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Informe definitivo - Informe núm. 137, 1973

Caso núm. 706 (Uruguay) - Fecha de presentación de la queja:: 29-JUN-72 - Cerrado

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  1. 30. La plainte de la Centrale latino-américaine de travailleurs figure dans une communication en date du 29 juin 1972. La Confédération mondiale du travail l'a appuyée dans une communication en date du 22 août 1972.
  2. 31. Le gouvernement a présenté ses observations sur cette plainte dans une communication en date du 26 mars 1973.
  3. 32. L'Uruguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 33. Les plaignants déclarent avoir été informés par l'organisation nationale qui leur est affiliée en Uruguay que, le 5 mai 1972, est décédé l'un de leurs meilleurs militants, M. Luis Batalla, qui travaillait dans la construction, des suites des tortures qui lui avaient été infligées dans une unité militaire située à l'intérieur du pays. Selon les plaignants, l'autopsie a permis de constater que la victime avait le foie éclaté, des plaies à la tête et aux talons et portait sur tout le corps des hématomes dus aux coups reçus.
  2. 34. Les observations très détaillées du gouvernement au sujet de cette plainte sont résumées ci-après. M. Luis Carlos Batalla avait été arrêté le 22 mai 1972 après que l'on eut reconnu son appartenance à l'organisation séditieuse qui se donne le nom de mouvement de libération nationale (Tupamaros). L'enquête fit apparaître qu'il avait été recruté pour cette organisation environ un an auparavant. Après avoir joué un certain rôle dans le domaine du renseignement, il acquit une plus grande importance au sein du mouvement subversif en devenant recruteur et chef de groupe. Le 4 avril 1972, il passa à la clandestinité et gagna un camp de l'organisation. Là, et ensuite dans la ville de Treinta y Tres, il prépara l'assassinat d'un officier des forces armées et d'un officier de la police, ainsi que l'occupation des studios de la radio locale, d'où devait être diffusé un communiqué expliquant les raisons de cet acte.
  3. 35. Le 3 mai 1972, on le fit rechercher par la police, et, jusqu'à son arrestation, le 22 mai, il se cacha en divers endroits. Il décéda le 24 mai 1972 dans une unité militaire du département de Treinta y Tres. M. Batalla aurait été victime d'an évanouissement après avoir été sorti du local où on l'avait interrogé et il se serait heurté la tête sur le rebord d'une plate-bande. Le chef du service sanitaire de l'unité militaire diagnostiqua, en l'absence de tout signe extérieur pouvant indiquer une autre cause, la °mort à la suite d'une éventuelle attaque cardiovasculaire ou cérébrale. On décida sur-le-champ de faire intervenir le juge d'instruction militaire, qui ordonna une autopsie. Celle-ci fut pratiquée le 25 mai et permit de diagnostiquer une "mort par anémie aiguë résultant d'un éclatement du foie". Il fallait tenir compte, selon le médecin, du coup reçu par M. Batalla lorsqu'il tomba évanoui et de son état de faiblesse évidente à la suite de la mauvaise alimentation et de la fatigue inhérentes à sa condition de fugitif.
  4. 36. Le chef de la région militaire en cause se rendit sur-le-champ à Montevideo, où il eut une entrevue avec le ministre de la Défense nationale. Il fut chargé lors de cette entrevue de procéder personnellement à une enquête complète sur les circonstances du drame, étant entendu que l'on écarterait immédiatement les chefs et officiers présumés être impliqués dans cette affaire.
  5. 37. Selon le juge d'instruction militaire, l'enquête visant à éclaircir les faits se poursuit au titre de la procédure de l'instruction préalable.
  6. 38. Dans sa communication, le gouvernement déclare ce qui suit: "Le fait qui motive la plainte en question s'inscrit dans le cadre d'une grave campagne de subversion terroriste contre laquelle ont dû lutter sans répit les forces que la Constitution et les lois destinent à la défense de l'ordre juridique national. Il no s'agissait pas, en l'occurrence, de lutter contre des actes constituant des délits pénaux ordinaires, ni d'un affrontement ouvert avec la force publique. On se trouvait devant l'une des formes les plus perfectionnées du terrorisme, peut-être l'une des plus perfectionnées au monde, et, sans doute, l'une des plus dangereuses et extrêmes. Au cours de cette lutte, on a vu défiler, devant les juges d'instruction, des centaines de prévenus, on a multiplié les enquêtes, les recherches, les interrogatoires, etc., au point d'arriver à des chiffres vraiment extraordinaires. Tout cela a exigé, il est superflu de le rappeler, un labeur énorme et dangereux, comportant beaucoup de dévouement et de sacrifices, mais aussi des horaires no laissant généralement pas de place au moindre repos."
  7. 39. Le gouvernement conclut en disant que le Parlement, non content de procéder à des enquêtes administratives et judiciaires, a exercé la fonction de contrôle qui lui incombe. Le ministre de la Défense nationale a été convoqué à la Chambre des représentants pour expliquer les circonstances du décès de M. Batalla. Après qu'il eut fourni les renseignements demandés, elle approuva la motion suivante: "La Chambre des représentants exprime sa confiance aux forces armées de la République et se déclare convaincue que, fidèles à leur tradition historique inaltérable, elles sauront imposer l'application des dispositions constitutionnelles et légales qui prescrivent, en toute circonstance, le respect de la dignité de la personne humaine. Devant les faits regrettables qui ont motivé cette convocation, et dont ressort la confirmation qu'un citoyen est mort des suites des mauvais traitements qu'il a subis lors de sa détention, elle exige que les coupables soient recherchés, identifiés et punis avec la plus grande célérité."

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 40. Le comité prend note de ces informations et no peut que déplorer les circonstances qui ont entouré le décès de Luis Carlos Batalla, telles qu'elles apparaissent dans les déclarations du gouvernement. Le comité a fait valoir à de nombreuses reprises que tout gouvernement doit veiller au respect des droits de l'homme et, en particulier, du droit qu'a toute personne détenue ou inculpée à bénéficier des garanties qu'offre une procédure régulière, entamée le plus rapidement possible. Les garanties d'une procédure judiciaire régulière no doivent pas simplement figurer dans la loi, mais être appliquées dans la pratique. Ainsi, le comité a toujours accordé une grande importance à ce que, dans tous les cas, y compris dans ceux où l'on accuse des syndicalistes de délits de caractère politique ou de droit commun, les intéressés soient jugés le plus rapidement possible par une autorité judiciaire impartiale et indépendante. En ce qui concerne plus particulièrement l'allégation de mauvais traitements, le comité souligne l'importance qu'il a toujours attachée au droit qu'ont les syndicalistes, de même que toute autre personne, de jouir des garanties qu'offre une procédure judiciaire régulière, conforme aux principes qui figurent dans la Déclaration universelle des droits de l'homme.
  2. 41. De toute façon, le comité estime que, dans le cas présent, il a reçu du gouvernement des informations qui démontrent de façon suffisamment précise que les mesures prises n'avaient rien à voir avec l'exercice des activités syndicales, mais qu'elles étaient le résultat d'activités étrangères aux occupations syndicales de M. Luis Carlos Batalla.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 42. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de prendre note des informations détaillées fournies par le gouvernement, et de déplorer les circonstances qui ont entouré la mort de Luis Carlos Batalla, telles qu'elles apparaissent dans ces informations;
    • b) de rappeler l'importance qu'il attribue aux principes énoncés au paragraphe 40;
    • c) de décider, pour les motifs indiqués au paragraphe 41, que ce cas n'appelle pas un examen plus approfondi de sa part.
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