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- 354. La plainte du Syndicat des travailleurs congolais est contenue dans un télégramme en date du 19 octobre 1963, adressé directement à l'O.I.T et explicité par une lettre portant la même date. Ces deux communications ont été transmises au gouvernement pour observations par deux lettres datées respectivement des 25 octobre et 20 novembre 1963. Le gouvernement a répondu par deux communications en date des 3 janvier et 12 février 1964.
- 355. Le Congo (Léopoldville) n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 356. Les plaignants allèguent que, le 15 octobre 1963, alors qu'il se trouvait en tournée d'inspection des sections locales du Syndicat des travailleurs congolais, M. Raymond Beya, président national de cette organisation, aurait été arrêté, arbitrairement incarcéré et maltraité par les autorités provinciales du Nord-Kivu.
- 357. Dans sa réponse en date du 3 janvier 1964, le gouvernement déclare que le Syndicat des travailleurs congolais n'a pas encore été agréé par le gouvernement en qualité d'association professionnelle et que, dès lors, il ne saurait être admis à exercer des activités syndicales. En effet, poursuit le gouvernement, le décret du 25 janvier 1957, relatif à l'exercice du droit d'association des habitants du Congo, dispose, en son article 2, que sont seules autorisées les associations ayant obtenu l'agréation suivant des modalités déterminées par des mesures réglementaires; l'article 6 prévoit des peines contre quiconque aura participé au fonctionnement d'une association professionnelle exerçant ses activités en contradiction avec la législation, ce qui est le cas notamment lorsque l'association n'est pas agréée.
- 358. Cette législation, déclare le gouvernement, qui impose l'agréation préalable aux syndicats, est toujours en vigueur « en attendant d'être abrogée et éventuellement remplacée par des dispositions conformes aux contingences actuelles ». Le gouvernement indique qu'elle a pour but de mettre le syndicalisme naissant à l'abri des mouvements politiques, dans l'intérêt même des affiliés. Dans la pratique, toutefois, précise le gouvernement, les associations professionnelles sont admises à fonctionner en tant que telles, avant même d'avoir obtenu l'agréation, pour autant que leur activité ne trouble pas l'ordre public.
- 359. En ce qui concerne le mouvement intitulé « Syndicat des travailleurs congolais », dont, déclare le gouvernement, l'existence n'est connue que depuis environ un an par les autorités, rien ne prouve jusqu'à présent qu'il s'agisse d'un véritable syndicat, c'est-à-dire d'un mouvement qui résulte de la volonté commune d'un groupe de travailleurs et dont les buts soient authentiquement syndicaux. En effet, poursuit le gouvernement, il peut s'agir d'un «bureau d'affaires », n'ayant du syndicat que le nom, «créé en dehors d'un mouvement d'aspiration des travailleurs et s'adressant aux travailleurs dans le but de procurer une activité à ses fondateurs ».
- 360. Le gouvernement - toujours dans sa communication du 3 janvier 1964 - déclare ignorer jusqu'à présent si les faits allégués se sont réellement produits. D'ailleurs, poursuit-il, même en admettant qu'ils se soient produits, on ne saurait admettre a priori que c'est en raison d'activités déployées en vue de la défense des travailleurs que M. Beya aurait été arrêté: « L'arrestation éventuelle a pu avoir pour motif un délit de droit commun, la qualité de syndicaliste ne peut, en effet, conférer ni privilège ni immunité quelconque; si un délit de droit commun a été commis à l'occasion d'une activité syndicale, les autorités compétentes ont le droit - et le devoir - de constater et d'instruire l'infraction, et d'exercer contre son auteur les moyens légaux de la procédure. »
- 361. Dans sa communication du 3 janvier 1964, le gouvernement déclare enfin avoir demandé aux autorités locales de lui fournir un rapport sur les événements et, notamment, sur les motifs de l'arrestation opérée au cas où celle-ci aurait effectivement eu lieu. Un même rapport a été demandé aux autorités judiciaires. Le gouvernement indique que l'O.I.T sera mise au courant du résultat de ces demandes lorsque le gouvernement lui-même en aura eu connaissance.
- 362. En terminant, le gouvernement déclare pouvoir affirmer qu'à la date de l'envoi de sa communication, M. Beya se trouvait en liberté.
- 363. Par une communication en date du 12 février 1964, reçue trop tard pour avoir permis au Comité de l'examiner quant au fond lors de sa 36ème session (20-21 février 1964), le gouvernement a fourni les informations complémentaires annoncées dans sa communication précédente et dont la nature est précisée au paragraphe 361 ci-dessus.
- 364. Il résulte de ces informations que M. Beya a été condamné en vertu d'un jugement régulièrement rendu le 17 octobre 1963 par le Tribunal de police de Butembo, qui, comme tous les tribunaux de police - qui existent dans chaque territoire et dans chaque localité classée comme « ville » --, est habilité à connaître des infractions punissables au maximum de deux mois de servitude pénale et de 2.000 francs d'amende ou d'une de ces peines seulement. Il ressort également des informations fournies par le gouvernement que M. Beya a été remis en liberté le 19 décembre 1963, une fois sa peine purgée.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 365. Le Comité constate que si le gouvernement, dans sa dernière série d'informations, fait état d'un jugement qui aurait conduit l'intéressé à purger une peine de prison, il s'abstient de préciser - comme il avait laissé entendre qu'il le ferait (voir paragr. 361 ci-dessus) - les motifs invoqués par le Tribunal pour justifier sa décision à l'encontre de M. Beya.
- 366. Le Comité tient à rappeler à ce sujet que, dans tous les cas où une affaire faisait l'objet d'une action devant une instance judiciaire nationale, pourvu que la procédure suivie soit assortie des garanties d'une procédure judiciaire régulière, le Comité, estimant que la décision intervenue était susceptible de lui fournir d'utiles éléments d'information dans son appréciation des allégations formulées, a décidé d'ajourner l'examen du cas en attendant d'être en possession du résultat des procédures engagées.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 367. En l'espèce, le Comité juge opportun de suivre la même pratique en recommandant au Conseil d'administration de demander au gouvernement de bien vouloir lui communiquer le texte du jugement qui a abouti à l'incarcération de M. Beya ainsi que celui de ses considérants et, en attendant, d'ajourner l'examen du cas.