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Informe definitivo - Informe núm. 403, Junio 2023

Caso núm. 3390 (Ucrania) - Fecha de presentación de la queja:: 02-JUL-20 - Cerrado

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Allégations: Les organisations plaignantes allèguent que, s’il est adopté, le projet de loi de l’Ukraine sur les amendements à certains actes législatifs de l’Ukraine concernant les activités syndicales (no 2681) violera la liberté syndicale et les droits de négociation collective en Ukraine

  1. 534. La plainte figure dans une communication datée du 2 juillet 2020 présentée par la Fédération des syndicats d’Ukraine (FPU) et la Confédération des syndicats indépendants d’Ukraine (KVPU). Dans une communication datée du 27 janvier 2022, la FPU a fourni des informations complémentaires.
  2. 535. Le gouvernement de l’Ukraine a transmis ses observations dans des communications datées des 30 octobre 2020 et 24 avril 2023.
  3. 536. L’Ukraine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 537. Dans leur communication datée du 2 juillet 2020, les organisations plaignantes – la FPU et la KVPU – allèguent que, s’il est adopté, le projet de loi «sur les amendements à certains actes législatifs de l’Ukraine (concernant certaines questions relatives aux activités syndicales)» (no 2681), soumis par un groupe de parlementaires à l’examen de la Verkhovna Rada, violera la liberté syndicale et les droits de négociation collective en Ukraine. Les organisations plaignantes allèguent que les auteurs du projet de loi ont affirmé, d’une part, que le cadre législatif dans le domaine des droits syndicaux est dépassé et doit être réformé pour renforcer le rôle du travailleur individuel et, d’autre part, que le développement des technologies numériques et la disponibilité des bases de données législatives, l’accessibilité des registres juridiques et un large réseau d’avocats et de juristes permettent une protection et un rétablissement rapides et efficaces des droits des travailleurs par les travailleurs eux mêmes.
  2. 538. Les organisations plaignantes expliquent que le projet de loi vise à modifier la loi sur les syndicats, leurs droits et leurs garanties d’activité (loi sur les syndicats) de 1999 et le Code du travail, et détaillent les modifications proposées comme suit.
  3. 539. Le projet de loi (paragraphe 1(1) et paragraphe 2(7)) propose d’ajouter de nouveaux articles au Code du travail (article 247 1) et à la loi sur les syndicats (article 16 1) et de modifier l’article 15 de la loi sur les syndicats afin de rendre obligatoire la création de commissions de contrôle par les syndicats. À cet égard, les organisations plaignantes expliquent que pour l’heure, les syndicats établissent des commissions de contrôle et d’audit conformément aux obligations énoncées dans leurs statuts respectifs. Ces commissions sont composées de membres du syndicat et ne sont pas responsables devant la direction du syndicat, ce qui garantit un contrôle total et indépendant des organes élus par les membres du syndicat. Les organisations plaignantes considèrent que les auteurs du projet de loi proposent d’établir des commissions de contrôle supplémentaires et doubles qui seraient composées de membres des syndicats et, si nécessaire, impliqueraient également, sur une base volontaire, des membres non syndiqués. Selon les organisations plaignantes, ces commissions auront le droit de contrôler: 1) la conformité des activités des organes élus des syndicats avec les exigences de la législation, des statuts et des conventions collectives; 2) le fonctionnement des organes élus des syndicats; et 3) l’utilisation des fonds syndicaux. Elles auront également le droit de gérer tout conflit au sein d’un syndicat donné. Les organisations plaignantes soutiennent que ces commissions de contrôle sont destinées à remplacer d’autres organes qui ont été constitués par les syndicats conformément à leurs statuts. La FPU et la KVPU considèrent ainsi que le projet de loi impose aux syndicats des procédures qui concernent exclusivement les activités internes des syndicats, s’immisçant ainsi directement dans les affaires internes des syndicats. Les organisations plaignantes soulignent que les spécialistes du Bureau central des experts scientifiques de la Verkhovna Rada ont proposé de supprimer le projet de nouvel article 247 1 sur les commissions de contrôle car le Code du travail régit les relations professionnelles alors que cette question concerne l’organisation interne des syndicats.
  4. 540. Les organisations plaignantes considèrent également que l’amendement proposé à l’article 36 de la loi sur les syndicats (au paragraphe 2(14) du projet de loi) imposant aux organes syndicaux élus l’obligation de rendre compte, dans les délais imposés, aux membres du syndicat primaire est déjà régi par les statuts du syndicat et contrevient aux exigences de l’article 3 de la convention no 87, car ces questions devraient être régies exclusivement par les statuts du syndicat.
  5. 541. En outre, de l’avis des organisations plaignantes, les amendements apportés en vertu du paragraphe 2(1) du projet de loi à l’article 1 de la loi sur les syndicats, qui limitent la création d’organisations syndicales primaires dans les établissements d’enseignement, contreviennent aux articles 2 et 3 de la convention no 87. Ils considèrent en outre que les amendements au même article qui limiteraient à deux le nombre de syndicats pouvant être établis dans une entreprise, une institution ou une organisation restreignent le droit à la liberté syndicale. La FPU et la KVPU considèrent que lorsqu’il existe déjà deux syndicats dans une entreprise, l’amendement, s’il était adopté, serait discriminatoire à l’égard des travailleurs qui préfèrent créer une troisième organisation syndicale. En outre, selon les organisations plaignantes, le projet de loi introduit une interdiction de créer des syndicats primaires dans les organisations/entreprises employant moins de dix travailleurs, ce qui, en pratique, aboutirait à interdire l’activité syndicale et la négociation collective.
  6. 542. Les organisations plaignantes soutiennent également que le paragraphe 2(2) du projet de loi, qui modifie l’article 7 de la loi sur les syndicats en excluant la restriction du droit des travailleurs à la double affiliation syndicale, que les syndicats peuvent actuellement inscrire dans leurs statuts, constitue une violation de la liberté syndicale.
  7. 543. Les organisations plaignantes indiquent également que l’amendement proposé à l’article 11 de la loi sur les syndicats, qui vise à porter à trois le nombre de syndicats primaires à partir d’un syndicat local, a été précédemment reconnu par la Cour constitutionnelle comme étant incompatible avec la partie 1 de l’article 36 de la Constitution de l’Ukraine.
  8. 544. Les organisations plaignantes considèrent que les amendements proposés à l’article 249 du Code du travail et à l’article 42 (3) de la loi sur les syndicats privent les travailleurs du droit de transférer, sur demande écrite soumise à leur employeur, une partie de leur salaire à titre de cotisation syndicale. Les organisations plaignantes expliquent à cet égard que les données comptables sur les cotisations sont généralement utilisées pour déterminer le nombre de membres d’un syndicat à des fins de négociation collective et allèguent que, malgré l’obligation actuelle de transférer les cotisations syndicales, il n’est pas rare que l’employeur s’y oppose par tous les moyens possibles. C’est pourquoi, selon eux, le maintien de l’obligation de transfert des cotisations par la loi est un levier supplémentaire pour assurer la stabilité des activités syndicales et favoriser un dialogue social efficace au niveau local. La FPU et la KVPU considèrent en outre que les amendements proposés aux articles 14 et 15 de la loi sur les syndicats, qui obligent les syndicats à fixer dans leurs statuts le montant des cotisations syndicales et la procédure de leur transfert, violent les droits syndicaux.
  9. 545. Les organisations plaignantes considèrent également comme discriminatoire la proposition d’amendement suivante à l’article 20 de la loi sur les syndicats: «Lorsqu’un syndicat comprend des personnes qui sont membres de la direction de l’entreprise, de l’institution ou de l’organisation, ce syndicat ne peut pas agir en tant que représentant des travailleurs dans les négociations collectives. Il est interdit aux personnes représentant les employeurs de négocier et de conclure des conventions collectives au nom des travailleurs». Elles soulignent à cet égard qu’en l’absence de définition du terme «direction» dans la législation en vigueur, il est impossible de déterminer qui appartient à la direction; il ne ressort donc pas clairement si le terme inclut uniquement le chef de l’entité juridique ou d’autres travailleurs occupant le poste de chef adjoint, ainsi que les chefs et les adjoints des différentes divisions de cette entité. Le projet de loi, s’il était adopté, non seulement priverait le personnel de direction du droit de choisir librement le syndicat auquel il souhaite adhérer, mais priverait également l’ensemble du personnel de l’entité en question du droit de négocier collectivement.
  10. 546. Les organisations plaignantes considèrent en outre que les amendements proposés à l’article 251 du Code du travail et aux articles 28 et 45 de la loi sur les syndicats limitent le droit des syndicats à recevoir les informations nécessaires pour établir et justifier leur position pendant la négociation collective et sont contraires à l’article 11 de la convention no 87.
  11. 547. Les organisations plaignantes considèrent également que les paragraphes 1(7) et 2(17) du projet de loi modifiant l’article 252 du Code du travail et l’article 41 de la loi sur les syndicats privent les travailleurs élus aux organes syndicaux de garanties supplémentaires dans les procédures disciplinaires à leur encontre et permettent aux membres des organes syndicaux élus d’être licenciés sans l’accord d’un organe syndical supérieur. La FPU et la KVPU font valoir que ces amendements conduiraient à des licenciements injustifiés de ces travailleurs et à des persécutions pour activité syndicale même après la fin de leur mandat.
  12. 548. Les organisations plaignantes considèrent en outre qu’il est inadmissible de retirer (en vertu du paragraphe 1 (2) du projet de loi) le droit d’un organe syndical élu d’exiger le licenciement du chef d’entreprise, comme le prévoient actuellement l’article 247 (9) du Code du travail et l’article 33 de la loi sur les syndicats, s’il viole la législation du travail, ne respecte pas les dispositions d’une convention collective ou manque de conclure une telle convention. Selon les organisations plaignantes, les garanties existantes permettent aux syndicats d’influencer les employeurs peu scrupuleux qui ne respectent pas les droits des travailleurs, d’autant plus qu’il n’existe pas en Ukraine de mécanisme permettant s’associer les travailleurs à la gestion de l’entreprise. Les organisations plaignantes soulignent qu’il n’y a pas d’abus de la part des syndicats dans l’exercice de ce droit, puisqu’en dernier ressort, les tribunaux décident de la légalité des demandes des syndicats et évaluent les actions des employeurs.
  13. 549. Les organisations plaignantes allèguent en outre que, s’il est adopté, le projet de loi privera les syndicats de certaines fonctions sociales, notamment en ce qui concerne le droit de représenter les assurés dans le système d’assurance sociale obligatoire de l’État (paragraphe 1(2) du projet de loi en ce qui concerne l’article 247 du Code du travail et l’article 38 de la loi sur les syndicats); le droit des syndicats d’exiger et d’obtenir de l’employeur les documents pertinents, les informations concernant les conditions de travail, la mise en œuvre des conventions collectives et le respect de la législation du travail; le droit de vérifier les états de paie et les calculs de l’assurance sociale de l’État (article 248 du Code du travail et article 40 de la loi sur les syndicats); et le droit de recevoir des employeurs des contributions d’au moins 0,3 pour cent pour les services culturels, physiques et de santé, ainsi que d’autres financements au titre des conventions collectives pour les activités culturelles, physiques et d’amélioration de la santé (article 250 du Code du travail). Les organisations plaignantes considèrent en outre que l’amendement à l’article 13 de la loi sur les syndicats visant à supprimer l’assistance de l’État aux syndicats pour l’établissement de partenariats commerciaux avec les employeurs et leurs associations, ainsi que pour la promotion de la formation du personnel syndical, ne satisfait pas aux exigences de l’article 3 de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958.
  14. 550. Les organisations plaignantes allèguent également que la réduction du congé d’activité syndicale rémunéré de six à trois jours civils pour les travailleurs qui sont des dirigeants syndicaux élus peut conduire dans la pratique à ce que les employeurs n’accordent qu’un jour de congé aux militants syndicaux (amendement proposé à l’article 252 du Code du travail et à l’article 41 de la loi sur les syndicats).
  15. 551. La FPU et la KVPU affirment également que les amendements proposés aux articles 21, 22, 24 et 28 de la loi sur les syndicats privent les syndicats de leur droit: de participer à l’examen des projets de loi régissant les relations professionnelles, sociales et économiques; d’être associés à l’examen de leurs propositions par les organismes gestionnaires et les organes du gouvernement local, ainsi que par les employeurs et les autres associations de citoyens; de recevoir gratuitement des informations sur les questions affectant les droits et les intérêts professionnels et socio économiques de leurs membres, ainsi que des informations sur les activités économiques des entreprises; et de faire partie, en tant que représentants des assurés, des conseils de surveillance des fonds d’assurance sociale obligatoire de l’État. Les organisations plaignantes considèrent que cela mettra pratiquement fin au dialogue social existant et détruira le mouvement syndical en Ukraine. En ce qui concerne les amendements à l’article 24 de la loi sur les syndicats qui révoquent le droit des représentants syndicaux de siéger aux conseils de surveillance, les organisations plaignantes soulignent que, en vertu de la législation en vigueur, les représentants des employeurs et des assurés sont habilités à gérer le fonds qu’ils ont créé, tandis que l’État ne peut que contrôler, mais non utiliser, les actifs du fonds.
  16. 552. Les organisations plaignantes considèrent en outre que la suppression de la partie 6 de l’article 249 du Code du travail, de la partie 2 de l’article 42 et de l’article 43 de la loi sur les syndicats concernant la mise à disposition par les employeurs de bâtiments, de locaux et d’installations aux syndicats pour des activités culturelles, éducatives, de santé et de bien-être est contraire à l’article 11 de la convention no 87 et au paragraphe 16 de la recommandation (no 143) concernant les représentants des travailleurs, 1971.
  17. 553. Les organisations plaignantes expliquent en outre que, conformément à l’article 24 de la loi sur les associations publiques, une association publique ayant le statut de personne morale a le droit, pour atteindre son (ses) objectif(s) statutaire(s), de posséder, d’utiliser des fonds et d’autres biens qui lui sont légalement transférés par ses membres ou par l’État, acquis sous forme de cotisations des membres, donnés par des citoyens, des sociétés, des institutions et des organisations, acquis grâce à l’activité entrepreneuriale de l’association ou à celle des personnes morales (sociétés ou entreprises) qu’elle a créées, ainsi que des biens achetés avec ses propres fonds, et prêtés temporairement. Les organisations plaignantes expliquent que pour l’heure, certaines organisations syndicales possèdent des bureaux, des centres de formation et des installations sociales (sanatoriums médicaux, camps de santé pour enfants, installations touristiques, etc.), qui ont été construits et achetés grâce aux cotisations des membres et à d’autres fonds syndicaux. Certaines de ces installations ont été transférées à titre gratuit par l’État à l’époque soviétique. Une grande partie de ces installations appartient à la FPU ou à ses affiliés. Pour chacune de ces installations, les organismes d’État compétents ont délivré des certificats officiels confirmant les droits de propriété des installations en question. Ainsi, la FPU, les syndicats de l’ensemble du secteur industriel ukrainien et les associations syndicales régionales sont actuellement les propriétaires légitimes des biens. Les organisations plaignantes indiquent que, en dépit de la protection constitutionnelle de la propriété syndicale, les dispositions finales du projet de loi prévoient le transfert obligatoire à l’État, c’est-à-dire la confiscation, de tous les biens des syndicats de l’ex URSS et de la RSS d’Ukraine, actuellement détenus légalement par les syndicats d’Ukraine. Les organisations plaignantes expliquent que la Fédération des syndicats indépendants d’Ukraine a reçu des biens en propriété de la Confédération générale des syndicats d’URSS par un accord dans les formes et selon la législation en vigueur en novembre 1990, c’est-à-dire avant l’adoption, en août 1991, de l’Acte de déclaration d’indépendance de l’Ukraine. La FPU estime que le paragraphe 21 «Dispositions finales» du projet de loi est discriminatoire à l’égard des syndicats, car il viole le principe de l’égalité des droits des syndicats par rapport aux autres organisations publiques en ce qui concerne la réglementation de leurs droits de propriété. En particulier, il n’existe pas de revendication de propriété au nom de l’État visant d’autres organisations publiques pan ukrainiennes dans une situation similaire à celle des syndicats d’Ukraine, qui fonctionnaient à l’époque de la RSS d’Ukraine et faisaient partie des associations publiques de l’URSS (associations professionnelles d’’écrivains, associations sportives, etc.). La FPU considère que les biens détenus par les syndicats ne sont pas des biens publics de l’URSS ou de la RSS d’Ukraine; ces biens ont été créés grâce aux fonds des syndicats et leur confiscation au profit de l’État est illégale.
  18. 554. La FPU et la KVPU indiquent que, alors que le Bureau central des experts scientifiques de la Verkhovna Rada d’Ukraine, qui est chargé de l’évaluation juridique des projets de loi soumis au Parlement, a conclu que le projet de loi, s’il est adopté, ne sera pas conforme aux conventions nos 87, 98 et 135, le 27 mai 2020, la Commission de la politique sociale et de la protection des droits des anciens combattants de la Verkhovna Rada d’Ukraine a décidé de recommander sans aucun amendement l’adoption en première lecture du projet de loi no 2681.
  19. 555. Dans sa communication du 27 janvier 2022, la FPU allègue que, outre le projet de loi no 2681, il existe 28 autres projets de loi enregistrés à la Verkhovna Rada visant à réformer les relations sociales et professionnelles dans le pays sans véritable dialogue social avec les syndicats, qui, s’ils sont adoptés, priveront ou restreindront considérablement le droit des syndicats de représenter et de défendre les droits et les intérêts de leurs membres. La FPU précise que durant les conditions liées à la pandémie, les actions de protestation de masse contre ces projets de loi ont été plus difficiles, voire interdites.
  20. 556. La FPU ajoute qu’une nouveauté dans le processus législatif en Ukraine est l’inclusion de dispositions antisyndicales dans des projets de loi qui n’ont aucun rapport avec les activités syndicales. Elle explique à cet égard que, lors de la préparation de la deuxième lecture du projet de loi portant modification de certains actes législatifs de l’Ukraine concernant l’amélioration de la gestion des soins de santé et la fourniture de services de santé à la population, la Commission de la Verkhovna Rada sur les soins de santé a inclus une disposition relative à l’obligation de l’employeur – en tant que payeur de la contribution sociale unique – de signaler aux autorités l’appartenance syndicale de ses travailleurs. Bien que le Département juridique central de la Verkhovna Rada ait considéré que cette disposition était contraire à la législation nationale, la loi a été adoptée par la Rada le 15 décembre 2021 et signée par le président de l’Ukraine le 6 janvier 2022. La FPU allègue à cet égard qu’elle a reçu de nombreuses notifications de collecte d’informations par les autorités locales, par le biais de leurs institutions, établissements et entreprises subordonnés, sur les syndicats opérant dans ces entités, ainsi que sur le paiement des cotisations – pour transmission ultérieure à des tiers.
  21. 557. La FPU fait savoir également que le 10 décembre 2021, deux projets de loi préparés par le gouvernement de l’Ukraine – «Sur le régime juridique des biens des associations (organisations) publiques de l’ex-URSS» et «Sur le moratoire relatif à l’aliénation des biens de des associations syndicales (organisations) publiques de l’ex-URSS» – ont été enregistrés à la Verkhovna Rada sous les nos 6420 et 6421, respectivement. Selon la FPU, les projets prévoient la confiscation des biens des organisations publiques. En ce qui concerne les syndicats, la FPU indique que les projets de loi prévoient la confiscation de bâtiments, de centres de formation, de stations thermales, d’installations sportives et touristiques, que les syndicats possèdent légalement depuis plusieurs décennies et qui sont utilisés dans l’intérêt des travailleurs. Selon la FPU, bien que le ministère de la Justice et le Fonds des biens de l’État n’aient pas soutenu le projet de loi no 6420 au motif qu’il n’était pas conforme aux traités internationaux ratifiés par l’Ukraine, les projets de loi ont été soutenus par le Cabinet des ministres de l’Ukraine et soumis à la Verkhovna Rada.
  22. 558. La FPU allègue en outre que le 19 octobre 2021, un juge d’instruction du tribunal de district de Kyiv Pechersky a émis une ordonnance de saisie immobilière et d’interdiction d’aliéner et d’utiliser plusieurs biens appartenant à des syndicats, notamment la Maison des syndicats à Kyiv, qui abrite le siège de la FPU et de 33 syndicats sectoriels nationaux et où travaillent 250 syndicalistes. La Maison des syndicats accueille tous les événements statutaires des syndicats, les réunions de l’organe représentatif conjoint des syndicats au niveau national – la partie syndicale du Conseil socio économique tripartite national. Elle a été construite dans les années quatre-vingt exclusivement grâce aux cotisations des syndicats et, après l’incendie de 2014, elle a été reconstruite par les syndicats sans aucune aide de l’État. Les confédérations syndicales nationales étrangères ont contribué à la reconstruction de la Maison des syndicats en versant des fonds à une fondation créée spécifiquement à cette fin. La FPU allègue que l’examen du cas par le juge s’est déroulé sans qu’elle en soit informée et que l’ordonnance elle même n’a été rendue publique que deux mois plus tard, le 10 décembre 2021. Les informations relatives à l’interdiction ont été incluses dans le Registre des droits de propriété immobilière le 5 janvier 2022. La demande du procureur était basée sur les mêmes hypothèses inconstitutionnelles et illégales que le projet de loi no 6420. La FPU indique qu’il s’agit de la quatrième tentative de saisie des biens des syndicats en 2021. Trois cas précédents ont fait l’objet d’un appel et ont été rejetés comme étant illégaux, sans fondement et réalisés avec des violations des dispositions relatives au fond et à la procédure. Le fait même que le bureau du procureur tente continuellement de saisir les biens des syndicats indique que certains clans oligarchiques sont derrière ces tentatives, s’empressant de saisir les biens des syndicats et d’affaiblir les syndicats. La FPU a fait appel de la décision du tribunal et attend le résultat de l’appel. Parallèlement, le 19 janvier 2022, le bureau du procureur a déposé une nouvelle demande de transfert des biens syndicaux saisis à l’Agence nationale ukrainienne pour la recherche, la traçabilité et la gestion des biens provenant de la corruption et d’autres crimes. Une audience pour examiner cette demande a été programmée pour le 3 février 2022.
  23. 559. La FPU conclut en indiquant que, combinée à l’avancement de la réforme visant à libéraliser le droit du travail, qui prévoit notamment que les contrats de travail individuels priment sur les lois et les conventions collectives, et aux amendements à la loi sur les syndicats, la confiscation des biens syndicaux priverait les syndicats de leurs fonctions de protection des droits, compromettrait leur capacité à promouvoir les principes du travail décent et à lutter contre les inégalités et la pauvreté chez les travailleurs.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 560. Dans sa communication du 30 octobre 2020, le gouvernement indique que le projet de loi no 2681 a été examiné avec la participation de représentants syndicaux lors des séances de la Commission de la Verkhovna Rada sur la politique sociale et la protection des droits des anciens combattants les 5 février et 27 mai 2020, ainsi que lors de la séance de la Commission de la Verkhovna Rada sur l’intégration de l’Ukraine à l’Union européenne le 2 juillet 2020. Le gouvernement souligne que le 19 février 2020, lors de l’audition de la Commission de la politique sociale et de la protection des droits des anciens combattants sur «La situation en cours des syndicats ukrainiens: La nécessité de réinitialiser le dialogue social/public», les députés du peuple, les représentants des syndicats et de leurs associations, les représentants des associations d’employeurs et les universitaires ont exprimé leurs points de vue sur la nécessité de poursuivre l’élaboration des projets de loi au sein d’un groupe de travail. Il a été convenu que l’élaboration et l’examen des projets de loi relatifs aux activités syndicales en Ukraine devraient se dérouler dans un format ouvert, avec la participation d’un large cercle de parties intéressées.
  2. 561. Le gouvernement indique que, si les acteurs du dialogue social conviennent généralement de la nécessité d’actualiser la législation sur l’activité syndicale, le projet de loi doit encore être modifié pour assurer sa conformité avec les conventions de l’OIT ratifiées par l’Ukraine, les recommandations adoptées par l’Ukraine, la Charte sociale européenne (révisée) et la directive 2002/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l’information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne.
  3. 562. Le gouvernement indique en outre que le ministère du Développement de l’Économie, du Commerce et de l’Agriculture a soumis des propositions concernant le projet de loi à la Commission de la politique sociale et de la protection des droits des anciens combattants, en ce qui concerne: i) la suppression des dispositions limitant le nombre de membres et d’organisations syndicales pouvant être établis dans une entreprise; ii) le droit des syndicats de recevoir des informations sur des questions concernant l’emploi et les droits socio économiques, les intérêts légitimes de leurs membres, et le développement socio économique d’une entreprise, d’une institution ou d’une organisation, etc.; iii) la protection des droits des travailleurs élus aux organes syndicaux; et iv) les droits de négociation collective des syndicats qui comptent parmi leurs membres du personnel de direction.
  4. 563. Le gouvernement indique que, le 27 mai 2020, la Commission de la politique sociale et de la protection des droits des anciens combattants a décidé de créer un groupe de travail – auquel participent des représentants syndicaux – chargé d’élaborer des propositions pour la deuxième lecture du projet de loi, qui seraient ensuite présentées par le président dudit groupe de travail si le projet de loi est approuvé en substance en première lecture. La réunion inaugurale du groupe de travail a eu lieu le 4 septembre 2020 et les partenaires sociaux au niveau national ont élaboré des propositions concernant le projet.
  5. 564. Le gouvernement rappelle que, en vertu de l’article 104 des règles de procédures de la Verkhovna Rada, les organes exécutifs ne sont pas habilités à retirer les projets de loi déposés par les députés du peuple.
  6. 565. En ce qui concerne l’expropriation des biens syndicaux, le gouvernement indique que, à ce jour, la question de la détermination des titulaires du droit de propriété sur les biens des organisations publiques de l’ex-URSS situés sur le territoire de l’Ukraine, y compris les biens des organisations syndicales, n’a pas été résolue au niveau législatif. Par la décision no 3943 XII du 4 février 1994 sur la propriété des organisations publiques de l’ex-URSS, la Verkhovna Rada a décidé que temporairement, dans l’attente de la détermination législative des propriétaires, lesdits biens seront la propriété de l’État dans son ensemble. Le ministère du Développement de l’économie, du Commerce et de l’Agriculture a élaboré un projet de loi sur le régime juridique de la propriété des associations (organisations) publiques de l’ex URSS. Les commentaires sur ce projet de loi ont été reçus des organismes intéressés et sont actuellement traités par le ministère dans le but de soumettre des propositions approuvées à l’examen du gouvernement.
  7. 566. Dans sa communication du 24 avril 2023, le gouvernement fournit les informations suivantes. En ce qui concerne la loi no 1962 IX portant modification de certains actes législatifs de l’Ukraine sur l’amélioration du système de gestion des soins de santé et la fourniture de soins médicaux à la population, datée du 15 décembre 2021, qui a modifié la loi no 2464 VI sur la collecte et la comptabilité de la contribution unique pour l’assurance sociale obligatoire de l’État et, en particulier, en ce qui concerne la déclaration par un employeur de l’appartenance des travailleurs à un syndicat à l’autorité fiscale et la fourniture au Registre d’État de l’assurance sociale obligatoire de l’État d’informations sur l’appartenance aux syndicats, le gouvernement indique que la loi no 2173 IX datée du 1er avril 2022 sur les amendements au Code des impôts de l’Ukraine et à d’autres actes législatifs de l’Ukraine sur l’administration de certains impôts pendant la période de la loi martiale et de l’état d’urgence a modifié la loi no 2464 en excluant les dispositions susmentionnées.
  8. 567. Le gouvernement fait savoir en outre que, conformément au sous paragraphe 4 du paragraphe 3 de la section II de la loi no 2215 IX du 21 avril 2022 sur la désoviétisation de la législation de l’Ukraine, le ministère de l’Économie a élaboré un projet de loi sur le travail en vue d’abandonner l’héritage législatif soviétique dans le domaine de l’emploi et des relations professionnelles et d’introduire des principes et des normes internationalement reconnus pour réglementer les relations professionnelles. Contrairement au Code du travail en vigueur, le projet de loi sur le travail tient compte des tendances actuelles du marché du travail tout en garantissant des conditions de travail décentes. Afin d’assurer un débat public, le ministère de l’Économie a publié le projet sur son site officiel le 23 septembre 2022. En octobre 2022, le projet de loi a été envoyé à l’Organisation internationale du travail. Le gouvernement souligne que le projet de loi ne prévoit aucune restriction à la liberté syndicale et au droit d’organisation. Ces relations sont régies par la loi sur les syndicats, qui n’a pas été modifiée et ne devrait pas l’être pour restreindre les droits consacrés par les conventions nos 87 et 98. Le ministère de l’Économie consulte actuellement les partenaires sociaux et la communauté scientifique et d’experts pour finaliser le projet de loi. Le ministère de l’Économie assure qu’il est prêt à un dialogue complet et ouvert qui faciliterait une compréhension totale du droit international du travail, ainsi que la mise en œuvre de ses normes dans la législation nationale.
  9. 568. En ce qui concerne les notifications relatives à la collecte par les gouvernements locaux (conseils régionaux) d’informations auprès de leurs institutions, établissements et entreprises subordonnés sur le nombre d’organisations syndicales opérant en leur sein et d’informations sur le paiement des cotisations, en vue d’un transfert ultérieur à des tiers, le gouvernement indique que, conformément à l’article 12 de la loi sur les syndicats, les syndicats et leurs associations sont indépendants. L’ingérence des organes de l’État, des organes de l’administration autonome locale, de leurs fonctionnaires, des employeurs et de leurs associations dans les activités statutaires des syndicats est interdite. Le ministère de l’Économie n’est pas autorisé à demander, analyser, publier ou diffuser des informations sur les membres des syndicats de quelque manière que ce soit. En même temps, les informations pertinentes peuvent être fournies directement par un syndicat s’il en prend la décision.
  10. 569. Le gouvernement a en outre informé de l’adoption, le 23 février 2023, de la loi sur les conventions et accords collectifs de travail no 2937 IX, qui entrera en vigueur six mois après la date de cessation ou de levée de la loi martiale.
  11. 570. En ce qui concerne les projets de loi no 6420 sur le régime juridique des biens des associations (organisations) publiques de l’ex URSS et no 6421 sur un moratoire sur l’aliénation des biens des associations (organisations) publiques de l’ex URSS, le gouvernement indique que, conformément à la résolution de la Verkhovna Rada no 3943 XII sur les biens des associations (organisations) publiques de l’ex URSS, datée du 4 février 1994, tant que la définition législative des sujets de droit des biens des organisations publiques de l’ex URSS situés en Ukraine ne sera pas établie, lesdits biens sont définis comme propriété de l’État, et le Fonds des biens de l’État de l’Ukraine est investi du droit d’aliéner ces biens et a le pouvoir d’agir en tant que bailleur de complexes d’entreprises et d’organisations. Une grande partie des biens syndicaux appartient aux associations syndicales publiques de l’ex URSS. Tous les sanatoriums existants, qui à l’époque soviétique relevaient du Département principal des stations, sanatoriums et maisons de repos du ministère de la Santé de l’URSS, ont été transférés au Conseil républicain ukrainien des syndicats conformément à la résolution no 606 du Conseil des ministres de l’URSS du 23 avril 1960 sur le transfert des sanatoriums et des maisons de repos du ministère de la Santé de l’URSS aux syndicats. Le ministère de la Santé de la RSS d’Ukraine a transféré à titre gratuit ces biens du Département principal des stations balnéaires, sanatoriums et maisons de repos du ministère aux syndicats, sans en transférer la propriété physique. Les syndicats ont obtenu le droit de gérer ces biens dans les limites prévues par la résolution no 606. Le paragraphe 5 de la résolution no 606 prévoit que le Comité de planification d’État de la RSS d’Ukraine, conjointement avec le ministère des Finances de la RSS d’Ukraine et le ministère de la Santé de la RSS d’Ukraine, doit déterminer le montant des investissements et les sources de financement pour la construction, la reconstruction et l’amélioration des installations des sanatoriums et centres de villégiature devant être transférés au Conseil républicain ukrainien des syndicats. Le gouvernement souligne que, étant donné que ces biens n’ont pas été accordés aux syndicats, ceux ci n’avaient pas le droit d’en disposer de manière indépendante et d’en changer la forme de propriété.
  12. 571. Le gouvernement explique en outre que, dans l’attente de l’adoption d’une loi spéciale définissant la propriété des biens gérés par les organisations publiques de l’ex URSS situés en Ukraine, la question de la propriété de ces biens est réglée par les tribunaux. Selon le Fonds des biens de l’État de l’Ukraine, des procédures judiciaires, en cours depuis 2011, ont été engagées par les procureurs pour restituer à l’État la propriété des biens des associations publiques de l’ex URSS. Le gouvernement souligne en outre que la nécessité d’adopter une loi spéciale est également attestée par la décision du Conseil de sécurité nationale et de défense de l’Ukraine du 18 février 2015 sur les mesures visant à créer une base matérielle et technique appropriée pour la prise en charge et la réadaptation des militaires et autres personnes ayant directement participé à la mise en œuvre de l’opération antiterroriste, ainsi que des combattants et des vétérans handicapés, et par l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 9 septembre 2018 dans l’affaire opposant la fondation pour les soins parentaux à l’Ukraine (requête no 5876/15), dans lequel la Cour européenne des droits de l’homme a souligné que l’Ukraine ne disposait pas d’une loi qui réglementerait clairement le statut juridique des biens des organisations publiques de l’ex Union soviétique situées en Ukraine et prévoirait un inventaire des biens de ces organisations.
  13. 572. Pour résoudre cette question, le ministère de l’Économie a élaboré et soumis à la Verkhovna Rada les projets de loi nos 6420 et 6421 du 10 décembre 2021. Le gouvernement indique que le projet de loi no 6420 a été envoyé à plusieurs reprises pour approbation à l’Organe représentatif conjoint des associations syndicales représentatives pan-ukrainiennes au niveau national et à l’Organe représentatif conjoint de la partie patronale au niveau national. Les représentants des parties prenantes concernées ont également été invités à une réunion de conciliation sur le projet de loi. Le gouvernement conclut en indiquant que les projets de loi visent à protéger les biens de l’État et n’affectent pas les intérêts légitimes des acheteurs de bonne foi. L’adoption de ces projets de loi permettra d’établir la base juridique pour déterminer la propriété des biens concernés.
  14. 573. En ce qui concerne la saisie alléguée des biens syndicaux, le gouvernement indique que la section 2 de l’article 328 du Code civil prévoit que la propriété est réputée avoir été acquise légalement, sauf disposition contraire expresse de la loi ou si l’illégalité de l’acquisition de la propriété ou le caractère déraisonnable des actifs dans la propriété est établi par un tribunal. Les décisions de justice entrées en vigueur sont contraignantes pour toutes les autorités de l’État, les gouvernements locaux, leurs fonctionnaires et travailleurs, les personnes physiques et morales et leurs associations sur l’ensemble du territoire ukrainien.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 574. Le comité note que les organisations plaignantes allèguent en l’espèce que, s’il est adopté, le projet de loi no 2681 portant modification de certains actes législatifs de l’Ukraine (sur certaines questions liées à l’activité des syndicats) contreviendra aux principes de la liberté syndicale et du droit de négociation collective en Ukraine. Il note en outre que le projet de loi vise à modifier le Code du travail et la loi sur les syndicats.
  2. 575. Le comité observe que, depuis le dépôt de la plainte, un projet de loi sur le travail a été élaboré par le ministère de l’Économie de l’Ukraine en 2022 afin de donner effet aux dispositions finales et transitoires de la loi sur la désoviétisation de la législation de l’Ukraine concernant la nécessité de remplacer le Code du travail de 1971. Il se félicite de la collaboration du gouvernement avec le BIT à cet égard. Le comité observe que le projet de loi sur le travail, qui vise à remplacer le Code du travail dans son ensemble, ne contient aucune des dispositions portant modification du Code du travail prévues par le projet de loi no 2681. Il prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle la modification de la loi sur les syndicats ne vise pas à restreindre les droits consacrés par les conventions nos 87 et 98. Le comité note en particulier que, d’après le gouvernement, le projet de loi doit encore être modifié pour assurer sa conformité avec les conventions de l’OIT ratifiées par l’Ukraine, la Charte sociale européenne (révisée) et la Directive 2002/14/CE établissant un cadre général relatif à l’information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne. Le comité note toutefois que, selon les informations publiées sur le portail officiel de la Verkhovna Rada, l’examen du projet de loi no 2681 portant modification du Code du travail et de la loi sur les syndicats est toujours en attente et qu’il est inscrit, par résolution 2911 IX du 7 février 2023, à l’ordre du jour de la 9e session de la Rada. Le comité procédera ainsi à l’examen des propositions de modification au Code du travail et à la loi sur les syndicats qui figurent dans le projet de loi no 2681.
  3. 576. Le comité prend note de la proposition consistant à ajouter l’article 241 1 au Code du travail et l’article 16 1 à la loi sur les syndicats, ainsi que de la modification de l’article 15 de la loi sur les syndicats prévoyant la mise en place obligatoire de commissions de contrôle au sein des associations syndicales. Il note par ailleurs l’explication des organisations plaignantes selon laquelle les syndicats sont actuellement tenus, en vertu de leurs statuts, de mettre en place des organes d’audit et d’autres organes de contrôle. Les organisations plaignantes estiment que cette nouvelle obligation législative, qui imposerait aux syndicats d’instituer des commissions de contrôle (supplémentaires) et qui réglementerait en détail leurs pouvoirs et leur composition, s’inscrit en violation du droit des syndicats d’organiser leur gestion sans ingérence. À cet égard, le comité rappelle que la liberté syndicale implique le droit pour les travailleurs et les employeurs d’élire librement leurs représentants ainsi que d’organiser leur gestion et leur activité sans aucune intervention des autorités publiques. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 666.] Il estime que cela suppose que les syndicats et associations syndicales puissent décider des organes internes qu’ils souhaitent mettre en place et de la composition de ceux ci, conformément à leurs statuts et aux décisions de caractère démocratique prises par leurs membres. Le comité attend du gouvernement qu’il prenne, en consultation avec les partenaires sociaux, les mesures nécessaires afin de supprimer ces projets de dispositions de façon à garantir que les organisations de travailleurs soient en mesure d’organiser leur gestion sans l’intervention des autorités publiques.
  4. 577. Le comité note en outre que les organisations plaignantes s’opposent à la proposition tendant à supprimer le paragraphe 9 de l’article 247 du Code du travail, en vertu duquel les syndicats peuvent actuellement exiger le licenciement du dirigeant d’une entreprise/institution si celui ci enfreint la loi sur les syndicats, la législation du travail, la convention collective ou se soustrait à ses obligations en matière de participation à la négociation collective et aux dispositions similaires de la loi sur les syndicats (articles 33 et 38 9)). Notant que l’article 46 de la loi sur les syndicats, qui prévoit que la violation des droits syndicaux entraîne une sanction de nature disciplinaire, administrative ou pénale, resterait inchangé, le comité considère que la suppression des dispositions en question ne constituerait pas une violation de la liberté syndicale.
  5. 578. Le comité considère par ailleurs que la suppression des paragraphes 13 et 14 de l’article 247 du Code du travail ainsi que des dispositions similaires de la loi sur les syndicats (article 38 13) et 14)), qui prévoient actuellement que les syndicats peuvent exercer un contrôle sur l’élaboration des documents relatifs aux pensions et sur la fourniture aux retraités et aux personnes en situation de handicap ayant travaillé dans l’entreprise ou dans l’institution de soins médicaux, de logements et de bons permettant d’accéder aux établissements de santé et de soins préventifs et de bénéficier d’autres prestations et services sociaux, conformément aux règles de l’entreprise ou de l’institution et à la convention collective en vigueur, ne constituerait pas une violation de la liberté syndicale et que ces questions peuvent également être réglementées par des conventions collectives négociées. Le comité estime que le droit de contrôler le fonctionnement des services de restauration, de soins de santé, de garde d’enfants, d’internat, de transport, etc. (article 248 4) du Code du travail), le droit de vérifier les états de paie et le versement des cotisations d’assurance sociale, et l’utilisation des fonds pour les activités sociales et culturelles et pour la construction de logements (article 248 6) du Code du travail), ainsi que le droit de recevoir au moins 0,3 pour cent du fonds salarial aux fins de l’organisation d’activités culturelles, d’éducation physique et d’amélioration de la santé (article 250 du Code du travail et article 44 de la loi sur les syndicats) sont des questions qui pourraient être réglementées par une convention collective.
  6. 579. Le comité observe en outre que la référence au droit de demander des informations sur les conditions de travail, l’application des conventions collectives et la législation du travail au propriétaire de l’entreprise ou à un représentant habilité serait supprimé, mais que le droit de recevoir de telles informations serait maintenu (article 248 2) du Code du travail).
  7. 580. Le comité note que, en vertu de la proposition de modification de l’article 249 du Code du travail et des modifications correspondantes de l’article 42 et de la suppression de l’article 43 de la loi sur les syndicats, la liste de certaines obligations imposées au propriétaire d’une entreprise afin de créer les conditions nécessaires à la tenue des activités syndicales prévues par la convention collective (mise à disposition de locaux, précompte syndical, cession de bâtiments et de locaux destinés à la pratique d’activités culturelles, éducatives, sanitaires, sportives et autres activités similaires sur une base contractuelle) serait supprimée et remplacée par une obligation générale de créer les conditions nécessaires au fonctionnement des syndicats dans l’entreprise ou l’institution, tel qu’indiqué dans la convention collective. Le comité rappelle que l’application des dispositions relatives aux facilités à accorder aux représentants des travailleurs, qui sont mentionnées dans la convention no 135 ratifiée par l’Ukraine, pourra être assurée par voie de législation nationale, de conventions collectives ou de toute autre manière qui serait conforme à la pratique nationale (article 6), et estime que les modifications proposées ne semblent pas limiter la liberté syndicale.
  8. 581. Le comité note en particulier que les propositions de modification des articles 28 et 45 de la loi sur les syndicats et de l’article 251 du Code du travail prévoient que les syndicats n’auraient plus le droit de demander à obtenir gratuitement des informations sur les droits et intérêts professionnels et socio-économiques de leurs membres, ainsi que sur les résultats de l’entreprise, et que l’article 40 de la loi sur les syndicats et l’article 251 du Code du travail ne prévoiraient plus que les syndicats, les associations syndicales et les représentants syndicaux puissent demander à l’employeur des informations et des documents pertinents en lien avec les conditions de travail, l’application des conventions collectives, le respect de la législation du travail et les droits sociaux et économiques des travailleurs. En outre, le comité note que l’article 28 n’exige plus que les informations demandées soient fournies dans un délai de cinq jours. Tout en observant que l’obligation générale de fournir des informations sur l’application des conventions collectives est maintenue, le comité rappelle que la recommandation (no 143) concernant les représentants des travailleurs, 1971, prévoit que la direction de l’entreprise devrait mettre à la disposition des représentants des travailleurs les facilités d’ordre matériel ainsi que les informations nécessaires à l’exercice de leurs fonctions [voir Compilation, paragr. 1581], et demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de modifier le projet de loi, en consultation avec les partenaires sociaux, pour faire en sorte que la législation continue de permettre à un syndicat de demander à la direction d’une entreprise des informations relatives aux questions qui leur sont nécessaires pour remplir leurs fonctions.
  9. 582. En ce qui concerne les garanties offertes aux travailleurs élus aux organes syndicaux, le comité prend note des propositions de modification de l’article 252 du Code du travail et de l’article 41 de la loi sur les syndicats et observe que, s’il resterait obligatoire d’obtenir le consentement d’un organe syndical élu avant de modifier les conditions d’emploi des travailleurs – y compris leur rémunération – prévues par leur contrat de travail, ou avant de procéder à des licenciements, le consentement d’un tel organe ne serait plus nécessaire pour prendre des mesures disciplinaires à l’encontre de dirigeants syndicaux. Par ailleurs, dans le cas d’un licenciement, si la nécessité d’obtenir le consentement préalable de l’organe élu serait maintenue, l’obligation actuelle consistant à obtenir également le consentement de l’organe syndical élu le plus élevé (association de syndicats) serait supprimée. La disposition interdisant le licenciement d’un travailleur qui a été élu à un organe syndical dans l’année suivant la fin de son mandat sera également supprimée en vertu du projet de loi. Le projet de loi prévoit également la suppression d’une disposition visant à garantir au travailleur de retrouver le même poste (ou un poste similaire, s’il y consent) à la fin de son mandat syndical. Le comité rappelle que l’un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est que les travailleurs bénéficient du droit d’être protégés de façon appropriée contre les mesures de discrimination antisyndicale en matière d’emploi – licenciement, rétrogradation, mutation et autres mesures préjudiciables. Cette protection est particulièrement souhaitable en ce qui concerne les délégués syndicaux étant donné que, pour pouvoir remplir leurs fonctions syndicales en pleine indépendance, ceux ci doivent avoir la garantie qu’ils ne subiront pas de préjudice en raison du mandat syndical qu’ils détiennent. Le comité a estimé que la garantie de semblable protection dans le cas de dirigeants syndicaux est en outre nécessaire pour assurer le respect du principe fondamental selon lequel les organisations de travailleurs ont le droit d’élire librement leurs représentants. [Voir Compilation, paragr. 1117.] Le comité considère que l’obligation d’obtenir l’accord préalable d’un organe syndical élu, le moratoire sur l’interdiction de licenciement dans l’année suivant la fin d’un mandat syndical et la garantie pour le travailleur de retrouver le même poste font partie des moyens de protection que la législation ou une convention collective peut prévoir; cependant, l’abrogation de ces mesures apparaîtrait comme un retour en arrière pour ce qui est de la protection globale offerte aux représentants syndicaux. Le comité encourage le gouvernement à engager un dialogue avec les partenaires sociaux afin de réexaminer ces mesures, le but étant de s’assurer que le cadre législatif continue de fournir une protection efficace contre la discrimination antisyndicale ou d’autres mesures préjudiciables en raison de l’appartenance des travailleurs à un syndicat ou à l’exercice d’une activité syndicale.
  10. 583. En ce qui concerne la proposition de modification visant à réduire de six à trois le nombre de jours de congés payés supplémentaires accordés aux travailleurs élus aux organes syndicaux au titre de la formation syndicale (proposition de modification de l’article 252 du Code du travail et de l’article 41 correspondant de la loi sur les syndicats), le comité souligne la nécessité d’assurer l’équilibre entre deux éléments: i) les facilités dans l’entreprise doivent être de nature à permettre aux syndicats de remplir rapidement et efficacement leurs fonctions; et ii) leur octroi ne devrait pas entraver le fonctionnement efficace de l’entreprise intéressée. [Voir Compilation, paragr. 1580.] Observant qu’en vertu du même projet de disposition, l’article 252 du Code du travail prévoirait également que l’entreprise puisse offrir aux travailleurs élus aux organes syndicaux, à ses frais, des avantages supplémentaires conformément à une convention collective, le comité considère que la proposition de modification ne semble pas limiter la liberté syndicale.
  11. 584. En ce qui concerne les propositions de modification de la loi sur les syndicats exposées dans le projet de loi no 2681, le comité note les amendements suivants à l’article 1 de ladite loi, qui donne la définition du terme «syndicat primaire» (un syndicat au niveau de l’entreprise ou de l’institution). Premièrement, l’amendement supprime la référence à «ceux qui étudient dans le même établissement d’enseignement», excluant ainsi la possibilité que des étudiants deviennent membres d’un syndicat, mais n’interdit pas les syndicats dans les établissements d’enseignement, contrairement à ce que font valoir les organisations plaignantes. Le comité rappelle à cet égard que la fonction de l’OIT est de garantir et promouvoir le droit d’association des travailleurs et des employeurs [voir paragraphe 13 des procédures spéciales en vigueur pour l’examen des plaintes en violation de la liberté syndicale], ce qui implique que les étudiants, s’ils ne sont pas des travailleurs (par exemple, les assistants d’éducation), ne relèvent pas de son champ de compétence. Deuxièmement, la définition modifiée fixerait le nombre d’adhérents minimum de ces syndicats à 10. Le comité rappelle à cet égard que le nombre minimum de membres requis au niveau de l’entreprise n’est pas en soi incompatible avec la convention no 87, mais que le seuil devrait être fixé à un niveau raisonnable, de façon à ne pas entraver la constitution des organisations, ce chiffre pouvant varier selon les conditions particulières dans lesquelles la restriction a été imposée. [Voir Compilation, paragr. 441.] Le comité exprime sa préoccupation quant aux conséquences que cette proposition de modification pourrait avoir sur les travailleurs des petites et très petites entreprises qui, à l’heure actuelle, sont en mesure d’exercer leur droit de constituer des syndicats primaires sur leur lieu de travail, et prie le gouvernement de réexaminer cette proposition en consultation avec les partenaires sociaux afin de veiller à ce que les travailleurs puissent continuer d’exercer leur droit d’organisation. Troisièmement, cette proposition de modification vise à limiter à deux le nombre de syndicats primaires qu’il est possible de créer dans une entreprise ou une institution donnée. Le comité estime que les travailleurs doivent être libres de choisir le syndicat dont ils pensent qu’il défend le mieux leurs intérêts professionnels sans ingérence des autorités. Il est peut-être préférable d’éviter, dans l’intérêt des travailleurs, une multiplicité de syndicats, mais ce choix devrait se faire librement et spontanément. En faisant figurer les termes «organisations de leur choix» dans la convention no 87, la Conférence internationale du Travail a reconnu que les intéressés pouvaient choisir entre plusieurs organisations d’employeurs et de travailleurs pour des raisons d’ordre professionnel, confessionnel ou politique. En conséquence, le comité prie le gouvernement d’examiner cette proposition de modification en consultation avec les partenaires sociaux.
  12. 585. Le comité note qu’en vertu de la proposition de modification de l’article 7 de la loi sur les syndicats, le paragraphe 5 de cet article, qui dispose que les statuts des syndicats peuvent prévoir des restrictions à la double affiliation syndicale, sera supprimé. Il considère que cela ne constitue pas en soi une violation des droits syndicaux car rien dans la loi n’interdit aux syndicats d’inscrire cette restriction dans leurs statuts s’ils le jugent nécessaire, laissant ainsi le soin aux organisations concernées de se prononcer elles-mêmes sur cette question.
  13. 586. Le comité note également les propositions de modification de l’article 11 de la loi sur les syndicats visant à porter à trois le nombre d’organisations syndicales primaires dans la même unité administrative/territoriale ou collectivité territoriale fusionnée autorisées à obtenir le statut local. S’il estime que le nombre proposé n’est pas assez élevé pour entraver la création d’organisations syndicales locales, le comité prend note de l’indication des organisations plaignantes selon laquelle cette disposition avait été considérée comme inconstitutionnelle par la Cour constitutionnelle de l’Ukraine.
  14. 587. En ce qui concerne la proposition de modification de l’article 13 de la loi sur les syndicats visant à supprimer l’aide publique fournie aux syndicats dans le cadre de l’établissement de partenariats commerciaux avec les employeurs et leurs associations et la formation du personnel syndical, le comité note que les organisations plaignantes allèguent des violations de la convention no 111, ce qui ne relève pas du mandat du comité.
  15. 588. Le comité note en outre les propositions de modification des articles 14 et 15 de la loi sur les syndicats visant à imposer aux syndicats de fixer, dans leurs règlements/statuts, le montant des cotisations syndicales et la méthode de transfert de ces cotisations. Le comité observe que la proposition de modification de l’article 249 du Code du travail examinée ci dessus laisse entendre que la méthode de transfert des cotisations syndicales est régie par une convention collective; les propositions de modification des articles 14 et 15 semblent donc contraires à cette intention. À cet égard, le comité rappelle que la question du prélèvement des cotisations syndicales par les employeurs et de leur transfert aux syndicats devrait être résolue par la négociation collective entre les employeurs et l’ensemble des syndicats sans obstacles d’ordre législatif. [Voir Compilation, paragr. 701.] Compte tenu des préoccupations exprimées par les organisations plaignantes concernant la manière dont l’obligation législative pour les syndicats de fixer dans leurs statuts le montant exact des cotisations syndicales pourrait nuire à leur administration interne, le comité prie le gouvernement d’examiner les propositions de modification en consultation avec les partenaires sociaux.
  16. 589. En ce qui concerne l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle le projet de loi restreint les droits syndicaux du personnel de direction et d’encadrement, le comité note que l’article 20 modifié de la loi sur les syndicats dispose que, si un syndicat compte parmi ses membres des personnes appartenant au personnel de direction d’une entreprise, d’une institution ou d’une organisation, il ne peut pas agir en qualité de représentant des travailleurs dans le cadre de la négociation collective. En outre, le comité note que la législation en vigueur ne donne aucune définition du terme «direction». Il estime qu’une telle omission peut donner lieu à une interprétation large de ce terme et, à la lumière de la proposition de modification, empêcher dans la pratique certains syndicats qui comptent parmi leurs membres des travailleurs qu’ils pourraient légitimement représenter de participer à la négociation collective. Il rappelle à cet égard que, en ce qui concerne des dispositions interdisant l’affiliation du personnel de direction aux syndicats de travailleurs, le comité a considéré que le mot «dirigeants» devrait se limiter aux seules personnes qui représentent effectivement les intérêts des employeurs. [Voir Compilation, paragr. 382.] En outre, le comité rappelle qu’il n’est pas nécessairement incompatible avec les dispositions de l’article 2 de la convention no 87 de dénier au personnel de direction ou d’encadrement le droit d’appartenir aux mêmes syndicats que les autres travailleurs, mais seulement à deux conditions: premièrement, qu’ils aient le droit de créer leurs propres organisations pour la défense de leurs intérêts et, deuxièmement, que ces catégories de personnel ne soient pas définies en termes si larges que les organisations des autres travailleurs de l’entreprise ou de la branche d’activité risquent de s’en trouver affaiblies, en les privant d’une proportion substantielle de leurs membres effectifs ou potentiels. [Voir Compilation, paragr. 381.] Le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en consultation avec les partenaires sociaux, afin de tenir compte des considérations susmentionnées.
  17. 590. Le comité prend note de l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle les modifications proposées des articles 21, 22 et 24 de la loi sur les syndicats entravent le dialogue social et visent à détruire le mouvement syndical en Ukraine. Il note que les articles 21 et 22 tels que modifiés excluraient le droit pour les syndicats de rédiger des lois et des règlements relatifs aux politiques du travail, sociales et économiques, le droit de participer à l’examen des propositions qu’ils formulent par différentes autorités ainsi que par les employeurs et leurs associations, et enfin le droit d’organiser des consultations appropriées sur des questions ayant trait aux moyens d’attirer et d’utiliser la main d’œuvre étrangère dans le pays, et de prendre part à ces consultations. Tout en notant que le droit de présenter des propositions à ceux qui possèdent le droit d’initiative législative serait maintenu, le comité rappelle qu’il a attiré l’attention du gouvernement sur la recommandation (nº 113) sur la consultation aux échelons industriel et national, 1960, qui établit que les consultations «devraient avoir pour objectif, en particulier, de permettre l’examen en commun, par les organisations d’employeurs et de travailleurs, des problèmes d’intérêt mutuel en vue d’aboutir, dans toute la mesure possible, à des solutions acceptées de part et d’autre» et comprend parmi les domaines de consultation «la préparation et la mise en œuvre de la législation touchant leurs intérêts». Le comité a également souligné l’importance, pour assurer des relations professionnelles harmonieuses, d’engager des consultations complètes et franches sur des questions touchant les intérêts professionnels des travailleurs. [Voir Compilation, paragr. 1517 et 1519.] Le comité s’attend à ce que des consultations pleines et franches soient engagées avec les partenaires sociaux en vue d’assurer le respect des considérations qui précèdent.
  18. 591. Le comité considère que la question soulevée par les organisations plaignantes en ce qui concerne la proposition de modification de l’article 24 de la loi sur les syndicats, qui ne permettrait pas aux syndicats et associations syndicales, en tant que représentants des assurés, de faire partie des conseils de surveillance des fonds d’assurance sociale obligatoire, mais préserverait dans le même temps leur droit d’être élus aux conseils d’administration de ces fonds, ne relève pas de sa compétence.
  19. 592. En outre, le comité note que l’article 36 modifié de la loi sur les syndicats imposerait aux organes syndicaux élus l’obligation de rendre régulièrement des comptes aux membres du syndicat sur le respect de leurs obligations et de présenter un rapport extraordinaire sur leurs activités à la demande d’au moins deux tiers des membres du syndicat principal. De l’avis du comité, d’emblée, la modification proposée visant à garantir le droit des membres de participer démocratiquement à la vie de l’organisation est conforme au principe de la liberté syndicale. Toutefois, les seuils pour de telles demandes par les membres du syndicat devraient être laissés à la décision de l’organisation concernée et non fixés par la législation.
  20. 593. En ce qui concerne la question des biens syndicaux, le comité note que les dispositions finales du projet de loi prévoient que les biens des syndicats et associations syndicales de l’ex URSS et de la RSS d’Ukraine, qui sont situés sur le territoire de l’Ukraine et que ces organisations géraient, possédaient et/ou utilisaient depuis le 24 août 1991, sont la propriété de l’État. Le comité prend également note de l’allégation de la FPU selon laquelle deux autres projets de loi (nos 6420 et 6421) prévoient que les biens des organisations publiques, des successeurs légaux des organisations syndicales publiques de l’ex URSS, y compris les syndicats et leurs organisations, doivent être confisqués. Le comité rappelle les conclusions et recommandations qu’il a formulées dans le cadre du cas no 3341 où il a pris note de la création d’un groupe de travail chargé d’examiner les moyens possibles de régler cette question et a invité le gouvernement à engager des consultations avec les organisations syndicales afin de parvenir à une solution mutuellement acceptable pour toutes les parties. [Voir rapport no 392, octobre 2020, paragr. 966.] Il examinera les questions relatives aux biens des syndicats dans le cadre du présent cas.
  21. 594. Le comité prend note de l’indication générale du gouvernement selon laquelle le projet de loi no 2681 doit encore être modifié pour assurer sa conformité avec les conventions de l’OIT ratifiées, et qu’un groupe de travail a été créé à cet effet et a commencé ses travaux en septembre 2020. Il prend également note de l’indication du gouvernement selon laquelle la modification de la loi sur les syndicats ne vise pas à restreindre les droits consacrés par les conventions nos 87 et 98. Le comité croit néanmoins comprendre que la version du projet de loi devant être examinée par la Verkhovna Rada n’a pas fait l’objet de nouvelles modifications depuis qu’elle a été présentée. Il rappelle que l’adhésion d’un État à l’OIT lui impose de respecter dans sa législation les principes de la liberté syndicale et les conventions qu’il a librement ratifiées. [Voir Compilation, paragr. 45.] Le comité prie instamment le gouvernement d’engager un dialogue avec les partenaires sociaux sur tout projet de législation concernant leurs intérêts et droits (projet de loi no 2681) en vue de mettre la législation en conformité avec les principes de la liberté syndicale avant tout nouvel examen à la Verkhovna Rada. Il prie le gouvernement de fournir des informations sur tout fait nouveau à cet égard à la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, à laquelle il renvoie les aspects législatifs de ce cas. Le comité rappelle que le gouvernement peut se prévaloir de l’assistance technique du Bureau à cet égard.
  22. 595. En outre, le comité prend note des allégations de la FPU selon lesquelles la législation ukrainienne a intégré une nouveauté, à savoir l’inclusion de dispositions antisyndicales dans des lois qui ne sont pas liées à l’activité des syndicats, par exemple la loi portant modification de certains actes législatifs de l’Ukraine concernant l’amélioration de la gestion des soins de santé et la fourniture de services de santé à la population, qui comporte une disposition relative à l’obligation pour l’employeur de signaler aux autorités l’affiliation syndicale des travailleurs de l’entreprise. S’il prend note de l’indication de la FPU selon laquelle le projet de loi a été adopté par la Rada le 15 décembre 2021 et promulgué par le Président le 6 janvier 2022, le comité relève également l’indication du gouvernement selon laquelle ladite disposition a été abrogée par une modification de la loi en avril 2022.
  23. 596. Par ailleurs, le comité prend note des allégations de la FPU selon lesquelles celle ci a reçu des informations concernant de nombreux cas de collecte de données par les autorités locales sur les syndicats intervenant dans les institutions, établissements et entreprises qui relèvent de ces autorités ainsi que sur le paiement de cotisations syndicales, données qui seraient ensuite transmises à des tiers. Le comité note l’indication du gouvernement selon laquelle la collecte et la diffusion d’informations relatives à l’affiliation syndicale sont contraires à la législation. Compte tenu de l’abrogation des dispositions législatives susmentionnées, qui autorisaient la collecte d’informations sur l’affiliation syndicale, le comité prie le gouvernement d’engager un dialogue avec les partenaires sociaux afin de déterminer s’il arrive que cette pratique soit encore utilisée, le but étant de prendre les mesures qui s’imposent, conformément à la législation nationale, pour l’interdire tout à fait.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 597. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité recommande au Conseil d’administration ce qui suit:
    • a) Le comité prie instamment le gouvernement d’engager un dialogue avec les partenaires sociaux sur tout projet de législation concernant leurs intérêts et droits (projet de loi no 2681) en vue de mettre la législation en conformité avec les principes de la liberté syndicale avant tout nouvel examen à la Verkhovna Rada. Il prie le gouvernement de fournir des informations sur tout fait nouveau à cet égard à la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, à laquelle il renvoie les aspects législatifs de ce cas.
    • b) Le comité rappelle que le gouvernement peut se prévaloir de l’assistance technique du Bureau à cet égard.
    • c) Le comité prie le gouvernement d’engager un dialogue avec les partenaires sociaux afin de déterminer si la collecte de données sur l’affiliation syndicale est encore pratiquée, le but étant de prendre les mesures qui s’imposent, conformément à la législation nationale, pour interdire cette pratique.
    • d) Le comité considère que ce cas est clos et n’appelle pas un examen plus approfondi.
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