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Observation (CEACR) - adoptée 2004, publiée 93ème session CIT (2005)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - Bangladesh (Ratification: 2001)

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La commission prend note des premier et second rapports du gouvernement ainsi que de la communication de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) en date du 2 septembre 2002. Se référant aux commentaires qu’elle formule à propos de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, dans la mesure où l’article 3 a) de la convention énonce que les pires formes de travail des enfants comprennent «toutes les formes d’esclavage ou pratiques analogues, telles que la vente et la traite des enfants, la servitude pour dette et le servage ainsi que le travail forcé ou obligatoire», la commission est d’avis que les questions de traite d’enfants et de travail forcé d’enfants employés comme domestiques peuvent être examinées plus spécifiquement sous l’angle de la présente convention. La commission prie le gouvernement de fournir de plus amples informations sur les points suivants.

Article 3 de la convention. Pires formes de travail des enfants. Alinéa a). Vente et traite des enfants. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté qu’une commission législative avait été constituée pour revoir la législation en vigueur et introduire de nouvelles dispositions en vue de protéger les droits des femmes et d’éliminer la traite des femmes et des enfants.

En réponse à l’observation de la commission, le gouvernement indique qu’une loi sur la répression de la violence à l’égard des femmes et des enfants a été adoptée en 2000, et qu’en conséquence la loi de 1995 sur l’oppression des femmes et des enfants a été abrogée. La commission note qu’en vertu de l’article 5, paragraphe 1, de la nouvelle loi quiconque «dans l’intention de se livrer à la prostitution ou à des actes illégaux ou immoraux, introduit dans le pays, vend ou fait la traite d’une femme étrangère, ou encore achète, vend ou cède à loyer ou à d’autres conditions une femme pour que celle-ci soit opprimée, ou garde en sa possession ou sous sa garde une femme dans un autre but de ce genre» commet une infraction. L’article 6, paragraphe 1, de la même loi énonce que quiconque «introduit dans le pays, vend ou fait la traite d’enfants ou encore achète ou vend des enfants à des fins illégales ou immorales, ou encore garde en sa possession ou sous sa garde des enfants à cette fin» commet une infraction. La commission note en outre qu’en vertu de l’article 2, paragraphe k), de la loi susmentionnée, l’«enfant» désigne une personne de moins de 14 ans et le terme «femme» se réfère à toute personne de sexe féminin, sans considération de son âge. La commission en déduit que la vente et la traite de garçons de 14 ans ou plus n’est pas interdite. La commission rappelle au gouvernement qu’en vertu de l’article 3 a) de la convention la vente et la traite des garçons et des filles de moins de 18 ans doit être interdite. Elle rappelle également au gouvernement que, en vertu de l’article 1 de la convention, des mesures immédiates et efficaces doivent être prises pour interdire cette pire forme de travail des enfants. En conséquence, elle prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que la vente et la traite de tous enfants de moins de 18 ans soit interdite.

Article 5. Mécanismes permettant de surveiller l’application des dispositions donnant effet à la convention. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté qu’une unité sur le travail des enfants devait être constituée au sein du ministère du Travail. La commission note que, selon les indications du gouvernement, une unité contre la traite des enfants avait été constituée au sein du ministère de l’Intérieur. Cette unité est chargée de repérer et arrêter les auteurs d’une telle traite et d’assurer immédiatement la sécurité de leurs victimes. Il existe deux autres unités s’occupant de la traite des enfants, l’une est désignée sous le sigle BRD et l’autre correspond à la police judiciaire (CID). La commission souhaiterait que le gouvernement fournisse des informations sur les activités du BRD et du CID, sur le nombre de personnes arrêtées et le nombre d’enfants sauvegardés grâce à l’unité contre la traite des enfants, de même que sur l’interaction entre les différentes unités s’occupant de la traite d’enfants.

Article 6. Programmes d’action tendant àéliminer les pires formes de travail des enfants. Dans sa précédente observation, la commission avait noté que le rapport du Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies (E/CN.4/2001/73/Add.2, 6 février 2001, paragr. 56) faisait état «d’un trafic intense de ce type, principalement à des fins de prostitution forcée, à partir du Bangladesh et, pour l’essentiel, vers l’Inde, le Pakistan et diverses destinations à l’intérieur de ce dernier pays, et de cas de travail en servitude». Le rapport indiquait que des enfants auraient été emmenés au Moyen-Orient pour y travailler comme jockeys de chameau. La commission avait également noté que le gouvernement avait lui-même conscience (document du ministère des Affaires féminines et de l’Enfance de décembre 2000 intitulé«Children in Need of Special Protection») de l’existence d’une traite d’enfants du Bangladesh à destination de l’Inde, du Pakistan et des pays du Golfe persique. Elle avait également noté que le ministère des Affaires féminines et de l’Enfance coopère depuis 2000, avec le concours du BIT/IPEC et de l’UNICEF, à un programme sous-régional de lutte contre la traite des enfants aux fins de leur exploitation sexuelle et économique au Bangladesh, au Népal et à Sri Lanka.

Dans sa communication en date du 2 septembre 2002, la CISL déclare que des femmes et des enfants sont victimes d’un système parlant de traite du Bangladesh à destination de l’Inde, du Pakistan et de pays du Moyen-Orient, où ils sont contraints de travailler comme prostitués, ouvriers ou jockeys de chameau. Dans ce cadre, des jeunes filles sont entraînées dans le travail forcé au moyen de promesses fallacieuses de mariage et sont emmenées dans des villes comme Calcutta, Mumbai et Karachi, où elles sont contraintes à la prostitution. Les garçons, eux, sont plutôt destinés àêtre engagés comme jockeys de chameau aux Emirats arabes unis ou dans d’autres pays du Golfe.

En réponse aux commentaires de la commission, le gouvernement indique qu’il met en place des programmes sans limite de durée tendant à sensibiliser la population (séminaires, conférences, programmes de radio ou de télévision) en vue de prévenir la traite des enfants. Par exemple, en 2001, le Centre des enfants indigènes s’est engagé dans un projet pilote intitulé«Théâtre de sensibilisation des communautés pour la prévention de la traite des enfants». Ce centre touche directement 110 000 personnes dans les provinces de Panchagarh, Thakurgaon et Dinajpur. Le programme sous-régional de lutte contre la traite des enfants aux fins de leur exploitation sexuelle ou économique au Bangladesh, au Népal et à Sri Lanka, initialement prévu pour deux ans, a été reconduit en 2002 et étendu au Pakistan, à la Thaïlande et à l’Indonésie. Avec cette deuxième phase, plusieurs activités doivent être entreprises au Bangladesh: i) création d’une base de données sur la traite; ii) adoption des mesures nécessaires pour dispenser un enseignement non formel à 5 000 enfants; iii) soutien de l’amélioration de la situation économique de près de 300 familles; iv) délivrance et réadaptation de 100 enfants victimes de traite.

La commission constate que, malgré l’adoption d’un programme sous-régional de lutte contre le trafic des enfants, cette question reste préoccupante au Bangladesh. En conséquence, elle prie le gouvernement de redoubler d’efforts en vue d’éliminer la traite d’enfants aux fins de leur exploitation sexuelle et économique. Elle le prie aussi de fournir des informations détaillées sur les mesures concrètes s’inscrivant dans la deuxième phase du programme sous-régional susmentionné de lutte contre la traite d’enfants, et sur les résultats obtenus.

Article 7, paragraphe 1. Sanctions. La commission avait noté précédemment que, selon le Rapporteur spécial à la Commission des droits de l’homme des Nations Unies (document précité, paragr. 63), «bien que la loi prévoie des sanctions rigoureuses pour réprimer la traite, peu d’auteurs sont punis».

La commission note qu’en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la loi sur la répression de la violence à l’égard des femmes et des enfants quiconque fait venir de l’étranger, vend ou fait la traite à l’étranger d’un enfant de moins de 14 ans, achète ou vend un enfant de moins de 14 ans à des fins illégales ou immorales, ou encore le détient ou en assure la garde à de telles fins, se rend coupable de crime et encourt la peine de mort, la prison à vie et une peine d’amende. Si la victime de cette traite à des fins d’exploitation sexuelle ou économique est une personne de sexe féminin (quel que soit son âge), l’auteur encourt la peine de mort, la prison à vie ou dix à vingt ans de réclusion et une amende (art. 5, paragr. 1, de la loi sur la répression de la violence à l’égard des femmes et des enfants). L’article 6, paragraphe 1, de la même loi prévoit que quiconque se livre à la traite d’enfants de moins de 14 ans à des fins illégales ou immorales encourt la peine de mort ou la réclusion à perpétuité et une peine d’amende. La commission prie le gouvernement de fournir des statistiques sur les poursuites, les condamnations concernant la traite d’enfants et les sanctions infligées à ce titre.

Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces prises dans un délai déterminé. Alinéa d). Identifier les enfants particulièrement exposés à des risques et entrer en contact direct avec euxEnfants travaillant comme domestiques. Dans ses précédents commentaires, la commission avait pris note du fait que, d’après la Confédération mondiale du travail, des enfants employés comme domestiques travaillent dans des conditions assimilables à de la servitude. Elle avait également noté que, selon le «Rapport national sur le suivi du Sommet mondial», établi par le ministère des Affaires féminines et de l’Enfance en décembre 2000, des enfants et des adolescents sont exploités dans le pays et, dans la seule ville de Dacca, on estime à 300 000 le nombre d’enfants domestiques.

En réponse aux commentaires de la Confédération mondiale du travail, le gouvernement déclare que le travail forcé est interdit par l’article 34 de la Constitution et que les enfants domestiques sont généralement bien traités. Le gouvernement indique également que le travail des enfants comme domestiques est une pratique ancienne, qui perdure en raison de la situation économique et sociale générale du pays. Il affirme avec force que les enfants travaillant comme domestiques ne sont pas soumis à du travail forcé ou en servitude. Il reconnaît que cette pratique a, outre des avantages, des inconvénients. Ainsi, parmi les aspects négatifs, il est rare que les enfants travaillant comme domestiques aient accès à l’éducation. Le gouvernement ajoute qu’il arrive que des enfants travaillant comme domestiques ne touchent pas leurs gages, soient mal nourris ou encore mal vêtus, et aussi que, dans des cas exceptionnels, ils soient victimes de sévices sexuels ou de maltraitance. Toujours selon le gouvernement, l’un des avantages du travail domestique des enfants est d’empêcher que ces enfants ne soient occupés à des travaux plus dangereux ou ne soient victimes d’une traite ou d’une exploitation sexuelle. Le gouvernement indique en outre qu’un certain nombre de programmes sont en cours: un projet qui vise l’éradication du travail dangereux accompli par des enfants; un projet intitulé«Equipe d’intervention dans le secteur informel pour la prévention et l’élimination du travail des enfants en milieu urbain»; un projet sur la prévention et l’élimination des pires formes de travail des enfants dans certains secteurs, sous le parrainage de US/DOL; un Programme assorti de délais (PAD) tendant à l’élimination des pires formes de travail des enfants conclu en juin 2004 par le gouvernement et le BIT/IPEC; précisant que tous ces programmes tendent à l’élimination des pires formes de travail des enfants. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les résultats des projets de coopération technique susmentionnés en termes de protection des enfants de moins de 18 ans employés comme domestiques contre le travail dangereux, et associant la réadaptation et la réinsertion sociale de ces enfants.

Article 8. Coopération internationale. La commission avait précédemment noté, selon le Rapporteur spécial à la Commission des droits de l’homme des Nations Unies, que la facilité de franchir illégalement la frontière entre le Bangladesh et l’Inde, surtout dans les environs de Jessore et de Benapole, favorise la traite des enfants (document E/CN.4/2001/73/Add.2, 6 fév. 2001, paragr. 56). Selon le même rapport (paragr. 14), on ferait franchir clandestinement la frontière avec l’Inde à 10 000 ou 15 000 jeunes filles et femmes chaque année. La commission prie en conséquence le gouvernement de fournir des informations sur les mesures de coopération conclues entre le Bangladesh et l’Inde, ou avec d’autres pays réputés être la destination d’enfants bangladais victimes d’une traite, en vue d’éradiquer cette traite des enfants.

La commission adresse, par ailleurs, une demande directe au gouvernement sur certains autres points précis.

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