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Observation (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

Pologne

Convention (n° 81) sur l'inspection du travail, 1947 (Ratification: 1995)
Convention (n° 129) sur l'inspection du travail (agriculture), 1969 (Ratification: 1995)

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Afin de fournir une vue d’ensemble des questions relatives à l’application des conventions ratifiées en matière d’inspection du travail, la commission estime qu’il convient d’examiner les conventions nos 81 (inspection du travail) et 129 (inspection du travail dans l’agriculture) dans un même commentaire.
Article 3, paragraphes 1 et 2, de la convention no 81, et article 6, paragraphes 1 et 3, de la convention no 129. Activités de l’inspection du travail pour la protection des travailleurs étrangers en situation irrégulière et fonctions additionnelles confiées aux inspecteurs du travail. La commission note que le gouvernement indique, en réponse à sa précédente demande, que les gardes-frontière reprennent progressivement les contrôles dans le domaine de la légalité de l’emploi d’étrangers. Le gouvernement précise qu’après l’adoption de la Politique polonaise sur la migration, en 2014, l’emphase de la coopération entre l’Inspection nationale du travail et les gardes-frontière est en train de passer du contrôle en commun de l’emploi illégal à l’échange d’expériences, de bonnes pratiques et de l’interprétation de la réglementation. Le gouvernement déclare que cela permettra à l’Inspection nationale du travail de se concentrer davantage sur des questions en lien direct avec la protection des droits des travailleurs. Suivant les statistiques contenues dans le rapport du gouvernement et le rapport de 2015 sur l’inspection déposé en 2016, cette évolution a eu pour résultat que les inspections du travail se concentrent davantage sur le contrôle de la légalité de l’emploi des ressortissants polonais: près de 23 000 inspections sur un total de 90 000 effectuées par l’Inspection nationale du travail en 2015 portaient sur la légalité de l’emploi et autre travail rémunéré des ressortissants polonais. Cela a permis de détecter des emplois illégaux de quelque 21 000 travailleurs, dont plus de 13 000 présumés entrepreneurs indépendants. La commission se félicite de l’indication suivant laquelle plus de 8 000 de ces travailleurs ont obtenu des contrats d’emploi grâce aux interventions de l’inspection du travail.
Toutefois, la commission note que le gouvernement indique que les contrôles effectués par l’inspection du travail sur les ressortissants étrangers en séjour irrégulier sur le territoire sont faits en coopération avec les gardes-frontière, ou que les résultats des inspections sont notifiés aux gardes-frontière qui imposent alors des sanctions. Le gouvernement indique que l’Inspection nationale du travail se concentre sur le respect des obligations des employeurs s’agissant des droits statutaires des seuls travailleurs polonais trouvés en situation irrégulière, peu de contrôles visant les travailleurs étrangers en situation similaire, ce qui résulte du nouveau partage des responsabilités entre les gardes-frontière et l’Inspection nationale du travail. Le rapport annuel de 2015 de l’inspection du travail indique que, cette année-là, 3 000 inspections ont porté sur la légalité de l’emploi d’étrangers, un tiers ayant révélé des infractions. Le gouvernement déclare que l’Inspection nationale du travail a détecté un nombre relativement faible de cas concernant des travailleurs étrangers en séjour irrégulier en Pologne: seuls 30 étrangers ont été détectés dans neuf établissements en 2015. Pour la période 2013-2015, la détection d’étrangers dépourvus de permis de travail s’est traduite par deux comparutions devant les tribunaux, avec quatre amendes pénales et onze mesures éducatives. Le gouvernement indique que l’Inspection nationale du travail n’a pas connaissance de cas dans lesquels des travailleurs étrangers en séjour irrégulier en Pologne auraient obtenu des droits statutaires en matière d’emploi, comme par exemple des salaires et prestations de sécurité sociale. La commission rappelle que, dans son étude d’ensemble de 2006 sur l’inspection du travail, elle indiquait au paragraphe 77 que ni la convention no 81 ni la convention no 129 ne contiennent de disposition suggérant l’exclusion de quelque travailleur que ce soit de la protection de l’inspection du travail en raison du caractère irrégulier de sa relation de travail. Elle rappelle aussi son observation sur l’application de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, dans laquelle elle priait le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de permettre aux travailleurs migrants de s’adresser aux autorités compétentes afin de demander réparation en cas de violation de leurs droits ou d’abus, sans crainte de représailles. Prenant note des efforts du gouvernement pour libérer les services d’inspection du travail concernant le contrôle de l’emploi illégal de travailleurs étrangers en le transférant aux gardes-frontière, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur la manière dont les services de l’inspection du travail garantissent le respect par les employeurs de leurs obligations s’agissant des droits légaux des travailleurs étrangers, y compris de ceux en situation irrégulière, découlant de leur travail actuel et passé (tels que les salaires et les prestations de sécurité sociale).
Articles 5 a), 17 et 18 de la convention no 81, et articles 12, 22 et 23 de la convention no 129. Sanctions et mécanismes d’application efficaces. Coopération entre les services d’inspection et les organes judiciaires. La commission prend note des informations, fournies par le gouvernement en réponse à ses précédents commentaires, sur le nombre de cas de suspicion de délit signalés par les inspecteurs du travail au procureur public. Elle note cependant que presque 75 pour cent des signalements concernant des suspicions de délits pénaux n’ont pas donné lieu à des poursuites. Le gouvernement indique que les inspecteurs du travail peuvent déposer plainte ou adresser des demandes de justification du refus du procureur public d’entamer une procédure et que les inspecteurs ont déposé 131 plaintes en 2015. Notant que la plupart des cas déférés au procureur public ne donnent pas lieu à des procédures, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées afin de stimuler une coopération efficace entre les services de l’inspection du travail et le système judiciaire. Elle le prie également de fournir des informations sur les raisons pour lesquelles le procureur public s’abstient de poursuivre, suspend ou abandonne certains cas et d’indiquer si le procureur public donne suite ou sollicite un complément d’information des inspecteurs avant sa décision définitive de ne pas poursuivre. Elle prie également le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour faire en sorte que les inspecteurs du travail reçoivent une formation appropriée sur la préparation des signalements au procureur public et soient systématiquement informés des suites données aux cas signalés.
Article 2, paragraphe 1, article 5 a), article 12, paragraphe 1, article 16 de la convention no 81, et articles 4, 12, article 16, paragraphe 1, article 21 de la convention no 129. Couverture des lieux de travail assujettis à l’inspection. Restrictions à la collaboration entre les agents de l’inspection du travail et d’autres institutions publiques et à la liberté d’accès des inspecteurs aux lieux de travail. La commission avait pris note précédemment des indications du gouvernement concernant les restrictions énoncées au chapitre 5 de la loi sur la liberté de l’activité économique qui prévoient que les inspections nécessitent une autorisation qui indique le sujet du contrôle, dont les limites ne peuvent être dépassées pendant l’inspection. La commission prend dûment note que la loi sur la liberté de l’activité économique a été modifiée en 2015 pour prescrire que certaines restrictions ne seront pas d’application si des accords internationaux ratifiés en disposent autrement. Toutefois, elle note avec préoccupation que le gouvernement indique que l’application des dispositions de la loi sur la liberté de l’activité économique à l’Inspection nationale du travail pose des difficultés diverses dans la pratique.
La commission prend dûment note du fait que l’obligation inscrite à l’article 79-2(1) de la loi sur la liberté de l’activité économique concernant un préavis avant inspection ne s’applique pas à l’inspection du travail à la lumière des obligations découlant des conventions nos 81 et 129. Elle note toutefois que l’article 79(a) de la loi sur la liberté de l’activité économique impose aux inspecteurs du travail d’obtenir et de présenter une autorisation de l’inspection du travail au chef d’entreprise ou à son représentant ou sa représentante, sauf dans les cas graves pour lesquels l’autorisation peut être présentée dans les trois jours suivant le début de l’inspection. Le gouvernement déclare que l’obtention de cette autorisation peut rallonger la durée des activités, coûteuses en temps, qui ont lieu avant l’inspection et freiner la mobilité des inspecteurs du travail. Elle pose des difficultés d’ordre pratique lorsque plus de deux chefs d’entreprise ou sous-traitants sont présents sur un même lieu de travail et rend souvent difficile la réalisation de contrôles sans l’accord du chef d’entreprise. Le gouvernement indique aussi que la loi sur la liberté de l’activité économique empêche les inspecteurs du travail de mener des inspections conjointes avec d’autres organismes publics chargés de contrôler les conditions de travail (tels que l’Inspection sanitaire de l’Etat et l’Inspection du transport routier). Il indique en outre que la loi sur la liberté de l’activité économique impose d’effectuer les inspections au siège de l’entreprise ou sur le lieu de son activité commerciale, ce qui limite la possibilité de contrôler les chefs d’entreprise qui ont leurs activités économiques à leur domicile privé. La commission prend également note des informations détaillées fournies par le gouvernement à propos de plusieurs décisions de juridictions administratives portant sur l’application de la loi sur la liberté de l’activité économique à l’Inspection nationale du travail et prend note de l’indication donnée par le gouvernement suivant laquelle il existe un risque que les éléments de preuve rassemblés à la suite d’inspections puissent être considérés constituer une violation de la loi sur la liberté de l’activité économique. La commission prie instamment le gouvernement de prendre des mesures pour remédier aux entraves à l’action de l’inspection du travail en rapport avec l’autorisation préalable, l’inspection de lieux de travail où exercent plusieurs employeurs et la conduite d’inspections conjointes, conformément aux articles 12 et 16 de la convention no 81, et aux articles 16 et 21 de la convention no 129. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard et de continuer à fournir des informations sur l’impact de la loi sur la liberté de l’activité économique sur l’action de l’inspection du travail.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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