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- 56. La plainte de la Fédération nationale des syndicats de la fonction publique figure dans une communication du 7 novembre 1984. Par la suite, l'organisation plaignante a fourni d'autres informations dans une communication télégraphique du 29 novembre 1984 et des documents complémentaires à l'appui de sa plainte, le 3 décembre 1984. Le gouvernement a envoyé sa réponse par une communication du 26 avril 1985.
- 57. Le Portugal a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.
A. Allégation de la fédération plaignante
A. Allégation de la fédération plaignante
- 58. La Fédération nationale des syndicats de la fonction publique allègue une violation des droits syndicaux au Portugal dans le domaine de la procédure de négociation pour la révision des salaires de la fonction publique pour l'année 1985.
- 59. Selon elle, les irrégularités suivantes auraient été commises par le gouvernement: après que la procédure de négociation eut débuté le 28 septembre 1984 et qu'il eut été décidé de concert que la deuxième réunion aurait lieu le 11 octobre suivant, le gouvernement ne s'y serait pas fait représenter par les personnes qui, aux termes de la loi, étaient habilitées à mener des négociations, et il aurait enfreint ainsi les dispositions de l'article 3 du décret-loi no 45/A/84 du 3 février 1984. Il aurait découlé, de ce fait, que la date de la réunion suivante n'y aurait pas été arrêtée et que le programme préalablement fixé ainsi que les dates limites de la procédure de négociation n'auraient pas pu être respectés.
- 60. La fédération plaignante précise qu'une lettre du 23 octobre émanant du secrétariat d'Etat à l'Administration publique qui indiquait que la procédure de négociation n'était pas considérée comme suspendue et qu'elle reprendrait dès que le secrétariat d'Etat à l'Administration publique et les autres membres du gouvernement auraient reçu des orientations plus précises à définir au Conseil des ministres au sujet de la politique budgétaire à appliquer n'aurait servi qu'à déguiser l'illégalité manifeste de la conduite du gouvernement dans le domaine des négociations. Ce dernier aurait enfreint de la sorte le paragraphe 1 de l'article 3 du décret-loi no 45/A/84 susmentionné; elle conclut que le gouvernement aurait interrompu les négociations de façon unilatérale et injustifiée, adoptant à l'égard de ces dernières une conduite qui se serait bornée, dans la pratique, à nier l'exercice du droit de négociation qui appartient aux syndicats des travailleurs de la fonction publique.
- 61. La fédération plaignante a par la suite ajouté que, malgré des efforts répétés de sa part pour amener le gouvernement à reprendre les négociations, celui-ci s'y serait refusé et que, le 28 novembre 1984, près de 20.000 travailleurs de la fonction publique auraient manifesté dans les rues de Lisbonne pour obtenir la reprise desdites négociations.
- 62. Or, selon la fédération plaignante, la législation portugaise sur le droit de négociation dans la fonction publique n'offrirait aucun recours permettant d'obliger le gouvernement à reprendre les négociations. A cet égard, elle rappelle qu'elle avait vivement critiqué le projet de loi sur le droit de négociation des travailleurs de la fonction publique, et elle communique un document qu'elle avait publié le 7 octobre 1983, dans lequel elle faisait état de ses griefs à l'égard de ce projet.
- 63. Selon ce document, le projet en question portait atteinte au droit inaliénable des travailleurs de la fonction publique de négocier collectivement puisque le terme de "négociation collective" qui y était utilisé ne désignait, en fait, qu'une démarche de consultation des syndicats sur la fixation, par voie législative, des conditions de travail de la fonction publique. En effet, d'après le document de la fédération plaignante, l'article 5, alinéa 2, du projet disposait que la négociation collective est l'appréciation et la discussion, par les associations syndicales et l'administration, des questions relatives aux conditions de travail pour les résoudre d'un commun accord, et l'article 5, alinéa 3, attribuait à l'accord résultant desdites appréciations et discussions le caractère de simples recommandations dépourvues de toute force exécutoire ou efficacité juridique.
- 64. En conséquence, selon la fédération plaignante, la "participation" à laquelle se référait le projet se bornait à admettre que les associations syndicales émettaient des rapports sur la fixation ou la modification de la législation applicable au régime général ou spécial de la fonction publique, et le projet ne contenait aucun mécanisme de résolution des conflits.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 65. Dans sa réponse du 26 avril 1985, le gouvernement observe que la fédération plaignante fonde sa plainte, tout d'abord, sur le manque de représentativité des membres gouvernementaux présents à la réunion du 11 octobre 1984, et qu'elle estime que ce fait a dénaturé de façon décisive et définitive toute la procédure, ce qui a mis en danger l'exercice du droit de négociation par les syndicats des travailleurs de la fonction publique.
- 66. Sur ce point, le gouvernement soutient que cette affirmation ne correspond pas à la vérité puisque le chef du cabinet du secrétaire d'Etat à l'Administration publique, les directeurs généraux de l'administration et de la fonction publique et de l'assistance dans la maladie aux fonctionnaires de l'Etat ainsi que d'autres dirigeants et cadres appartenant à ces directions générales étaient présents à la réunion du 11 octobre et représentaient le gouvernement.
- 67. Le gouvernement explique, d'une part, qu'il appartient au secrétaire d'Etat à l'Administration publique, par délégation du ministre d'Etat et conformément à la loi organique du gouvernement (voir décret-loi no 344/A/83), de coordonner les actions à mener dans le cadre de la réforme de l'administration publique, et que la représentation de ce secrétaire d'Etat dans les actes à caractère non strictement personnel appartient au chef de son cabinet (voir décret-loi no 267/77). De plus, ajoute le gouvernement, la Direction générale de l'administration et de la fonction publique du secrétariat d'Etat à l'Administration publique a pour attributions de promouvoir l'amélioration et la modernisation de l'administration publique et de participer à la définition des stratégies et des politiques de réforme administrative (voir décret réglementaire no 80/82). La direction générale en question, en sa qualité d'organe de coordination et d'aide technique, a pour mission d'assurer l'établissement de relations avec les associations syndicales des travailleurs de l'administration publique et de mener la procédure de négociation collective et de participation à l'élaboration de la législation relative au régime général ou spécial de la fonction publique.
- 68. D'autre part, le ministre des Finances et du Plan s'est fait représenter auprès de la Direction générale de l'administration et de la fonction publique par le Directeur général de l'assistance dans la maladie aux fonctionnaires de l'Etat, compte tenu de la nature et de la portée des matières en discussion dans le cadre de cette direction générale, poursuit le gouvernement.
- 69. Il estime donc qu'il n'y a eu aucune irrégularité en ce qui concerne sa représentation à la réunion du 11 octobre, étant donné la présence à ladite réunion du représentant légal du secrétaire d'Etat à l'Administration publique, du Directeur général de l'assistance dans la maladie aux fonctionnaires de l'Etat, pour le ministère des Finances et du Plan, et du Directeur général de l'administration et de la fonction publique.
- 70. A propos du grief de la fédération plaignante, qui affirme qu'il y a eu interruption de la procédure de négociation de la part du gouvernement, ce qui ne serait pas conforme à l'article 3.2 du décret-loi no 45/A/84 susmentionné et enfreindrait le paragraphe 1 de ce même article, le gouvernement estime que cette allégation est également dénuée de tout fondement.
- 71. Selon lui, il n'y a eu, en réalité, aucune interruption ni même aucune suspension de la marche de la procédure de négociation, mais seulement ajournement des délais initialement arrêtés, en conséquence d'un retard imprévu qui est survenu dans les travaux du budget général de l'Etat, de l'adoption duquel dépendait nécessairement la fixation des nouveaux traitements de la fonction publique. D'ailleurs, comme il avait été convenu dès le commencement, les réunions de négociation concernaient principalement la révision des traitements et, accessoirement, la question des carrières. C'est ce point qui a été éclairé et proposé dans la lettre du 23 octobre susmentionnée, explique le gouvernement.
- 72. D'autre part, toujours d'après le gouvernement, la politique budgétaire pour 1985 ayant été définie par le Conseil des ministres, les réunions sur les traitements ont été immédiatement reprises le 11 janvier 1985, et la présence de la commission syndicale de négociation à ces réunions démontre l'absurdité de la plainte déposée entre-temps. Il faut d'ailleurs signaler que ladite commission syndicale de négociation, lors de la réunion du 11 octobre à laquelle elle s'est opposée par la suite, a discuté la proposition du gouvernement et a même avancé des contre-propositions qui devaient être soumises à une appréciation ultérieure puisqu'elle a accepté que la date de la réunion suivante soit fixée par téléphone.
- 73. Le gouvernement conclut en affirmant qu'il a donc été légitimement et suffisamment représenté à la réunion du 11 octobre, que la prorogation des délais initialement convenus a été justifiée et qu'elle ne saurait être considérée comme une infraction aux principes de l'article 3 du décret-loi no 45/A/84 susmentionné, ni à ceux de la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978. Il est d'avis qu'il n'y a pas de fondement à la démarche de la Fédération nationale des syndicats de la fonction publique auprès du Comité de la liberté syndicale, et que la loi portugaise et la pratique sont conformes aux normes de cette convention internationale.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 74. Le comité observe que la plainte de la Fédération nationale des syndicats de la fonction publique porte essentiellement sur une critique du décret-loi no 45/A/84 du 3 février 1984 réglementant le droit de négociation des travailleurs de l'administration publique qui, selon la fédération plaignante, n'aurait pas établi de mécanisme de résolution des conflits dans la fonction publique. Elle porte aussi sur des allégations d'irrégularité dans la procédure de négociation pour la révision des salaires de la fonction publique pour l'année 1985 et de rupture unilatérale des négociations du fait du gouvernement.
- 75. Le comité observe que la Fédération nationale des syndicats de la fonction publique, adhérente à la Confédération générale des travailleurs portugais (CGTP-IN), a déjà porté plainte dans le domaine des négociations collectives dans la fonction publique en 1981 (cas no 1042 examiné par le Comité de la liberté syndicale dans son 214e rapport, paragr. 301 à 331, approuvé par le Conseil d'administration à sa 219e session, février-mars 1982) .
- 76. A l'époque, le gouvernement avait déjà ratifié la convention no 151, mais il n'avait pas encore adopté le décret-loi no 45/A/84 du 3 février 1984 réglementant le droit de négociation des travailleurs de l'administration publique.
- 77. Or, de l'avis de la Commission d'experts pour l'application des conventions et reccomandations, le décret-loi est conforme aux exigences de la convention no. 151. En effet, l'article 8 du décret-loi, qui traite de la résolution des conflits, dispose en son alinéa 1 que "la résolution des conflits survenant pendant la procédure de négociation pourra se faire à la demande des organisations syndicales par des négociations supplémentaires". L'alinéa 2 du même article prévoit que l'ouverture de négociations supplémentaires exige l'approbation du gouvernement et ne pourra intervenir au delà d'un délai de 20 jours et aura pour objet de tenter d'obtenir un accord. L'alinéa 3 énonce que le consensus obtenu dans les négociations supplémentaires aura le caractère d'une recommandation.
- 78. Le comité rappelle que l'article 8 de la convention no 151 est libellé comme suit: Le règlement des différends survenant à propos de la détermination des conditions d'emploi sera recherché, d'une manière appropriée aux conditions nationales, par voie de négociation entre les parties ou par une procédure donnant des garanties d'indépendance et d'impartialité, telle que la médiation, la conciliation ou l'arbitrage, instituée de telle sorte qu'elle inspire la confiance des parties intéressées. Le comité ne peut que se rallier à l'opinion de la commission d'experts, et il estime que la procédure choisie par le législateur portugais pour résoudre les conflits, à savoir les négociations supplémentaires, est conforme aux prescriptions de la convention qui, dans le cas d'espèce, ont été correctement appliquées par le gouvernement.
- 79. En ce qui concerne les allégations relatives aux irrégularités dans la procédure de négociation qui auraient tenu à ce que le gouvernement se serait fait représenté par des personnes qui, aux termes de la loi, n'étaient pas habilitées à mener des négociations, le comité a pris note des explications détaillées fournies par le gouvernement, et en particulier du fait qu'il était légitimement et suffisamment représenté à la réunion du 11 octobre 1984 par le chef du cabinet du secrétaire d'Etat à l'Administration publique, par le Directeur général de l'assistance dans la maladie aux fonctionnaires de l'Etat et par le Directeur général de l'administration et de la fonction publique. Le comité estime que, compte tenu de ces explications, cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
- 80. En ce qui concerne l'allégation d'interruption unilatérale de la procédure de négociation de la part du gouvernement, le comité a également pris note des explications du gouvernement, et en particulier du fait qu'il n'y a eu qu'un ajournement des délais initialement arrêtés en conséquence d'un retard imprévu dans les travaux du budget général de l'Etat, de l'adoption duquel dépendait la fixation des nouveaux traitements de la fonction publique. Le comité a aussi noté que les réunions sur les traitements ont repris à partir du 11 janvier 1985 avec la commission syndicale de négociation et que quatre réunions ont eu lieu, ce que la fédération plaignante n'a pas nié. Le comité estime que, dans ces conditions, cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 81. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, la conclusion suivante:
- Le comité a pris note des explications du gouvernement sur les allégations d'irrégularité dans la procédure de négociation pour la révision des salaires de 1985 dans la fonction publique et la rupture unilatérale des négociations du fait du gouvernement, et il estime que, compte tenu de ces explications, le cas n'appelle pas un examen plus approfondi.