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- 880. La plainte figure dans deux communications datées du 26 octobre 2005 et du 24 janvier 2006, ainsi que dans des communications des 20 et 24 juin 2006, dans lesquelles l’UDT fournit des informations complémentaires.
- 881. Le gouvernement n’ayant pas répondu, le comité a dû ajourner l’examen du cas à deux reprises. A sa réunion de novembre 2006 [voir 343e rapport, paragr. 10], le comité a lancé un appel pressant au gouvernement indiquant que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvé par le Conseil d’administration, il pourrait présenter un rapport sur le fond de l’affaire à sa prochaine session, même si les informations ou observations demandées n’étaient pas reçues à temps. A ce jour, le gouvernement n’a envoyé aucune information.
- 882. Djibouti a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 883. L’organisation plaignante allègue que, contraints de travailler depuis 2004 dans un contexte de violations flagrantes des lois et règlements du travail ainsi que d’abus de pouvoir de la part de la direction du Port autonome international de Djibouti, les employés du port ont décidé de saisir par le biais de l’Union des travailleurs du port (UTP) les instances compétentes en la matière et les autorités du pays conformément à la législation nationale (inspection du travail, ministère de Tutelle et présidence de la République).
- 884. Ayant épuisé tous les recours réglementaires, l’UTP, suite à une assemblée générale tenue le 10 septembre 2005, a déposé un préavis de grève. L’organisation plaignante indique que le ministère de l’Emploi a tenté d’empêcher la grève avant de se raviser et d’inviter les deux parties à la table des négociations le jour même de la grève, le 14 septembre 2005. L’amorce de dialogue social a toutefois été rapidement rompue à l’instigation de la direction du port.
- 885. L’organisation plaignante allègue en particulier que, le 24 septembre 2005, 11 responsables et militants syndicaux ont été licenciés; qu’à la suite d’une grève de solidarité déclenchée le lendemain, 170 travailleurs ont été conduits dans un centre de détention et que 25 autres travailleurs ont été licenciés (la liste des travailleurs du Port de Djibouti licenciés au cours du conflit collectif est annexée à la plainte); que 12 travailleurs maintenus en détention préventive, pour provocation d’une rébellion manifestée et participation délictueuse à un attroupement, ont été relaxés par jugement du 2 octobre 2005; qu’à cet égard la chambre correctionnelle de la Cour d’appel de Djibouti a arbitrairement condamné lesdits travailleurs à des peines de prison allant jusqu’à deux mois d’emprisonnement avec sursis (trois d’entre eux ont été déclarés coupables de délit de manifestation illégale et d’obstruction à la liberté du travail, et les autres coupables de menaces et de rassemblement sur la voie publique susceptible de trouble à l’ordre public). L’organisation plaignante dénonce également les «derniers avertissements avant licenciement» dirigés à l’encontre de 120 travailleurs s’étant livrés à une collecte pour soutenir financièrement les travailleurs licenciés, ainsi que d’une manière générale des mesures de harcèlement policier et juridique de travailleurs (voir communication du 24 janvier 2006). L’organisation plaignante demande au comité de formuler les recommandations nécessaires en vue de l’annulation des décisions de licenciement des grévistes.
- 886. Dans sa communication du 24 juin 2006, l’UDT souligne que ces violations de la liberté syndicale s’inscrivent dans le cadre d’une politique de répression sauvage et inhumaine du gouvernement. Ce dernier a franchi une nouvelle étape avec l’arrestation de quatre syndicalistes affiliés à l’UDT, inculpés de livraison d’informations à une puissance étrangère et d’outrage au président de la République et placés sous mandat de dépôt à la prison de Gabode, où ils sont restés détenus pendant presque un mois. L’organisation plaignante allègue que ces arrestations, détentions et poursuites judiciaires sont arbitraires et contreviennent aux règles essentielles de procédure pénale. Le passeport de deux des inculpés a en outre été confisqué.
B. Conclusions du comité
B. Conclusions du comité- 887. Le comité regrette que, malgré le temps écoulé depuis la présentation de la plainte, le gouvernement n’ait pas répondu aux allégations de l’organisation plaignante, alors qu’il a été invité à plusieurs reprises, y compris par un appel pressant, à présenter ses commentaires et observations sur ce cas. Le comité prie instamment le gouvernement de faire preuve de plus de coopération à l’avenir.
- 888. Dans ces conditions, conformément à la règle de procédure applicable [voir 127e rapport, paragr. 17, approuvé par le Conseil d’administration à sa 184e session], le comité se voit dans l’obligation de présenter un rapport sur le fond de l’affaire sans pouvoir tenir compte des informations qu’il espérait recevoir du gouvernement.
- 889. Le comité rappelle au gouvernement que l’ensemble de la procédure instituée par l’Organisation internationale du Travail pour l’examen d’allégations en violation de la liberté syndicale vise à assurer le respect de cette liberté en droit comme en fait. Le comité demeure convaincu que, si la procédure protège les gouvernements contre les accusations déraisonnables, ceux-ci doivent à leur tour reconnaître l’importance qu’il y a pour leur propre réputation à ce qu’ils présentent, en vue d’un examen objectif, des réponses détaillées aux allégations formulées à leur encontre. [Voir premier rapport du comité, paragr. 31.]
- 890. Le comité note que le présent cas porte, dans un contexte d’intimidations et d’aggravation des violations des droits syndicaux, sur des mesures de représailles liées au déclenchement d’un conflit collectif en 2004 dans le Port autonome international de Djibouti: licenciement abusif de 36 responsables et militants syndicaux, détention de 170 travailleurs solidaires des travailleurs licenciés, arrestation et détention préventive de 12 travailleurs pour provocation d’une rébellion manifestée et participation délictueuse à un attroupement; menaces de licenciements à l’encontre de 120 travailleurs s’étant livrés à une collecte pour soutenir financièrement les travailleurs licenciés.
- 891. Le comité note avec regret que le gouvernement n’a pas répondu aux allégations de licenciements abusifs dont sont victimes les dirigeants et militants syndicaux. Le comité rappelle à cet égard que le droit de grève est un des moyens dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux, et qu’il est un corollaire indissociable du droit syndical protégé par la convention no 87. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 522 et 523.]
- 892. Le comité attire l’attention du gouvernement sur le fait qu’un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est que les travailleurs doivent bénéficier d’une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d’emploi – licenciement, transfert, rétrogradation et autres actes préjudiciables – et que cette protection est particulièrement souhaitable en ce qui concerne les délégués syndicaux, étant donné que, pour pouvoir remplir leurs fonctions syndicales en pleine indépendance, ceux-ci doivent avoir la garantie qu’ils ne subiront pas de préjudice en raison du mandat syndical qu’ils détiennent. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 799.]
- 893. Le comité demande donc au gouvernement de diligenter rapidement une enquête indépendante sur les allégations de licenciement abusif des 36 responsables et militants syndicaux dans le Port de Djibouti et, si elles s’avèrent fondées, de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour mettre fin à ces actes de discrimination et de sanctionner les personnes responsables et d’assurer leur réintégration sans perte de salaire. Le comité considère en outre que le gouvernement doit veiller à assurer une protection adéquate et efficace contre les actes de discrimination antisyndicale en mettant l’accent sur la réintégration du travailleur comme moyen de réparation efficace. Le comité rappelle que la possibilité d’être réintégré dans leur poste de travail devrait être ouverte aux personnes qui ont été l’objet de discrimination antisyndicale et que, dans les cas où une réintégration s’avère impossible, le gouvernement devrait veiller à ce que soit versée aux travailleurs concernés une indemnisation adéquate qui constituerait une sanction suffisamment dissuasive contre les licenciements antisyndicaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 837 et 845.]
- 894. Par ailleurs, s’agissant des allégations de détention suite à une grève de solidarité, regrettant une fois encore l’absence d’observations de la part du gouvernement, le comité rappelle fermement que l’arrestation et la détention de syndicalistes, comme les mesures de harcèlement et d’intimidation dénoncées, mettent gravement en péril le libre exercice des droits syndicaux, que les autorités ne devraient pas recourir aux mesures d’arrestation et d’emprisonnement en cas d’organisation ou de participation à une grève pacifique, et que nul ne devrait pouvoir être privé de liberté ni faire l’objet de sanctions pénales pour le simple fait d’avoir organisé une grève pacifique ou d’y avoir participé et que le gouvernement devrait prendre des mesures sévères à l’égard de telles pratiques. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 671 et 672.]
- 895. Le comité note enfin avec une profonde préoccupation les allégations concernant l’arrestation et la détention de quatre syndicalistes affiliés à l’UDT, à savoir MM. Adan Mohamed, Hassan Cher Hared, Mohamed Ahmed Mohamed et Djibril Ismael Egueh, ainsi que les poursuites judiciaires dont ils font l’objet. Le comité s’attend à ce que ces responsables syndicaux soient libérés, qu’aucune charge ne soit plus retenue contre eux, et prie instamment le gouvernement de fournir des informations précises à ce sujet.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 896. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité regrette profondément que, en dépit du laps de temps écoulé depuis la première présentation de la plainte, le gouvernement n’ait pas répondu aux allégations du plaignant. Le comité prie instamment le gouvernement de se montrer plus coopératif à l’avenir.
- b) Le comité demande au gouvernement de diligenter rapidement une enquête indépendante sur les allégations de licenciement abusif des 36 responsables et militants syndicaux dans le Port de Djibouti. Si ces allégations s’avèrent fondées, le comité prie le gouvernement de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour mettre fin à ces actes de discrimination et sanctionner les personnes responsables et de s’assurer de leur réintégration sans perte de salaire. Dans les cas où une réintégration s’avère impossible, le comité prie le gouvernement de veiller à ce que soit versée aux travailleurs concernés une indemnisation adéquate qui constitue une sanction suffisamment dissuasive contre les licenciements antisyndicaux.
- c) Le comité s’attend à ce que les responsables syndicaux MM. Adan Mohamed, Hassan Cher Hared, Mohamed Ahmed Mohamed et Djibril Ismael Egueh soient libérés, qu’aucune charge ne soit plus retenue contre eux, et prie instamment le gouvernement de fournir des informations précises à ce sujet.
Z. ANNEXE
Z. ANNEXE- La liste des travailleurs du Port autonome international de Djibouti licenciés au cours du conflit collectif (du 14 au 27 septembre 2005)
- No
- Fichier
- Nom
- Situation professionnelle
- pendant le licenciement
- Nombre d’années
- en fonction au port
- Fonction dans le syndicat
- Fonction professionnelle
- Emargement
- 01
- 1220
- Ali Ibrahim Darar
- En activité
- 24
- Secrétaire général adjoint
- Chef des opérations
- 02
- 2108
- Wahib Ahmed Dini
- En activité
- 8
- 2e adjoint du secrétaire général
- Portiqueur
- 03
- 1756
- Mohamed Ahmed Mohamed
- En activité
- 12
- Secrétaire affaires juridiques
- Technicien
- 04
- 2142
- Mohamed Ali Ahmed
- En activité
- 10
- Secrétaire relations ext.
- Chef de bord
- 05
- 1562
- Abdourahman Bouh Il Tireh
- En activité
- 21
- Secrétaire Inform/C
- Technicien navigant
- 06
- 2124
- Ali Ibrahim Chireh
- En activité
- 6
- Délégué personnel et syndicat
- Portiqueur
- 07
- 1705
- Yacin Ahmed Robleh
- En activité
- 19
- Délégué personnel et syndicat
- Superviseur DDP
- 08
- 1580
- Mohamed Abdillahi Dirieh
- En activité
- 27
- Conseiller T. SG.
- Chef de section engins
- 09
- 1103
- Kamil Mohamed Ali
- En activité
- 28
- Délégué personnel
- Chef dpt. exploitation
- 10
- 1201
- Ibrahim Moussa Sultan
- En activité
- 26
- Délégué personnel
- Chef dpt. comptable
- 11
- 1390
- Samira Hassan Mohamed
- En activité
- 22
- Délégué personnel
- Assistant adm. direction port
- 12
- 1992
- Djibril Houssein Walieh
- En activité
- 7
- Délégué personnel
- Technicien
- 13
- 1978
- Moustapha Moussa Housein
- En activité
- 7
- Délégué personnel
- Chef section électricité
- 14
- 1404
- Youssouf Houmed Mohamed
- En congé
- 24
- Délégué personnel
- Patron de remorqueur
- 15
- 1703
- Ahmed Abdi Waliyeh
- En activité
- 17
- Délégué personnel
- Agent de facturation
- 16
- 2155
- Osman Houssein Djama
- En activité
- 8
- Militant
- Planificateur des bateaux
- 17
- 2506
- Djamal Mohamed Rayaleh
- En congé
- 3
- Militant
- Conducteur poids lourd
- 18
- 2138
- Mohamed Hersi Houssein
- En activité
- 7
- Militant
- Conducteur poids lourd
- 19
- 2571
- Aden Moussa Aden
- En activité
- 3
- Militant
- Docker spécialisé
- 20
- 2580
- Moussa Doubad
- En activité
- 3
- Militant
- Docker spécialisé
- 21
- 2594
- Mohamed Ali Abdellah
- En activité
- 3
- Militant
- Docker spécialisé
- 22
- 2624
- Ali Hassan Mohamed
- En activité
- 3
- Militant
- Docker spécialisé
- 23
- 2022
- Kadidja Abdo
- En activité
- 8
- Militante
- Agent de facturation
- 24
- 1738
- Neima Awad
- En activité
- 12
- Militante
- Secrétaire de direction
- 25
- 1540
- Naguib Ahmed Mohamed
- Paraplégique/inactivité
- 20
- Militant
- Pompiste
- 26
- 1623
- Osman Abdillahi Youssouf
- En activité
- Militant
- Technicien
- 27
- 2364
- Ali Mohamed Ali
- En activité
- 4
- Militant
- Agent de sécurité
- 28
- 2323
- Houssein Barreh Djama
- En activité
- 4
- Militant
- Agent de sécurité
- 29
- 2007
- Djama Ismael Assoweh
- En activité
- 7
- Militant
- Technicien
- 30
- 2545
- Kadir Osman Hassan
- En activité
- 4
- Militant
- Technicien
- 31
- 2298
- Mohamed Hais Mohamed
- En activité
- 10
- Militant
- Technicien
- 32
- 2186
- Farhan Bouh Dafe
- En activité
- 6
- Militant
- Technicien
- 33
- 1658
- Moustapha Abchir Egueh
- En activité
- 20
- Militant
- Capitaine de remorqueur
- 34
- 2463
- Mohamed Abdillahi Omar
- En activité
- 7
- Militant
- Enquêteur SENIOR
- 35
- Koulmiyeh Houssein Ahmed
- En activité
- 5
- Militant
- Contrôleur d’exploitation
- 36
- 2574
- Ali Hassan Kamil
- En activité
- 3
- Militant
- Docker spécialisé