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Informe en el que el Comité pide que se le mantenga informado de la evolución de la situación - Informe núm. 295, Noviembre 1994

Caso núm. 1718 (Filipinas) - Fecha de presentación de la queja:: 31-MAY-93 - Cerrado

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  1. 284. La plainte faisant l'objet du présent cas figure dans une communication de la Fédération des travailleurs de l'industrie des médicaments, de l'alimentation et activités connexes (DFA) du 31 mai 1993. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication du 20 mai 1994.
  2. 285. Les Philippines ont ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du plaignant

A. Allégations du plaignant
  1. 286. Dans sa communication du 31 mai 1993, la Fédération des travailleurs de l'industrie des médicaments, de l'alimentation et activités connexes (DFA) signale que l'Union des travailleurs de Filipro (UFE) est seule habilitée à négocier au nom de l'ensemble des travailleurs de l'entreprise Nestlé Philippines Inc. et rappelle que son action revendicative remonte à novembre 1985, date à laquelle elle avait appelé les travailleurs à faire grève pour protester contre diverses atteintes aux droits des travailleurs. L'organisation plaignante ajoute qu'en décembre 1985, à la demande de l'entreprise Nestlé, le ministre du Travail est intervenu pour régler le conflit, à la suite de quoi la grève a été interdite. L'UFE a demandé, mais sans succès, que cette décision soit reconsidérée. En janvier 1986, l'entreprise se refusant à négocier, l'organisation syndicale a lancé un mot d'ordre de grève. Le ministère du Travail a alors sommé les grévistes de reprendre le travail. De son côté, l'entreprise a saisi les sections d'arbitrage du travail du district de la capitale et de Cagayán de Oro pour que la grève soit déclarée illégale. L'organisation plaignante indique qu'elle a demandé que ces requêtes soient rejetées, mais que ses demandes ont été ignorées ou rejetées.
  2. 287. L'organisation plaignante signale que, le 13 mars 1986, le nouveau gouvernement a donné ordre à tous les grévistes de reprendre le travail et à l'entreprise de les réintégrer dans les mêmes conditions qu'avant la grève; malgré la reprise du travail, deux jours plus tard, l'entreprise a refusé de réintégrer plusieurs travailleurs. Concrètement, l'organisation plaignante allègue qu'à Cagayán de Oro la réintégration de 72 membres de l'UFE n'a pas été autorisée et les intéressés n'ont pas touché les prestations qui leur étaient dues; à Alabana les postes de travail des chauffeurs ont été modifiés, et à Makati un travailleur a été muté.
  3. 288. L'organisation plaignante indique que l'UFE a essayé de régler le conflit à l'amiable et qu'à cette fin elle a écrit, en juin 1986, au secrétaire au Travail pour solliciter sa médiation préventive en vue de trouver un compromis. La lettre a été transmise au Conseil national de conciliation et de médiation, qui a convoqué l'entreprise à une audience de conciliation, mais celle-ci ne s'est pas présentée, d'où le dépôt d'un préavis de grève pour le 4 décembre 1986. Les motifs invoqués pour cette grève étaient les suivants: violation de la convention collective, licenciement de dirigeants et de membres du syndicat, discrimination antisyndicale et recrutement de briseurs de grève. L'organisation plaignante ajoute que, espérant aboutir à un accord, elle a mis un terme à la grève le 16 décembre bien qu'aucune question n'ait été réglée; mais les médiateurs ont déclaré que la grève était illégale et que les dirigeants et les membres du syndicat avaient perdu leur statut d'employés de l'entreprise.
  4. 289. L'organisation plaignante signale que la négociation d'une convention collective avec l'entreprise a commencé en juin 1987 mais que l'entreprise n'a présenté ses propositions que deux mois plus tard. Elle ajoute que les nombreuses séances de négociation ont débouché sur une impasse le 11 septembre 1987. L'UFE ayant alors appelé à la grève, le 14 septembre l'entreprise résiliait le contrat de travail de 69 dirigeants et de 35 membres du syndicat. La négociation collective a été suspendue et l'entreprise a commencé de traiter individuellement avec les travailleurs de l'établissement de Cebu-Davao et de l'usine de Cagayán de Oro.
  5. 290. L'organisation plaignante affirme qu'en septembre 1987 l'entreprise a cessé de reverser les cotisations syndicales, sous prétexte que les dirigeants du syndicat licenciés n'étaient plus représentatifs. Elle a saisi la Commission nationale des relations professionnelles (NLRC), laquelle, à l'issue d'une longue procédure, a sommé l'entreprise Nestlé de reverser les cotisations. Celle-ci a refusé d'obtempérer et a fait appel de cette décision devant la Cour suprême, de sorte que l'exécution de la décision a été suspendue. La Cour suprême a débouté l'entreprise en octobre 1989, puis à nouveau en novembre 1989, l'entreprise ayant présenté un autre recours. Finalement, après avoir privé pendant toute une année l'organisation syndicale de ses fonds, l'entreprise, au mépris des décisions de la Commission nationale des relations professionnelles et de la Cour suprême, a distribué les cotisations en les remettant directement et personnellement aux membres du syndicat.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 291. Dans sa communication du 20 mai 1994, le gouvernement signale que la plainte porte sur l'application des articles 263 et 264 du Code du travail des Philippines dans le conflit qui a éclaté à l'entreprise Nestlé Philippines Inc. Concrètement, le gouvernement avance que l'organisation plaignante a contrevenu à la législation en appelant à la grève et en faisant cesser le travail alors que le ministre du Travail - conformément à l'article 263 du Code du travail qui l'autorise à connaître d'un conflit pouvant déboucher sur une grève dans un secteur vital pour l'intérêt national - s'occupait de trouver une solution et avait intimé aux grévistes l'ordre de reprendre le travail. Le gouvernement explique que les dispositions en question - en particulier celles relatives au pouvoir de connaître d'un litige - n'entament en rien le droit de grève des travailleurs et que, dans le présent cas, l'injonction faite aux grévistes visait à maintenir le statu quo en attendant la décision quant à la légalité ou à l'illégalité de la grève. Dans son arrêt - joint aux observations du gouvernement -, la Cour suprême confirmait les décisions par lesquelles la Commission nationale des relations professionnelles déclarait les grèves illégales et les licenciements justifiés.
  2. 292. En ce qui concerne l'allégation relative au non-versement des cotisations syndicales, le gouvernement déclare que c'est à juste titre que la NLRC a refusé d'émettre une ordonnance d'exécution de sa décision sommant l'entreprise de reverser les cotisations syndicales, et que ce refus ne porte pas atteinte au droit d'organisation puisque les travailleurs pouvaient exercer leur droit de s'inscrire au syndicat de l'entreprise. Le gouvernement souligne que la décision de la Commission nationale des relations professionnelles ne pouvait être exécutée puisque l'entreprise l'avait contestée devant la Cour suprême et qu'il fallait donc attendre que cette dernière se prononce.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 293. En premier lieu, le comité observe que le conflit du travail auquel se rapportent les allégations d'atteintes à la liberté syndicale a éclaté il y a neuf ans (en 1985) et il comprend que le gouvernement puisse avoir des difficultés à donner des informations détaillées sur des événements déjà lointains. Par ailleurs, entre-temps, le gouvernement a changé aux Philippines et le comité rappelle, ainsi qu'il l'a signalé à diverses occasions, qu'il incombe aux nouveaux gouvernements de prendre les mesures nécessaires pour remédier aux conséquences que des faits allégués dans une plainte auraient pu avoir depuis leur arrivée au pouvoir, même lorsque lesdits faits se sont produits sous le régime précédent.
  2. 294. Le comité observe que les allégations du présent cas portent sur des lacunes de la législation du travail, sur le licenciement ou la mutation de nombreux travailleurs, dont des dirigeants ou membres du syndicat qui s'étaient par deux fois mis en grève dans l'entreprise Nestlé, ainsi que sur le non-reversement par l'entreprise des cotisations syndicales et sur le refus de celle-ci de négocier une convention collective.
  3. 295. En ce qui concerne l'allégation relative aux licenciements ou mutations de travailleurs, dont des dirigeants ou membres du syndicat intervenus par suite des grèves de janvier 1986 et septembre 1987, le comité note que, selon le gouvernement, en provoquant ces arrêts de travail alors que le ministre du Travail s'était saisi de la question et avait sommé les grévistes de reprendre le travail, l'organisation plaignante a enfreint les dispositions des articles 263 et 264 du Code du travail. Le comité observe qu'en vertu de ces articles, en cas de conflit du travail risquant de déboucher sur une grève ou un lock-out dans un secteur que le gouvernement juge vital pour l'intérêt national, le secrétaire au Travail et à l'Emploi est autorisé à connaître du conflit pour y remédier ou à imposer un arbitrage obligatoire. Le comité observe aussi que, dans son arrêt joint aux observations du gouvernement, la Cour suprême confirme les décisions par lesquelles la NLRC déclarait les grèves illégales et justifiait la plupart des licenciements.
  4. 296. Le comité observe que l'autorité du travail s'est occupée de régler le conflit et qu'à la demande de l'entreprise Nestlé l'arbitrage obligatoire de la Commission nationale des relations professionnelles a été imposé, malgré l'opposition de l'organisation plaignante. Le comité note aussi que les grèves ayant été déclarées illégales par la NLRC, l'entreprise n'a pas donné suite à l'injonction de l'autorité du travail de réintégrer tous les grévistes à leur poste à l'issue de la grève de janvier 1986 (72 travailleurs avaient été licenciés); de même, après la grève de septembre 1987, elle a licencié 104 dirigeants ou membres du syndicat. A cet égard, le comité signale à l'attention du gouvernement qu'une "disposition qui permet à l'une des parties au conflit de demander unilatéralement l'intervention de l'autorité du travail pour qu'elle s'occupe de régler ledit conflit présente un risque pour le droit des travailleurs de déclarer la grève et porte atteinte à la négociation collective". (Voir 265e rapport, cas nos 1478 et 1484 (Pérou), paragr. 547.) Le comité déplore également que les postes de travail des conducteurs aient été modifiés aux bureaux de Alabana et Makati.
  5. 297. Le comité rappelle que le recours à l'arbitrage obligatoire pour mettre fin à un conflit collectif du travail n'est acceptable que s'il intervient à la demande des deux parties au conflit ou dans les cas où la grève peut être limitée, voire interdite, à savoir en cas de conflit dans les services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire les services dont l'interruption risquerait de mettre en danger dans tout ou partie de la population la vie, la santé ou la sécurité de la personne. (Voir 256e rapport du comité, cas no 1430 (Canada/Colombie-Britannique), paragr. 181.) Ainsi que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations le demande depuis plusieurs années, le comité demande instamment au gouvernement de modifier les dispositions du Code du travail concernant le recours à l'arbitrage obligatoire lorsque, de l'avis du ministère du Travail et de l'Emploi, une grève, prévue ou effective, touche un secteur vital pour l'intérêt national (art. 263, alinéas g) et i)) et celles concernant le licenciement de dirigeants syndicaux pour participation à des grèves déclarées illégales (art. 264), afin d'éviter les restrictions à l'exercice de la grève, conformément aux principes consacrés par la convention no 87.
  6. 298. Le comité observe que l'arbitrage obligatoire a été sollicité par l'entreprise Nestlé en application de la loi, sous prétexte que le conflit touchait un secteur vital pour l'intérêt national (art. 263 du Code du travail). Etant donné que, selon le comité, les activités de cette entreprise ne peuvent en aucun cas être considérées comme des services dits essentiels au sens strict, le comité déplore la limitation ainsi imposée au droit de grève et les nombreux licenciements qui en ont découlé. Le comité demande au gouvernement de favoriser l'ouverture de négociations entre l'entreprise et le syndicat afin d'étudier la possibilité de réintégrer les intéressés dans leurs postes. Le comité demande aussi au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.
  7. 299. En ce qui concerne l'allégation relative au non-reversement des cotisations syndicales par l'entreprise Nestlé depuis 1987, le comité note que, selon le gouvernement, la décision de la NLRC disposant que l'entreprise devait reverser les cotisations syndicales n'a pu être appliquée parce que l'entreprise avait fait appel de cette décision devant la Cour suprême. Le comité signale à l'attention du gouvernement qu'un retard aussi considérable dans l'administration de la justice - sept ans dans le cas d'espèce - équivaut en fait à un déni de justice. Le comité note également que, selon les plaignants, les cotisations ont été remboursées individuellement aux travailleurs. Il rappelle néanmoins au gouvernement que "la suppression de la possibilité de retenir les cotisations à la source, qui pourrait déboucher sur des difficultés financières pour les organisations syndicales, n'est pas propice à l'instauration de relations professionnelles harmonieuses et devrait donc être évitée". (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 325.) Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour que, à l'avenir, de semblables pratiques ne se répètent pas.
  8. 300. Pour ce qui est de l'allégation relative au fait que l'entreprise Nestlé a refusé de négocier une nouvelle convention collective avec l'organisation syndicale et a privilégié la négociation individuelle, le comité observe que le gouvernement n'a pas communiqué ses observations à ce sujet. Il signale, sur un plan général, "qu'employeurs et syndicats doivent négocier de bonne foi afin de parvenir à un accord, et que des négociations véritables et constructives sont un élément nécessaire pour établir et maintenir une relation de confiance entre les parties". (Voir 284e rapport, cas no 1619 (Royaume-Uni), paragr. 360.) Le comité rappelle par ailleurs qu'"une négociation directe conduite entre l'entreprise et son personnel, en ignorant les organisations représentatives existantes, peut, dans certains cas, être contraire au principe selon lequel il faut encourager et promouvoir la négociation collective entre les employeurs et les organisations de travailleurs". (Voir Recueil, op. cit., paragr. 608.)

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 301. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande instamment au gouvernement de modifier, ainsi que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations le lui demande depuis plusieurs années, les dispositions concernant 1) le recours à l'arbitrage obligatoire lorsque, de l'avis du ministère du Travail et de l'Emploi, une grève, prévue ou effective, touche un secteur vital pour l'intérêt national (art. 263, alinéas g) et i)), et 2) celles concernant le licenciement de dirigeants syndicaux pour participation à des grèves déclarées illégales (art. 264, alinéa a)), afin d'éviter les restrictions à l'exercice du droit de grève, conformément aux principes consacrés par la convention no 87.
    • b) Le comité déplore les nombreux licenciements intervenus en application de la législation en question pour cause de participation à des grèves déclarées illégales dans l'entreprise Nestlé - laquelle ne fournit pas des services essentiels - et il demande au gouvernement de favoriser l'ouverture de négociations entre l'entreprise et le syndicat afin d'étudier la possibilité de réintégrer les intéressés dans leurs postes. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.
    • c) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures voulues pour que, à l'avenir, ne se répètent pas les pratiques relatives à la retenue des cotisations syndicales mentionnées en rapport avec l'entreprise Nestlé.
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