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Informe en el que el Comité pide que se le mantenga informado de la evolución de la situación - Informe núm. 243, Marzo 1986

Caso núm. 1350 (Canadá) - Fecha de presentación de la queja:: 08-OCT-85 - Cerrado

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  1. 293. Dans une communication du 8 octobre 1985, la Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante (CMOPE), au nom de la Fédération des enseignants de la Colombie britannique, organisation qui lui est affiliée, a présenté une plainte contre le gouvernement du Canada/Colombie britannique. Elle a fourni des renseignements complémentaires dans une lettre du 18 décembre 1985. Le gouvernement a fait part de ses observations dans une communication du 20 janvier 1986.
  2. 294. Le Canada a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il n'a ratifié ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ni la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations du plaignant

A. Allégations du plaignant
  1. 295. Dans sa lettre du 8 octobre 1985, la CMOPE allègue que les enseignants employés par les conseils scolaires de la Colombie britannique se voient dénier le droit de négociation collective. Elle déclare que le gouvernement n'a pas tenu compte des recommandations formulées par le comité dans le cas no 1173 et a pris de nouvelles mesures pour limiter les budgets des conseils scolaires, restreindre le droit de ces conseils de négocier les traitements du personnel qu'ils emploient, déterminer d'avance le résultat des négociations et de l'arbitrage et imposer le principe de la capacité de payer comme le seul facteur déterminant le résultat des négociations, ce qui prive les conseils d'arbitrage de tout pouvoir.
  2. 296. Plus précisément, la CMOPE fait état des restrictions législatives ci-après:
  3. 1. la loi scolaire de 1979 (qui régit la négociation collective des enseignants) limite le champ de la négociation aux questions pécuniaires de "salaires et de primes";
  4. 2. la loi temporaire de 1982 sur le financement de l'éducation, telle que modifiée, change unilatéralement les dates de l'exercice fiscal pour les conseils scolaires, de sorte qu'un conseil doit établir son budget définitif pour approbation par le ministre des Finances avant que les négociations collectives puissent être achevées ou que les conclusions des conseils d'arbitrage soient connues;
  5. 3. la directive du Conseil du Trésor no 1/86 du 4 avril 1985, publiée en vertu de la loi sur l'administration financière, prévoit des peines sévères - sous la forme de réductions des subventions octroyées - à l'encontre des conseils scolaires qui essaieraient de dégager des fonds pour augmenter les salaires en réduisant l'effectif d'enseignants qu'elles emploient;
  6. 4. des modifications apportées à la loi de 1982 sur la stabilisation des rémunérations, telle que modifiée, habilitent le Commissaire à annuler toute convention collective ou sentence arbitrale dont il considère qu'elle n'est pas compatible avec le résultat souhaité par le gouvernement.
  7. 297. La CMOPE joint à sa plainte copie de plusieurs sentences arbitrales (Conseil d'administration scolaire du district de Vancouver c. Associations des professeurs de l'enseignement élémentaire/ secondaire de Vancouver, du 28 juin 1985, Associations des enseignants de Sunshine Coast et Powell River c. Conseils d'administration des districts scolaires de Sunshine Coast et Powell River, du 30 mai 1985, et une autre encore) d'où il ressort que les arbitres, s'ils se reconnaissent liés par le critère de la capacité de payer de la loi sur la stabilisation des rémunérations, jugent néanmoins inadmissibles les présentes restrictions à la procédure d'arbitrage. L'extrait ci-après de l'une des sentences résume les critiques que le plaignant formule en ce qui concerne la situation présente de la négociation collective pour les enseignants de la province:
    • Nous avons fait état plus haut de la législation, des règlements et des directives actuellement en vigueur. Le fait est que c'est dans le cadre du système que constitue ou crée ce salmifondi que les dispositions budgétaires dont nous avons retracé les grandes lignes s'appliquent actuellement, que les membres des conseils scolaires ont les mains liées en ce qui concerne la capacité de payer et que le présent Conseil d'arbitrage se voit impuissant à faire quoi que ce soit pour accorder une augmentation au demeurant bien justifiée. Les enseignants nous ont demandé de ne pas nous embarrasser de ces entraves et de rendre une sentence qui tout à la fois reconnaisse le bien-fondé de leur position et affirme notre indépendance vis-à-vis de ces restrictions et/ou directives gouvernementales. Eu égard à l'indépendance traditionnelle des arbitres et au fait qu'il serait souhaitable de rendre une sentence au fond, la tentation d'agir ainsi est forte, mais, en réalité il n'y aurait là qu'un geste creux, qui entraînerait de nouveau saisie du Commissaire, puis renvoi aux arbitres, d'où un gaspillage de temps et d'argent par toutes les parties, sans effet pratique.
  8. 298. Dans sa lettre du 18 décembre 1985, la CMOPE explique que la Fédération des enseignants de la Colombie britannique a contesté la directive no 1/86 du Conseil du Trésor, au motif qu'elle n'aurait pas été autorisée par la loi. En première instance, le Tribunal de la Colombie britannique a considéré que la directive était valide. La cour d'appel (dont l'arrêt du 21 novembre 1985 est fourni) l'a invalidée au motif qu'une directive ne saurait aller à l'encontre des dispositions de la loi scolaire, qui seule confère aux conseils scolaires le droit de décider du nombre des enseignants qu'ils emploient et régit le mécanisme de négociation des traitements. Cet arrêt contient une vive critique de l'ingérence législative dans la procédure d'arbitrage.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 299. Dans sa communication du 20 janvier 1986, le gouvernement rappelle que l'évolution du programme de stabilisation des rémunérations - qui faisait l'objet du cas no 1173 évoqué par la CMOPE - est directement liée à la situation économique difficile dans laquelle la Colombie britannique se trouve plongée depuis 1981. Le gouvernement fait état du chômage, des pertes de revenus et des accords sur les salaires conclus dans le secteur public, qui, en 1981, ont atteint 14,4 pour cent d'augmentation. La réponse détaillée du gouvernement aux allégations relatives au programme de stabilisation est reproduite aux paragraphes 173 à 181 du présent rapport (cas no 1329).
  2. 300. En réponse aux allégations précises de la CMOPE au sujet de la négociation collective des enseignants, le gouvernement souligne que la Fédération des enseignants de la Colombie britannique vient d'introduire un recours en justice contestant les dispositions de la loi scolaire qui régissent le champ d'application de la négociation collective. En conséquence, il estime inapproprié de discuter de ces allégations jusqu'à ce que la décision judiciaire en question ait été rendue. Il déclare toutefois que l'allégation selon laquelle le gouvernement n'aurait pas répondu aux demandes de modification de la loi est de nature à induire en erreur. Ces demandes sont toutes récentes et sont liées à un mécontentement devant le fait que le programme de stabilisation des rémunérations englobe le secteur de l'enseignement. Le gouvernement souligne que seule une faible majorité des délégués ayant voté à la convention de 1983 de la Fédération des enseignants de la Colombie britannique était favorable à l'autre solution consistant à ce que ce secteur relève de dispositions législatives plus générales (par exemple du code du travail). D'après lui, la loi scolaire dénie le droit de grève mais prévoit en revanche une autre solution, à savoir l'arbitrage obligatoire au sujet des traitements des enseignants lorsque les parties ne parviennent pas à se mettre d'accord.
  3. 301. En ce qui concerne la loi temporaire sur le financement de l'éducation, le gouvernement déclare que ce texte a été adopté en vue de restreindre les dépenses publiques d'éducation dans une conjoncture de réduction des finances publiques et de grave récession. Par l'intermédiaire de cette loi, le gouvernement de la province a certes fixé le budget des conseils scolaires, mais il ne leur donne pas d'instructions quant à la façon de répartir leurs crédits. En conséquence, la loi n'exclut pas la possibilité de négocier des ajustements des rémunérations. Cette loi sera abrogée automatiquement le 31 décembre 1986 (art. 61). En outre, le gouvernement a annoncé que le pouvoir de percevoir les taxes scolaires locales sera restitué aux districts scolaires à compter du 1er juillet 1986, c'est-à-dire six mois avant l'arrivée à expiration de la loi.
  4. 302. Le gouvernement admet que l'esprit et les effets de la directive no 1/86 du Conseil du Trésor peuvent prêter à confusion. Il déclare que l'objet de cette directive est de garantir la qualité de l'enseignement et le maintien des emplois des enseignants. D'après lui, elle n'exclut pas la possibilité de négocier des augmentations de traitement, pour autant que celles-ci n'entraînent pas des suppressions d'emplois d'enseignants. Il cite des statistiques montrant que la rémunération totale des enseignants à plein temps a augmenté en moyenne annuelle de 1,72 pour cent en 1985-86. En ce qui concerne la décision de la cour d'appel au sujet de cette directive, le gouvernement considère que la décision majoritaire s'est fondée sur une question de formalisme juridique; elle n'a pas invalidé le pouvoir du gouvernement d'instituer une formule permettant de limiter les allocations budgétaires aux conseils scolaires locaux qui licencieraient des enseignants pour pouvoir financer les augmentations de salaires d'autres enseignants.
  5. 303. En ce qui concerne la prétendue ingérence des pouvoirs publics par l'intermédiaire de déclarations ministérielles pour l'exposé détaillé que la CMOPE en fait à propos du cas no 1329, (voir paragr. 172 du présent rapport), le gouvernement déclare que le ministre de l'Education a simplement écrit aux conseils scolaires pour leur faire savoir que toute augmentation de salaires négociée devrait être financée dans le cadre du budget déjà alloué aux districts scolaires.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 304. Le comité a procédé à un examen approfondi de la loi de 1982 sur la stabilisation des salaires et de la loi temporaire de 1982 sur le financement de l'éducation dans le contexte du cas no 1173 et a formulé des conclusions définitives à sa réunion de mai 1984. (Voir 234e rapport, paragr. 75 à 91.) Les nouveaux aspects qu'introduit le présent cas sont les suivants: 1) il est allégué que le maintien du programme de stabilisation des salaires, en particulier le concept de la capacité de payer des employeurs et les limites imposées à l'arbitrage, ont presque supprimé la négociation collective des enseignants; 2) les modifications apportées à la loi en 1985 et la directive no 1/86 du Trésor auraient aggravé la situation.
  2. 305. En ce qui concerne le premier de ces aspects nouveaux, le comité a entrepris un réexamen approfondi de la loi sur la stabilisation des salaires dans le contexte du cas no 1329 et, en conséquence, dans le cas présent, il renvoie aux conclusions qu'il a formulées au sujet de ce cas. (Voir paragr. 183 à 188.)
  3. 306. En outre, le comité, au cours de son examen du cas no 1173, a eu l'occasion d'examiner la loi temporaire sur le financement de l'éducation qui permet au gouvernement de bloquer les augmentations de salaires antérieurement convenues entre les parties à la négociation. (Voir 230e rapport, paragr. 573.) Dans le cas présent, le comité ne peut que réaffirmer sa conclusion antérieure selon laquelle une telle mesure n'est pas compatible avec les principes de la liberté syndicale. Le comité a souligné par le passé l'importance qu'il attache au principe de l'autonomie des parties à la négociation collective, principe qui a été reconnu de façon générale au cours des discussions préparatoires ayant abouti à l'adoption, par la Conférence internationale du Travail, de la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981. Il en découle que les pouvoirs publics ne devraient pas, en règle générale, intervenir pour modifier le contenu de conventions collectives qui ont été conclues librement. Le comité rappelle aussi de nouveau que le fait d'user de pouvoirs attribués à l'autorité financière de façon à empêcher l'exécution d'obligations prévues par des conventions collectives conclues par des organismes publics n'est pas compatible avec le principe de la libre négociation collective. Il note que la loi en question viendra à expiration, en pratique, en juillet 1986 et, en droit, en décembre 1986.
  4. 307. La directive no 1/86 du Conseil du Trésor ayant été annulée par la Cour d'appel de la Colombie britannique, le comité considère qu'il n'y a pas lieu d'examiner la question de sa conformité avec les principes de la liberté syndicale de l'OIT. De même, le comité estime que l'allégation de l'organisation plaignante selon laquelle les pouvoirs publics auraient commis une ingérence par l'intermédiaire de pressions sur les organismes employeurs - les conseils scolaires -, n'est pas suffisamment fondée et n'appelle pas un examen plus approfondi.
  5. 308. En ce qui concerne la loi scolaire, le comité souhaite tout d'abord souligner que cette loi, en déniant comme elle le fait le droit de grève aux enseignants, n'est pas en conformité avec le principe selon lequel l'interdiction de la grève, qui est un moyen légitime de défense des intérêts économiques et sociaux des travailleurs, devrait être limitée aux fonctionnaires qui agissent en tant qu'organe de la puissance publique ou aux services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire aux services dont l'interruption risquerait de mettre en danger, dans toute ou partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne. En outre, lorsque la grève est soumise à des restrictions ou interdite, il conviendrait d'accorder aux travailleurs une protection adéquate pour compenser les limites ainsi mises à leur liberté d'action, en prévoyant des procédures appropriées, impartiales et rapides de conciliation et d'arbitrage aux diverses étapes desquelles les parties devraient pouvoir participer et où les décisions arbitrales, une fois rendues, devraient être appliquées rapidement et de façon complète.
  6. 309. Le comité exprime l'espoir que le gouvernement reconsidérera, à la lumière de ces principes, les dispositions législatives mises en cause dans le cas présent.
  7. 310. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle la loi scolaire limiterait le champ d'application de la négociation collective pour les enseignants, le comité note les déclarations du gouvernement au sujet de cette loi et le fait qu'elle est actuellement contestée en justice. Il rappelle que dans des cas antérieurs (voir par exemple 139e rapport, cas nos 743 et 744 (Japon), paragr. 211), au sujet d'allégations relatives au refus de négocier collectivement sur certaines questions dans le secteur public, il a répété l'opinion de selon laquelle "il est certaines questions qui, manifestement, relèvent au premier chef ou essentiellement de la gestion et de l'exploitation des affaires du gouvernement; ces questions peuvent raisonnablement être considérées comme étrangères au champ des négociations". Il est également évident que certaines autres questions se rapportent au premier chef ou essentiellement aux conditions d'emploi et qu'elles ne devraient pas être considérées comme restant en dehors du champ de la négociation collective menée dans une atmosphère de bonne foi et de confiance mutuelles. Le comité veut croire que le tribunal, dans son examen du cas relatif à la loi scolaire, tiendra compte de ces principes. Le comité prie le gouvernement de lui transmettre une copie de la décision qui sera rendue dans ce cas.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 311. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:
    • a) En ce qui concerne le programme de révision de la stabilisation des salaires dans le secteur public en vigueur depuis 1982 en vertu de la loi sur la stabilisation des salaires, le comité note qu'il a réexaminé la législation en question lors de la présente réunion dans le contexte du cas no 1329 et, en conséquence, il renvoit aux conclusions qu'il a formulées à ce sujet.
    • b) Pour ce qui est des allégations relatives à la loi temporaire sur le financement de l'éducation, le comité considère que le fait d'user de pouvoirs attribués à l'autorité financière de façon à bloquer l'exécution de conventions collectives négociées antérieurement n'est pas compatible avec les principes de la liberté syndicale. Il note que la loi temporaire sur le financement de l'éducation arrivera à expiration, en pratique, en juillet 1986 et, en droit, en décembre 1986.
    • c) Le comité considère que les allégations relatives à la directive no 1/86 du Conseil du Trésor et au fait que le gouvernement aurait commis une ingérence en exerçant des pressions aux conseils scolaires n'appellent pas un examen plus approfondi.
    • d) Le comité appelle l'attention du gouvernement sur les principes énoncés au paragraphe 308 ci-dessus et exprime l'espoir que le gouvernement reconsidérera la législation.
    • e) Le comité appelle l'attention du gouvernement sur le principe relatif au champ de la négociation énoncé au paragraphe 310 ci-dessus; il demande au gouvernement de lui transmettre une copie de la décision judiciaire qui sera rendue dans l'affaire relative à la loi scolaire.
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