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- 49. Des plaintes en violation de la liberté syndicale ainsi que des informations complémentaires ont été présentées par les organisations suivantes: Fédération de la banque et de l'épargne des commissions ouvrières (FEBA, communication du 12 février 1979); Fédération internationale des employés et techniciens (FIET, communications des 12 février et 21 mars 1979); Confédération internationale des syndicats libres (CISL, communications des 13 et 21 février 1979). Le gouvernement a fait parvenir ses observations par une lettre du 27 septembre 1979.
- 50. L'Espagne a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 51. La FEBA demande, dans sa communication du 12 février 1979, que les syndicats puissent jouir d'une entière liberté d'action et que les travailleurs en grève des banques privées ne soient plus punis de sanctions et arrêtés. La CISL et la FIET protestent dans leurs différentes communications contre les mesures antisyndicales qui auraient été prises par le gouvernement espagnol à l'encontre des travailleurs en grève pour défendre leurs intérêts économiques; les autorités auraient utilisé la législation antiterroriste récemment adoptée contre les travailleurs des banques en grève et leurs syndicats agissant légitimement.
- 52. La CISL communique, dans une lettre postérieure, une copie du décret-loi "sur la sécurité du citoyen" sur lequel les autorités s'appuieraient pour arrêter les grévistes. Depuis l'adoption de ce décret, ajoute le plaignant, on a constaté une vague d'arrestations sur tout le territoire espagnol et, en particulier, à Madrid; les syndicalistes et les travailleurs arrêtés sont en général détenus pendant une journée puis relâchés après le versement d'une amende de 25.000 pesetas environ. Ainsi, poursuit-il, le 13 février 1979, 14 travailleurs des banques étaient arrêtés avant 9 heures du matin et détenus jusqu'au soir. Plus de 200 travailleurs métallurgistes, une centaine de travailleurs des banques, une centaine de travailleurs des assurances et une vingtaine de travailleurs de l'enseignement auraient été arrêtés; 40 pour cent d'entre eux sont membres de l'Union générale des travailleurs (UGT). Les plaignants communiquent également une série de documents à l'appui de leurs allégations. La FIET cite notamment les noms de plusieurs travailleurs qui auraient été punis d'une sanction pour avoir participé à une grève (dans le cadre des négociations d'une convention collective) dans le secteur bancaire: ils auraient été arrêtés, à la porte de leur lieu de travail respectif, les 8 et 14 février 1979 et remis en liberté sous caution (de 25.000 à 35.000 pesetas) par la suite d'autres travailleurs auraient été arrêtés le 15 février et relâchés sous une caution de 35.000 pesetas. De même, deux militants de l'UGT, membres du comité de grève de la "Banco Simeón", ont été punis par lai direction d'une mise à pied de 15 jours en raison des grèves intervenues.
- 53. Dans sa réponse, le gouvernement signale en premier lieu que le nombre de personnes arrêtées - en rapport avec la conduite de piquets de grève dans les conflits survenus en février 1979 dans les secteurs de la métallurgie, des assurances et de l'enseignement - a été de 118 pour tout le territoire espagnol, chiffre notablement, inférieur aux chiffres allégués. Quarante-six de ces personnes furent arrêtées pour avoir agi ostensiblement par la contrainte, utilisant des panneaux insultants, formulant des menaces, jetant des pierres, exhibant des objets dangereux et usant d'autres formes de violence physique et morale à l'égard de ceux qui étaient à leur poste de travail; il existait une présomption que ces faits étaient constitutifs du délit de menaces et de contraintes, prévu à l'article 496 du Code pénal. Les intéressés furent arrêtés, indique le gouvernement, par les agents de la police judiciaire, conformément aux règles prévues a l'article 492 de la loi sur la procédure pénale, et ils furent mis à la disposition des juges d'instruction compétents qui devaient déterminer si ces personnes encouraient une responsabilité pénale.
- 54. Les arrestations opérées dans 71 autres cas, poursuit le gouvernement, reposent également sur l'article 496 du code pénal. En vertu du paragraphe 2 de celui-ci, commettent un délit de contraintes et sont punissables d'une peine de prison et d'une amende de 20.000 à 200.000 pesetas ceux qui agissent avec violence ou intimidation, en groupe ou individuellement mais en accord avec d'autres, obligent des tiers à entamer ou à continuer une grève, un arrêt de travail ou un lock-out. Les agents de police ont estimé que la conduite de ces personnes impliquait une intimidation: des groupes très nombreux faisaient pression sur les travailleurs pour qu'ils abandonnent leur poste de travail; à cela s'ajoutait une série de circonstances objectives qui devaient influencer ceux qui se refusaient à appuyer la grève, comme les représailles exercées précédemment sur des travailleurs qui avaient refusé d'obéir en d'autres occasions aux ordres de grève et aux invitations de ce type ou comme les actions terroristes qui avaient, immédiatement avant, semé la panique parmi les professionnels des centres en grève (cinq explosions d'engins pendant le mois de janvier 1979 et plus de 40 menaces en ce sens dans différents centres où les grèves se préparaient déjà).
- 55. Ainsi, conclut le gouvernement, les arrestations ont été opérées sur la base des normes pénales et procédurales en vigueur sans qu'ait été appliqué le décret-loi royal du 26 janvier 1979 sur la sécurité du citoyen; ce dernier texte ne prévoit aucune mesure de police contre les piquets de grève ou les groupes de grévistes.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 56. Comme le comité l'a déjà signalé, notamment dans une autre affaire relative à l'Espagne, l'arrestation d'un grand nombre de dirigeants et de militants syndicaux comporte des risques particuliers d'abus et des dangers pour la liberté syndicale.
- 57. Dans le cas présent néanmoins, un certain nombre de syndicalistes arrêtés ont été relâchés peu après et il ressort des informations communiquées tant par les plaignants que par le gouvernement que les autres personnes arrêtées ont été libérées également après avoir fait l'objet d'une instruction judiciaire parce qu'ils étaient soupçonnés d'avoir commis des actes de violence ou d'intimidation à l'occasion de grèves, notamment lors de piquets de grève.
- 58. A ce dernier propos, le comité estime que le seul fait de participer à un piquet de grève et d'inciter fermement, mais pacifiquement, les autres salariés à ne pas rejoindre leur poste de travail ne peut être considéré comme une action illégitime. Il en va toutefois autrement lorsque le piquet de grève s'accompagne de violences ou d'entraves à la liberté du travail par contrainte exercée sur les non grévistes, actes qui dans beaucoup de pays sont punis par la loi pénale. Le comité estime que des poursuites exercées dans ces circonstances ne constituent pas une atteinte à la liberté syndicale, d'autant que les inculpés ont été régulièrement soumis aux autorités judiciaires compétentes conformément aux règles de la procédure pénale ordinaire.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 59. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration de décider que cette affaire n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.