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  1. 48. La plainte du Secrétariat professionnel international de l'enseignement est contenue dans une communication en date du 21 avril 1970 adressée directement à l'OIT. Le texte de la plainte a été transmis, pour observations, au gouvernement des Etats-Unis. Celui-ci, par une communication datée du 18 mai 1970, a déclaré qu'il comptait répondre aux allégations une fois qu'il aurait reçu les informations complémentaires que l'organisation plaignante était en droit de présenter dans un délai d'un mois, conformément à la procédure en vigueur.
  2. 49. Etant donné que l'organisation plaignante n'a pas usé de ce droit, le gouvernement a été prié de communiquer ses observations sur la plainte originale; en outre, le comité a indiqué au gouvernement certains points précis sur lesquels il souhaitait que celui-ci fournisse des informations. Ces informations ont été transmises par une communication en date du 15 juillet 1971.
  3. 50. Les Etats-Unis n'ont ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 51. La plainte a trait au fait que M. David Selden, président de la Fédération américaine des enseignants, a été incarcéré pour avoir participé à un piquet de grève. Les plaignants font valoir que les mesures prises contre cette fédération et son président sont en criante opposition avec la recommandation concernant la condition du personnel enseignant et avec les instruments de l'OIT relatifs à la liberté syndicale et à la négociation collective. Selon les plaignants, le Syndicat des enseignants de Newark a été en mesure, grâce à cette grève, de conclure une convention collective assurant une amélioration substantielle de la situation des étudiants comme des enseignants. Sans cette action, font-ils observer, la dégradation de la situation n'aurait fait que s'accentuer. Relevant, en outre, que les amendes et peines de prison qui ont été infligées l'ont été après la signature de la convention, ils sollicitent l'appui de MIT en vue de mettre fin aux recours, aux injonctions judiciaires dans les cas de conflits sociaux au sein des services publics, dans la mesure où ces conflits ne menacent pas directement la sécurité de l'Etat.
  2. 52. Le gouvernement fait valoir que, dans le présent cas, on ne peut relever aucune violation des droits syndicaux ou des instruments internationaux cités par les plaignants. Le gouvernement fait observer que la grève est interdite aux membres de la fonction publique par la loi du New Jersey, Etat où la grève a eu lieu. L'octroi de ce droit aux fonctionnaires doit être expressément mentionné dans la législation et non déduit. Le gouvernement ajoute que la loi du New Jersey sur les rapports entre employeurs et employés, telle que modifiée par le chapitre 303 de la loi de 1968 entrée en vigueur le 13 septembre 1968, prévoit des procédures de médiation et d'arbitrage en cas de conflits du travail dans la fonction publique, mais n'accorde nullement le droit de grève dans ce secteur. En outre, le gouvernement déclare que les injonctions judiciaires prononcées en cas de grève ou de piquets déclarés illégaux font, aux Etats-Unis, partie intégrante des lois sur le travail, tant sur le plan fédéral que sur celui des Etats et que la fréquence accrue de ces injonctions ne fait que refléter l'augmentation de ce que l'on a toujours considéré aux Etats-Unis comme grève et activités concomitantes illégales.
  3. 53. Le gouvernement donne l'exposé suivant des faits se rapportant au conflit qui a donné lieu aux allégations. Le 5 décembre 1969, en application de la loi du New Jersey sur les rapports entre employeurs et employés, la Commission des rapports professionnels dans la fonction publique a homologué le Syndicat des enseignants de Newark, section locale 481, affilié à la Fédération américaine des enseignants (AFL-CIO), comme agent représentatif pour les négociations collectives intéressant les enseignants membres des unités correspondantes des écoles publiques de la ville de Newark (New Jersey). Ces écoles sont dirigées, équipées et entretenues par le Bureau de l'enseignement de Newark (comté d'Essex). Ce bureau est un corps constitué qui dépend du gouvernement de l'Etat du New Jersey. A la suite de cette homologation, une commission négociatrice du Bureau de l'enseignement et des représentants du syndicat se sont réunis le 12 décembre 1969 et se sont mis d'accord sur les principes à suivre pour négocier une nouvelle convention pour les enseignants. Le syndicat a remis à la commission négociatrice, le 30 décembre 1969, un projet de convention. Lors de cette réunion, et d'une autre tenue le 5 janvier 1970, la commission a informé le syndicat que le budget du Bureau de l'enseignement serait présenté le 1er février 1970 et lui a demandé, en conséquence, d'examiner en priorité les clauses budgétaires du projet de convention. Le syndicat n'aurait pas accepté cette suggestion. Les négociations sur l'ensemble du contrat se sont ensuite poursuivies à la cadence d'une réunion par jour, dépassant au 29 janvier 1970 une durée totale de deux cents heures. A mi-cours de ces réunions, le syndicat a fait savoir qu'il adopterait, à partir du 31 janvier 1970, le principe « sans contrat, pas de travail ». Il a rejeté les propositions budgétaires de la commission négociatrice. Le 31 janvier 1970, la Chancellerie, division du Tribunal supérieur du New Jersey (comté d'Essex), a rendu une ordonnance provisoire d'interdiction, enjoignant au syndicat de s'abstenir de la grève envisagée, de ne pas former de piquets de grève et de ne se livrer à aucune autre activité propre à favoriser la grève. Le 10 février 1970, la Cour a reconnu le syndicat et ses représentants coupables de violation de l'ordonnance d'interdiction et a déclaré qu'après l'arrestation de toute personne persistant à de telles violations elle jugerait s'il y aurait lieu d'entamer des poursuites pour refus d'obtempérer.
  4. 54. Le gouvernement ajoute que le syndicat, passant outre à l'ordonnance d'interdiction, a déclenché la grève le 2 février 1970 et fermé les écoles de la ville, les plus importantes de l'Etat, puisqu'elles groupent 78 000 élèves; le 18 février 1970, M. David Selden, président de la Fédération américaine de l'enseignement, a été arrêté pour participation active à un piquet de grève placé devant l'école primaire de McKinley Street et accusé de refus d'obtempérer pour être passé outre à l'ordonnance d'interdiction. Il a refusé l'assistance de l'avocat du Syndicat des enseignants de Newark et a également refusé sa mise en liberté sous caution de 2 500 dollars. Les autres personnes arrêtées au même moment ont été relaxées lorsqu'elles se sont déclarées résidents du New Jersey; la caution avait été exigée de M. Selden parce qu'il habite en dehors de l'Etat.
  5. 55. Le magistrat qui a présidé au procès en refus d'obtempérer intenté contre M. Selden (qui a eu lieu le 9 mars 1970) a jugé qu'« il a délibérément participé à un piquet de grève devant l'école McKinley et a, par ce fait et en d'autres manières, favorisé et encouragé la grève menée contre le Bureau de l'enseignement de Newark, encourageant ainsi les enseignants de Newark et agissant de concert avec eux pour entretenir cette grève ». M. Selden a été condamné à soixante jours de prison au pénitencier du comté d'Essex, sous déduction du temps qu'il y avait déjà passé. Les sources locales indiquent que M. David Selden a été emprisonné au pénitencier du comté d'Essex à Cadwell, New Jersey, du 13 mars au 1er mai 1970.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 56. Le comité a toujours appliqué le principe selon lequel les allégations relatives au droit de grève relèvent de sa compétence dans la mesure où elles intéressent l'exercice des droits syndicaux. En ce qui concerne les services essentiels ou la fonction publique, le comité a toujours insisté sur l'importance qu'il y a, lorsque les grèves sont interdites ou soumises à des restrictions dans ces services, à ce que soient instituées des garanties adéquates pour protéger les intérêts des travailleurs ainsi privés d'un moyen essentiel de faire valoir leurs intérêts professionnels. Il a également toujours fait observer que ces restrictions doivent s'assortir de procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et expéditives, auxquelles les intéressés peuvent participer à tous les stades, les sentences arbitrales rendues devant être intégralement et promptement exécutées.
  2. 57. Dans le présent cas, le comité note que les grèves des membres de la fonction publique sont interdites dans l'Etat du New Jersey mais que, aux termes de la loi du New Jersey sur les rapports entre employeurs et employés, qui s'applique aux fonctionnaires, des procédures de négociation, de médiation et d'arbitrage de large portée sont prévues pour le règlement des conflits du travail dans le secteur public. Le comité note, toutefois, que le recours à l'arbitrage est facultatif puisqu'il suppose le consentement des parties. Quoi qu'il en soit, la grève a été déclenchée alors que les négociations étaient encore en cours, la raison invoquée étant qu'aucun contrat n'avait été conclu à une date donnée, interrompant ainsi le fonctionnement normal du mécanisme de règlement des conflits prévu par la loi. Le comité note en outre que, en vertu d'une ordonnance provisoire d'interdiction, il a été enjoint au syndicat de s'abstenir de la grève envisagée, de ne pas former des piquets de grève et de ne se livrer à aucune autre activité propre à favoriser la grève. Le syndicat a passé outre à cette ordonnance judiciaire et c'est à la suite de la violation de ladite ordonnance que M. David Selden a été inculpé et, ultérieurement, incarcéré après une procédure devant les tribunaux.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 58. Dans ces conditions, le comité est d'avis que, eu égard aux principes énoncés ci-dessus concernant les grèves dans la fonction publique, il n'y a pas eu de violation des droits syndicaux dans le présent cas. En conséquence, le comité recommande au Conseil d'administration de décider que les allégations et, partant, le cas dans son ensemble n'appellent pas un examen plus approfondi.
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