour participation à des grèves. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté qu’en cas de grève prévue ou en cours dans un secteur considéré comme indispensable à l’intérêt national le Secrétaire d’Etat au travail et à l’emploi peut exercer sa juridiction sur le conflit et, soit le trancher, soit le soumettre à l’arbitrage obligatoire. De plus, le Président peut déterminer les secteurs indispensables à l’intérêt national et exercer sa juridiction sur un conflit du travail (art. 263 g) du Code du travail, tel que modifié par la loi no 6715). Après une telle saisine ou après soumission à l’arbitrage obligatoire, toute déclaration de grève est interdite (art. 264), et la participation à une grève interdite est passible d’une peine d’emprisonnement (art. 272 a) du Code du travail), laquelle comporte une obligation de travailler conformément l’article 1727 du Code administratif révisé. Le Code pénal révisé prévoit lui aussi des peines d’emprisonnement à l’égard des personnes ayant participé à des grèves illégales (art. 146).

Se référant au paragraphe 123 de son étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, la commission rappelle que l’arbitrage obligatoire, lorsqu’il est assorti de sanctions comportant du travail obligatoire, doit être limité aux services essentiels au sens strict du terme, à savoir ceux dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la santé ou la sécurité des personnes. A ce propos, la commission note que, d’après le compte rendu analytique de la réunion technique de consultation de la Commission de contrôle du Congrès sur le travail et l’emploi (COCLE) tenue le 14 novembre 2002, l’une des recommandations d’amendement du Code du travail tendait à «limiter le pouvoir de saisine du secrétaire d’Etat au Travail en matière de conflits mettant en jeu l’intérêt national aux seuls conflits qui concernent les services essentiels tels que définis par l’OIT». La commission note cependant que plusieurs projets de loi tendant à modifier le Code du travail qui ont été subséquemment présentés au Congrès ont tous été déférés à la Commission de contrôle sans connaître aucune autre suite. On citera notamment: le projet de loi du Parlement no 6517 en date du 22 octobre 2003, qui tend à limiter le pouvoir de saisine du secrétaire d’Etat au Travail et à l’Emploi et du Président des Philippines sur des conflits du travail et celui de soumettre ces conflits à l’arbitrage obligatoire aux seuls «établissements pouvant véritablement être considérés comme assurant des services essentiels, comme les hôpitaux ou les services de l’eau et de l’électricité, établissements dont le non-fonctionnement constituerait une menace pour la vie ou pour la sécurité publique; le projet de loi du Sénat no 1049 présenté au 13e Congrès, le 30 juin 2004, et le projet de loi de la Chambre des députés no 1505, présenté le 19 juillet 2004, qui tendaient l’un et l’autre à limiter ce pouvoir de saisine et celui de soumettre un conflit à un arbitrage obligatoire aux seuls conflits survenant «dans une entreprise assurant des services essentiels, tels que les hôpitaux, les services de l’eau et de l’électricité, les communications et les transports». La commission note que le projet de loi de la Chambre des députés no 3723 présenté le 8 février 2005 tend à abolir le pouvoir de saisine reconnu au secrétaire d’Etat au Travail et à l’Emploi en vertu de l’article 263 g) du Code du travail. Elle note que les projets de loi laissent inchangées les sanctions pénales, y compris les peines d’emprisonnement (avec obligation de travailler, en vertu du Code administratif révisé), qui répriment la participation à des grèves illégales en vertu de l’article 272 a) du Code du travail actuellement en vigueur.

La commission rappelle que le Comité de la liberté syndicale, examinant l’article 263 g) du Code du travail à la lumière des principes de la liberté syndicale, suite aux plaintes déposées contre le gouvernement des Philippines par l’Association des pilotes de l’air des Philippines (cas no 2195) et par l’Association des travailleurs de la Société des automobiles Toyota Philippines (cas no 2252), a souligné que, «pour déterminer les cas dans lesquels une grève pourrait être interdite, le critère à retenir est l’existence d’une menace évidente et imminente pour la vie, la sécurité et la santé dans tout ou partie de la population», et qu’un ordre de reprise du travail intervenant en dehors de telles circonstances est contraire aux principes de la liberté syndicale (Bulletin officiel, vol. LXXXVI, 2003, série B, no 3, paragr. 883). Il a également rappelé, se référant au paragraphe 522 du Recueil de décisions et de principes de 1996, que «le pouvoir de déclarer une grève illégale ne devrait pas appartenir au gouvernement mais à un organe indépendant recueillant la confiance de toutes les parties concernées» (Bulletin officiel, vol. LXXXV, 2002, série B, no 3, paragr. 736). En conséquence, le Comité de la liberté syndicale a vivement incité le gouvernement à modifier l’article 263 g) du Code du travail de manière à le rendre pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale. S’agissant des transports, la commission note que le Comité de la liberté syndicale, se référant aux paragraphes 540 et 545 de son recueil de 1996, a rappelé également dans le cas no 2195 (paragr. 737) que les transports n’ont jamais été considérés d’une manière générale comme constituant des services essentiels au sens strict du terme.

La commission exprime à nouveau le ferme espoir que les mesures nécessaires seront prises par le gouvernement pour modifier le Code du travail en vue de le rendre pleinement conforme à la convention et que le gouvernement sera en mesure de faire état des progrès accomplis dans ce sens.

2. Article 1 a). Imposition de peines de prison comportant du travail obligatoire comme sanction à l’expression d’opinions politiques. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que l’article 142 du Code pénal révisé prévoit qu’une peine de prison peut être infligée aux personnes qui incitent autrui, par des discours, des proclamations, des écrits ou des emblèmes, à des actes constituant une sédition, qui tiennent des propos ou des discours séditieux ou encore qui écrivent, publient ou diffusent des pamphlets injurieux contre le gouvernement. De même, l’article 154(1) prévoit une peine de prison à l’encontre de celui qui, par des moyens tels que l’imprimé, la lithographie ou tout autre support de publication, porte de manière mal intentionnée à la connaissance du public une fausse nouvelle susceptible de troubler l’ordre public ou de porter atteinte aux intérêts ou au crédit de l’Etat.

La commission avait rappelé que la convention interdit le recours au travail forcé ou obligatoire en tant que mesure de coercition ou d’éducation politique, ou comme sanction à l’égard de ceux qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur position idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Elle avait demandé au gouvernement d’indiquer les mesures prises ou envisagées pour assurer qu’aucune peine de prison comportant, conformément à l’article 1727 du Code administratif révisé, l’obligation de travailler, ne soit imposée dans les situations visées par la convention.

La commission avait noté que, dans son rapport de 1999, le gouvernement indiquait qu’une proposition de modification de l’article 1727 du Code administratif révisé avait été présentée. Cependant, le gouvernement déclarait dans son dernier rapport que cet article, qui concerne l’administration des prisons, a pour but de garantir que les détenus assurent leur hygiène et restent occupés à une activité productive tandis qu’ils exécutent leur peine.

Prenant note de cette déclaration, la commission a souhaité attirer l’attention du gouvernement sur les paragraphes 102 à 109 de son étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, où elle a souligné que le travail imposé à des personnes comme conséquence d’une condamnation judiciaire n’aura, dans la plupart des cas, aucun rapport avec l’application de la convention. Par contre, si une personne est, de quelque manière que ce soit, astreinte au travail, y compris le travail en prison, parce qu’elle a ou exprime certaines opinions politiques ou parce qu’elle a manqué à la discipline du travail ou a participé à une grève, cette situation relève alors de la convention.

La commission exprime à nouveau l’espoir que des mesures seront prises dans un proche avenir pour assurer le respect de la convention sur ce point et elle prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur les mesures prises. En attendant la modification de la législation, elle prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur l’application dans la pratique des articles 142 et 154(1) du Code pénal, notamment des statistiques des condamnations prononcées sur les fondements de ces articles et le texte de tout jugement qui serait de nature à en définir ou en illustrer la portée.

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