ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil > Profils par pays >  > Commentaires

Observation (CEACR) - adoptée 1996, publiée 85ème session CIT (1997)

Convention (n° 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952 - Allemagne (Ratification: 1958)

Autre commentaire sur C102

Observation
  1. 1996
  2. 1995
  3. 1993
  4. 1991
  5. 1989
Demande directe
  1. 2017
  2. 2006
  3. 2005
  4. 1996
  5. 1993
Réponses reçues aux questions soulevées dans une demande directe qui ne donnent pas lieu à d’autres commentaires
  1. 2011

Afficher en : Anglais - EspagnolTout voir

La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement.

Partie XIII (Dispositions communes), article 69 i) de la convention, concernant la suspension de la prestation de chômage. Depuis un certain nombre d'années, suite aux observations formulées par la Confédération des syndicats allemands (DGB), la commission examine la question de savoir si l'article 116 de la loi sur la promotion de l'emploi, dans sa teneur modifiée en 1986, est compatible avec l'article 69 i).

L'article 116, paragraphe 3, de la loi fédérale sur la promotion de l'emploi, tel que modifié, permet la suspension des allocations de chômage dues aux travailleurs qui ont perdu leur emploi en raison d'un conflit du travail, mais qui n'y ont pas participé: a) lorsque l'entreprise dans laquelle les intéressés étaient employés relève du champ d'application territorial et professionnel de la convention collective qui fait l'objet du conflit; et b) lorsque l'entreprise en question ne relève pas du champ d'application territorial de la convention collective mais qu'elle appartient au secteur professionnel couvert par celle-ci. Dans ce dernier cas, la suspension des prestations n'intervient que si une même revendication - mais pas nécessairement identique - quant à la nature et à la portée, à la revendication principale, faisant l'objet du conflit a été formulée et si, selon toute probabilité, les résultats obtenus à la suite de ce conflit vont être repris "dans une mesure essentielle" par la convention collective qui ne fait pas l'objet d'un conflit mais qui est applicable dans la zone territoriale de l'entreprise. La Commission pour la neutralité, constituée de représentants d'employeurs et de travailleurs et du président de l'Institut fédéral du travail, détermine si les conditions susmentionnées pour la suspension des prestations en vertu de l'article 116 sont remplies.

Dans ses précédents commentaires, la commission avait souligné l'importance de l'application, sur le plan pratique, de la modification de l'article 116 de la loi fédérale pour l'évaluation de la conformité avec l'article 69 i) de la convention, et avait demandé copie de toutes décisions judiciaires pertinentes.

En décembre 1994, la DGB avait soumis une communication concernant le jugement rendu le 4 octobre 1994 par la Cour sociale fédérale, qui confirmait une décision adoptée par la Commission pour la neutralité sur la plupart des aspects et avait estimé que, compte tenu des circonstances de l'espèce, les exigences prévues à l'article 116 (3) de la loi sur la promotion de l'emploi étaient satisfaites, pour refuser une prestation de chômage en cas d'arrêt de travail dû à la grève dans d'autres régions géographiques. La DGB allègue que cette décision contrevient à l'article 69 i) et constitue une violation du droit de grève.

En réponse aux commentaires de la DGB, le gouvernement fait pleinement siennes les conclusions de la Cour sociale fédérale, à savoir que l'article 116 de ladite loi est conforme à l'article 69 i) et compatible avec le principe selon lequel l'Etat ne doit pas intervenir dans un conflit du travail en accordant des prestations aux travailleurs suspendus qui profiteront probablement des résultats obtenus par les autres travailleurs en grève. D'après le gouvernement, il y aurait ingérence si l'Etat devait assumer le risque de perte de gains pour les travailleurs qui bénéficieront probablement aussi des résultats obtenus par les autres travailleurs en grève bien qu'ils ne soient pas directement impliqués dans leur action revendicative.

La commission a reçu copie des décisions de la Commission pour la neutralité (1er juillet 1993), de la Cour sociale fédérale (publiée le 4 octobre 1994; BSGE, A2: 7Kl Ar 93) et de la Cour constitutionnelle (BVG, 14 avril 1995), concernant l'article 116 de la loi fédérale sur la promotion de l'emploi, dans sa teneur modifiée en 1986. La commission a examiné ces décisions. Elle note que, selon la Cour sociale fédérale et la Cour constitutionnelle, l'article 116 3) (2) exige que la Commission pour la neutralité établisse les faits suivants: 1) que les travailleurs affectés par l'arrêt de travail mais qui ne sont pas impliqués dans le mouvement de grève dans une autre région géographique doivent avoir formulé des revendications concernant leurs conventions collectives et être en train de les affirmer; 2) que la principale revendication qu'ils ont formulée ou qu'ils entendent formuler est "la même quant à la nature et à la portée" que la revendication principale formulée par les travailleurs en grève; et 3) que "selon toute probabilité" la série de revendications sera, dans une mesure essentielle, prise en compte dans l'autre. Il faut que ces trois éléments soient réunis pendant toute la durée du déni de prestations au titre de l'article 116 3) (2); un changement de circonstances entraînant l'élimination d'un quelconque de ces éléments mettra automatiquement un terme à l'application de la décision de la Commission pour la neutralité sur la base de laquelle le Bureau de l'emploi se prononce sur les demandes individuelles de prestations en cas d'arrêt de travail dans le cadre d'un conflit professionnel. La Cour sociale fédérale a considéré que, dans l'affaire dont elle était saisie, ces trois éléments étaient clairement réunis simultanément pendant une période limitée couverte par l'arrêt de travail, et a fourni des éléments corroborant la corrélation étroite qui existait ces dernières années, sur le plan des salaires et des prestations au titre de la formation pour le même secteur de salaire, entre les zones géographiques engagées pratiquement simultanément dans le processus de négociation collective de mai 1993. La Cour sociale fédérale a estimé comme non pertinent le fait que, dans cette affaire, l'action revendicative avait été menée en réaction au retrait des employeurs de la convention collective de 1991.

La commission prend note en particulier des considérants de la Cour sociale fédérale selon lesquels la principale revendication dans une grève est celle pour laquelle le syndicat mobilise ses membres en vue d'une action revendicative et qui est à la base de ce mouvement. Les exigences principales de chaque secteur géographique doivent être les mêmes quant à la nature (c'est-à-dire l'objectif) et quant à la portée (c'est-à-dire l'étendue), sans être nécessairement identiques: selon la Cour sociale fédérale, l'intention législative était d'indiquer que le terme "même" n'implique pas que les revendications soient tout à fait équivalentes dans les moindres détails; il convient cependant que le terme "même" soit examiné dans chaque situation, de manière à déterminer l'importance économique de la revendication. La Cour sociale fédérale a insisté sur la nécessité de donner du terme "même" une interprétation stricte: "la revendication formulée et les principales exigences liées à la grève doivent être si rapprochées qu'elles correspondent presque intégralement". Bien que la Cour sociale fédérale a estimé que les différences quant à la nature de l'accord proposé (niveau d'entreprise, niveau sectoriel, etc.) n'avaient aucune incidence sur la détermination de la similarité des revendications, elle a souligné que de telles différences devaient être dûment analysées dans le cadre de l'évaluation des probabilités.

Enfin, selon la Cour sociale fédérale, la Commission pour la neutralité n'a aucune marge de manoeuvre ni aucune prérogative d'évaluation lorsqu'elle statue sur la question de savoir si les résultats obtenus à la suite du conflit propre à un secteur seront probablement transférés à l'autre; et ses prévisions sont soumises à un contrôle judiciaire. Les prévisions doivent être à l'épreuve d'une analyse rigoureuse, et les conclusions doivent apparaître hautement probables sur la base d'informations et de données d'expérience spécifiques. La Cour constitutionnelle a globalement confirmé le jugement rendu par la Cour sociale fédérale et elle a considéré que l'article 116 était compatible avec la Constitution allemande, compte tenu des circonstances de l'espèce.

La commission rappelle que, dans ses observations antérieures, notamment dans l'observation qu'elle avait formulée en 1965 à l'intention de l'Allemagne, elle avait examiné en profondeur le sens de l'expression "en raison directe d'un arrêt de travail" utilisée à l'article 69 i). Ce libellé vise à distinguer entre les travailleurs qui sont peu ou d'aucune manière intéressés par les résultats obtenus à la suite d'un conflit professionnel et qui, par conséquent, ne devraient pas avoir à supporter les risques d'une telle action, et ceux qui ont un intérêt majeur dans les résultats d'un tel conflit et qui, par conséquent, sont plus raisonnablement susceptibles d'en supporter les conséquences au même titre que les travailleurs en grève. Comme la commission l'avait indiqué dans ses précédents commentaires, la question clé est de savoir si le conflit professionnel est susceptible d'avoir des incidences sur les conditions de travail des requérants. A cet égard, elle considère que la norme "selon toute probabilité", énoncée à l'article 116 3) (2) b), distingue de manière adéquate entre travailleurs intéressés et travailleurs non intéressés. La commission estime également que le fait de déterminer si les revendications sont "les mêmes quant à la nature et à la portée" est une question centrale dans l'évaluation de la conformité de l'article 116 de la loi fédérale susvisée avec l'article 69 i) de la convention. La commission est consciente que l'amendement de l'article 116, paragraphe 3, risque d'avoir des effets négatifs sur le droit aux allocations de chômage pendant les actions revendicatives, mais il ressort de la décision de la Cour sociale fédérale que la suspension de prestations dans ce cas spécifique n'était pas incompatible avec les dispositions de la convention. A cet égard, la commission tient à rappeler la déclaration de la Cour sociale fédérale, selon laquelle le terme "même" doit être déterminé dans chaque cas particulier, et elle souhaiterait être informée de tous jugements rendus à l'avenir sur l'article 116.

© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer