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Informe provisional - Informe núm. 346, Junio 2007

Caso núm. 2528 (Filipinas) - Fecha de presentación de la queja:: 31-OCT-06 - En seguimiento

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  1. 1361. La plainte figure dans une communication du Kilusang Mayo Uno (KMU) du 31 octobre 2006.
  2. 1362. Le gouvernement a répondu dans une communication du 1er mars 2007.
  3. 1363. Les Philippines ont ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 1364. Dans une communication du 31 octobre 2006, le KMU explique être un centre syndical aux Philippines qui représente environ 300 000 membres dans l’ensemble du pays. Fondé le 1er mai 1980, il a sous son aile 11 fédérations nationales et deux organisations de masse de travailleurs du secteur informel. Il a pour membres des syndicats des secteurs de l’industrie, des services et de l’agriculture.
  2. 1365. Les actes dénoncés comprennent des meurtres, menaces graves, harcèlement et intimidations incessants et autres formes de violence infligés à des dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux/défenseurs de syndicats et des organisations de travailleurs du secteur informel qui continuent activement de faire valoir leurs exigences légitimes aux niveaux régional et national. Les données recueillies indiquent que ces violations sont très répandues et systématiquement commises, directement ou indirectement, par des administrations, des organismes et des fonctionnaires publics du gouvernement civil et/ou de l’armée actuellement en place, y compris par leurs agents qui ont, dans une large mesure, effectivement broyé un certain nombre de syndicats et d’organisations de travailleurs du secteur informel existants et qui, si on ne les arrête pas, vont considérablement affaiblir le mouvement syndical dans le pays.
  3. 1366. Selon l’organisation plaignante, ces actes sont actuellement commis par le gouvernement des Philippines, dans le cadre de ses politiques néolibérales de déréglementation, libéralisation et privatisation, qui affectent gravement la population active, afin d’attirer les investissements étrangers. Concrètement, les actes dénoncés portent entre autres sur: 1) exécutions sommaires de 64 dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et travailleurs du secteur informel, comme point culminant du programme du gouvernement pour empêcher les travailleurs, de l’économie structurée ou du secteur informel, d’exercer leur liberté syndicale et leur droit d’organisation et de négociation collective; 2) enlèvements et disparitions forcées de dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et travailleurs du secteur informel, commis par des éléments de l’armée et de la police, non seulement pour intimider et/ou terroriser les travailleurs, syndiqués ou non, pour les empêcher de poursuivre leurs activités économiques et politiques, mais aussi dans le but ultime de paralyser le syndicat ou l’organisation pour lui ôter toute utilité; 3) harcèlement, intimidation, chasse aux sorcières et menaces graves commises par l’armée et les forces de police à l’encontre de dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et travailleurs du secteur informel; 4) militarisation des lieux de travail dans des sociétés paralysées par une grève ou par l’existence d’un conflit du travail entre la direction et les travailleurs et où les syndicats déjà en place ou en cours de constitution sont considérés progressistes ou militants, par la mise en place de détachements de l’armée et/ou le déploiement de forces de police et de l’armée sous prétexte d’opérations de contre-insurrection; et 5) arrestation et détention suivies de poursuites judiciaires pénales à l’encontre de dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et travailleurs du secteur informel du fait de leur implication et de leur participation active dans des activités économiques et politiques légitimes de syndicats et d’associations de travailleurs du secteur informel. Ces actes contreviennent directement aux articles 3, 5 et 11 de la convention no 87 et à l’article 1 de la convention no 98, ainsi qu’à la Constitution des Philippines.
  4. 1367. Toutefois, bien que le droit de s’organiser eux-mêmes prévu par l’article III et l’article XIII, section 3, de la Constitution philippine de 1987 implique qu’il ne saurait être porté atteinte aux droits des travailleurs d’organiser ou d’adhérer aux syndicats de leur choix, l’exercice de ces droits par les travailleurs s’est avéré dans la pratique difficile à mettre en œuvre. Un ensemble de facteurs, tels que le travail rendu de plus en plus flexible, la rigueur des conditions juridiques requises pour l’inscription et la reconnaissance d’un syndicat et les manœuvres calculées des employeurs pour faire échec à la formation d’un syndicat, comme par exemple, pour n’en citer que quelques-unes, les licenciements sommaires de responsables et de membres actifs d’un syndicat et les fermetures d’entreprises ont, dans une large mesure, empêché le développement de syndicats dans le pays. Au cours des cinq dernières années, le KMU a perdu à lui seul 30 syndicats, soit un nombre total d’adhérents estimé à 20 000 membres, par suite de fermetures d’usines au moment où le syndicat était en cours de constitution ou une convention collective (CBA) en cours de renégociation. Après avoir cessé leur activité pendant plusieurs mois, ces sociétés ont ensuite embauché de nouveaux travailleurs.
  5. 1368. L’organisation plaignante fait état d’un certain nombre d’obstacles à la formation et au fonctionnement de syndicats, notamment: i) le processus de constitution d’un syndicat, de sa demande d’habilitation à sa reconnaissance, qui est en lui-même un labyrinthe; ii) la persistance d’une politique non écrite voulant qu’il n’y ait ni syndicat ni grève, en particulier dans les zones franches d’exportation et les enclaves industrielles où sont concentrés les investissements étrangers; iii) la flexibilité accrue du travail qui, sous la forme locale connue de la contractualisation, empêche les travailleurs flexibles (travailleurs stagiaires, journaliers, à l’essai, vacataires, de réserve, de projet, temporaires, pakyaw, etc.) d’exercer leurs droits de liberté syndicale, d’organisation et de négociation collective ou simplement d’exiger la mise en œuvre de normes du travail, par crainte d’être licenciés; iv) des licenciements de dirigeants syndicaux et de membres actifs et des requêtes à l’instigation des sociétés pour annuler l’inscription du syndicat, ce qui paralyse pratiquement ce dernier dans sa phase de constitution; dans plusieurs cas, cette situation a poussé des syndicats naissants à lancer des actions concertées de protestation, y compris des grèves, contre le démantèlement du syndicat, uniquement pour affronter une autre phase de bataille juridique et politique complexe; et v) les pouvoirs du/de la secrétaire du ministère du Travail et de l’Emploi (DOLE) d’imposer un arbitrage obligatoire mettant fin à des grèves dans les cas où, de son point de vue, les sociétés sont indispensables à l’intérêt national (art. 263(g) du Code du travail des Philippines); la non-conformité avec l’ordonnance d’attribution de juridiction (AJO) ainsi que son ordre de reprise du travail dans les 24 heures risqueraient de faire déclarer la grève illégale et de faire perdre leur emploi aux responsables ayant conduit la grève, y compris ceux qui auraient bravé l’ordre de reprise du travail. Ainsi, par exemple, le mépris de l’AJO par le syndicat a déclenché une violente dispersion des grévistes par les forces de la police et de l’armée dans l’Hacienda Luisita à Tarlac, la mise à exécution de l’AJO ayant coûté la vie à au moins sept grévistes et entraîné des blessures graves pour 70 travailleurs et sympathisants.
  6. 1369. Selon l’organisation plaignante, presque tous les syndicats qui ont été en mesure de résister à ce qui précède étaient des syndicats affiliés au KMU ou dont l’orientation progressiste et militante était semblable à celle du KMU; ce qui a donné au gouvernement une excuse bien pratique pour qualifier les syndicats du KMU de terroristes et de têtes de pont communistes dans les usines. Dès lors, dans une allocution prononcée devant de nouveaux représentants barangay officiels élus à Sta. Cruz, Laguna, le 22 septembre 2002, la Présidente a entre autres déclaré: «Luttons contre les criminels, les seigneurs du jeu, les seigneurs de la drogue … et ceux qui terrorisent les usines qui créent des emplois…». Ce discours, qui faisait à l’évidence référence au syndicalisme militant, a immédiatement provoqué les grèves chez Nestlé Philippines, chez Nissan Motors et dans une multitude de sociétés implantées dans plusieurs enclaves économiques de Laguna, les grévistes ayant été harcelés et violemment dispersés par les forces d’intervention spéciales (RSAF), les éléments réguliers de la Police nationale des Philippines (PNP) et des milices privées.
  7. 1370. Des membres et des sympathisants locaux du KMU ont été terrorisés, harcelés et intimidés et le nom du KMU a été diabolisé et, pour créer un sentiment de peur parmi les travailleurs, ses dirigeants ont été pris en filature; certains sont heureusement parvenus à échapper aux tentatives d’attenter à leur vie mais d’autres ont été tués.
  8. 1371. En dépit de leur défiance à l’égard du système judiciaire existant, les travailleurs, notamment des membres et sympathisants du KMU, ont œuvré sans relâche pour aider à la création de l’Anakpawis Partylist (Parti des masses laborieuses) en 2004. Le KMU a intégré parmi ses tâches l’organisation et le renforcement de l’Anakpawis Partylist, de sorte que ses revendications en matière de réformes, en particulier pour des augmentations de salaires uniformes, ont pu se frayer un chemin jusqu’aux chambres du Congrès. De nombreux dirigeants du KMU aux niveaux local, régional et national ont accepté des responsabilités majeures au sein du parti politique, dans une tentative de hisser le syndicalisme à de nouvelles altitudes. Cet effort s’est avéré payant puisque l’Anakpawis a obtenu deux sièges à la Chambre des représentants. A l’instar d’autres critiques scrupuleux de l’administration, l’Anakpawis Partylist est lui aussi qualifié de tête de pont communiste et il a fait l’objet de l’opération de contre-insurrection menée par le gouvernement ou Oplan Bantay Laya (Operation Freedom Watch), enregistrant ainsi de lourdes pertes parmi ses dirigeants et organisateurs. Le député M. Beltran – dirigeant de longue date du KMU et vétéran syndical – a fait l’objet d’une arrestation sans mandat illégale le 25 février dernier et est demeuré en détention malgré les protestations locales et internationales.
  9. 1372. De la même façon, le KMU est constamment attaqué dans tous les documents, assemblées, forums, bombardements médiatiques et activités contre-insurrectionnelles que la PNP et les Forces armées philippines (AFP) organisent et conduisent dans des zones où l’organisation syndicale du KMU s’étend. Le KMU se trouve ainsi en bonne place dans «Connaissez l’ennemi» – un CD des AFP en PowerPoint – qui donne la liste de presque toutes les organisations légales progressistes en les présentant comme des têtes de pont communistes et des cibles d’opérations militaires au titre du programme contre-insurrectionnel national conduit par le gouvernement – l’Oplan Bantay Laya (Operation Freedom Watch).
  10. 1373. La gamme complète de l’Oplan Bantay Laya, de sa conception à sa mise en œuvre, supprime pour l’essentiel la distinction entre l’exercice par les travailleurs de leurs droits légitimes et les actes perçus par l’Etat comme menaçant sa sécurité et dissuadant les investissements étrangers. Dès lors, l’organisation d’un syndicat pour le lancement d’actions concertées visant à obtenir des améliorations de salaires, des indemnités, la sécurité de l’emploi et des réformes constructives, tel que prévu dans les Constitutions et conventions de l’OIT, est traitée, au titre de l’Oplan Bantay Laya, comme une atteinte à la sécurité de l’Etat. Ce qui, malheureusement, fait de chaque personne, de chaque travailleur, de chaque syndicaliste et de chaque dirigeant syndical des cibles déclarées de cette folie militariste, conduisant non seulement à toute une série de violations mais à une dégradation accrue de la situation économique, sociale et politique des travailleurs.
  11. 1374. L’organisation plaignante poursuit en présentant les plaintes spécifiques suivantes.
  12. 1375. Exécutions sommaires de 64 dirigeants membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et travailleurs du secteur informel, dont la plupart étaient membres du KMU. Pour que des travailleurs puissent effectivement maintenir leurs revendications et obtenir un résultat significatif en matière d’amélioration de salaires, d’indemnités, de sécurité de l’emploi et d’autres avantages économiques et politiques, ils doivent nécessairement constituer leurs syndicats ou associations, les faire reconnaître et signer une convention collective (CBA). Dans une certaine mesure, au cours des phases allant de la création d’un syndicat local à la signature d’une CBA, il leur faut également sensibiliser le public à leurs problèmes locaux par la mise en place de réseaux, d’alliances, d’actions de lobbying et de plaidoyers communs, y compris d’actions concertées. Mais le gouvernement réagit à ces actions légitimes par une répression endémique.
  13. 1376. Un rapport publié par le Centre pour les droits syndicaux et de la personne (CTUHR), une organisation non gouvernementale indépendante établissant en détail et surveillant les violations des droits de l’homme commises à l’encontre de travailleurs et de syndicats, a conclu que, de 2001 au 30 septembre 2006, on a compté 410 cas de violations dont ont été victimes 30 825 travailleurs. Ces violations ont atteint leur paroxysme avec la hausse sans précédent du nombre de syndicalistes, organisateurs, dirigeants syndicaux, sympathisants et travailleurs du secteur informel tués au cours des cinq dernières années dans le cadre de leurs activités syndicales ou dans le cas de simples travailleurs, alors qu’ils protestaient contre un cas de licenciement illégal. La plupart de ces dirigeants et organisateurs syndicaux appartenaient à des syndicats du KMU ou à ses sections régionales et provinciales et/ou à l’Anakpawis Partylist dont l’une des tâches principales est d’organiser les travailleurs. Avant d’être assassinés, ils avaient fait état d’une surveillance et de menaces pour lesquelles les soupçons se portaient sur des services de renseignements militaires.
  14. 1377. Les cas les plus notables sont:
  15. 1) Felipe Lapa – 49 ans, président du Syndicat des travailleurs agricoles de Milagrosa – NAFLU-KMU à Nagcarlan, Laguna, tué par un groupe paramilitaire des CAFGU le 25 octobre 2001 à quelques mètres de son domicile. La veille, il recueillait des denrées alimentaires (viande, patates douces) auprès de membres du syndicat pour les envoyer en soutien aux travailleurs en grève de Nissan Motors Corp. à Santa Rosa, Laguna. En tant que président du syndicat, il était élu chef de sa communauté et les habitants lui demandaient souvent conseil. Avant sa mort, des CAFGU l’avaient mis en garde pour qu’il cesse de soutenir les activités syndicales et il avait à plusieurs reprises été accusé d’être un sympathisant de la NPA.
  16. 2) Nenita Labordio – membre de Samahau ng Manggagawa sa Footjoy Manufacturing-Independent, Marilao, Bulacan. Bien que non affilié à une fédération syndicale, le syndicat local est membre du KMB (Mouvement des travailleurs du Bulacan) – une alliance provinciale de travailleurs placée sous la responsabilité de l’Alliance des travailleurs de la section du KMU – Région III. Mme Labordio est décédée quand un camion de la société l’a écrasée au piquet de grève en décembre 2002.
  17. 3) Angelito Mabansay – organisateur du KADAMAY de Tondo, Manille, a été tué près de son domicile en août 2003 par le SPO4 Bartolome Tupaz, du groupe antiterroriste de la PNP. Le KADAMAY, une organisation de travailleurs du secteur informel et de classes urbaines défavorisées, est affilié au KMU.
  18. 4) Samuel Bandilla – 40 ans, organisateur du KMU à Tacloban, Leyte, Eastern Visayas, et en même temps dirigeant de l’Anakpawis Partylist, a été abattu par un homme non identifié circulant à moto, alors qu’il rentrait chez lui après avoir pris la parole devant des travailleurs en grève de Metro Tacloban Water District le 4 mai 2004.
  19. 5) Sept victimes du massacre de l’Hacienda Luisita le 16 novembre 2004. Il s’agit de la dispersion d’une grève la plus violente et la plus sanglante de ces dernières années, commise par des éléments composites de l’armée et de la police nationale au titre de la mise en œuvre de l’AJO délivrée par le secrétaire du ministère du Travail et de l’Emploi (DOLE) alors en place. La grève était menée conjointement par l’United Luisita Workers’ Union ou ULWU-NLU (le syndicat des ouvriers agricoles) et le Central Azucarera de Tarlac Labor Union (CATLU) (le syndicat des minotiers). Bien qu’ils ne soient affiliés à aucune fédération du KMU, l’ULWU et le CATLU sont en fait membres de l’Alliance des travailleurs de la section régionale du KMU – Région III.
  20. i) Jesus Laza, un homme de 34 ans, ouvrier agricole et membre actif de l’United Luisita Workers’ Union (ULWU), a reçu deux blessures par balles dans la poitrine.
  21. ii) Jun David, 28 ans, ouvrier agricole depuis qu’il a commencé à travailler et membre actif de l’ULWU, a été blessé à l’épaule par une balle qui est descendue jusqu’à son poumon gauche.
  22. iii) Adriano Caballero, un homme de 23 ans, caddie à temps partiel au golf et au Country Club de l’Hacienda Luisita, a soutenu la grève. Blessé par balle à l’épaule, la balle a pénétré et lui a lacéré la partie gauche du foie, l’estomac et le cœur.
  23. iv) Jhaivie Basilio, un homme de 20 ans, travailleur à la Central Azucarera de Tarlac, membre du CATLU, a reçu une blessure par balle dans la fesse gauche et la poitrine, la balle ayant pénétré dans son poumon gauche et à la base du cœur.
  24. v) Jaime Pastidio, un homme de 46 ans, ouvrier agricole et membre de l’ULWU, a été blessé dans la région du maxillaire inférieur, la balle lui ayant lacéré le cou et l’artère et la veine carotides gauches.
  25. vi) Juancho Sanchez, un homme de 20 ans, fils d’un ouvrier agricole de la HLI ayant subi un licenciement économique et conducteur de jeepney, a reçu une blessure par balle dans la région pelvienne gauche, la balle ayant pénétré dans son estomac. Sa famille a soutenu la grève et son père, syndicaliste, y a pris une part active.
  26. vii) Jessi Valdez, un homme de 30 ans, ouvrier agricole de la HLI et membre de l’ULWU, a reçu une blessure par balle dans la cuisse gauche mais, au lieu de l’emmener à l’hôpital, l’armée l’a conduit au camp militaire. Il est mort d’une grave hémorragie.
  27. Des enquêtes du Congrès et du Sénat ont été menées sur cet événement. Par l’intermédiaire des Comités des droits de l’homme, du travail et de l’emploi et de l’agriculture, la Chambre des représentants a notamment conclu:
  28. … Les comités sont parvenus à la conclusion que des violations des droits de l’homme ont été commises à l’encontre des travailleurs en grève de l’Hacienda Luisita par des éléments de la Police nationale des Philippines et des Forces armées des Philippines, y compris les fonctionnaires et le personnel du ministère du Travail et de l’Emploi. Il est dès lors impératif que les fonctionnaires concernés soient tenus responsables, directement ou du fait d’un ordre du commandement, desdits actes à l’issue des conclusions données par une enquête conduite en bonne et due forme.
  29. 6) Abelardo Ladera, un homme de 45 ans, conseiller municipal de Tarlac, sympathisant de la grève à l’Hacienda Luisita, a été tué le 3 mars 2005 au seul motif connu de son solide soutien à la grève et pour avoir insisté, dans le cadre du conseil municipal de Tarlac, pour qu’une enquête soit menée sur le massacre survenu à l’Hacienda Luisita.
  30. 7) Le Père William Tadena, un prêtre de 37 ans de l’Eglise philippine indépendante, sympathisant de la grève à l’Hacienda Luisita, a été tué le 13 mars 2005 immédiatement après avoir célébré la messe dans son église et appelé ses paroissiens à faire des dons de riz et de denrées aux travailleurs en grève de l’Hacienda Luisita.
  31. 8) Edwin Bargamento, un homme de 46 ans, membre du Comité exécutif régional de la Fédération nationale des travailleurs de l’industrie du sucre (NFSW-KMU), a été assassiné le 13 avril 2005 en ayant reçu 22 blessures par balles alors qu’il se rendait chez un ami après avoir pris part à une série de manifestations syndicales à Bacolod City, Negros. Avant d’être assassiné, il avait reçu des menaces de la part de membres du RPA-ABB, un groupe armé lié aux Forces armées philippines (AFP), lui demandant de cesser d’organiser la NFSW dans le Negros Occidental.
  32. 9) Mario Fernandez, 22 ans, organisateur de la Fédération nationale des travailleurs de l’industrie du sucre (NFSW-FGT-KMU), a été tué le 10 juin 2005 à Silay City, Negros Occidental, par des éléments présumés du Groupe mobile régional de la Police nationale des Philippines. Le seul motif connu était de créer une atmosphère d’intimidation pour empêcher les masses de se joindre au rassemblement prévu pour la Journée de deuil du 12 juin.
  33. 10) Manuel Batolina, 50 ans, président et organisateur de la Fédération nationale des travailleurs de l’industrie du sucre (NFSW) pour plusieurs haciendas à Manapla, a été tué le 13 juin 2005 par des hommes armés non identifiés qui ont ouvert le feu sur lui pendant qu’il se reposait à l’intérieur de sa cabane en feuilles de palmier; il est mort sur le champ. Avant son assassinat – d’après ce qu’a exposé sa fille, Laura Batolina, à la Commission des droits de l’homme (CHR) –, il avait reçu des menaces du RPA-ABB pour qu’il cesse d’organiser la NFSW dans son secteur.
  34. 11) Antonio Pantonial, de la Fédération nationale des travailleurs de l’industrie du sucre (NFSW) à Negros, a été tué le 6 juillet 2005. Les incidents entourant le meurtre de M. Pantonial ressemblent à ceux ayant abouti à l’assassinat d’autres organisateurs/dirigeants de la NFSW avant lui.
  35. 12) Diosdado Fortuna, président du Syndicat des employés de Filipro chez Nestlé Philippines, conduisait la grève des travailleurs depuis le 14 janvier 2002. Il était également le président du PAMANTIK-KMU et de l’Anakpawis Partylist dans la région. Il a été abattu le 22 septembre 2005, recevant deux blessures par balles qui lui ont transpercé les poumons. Avant sa mort, il disait faire l’objet d’une surveillance constante depuis le début de la grève. M. Fortuna est le second président du syndicat de Nestlé à avoir été tué pendant la grève des travailleurs. Son prédécesseur, Meliton Roxas, a été tué devant le piquet de grève en 1989. M. Fortuna a été élu président du syndicat un an plus tard.
  36. 13) Victoria Samonte, une femme de 50 ans, présidente du Syndicat des employés du Collège Andres Soriano et vice-présidente du KMU pour la région de CARAGA, a été tuée le 30 septembre 2005. Son implication active dans différentes organisations comme dirigeante syndicale de longue date semble être la seule explication à son assassinat.
  37. 14) Ricardo Ramos, un homme de 47 ans, président du CATLU, a été tué le 25 octobre 2005 à l’intérieur d’une cabane en bambou par des hommes armés non identifiés sans doute dirigés par le Sgt Castillo et le Sgt de la Cruz de la 7e division d’infanterie de l’Armée philippine (PA). M. Ramos était un meneur de la grève et, au moment de son assassinat, il venait juste de terminer de distribuer à des membres du syndicat les salaires impayés qu’ils avaient gagnés pendant la grève.
  38. 15) Ramon Namuro, membre de l’AJODOM-PISTON-KMU, a été tué le 15 décembre 2005 par un membre de la Garde (groupe paramilitaire) qui voulait prendre le contrôle du terminus des jeepneys géré par l’association.
  39. 16) Federico de Leon, 53 ans, conducteur de tricycle, porte-parole de la Confédération des opérateurs et de l’Association des conducteurs du Bulacan (BCODA-PISTON-KMU) et président de l’Anakpawis Partylist au Bulacan, est mort des suites de trois blessures par balles tirées par un homme et une femme non identifiés qu’il avait pris comme passagers et qui avaient demandé à être conduits spécialement par M. de Leon dans l’après-midi du 26 octobre 2005. M. de Leon était un dirigeant bien connu des travailleurs du transport et il prenait une part active dans les actions de protestation contre les hausses du prix du carburant et autres réglementations publiques affectant les exploitations de tricycle dans la région.
  40. 17) Florante Collantes, ancien président du syndicat de Ford Philippines, travaillait habituellement dans la zone franche industrielle de Bataan et il était l’un des organisateurs de l’Alliance des travailleurs de la Région III du KMU. Affecté à l’Hacienda Luisita, il était parallèlement coordinateur du BAYAN MUNA à Camiling, Tarlac. Il a été abattu le 15 octobre 2005 pendant qu’il s’occupait de son magasin de vente au détail (sari-sari), par des bandits armés qui s’étaient fait passer pour des clients. Selon sa femme, Adelia Simon-Collantes, il s’agissait de la seconde tentative de meurtre visant son mari; la première, qui avait échoué, avait eu lieu en 1985 quand il organisait encore les travailleurs dans la zone franche industrielle de Bataan. Sa femme a fait un compte rendu oral mais a poliment refusé de signer une déclaration écrite sous serment car elle continuait de vivre dans la même maison où son mari a été tué.
  41. 18) Crisanto Teodoro, l’ancien organisateur de l’Association des organisations syndicales démocratiques – KMU, organisateur de plusieurs associations de travailleurs du transport à Bulacan et président de Bagong Alyansang Makaban – Malolos, Bulacan, a été tué le 9 mars 2006. M. Teodoro était un élément essentiel dans de nombreuses actions de protestation organisées par des travailleurs du transport à Bulacan contre les hausses du prix du carburant.
  42. 19) Tirzo Cruz, membre du conseil de l’ULWU, a été tué le 17 mars 2006 en ayant reçu neuf blessures par balles.
  43. 20) Leodegario Punzal, organisateur de la communauté et du syndicat des travailleurs du secteur informel et dirigeant local de l’Anakpawis à Norzagaray, Bulacan, a été tué le 13 septembre 2005 à son domicile pendant qu’il exerçait sa profession artistique (création de banderoles, d’enseignes, de t-shirts, etc.). La seconde balle l’a atteint alors que sa mère en pleurs le serrait dans ses bras. Cette dernière, Maxima Punzal, 70 ans, témoin de l’événement, a affirmé dans une déclaration orale que son fils n’avait aucun ennemi personnel connu et qu’elle savait seulement qu’il avait aidé de nombreuses personnes de leur communauté.
  44. 21) Rolando Mariano, ancien président du Syndicat des travailleurs TARELCO 1, était un responsable actif du syndicat et de la communauté de Bayan Muna au moment de son assassinat le 7 octobre 2005. A la suite de ce meurtre, sa famille a quitté Tarlac pour un lieu non révélé dans le Grand Manille et il a de ce fait été difficile d’obtenir un témoignage écrit.
  45. 22) Dante Teotino, membre du syndicat de Schneider Packaging Corporations à Kaybiga, Kaloocan City, a été abattu par balle par des gardes de la sécurité sur ordre de la direction de tirer sur les travailleurs en grève protestant à propos du sous-paiement des salaires minimums le 13 septembre 2005.
  46. 23) Noel Daray, travailleur contractuel de WL Food Inc., Valenzuela City, a été tué par des gardes de sécurité de la société alors qu’il protestait contre son licenciement illégal un soir de décembre 2005. Les témoins de l’événement ont refusé de donner un compte rendu précis par crainte d’être licenciés ou tués.
  47. 24) Roberto de la Cruz, 43 ans, ancien chauffeur de Tritran Bus Company, était membre du conseil du Syndicat des travailleurs de Tritran, vice-président de l’Alyansa ng mga Manggagawa ng Bus Company (AMB; Alliance des travailleurs de bus) et membre de l’Anakpawis. Il a été abattu à l’intérieur de son café-restaurant par des hommes circulant à moto le 25 janvier 2006. Avant sa mort, il avait été suivi par des éléments de l’armée et était accusé d’aider la Nouvelle armée du peuple. La veille de son assassinat, M. Dela Cruz s’était présenté de lui-même au Service de renseignements des Forces armées des Philippines (ISAFP) pour laver son nom de tout soupçon.
  48. 25) Paquito Diaz, 44 ans, président régional de la Confédération pour l’unité, la reconnaissance et le progrès des employés du gouvernement (COURAGE-EV) basée à Tacloban, Leyte, a été assassiné le 6 juillet 2006, après s’être impliqué de longue date dans des luttes syndicales dans différentes administrations publiques de la région.
  49. 26) Ronald Adrada, un membre du KADAMAY-KMU, a été tué le 24 septembre 2005 par la police à moto de la Philippine National Construction Corporation (PNCC) au motif allégué qu’il se livrait à des ventes illégales.
  50. 27) Nilo Bayas, vice-président de l’Association des fabricants de charbon de bois du Bulacan et membre de l’Anakpawis, a été tué le 17 juillet 2005, sans doute par des membres de l’armée.
  51. 28) Albert Terradeno, président de l’Association des employés du DAR à Abra et membre de la COURAGE, a été tué le 29 novembre 2005. M. Terradeno était un dirigeant et organisateur connu du syndicat des fonctionnaires.
  52. L’organisation plaignante joint d’autres noms de travailleurs, syndicalistes, organisateurs et travailleurs du secteur informel qui ont été tués sans doute par la PNP ou par des éléments de l’armée, mais pour des raisons tout à fait difficiles à établir.
  53. 1378. L’organisation plaignante fait remarquer que, pour ce qui concerne la manière dont les victimes ont été tuées, 98 pour cent ont été abattues par balles par des hommes à moto portant des masques de ski ou des casques. Les enquêtes préliminaires ont révélé que la plupart des cas étaient prémédités, c’est-à-dire que les victimes étaient déjà, avant leur mort, surveillées par certains éléments soupçonnés des AFP ou de la PNP.
  54. 1379. L’organisation plaignante indique par ailleurs que, alarmés par ces violations croissantes des droits de l’homme et des droits syndicaux dans le pays, l’Institut œcuménique pour l’éducation et la recherche syndicale (EILER), le Centre pour les droits syndicaux et de la personne (CTUHR) et l’Alliance des enseignant(e)s concerné(e)s (ACT) ont été le fer de lance d’une Mission internationale de solidarité ouvrière (MISO) organisée du 30 avril au 8 mai 2006, visant à enquêter sur la série de meurtres de syndicalistes et de violations survenus dans le pays. Trente délégués internationaux venus de 12 pays ont pris part à la MISO et se sont rendus dans quatre régions du pays – Central Luzon et le Southern Tagalog sur l’Ile de Luzon, Negros sur l’Ile de Visayas et Compostela Valley sur l’Ile de Mindanao. A l’issue de sa mission, la MISO notait entre autres dans sa présentation publique de ses résultats:
  55. … la MISO a noté avec consternation et réprobation que le nombre de meurtres a substantiellement augmenté sous le gouvernement Arroyo, que la «violation des droits du travail et des droits de l’homme est aux Philippines systématique et à l’échelle nationale» et que «les attaques endémiques sur les travailleurs ont pour but de créer une atmosphère de terreur».
  56. 1380. Dans des termes semblables, un rapport d’Amnesty International (AI) sur les meurtres politiques aux Philippines paru en août 2006 a conclu que: «les attaques ne sont pas une série de meurtres non reliés mais constituent un plan concerté d’exécutions». Exprimant sa profonde inquiétude «que des membres des forces de sécurité aient pu avoir été directement impliqués dans les meurtres, ou sinon les avoir tolérés, acceptés ou en avoir été complices», AI a recommandé que «… les enquêtes doivent alors aboutir à l’arrestation, la poursuite, l’inculpation et la punition des auteurs des délits» afin de mettre un coup d’arrêt à la culture de l’impunité dans le pays.
  57. 1381. Dans l’intervalle, dans une lettre de doléances du 11 juillet 2006 envoyée à la Présidente des Philippines, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) déclarait: «la violation des droits syndicaux et démocratiques dirigée contre les travailleurs et leurs dirigeants dans votre pays est un sujet d’inquiétude majeur qui a attiré l’attention du mouvement syndical international». Elle notait que «le nombre de meurtres liés aux questions de travail aux Philippines place à présent ce pays dans la même catégorie que la Colombie … Les Philippines semblent se diriger rapidement vers la deuxième place.» Indépendamment de ces organes internationaux, de plus en plus d’organisations internationales, y compris des syndicats, des groupes de droits de l’homme et des églises, ont exprimé leur consternation et leur sérieuse inquiétude devant l’avalanche d’exécutions extrajudiciaires et le climat d’impunité qui prédomine aux Philippines et ont condamné les meurtres et la complicité ou l’inertie du gouvernement face à cette campagne systématique.
  58. 1382. Pour tenter d’atténuer la pression et les protestations internationales, le gouvernement s’est vu contraint de créer un groupe d’étude, l’Usig, et plus tard la Commission Melo pour examiner et résoudre ces affaires de meurtres n’ayant pas fait l’objet de procédures judiciaires. Le public et en particulier les victimes ont reçu le groupe d’étude et la commission avec une certaine incrédulité et ont en fait mis leur intégrité en question. Les deux organes sont en effet constitués de militaires et de personnalités connues pour être des alliés du gouvernement.
  59. 1383. A ce jour, pas un seul auteur de délit n’a été appréhendé en dépit de nombreux éléments qui laissent à penser que ces meurtres, enlèvements et disparitions étaient l’œuvre de la police, de l’armée ou de leurs agents. Plus grave encore, des auteurs de délits tels que le général de division Jovito Palparan, dit «le boucher», accusé d’être le cerveau se cachant derrière un grand nombre de ces meurtres, a été couvert d’éloges dithyrambiques pour son «bon travail», ce qui renforce encore la culture de l’impunité.
  60. 1384. Enlèvements et disparitions forcées de dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et de travailleurs du secteur informel commis par des éléments de l’armée et de la police. Selon l’organisation plaignante, le CTUHR a enregistré 22 cas d’enlèvements et de disparitions forcées, dont ont été victimes 52 syndicalistes et sympathisants entre le 20 janvier 2001 et le 30 juin 2006. La majorité des cas sont survenus en 2005 (huit cas) et en 2006 (dix cas). L’un des principaux cas de 2005 a été la disparition de Perseus Geogoni, un organisateur de la Fédération nationale des travailleurs de l’industrie du sucre (NFSW) à Negros. M. Geogoni a été vu pour la dernière fois le soir du 5 décembre 2005, alors qu’il suivait des questions d’organisation à Bacolod City. Avant sa disparition, il avait déclaré qu’il était pris en filature et que deux individus non identifiés lui avaient demandé d’une manière louche d’où il venait. Un militaire a fait parvenir une information selon laquelle un groupe de 30 agents des services de renseignements conduits par le lieutenant en premier Clarence Garrido, de la 11e division d’infanterie, sous la supervision du commandement des Services de renseignements de l’armée de Visayas, était responsable de l’enlèvement de M. Geogoni, qui n’a pas réapparu à ce jour. On pense que la raison ayant motivé son enlèvement était liée à son travail d’organisateur dans les zones de canne à sucre et les communautés paysannes et à son implication dans des organisations progressistes critiquant les politiques antipeuple du gouvernement.
  61. 1385. Rien qu’en 2006 des données partielles recueillies par le CTUHR ont fait état de l’existence de dix cas d’enlèvement touchant 57 victimes. Sur les 33 victimes, 11 demeuraient manquantes, une a été trouvée morte et 21 ont été rendues à leurs familles, quatre ont été remises à la PNP en étant inculpées d’accusations criminelles fabriquées. Un récapitulatif des événements et des victimes est fourni par l’organisation plaignante et partiellement reproduit dans l’annexe II.
  62. 1386. Harcèlement, intimidation, chasse aux sorcières et menaces graves commis par des forces de l’armée et de la police à l’encontre de dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et de travailleurs du secteur informel. Selon l’organisation plaignante, le gouvernement, de connivence avec des investisseurs étrangers et des capitalistes locaux, s’est lancé dans le harcèlement, l’intimidation, la chasse aux sorcières et les menaces graves visant des dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et de travailleurs du secteur informel. Du 1er janvier 2001 au 30 juin 2006, le CTUHR a enregistré 81 cas de menaces graves touchant 16 276 travailleurs de l’économie structurée et du secteur informel. Il a également noté, au cours de la même période, 114 cas d’intimidation portant sur 13 454 travailleurs de l’économie structurée et du secteur informel. Par l’intermédiaire de l’armée, le gouvernement a inclus dans sa liste de terroristes et communistes présumés des dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et des organisations de travailleurs du secteur informel. Cette liste sert à justifier leurs harcèlement et intimidation, leurs arrestations et détentions et, pour finir, leur incarcération ou exécution sommaire. L’armée utilise également la même liste pour intimider les membres des syndicats et leur conseiller vivement de se désolidariser de leurs responsables et organisateurs syndicaux.
  63. 1387. Lors d’une conférence de presse organisée au Camp Vicente Lim le 4 avril 2001, le directeur de la Région IV de la Police nationale des Philippines, Domingo Reyes, a reconnu que 94 usines comptant des syndicats militants affiliés à la Solidarité des travailleurs dans le Southern Tagalog, à l’OLALIA-KMU et à l’Alliance des travailleurs à Laguna sont sous surveillance.
  64. Les cas de menaces graves sont notamment les suivants:
  65. a) Angelina Ladera, une femme de 38 ans, présidente par intérim de l’Alliance des travailleurs de la Région 3 (WAR 3) et ancienne présidente du Syndicat des travailleurs d’International Wiring Services Corporation. Mme Ladera se trouve sur la liste de l’ordre d’attaquer de l’armée et elle fait partie des dix personnes considérées comme menaçant la sécurité nationale et qualifiées d’«ennemis de l’Etat» dans une présentation PowerPoint intitulée «Trinity of War» distribuée par le Northern Luzon Command en janvier 2005.
  66. b) Romeo Legaspi, président du syndicat de Lakas Manggagwa Nagkakaisa sa Honda (Force unie des travailleurs de Honda) et actuel président national de l’OLALIA-KMU, auquel est affilié le syndicat de Honda. Depuis octobre 2005, M. Legaspi a été contraint de s’abstenir de rentrer chez lui et a dû déménager d’un lieu à un autre à cause des menaces pesant sur sa vie du fait de son engagement actif dans des activités syndicales et collectives.
  67. c) Activités de harcèlement et de surveillance portant sur un certain nombre de dirigeants syndicaux et de membres du Syndicat des travailleurs de Nestlé à Cabuyao, qui comprenaient la filature des travailleurs dans le périmètre de la grève, dans leurs activités et à leur domicile assorties de menaces d’arrestation. Des déclarations sous serment ont été signées notamment par Reynaldo B. Batites, membre du conseil du syndicat, Roberto L. Berroya Jr, délégué du bureau et du personnel du syndicat, Rene A. Manalo, Ariel G. Legaspi et Noel T. Sanchez, dans lesquelles ils certifiaient que ces cas d’intimidation et harcèlement étaient liés à leur implication active dans la grève que mènent actuellement les travailleurs de Nestlé Philippines.
  68. d) Interrogatoire d’un certain nombre de dirigeants syndicaux et de membres du NAMAOS dans la ville de Compostela, Compostela Valley. A diverses reprises, certains ont été «invités» à venir répondre aux questions de membres de l’équipe des opérations spéciales du 36e bataillon d’infanterie, AP sous le M/Sgt Alexander Iscarten. Les militaires accusent le NAMAOS d’être soutenu par la NPA et tous les membres du NAMAOS d’être membres de la NPA et affirment que les cotisations mensuelles du syndicat sont données en soutien à la NPA.
  69. e) Vicente Barrios, président des Travailleurs unis des exploitations agricoles de Suyapa (NAMASUFA) – convoqué par les militaires à plusieurs reprises en septembre 2005. L’armée accuse le NAMASUFA d’être dirigé par des rebelles de la NPA et M. Barrios d’être un organisateur de celle-ci. La société a fait appel à l’armée pour intervenir dans les actions concertées du syndicat visant à exposer les doléances des travailleurs. M. Barrios a reçu plusieurs avertissements au sujet d’une présomption de conspiration pour le tuer à cause de ses activités syndicales.
  70. f) Syndicat des travailleurs de Console Farm à San Miguel, Bulacan. Harcèlement incessant de l’armée à l’encontre de membres et de responsables du syndicat, incluant des mesures coercitives pour le retrait de l’affiliation de leur fédération syndicale, l’Association des organisations syndicales authentiques nationalistes (ANGLO-KMU), telles que la vérification des livres de comptes du syndicat, la surveillance étroite des mouvements des travailleurs, le fichage comme terroristes, communistes et sympathisants de la NPA des organisateurs et dirigeants syndicaux qui se joignent à des manifestations de protestation légitimes. En 2005, les militaires ont convoqué à deux reprises les travailleurs pour une réunion à l’intérieur de la société.
  71. g) NAMASUFA, le syndicat des travailleurs dans l’usine d’emballage 90 de la Fresh Banana Agricultural Corporation, située à Purok 4, Barangay Siocon, Compostela, Compostela Valley. Les militaires, sous l’autorité du 28e bataillon d’infanterie de l’AP, ont appelé à une réunion avec les travailleurs le 16 août 2005. Les militaires leur ont dit de ne pas constituer de syndicat sous peine de voir l’activité fermer définitivement et leurs familles dans l’impossibilité de trouver du travail car elles étaient syndicalistes. Les membres du syndicat ont également été étiquetés comme étant des rebelles et il leur a été demandé de se disculper, faute de quoi ils seraient pris en filature et cités à comparaître dans le cadre d’une enquête.
  72. h) Les Travailleurs unis de San José (NAMASAN), le syndicat des travailleurs dans l’usine d’emballage 95 de la Fresh Banana Agricultural Corporation, située à Barangay San José, Compostela. Le 21 août 2005, les militaires ont organisé une réunion avec environ 160 travailleurs. Ils leur ont dit de ne pas s’inscrire au syndicat sous peine de voir l’activité fermer définitivement et leurs familles dans l’impossibilité de trouver du travail à cause de leur engagement syndical; et que les membres du KMU sont des satanistes et des rebelles et qu’il était possible de constituer un syndicat mais pas sous le contrôle du KMU.
  73. i) Harcèlement des travailleurs de l’usine d’emballage 92 de la Fresh Banana Agricultural Corporation, située à Barangay New Alegria, Compostela. Le 18 août 2005, les militaires ont appelé à une réunion avec plus de 100 travailleurs. Ils leur ont dit les avoir convoqués à cette réunion car ils étaient en train de constituer un syndicat, que le syndicat dont ils demandaient le soutien – le NAMAOS – était constitué de rebelles et que le NAMAOS et le KMU étaient de faux syndicats.
  74. j) Surveillance exercée sur des avocats de travailleurs appartenant au Pro-Labor Assistance Center (PLACE). Le 6 octobre 2006, le soldat de première classe [«Pfc»] Rommel Felipe Santiago, un officier du renseignement de l’AP, a reconnu effectuer du travail de surveillance après avoir été appréhendé par des gardes de sécurité de Food Terminal Inc. (FTI) alors qu’il avait pris en filature un groupe de responsables syndicaux, du bureau de l’emploi jusqu’à la FTI. Une fiche d’arrestation a été remplie dans les locaux du poste de police de Taguig mais le Pfc Santiago a ensuite été relâché après qu’un inspecteur général non identifié a appelé la police de Taguig et attesté que Santiago était «en mission officielle». Depuis, des hommes postés dans divers véhicules continuent leur travail de surveillance du bureau de l’emploi, dont les clients proviennent essentiellement de syndicats militants et indépendants.
  75. 1388. Militarisation des lieux de travail par la mise en place de détachements militaires et/ou le déploiement d’éléments de la police et de l’armée dans des sociétés paralysées par une grève ou par l’existence d’un conflit du travail entre la direction et les travailleurs et où les syndicats déjà en place ou en cours de constitution sont considérés progressistes ou militants. L’organisation plaignante allègue que, dans le cadre de l’objectif gouvernemental de préserver la «paix industrielle», des détachements militaires sont mis en place et/ou des éléments de l’armée sont déployés dans des sociétés touchées par une grève ou encore là où des syndicats militants sont présents. Ces détachements servent à disperser violemment des grèves et des actions de protestation légitimes des travailleurs et à «protéger» les sociétés contre les perturbations engendrées par des «éléments fauteurs de troubles». Ces détachements de l’armée restent sur place même après avoir démantelé une grève pour s’assurer qu’aucune grève semblable ne pourra se produire dans un avenir proche, pour harceler et intimider les travailleurs et, au bout du compte, réduire leur syndicat à néant.
  76. 1389. La présence et l’intervention directe de l’armée et de la police dans des conflits du travail est une pratique en constante augmentation. La présence d’éléments des Forces d’intervention spéciales régionales, du groupe mobile de la PNP et des groupes d’intervention tactique spéciaux (SWAT) en tenue de combat fait désormais partie du paysage habituel dans les sociétés du Southern Tagalog et du Central Luzon, deux des zones industrielles du pays concentrant la plupart des investissements étrangers. Chez Nestlé Cabuyao, l’armée a maintenu des opérations à l’intérieur de l’usine de 2002 à ce jour.
  77. 1390. Les cas de militarisation enregistrés sont notamment les suivants:
  78. a) Syndicat des travailleurs de Console Farm à San Miguel, Bulacan – Les militaires ont forcé les travailleurs à devenir membres du Barangay Defence System (BDS), une unité paramilitaire soi-disant mise en place pour le maintien de l’ordre public dans le secteur. En tant que membres du BDS, les travailleurs sont tenus d’effectuer chaque jour, à tour de rôle, au moins deux heures de corvées militaires. Le refus d’obéir aux ordres revient à être traité de terroriste ou de communiste ou à se voir inscrit sur l’ordre d’attaque de l’armée.
  79. b) Syndicat des travailleurs de Robina Farms – L’armée a mis en place un détachement à l’intérieur de Robina Farms, procédé à un recensement militaire, sillonné la zone en tenue de combat et harcelé les membres du syndicat, leur demandant de se désaffilier du Kilusang Mayo Uno, le centre du syndicat. Les travailleurs craignent pour leur vie et certains responsables syndicaux ont même peur de rentrer chez eux.
  80. c) Dans la Compostela Valley, des membres du 28e bataillon d’infanterie ont organisé des réunions des travailleurs à la chaîne à l’intérieur des usines d’emballage de la Fresh Banana Plantation. Ces réunions à l’initiative de l’armée coïncidaient avec la constitution de syndicats dans les usines d’emballage 95, 90 et 92.
  81. d) NAMASAN, Travailleurs unis à San José – Des éléments de l’armée sous l’autorité du 28e bataillon d’infanterie ont organisé une réunion avec les travailleurs à l’intérieur de l’usine d’emballage 95, pendant laquelle ils leur ont dit demander de s’abstenir de participer aux activités syndicales et tout particulièrement avec le KMU. Quand les travailleurs leur ont demandé qui les avait recrutés pour organiser la réunion, les soldats ont répondu que cela faisait partie de leurs compétences.
  82. e) Dans le NAMAOS, des dirigeants ont été pris en filature après avoir conclu leur convention collective et, le 14 novembre 2004, des soldats ont patrouillé autour du bureau du NAMAOS au milieu de la nuit et placardé des affiches dépeignant le KMU comme un diable et avertissant les travailleurs de ne pas se laisser «utiliser par les communistes».
  83. f) Dans l’entreprise Sun Ever Lights appartenant aux Japonais à Santa Rosa, Laguna, des éléments du Groupe d’intervention armée spécial (SWAG) ont été déployés pour assurer le fonctionnement de la chaîne de fabrication et surveiller de près les dirigeants syndicaux du syndicat nouvellement constitué, juste au moment où le syndicat préparait un vote d’homologation.
  84. 1391. Arrestation et détention de dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et travailleurs du secteur informel du fait de leur implication et de leur participation active dans des activités économiques et politiques de syndicats et d’associations de travailleurs du secteur informel. L’organisation plaignante a présenté les allégations suivantes:
  85. a) Arrestation et détention illégales du délégué Crispin Beltran, président honoraire du KMU et représentant de l’Anakpawis Partylist – M. Beltran a été enlevé et arrêté à Bulacan le 25 février 2006, le lendemain de la déclaration de l’état d’urgence par la Présidente des Philippines. Il a été arrêté sur la base d’accusations fabriquées remontant à vingt ans et déjà infirmées par les tribunaux philippins. Plus tard, par l’intermédiaire du ministère de la Justice, le gouvernement a impliqué M. Beltran dans des tentatives ratées de renversement du gouvernement. Il est à l’heure actuelle toujours détenu à l’hôpital, du fait de sa santé défaillante.
  86. b) Arrestation et détention de cinq membres de la Fédération nationale des travailleurs de l’industrie du sucre (NFSW-KMU) et de deux autres personnes le 30 septembre 2005 près du détachement de la compagnie Alpha du 12e bataillon d’infanterie à Carmingawan, Kabankalan City, Negros Occidental. Les militaires ont accusé les personnes arrêtées d’être des responsables de haut rang du Parti communiste des Philippines et de la Nouvelle armée populaire (CPP/NPA).
  87. 1392. Pour finir, l’organisation plaignante indique que, même si la plupart des victimes et de leurs familles ont été réticentes à donner des témoignages écrits et/ou à signer des déclarations écrites sous serment par crainte d’être harcelées, elle joint néanmoins les rapports de la mission d’enquête de la Mission internationale de solidarité ouvrière (MISO), qui a été conduite du 30 avril au 8 mai 2006, de même que plusieurs exposés des faits, affidavits et déclarations sous serment, rapports, coupures de presse, photographies et autres documents dans le cadre des preuves permettant de mieux éclairer la plainte.
  88. B. Réponse du gouvernement
  89. 1393. Dans une communication du 1er mars 2007, le gouvernement a indiqué que la Présidente des Philippines a mis en place la Commission indépendante chargée des meurtres de membres des médias et d’activistes (Commission Melo) – placée sous la direction du juge de la Cour suprême à la retraite Jose A.R. Melo et comprenant les membres suivants: l’administrateur Mantaring (Bureau national d’investigation); Jovencito R. Zuno (Procureur général); Nella I. Gonzales (membre du conseil d’administration de l’Université des Philippines); et le révérend Juan DeDios M. Pueblos, D.D. (évêque catholique de Butuan). Le rapport de cette commission a été soumis le 30 janvier 2007 et publié le 22 février 2007.
  90. 1394. Le gouvernement estime opportun de souligner que l’organisation plaignante, le KMU, n’a pas voulu prendre part aux procédures de la Commission Melo et a préféré déposer la présente plainte.
  91. 1395. La Commission Melo a conclu dans son rapport que:
  92. A partir des preuves recueillies et après leur étude approfondie, la commission est parvenue à la conclusion qu’il n’existe aucune preuve directe, mais uniquement des présomptions, reliant certains éléments de l’armée aux meurtres. Il n’existe, de la part de l’armée ou de ses instances supérieures civiles, aucune politique officielle ou approuvée de recours à ce que d’autres pays appellent par euphémisme des «procédures alternatives» – à savoir des liquidations. Il existe toutefois sans aucun doute des preuves qui font peser des soupçons sur certains éléments et personnalités des forces armées … comme étant responsables du nombre indéterminé de meurtres en autorisant, tolérant et même encourageant ces derniers.
  93. […]
  94. … du fait du manque de coopération de la part des groupes activistes, la commission ne s’est pas vu présenter des preuves suffisantes pour lui permettre de désigner avec précision et, finalement, pour recommander de poursuivre en justice les personnes responsables en dernier ressort des meurtres. Il n’existe derrière les meurtres aucune personne physique ou morale ni aucun intérêt défini(e) ou identifiable. Pas plus qu’il n’existe de décompte définitif du nombre réel [de] meurtres d’activistes. Même Karapatan et Amnesty International présentent des chiffres tout à fait différents.
  95. […]
  96. En tout état de cause, un complément d’enquête approfondi sur les nombreux meurtres incluant un large rassemblement de preuves est nécessaire pour pouvoir poursuivre avec succès les éléments directement responsables. A cet égard, la déposition de témoins et la présentation de preuves par les victimes et leurs familles et collègues pourraient s’avérer indispensables.
  97. 1396. La commission a ensuite fait les recommandations suivantes:
  98. 1. Volonté politique – «Il est vivement conseillé que la Présidente réitère avec la plus grande force possible ses déclarations ou manifestations de détermination et de ferme résolution d’y mettre un terme … le gouvernement doit en permanence et à tous les niveaux condamner les meurtres politiques. La Présidente et tous les services gouvernementaux devraient faire clairement savoir à tous les membres des forces de la police et de l’armée que les exécutions extrajudiciaires ne seront en aucun cas avalisées.»
  99. 2. Enquête – «L’enquête doit être conduite par un organisme ou un bureau indépendant des forces armées … Ce bureau d’enquête civil devrait … avoir la maîtrise de son propre budget, avec un personnel formé au travail d’enquête et d’exécution, autorisé à exécuter des mandats de perquisition et à procéder à des arrestations, muni de la technologie appropriée…»
  100. 3. Poursuites – «Le ministère de la Justice (DOJ) devra créer une équipe spéciale de procureurs compétents et bien formés pour diriger le procès dans lesdits cas. Le DOJ devra également demander à la Cour suprême de désigner des tribunaux d’exception pour instruire et compléter lesdits cas jusqu’à leur audience finale.»
  101. 4. Protection des témoins – «Le gouvernement doit accorder la plus grande priorité à l’amélioration, au renforcement et au financement du Programme de protection des témoins.»
  102. 5. Loi spéciale pour une stricte responsabilité de la chaîne de commandement – «La Présidente devrait proposer une législation pour exiger que les forces de la police et de l’armée et les autres fonctionnaires conservent une stricte responsabilité de la chaîne de commandement pour ce qui a trait aux meurtres extrajudiciaires et autres délits commis par le personnel placé sous leur commandement, contrôle ou autorité.»
  103. 6. Orientation et formation adaptées des forces de sécurité – «Les AFP devraient être encouragées et soutenues pour l’organisation de séminaires, d’orientations et de formation intensifs destinés à des officiers de haut et moyen grades afin de leur faire prendre connaissance des doctrines de commandement en vigueur et de leurs ramifications.»
  104. 1397. Suite à ce rapport, la Présidente a donné les instructions suivantes:
  105. 1) Elle a demandé à la Commission Melo de poursuivre son travail et de soumettre ponctuellement des rapports complémentaires (clarifiant ainsi que le travail de la Commission Melo n’est pas terminé).
  106. 2) Elle a donné au ministère des Affaires étrangères l’instruction de soumettre une proposition officielle à l’Union européenne, à la Finlande, à l’Espagne et à la Suède pour l’envoi d’enquêteurs chargés d’aider la Commission Melo.
  107. 3) Elle a ordonné aux ministères de la Justice et de la Défense nationale de constituer en coordination avec la Commission des droits de l’homme un organe d’enquête mixte pour creuser plus avant la question de l’implication de personnel militaire dans des meurtres inexpliqués, déposer les accusations correspondantes et poursuivre des coupables.
  108. 4) Elle a ordonné au ministère de la Justice d’élargir le Programme de protection des témoins pour couvrir tous les témoins des meurtres inexpliqués de nature idéologique/politique.
  109. 5) Elle a demandé à la Cour suprême de créer des tribunaux d’exception pour juger en première instance les accusations impliquant des meurtres inexpliqués de nature idéologique/politique.
  110. 1398. Depuis, la Cour suprême a réagi en accréditant – par ordonnance administrative no 25-2007 – 99 tribunaux de première instance régionaux du pays comme tribunaux d’exception qui devront résoudre promptement ou statuer sur les cas d’exécutions extrajudiciaires. Ladite ordonnance administrative enjoint aux tribunaux d’exception de donner la priorité aux cas d’activistes et de personnels des médias; ordonne un procès sans interruption devant être terminé dans un délai de soixante jours à compter de l’ouverture du cas et exige qu’un jugement soit rendu dans les trente jours consécutifs à la plaidoirie en vue d’une décision; et interdit le dépôt de demandes de renvoi ou autres moyens ou requêtes dilatoires.
  111. 1399. A partir de ce bref exposé des récents développements, il apparaît immédiatement qu’il reste beaucoup à faire avant de pouvoir obtenir des résultats tangibles en matière de meurtres non résolus en général, et sur la question des violations des droits syndicaux en particulier. En ce sens, l’action sur les meurtres d’activistes, y compris ceux dénoncés par le KMU, est un travail en cours.
  112. 1400. Le gouvernement indique au Comité de la liberté syndicale que:
  113. 1) Il est prématuré d’admettre la présente plainte basée sur les allégations généralisées et non prouvées de l’organisation plaignante, qui n’est pas en mesure de présenter un commencement de preuve que le gouvernement a violé les droits syndicaux en vertu des conventions nos 87 et 98. La charge de la preuve incombe à l’organisation plaignante qui, en l’absence de preuve à l’appui d’une affaire qui, de prime abord, paraît fondée, devrait être déboutée.
  114. 2) L’organisation plaignante se renseigne effectivement à droite et à gauche en quête d’un tribunal compétent qui, souhaite-t-elle, lui ferait la plus grande publicité. Le gouvernement attire l’attention du comité sur l’idée que la compétence de juridiction locale – c’est-à-dire les méthodes d’enquête internes des Philippines – devrait prendre la priorité chaque fois que l’existence d’une telle juridiction compétente apparaît clairement, avant que le comité reconnaisse officiellement une plainte comme susceptible d’être valablement soumise à l’investigation du BIT. Le gouvernement attire de même l’attention du comité sur le fait que l’organisation plaignante, le KMU, a échoué et refusé de venir faire la preuve du bien-fondé de son cas devant la Commission Melo du gouvernement des Philippines.
  115. 3) Cela fait soixante ans que les Philippines sont confrontées à un problème insurrectionnel encore aggravé par le terrorisme mondial au cours des vingt dernières années. Le gouvernement invite le comité à reconnaître que l’organisation plaignante, le KMU, est une branche d’un mouvement insurrectionnel – le CPP/NPA – et qu’il convient de distinguer les activités syndicales légitimes qui ont pleinement droit à la protection de l’OIT et les activités subversives menées en violation de la loi philippine, qui n’entrent pas dans les paramètres des conventions de l’OIT présumées avoir été violées.
  116. 4) Lorsqu’il examine une plainte, le comité devrait tenir compte non seulement des simples allégations de l’organisation plaignante mais aussi de l’ensemble du dossier dont l’OIT dispose concernant le gouvernement faisant l’objet de la plainte. Pour les Philippines, il faudrait tenir compte de leurs antécédents de ratification et de participation active, de leur situation syndicale globale et des observations des bureaux de l’OIT dans le pays.
  117. 5) En résumé, le gouvernement n’a pas d’antécédents ni de grand projet de suppression des droits syndicaux; et il excusera ou tolérera encore moins que la police et l’armée violent éventuellement ces droits.
  118. 1401. En ce qui concerne l’organisation plaignante, le KMU, le gouvernement indique que le KMU est un centre syndical fondé en 1980. Bien qu’il ne soit pas inscrit auprès du gouvernement des Philippines, il opère néanmoins sans entrave depuis vingt-sept ans. Il est lié à 11 fédérations, deux organisations de masse et 300 000 travailleurs adhérents. Fondé par Felixberto Olalia, c’est son fils Rolando qui lui a ensuite succédé à la barre du KMU. A la mort de Rolando, la direction du KMU a été confiée à Crispin Beltran. Après un séjour en prison au début des années quatre-vingt, Crispin Beltran a rejoint la NPA. Plus tard, il a été le cofondateur du Parti ng Bayan (PnB), du Bagong Alyansa ng mga Makabayan (BAYAN), du Parti Bayan Muna et, ultérieurement, de l’Anakpawis qu’il représente actuellement au Congrès. A cet égard, le gouvernement note que, selon l’organisation plaignante, les syndicats du KMU considèrent comme l’une de leurs tâches d’organiser et de consolider l’Anakpawis; et de nombreux dirigeants du KMU aux niveaux local, régional et national ont accepté des responsabilités majeures au sein du parti politique pour tenter de donner une nouvelle stature au syndicalisme. Le gouvernement ajoute que le BAYAN et l’Anakpawis sont des organisations politiques penchant vers la gauche et associées au CPP/NPA et au Front démocratique national (NDF). En fait, le KMU a une orientation marxiste-léniniste-maoïste semblable à celles du CPP/NPA et du NDF, et la NPA compte dans ses rangs des membres du KMU.
  119. 1402. Les Philippines ont sans doute le foyer insurrectionnel le plus ancien d’Asie, la NPA se vantant d’avoir, avec le soutien des travailleurs, un avantage tactique de 10:1 sur les forces armées. Elle est reconnue comme étant l’auteur du meurtre de Col Rowe et des membres du Congrès Rodolfo Aguinaldo et Marcial Punzalan Jr. Elle est également l’auteur de purges internes, de l’exécution sommaire de ses membres et des charniers exhumés au Misamis Occidental qui rappellent le régime de Pol Pot. Elle a mis en place un gouvernement parallèle qui se charge de prélever ses propres impôts, de s’ingérer dans les élections et de harceler les travailleurs qui n’adhèrent ni à l’idéologie ni aux grèves.
  120. 1403. En août 2002, la NPA et le CPP ont été inscrits sur la liste des organisations terroristes par les Etats-Unis et l’Union européenne; ce qui a entraîné un retrait massif des soutiens financiers étrangers aux organisations penchant à gauche et aux syndicats affiliés. Du 9 août 2002 à ce jour, la NPA est assaillie par des dissensions internes, des mesures de représailles de la part d’ennemis privés, des pressions internationales et des campagnes conduites avec succès par les forces armées. La lutte contre le terrorisme continue. Dans le même temps, le gouvernement des Philippines garantit le respect total de la Déclaration des droits [«Bill of Rights»]. De fait, la Présidente condamne avec la plus grande fermeté l’avalanche d’exécutions extrajudiciaires. C’est pour cette raison que des audiences publiques conduites par le Congrès et des commissions spéciales pour identifier les coupables sont en cours.
  121. 1404. Pour ce qui a trait aux antécédents des Philippines en matière de relations de travail, le gouvernement indique que les Philippines ont ratifié les deux conventions nos 87 et 98. Elles étaient ainsi le onzième pays du monde et le quatrième pays hors de l’Europe à ratifier ces deux conventions. La Constitution philippine de 1987 stipule de manière catégorique que les travailleurs devront avoir le droit de s’organiser, le droit aux négociations et aux conventions collectives et le droit de faire grève et de s’engager dans des activités concertées.
  122. 1405. En 1981, le ministère du Travail et de l’Emploi a enregistré 260 grèves, soit 66 pour cent de plus que le précédent record de 157 enregistré en 1971. Le chiffre de 1981 est passé à 282 en 1984, 371 en 1985 et 581 – soit une nouvelle grève toutes les 15 heures – en 1986. Cette même année (1986), le nombre des syndicats inscrits aux Philippines a franchi la barre des 2 000, avant de dépasser les 3 000 en 1988, 4 000 en 1990 et d’augmenter ensuite régulièrement. Dans ce contexte, l’organisation plaignante s’est développée et a atteint le nombre de 300 000 travailleurs adhérents, ainsi qu’il est déclaré dans la plainte. Son nombre d’adhérents n’aurait jamais pu atteindre un tel niveau si une intention claire de supprimer l’organisation en question et ses activités légitimes avait existé.
  123. 1406. Au cours des deux derniers mois de 2007, seuls 61 avis de grève ont été déposés. Sur ce nombre, le ministère du Travail s’est attribué la juridiction sur un cas et a confirmé un autre cas à la Commission nationale des relations professionnelles pour arbitrage obligatoire. Certains de ces cas ont été réglés par une conciliation. Seul un avis de grève a finalement abouti à une grève effective. Ce record, dont les investisseurs ont pris note, est source de fierté pour le gouvernement. Il serait extrêmement injuste pour le gouvernement que ce résultat soit affaibli par une plainte prématurée présentant des allégations sans consistance de violations [des conventions] de l’OIT.
  124. 1407. La source d’information la plus fiable pour le comité est peut-être le propre bureau sous-régional de l’OIT aux Philippines. Le gouvernement recommande que, ne serait-ce que sur la question de l’état de santé du travail en général et du syndicalisme en particulier, le comité devrait obtenir des informations de son bureau sous-régional qui est le mieux à même d’attester des efforts du gouvernement des Philippines, non seulement en matière de syndicalisme mais dans les domaines du travail décent, du travail des enfants et d’autres domaines d’intervention particulièrement sensibles de l’OIT.
  125. 1408. En ce qui concerne les allégations relatives au président du KMU, Crispin Beltran, et à sept autres dirigeants et membres de la Fédération nationale des travailleurs de l’industrie du sucre (NFSW-KMU) qui avaient fait l’objet d’une arrestation sans mandat à Bulacan le 25 février 2006 – le lendemain de la déclaration de l’état d’urgence par la Présidente Arroyo –, le gouvernement indique que M. Beltran avait été arrêté sur la base d’un mandat d’arrêt. L’allégation selon laquelle une accusation antérieure contre M. Beltran avait été infirmée demeure une allégation sans fondement puisque le KMU ne peut produire aucune preuve à ce sujet. Qui plus est, l’accusation pour laquelle M. Beltran a été arrêté n’a aucun rapport avec des activités syndicales puisqu’elle concerne l’accusation de rébellion. D’une manière significative, le gouvernement a par la suite impliqué M. Beltran dans les tentatives avortées de renversement du gouvernement. Il est à l’heure actuelle toujours détenu à l’hôpital à cause de sa santé défaillante.
  126. 1409. Un examen de la plainte du KMU et de ses pièces jointes ferait également apparaître une absence de relation entre l’arrestation et la détention de membres du NFSW et des activités syndicales. Les membres et dirigeants du NFSW ont été arrêtés le 30 septembre 2005 à proximité du détachement de la Compagnie Alpha du 12e bataillon d’infanterie à Camingawan, Kabankalan City, Negros Occidental, après avoir été accusés d’être des responsables de haut rang du Parti communiste des Philippines et de la Nouvelle armée populaire (CPP/NPA). L’accent est mis très tôt sur ces cas car ils montrent les principales caractéristiques de la plainte du KMU, très à l’aise pour faire des allégations mais beaucoup moins pour les étayer, notamment pour ce qui concerne les allégations et la preuve de violation d’activités syndicales.
  127. 1410. Concernant le cas de l’Hacienda Luisita, les allégations du KMU selon lesquelles les forces chargées de faire appliquer la loi ont abattu par balles Jesus Laza, Jun David, Adriano Caballero, Jhaivie Basilio, Jaime Pastidio, Juancho Sanchez et Jessie Valdez au plus fort de la dispersion de la grève et alors que les forces composites de la police et de l’armée faisaient appliquer l’AJO émise par le secrétaire d’Etat au Travail, le gouvernement indique que des auditions ont été organisées par le Congrès sur cet événement et que ses Comités des droits de l’homme, du travail et de l’emploi et de l’agriculture ont en partie conclu que des violations des droits de l’homme ont été commises contre les travailleurs en grève de l’Hacienda Luisita.
  128. 1411. Le gouvernement tient toutefois à souligner que le cas de l’Hacienda Luisita n’était pas un simple cas d’intervention policière contre des grévistes. Les procès-verbaux montrent que la dispersion des grévistes s’est produite plusieurs jours après la grève et non immédiatement après son lancement; il y a eu des signes clairs de provocation de la part des grévistes qui ont contraint la police et les forces de l’armée à faire appliquer de force l’ordre de reprise du travail du ministère du Travail et de l’Emploi. Il est certain que les grévistes, et plus particulièrement les dirigeants syndicaux, auraient réellement pu contribuer à un règlement pacifique du conflit s’ils s’étaient conformés aux décisions légales prises par l’autorité légitimement constituée – l’AJO émise par le secrétaire d’Etat au Travail. Si les travailleurs en grève avaient repris le travail comme ils en avaient reçu l’ordre, l’incident de l’Hacienda Luisita n’aurait pas abouti à la mort et aux blessures de travailleurs.
  129. 1412. L’exercice du droit de grève a pour corollaire l’obligation de respecter les limitations imposées par la loi, en particulier celles qui sont essentielles au maintien de la paix et de l’ordre public. En vertu du droit philippin, une grève ne devrait pas entraîner l’obstruction au libre accès et à la libre sortie de l’entreprise et, lorsque cette limitation reconnue par la loi est violée par les grévistes, il peut s’avérer nécessaire de faire appel aux fonctionnaires chargés de faire appliquer la loi ou de chercher à obtenir leur aide. Dans le cadre de la grève de l’Hacienda Luisita, les excès commis par les grévistes pour empêcher l’entrée et la sortie du lieu de travail ont imposé l’intervention des fonctionnaires chargés de faire appliquer la loi, qui sont censés maintenir en permanence l’ordre public. De fait, tout droit normalement irréfragable prend fin là où les droits des autres commencent.
  130. 1413. Si des fonctionnaires chargés de faire appliquer la loi dépassent effectivement les limites de leur autorité au-delà de ce qui est exigé ou requis par la situation, il existe des voies de recours juridiques automatiques pour traiter cette situation, sans qu’il soit besoin d’exiger que l’on en tire la conclusion d’une violation des droits syndicaux par une partie aux conventions. Les événements survenus à l’Hacienda Luisita sont des incidents isolés qui ont été affectés par des circonstances inhabituelles. Il s’agit d’une déviation du cours normal des choses qui n’est en rien révélatrice d’un dessein ou d’une tentative préméditée du gouvernement visant à supprimer les droits syndicaux.
  131. 1414. Pour ce qui concerne les allégations relatives aux meurtres et autres actes contre des activistes, le gouvernement répond que la plainte du KMU n’a donné, dans les cas cités, aucune preuve directe montrant que la police et l’armée étaient effectivement les auteurs de ces meurtres et de ces actes commis contre des dirigeants et des membres du KMU. La plainte n’établit pas non plus de manière catégorique de quelle façon les conventions de l’OIT citées ont été violées. Au mieux, le lien fait avec la police et l’armée semble être une simple présomption – la Commission Melo étant elle-même parvenue à cette conclusion dans son premier rapport. A l’évidence, impliquer la police et l’armée dans les meurtres sans produire aucune preuve revient à des conjectures et des spéculations pures et simples. Malheureusement, c’est ainsi que le KMU présente habituellement ses allégations, en reliant l’armée et la police aux actes dénoncés. Dans certains cas, c’est uniquement une surveillance de la police ou de l’armée, présumée et non prouvée, juste avant le meurtre, qui a fait établir un lien avec la police ou l’armée. Il faudrait bien entendu présenter bien plus que ce type d’allégation pour que le Comité de la liberté syndicale puisse faire droit à une plainte pour violation.
  132. 1415. Concernant les allégations relatives à la disparition de Perseus Geagoni, le gouvernement insiste sur l’absence de preuve désignant la responsabilité de l’armée. L’allégation d’une participation militaire se base simplement sur la déposition sur la foi d’autrui déclarant qu’un militaire a révélé qu’un groupe de 30 agents des services de renseignements était responsable de la disparition de Geagoni. Il s’agit d’une allégation très faible pour prouver le bien-fondé de l’implication présumée de l’armée. Il en va de même pour le cas de Ronald Intal.
  133. 1416. Dans les cas de Nenita Labordio, Dante Teotino, Noel Daray et Ronald Andrade, la plainte du KMU et les pièces qui y sont jointes montrent qu’ils ont en fait été tués par des personnes privées; dès lors, il est clair qu’il n’y a eu, dans ces cas, aucune participation de l’armée et/ou de la police.
  134. 1417. Dans les cas d’Antonio Pantonial, Victoria Samonte, Federico de Leon, Crisanto Teodoro, Tirso Cruz, Leodogario Punzal, Rolando Mariano et Albert Terradeno, l’organisation plaignante, le KMU, n’a pas même fait état d’une seule circonstance qui permettrait de suggérer la participation de la police et de l’armée à ces meurtres. Les seules choses clairement établies dans ces affaires, c’est que les victimes étaient soit des dirigeants ou des membres du KMU, soit des employés activement engagés dans des activités syndicales; ni plus ni moins. Il n’a même pas été allégué qu’elles ont été tuées pour des activités syndicales précises.
  135. 1418. En ce qui concerne le Père William Tadena, un prêtre, et Abelardo Ladera, un membre du conseil local, qui ont été prétendument victimes de répression antisyndicale et qui étaient des sympathisants connus des travailleurs de l’Hacienda Luisita, l’organisation plaignante, le KMU, n’a même pas allégué, et encore moins produit des preuves, de la participation de l’armée ou de la police à leurs meurtres.
  136. 1419. Dans les cas de Ramon Namuro et Nilo Bayas, l’organisation plaignante, le KMU, a présenté, à côté de leur adhésion ou affiliation au KMU, la réclamation supplémentaire qu’ils ont été tués respectivement par des membres d’un groupe paramilitaire et par l’armée. En dehors de cette réclamation non étayée et intéressée, l’organisation plaignante ne fournit aucun élément ou détail sur la façon dont l’armée pourrait avoir été impliquée dans ces cas.
  137. 1420. Samuel Bandilla, membre de l’Anakpawis, a été prétendument tué par des motocyclistes. En dehors du lien hypothétique établi entre des motocyclistes et l’armée, l’organisation plaignante ne parvient pas à présenter une allégation précise portant sur l’implication de l’armée ou de la police dans le meurtre.
  138. 1421. Pour ce qui a trait aux meurtres qui impliquent prétendument l’armée: 1) Felipe Lapa, président du Syndicat des travailleurs de Milagrosa Farm (NAFLU-KMU); 2) Angelito Mabansag, membre d’une organisation des classes urbaines défavorisées affiliée au KMU; 3) Edwin Bargamento, membre du comité exécutif régional de la Fédération nationale des travailleurs de l’industrie du sucre (NFSW-KMU); 4) Mario Fernandez, organisateur de la NFSW; 5) Manuel Bartolina, président et organisateur de la NFSW dans plusieurs haciendas à Manapla, Negros Occidental; 6) Diosdado Fortuna, président du Syndicat des employés de Filipro Employees chez Nestlé Philippines; 7) Ricardo Ramos, Syndicat de la sucrerie centrale de Tarlac (CATLU); 8) Roberto de la Cruz, membre du conseil du Syndicat des travailleurs de Tritran et membre de l’Anakpawis, de même que pour quelque 35 cas supplémentaires énumérés par l’organisation plaignante pour ce qui concerne des allégations de meurtres commis par des éléments de la police ou de l’armée sans aucune indication quant aux motifs, le gouvernement note que l’un des points communs aux allégations relatives à ces cas est que les documents fournis à l’appui sont pour la plupart des récits relatés par le KARAPATAN ou par la Mission internationale de solidarité ouvrière (MISO) Philippines, ou par d’autres organisations alliées à la communauté activiste du KMU. Ils renferment des récits qui ne donnent pas suffisamment de preuves pour que l’accusation tienne dans le cadre d’enquêtes officielles ou judiciaires portant sur l’implication de l’armée ou de la police dans les meurtres ou dans les violations des droits syndicaux. A titre d’exemple, les allégations du KMU relatives aux liens, aux pressions ou aux menaces de l’armée avant les meurtres doivent être établies par des preuves concluantes à l’appui; condition qui n’est en aucune façon remplie par les pièces intéressées jointes aux plaintes du KMU. En d’autres termes, il faut qu’il y ait au moins quelque élément prouvant la pertinence des allégations. De plus, ces organisations qui ont fourni les exposés des faits pour les allégations du KMU sont les mêmes qui ont refusé de participer à la Commission Melo bien qu’elles y aient été librement invitées. Dans ces conditions, les allégations de violations des droits syndicaux présentées par le gouvernement au titre des conventions ne devraient pas être admises.
  139. 1422. En ce qui concerne les prétendus kidnappings et disparitions forcées, le gouvernement indique que, d’après les propres allégations du KMU, des victimes telles que Armando Leabres, Francis Noel Desacula, Rogelio Concepcion et Leopoldo Ancheta ont été enlevées par des hommes soupçonnés d’être des militaires. Une fois de plus, la participation de l’armée dans ces affaires est purement hypothétique et il ne saurait s’agir d’enlèvements commis par l’armée pour étouffer le syndicalisme. La charge de la preuve ne devrait pas incomber au gouvernement sur la base de ces allégations hypothétiques.
  140. 1423. Les autres cas d’enlèvements ou de kidnappings prétendument perpétrés par l’armée reposent de la même façon sur des suppositions, des conjectures et des spéculations. D’autre part, certaines réclamations du KMU ne s’appuient pas entièrement sur des preuves qui pourraient soutenir l’épreuve d’acceptation sans réserves. Ainsi, par exemple, les cas de Robin Solano et Ricardo Valmocina, prétendument enlevés par des éléments de l’armée qui avaient auparavant massacré les travailleurs de la CV Tamayo Farm, font apparaître une absence de fondement de ces allégations essentielles qui renferment rien moins que des accusations de massacre.
  141. 1424. Dans certains cas, l’armée semble avoir des raisons valables de poursuivre les «prétendues victimes». Quatre membres du groupe PISTON ont ainsi été par la suite accusés de possession illégale d’explosifs – un crime passible de sanctions en vertu de la loi philippine. Dans ce cas, les poursuites ne sont pas dirigées contre des activités syndicales mais pour des crimes commis contre l’ordre public.
  142. 1425. Concernant les allégations de militarisation des lieux de travail, le gouvernement nie mettre en place des détachements militaires ou déployer des forces armées dans des lieux de travail paralysés par une grève ou dans ceux où existent des syndicats militants du fait de la situation syndicale dans ces lieux. La présence de la police et de l’armée est dictée par le besoin public. Quand la paix et l’ordre public sont en jeu, la police est généralement de service, mais l’armée peut être impliquée quand des questions d’insurrection et de terrorisme sont concernées. Il est certain que ces responsabilités ne peuvent être dissimulées ou tenues à l’écart du public simplement du fait de l’existence d’une grève à proximité ou parce que des travailleurs sont en train de s’organiser en syndicat. A tout le moins, des accusations de cette nature devraient être appuyées par des preuves, et non par de simples récits de seconde main. Ces récits sont par ailleurs nécessairement suspects s’ils ne semblent pas avoir été portés à l’attention du ministère du Travail et de l’Emploi dans le cadre d’une plainte ou de toute autre façon.
  143. 1426. Les allégations selon lesquelles des travailleurs sont tenus de prêter assistance à l’armée apparaissent sans rapport avec les conventions citées, en l’absence de toute relation avec des activités syndicales. En d’autres termes, leur aide peut leur avoir été demandée en leur qualité de membres ou de citoyens d’une communauté locale – une demande qui n’entre pas du tout dans le cadre des conventions concernées. Dès lors, ces allégations n’ont pas à être abordées ici. Le gouvernement ajoute qu’il ne s’autorise pas, lui-même ou l’un quelconque de ses agents, à être utilisé par des entreprises et sociétés privées dans l’objectif de contester à des travailleurs leur droit d’organisation, de négociation et de convention collective, ainsi que l’organisation plaignante, le KMU, veut le faire croire à cet organisme. La plainte du KMU à cet égard ne devrait pas être examinée car sans fondement.
  144. 1427. En ce qui concerne les allégations de surveillance par l’armée, le gouvernement indique que la surveillance est un outil légitime pour faire appliquer la loi, qui ne peut être présumée constituer par elle-même une violation des droits syndicaux. Pour qu’elle le soit, il faudrait qu’il y ait plus qu’une surveillance, avec l’intention manifeste d’affecter, subvertir ou saper l’exercice de l’activité syndicale. La surveillance d’un membre du KMU n’indique pas en elle-même une telle violation, compte tenu de la ligne rouge très ténue qui sépare le KMU et certains de ses membres d’activités illégales du CPP/NPA dont il a été question plus haut. Chaque fois qu’un membre du KMU a franchi cette ligne de démarcation, la légitimité de la surveillance ne devrait soulever aucune question. Parallèlement, il faudrait mettre en avant plus qu’une banale réclamation pour surveillance pour mériter un examen pour violation de droits syndicaux devant le Comité de la liberté syndicale.
  145. 1428. En conclusion, le gouvernement souligne que la présente plainte a soulevé des questions d’ordre purement politique dont les faits sous-jacents fondamentaux ne peuvent être prouvés dans le cadre d’une juridiction telle que le Comité de la liberté syndicale. Ces faits doivent nécessairement être établis au niveau de la juridiction locale; ce n’est qu’ensuite et à partir de cette base que la question d’une violation des droits syndicaux sera prête à être examinée par le comité.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 1429. Le comité note que le présent cas concerne des allégations de meurtres, menaces graves, harcèlement et intimidations incessants et autres formes de violence infligés à des dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux/défenseurs de syndicats et des organisations de travailleurs du secteur informel qui continuent activement de faire valoir leurs exigences légitimes aux niveaux local et national.
  2. 1430. Le comité note que le gouvernement soulève un certain nombre d’objections préliminaires à ce cas en déclarant ce qui suit: i) la plainte ne présente pas de commencement de preuve; ii) l’organisation plaignante se renseigne à droite et à gauche en quête d’un tribunal compétent susceptible de lui faire la plus grande publicité alors qu’une juridiction compétente locale, c’est-à-dire. le processus d’enquête interne des Philippines, est disponible et devrait avoir la priorité; iii) cela fait soixante ans que les Philippines sont confrontées à un problème insurrectionnel, encore aggravé par le terrorisme au cours des vingt dernières années; et iv) l’organisation plaignante, le KMU, est une branche d’un mouvement d’insurrection, le Parti communiste des Philippines/Nouvelle armée populaire (CPP/NPA), et il conviendrait de distinguer les activités syndicales légitimes qui ont pleinement droit à la protection de l’OIT et les activités subversives qui violent les lois philippines et n’entrent pas dans les paramètres des conventions de l’OIT sur la liberté syndicale.
  3. 1431. Le comité note à ce sujet ce qui suit: i) il entre dans le mandat du comité d’examiner si, et dans quelle mesure, des preuves sont présentées pour étayer les allégations; cette appréciation porte sur le fond de l’affaire et ne saurait fonder une décision d’irrecevabilité [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 9]; ii) même si le recours à des procédures juridiques internes, quelle qu’en soit l’issue, est sans aucun doute un élément à prendre en considération, le comité a toujours estimé que, eu égard à ses responsabilités, sa compétence à examiner des allégations n’est pas soumise à l’épuisement de procédures nationales [Procédures spéciales pour l’examen par l’Organisation internationale du Travail de plaintes alléguant des violations de la liberté syndicale, paragr. 30]; et iii) dans les cas où le gouvernement concerné estime que les questions soulevées sont de nature purement politique, le comité a décidé que, même si des allégations peuvent être à l’origine politiques ou présenter certains aspects politiques, elles devront être examinées sur le fond si elles soulèvent des questions concernant directement l’exercice de droits syndicaux [Procédures, op. cit., paragr. 25]; qui plus est, dans le cadre de son mandat, il appartient au comité d’examiner dans quelle mesure l’exercice des droits syndicaux peut être affecté dans des cas d’allégations d’atteintes aux libertés civiles. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 7.]
  4. 1432. Le comité souhaite souligner que la procédure spéciale sur la liberté syndicale n’a pas pour objet de blâmer ni de sanctionner quiconque, mais d’engager un dialogue tripartite constructif afin de promouvoir le respect des droits syndicaux dans la loi et dans la pratique. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 4.] C’est dans cet esprit que le comité poursuivra un examen du présent cas.
  5. 1433. Le comité note que l’organisation plaignante se réfère aux types de violations suivants: i) exécutions sommaires de dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et de travailleurs du secteur informel de 2001 à 2006, comme point culminant du programme du gouvernement pour empêcher les travailleurs de l’économie structurée ou du secteur informel d’exercer leur liberté syndicale et leur droit d’organisation et de négociation collective; en conformité avec son mandat, qui l’autorise à examiner dans quelle mesure l’exercice des droits syndicaux peut être affecté dans des cas d’allégations d’atteintes aux libertés civiles [voir Recueil, op. cit., paragr. 7], le comité a, à cet égard, retenu une liste de 44 meurtres de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes figurant dans l’annexe I; ii) enlèvements et disparitions forcées de dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et travailleurs du secteur informel, commis par des éléments de l’armée et de la police de janvier 2001 à juin 2006, non seulement pour intimider et/ou terroriser les travailleurs, syndiqués ou non, pour les empêcher de poursuivre leurs activités économiques et politiques, mais aussi dans le but ultime de paralyser le syndicat ou l’organisation pour lui ôter toute utilité; le comité a retenu une liste d’incidents concernant des membres ou des dirigeants syndicaux figurant dans l’annexe II; iii) harcèlement, intimidation, chasse aux sorcières et menaces graves commises par l’armée et les forces de police à l’encontre de dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et travailleurs du secteur informel; iv) militarisation des lieux de travail dans des sociétés paralysées par une grève ou par l’existence d’un conflit du travail entre la direction et les travailleurs et où les syndicats déjà en place ou en cours de constitution sont considérés progressistes ou militants, par la mise en place de détachements de l’armée et/ou le déploiement de forces de police et de l’armée sous prétexte d’opérations de contre-insurrection; et v) arrestation et détention suivies de poursuites judiciaires pénales à l’encontre de dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et travailleurs du secteur informel du fait de leur implication et de leur participation active dans des activités économiques et politiques légitimes de syndicats et d’associations de travailleurs du secteur informel.
  6. 1434. Le comité note les précisions du gouvernement selon lesquelles la Présidente des Philippines a mis en place une Commission indépendante chargée de s’occuper des meurtres de membres des médias et d’activistes (la Commission Melo), qui a présenté son rapport le 30 janvier 2007. Dans ce rapport, publié le 22 février 2007, «la commission est parvenue à la conclusion qu’il n’existe aucune preuve directe, mais uniquement des présomptions reliant certains éléments de l’armée aux meurtres … Il existe toutefois sans aucun doute des preuves qui font peser des soupçons sur certains éléments et personnalités des forces armées … comme étant responsables du nombre indéterminé de meurtres en autorisant, tolérant et même encourageant ces derniers.» Indépendamment de ce qui précède, «un complément d’enquête approfondi sur les nombreux meurtres incluant un large rassemblement de preuves est nécessaire pour pouvoir poursuivre avec succès les éléments directement responsables. A cet égard, la déposition de témoins et la présentation de preuves par les victimes et leurs familles et collègues pourraient s’avérer indispensables.»
  7. 1435. Le comité observe également que les recommandations de la Commission Melo ont insisté sur la nécessité de: i) une ferme condamnation des meurtres de la part du gouvernement et en particulier de la Présidente; ii) une enquête conduite par un organisme ou un bureau indépendant des forces armées; iii) la création d’une équipe spéciale de procureurs compétents et bien formés pour diriger les procès et de tribunaux d’exception pour instruire et compléter ces cas jusqu’à leur audience finale; iv) le renforcement du Programme de protection des témoins; v) une législation pour exiger que les forces de la police et de l’armée et les autres fonctionnaires conservent une stricte responsabilité de la chaîne de commandement concernant les meurtres extrajudiciaires et autres délits commis par le personnel placé sous leur commandement, contrôle ou autorité; et vi) une orientation et une formation des forces armées.
  8. 1436. Le comité observe que, de ce fait, la Présidente des Philippines a donné les instructions suivantes: i) que la Commission Melo poursuive son travail et soumette régulièrement des rapports complémentaires; ii) qu’une proposition officielle soit soumise à l’Union européenne, à l’Espagne, à la Finlande et à la Suède pour l’envoi d’enquêteurs chargés d’aider la Commission Melo; iii) la constitution d’un organe d’enquête mixte par les ministères de la Justice, de la Défense nationale et la Commission des droits de l’homme pour creuser plus avant la question de l’implication de personnel militaire dans des meurtres inexpliqués; déposer les accusations correspondantes et poursuivre les parties coupables; iv) l’élargissement du Programme de protection des témoins de manière à couvrir tous les témoins de meurtres inexpliqués de nature idéologique/politique; et v) la création de tribunaux d’exception pour juger en première instance les accusations impliquant des meurtres inexpliqués de nature idéologique/politique. La Cour suprême a répondu à la dernière demande par la désignation de 99 tribunaux régionaux à titre de tribunaux d’exception, qui devront résoudre ou statuer promptement sur les cas d’exécutions extrajudiciaires. Les procès seront terminés dans un délai de soixante jours et un jugement sera rendu dans les trente jours, la priorité étant donnée aux cas relatifs aux activistes et au personnel des médias; et tous moyens et requêtes dilatoires seront interdits.
  9. 1437. Le comité note avec intérêt les dispositions prises par le gouvernement eu égard à la gravité du problème des meurtres. Le comité rappelle toutefois également que la présente plainte est la troisième à lui être présentée concernant de très graves allégations de meurtres, disparitions, attaques de piquets de grève et arrestations illégales. [Voir 292e rapport, cas no 1572, paragr. 297-312, et 279e rapport, cas no 1444, paragr. 544-562.] Le comité déplore la gravité des allégations faites dans le présent cas et le fait que, plus de dix ans après le dépôt de la dernière plainte sur cette question, les avancées réalisées par le gouvernement pour mettre un terme aux meurtres, enlèvements, disparitions et autres graves violations des droits de l’homme qui ne peuvent que renforcer le climat de violence et d’insécurité et avoir un effet extrêmement dommageable sur l’exercice des droits syndicaux ont été inadéquates – au contraire, le nombre d’allégations de meurtres a spectaculairement augmenté, comme le montre la liste de l’annexe I. Le comité insiste sur le fait que la liberté syndicale ne peut s’exercer que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l’homme, en particulier du droit à la vie et du droit à la sécurité de la personne. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 43.] Les droits des organisations de travailleurs […] ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 44.] Un climat de violence, tel que celui que reflètent l’assassinat ou la disparition de dirigeants syndicaux, ou des actes d’agression dirigés contre les locaux et les biens d’organisations de travailleurs et d’employeurs, constitue un grave obstacle à l’exercice des droits syndicaux; de tels actes exigent de sévères mesures de la part des autorités. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 46.]
  10. 1438. Le comité tient également à faire remarquer avec une profonde inquiétude que, bien que la Commission Melo ait recommandé que l’enquête sur les meurtres soit conduite par un organe indépendant de l’armée, l’organe d’enquête mixte effectivement mis en place compte parmi les instances responsables de sa création le ministère de la Défense nationale. Le comité rappelle à cet égard que l’assassinat ou la disparition de dirigeants syndicaux et de syndicalistes ou des lésions graves infligées à des dirigeants syndicaux et des syndicalistes exigent l’ouverture d’enquêtes judiciaires indépendantes en vue de faire pleinement et à bref délai la lumière sur les faits et les circonstances dans lesquelles se sont produits ces faits et ainsi, dans la mesure du possible, de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et d’empêcher que de tels faits se reproduisent. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 48.]
  11. 1439. Le comité observe également que, alors que les meurtres allégués dans le présent cas remontent jusqu’à 2001 – même si la principale série date de 2005 –, le gouvernement ne mentionne pas un seul cas dans lequel un suspect ait été convoqué pour être interrogé, ni aucune mesure concrète prise pour enquêter sur les meurtres. Le comité rappelle que l’administration dilatoire de la justice constitue un déni de justice et que l’absence de jugements contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d’insécurité, et qui est donc extrêmement dommageable pour l’exercice des activités syndicales. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 105 et 52.] Le comité demande donc au gouvernement de le tenir informé des avancées de l’enquête qui doit être conduite par l’organe d’enquête mixte concernant les meurtres de dirigeants syndicaux et de syndicalistes et, en particulier, des mesures prises pour enquêter sur les meurtres allégués par l’organisation plaignante dont la liste est donnée dans l’annexe I. Le comité espère fermement que l’enquête et les procès démarreront sans retard et en toute indépendance, de telle sorte que toutes les parties responsables puissent être identifiées et sanctionnées par les tribunaux compétents dès que possible et que l’on évite un climat d’impunité. Le comité demande à être tenu informé des développements en la matière.
  12. 1440. De plus, le comité note avec regret que le gouvernement rejette les allégations relatives à l’implication de la police ou de l’armée dans les meurtres en se basant sur le manque de preuves suffisantes. Le comité considère que, indépendamment de la question de toute implication de membres des forces armées ou de la police dans les assassinats, de nombreux meurtres se sont effectivement produits, comme l’ont reconnu la Commission Melo et le gouvernement lui-même. A cet égard, le comité considère que les faits imputables à des particuliers engagent la responsabilité des Etats en raison de leur obligation de prévenir les violations des droits de l’homme. En conséquence, les gouvernements doivent s’efforcer de ne pas violer leurs devoirs de respect des droits et des libertés individuelles, ainsi que leur devoir de garantir le droit à la vie des syndicalistes. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 47.] Dès lors, le gouvernement est dans l’obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire identifier et sanctionner les parties coupables – en particulier en s’assurant que les témoins, qui sont un élément crucial pour réussir à identifier et à poursuivre des suspects, sont efficacement protégés – et pour parvenir à empêcher la répétition de violations des droits de l’homme.
  13. 1441. A cet égard, le comité note avec inquiétude que le gouvernement n’a fourni aucune information sur les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations de la Commission Melo concernant: i) le renforcement du Programme de protection des témoins (les informations fournies par le gouvernement se limitent à l’élargissement de ce programme pour inclure les témoins de meurtres); ii) l’adoption d’une législation pour assurer une stricte responsabilité de la chaîne de commandement dans la police et les forces armées pour ce qui concerne les meurtres; et iii) l’organisation d’une orientation et d’une formation des forces armées. Le comité demande donc au gouvernement de prendre sans retard toutes les mesures nécessaires pour garantir la mise en œuvre intégrale de ces importantes recommandations de la Commission Melo.
  14. 1442. Le comité doit également faire remarquer avec inquiétude que le mandat de la Commission Melo se limite aux exécutions extrajudiciaires, de sorte que les allégations d’enlèvements et de disparitions demeurent inexplorées. Qui plus est, le comité s’inquiète de voir le gouvernement ne faire état d’aucune disposition prise pour enquêter sur les enlèvements et disparitions allégués ou pour citer à comparaître les auteurs présumés pour les interroger. Au contraire, le gouvernement a tendance à rejeter purement et simplement les allégations sur la base du manque de preuves suffisantes. Le comité rappelle que l’assassinat ou la disparition de dirigeants syndicaux et de syndicalistes ou des lésions graves infligées à des dirigeants syndicaux et des syndicalistes exigent l’ouverture d’enquêtes judiciaires indépendantes en vue de faire pleinement et à bref délai la lumière sur les faits et les circonstances dans lesquelles se sont produits ces faits et ainsi, dans la mesure du possible, de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et d’empêcher que de tels faits se reproduisent. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 48.] Il souligne également que l’absence de jugements contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d’insécurité, et qui est donc extrêmement dommageable pour l’exercice des activités syndicales. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 52.] Le comité demande donc au gouvernement de diligenter dès que possible une enquête judiciaire indépendante et d’entamer des procédures devant les tribunaux compétents portant sur les allégations d’enlèvements et de disparitions de dirigeants syndicaux et de syndicalistes dont la liste est donnée dans l’annexe II, en vue de faire pleinement la lumière sur les faits et circonstances concernés, déterminer les responsables, punir les coupables et empêcher la répétition d’événements semblables. Le comité demande à être tenu informé des progrès réalisés à cet égard.
  15. 1443. Le comité note les autres allégations faites par l’organisation plaignante sur un certain nombre d’obstacles à la formation et aux activités de syndicats, notamment: i) de sérieux obstacles mis au processus de reconnaissance d’un syndicat; ii) une politique non écrite voulant qu’il n’y ait ni syndicat ni grève dans les zones franches d’exportation et les enclaves industrielles où sont concentrés les investissements étrangers; iii) une tendance à la flexibilisation qui empêche les travailleurs de s’organiser ou de négocier collectivement par crainte d’être licenciés; iv) des licenciements de dirigeants syndicaux et de membres actifs et des requêtes à l’instigation des sociétés pour annuler les inscriptions de syndicats qui paralysent pratiquement ces derniers dans leur phase de constitution; v) le pouvoir du/de la secrétaire du DOLE d’imposer un arbitrage obligatoire mettant fin à des grèves par la délivrance de l’AJO en vertu de l’article 263(g) du Code du travail; et vi) la dispersion de grèves par la police et l’armée dans les cas où le syndicat brave l’AJO, à l’instar de ce qui s’est produit dans le cas de l’Hacienda Luisita à Tarlac où la mise à exécution d’une AJO a coûté la vie à au moins sept grévistes et entraîné des blessures graves pour 70 travailleurs et sympathisants.
  16. 1444. Le comité note que, en réponse à ces allégations, le gouvernement fait référence à ses antécédents en matière de relations de travail (ratification des conventions nos 87 et 98, reconnaissance de la liberté syndicale dans la Constitution, etc.). Concernant le droit de grève en particulier, le gouvernement se réfère à des statistiques montrant que le taux de grèves a spectaculairement baissé depuis les années quatre-vingt et que, au cours des deux premiers mois de 2007, sur 61 avis de grèves, seule une grève a effectivement eu lieu; certaines se sont réglées par la conciliation; le ministère du Travail s’est attribué la juridiction sur un cas et a confirmé un autre cas à la Commission nationale des relations professionnelles pour arbitrage obligatoire. Le gouvernement déclare que ce record est pour lui une source de fierté dont les investisseurs ont pris note.
  17. 1445. Le comité note que la plupart des questions soulevées par l’organisation plaignante ont été examinées à plusieurs reprises par le comité dans des cas antérieurs [les cas les plus récents étant le cas no 2252, 343e rapport, paragr. 182-190, et le cas no 2488, 346e rapport, paragr. 1271 à 1360]. Le comité poursuivra dans le cadre de ces autres cas son examen des questions liées à l’absence d’une méthode d’homologation juste, indépendante et rapide offrant une protection adéquate contre des actes d’ingérence de l’employeur, le pouvoir du/de la secrétaire du DOLE en vertu de l’article 286(g) du Code du travail de mettre fin à des grèves dans des secteurs qui ne sont pas qualifiés d’essentiels au sens strict du terme ou qui concernent des fonctionnaires exerçant une autorité au nom de l’Etat, les licenciements de dirigeants syndicaux et de syndicalistes dans ce contexte et l’absence d’une protection efficace contre la discrimination antisyndicale devant les tribunaux.
  18. 1446. Le comité saisit cette occasion pour souligner que, pour ce qui concerne la réponse du gouvernement aux allégations, les droits syndicaux, comme les autres droits de l’homme, doivent être respectés quel que soit le niveau de développement du pays concerné [voir Recueil, op. cit., paragr. 19]; et il rappelle la Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale, adoptée par le Conseil d’administration du BIT en novembre 1977, qui dispose (paragr. 46 de la Déclaration telle que modifiée en novembre 2000): «là où les gouvernements des pays d’accueil offrent des avantages particuliers pour attirer les investissement étrangers, ces avantages ne devraient pas se traduire par des restrictions quelconques apportées à la liberté syndicale des travailleurs ou à leur droit d’organisation et de négociation collective». [voir Recueil, op. cit., paragr. 19 et 20.] Le comité insiste également sur le fait que les travailleurs des zones franches d’exportation – malgré les arguments économiques souvent mis en avant – doivent comme tous les autres travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, jouir des droits syndicaux prévus par les conventions sur la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 264.] Enfin, le comité a toujours reconnu aux travailleurs et à leurs organisations le droit de grève comme le moyen légitime de défense de leurs intérêts économiques et sociaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 521.]
  19. 1447. Concernant l’incident survenu à l’Hacienda Luisita, qui porte sur l’intervention de la police et de l’armée dans une grève qui a coûté la vie à au moins sept dirigeants syndicaux et syndicalistes et des blessures à 70 autres, le comité note que, selon le gouvernement, les dossiers montrent qu’il y a eu des signes clairs de provocation de la part des grévistes qui ont refusé de se conformer à l’AJO du/de la secrétaire du DOLE les enjoignant de mettre fin à leur grève, et il souligne que l’exercice du droit de grève a pour corollaire l’obligation de respecter les restrictions légales, tout particulièrement pour ce qui a trait à l’interdiction d’empêcher l’accès et la sortie des entreprises. Les excès commis par les grévistes ont rendu incontournable l’intervention des fonctionnaires chargés de faire appliquer la loi.
  20. 1448. Le comité observe, à partir des nombreux documents fournis par l’organisation plaignante, que trois des six grilles de l’Hacienda Luisita étaient ouvertes pendant que les travailleurs tenaient leur piquet de grève à la grille 1; c’est ainsi que l’armée et la police ont pu pénétrer dans l’hacienda pour attaquer les travailleurs. Le comité observe par ailleurs que les Comités des droits de l’homme, du travail et de l’emploi de la Chambre des représentants sont parvenus, sur cet incident, aux conclusions suivantes: i) «il n’existe aucune preuve quelle qu’elle soit que des actes criminels aient été commis et/ou des troubles civils aient été perpétrés par les travailleurs en grève, qui auraient pu justifier l’intervention de la police»; ii) «les 6 et 7 novembre 2004, alors que les membres de la police avaient prétendument déjà harcelé les travailleurs, le DOLE n’avait encore délivré aucun ordre demandant l’aide d’organes de maintien de l’ordre … Il n’existait donc aucune base permettant à la PNP [Police nationale des Philippines] de déployer une force de police CDM dans la zone de la grève»; iii) «il y a eu sans le moindre doute une utilisation excessive de la force à l’encontre des travailleurs»; iv) «le 16 novembre 2004, les Forces armées philippines [AFP] se sont jointes à la PNP pour harceler, blesser et tirer sur les travailleurs en grève, ce qui a causé la mort d’un certain nombre d’entre eux. La participation des AFP s’est faite sur la demande ou l’ordre du/de la secrétaire du DOLE». Et les comités de conclure: «Après une délibération et un examen minutieux des dépositions des témoins et de toutes les parties invitées par les comités et l’étude de tous les documents soumis dans le cadre du déroulement de l’enquête du Congrès, les comités sont parvenus à la conclusion que des violations des droits de l’homme ont été commises à l’encontre des travailleurs en grève de l’Hacienda Luisita par des éléments de la Police nationale des Philippines et des Forces armées des Philippines, y compris les fonctionnaires et le personnel du ministère du Travail et de l’Emploi. Il est dès lors impératif que les fonctionnaires concernés soient tenus responsables, directement ou du fait d’un ordre du commandement, desdits actes à l’issue des conclusions données par une enquête conduite en bonne et due forme.»
  21. 1449. Le comité rappelle que les autorités ne devraient avoir recours à la force publique que dans des situations où l’ordre public serait sérieusement menacé. L’intervention de la force publique devrait rester proportionnée à la menace pour l’ordre public qu’il convient de contrôler, et les gouvernements devraient prendre des dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées en vue d’éliminer le danger qu’impliquent les excès de violence lorsqu’il s’agit de contrôler des manifestations qui pourraient troubler l’ordre public. Dans les cas où la dispersion d’assemblées publiques ou de manifestations par la police a entraîné la perte de vies humaines ou des blessures graves, le comité a attaché une importance spéciale à ce qu’on procède immédiatement à une enquête impartiale et approfondie des circonstances et à ce qu’une procédure légale régulière soit suivie pour déterminer le bien-fondé de l’action prise par la police et pour déterminer les responsabilités. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 140 et 49.]
  22. 1450. Le comité regrette profondément l’implication de l’armée et de la police dans la dispersion du piquet de grève et il déplore également que le gouvernement ne fasse état d’aucune enquête diligentée ni d’aucun suspect identifié conformément aux recommandations du rapport du Congrès. Le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour qu’une enquête indépendante soit menée concernant les événements de l’Hacienda Luisita, aux fins d’identifier et de punir sans plus de retard les responsables. Il demande également au gouvernement de donner aux autorités chargées de faire appliquer la loi des instructions appropriées pour éliminer le danger induit par le recours à une violence excessive en tentant de maîtriser des manifestations. Le comité demande à être tenu informé à ce sujet.
  23. 1451. Le comité note que, concernant les graves allégations de militarisation des lieux des travail, le gouvernement indique que des détachements militaires ne sont pas déployés sur des lieux de travail paralysés par une grève où se trouvent des syndicats militants à cause de la situation syndicale existant dans ces lieux, mais pour des problèmes d’insurrection et de terrorisme. Qui plus est, concernant les allégations selon lesquelles des travailleurs sont contraints d’apporter leur aide à l’armée, le gouvernement indique qu’une aide peut avoir été demandée non à cause de leurs activités syndicales mais dans le cadre de leurs devoirs civiques et que le gouvernement ne s’autorise pas à être utilisé par des entreprises et des sociétés privées dans l’objectif de refuser aux travailleurs leur droit d’organisation, de négociation et de convention collective.
  24. 1452. Le comité note avec un profond regret que le gouvernement confirme pour l’essentiel l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle les Forces régionales d’intervention spéciales, le groupe mobile de la PNP et des groupes d’intervention tactique spéciaux des Philippines (SWAT) en tenue de combat intégrale font désormais partie du paysage habituel dans les sociétés du Southern Tagalog et du Central Luzon, deux des zones industrielles du pays concentrant la plupart des investissements étrangers. Le comité déplore également que le gouvernement ne fournisse aucune réponse précise aux allégations de l’organisation plaignante suivantes: i) présence et opérations militaires dans l’usine Nestlé Cabuyao depuis 2002; ii) dans la Console Farm, les militaires ont forcé les travailleurs à devenir membres d’une unité paramilitaire et à effectuer chaque jour, à tour de rôle, au moins deux heures de corvées militaires; les travailleurs sont de plus contraints par l’armée à se retirer du syndicat; les mouvements des travailleurs sont étroitement surveillés et les organisateurs et dirigeants qui se joignent à des manifestations de protestation légitimes sont fichés comme terroristes, communistes et sympathisants de la NPA; iii) à Robina Farms, l’armée a mis en place un détachement et a harcelé les syndicalistes en leur demandant de se désaffilier du KMU; iv) dans la Fresh Banana Agricultural Corporation, Compostela Valley, des membres du 28e bataillon d’infanterie ont organisé en août 2005 des réunions à l’intérieur des usines d’emballage 90, 92 et 95 pour empêcher les travailleurs de former des syndicats; les militaires auraient fait croire aux travailleurs que la création d’un syndicat entraînerait la fermeture définitive de l’usine et que leurs familles ne trouveraient plus de travail, que les membres du KMU étaient des satanistes et des rebelles et que c’était bien de créer un syndicat mais pas sous l’autorité du KMU; et v) chez Sun Ever Lights à Santa Rosa, Laguna, des éléments du Groupe d’intervention armée spécial (SWAG) ont été déployés pour assurer le fonctionnement de la chaîne de fabrication et surveiller de près les dirigeants syndicaux du syndicat nouvellement constitué.
  25. 1453. Le comité exprime son inquiétude devant l’allégation relative à la présence prolongée de l’armée à l’intérieur des lieux de travail qui, si elle est avérée, est susceptible d’avoir un effet d’intimidation sur les travailleurs souhaitant s’engager dans des activités syndicales et de créer une atmosphère de méfiance difficilement compatible avec des relations professionnelles harmonieuses. Le comité rappelle que la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations a souligné que les conventions sur la liberté syndicale ne contiennent pas de dispositions permettant d’invoquer l’excuse d’un état d’exception pour motiver une dérogation aux obligations découlant des conventions aux termes de celles-ci ou une suspension de leur application. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 193.] Il convient donc d’adopter toutes les mesures adéquates pour garantir que, quelle que soit la tendance syndicale, les droits syndicaux puissent s’exercer normalement, dans le respect des droits fondamentaux de l’homme et dans un climat exempt de violence, de pressions, de crainte et de menaces de tous ordres. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 35.] La Conférence internationale du Travail a également signalé que le droit de réunion, la liberté d’opinion et d’expression et, en particulier, le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de divulguer, sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit constituaient des libertés civiles qui sont essentielles à l’exercice normal des droits syndicaux (résolution concernant les droits syndicaux et leurs relations avec les libertés civiles, adoptée à la 54e session, 1970). [Voir Recueil, op. cit., paragr. 38.] Pour finir, les travailleurs doivent avoir le droit, sans distinction d’aucune sorte, notamment sans aucune discrimination tenant aux opinions politiques, de s’affilier au syndicat de leur choix. Ils doivent pouvoir constituer dans un climat de pleine sécurité les organisations qu’ils jugent appropriées, qu’ils approuvent ou non le modèle économique et social du gouvernement ou même le modèle politique du pays. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 212 et 213.]
  26. 1454. Le comité demande donc au gouvernement de prendre des mesures, notamment la remise d’instructions appropriées, pour mettre un terme à la présence militaire prolongée à l’intérieur des lieux de travail. Le comité demande également au gouvernement de donner des instructions appropriées pour garantir qu’aucune mesure d’exception visant à protéger la sécurité nationale n’empêche de quelque façon que ce soit l’exercice par tous les syndicats de leurs droits et activités légitimes, grèves incluses, et ce quelle que soit leur orientation philosophique ou politique, dans un climat de sécurité totale. Le comité demande à être tenu informé à ce sujet.
  27. 1455. Qui plus est, le comité note que, pour ce qui concerne les allégations de surveillance de dirigeants syndicaux, le gouvernement indique que cet outil légitime pour faire appliquer la loi ne peut être présumé constituer en lui-même une violation des droits syndicaux et que la surveillance n’indique pas par elle-même une intention de saper l’activité syndicale étant donné la ligne rouge très ténue qui sépare l’organisation plaignante, le KMU, et certains de ses membres des activités illégales du CPP/NPA.
  28. 1456. Le comité exprime sa préoccupation devant le laconisme des informations données par le gouvernement en réponse aux allégations de l’organisation plaignante qui portent notamment sur: i) la reconnaissance invoquée le 4 avril 2001, au cours d’une conférence de presse donnée par Domingo Reyes, directeur de la Police nationale des Philippines
  29. – Région IV, que 94 usines dotées de syndicats militants étaient sous surveillance; ii) la surveillance d’Angelina Ladera, présidente de l’Alliance des travailleurs de la Région 3 (WAR-3) et ancienne présidente du Syndicat d’International Wiring Services Corp. qu’elle avait dû quitter car elle craignait pour sa vie, notamment après avoir appris qu’elle figurait sur la liste des «ennemis de l’Etat» donnée par un CD-ROM distribué par le Commandement de Northern Luzon en janvier 2005 aux médias locaux et internationaux; iii) le harcèlement et la surveillance d’un certain nombre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes du Syndicat des travailleurs de Nestlé à Cabuyao; et iv) la prise en filature de dirigeants du NAMAOS dans la ville de Compostela après la conclusion d’une convention collective.
  30. 1457. Le comité rappelle que les droits des organisations de travailleurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 44.] Le comité demande donc au gouvernement de donner sans retard des instructions précises permettant de garantir le strict respect de méthodes dûment avalisées mises en œuvre dans le cadre de toutes opérations de surveillance et d’interrogatoire par l’armée et la police, d’une manière garantissant que les droits des organisations de travailleurs puissent être exercés dans un climat exempt de violence, de pressions et de menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations. Le comité demande à être tenu informé à ce sujet.
  31. 1458. Le comité déplore également que le gouvernement ne réponde pas aux allégations restantes de harcèlement et d’intimidation, portant notamment sur: i) 81 cas de menaces graves enregistrés par le CTUHR, comprenant des menaces de mort contre Romeo Legaspi, président de la Force des travailleurs unis chez Honda; ii) les interrogatoires d’un certain nombre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes du NAMAOS par les membres de l’Equipe d’intervention spéciale du 36e bataillon d’infanterie; iii) l’interrogatoire à plusieurs reprises par les militaires en septembre 2005 de Vicente Barrios, président des Travailleurs unis des Suyapa Farms; et iv) l’incident du 14 novembre 2004 au cours duquel des soldats ont patrouillé autour du bureau du NAMAOS et ont placardé des affiches avertissant les travailleurs de ne pas se laisser «utiliser par les communistes».
  32. 1459. Rappelant que les mesures privatives de liberté prises contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités syndicales, même s’il ne s’agit que de simples interpellations de courte durée, constituent un obstacle à l’exercice des droits syndicaux et que l’inviolabilité des locaux et biens syndicaux constitue l’une des libertés civiles essentielles pour l’exercice des droits syndicaux et, de plus, qu’un climat de violence, de menaces et d’intimidation à l’encontre des dirigeants syndicaux et de leurs familles ne favorise pas le libre exercice et la pleine jouissance des droits et libertés garantis par les conventions nos 87 et 98 [voir Recueil, op. cit., paragr. 63, 178 et 58], le comité demande au gouvernement de lui faire part de ses commentaires au sujet des allégations de harcèlement et d’intimidation de dirigeants syndicaux et de syndicalistes affiliés au KMU.
  33. 1460. En ce qui concerne les allégations relatives à l’arrestation de Crispin Beltran, dirigeant de longue date du KMU et actuellement représentant au Congrès de l’Anakpawis Partylist auquel le KMU est étroitement lié, ainsi qu’à l’arrestation de cinq membres de la NFSW le 30 septembre 2005 accusés d’être des responsables de haut rang du CPP/NPA, le comité note que, selon le gouvernement: i) Crispin Beltran a été arrêté sur la base d’un mandat d’arrêt, sous l’accusation de rébellion sans rapport avec des activités syndicales; le gouvernement l’a par la suite impliqué dans des tentatives avortées de renversement du gouvernement et il est actuellement détenu à l’hôpital à cause de sa santé défaillante; et ii) il n’existe aucun lien entre l’arrestation des membres et dirigeants de la NFSW et des activités syndicales, puisqu’ils ont été accusés d’être des responsables de haut rang du Parti communiste des Philippines et de la Nouvelle armée populaire (CPP/NPA).
  34. 1461. En se basant sur les informations qui lui ont été présentées, le comité n’est pas en mesure de déterminer si ces cas concernent ou non des activités syndicales. Le comité rappelle que dans des cas où les plaignants allèguent que des travailleurs ou des dirigeants syndicalistes avaient été arrêtés en raison de leurs activités syndicales et où les réponses des gouvernements se bornaient à réfuter semblables allégations ou à indiquer que les arrestations avaient été opérées en raison d’activités subversives, pour des raisons de sécurité intérieure ou pour des crimes de droit commun, le comité s’est fait une règle de demander aux gouvernements en question des informations aussi précises que possible sur les arrestations incriminées, en particulier en ce qui concerne les actions judiciaires entreprises et le résultat de ces actions, pour lui permettre de procéder en connaissance de cause à l’examen des allégations. Dans de nombreux cas, le comité a demandé aux gouvernements intéressés de communiquer le texte des jugements prononcés avec leurs attendus. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 111 et 112.]
  35. 1462. Le comité demande au gouvernement de lui envoyer toute décision judiciaire rendue dans les affaires relatives à l’arrestation de Crispin Beltran, président de longue date du KMU, ainsi que de cinq membres de la NFSW et de s’assurer que toute information pertinente est collectée de façon indépendante afin de clarifier leur situation et les circonstances entourant leur arrestation. S’il s’avère, suite aux procédures judiciaires, que leur arrestation a eu un lien avec leurs activités syndicales, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin d’assurer qu’ils soient immédiatement libérés.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 1463. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité déplore la gravité des allégations faites dans le présent cas et le fait que, plus de dix ans après le dépôt de la dernière plainte sur cette question, les avancées réalisées par le gouvernement pour mettre un terme aux meurtres, enlèvements, disparitions et autres graves violations des droits de l’homme qui ne peuvent que renforcer le climat de violence et d’insécurité et avoir un effet extrêmement dommageable sur l’exercice des droits syndicaux ont été inadéquates.
    • b) Le comité demande au gouvernement de:
    • i) le tenir informé des avancées de l’enquête qui doit être conduite par l’organe d’enquête mixte concernant les meurtres de dirigeants syndicaux et de syndicalistes et, en particulier, des mesures prises pour enquêter sur les meurtres allégués par l’organisation plaignante dont la liste est donnée dans l’annexe I. Le comité espère fortement que l’enquête et les procès démarreront sans retard et en toute indépendance, de telle sorte que toutes les parties responsables puissent être identifiées et sanctionnées par les tribunaux compétents dès que possible et que l’on évite un climat d’impunité;
    • ii) diligenter dès que possible une enquête judiciaire indépendante et entamer une procédure devant les tribunaux compétents portant sur les allégations d’enlèvements et de disparitions de dirigeants syndicaux et de syndicalistes dont la liste est donnée dans l’annexe II, en vue de faire pleinement la lumière sur les faits et circonstances concernés, déterminer les responsables, punir les coupables et empêcher la répétition d’événements semblables;
    • iii) le tenir informé des progrès réalisés à cet égard.
    • c) Notant que le gouvernement est dans l’obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire identifier et sanctionner les parties coupables – en particulier en s’assurant que les témoins, qui sont un élément crucial pour réussir à identifier et à poursuivre des suspects, sont efficacement protégés – et pour parvenir à empêcher la répétition de violations des droits de l’homme, le comité demande au gouvernement de prendre sans retard toutes les mesures nécessaires pour garantir la mise en œuvre intégrale des recommandations de la Commission Melo pour ce qui concerne: i) le renforcement du Programme de protection des témoins; ii) une législation pour exiger que les forces de la police et de l’armée et d’autres fonctionnaires maintiennent une stricte responsabilité de la chaîne de commandement concernant les meurtres extrajudiciaires et autres délits commis par un personnel placé sous leur commandement, contrôle ou autorité; et iii) l’orientation et la formation des forces armées.
    • d) Déplorant profondément l’implication de l’armée et de la police dans l’intervention mettant fin à la grève qui a coûté la vie à au moins sept dirigeants syndicaux et syndicalistes et des blessures graves à 70 autres, le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour qu’une enquête indépendante soit menée, aux fins d’identifier et de punir sans plus de retard les responsables. Il demande également au gouvernement de donner aux autorités chargées de faire appliquer la loi des instructions appropriées pour éliminer le danger induit par le recours à une violence excessive en tentant de maîtriser des manifestations. Le comité demande à être tenu informé à ce sujet.
    • e) Exprimant son inquiétude devant la présence prolongée de l’armée à l’intérieur des lieux de travail, qui est susceptible d’avoir un effet d’intimidation sur les travailleurs souhaitant s’engager dans des activités syndicales et de créer une atmosphère de méfiance difficilement compatible avec des relations professionnelles harmonieuses, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures, notamment la remise d’instructions appropriées, pour mettre un terme à la présence militaire prolongée à l’intérieur des lieux de travail.
    • f) Le comité demande au gouvernement de donner des instructions appropriées pour garantir qu’aucune mesure d’exception visant à protéger la sécurité nationale n’empêche de quelque façon que ce soit l’exercice par tous les syndicats de leurs droits et activités légitimes, grèves incluses, et ce quelle que soit leur orientation philosophique ou politique, dans un climat de sécurité totale. Le comité demande à être tenu informé à ce sujet.
    • g) Le comité demande au gouvernement de donner sans retard des instructions précises permettant de garantir le strict respect de méthodes dûment avalisées mises en œuvre dans le cadre de toutes opérations de surveillance et d’interrogatoire par l’armée et la police, d’une manière garantissant que les droits des organisations de travailleurs puissent être exercés dans un climat exempt de violence, de pressions et de menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations. Le comité demande à être tenu informé à ce sujet.
    • h) Le comité demande au gouvernement de lui faire part de ses commentaires au sujet des allégations de harcèlement et d’intimidation de dirigeants syndicaux et de syndicalistes affiliés au KMU.
    • i) Le comité demande au gouvernement de lui envoyer toute décision judiciaire rendue dans les affaires relatives à l’arrestation de Crispin Beltran, président de longue date du KMU, ainsi que de cinq membres de la NFSW et de s’assurer que toute information pertinente est collectée de façon indépendante afin de clarifier leur situation et les circonstances entourant leur arrestation. S’il s’avère, suite aux procédures judiciaires, que leur arrestation a eu un lien avec leurs activités syndicales, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin d’assurer qu’ils soient immédiatement libérés.

Z. Annexe I

Z. Annexe I
  • Meurtres allégués
  • Nom
  • Tué(e) le
  • Organisation et position
    1. 1 Felipe Lapa
    2. 25 octobre 2001
  • Dirigeant, Syndicat des travailleurs de Milagros Farm
    1. 2 Nenita Labordio
    2. 27 octobre 2002
  • Ouvrier, Footjoy Company
    1. 3 Angelito Mabansag
    2. 28 septembre 2003
  • Organisateur de la communauté, KADAMAY, Manille
    1. 4 Melita Carvajal
    2. 27 août 2004
  • KADAMAY, Laguna
    1. 5 Samuel Bandilla
    2. 15 octobre 2004
  • Organisateur du Syndicat de Leyte Metropolitan Waterworks, Association des employés du district
    1. 6 Jhaivie Basilio
    2. 16 novembre 2004
  • Hacienda Luisita, Inc.
    1. 7 Adriano Caballero
    2. 16 novembre 2004
  • Hacienda Luisita, Inc.
    1. 8 Jun David
    2. 16 novembre 2004
  • Hacienda Luisita, Inc.
    1. 9 Jesus Laza
    2. 16 novembre 2004
  • Hacienda Luisita, Inc.
    1. 10 Jaime Pastidio
    2. 16 novembre 2004
  • Hacienda Luisita, Inc.
    1. 11 Juancho Sanchez
    2. 16 novembre 2004
  • Hacienda Luisita, Inc.
    1. 12 Jessie Valdez
    2. 16 novembre 2004
  • Hacienda Luisita, Inc.
    1. 13 Ronnie Almoete
    2. 5 février 2005
  • Membre, Bayan Muna/Secteur des classes urbaines défavorisées
    1. 14 Abelardo Ladera
    2. 3 mars 2005
  • Conseiller – Tarlac City; membre, Bayan Muna/Organisateur de la campagne de soutien du Kapitbisig pour les familles et victimes du massacre de l’Hacienda Luisita
    1. 15 Samuel Dote
    2. 11 avril 2005
  • Membre, Association municipale des employés de Catbalogan affiliés à la Confédération pour l’unité, la reconnaissance et l’avancement des employés du gouvernement – Western Samar (COURAGE-WS)
    1. 16 Manuel «Edwin» Bargamento
    2. 13 avril 2005
  • Organisateur – Fédération des travailleurs du sucre du Negros
    1. 17 Mario Fernandez
    2. 10 juin 2005
  • Organisateur de la NFSW-FGT
    1. 18 Manuel Batolina
    2. 13 juin 2005
  • Organisateur de la NFSW-FGT et président de la fédération locale de la NFSW des Haciendas Navidad, Candelaria et Begonia
    1. 19 Antonio Pantonial
    2. 6 juillet 2005
  • Membre de la NFSW
    1. 20 Nilo Bayas
    2. 17 juillet 2005
      • Vice-président, Samahan ng Mag-uuling sa Sapang Bulak, Dona Remedios Trinidad, Bulacan, employé du Service de la santé provincial à Malolos, Bulacan au titre du Programme de lutte contre le paludisme
    3. 21 Ryan Cabrigas
    4. 1er septembre 2005
  • Employé, Samar Electric Cooperative II
    1. 22 Benedicto Gabon
    2. 1er septembre 2005
  • Employé, Samar Electric Cooperative II
    1. 23 Engr. Dalmacio Cepeda
    2. 1er septembre 2005
  • Employé, Samar Electric Cooperative II
    1. 24 Dante Teotino
    2. 13 septembre 2005
  • Ouvrier/syndicaliste
    1. 25 Diosdado Fortuna
    2. 22 septembre 2005
  • Président du Syndicat des employés de Nestlé
    1. 26 Ronald Andrada
    2. 24 septembre 2005
  • Membre, KADAMAY
    1. 27 Victoria P. Samonte
    2. 30 septembre 2005
      • Vice-présidente régionale, KMU CARAGA, Présidente du Syndicat des employés du Collège Andres Soriano
    3. 28 Jimmy Legaspi
    4. 1er octobre 2005
  • Président du Syndicat BOD Sierra Madre Bus Line Co.
    1. 29 Rolando Mariano
    2. 7 octobre 2005
  • Ancien président du Syndicat des employés de TARELCO 1
    1. 30 Florante Collantes
    2. 15 octobre 2005
  • Secrétaire général, Bayan Muna-Tarlac
    1. 31 Ramon Namuro
    2. 15 octobre 2005
  • Cadre, AJODOM-PISTON
    1. 32 Ricardo Ramos
    2. 25 octobre 2005
  • Président, CATLU
    1. 33 Federico de Leon
    2. 26 octobre 2005
  • Président, PISTON – Coordinateur de l’Anakpawis provincial et pour Bulacan
    1. 34 Errol Sending
    2. 19 novembre 2005
  • KADAMAY, Pampanga
    1. 35 Rommel Arcilla
    2. 21 novembre 2005
  • Membre, Bagong Alyansang Makabayan Community Relations Officer, Pampanga Electric Cooperative II
    1. 36 Albert Terredaño
    2. 29 novembre 2005
  • Président, Association des employés du Département de la réforme agraire (DAREA); Organisateur du Comité d’organisation provincial de COURAGE-ABRA
    1. 37 Junico Halem
    2. 6 décembre 2005
  • Coordinateur municipal du Bayan Muna
    1. 38 Jess Alcantara
    2. 16 décembre 2005
  • Ancien Coordinateur municipal et ancien secrétaire du TODA
    1. 39 Noel Daray
    2. 25 décembre 2005
  • Membre, Association des travailleurs de WL Food Inc.
  • Annexe II
  • Enlèvements et disparitions allégués
  • Date/heure
  • Lieu
  • Auteur(s) présumé(s)
  • Compte rendu
  • de l’incident
  • Profil des victimes
  • Situation actuelle
    1. 8/1/2006;
    2. 10 heures
  • Ormoc, Leyte
    1. 8e division d’infanterie sous le commandement du Major General Bonifacio Ramos
  • Enlevé par huit hommes masqués, détenu et interrogé pendant près de cinq heures sur ses liens présumés avec la Nouvelle armée populaire (NPA); les militaires ont menacé de s’en prendre à lui et à sa famille s’il ne coopérait pas
  • Rafael Tarroza – Président régional de la Fédération nationale des syndicats (NAFLU-KMU)
  • Rentré chez lui au bout de six heures, après avoir dit aux militaires qu’il allait coopérer
    1. 10/1/2006;
    2. 7 h 20
  • Penaranda, Nueva Ecija
  • Eléments de l’armée soupçonnés
  • Enlevé par des hommes armés alors qu’il se rendait au travail; retrouvé mort le lendemain
  • Armando Leabres
  • Trouvé mort
    1. 29/1/2006
  • Lemery, Batangas
    1. 30 éléments des Forces armées des Philippines (AFP)
  • Francis Noel Desacula
  • Manquant
    1. 1/2/2006;
    2. 20 heures
  • San Ildefonso, Bulacan
    1. 24e bataillon d’infanterie
  • Enlevés par le 24e bataillon d’infanterie de l’Armée des Philippines (IBPA) après le massacre de CV Tamayo Farms
    1. 1) Robin Solano, ouvrier de la ferme;
    2. 2) Ricardo Valmocina, gardien de Tamayo Farm
  • Manquants
    1. 6/3/2006;
    2. 22 heures
  • San Ildefonso, Bulacan
  • Eléments de l’armée soupçonnés
  • Enlevé par des éléments de l’armée soupçonnés appartenir au 24e bataillon dans le champ jouxtant la Solid Development Corp
  • Rogelio Concepcion, président par intérim de l’Association des travailleurs de Solid Development Corp. (SDCWA). Son prédécesseur est également parti se cacher après que les militaires du 24e BI de la 7e DI de l’Armée philippine ont campé à l’intérieur de la société en décembre 2006
  • Manquant, sa femme a refusé de rencontrer qui que ce soit ou de signer une déclaration écrite par crainte pour sa vie
    1. 3/4/2006;
    2. 11 heures
  • Tarlac City, Tarlac
  • Eléments militaires non identifiés
  • Selon les témoins, a été enlevé par des militaires et conduit à Aqua Farms
  • Ronald Intal, fabricant de charbon de bois dans l’Hacienda Luisita, soupçonné d’être sympathisant de la NPA
  • Manquant
    1. 17/04/2006;
    2. 9 h 30
  • Dona Remedios Trinidad, Bulacan
    1. 56e bataillon d’infanterie sous le commandement du Lt Ferdinand Basas, membres du RHB
  • Des membres du RHB ont attaqué et torturé
  • les victimes, puis enlevé Mendiola, Leuterio, Virgilio et Teresita Calilap. Après quoi, 26 membres de la 703e brigade des AFP sont arrivés et ont forcé 15 autres habitants à monter dans un camion pour les conduire dans une chapelle où on leur
  • a fait des exposés sur la propagande anti-insurrection et anticommuniste. Ils ont ensuite été relâchés. Ceux qui demeurent manquants étaient accusés par les militaires d’être des rebelles de la NPA
    1. 1) Virgilio Calilap
  • – organisateur
    1. 2) Teresita Calilap – femme de Virgilio
    2. 3) Bernabe Mendiola
  • – directeur des opérations de la société
    1. 4) Oscar Leuerio
  • – mineur
    1. 24/06/2006
  • Guiginto, Bulacan
  • Hommes non identifiés
  • Enlevé par des hommes non identifiés à bord d’une fourgonnette, soupçonnés d’être des agents de l’armée
  • Leopoldo Ancheta
  • Manquant
    1. 3/07/2006;
    2. 11 heures
  • Angeles City, Pampanga
  • Police nationale des Philippines – CIDG – Angeles City
    1. 69e et 56e bataillons d’infanterie
  • Enlevés par les forces combinées de la PNP et des AFP alors qu’ils étaient censés se réunir pour discuter de questions importantes de l’industrie du transport. Ils ont été torturés avant d’être remis au siège de la PNP d’Angeles. Tous ont été relâchés à l’exception de Lipio, qui est toujours sous la garde de l’armée
    1. 1) Emerito Gonzales Lipio, membre du Conseil national du PISTON et dirigeant du PISTON à Bulacan
    2. 2) William Agilar, PISTON Central Luzon et organisateur du KMU
  • Emerito Gonzales Lipio est toujours sous la garde des AFP. Les autres victimes ont été relâchées
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