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- 203. Le Syndicat unifié des mineurs d'Amérique (UMWA) a présenté une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement des Etats-Unis d'Amérique dans une communication datée du 28 juillet 1988. Il a fourni des informations complémentaires à l'appui de sa plainte dans une lettre du 9 septembre 1988. La Fédération américaine du travail et Congrès des organisations industrielles (AFL-CIO) ainsi que la Fédération internationale des mineurs (FIM) ont appuyé la plainte de l'UMWA dans des communications datées respectivement des 2 et 8 septembre 1988. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication du 26 octobre 1988.
- 204. Les Etats-Unis n'ont ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du plaignant
A. Allégations du plaignant
- 205. Dans sa communication du 28 juillet 1988, l'UMWA met en cause le comportement de l'Ente Nazionale Idrocarburi (ENI), société holding d'Etat ayant son siège en Italie, dans le cadre de ses activités minières aux Etats-Unis, gérées par l'une de ses filiales dont elle détient le contrôle total, Enoxy Coal Corporation ("Enoxy"). La présente plainte vise les agissements de l'Enoxy dans ses installations houillères de Pevler au Kentucky.
- 206. La plainte de l'UMWA peut être résumée comme suit. Une première allégation d'ordre général est que les procédures d'application de la législation du travail des Etats-Unis sont si lentes et les sanctions si légères qu'une société peut, en fait, violer les droits syndicaux fondamentaux de ses salariés en toute impunité. Puis une série d'allégations faisant état de pratiques déloyales de travail visent spécifiquement Enoxy, à savoir: le refus de négocier de bonne foi; la sous-traitance d'opérations minières à des sociétés dépourvues de syndicats; des actes de discrimination antisyndicale contre des dirigeants syndicaux, y compris le licenciement du vice-président du syndicat pour tenter d'affaiblir le syndicat; le recrutement de gardes de sécurité armés afin de harceler et d'intimider les membres du syndicat.
- 207. Pour étayer son allégation selon laquelle Enoxy a refusé de négocier de bonne foi en vue de renouveler la convention collective de 1984, le plaignant soutient que, bien qu'il avait décidé de ne pas faire grève dans les mines d'Enoxy, la société a rejeté son offre de proroger la convention de 1984, utilisé les services d'un cabinet juridique connu pour son action antisyndicale, refusé les propositions de rencontres officieuses émanant de responsables internationaux de l'UMWA et mis un terme au stade final et obligatoire de l'arbitrage. En outre, Enoxy a refusé de continuer à cotiser aux fonds de pension et de prestations de l'UMWA, refus qui fait actuellement l'objet de poursuites judiciaires auprès du tribunal de district de Columbia. Le plaignant fournit plusieurs déclarations écrites sous serment et lettres à l'appui desdites allégations.
- 208. S'agissant de la sous-traitance et de la concession d'opérations à des sociétés houillères dépourvues de syndicats, le plaignant prétend qu'Enoxy mène cette politique depuis fort longtemps pour tenter de vider la convention collective de son contenu. L'UMWA cite, en particulier, une sentence arbitrale rendue en 1987 qui conclut que la société avait violé la convention collective en concédant ses gisements houillers de Pevler à des entreprises dépourvues de syndicats et qui ordonna à Enoxy de mettre fin aux contrats de sous-traitance en cause. Le plaignant fournit plusieurs lettres et déclarations écrites sous serment à l'appui de cette allégation.
- 209. En ce qui concerne les allégations de discrimination antisyndicale, l'UMWA affirme qu'Enoxy a mis à pied le vice-président du syndicat local ainsi qu'un membre du comité syndical pour tenter d'affaiblir le syndicat dans le complexe de Pevler. La société a offert au vice-président susmentionné de le réintégrer dans son emploi s'il acceptait de ne pas donner suite à la réclamation d'un autre membre du syndicat; ayant refusé, celui-ci a été licencié. Le plaignant produit une déclaration écrite sous serment à l'appui de cette allégation.
- 210. Enfin, l'UMWA se plaint des pratiques et tactiques paramilitaires de l'agence de sécurité à laquelle Enoxy a fait appel en vue de harceler et d'intimider les membres du syndicat. L'UMWA allègue avoir confirmation de rapports selon lesquels les gardes en faction sur le site de Pevler sont lourdement armés de pistolets automatiques et de fusils mitrailleurs et qu'ils ont érigé des "bunkers" à l'entrée du site minier. Le plaignant présente de nombreux documents, brochures, coupures de presse, photos, etc., à l'appui de son allégation.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 211. Dans sa communication du 26 octobre 1988, le gouvernement résume les faits qui ont conduit au dépôt du grief contre les contrats de sous-traitance. En octobre 1984, Enoxy a fermé ses installations minières sur le site de Pevler et mis à pied tous les salariés faisant partie de l'unité de négociation de l'UMWA. Au cours de l'été 1986, Enoxy a conclu avec trois entreprises houillères dépourvues de syndicats des accords de licence pour l'extraction de charbon sur le site de Pevler, stipulant l'obligation de vendre la totalité de la production à Enoxy. Deux de ces entreprises (KTK et Highwire) commencèrent la production en juillet 1986. En juin et juillet 1986, des responsables syndicaux rencontrèrent des représentants d'Enoxy pour discuter du refus des exploitants indépendants de reconnaître le syndicat en tant que représentant de leurs salariés, qui continuèrent à ne pas être représentés par le syndicat. En août 1986, des membres du syndicat protestèrent contre la sous-traitance des opérations minières en mettant en place des piquets de grève afin de faire connaître la situation, mais aucun grief ne fut alors déposé. Le grief, déposé le 29 décembre 1986 conformément à la convention collective, a été entendu le 12 mai 1987 par un arbitre qui devait se prononcer sur trois points:
- - le grief pouvait-il faire l'objet d'un arbitrage, compte tenu du fait que l'employeur contestait qu'il eût été déposé dans les délais?
- - Enoxy avait-elle violé la convention collective en sous-traitant ses opérations minières sur le site de Pevler?
- - si tel était le cas, quelle était la mesure de redressement appropriée?
- 212. Dans sa décision rendue le 25 mai 1987, l'arbitre jugea, en ce qui concerne le premier point, que la réclamation avait été déposée dans les délais au motif que les accords de sous-traitance constituaient une violation continue de la convention puisqu'ils étaient encore en vigueur fin décembre 1986 lorsque fut déposé le grief. Sur le fond, l'arbitre jugea que la convention collective "... empêche un employeur se trouvant dans la situation d'Enoxy de concéder ou de sous-traiter ses gisements houillers lorsque le but de cette opération est d'éviter que la convention n'ait les effets qui auraient été les siens si l'accord de concession ou de licence en cause n'avait pas été conclu". L'arbitre conclut que tout employeur raisonnable, dans la situation d'Enoxy, se serait rendu compte que le fait de concéder l'exploitation de certains gisements houillers à des entreprises dépourvues de syndicats aurait pour conséquence d'éviter l'application de la convention. L'arbitre déclara en outre que, en recourant au système de la sous-traitance, Enoxy était en mesure de s'approvisionner en charbon extrait de Pevler et de continuer à honorer ses contrats de vente sans être liée par les diverses clauses de la convention collective en matière de salaires, de cotisations au titre des prestations de pension, d'ancienneté, de sécurité et autres. Il ordonna à Enoxy de résilier immédiatement ses contrats d'exploitation avec KTK et Highwire et, en tout cas, au 1er juillet 1987 au plus tard.
- 213. Le 26 juin 1987, la direction d'Enoxy a fait appel de la décision de l'arbitre auprès du tribunal de district des Etats-Unis pour le district est du Kentucky. L'affaire fut soumise à un magistrat du tribunal de district qui infirma la conclusion de l'arbitre en ce qui concerne le caractère continu de la violation, au motif qu'aucune clause de la convention ne venait étayer cette théorie. Il conclut en outre que la clause de prescription énoncée dans la convention était parfaitement claire et revêtait un caractère obligatoire. Le magistrat ne se prononça pas sur le fond du grief.
- 214. Le syndicat fit appel de la décision du magistrat devant le tribunal de district. Deux juges saisis de l'affaire tombèrent malades; un troisième juge du tribunal de district des Etats-Unis, adoptant entre autres le raisonnement de la Cour suprême des Etats-Unis en ce qui concerne les principes de révision des sentences arbitrales, confirma la décision du magistrat. Le juge ne se prononça pas sur le fond du grief. Le 30 septembre 1988, le syndicat interjeta appel de cette décision devant la Cour d'appel des Etats-Unis où l'affaire est maintenant en instance.
- 215. Le gouvernement indique également que l'entreprise Enoxy a, sur plusieurs points, modifié ses relations avec le syndicat. En outre, sans entériner ni critiquer la position et les allégations de l'une ou l'autre des parties, il affirme que, de manière générale, les lois des Etats-Unis sont conformes aux dispositions des conventions nos 87 et 98 et protègent la liberté syndicale des travailleurs syndiqués.
- 216. S'agissant des allégations selon lesquelles l'application de la législation du travail des Etats-Unis est trop lente ou les sanctions trop légères pour être efficaces, le gouvernement répond que sa législation prévoit des procédures d'appel rapides dans le cadre du système judiciaire. Il semble que le syndicat ne se plaigne pas de la longueur de la procédure mais plutôt de la décision elle-même; du reste, c'est maintenant le syndicat qui a interjeté appel devant la Cour d'appel. De plus, les sanctions prévues par la législation sont appropriées; si le tribunal qui a statué en appel sur la décision de l'arbitre avait confirmé ladite décision, ce tribunal aurait ordonné à Enoxy de résilier les contrats de sous-traitance, soit la mesure de redressement désirée par le syndicat.
- 217. En ce qui concerne l'allégation de refus de négocier de bonne foi, le gouvernement soutient que les négociations collectives sont volontaires et qu'aucune partie n'est tenue d'approuver une convention collective dont la teneur lui semble inacceptable. Les articles 8(a)(5) et 8(b)(3) de la National Labor Relations Act (NLRA) disposent que les employeurs et les syndicats doivent négocier de bonne foi. Le syndicat aurait dû déposer une plainte pour pratiques déloyales de travail auprès du National Labor Relations Board (NLRB), mais il a apparemment choisi de ne pas le faire.
- 218. Quant à l'allégation selon laquelle Enoxy s'est rendue coupable de discrimination antisyndicale en sous-traitant ses activités houillères à des sociétés dépourvues de syndicats en vue de vider la convention collective de sa substance, le gouvernement répond que ce type de mesure constitue également une pratique déloyale de travail aux termes des articles 8(a)(3), 8(a)(5) et 8 (d)de la NLRA. Ici encore, le syndicat aurait dû déposer une plainte pour pratiques déloyales de travail auprès du NLRB, ce qu'il n'a pas fait. Le syndicat a décidé de porter l'affaire devant un arbitre, lequel a statué en sa faveur; toutefois, deux tribunaux statuant en appel ont infirmé la sentence arbitrale car ils ont estimé que le délai de prescription était échu. L'affaire est maintenant en instance devant la Cour d'appel des Etats-Unis (sixième ressort), qui peut confirmer ou infirmer les décisions de la juridiction inférieure. Ces procédures d'appel sont équitables et raisonnables et ouvertes aux deux parties.
- 219. Le gouvernement ajoute que le syndicat disposait de la même voie de recours eu égard à ses quatrième et cinquième allégations (congédiement illégal de responsables syndicaux, harcèlement et intimidation de travailleurs syndiqués), à savoir engager des poursuites pour pratiques déloyales de travail devant le NLRB, puisque de tels agissements sont spécifiquement interdits par les articles 7, 8(a)(1), 8(a)(3) et 8(a)(4) de la NLRA. Le syndicat ne l'a pas fait à ce jour.
- 220. Le gouvernement conclut que la plainte du syndicat ne fournit aucune information spécifique pour étayer sa thèse selon laquelle la législation du travail des Etats-Unis n'est pas suffisante pour défendre les principes de la liberté syndicale. La législation du travail des Etats-Unis offre des procédures et mesures de redressement plus que suffisantes pour remédier aux violations alléguées dans le présent cas; ce n'est qu'en raison des circonstances particulières du cas que ces mesures de redressement n'ont pas été accordées au syndicat.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 221. Le comité note que le présent cas porte sur deux catégories d'allégations. Premièrement, l'UMWA porte plainte contre diverses pratiques déloyales de travail du fait d'Enoxy, une filiale d'Ente Nazionale Idrocarburi, dans ses installations minières de Pevler au Kentucky. Deuxièmement, le plaignant prétend que la National Labor Relations Act ne protège pas suffisamment les travailleurs contre ce type de violation de leurs droits syndicaux fondamentaux. Pour sa part, le gouvernement affirme que sa législation du travail et son application pratique, tant de manière générale que dans les circonstances particulières de l'espèce, sont conformes aux conventions nos 87 et 98 de l'OIT. En outre, le gouvernement souligne qu'il n'entérine ni ne critique les positions et allégations de l'une ou l'autre des parties, mais soutient que la législation des Etats-Unis permet de défendre adéquatement les droits des travailleurs syndiqués en matière de liberté syndicale.
- 222. Comme cela est souligné dans la réponse du gouvernement et comme le comité l'a noté dans le cas BASF (256e rapport, cas no 1437, paragr. 234), la NLRA prévoit une série de garanties procédurales quant au dépôt et à l'instruction des plaintes concernant des pratiques déloyales de travail. Les syndicats plaignants dans le cas BASF, qui comportait des allégations similaires, ont déposé de telles plaintes auprès du NLRB; sur certains points, celui-ci a tranché en faveur du syndicat et, sur d'autres, il a entériné la position de l'employeur. Cela a conduit le comité à déclarer que le fait même que les affiliés de l'organisation plaignante continuaient d'utiliser - avec succès - les procédures du NLRB indiquait que le système conservait dans une certaine mesure la confiance des organisations de travailleurs intéressées (ibid., paragr. 234).
- 223. La différence majeure entre la présente plainte et le cas BASF tient au fait que, pour une raison inexpliquée, l'UMWA n'a pas déposé de plainte pour pratiques déloyales de travail auprès du NLRB dans le délai de six mois prévu par la NLRA. Bien que la compétence du comité pour examiner des allégations ne soit pas subordonnée à l'épuisement des procédures de recours sur le plan national, il a estimé que, lorsque la législation nationale prévoit la possibilité de recours devant une cour ou un tribunal indépendant, et que cette procédure n'a pas été suivie en ce qui concerne les questions qui font l'objet d'une plainte, il doit tenir compte de ce fait lorsqu'il examine le bien-fondé de la plainte. (Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration du BIT, troisième édition, 1985, paragr. 31 et 33.) Puisque l'une des allégations principales est que les procédures de recours prévues par la législation sont trop lentes et les sanctions trop légères pour être efficaces, il convient de noter que l'article 10 m) de la NLRA donne la priorité à toutes les plaintes pour pratiques déloyales de travail déposées en vertu de l'article 8 sur tous autres cas autres que les cas de même nature, et que l'article 10 c) de la même loi donne au NLRB le pouvoir de rendre des ordonnances enjoignant de cesser les pratiques déloyales et d'ordonner toute mesure positive susceptible de permettre la réalisation des principes établis dans la loi, y compris la réintégration des salariés avec ou sans rémunération rétroactive. En l'absence d'autres preuves, le comité estime que la loi en question institue des procédures pour déposer et faire valoir des plaintes concernant des pratiques déloyales de travail, dont le plaignant n'a apparemment pas choisi de se prévaloir.
- 224. Cela dit, le comité observe avec préoccupation qu'il s'agit de la quatrième plainte récente déposée - par divers plaignants - contre les Etats-Unis concernant des mesures antisyndicales et des pratiques déloyales de travail, en particulier par une application abusive des dispositions législatives sur la reconnaissance des agents de négociation collective et des procédures conduisant à la conclusion de conventions collectives. Dans le cas BASF, par exemple (loc. cit., paragr. 231 à 237, approuvé en mai-juin 1988), le comité a rappelé que des mesures de sous-traitance accompagnées de licenciements de dirigeants syndicaux peuvent constituer une violation du principe selon lequel nul ne devrait faire l'objet de discrimination dans l'emploi en raison de son affiliation ou de ses activités syndicales.
- 225. Le présent cas comporte des accusations graves qui, pour la plupart, ont trait à des actes de discrimination antisyndicale. La pratique constante du comité a été de ne pas faire de distinction entre les allégations dirigées contre le gouvernement ou contre d'autres personnes accusées de violation de la liberté syndicale, mais de déterminer, dans chaque cas d'espèce, si le gouvernement avait bien veillé à ce que les droits syndicaux puissent librement s'exercer sur son territoire. (Recueil, paragr. 25, et cas cités.) De plus, comme l'a souligné la commission d'experts (Etude d'ensemble, BIT, 1983, paragr. 256-280), l'expérience montre que l'existence de normes législatives fondamentales interdisant les actes de discrimination antisyndicale est insuffisante si celles-ci ne s'accompagnent pas de procédures efficaces qui assurent leur application dans la pratique. Les plaintes pour des actes de discrimination antisyndicale devraient normalement être examinées dans le cadre d'une procédure nationale qui, outre qu'elle devrait être prompte, devrait être non seulement impartiale, mais considérée comme telle par les parties intéressées; ces dernières devraient participer à cette procédure d'une façon appropriée et constructive. Tant que la protection contre les actes de discrimination antisyndicale est effectivement assurée, les méthodes adoptées pour garantir celle-ci aux travailleurs peuvent varier d'un Etat à l'autre; toutefois, si des actes de discrimination se produisent, le gouvernement intéressé doit, quelles que soient les méthodes utilisées, prendre toutes les mesures qui s'avèrent nécessaires pour remédier à cette situation. (Recueil, paragr. 570-571.)
- 226. Revenant aux allégations spécifiques de pratiques déloyales de travail faites ici, le comité estime que vues dans leur ensemble et replacées dans leur contexte général, plusieurs des mesures prises par Enoxy ne peuvent être considérées comme propices à l'établissement de bonnes relations professionnelles. Le plaignant indique - et le gouvernement reconnaît - qu'Enoxy a modifié ses relations avec le syndicat à plusieurs égards: en refusant de proroger la convention qui expirait le 28 janvier 1988 jusqu'à une date ultérieure où une nouvelle convention pourrait être négociée; en refusant de cotiser aux fonds syndicaux de pension et de prestations de 1950 et 1974; et en sous-traitant ses opérations minières de Pevler. Compte tenu de ces faits, et tout en reconnaissant que la question de savoir si une partie a adopté une attitude raisonnable ou intransigeante vis-à-vis de l'autre relève de la négociation entre les parties dans le cadre de la législation nationale, le comité rappelle l'importance qu'il attache au principe selon lequel les employeurs et les syndicats doivent négocier de bonne foi pour arriver à un accord. De plus, le comité rappelle que les droits syndicaux ne peuvent s'exercer que dans un climat dénué de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l'encontre des syndicalistes; il appartient au gouvernement d'assurer le respect de ce principe. (Recueil, paragr. 70.)
- 227. S'agissant de la procédure arbitrale et judiciaire suivie pour faire valoir le grief contre la politique de sous-traitance d'Enoxy, le comité note que l'arbitre saisi a rejeté l'objection de l'employeur relative au délai de prescription, au motif que l'infraction alléguée était de nature continue; il s'est prononcé en faveur du syndicat sur le fond en concluant que, par le biais du système de la sous-traitance, l'entreprise Enoxy était en mesure de s'approvisionner en charbon extrait du site de Pevler sans être liée par les termes de la convention collective. L'arbitre a ordonné à Enoxy de résilier ses contrats de sous-traitance miniers.
- 228. L'employeur a fait appel et un magistrat du tribunal de district des Etats-Unis a recommandé d'infirmer la sentence de l'arbitre au motif que sa conclusion sur le respect de la prescription pour le dépôt du grief n'était pas étayée par les dispositions sans ambiguïté et obligatoires de la convention collective en matière de prescription. Après des retards supplémentaires dus à la maladie des deux juges saisis du rapport du magistrat, un juge du tribunal de district des Etats-Unis a confirmé la décision du magistrat. Il convient de noter que le magistrat et le juge du tribunal de district ne se sont pas prononcés sur le fond de l'affaire. L'ensemble de la procédure depuis la sentence arbitrale jusqu'à la décision judiciaire a donc duré quinze mois environ; puisque le syndicat a interjeté appel auprès de la Cour d'appel des Etats-Unis le 30 septembre 1988, de nouveaux retards doivent être escomptés. Le jugement final de ce grief ne sera pas connu avant l'épuisement de toutes les possibilités d'appel. Le comité regrette la durée excessive de la procédure de recours utilisée par le plaignant. Etant donné que les mesures de sous-traitance accompagnées de licenciements de dirigeant ou de militants syndicaux peuvent constituer une violation du principe selon lequel nul ne devrait faire l'objet de discrimination dans l'emploi en raison de son affiliation syndicale, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de la décision finale eu égard au grief contre la sous-traitance déposé par le syndicat plaignant.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 229. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Au sujet des allégations de pratiques déloyales de travail (licenciement d'un dirigeant syndical, refus de négocier de bonne foi), le comité estime que, en vertu de la loi nationale sur les relations professionnelles, il existe dans le présent cas des procédures pour traiter de ce qui constitue en fait des plaintes pour pratiques déloyales de travail, dont le plaignant n'a apparemment pas choisi de se prévaloir.
- b) Cependant, au sujet de l'allégation de sous-traitance d'opérations minières à des sociétés sans syndicat, le comité regrette la durée excessive de la procédure de recours utilisée par le plaignant.
- c) Etant donné que les mesures de sous-traitance accompagnées de licenciements de dirigeants ou militants syndicaux peuvent constituer une violation du principe selon lequel nul ne devrait faire l'objet de discrimination dans l'emploi en raison de son affiliation ou de ses activités syndicales, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de la décision finale eu égard au grief contre la sous-traitance déposé par le syndicat plaignant.
- d) Le comité demande au gouvernement d'attirer l'attention d'Ente Nazionale Idrocarburi/Enoxy Coal Corporation sur l'obligation des employeurs et des syndicats de négocier de bonne foi pour parvenir à un accord, et sur le fait que des relations professionnelles satisfaisantes dépendent en premier lieu de l'attitude des parties vis-à-vis l'une de l'autre et de leur confiance mutuelle. Le comité demande en outre au gouvernement de le tenir informé de l'évolution des relations professionnelles chez Enoxy Coal Corporation, notamment au site houiller de Pevler et des mesures prises pour améliorer le climat des relations professionnelles dans cette entreprise.