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Informe definitivo - Informe núm. 360, Junio 2011

Caso núm. 2767 (Costa Rica) - Fecha de presentación de la queja:: 30-MAR-10 - Cerrado

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555. La plainte figure dans une communication de mars 2010 de la Confédération des travailleurs Rerum Novarum (CTRN), du Syndicat des travailleurs du Japdeva (SINTRAJAP), de la Confédération générale des travailleurs (CGT), de la Confédération du mouvement des travailleurs costariciens (CMTC), de la Confédération costaricienne des travailleurs démocratiques (CCTD), de la Centrale sociale Juanito Mora Porras (CSJMP) et de la Fédération des travailleurs de l’entreprise Limón (FETRAL).

  1. 555. La plainte figure dans une communication de mars 2010 de la Confédération des travailleurs Rerum Novarum (CTRN), du Syndicat des travailleurs du Japdeva (SINTRAJAP), de la Confédération générale des travailleurs (CGT), de la Confédération du mouvement des travailleurs costariciens (CMTC), de la Confédération costaricienne des travailleurs démocratiques (CCTD), de la Centrale sociale Juanito Mora Porras (CSJMP) et de la Fédération des travailleurs de l’entreprise Limón (FETRAL).
  2. 556. Le gouvernement a fait part de ses observations dans des communications en date du 29 septembre 2010 et du 2 février 2011.
  3. 557. Le Costa Rica a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 558. Dans leur communication de mars 2010, la Confédération des travailleurs Rerum Novarum (CTRN), le Syndicat des travailleurs du Japdeva (SINTRAJAP), la Confédération générale des travailleurs (CGT), la Confédération du mouvement des travailleurs costariciens (CMTC), la Confédération costaricienne des travailleurs démocratiques (CCTD), la Centrale sociale Juanito Mora Porras (CSJMP) et la Fédération des travailleurs de l’entreprise Limón (FETRAL) allèguent que le gouvernement du Costa Rica, par l’entremise du Président de la République en personne et de concert avec le patronat, a lancé une campagne antisyndicale visant à détruire le Syndicat des travailleurs du Comité de l’administration portuaire et du développement économique de la Vertiente Atlántica (SINTRAJAP), affilié à la CTRN. Ce syndicat a maintenu une position ferme en ce qui concerne la défense des droits des travailleuses et des travailleurs affiliés, et actuellement on s’efforce de tous les licencier, afin de permettre la privatisation des quais. Le syndicat a dû affronter une chaîne nationale de radio et de télévision, sur laquelle le Président de la République de l’époque s’exprime à son encontre et exige que soit tenue une assemblée syndicale destinée à informer sur la privatisation des quais, alors que quatre assemblées avaient déjà eu lieu à ce sujet, au cours desquelles les travailleuses et travailleurs se sont opposés à la privatisation, précisément à cause des préjudices que celle-ci leur causerait du point de vue professionnel et social.
  2. 559. Les organisations plaignantes précisent que, se servant d’une chaîne nationale de radio et de télévision, l’ancien Président de la République a publiquement attaqué le Syndicat des travailleurs du Comité de l’administration portuaire et du développement économique de la Vertiente Atlántica (SINTRAJAP) et ses dirigeants, de manière irrespectueuse et injurieuse, portant atteinte à l’image de l’organisation syndicale et de son comité directeur.
  3. 560. Le 13 février 2009, suivant la même ligne de conduite que celle adoptée par le gouvernement de la République, la ministre des Travaux publics et des Transports de l’époque a fait part à la presse écrite et télévisée de la position du gouvernement contre les syndicats, déclarant: «Le gouvernement déclare la guerre aux syndicats de Limón et appelle les entreprises privées à serrer les rangs afin d’activer la concession du nouveau quai des Caraïbes à une entreprise privée. Dans deux ou trois semaines, le gouvernement publiera l’appel d’offres relatif à un nouveau quai à Limón. Cette initiative servira, selon les propres mots de la ministre des Transports, de banderille au cours d’un combat qui durera toute l’année et dont l’un des objectifs est d’en finir avec les syndicats de dockers dans les Caraïbes. La ministre a rencontré les représentants des chambres patronales, et dans les termes les plus durs, ils ont indiqué qu’il s’agit d’une guerre au cours de laquelle il n’y aura pas de répit. Le gouvernement s’emploie à élaborer un plan visant à confier à un concessionnaire, pour un coût total de 880 millions de dollars, la construction d’un nouveau quai. Les installations portuaires actuelles seraient modernisées et, bien qu’elles resteraient la propriété de l’Etat, elles seraient exploitées selon un nouveau système, sans syndicats ni conventions collectives.»
  4. 561. Le président exécutif du Comité de l’administration des ports de la Vertiente Atlántica (JAPDEVA) a menacé le syndicat de le poursuivre en justice, au motif que celui-ci entrave la procédure d’attribution de concession portuaire. Pour atteindre ses objectifs, le président exécutif a conspiré avec le ministère du Travail et un groupe de travailleurs acolytes du gouvernement, autodénommé «groupe médiateur», celui-là même qui est apparu avec le Président de la République sur la chaîne de télévision nationale mentionnée au début de l’exposé. La poursuite en justice s’est concrétisée par l’intermédiaire de la Direction de l’inspection nationale du travail qui, avec le concours du ministre du Travail, accuse le syndicat devant le tribunal du travail de faits qui n’existent pas en droit, à savoir des pratiques professionnelles déloyales, qui ne peuvent être attribuées qu’au patronat. L’autodénommé «groupe médiateur» a servi de prête-nom pour présenter un recours en amparo devant la chambre constitutionnelle, devant laquelle il était allégué que le syndicat ne voulait pas convoquer d’assemblée, ce qui n’a jamais été le cas; conclusion à laquelle est parvenue la chambre constitutionnelle, qui a déclaré le recours irrecevable.
  5. 562. Dans le Diario Extra du mardi 19 janvier 2010, le Président de la République a publié un article dans lequel il déclare: «De plus en plus d’employés adhèrent à la proposition du gouvernement relative à l’attribution de la concession portuaire. En échange du renoncement à leur affiliation au syndicat et afin que l’administration du port puisse être confiée à une entreprise privée, nous leur avons offert 137 millions de dollars à titre d’indemnisation. Cela signifie que chaque travailleur recevra des dizaines de millions de colons simplement pour avoir quitté le syndicat.»
  6. 563. Pour détruire le comité directeur du SINTRAJAP, le gouvernement élabore une stratégie et la met en œuvre dans le but de décapiter l’organisation syndicale, et pour cela il utilise le «groupe médiateur» précité, qui lui sert de prête-nom pour éliminer le comité directeur du SINTRAJAP de manière illégale, lequel a été nommé par les travailleurs pour la période allant de 2009 à 2011. Les faits se sont déroulés de la manière suivante:
  7. 1) le syndicat selon les statuts convoque une assemblée de mi-mandat le 8 janvier 2010 dans ses locaux; l’un des hommes de paille de l’autodénommé «groupe médiateur», M. Ivansky Blackwood Sharpe, qui plus tard se joint au comité directeur illégitime, demande au ministère de la Santé de suspendre l’assemblée, au motif que les locaux ne sont pas conformes aux normes requises pour sa tenue;
  8. 2) le ministère de la Santé ordonne au syndicat de suspendre l’assemblée en question. Le syndicat annule l’assemblée, car s’il enfreignait une ordonnance du ministère de la Santé, il s’exposerait à des poursuites pénales. L’autodénommé «groupe médiateur» se réunit ensuite avec un groupe de travailleurs et tient l’assemblée (mais selon les statuts et le Code du travail, seul le comité directeur peut convoquer l’assemblée par l’entremise de son secrétaire général, faute de quoi celle-ci n’a aucune validité);
  9. 3) au cours de cette assemblée, l’autodénommé «groupe médiateur» procède à la destitution du comité directeur et approuve la concession des ports, avec la participation à peine de 284 travailleuses et travailleurs sur les 1 500 membres que compte l’organisation; et
  10. 4) une fois que le comité directeur putschiste présente les documents de l’assemblée (au cours de laquelle le comité directeur légitime désigné pour la période 2009-2011 a été destitué) au Département des organisations sociales (bureau des syndicats), les centrales syndicales rencontrent le ministre du Travail et, dans un document, lui exposent les raisons légales et juridiques pour lesquelles ni l’assemblée (qui n’a pas respecté les prescriptions et procédures légales et statutaires) ni le comité directeur ne doivent être inscrits. Malgré cela, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale valide cette assemblée et enregistre le comité directeur (ce qui lui confère immédiatement la personnalité juridique), sans avertir le comité directeur légitime (dont le secrétaire général est M. Rolando Blear), afin qu’il se prononce sur l’accord conclu par l’assemblée qui a procédé à la destitution, étant donné que cette assemblée n’a pas préalablement informé les personnes concernées (le comité directeur du SINTRAJAP) de sa décision, violant ainsi leur droit légitime de se défendre, et ce sans que les garanties d’une procédure régulière n’aient été respectées.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 564. Dans sa communication datée du 29 septembre 2010, le gouvernement déclare que les allégations des parties plaignantes ne sont plus d’actualité, car les membres du comité directeur du SINTRAJAP, exerçant leur droit constitutionnel d’accès à la justice prévu par le système juridique costaricien, ont présenté différentes actions en justice visant à faire la lumière sur les faits qui se sont déroulés au sein de cette organisation syndicale:
  2. 1) procès administratif, dossier no 10-641-1027-CA réclamant la suspension de l’acte destituant les demandeurs de leur statut de membre du comité directeur du SINTRAJAP, l’annulation de l’enregistrement qui inscrit de nouveaux mandataires et la restitution aux demandeurs de leur statut de membre du comité directeur;
  3. 2) recours en amparo, dossier no 10-3819-0007-CO alléguant que les garanties d’une procédure régulière n’ont pas été respectées;
  4. 3) recours en inconstitutionnalité contre la modification de la convention collective du JAPDEVA qui autorise le versement d’indemnités, au motif que cela constituerait un usage abusif des fonds publics: dossier no 10-008049-007;
  5. 4) recours en amparo, dossier no 10-3500-0007-CO alléguant la violation des garanties d’une procédure régulière et l’intrusion du ministère de la Sécurité publique et du ministère de la Santé dans les activités syndicales; et
  6. 5) recours en amparo, dossier no 10-2977-0007-CO alléguant la violation des garanties d’une procédure régulière et du principe de l’autonomie syndicale.
  7. 565. Le gouvernement indique que la chambre constitutionnelle a récemment rendu sa décision à l’égard de deux de ces recours, demandant l’annulation des «accords conclus aux assemblées générales ordinaires tenues par le SINTRAJAP les 8, 15 et 19 janvier 2010 et de la désignation du nouveau comité directeur...».
  8. 566. En conséquence, le gouvernement du Costa Rica, reconnaissant la suprématie des principes de liberté syndicale et suivant les dispositions de l’organe juridictionnel suprême, a procédé à l’annulation de l’inscription du comité directeur nommé aux assemblées susmentionnées par la chambre constitutionnelle, et en lieu et place, a fait enregistrer et réinstaller le comité directeur précédent, en vertu de la résolution no 280/J-7/DOS/2010 du 26 août 2010 à 14 h 40 du Département des organisations sociales du ministère du Travail et de la Sécurité sociale. Compte tenu de ce qui précède, il apparaît clairement que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a rétabli, avec la rapidité appropriée, le statut juridique réclamé par les demandeurs dans les deux affaires résolues par l’organe juridictionnel suprême, statut qui correspond aux demandes formulées par les organisations plaignantes. Par ailleurs, le 6 septembre 2010 dernier, la chambre constitutionnelle a déclaré irrecevable un autre des recours en amparo interjetés, et a en outre résolu que la révision de la convention collective du JAPDEVA ne pouvait pas être effectuée par la juridiction constitutionnelle, comme il avait été demandé dans le cadre d’un recours en inconstitutionnalité. Cette décision n’a pas empêché que les parties, tant l’employeur JAPDEVA que le syndicat rétabli, entament un processus de négociation de la convention collective, auquel participe également le ministère du Travail et de la Sécurité sociale en tant que facilitateur du dialogue social.
  9. 567. A ce jour, un procès administratif suit son cours devant les tribunaux de justice, étape par étape, conformément à la procédure régulière.
  10. 568. De plus, il est important d’apporter une correction en disant que les allégations des parties plaignantes et les circonstances qui ont entouré les événements qui se sont déroulés au sein du syndicat SINTRAJAP ne permettent pas de conclure que le gouvernement a commis une violation de la législation du travail en vigueur et des conventions fondamentales de l’OIT.
  11. 569. Il est dans l’intérêt du gouvernement du Costa Rica de préciser que, bien qu’il considère que toutes les institutions publiques et les services impliqués dans l’affaire qui nous occupe ont agi conformément au droit et au principe de la légalité, ces institutions sont également soumises à un contrôle de constitutionnalité effectué par la chambre constitutionnelle, organe juridictionnel suprême du système juridique.
  12. 570. Ainsi, comme il a été indiqué dans les lignes qui précèdent, la chambre constitutionnelle a déjà statué sur des éléments identiques à ceux évoqués par les organisations plaignantes. Pour cette raison, le gouvernement considère que la présente plainte n’est pas d’actualité et ne mérite pas que l’Organisation poursuive son examen, puisque les faits discutés ont été résolus et réparés par les instances judiciaires et administratives compétentes.
  13. 571. Toutefois, dans le but de présenter une vision claire des faits, le gouvernement du Costa Rica répond aux allégations des organisations plaignantes dans les paragraphes qui suivent.
  14. 572. S’agissant de la prétendue campagne du gouvernement destinée à discréditer et éliminer le syndicat SINTRAJAP, le gouvernement réfute cette accusation des organisations plaignantes, car il s’agit d’une appréciation subjective, dénuée de tout fondement juridique et sans aucun élément de preuve. Il est inexact que le gouvernement a lancé une campagne visant à discréditer et éliminer le syndicat.
  15. 573. Les actions entreprises par le gouvernement du Costa Rica l’ont été en toute légalité, dans un contexte normatif et technique qui lui permet de promouvoir la modernisation portuaire comme un élément essentiel du développement socio-économique du pays.
  16. 574. Afin de bien comprendre qu’aucune des actions du gouvernement n’a été menée à des fins antisyndicales, il est important d’évoquer le processus de modernisation des ports nationaux en général.
  17. 575. Concernant le processus de modernisation des ports nationaux, ce sont les tribunaux qui sont habilités à se prononcer sur un processus de cette nature et à le qualifier. A ce sujet, il existe des décisions de la chambre constitutionnelle relatives à la légalité des processus de modernisation – ces décisions considèrent que, si la convention collective a été modifiée dans le but d’y inclure les frais d’indemnisation des travailleurs démissionnaires pour permettre au gouvernement de mettre en œuvre son processus de renforcement et de modernisation, cela constitue un élément suffisant pour autoriser ce processus et que le transfert ne constitue pas en soi une norme atypique.
  18. 576. Pour ce qui concerne davantage les organisations plaignantes, il est important de préciser que le Plan national de développement 2006-2010 a fixé, comme l’un de ses principaux axes de développement, la modernisation des ports de la côte Caraïbe, avec pour objectif de générer des sources d’emploi et d’attirer des ressources provenant des exportations, qui atténuent fortement le grave retard social dont souffre la province de Limón, où les indices de pauvreté atteignent des niveaux très préoccupants.
  19. 577. Le Costa Rica enregistre un retard de plusieurs années à l’égard des investissements et des infrastructures nécessaires pour l’entretien des navires sur cette côte, ce qui l’empêche d’être compétitif en matière de commerce extérieur.
  20. 578. Compte tenu de cela, le gouvernement a la grande responsabilité d’adopter des mesures qui permettent de remédier à la situation. Toutefois, il ne possède pas les ressources nécessaires pour procéder à l’expansion portuaire établie, techniquement, par le Plan maître portuaire, lequel a reçu l’autorisation de l’Inspection générale des finances de la République, organe suprême de contrôle de l’Etat.
  21. 579. A elle seule, la construction du nouveau terminal des conteneurs de Limón demande des investissements de près d’un milliard de dollars, et l’optimisation des services portuaires actuellement offerts dans le complexe portuaire Limón-Moín demande des investissements d’au moins 100 millions de dollars. Ces investissements devraient prendre forme au moyen de procédés de financement prévus par le système juridique national. Premièrement, par la concession de travaux publics avec service public, au sens de la loi no 7762 et, deuxièmement, en vertu de l’article 74 de la loi relative aux contrats administratifs, par la concession de la gestion de services publics. Le premier procédé se trouve à un niveau d’avancement important, étant donné que l’appel d’offres a déjà reçu l’aval de l’Autorité régulatrice des services publics et de l’Inspection générale des finances de la République, organes de contrôle de la gestion des finances publiques.
  22. 580. Quant à la représentation du syndicat SINTRAJAP, le gouvernement déclare que, dans les registres du Département des organisations sociales du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, il est indiqué qu’effectivement M. Ronaldo Blear était titulaire du poste de secrétaire général du syndicat du 31 janvier 2009 au 31 janvier 2011.
  23. 581. Concernant le refus du comité directeur du SINTRAJAP de convoquer l’assemblée, le processus de modernisation du port de Moín nécessite l’utilisation d’un procédé de gestion du service public dans lequel seul change l’opérateur portuaire. Pour mener à bien ce processus, il est nécessaire de verser des indemnités aux travailleurs actuels de JAPDEVA. Au départ, il a été proposé qu’une indemnité s’élevant à 1,7 million de colons par année travaillée à JAPDEVA soit versée à chaque travailleur, jusqu’à un maximum de vingt années et, pour les années supplémentaires, un montant additionnel de 1 million de colons. Le précédent comité directeur du SINTRAJAP a soumis cette proposition à discussion au cours d’une assemblée du syndicat, qui l’a rejetée, et a demandé à la place qu’une somme de 500 000 dollars soit versée à chaque travailleur, une somme considérée par les autorités gouvernementales comme déraisonnable et disproportionnée. Plus tard, le gouvernement a amélioré le plan d’indemnisation, faisant passer à 2,7 millions de colons par année l’indemnité à verser à chaque travailleur, jusqu’à un maximum de vingt ans. Toutefois, le comité directeur du syndicat a refusé de porter cette nouvelle proposition à la connaissance d’une assemblée extraordinaire, qui constitue l’organe suprême d’une organisation de cette nature, empêchant les travailleurs membres d’exercer les droits inhérents à la liberté d’association et à l’autonomie syndicale.
  24. 582. Les statuts du SINTRAJAP contiennent des règles qui permettent à un groupe de membres de réunir des signatures et de demander au comité directeur la tenue d’une assemblée extraordinaire. Par conséquent, les travailleurs membres ont recueilli des signatures et, étant donné qu’ils avaient validé la signature de 25 pour cent des membres, ils ont demandé que soit tenue cette assemblée. L’article 15 des statuts stipule ce qui suit:
    • Vingt-cinq pour cent des membres du syndicat peuvent demander au comité directeur, après avoir accompli les formalités requises, que soit convoquée une assemblée générale extraordinaire (...). De son côté, le comité directeur (...) a l’obligation de procéder à la convocation demandée, au plus tard huit jours après en avoir reçu la demande.
    • De même, l’article 12 des statuts du SINTRAJAP dispose que:
    • L’assemblée générale constitue l’autorité suprême du syndicat, laquelle se réunit ordinairement une fois par an, et extraordinairement, chaque fois que le comité directeur du syndicat ou 25 pour cent de ses membres le jugent nécessaire.
  25. 583. En l’absence d’une réponse à leur demande qu’une assemblée soit convoquée conformément aux statuts du SINTRAJAP et voyant que leurs droits fondamentaux n’étaient pas respectés, les travailleurs membres ont demandé l’intervention du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, lequel, s’appuyant sur l’article 608 et concordants du Code du travail, a engagé d’urgence une procédure pour violation de la législation du travail.
  26. 584. Pour une meilleure compréhension, il convient de mentionner la déclaration DNI-UAL-018-10 de la Direction nationale de l’inspection du travail à cet égard, à savoir que:
    • Les inspecteurs du travail mentionnés ayant constaté que 25 pour cent des travailleurs signataires membres actifs du SINTRAJAP ont accompli les formalités prescrites pour convoquer une assemblée conformément à l’article 15 des statuts, mais que leur demande a été rejetée en date du 20 octobre 2009, sans aucun motif légal, il est considéré qu’il s’agit d’une violation desdits statuts, le délai de préavis prescrit s’étant échu le 6 novembre 2009, et l’accusé ayant eu trois jours pour se mettre en règle mais ne l’ayant pas fait, comme l’indique le rapport no SJ-DNI-0321-09 approuvé par les inspecteurs du travail le 19 novembre 2009. La Constitution garantit aux travailleurs le droit de s’organiser et de promouvoir et défendre leurs intérêts, individuellement ou collectivement. Tout acte qui limite ou restreint ces droits est considéré comme une violation de la législation du travail, raison pour laquelle la Direction nationale de l’inspection du travail a déposé, en date du 19 novembre 2009, une plainte pour violation de la législation du travail devant les tribunaux de justice de Limón.
  27. 585. Après que la plainte déposée contre le comité directeur du SINTRAJAP ait été reçue par le tribunal compétent, le 29 décembre 2009, le comité directeur a convoqué, en première convocation, une assemblée ordinaire dont l’un des points inscrits à l’ordre du jour était l’indemnisation, et qui devait avoir lieu le 8 janvier 2010 à 13 heures, dans les locaux principaux du syndicat.
  28. 586. Le gouvernement ajoute que, le 7 janvier 2010, M. Ivansky Blacwood Sharpe, membre du SINTRAJAP, a demandé par écrit au siège régional du ministère de la Santé de la province de Limón de vérifier l’état des locaux avant la tenue de l’assemblée, car il le jugeait nécessaire compte tenu du nombre de membres attendus à cette réunion et de la taille réduite du local. Cette demande a été dûment traitée par ce ministère, comme il est indiqué dans le rapport HA-ARS-L-RS-19-2010 de la Direction régionale de la santé de cette province, qui déclare à ce sujet: «... Aucune activité n’est autorisée dans les locaux du SINTRAJAP, situés au centre de Limón.» On peut facilement déduire de ce qui précède que l’affirmation des parties plaignantes selon laquelle le ministère de la Santé a ordonné la suspension de l’assemblée est inexacte. Au contraire, l’ordonnance de ce ministère visait à recommander que l’assemblée n’ait pas lieu dans les locaux choisis par le comité directeur du SINTRAJAP, en raison de la taille réduite du local et afin de protéger la santé des personnes attendues, suggérant ainsi à cet organe directeur, compte tenu du grand nombre de membres qui assisteraient à l’assemblée, de rechercher une solution adéquate.
  29. 587. Concrètement, dans un rapport sur ce sujet, la Direction régionale de la santé de la province de Limón a indiqué ce qui suit:
    • ... compte tenu du Règlement relatif aux concentrations massives, étant donné que, le 8 janvier 2010, tous les membres du syndicat ont été convoqués à une assemblée générale ordinaire de mi mandat qui aura lieu à 13 heures, ce qui soit dit en passant représente plus de 1 000 visiteurs, et compte tenu de l’évaluation préalable, ces installations n’offrent pas l’espace requis pour le déroulement de cette assemblée. Pour cette raison, cette direction régionale ne recommande pas que l’on convoque plus de 1 000 personnes dans un espace de 150 mètres carrés, car il ne présente pas la capacité requise pour accueillir un tel nombre de membres.
  30. 588. Il convient de noter que le ministère de la Santé, respectant le système juridique, n’a à aucun moment ordonné la suspension de l’assemblée ni empêché sa tenue, mais a simplement présenté une objection quant au lieu de sa tenue, en laissant la possibilité qu’elle se déroule à un autre endroit, car il a l’obligation légale de garantir la protection et l’amélioration de l’état de santé de la population. Ce qui précède est conforme à la loi générale sur la santé et au règlement général relatif aux permis sanitaires de fonctionnement, décret exécutif no 34728-S et textes le modifiant.
  31. 589. Quant au déroulement des assemblées des 8, 15 et 29 janvier 2010, comme il a déjà été indiqué, le ministère de la Santé n’a à aucun moment empêché la tenue de l’assemblée, mais en vertu de ses compétences, a présenté une objection quant au lieu de sa tenue, pour des raisons de santé publique, en laissant la possibilité qu’elle se déroule à un autre endroit.
  32. 590. Bien que les parties plaignantes déclarent que l’assemblée a été annulée, tous les travailleurs n’ont toutefois pas été informés de l’annulation faite par le comité directeur (un jour plus tôt). Par conséquent, les travailleurs membres se sont présentés au lieu indiqué et, conformément aux dispositions de l’article 345, alinéa h) du Code du travail, voyant que le quorum n’était pas réuni, ont fixé une nouvelle date pour la tenue de la seconde assemblée, conformément au système juridique national en vigueur. C’est de cette manière qu’ils sont parvenus à se constituer en assemblée et, ayant constaté que le quorum (deux tiers des membres) requis pour mener à bien la première assemblée n’était pas réuni, ils se sont mis d’accord pour convoquer une seconde assemblée, conformément aux statuts du syndicat, pour le 15 janvier 2010 à 8 heures, dans l’un des sous-sols des locaux du JAPDEVA.
  33. 591. Les membres présents à l’assemblée, par lettre circulaire, courrier électronique interne et télécopie, informent les travailleurs qu’une assemblée a été convoquée à 8 heures le 15 janvier 2010. Ce jour-là, étant donné que moins de la moitié plus un des membres était présente à la deuxième assemblée (à laquelle, selon l’acte notarié, 550 membres ont assisté), les participants décident à l’unanimité de tenir une troisième assemblée à 9 heures le même jour, quel que soit le nombre de membres présents, conformément aux dispositions du Code du travail.
  34. 592. Compte tenu de ce qui précède, la situation exposée est considérée comme un conflit entre les travailleurs membres et le comité directeur syndical, dû au non-respect des dispositions statutaires, le comité ayant refusé de convoquer une assemblée extraordinaire, au cours de laquelle les travailleurs souhaitaient prendre eux-mêmes des décisions sur des sujets qui les concernent. Il est évident que le gouvernement du Costa Rica n’a pas pris part au déroulement des assemblées, et que le caractère confus des communications est directement lié aux agissements des membres du comité directeur.
  35. 593. S’agissant du rôle joué par le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, en vertu du système juridique en vigueur, ce ministère n’est pas habilité, en matière d’enregistrement, à exercer la fonction de police administrative, un rôle qu’il lui est interdit de jouer au nom des principes de l’autonomie et de l’indépendance des syndicats, implicitement reconnus par l’article 60 de la Constitution et, plus encore, par la convention no 87 de l’OIT, dûment approuvée et ratifiée par le Costa Rica. A ce propos, la chambre constitutionnelle de la Cour suprême de justice, à plusieurs occasions, a reconnu que le ministère du Travail était habilité à procéder à des enregistrements. Le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, par l’intermédiaire du Département des organisations sociales, à la demande du comité directeur désigné, a inscrit les accords dont la conformité lui a été dûment certifiée et qui font l’objet de l’enregistrement.
  36. 594. Selon la jurisprudence, le «principe de la liberté d’organisation empêche tout acte administratif qui a des répercussions sur l’existence même du syndicat, car une mesure de cette nature ne peut être prise que par les tribunaux de justice, conformément aux articles 350 et 351 du code précité […] Le ministère peut seulement vérifier que les documents fournis sont conformes aux prescriptions légales (règle énoncée dans l’article 344 du Code du travail), puisque les questions qui peuvent surgir entre les membres au sujet des anomalies constatées à l’assemblée et qui ne figurent pas dans le procès-verbal doivent être soumises aux tribunaux du travail...».
  37. 595. En dépit de ce qui précède, comme il a été expliqué au début, le Département des organisations sociales du ministère du Travail et de la Sécurité sociale a procédé à l’annulation de l’inscription effectuée par le comité directeur nommé aux assemblées mentionnées précédemment, et a enregistré puis réinstallé le comité directeur précédent, en vertu de la résolution n°280/J-7/DOS/2010 du 26 août 2010. Pour ces raisons, le gouvernement du Costa Rica répète qu’il considère que la présente plainte n’est pas d’actualité, étant donné que le comité directeur du SINTRAJAP a été rétabli, conformément à la décision de l’organe juridictionnel suprême du pays.
  38. 596. Concernant le prétendu non-respect du principe de la régularité des procédures et de l’autonomie syndicale, le gouvernement déclare que les résolutions prises par les plus hautes instances judiciaires du pays, comme la chambre constitutionnelle 11 et la deuxième chambre 12, contiennent une jurisprudence abondante et détaillée sur les garanties d’une procédure régulière. Les articles 41 et 39 de la Constitution politique et l’article 8 de la Convention américaine relative aux droits de l’homme consacrent ce principe comme un droit fondamental de toute personne, et le gouvernement du Costa Rica a joué un rôle de promoteur et de contrôleur, au moyen du contrôle de la constitutionnalité et de la judiciarité existant. Les garanties d’une procédure régulière comprennent, selon cette jurisprudence, le droit d’être informé de la nature et de la finalité de la procédure, le droit d’être entendu, le droit de préparer et de présenter une défense, le droit de fournir des preuves à décharge, le droit d’accéder à l’information contenue dans le dossier, le droit de bénéficier d’une décision de justice juste et fondée, le droit d’être informé de cette décision et celui de faire appel de la décision. Toutefois, les faits évoqués par les parties plaignantes, à savoir la convocation de l’assemblée, sa tenue et la conclusion d’accords, sont des questions qui concernent uniquement les travailleurs membres et le comité directeur du syndicat. Le gouvernement, au nom du principe de la liberté syndicale consacré par la Constitution et la législation internationale, n’a aucune compétence pour intervenir dans ces domaines. Par conséquent, lorsqu’une quelconque irrégularité survient au cours de ces activités, ce sont les travailleurs eux-mêmes qui peuvent faire appel aux instances juridictionnelles mises à leur disposition par le système juridique national, s’ils considèrent que leurs droits ont été bafoués. C’est au titre de ces droits que les membres du comité directeur du SINTRAJAP ont présenté différentes actions en justice dans le but de faire la lumière sur les faits rapportés, en vertu de la législation costaricienne en matière de travail, recours à l’égard desquels, pour la plupart, la justice a rendu une décision, à l’exception d’un procès administratif en cours devant les tribunaux.
  39. 597. Le gouvernement a agi conformément aux principes de la légalité et de la liberté syndicale consacrés par la Constitution, dans le respect des dispositions de l’organe juridictionnel suprême, en rétablissant le statut juridique demandé par les demandeurs dans les recours à l’égard desquels une décision a été rendue, avec la rapidité appropriée, ce qui correspond aux demandes formulées par les organisations plaignantes dans leurs allégations. De même, il a été attesté que le pays garantit un accès adéquat à la justice et la protection des droits de tous les travailleurs, indépendamment de leur affiliation syndicale. Le gouvernement répète que le processus de modernisation des ports nationaux n’a pas pour finalité d’éliminer les syndicats de travailleurs, mais s’inscrit dans le cadre de propositions de politiques nationales en matière de développement économique. Le ministère du Travail, à la suite des récentes résolutions de la chambre constitutionnelle, a organisé des réunions avec le comité directeur rétabli du syndicat de travailleurs, présidé par M. Ronaldo Blear, dans le but de parvenir à des accords au moyen d’un dialogue social transparent.
  40. 598. Dans sa communication du 2 février 2011, le gouvernement indique que, le 21 janvier 2011, le SINTRAJAP a organisé un scrutin et les travailleurs affiliés ont réélu pour un quatrième mandat consécutif le comité directeur présidé par M. Ronaldo Blear, qui assumera pendant deux ans de plus les fonctions de secrétaire général du Syndicat des travailleurs du JAPDEVA.
  41. 599. En outre, le gouvernement fait savoir que, à ce jour, trois jugements de la chambre constitutionnelle ont été prononcés (et figurent en annexe). Ils correspondent aux procès des recours en amparo dont a fait état le gouvernement dans sa réponse au présent cas et qui ont été présentés par l’organisation plaignante. La lecture des textes de référence démontre que les institutions publiques n’ont pas failli au respect qu’elles doivent à la législation du travail en vigueur ni aux conventions fondamentales de l’OIT et que les circonstances qui ont entouré les faits dénoncés sont dues à des questions relevant de l’organisation interne du syndicat et de ses affiliés.
  42. 600. Le gouvernement souligne que les requérants ont joui d’un libre accès aux instances juridictionnelles et administratives pour faire connaître les aspects concernant lesquels ils sont en désaccord. Le gouvernement informe également que tant l’entité employeur JAPDEVA que les dirigeants syndicaux du SINTRAJAP, qui viennent d’être désignés pour un nouveau mandat de deux ans, ont pu poursuivre un dialogue ouvert dans le cadre de la négociation de la convention collective, à laquelle participe également le ministère du Travail et de la Sécurité sociale en qualité de facilitateur du dialogue social.
  43. 601. Le gouvernement conclut en demandant que le cas no 2767 soit rejeté dans sa totalité.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 602. Le comité observe que, dans le présent cas, les organisations plaignantes allèguent: 1) des déclarations de nature antisyndicale de la part de l’ancien Président de la République et de l’ancienne ministre des Travaux publics et des Transports dans le cadre du processus de modernisation (privatisation des quais administrés par le JAPDEVA et licenciements massifs) visant à détruire le comité directeur du syndicat SINTRAJAP qui s’opposait à la privatisation et qui, plus tard, a réclamé des indemnités de licenciement très supérieures à celles offertes par les autorités; 2) l’utilisation par les autorités et le président exécutif du JAPDEVA d’un groupe de travailleurs (l’autodénommé «groupe médiateur») pour destituer le comité directeur du SINTRAJAP à une assemblée syndicale illégale et nommer un comité directeur ayant des affinités avec les autorités et l’employeur; et 3) l’enregistrement par le ministère du Travail d’un nouveau comité directeur en accord avec les autorités et la destitution du comité directeur légitime. Le comité prend note que le gouvernement nie le caractère antisyndical des mesures mentionnées et inscrit les allégations dans le cadre d’un conflit entre le comité directeur du syndicat et un groupe de membres qui, selon le gouvernement, a pris des mesures lorsque le comité directeur du syndicat n’a pas porté à la connaissance des travailleurs la deuxième offre d’indemnisation de l’employeur. Le gouvernement indique qu’une des assemblées organisées par le groupe de membres en question a réuni 550 participants.
  2. 603. En ce qui concerne les allégations de déclarations antisyndicales réalisées par les autorités aux fins du processus de modernisation du JAPDEVA, le comité prend note que les organisations syndicales reproduisent les déclarations suivantes faites à la presse:
    • – Dans le Diario Extra du mardi 19 janvier 2010, le Président de la République a déclaré:
    • De plus en plus d’employés adhèrent à la proposition du gouvernement relative à l’attribution de la concession portuaire. En échange d’un renoncement à leur affiliation au syndicat et afin que l’administration du port puisse être confiée à une entreprise privée, nous leur avons offert 137 millions de dollars à titre d’indemnisation. Cela signifie que chaque travailleur recevra des dizaines de millions de colons simplement pour avoir quitté le syndicat.
    • – Le 13 février 2009, la ministre des Travaux publics et des Transports d’alors a fait part à la presse écrite et télévisée de la position du gouvernement contre les syndicats, en ces termes:
    • Le gouvernement déclare la guerre aux syndicats de Limón et appelle les entreprises privées à serrer les rangs pour activer la concession du nouveau quai des Caraïbes à une entreprise privée. Dans deux ou trois semaines, le gouvernement publiera l’appel d’offres relatif à un nouveau quai à Limón. Cette publication servira, selon les propres mots de la ministre des Transports, de banderille au cours d’un combat qui durera toute l’année et dont l’un des objectifs est d’en finir avec les syndicats de dockers dans les Caraïbes. La ministre a rencontré les représentants des chambres patronales, et dans les termes les plus durs, ils ont indiqué qu’il s’agit d’une guerre au cours de laquelle il n’y aura pas de répit. Le gouvernement s’emploie à élaborer un plan visant à confier à un concessionnaire, pour un coût total de 880 millions de dollars, la construction d’un nouveau quai. Les installations portuaires actuelles seraient modernisées et, bien qu’elles resteraient la propriété de l’Etat, elles seraient exploitées selon un nouveau système, sans syndicats ni conventions collectives.
  3. 604. Le comité estime que, bien que les autorités ont le droit d’informer la population de leurs politiques et décisions et de faire connaître leur point de vue concernant les positions des organisations syndicales, notamment lorsque celles-ci s’opposent à un processus de privatisation impliquant un nombre élevé de licenciements, dans le présent cas, les déclarations des autorités semblent avoir dépassé le cadre de l’exercice de la liberté d’expression, car elles encouragent explicitement les membres du syndicat à renoncer à leur affiliation et préconisent un nouveau système sans syndicats.
  4. 605. Le comité fait remarquer que, bien que le gouvernement déclare qu’il n’y a pas eu de campagne antisyndicale et que ses actions n’avaient pas de finalité antisyndicale comme celle d’éliminer le syndicat, il n’a pas nié les déclarations reproduites dans les allégations, lesquelles, dans la mesure où elles sont susceptibles de pousser les membres du syndicat à renoncer à leur affiliation ou à poursuivre la destruction du syndicat, sont contraires à l’article 2 de la convention no 87. Le comité souligne l’importance pour les autorités de ne pas faire devant les médias des déclarations susceptibles d’avoir une incidence sur le droit des travailleurs de s’affilier à l’organisation syndicale de leur choix.
  5. 606. Concernant l’allégation selon laquelle les autorités et le président exécutif du JAPDEVA se sont servis d’un groupe de travailleurs (l’autodénommé groupe médiateur) pour destituer – en tenant des assemblées illégales et contraires aux statuts syndicaux – le comité directeur du SINTRAJAP et nommer un comité directeur ayant des affinités avec les autorités et, concernant l’enregistrement ultérieur par le ministère du Travail de ce comité directeur patronné par le groupe médiateur, le comité prend note que le gouvernement déclare que la Cour suprême a ordonné que le précédent comité directeur soit rétabli et que l’enregistrement du nouveau comité directeur soit annulé, un ordre auquel le ministère du Travail a immédiatement obéi. Le comité relève que les allégations soulignent des ingérences des ministères des Travaux publics et des Transports et de la Santé (lequel, selon les allégations, a suspendu une assemblée du comité directeur légitime du SINTRAJAP au motif que le lieu prévu pour la réunion n’était pas conforme aux normes requises et a fait en sorte que le groupe médiateur se réunisse avec un groupe de travailleurs et tienne une assemblée avec 286 membres seulement sur les 1 500 que compte le syndicat, au cours de laquelle un comité directeur illégitime a été nommé, que le ministre du Travail s’est empressé d’enregistrer). Le comité observe que le gouvernement présente une version très différente des faits, à savoir que le local (de 150 mètres carrés) choisi pour l’assemblée était trop petit pour accueillir plus de 1 000 personnes, et qu’en vertu de la règlementation en vigueur le ministre de la Santé, à la demande d’un membre du SINTRAJAP (du groupe médiateur), a présenté une objection à l’égard du local choisi, pour des raisons de santé publique, et recommandé que l’assemblée ne se tienne pas à cet endroit, mais n’a pas ordonné la suspension de l’assemblée. Selon le gouvernement, les faits se sont déroulés dans le cadre d’un conflit survenu entre des travailleurs membres (selon le gouvernement, seuls 550 membres se sont présentés à la deuxième assemblée, ces derniers s’étant réunis parce que le comité directeur n’avait pas informé les travailleurs de la deuxième proposition d’indemnisation faite par l’employeur) et le comité directeur du syndicat, sans que les autorités n’aient participé aux assemblées. Le gouvernement fait remarquer que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale – qui n’est pas habilité à exercer la fonction de police administrative – a inscrit les accords dont la conformité lui avait été dûment certifiée, mais a plus tard annulé l’inscription du nouveau comité directeur à la suite de l’arrêt par ordonnance rendu par l’autorité judiciaire; par conséquent – souligne le gouvernement – le problème à l’origine de la plainte des organisations plaignantes a été résolu.
  6. 607. Le comité prend note des décisions judiciaires sur ce thème envoyées par le gouvernement. Le comité souhaite reproduire ici les faits dont la chambre constitutionnelle de la Cour suprême de justice estime qu’ils ont été démontrés:
    • a) Le 29 décembre 2009, le comité directeur du SINTRAJAP en fonction à ce moment-là prévoit la réunion en première convocation de l’assemblée générale de mi-mandat le 8 janvier 2010.
    • b) Par le biais du dossier HA-ARS-L-RS-19-2010 du 7 janvier 2010, la Direction régionale de la santé du ministère de la Santé refuse au SINTRAJAP l’autorisation de tenir une assemblée générale de mi-mandat le 8 janvier 2010, car le lieu de réunion choisi ne présente pas les conditions techniques et sanitaires suffisantes.
    • c) Le 8 janvier 2010, le secrétaire général du SINTRAJAP communique aux affiliés la suspension de l’assemblée générale prévue pour ce même jour.
    • d) Le 8 janvier 2010, un groupe d’affiliés du SINTRAJAP décide de réunir en deuxième convocation une assemblée générale ordinaire le 15 janvier 2010.
    • e) Le 15 janvier 2010, en troisième convocation de l’assemblée générale ordinaire du SINTRAJAP, un affilié présente une motion tendant à destituer complètement le comité directeur en fonction à ce moment-là; la motion est approuvée par la majorité des assistants.
    • f) Le 15 janvier 2010, un groupe d’affiliés du SINTRAJAP fixe au 29 janvier 2010 la poursuite de l’assemblée générale ordinaire, désigne le nouveau comité directeur ad hoc et transfère le 25 janvier 2010 les fonctions des membres du comité directeur destitués.
    • g) Le 25 janvier 2010, le nouveau comité directeur du SINTRAJAP notifie les membres de l’ancien comité directeur que l’audience pertinente leur sera accordée le 29 février 2010.
    • h) Le 29 janvier 2010, un groupe d’affiliés du SINTRAJAP poursuit l’assemblée générale ordinaire de mi-mandat.
    • i) Entre le 20 et le 25 janvier 2010, les dirigeants de l’ancien comité directeur se réunissent avec divers fonctionnaires du ministère du Travail et de la Sécurité sociale.
    • j) Le 29 janvier 2010, le comité directeur destitué ne se présente pas à l’audience que lui avait accordée le nouveau comité ad hoc.
    • k) Par la résolution 038-DOS-2010 du 19 février 2010 à 15 heures, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale enregistre l’assemblée générale ordinaire qui avait eu lieu, rassemblant un groupe d’associés du SINTRAJAP, les 8, 15 et 29 janvier 2010, et il enregistre également la désignation du nouveau comité directeur.
    • l) Le 22 février 2010, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale communique au plaignant (M. Ronaldo Blear, secrétaire général du syndicat) la résolution 038-DOS-2010 du 19 février 2010 à 15 heures.
  7. 608. Le comité note que, par ces jugements, la chambre constitutionnelle de la Cour suprême a décidé: 1) de rétablir dans ses fonctions le secrétaire général du syndicat et les autres membres du comité directeur parce que l’assemblée du 15 janvier 2010 ne leur a pas permis d’exercer leur droit (constitutionnel) de se défendre (la Cour suprême ne se prononce en revanche pas sur la question de savoir si ces dirigeants ont eu ou non une conduite qui justifie leur destitution); 2) d’annuler la décision du ministère du Travail concernant l’enregistrement du comité directeur ad hoc et de réintégrer le comité directeur dans ses fonctions. Le comité estime que cette annulation de la décision ministérielle n’implique pas en soi un reproche au ministère car, s’agissant d’appliquer la législation, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale doit se limiter à vérifier que les exigences formelles sont respectées lorsqu’il enregistre le comité directeur d’un syndicat (comme cela ressort des déclarations du gouvernement, l’examen du fond de l’affaire relève uniquement de l’autorité judiciaire).
  8. 609. Le comité note également que la Cour suprême a déclaré qu’il est prouvé que: a) le 4 janvier 2010, la Direction régionale de la santé de Limón reçoit la dénonciation du travailleur et opérateur de monte-charge, M. Ivansky Blackwoord Sharpe, indiquant que le local du Syndicat des travailleurs du comité de l’administration portuaire et du développement économique de la Vertiente Atlántica est trop exigu pour recevoir 1 279 travailleurs et travailleuses affiliés à ce syndicat, convoqués pour le 8 janvier 2010 à une assemblée générale de mi-mandat car, en réalité, ce local ne peut recevoir plus de 100 personnes; b) en vertu de cette dénonciation, une inspection a été réalisée qui a permis de constater les lacunes sanitaires suivantes: la structure dispose d’une zone d’environ 150 m², dotée de 80 chaises, dépourvue d’escalier de sortie d’urgence, située au troisième étage, et dont l’aération est mixte; c) compte tenu de ces éléments, le 7 janvier 2010, la directrice intérimaire de la Direction régionale de la santé de Limón et la spécialiste de l’environnement de cette direction ont fait savoir au plaignant que, compte tenu de ces considérations techniques et sanitaires relevant de l’environnement, l’autorisation de tenir l’assemblée générale de mi-mandat du Syndicat des travailleurs du comité de l’administration portuaire et du développement économique de la Vertiente Atlántica, prévue pour le 8 janvier 2010, est refusée. Par ailleurs, la Cour suprême estime que «le refus du ministère de la Santé d’autoriser des activités auxquelles participent un nombre de personnes excédant la capacité du local dans l’immeuble de référence ne porte préjudice à l’exercice d’aucun droit fondamental car ces activités ne peuvent avoir lieu que si elles sont conformes au droit, c’est-à-dire si elles sont dûment autorisées comme doivent l’être les activités de cette nature».
  9. 610. Dans ces conditions, compte tenu des décisions judiciaires susmentionnées selon lesquelles le comité directeur du SINTRAJAP a été réintégré dans ses fonctions et du fait que le syndicat et son employeur mènent à bien une négociation collective, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 611. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à décider que ce cas ne requiert pas un examen plus approfondi.
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