National Legislation on Labour and Social Rights
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La commission a pris note du rapport du gouvernement et de la discussion qui a eu lieu à la Commission de la Conférence en 1991 au sujet des questions soulevées dans sa précédente observation.
1. La commission note que le gouvernement a réitéré sa position selon laquelle la décision présidentielle no 214 de 1978 n'est pas contraire à l'article 1 de la convention puisqu'elle protège les religions sans discrimination entre elles et vise à combattre toutes les formes de fondamentalisme et de terrorisme en vue de maintenir les valeurs de la communauté et de promouvoir le bien-être de la population, comme le permet l'article 4 de la convention.
La commission rappelle que la décision présidentielle no 214 concernant les principes de la protection du front intérieur et de la paix sociale contient, en particulier, une disposition selon laquelle "quiconque est convaincu de soutenir des principes contraires ou portant atteinte aux lois divines ne peut occuper un poste supérieur dans l'administration publique ou dans le secteur public, ni publier d'articles dans les journaux ou exercer un travail dans un moyen d'information quelconque ou un travail de nature à influencer l'opinion publique". Deux lois adoptées en application de ce texte, à savoir la loi no 33 de 1978 sur la protection du front intérieur et de la paix sociale et la loi no 95 de 1980 sur la protection des valeurs, contiennent des dipositions similaires. Aux termes de l'article 2 de la loi no 33, "quiconque est convaincu, après instruction menée par le Procureur général socialiste (...) d'avoir appelé ou participé à des appels en faveur de doctrines comportant un rejet des lois divines ou s'opposant à leur enseignement, ne peut occuper un poste supérieur de l'Etat ou du secteur public impliquant un pouvoir d'orientation ou de commandement, ou un poste ayant de l'infuence sur l'opinion publique, ni aucun poste de membre délégué au sein des conseils d'administration des sociétés et organismes publics ou des établissements de presse". De même, aux termes de l'article 4 de la loi no 95, tout individu dont la responsabilité est établie comme ayant porté atteinte aux valeurs fondamentales du peuple, dont notamment les droits et valeurs religieuses du peuple, sera condamné, pour une période allant de six mois à cinq ans, à "l'interdiction d'être candidat ou d'être nommé aux postes de président ou de membre des comités directeurs ou des conseils d'administration des sociétés ou des organismes publics" et "d'occuper des postes ou de remplir des fonctions pouvant influencer l'opinion publique ou être liées à l'éducation des nouvelles générations". Selon le même article, les personnes en question sont transférées à un autre poste en conservant leur salaire et leurs droits à l'ancienneté à moins "qu'elles n'en soient privées pour un motif d'ordre juridique".
La commission note que, selon le représentant gouvernemental à la Conférence, de nombreuses dispositions contraires aux principes d'égalité contenus dans la Constitution égyptienne ont déjà été annulées, ce qui a permis de respecter les principes de non-discrimination; de plus, dans un rapport précédent, le gouvernement avait précisé que ces dispositions ne sont pas utilisées dans la pratique et qu'à l'heure actuelle il n'existe aucune personne qui puisse être sanctionnée en vertu de cette décision.
La commission se doit de rappeler encore une fois qu'il convient d'assurer la conformité dans leur teneur comme dans leur application des dispositions précitées avec l'article 1, paragraphe 1 a), de la convention, relativement à toute exclusion ou préférence fondée sur la religion ou sur l'expression d'opinions liées aux valeurs morales. La commission souligne que, dans son Etude d'ensemble de 1988 sur l'égalité dans l'emploi et la profession, elle a rappelé au paragraphe 127 que "des critères tels que l'opinion politique, l'origine nationale ou la religion pourraient être pris en considération au titre des qualifications nécessaires pour certains emplois impliquant des responsabilités particulières, mais qu'au-delà de certaines limites cette pratique entre en conflit avec les dispositions de la convention". Il apparaît à la commission que les dispositions de la décision présidentielle no 214 va au-delà de ce qui pourrait être considéré comme conforme à la convention.
Par ailleurs, la commission rappelle que la manifestation d'opinions ou de croyances religieuses, philosophiques ou politiques ne saurait être considérée en elle-même comme permettant l'application de l'exception prévue à l'article 4 de la convention pour les activités préjudiciables à la sécurité de l'Etat, pour autant qu'il n'y ait pas recours ou appel à des méthodes violentes (la commission prie le gouvernement de se référer à cet égard au paragraphe 135 de l'étude d'ensemble précitée).
Par conséquent, la commission prie encore une fois le gouvernement de faire son possible pour modifier ces dispositions afin d'assurer à tout individu, indépendamment de son appartenance religieuse ou de ses convictions et de leur expression, l'application en droit comme en fait du principe de non-discrimination en matière d'emploi et de profession. La commission veut croire que, dans son prochain rapport, le gouvernement l'informera des mesures prises dans ce sens.
2. La commission rappelle qu'elle avait soulevé également l'incompatibilité de l'article 18 de la loi no 148 de 1980 relative au pouvoir de la presse avec les principes de la convention. Cet article interdit la publication, la participation à la publication ou la propriété de journaux à certaines catégories de personnes (les personnes frappées d'une interdiction d'exercer leurs droits politiques ou de constituer des partis politiques, celles qui professent des doctrines rejetant les lois célestes et celles condamnées par la Cour des valeurs morales). La commission a constaté en outre que la loi no 33 précitée pose aux membres du Syndicat des journalistes, notamment des limites à la liberté de publication ou de diffusion par voie de presse ou par tout autre moyen d'information, d'articles portant atteinte, entre autres, "au régime socialiste démocratique de l'Etat" ou "aux acquis socialistes des ouvriers et des paysans" et les soumet à des sanctions disciplinaires en cas d'infraction.
La commission note que, dans sa déclaration à la Commission de la Conférence, le représentant gouvernemental a déclaré que l'article 18 ne restreint pas le droit du citoyen d'exprimer ses idées moyennant les différents moyens d'information et que la loi no 148 sera abrogée lors de la révision de la législation sur la presse.
La commission rappelle que ces dispositions législatives, dans la mesure où elles peuvent servir de base à une discrimination fondée sur l'opinion politique ayant pour effet d'altérer ou de détruire l'égalité de chances et de traitement en matière d'emploi et de profession de ces personnes, sont contraires à l'article 1, paragraphe 1 a), de la convention. La commission a noté que, dans une lettre en date du 28 janvier 1992, le gouvernement indique être en train de procéder à la révision de la législation nationale afin de la mettre en harmonie avec les conventions internationales. Elle veut croire que le gouvernement tiendra compte, à cette occasion, de tous ses commentaires sur l'application de la convention et qu'il fera tout son possible pour que les dispositions susmentionnées soient, dans un très proche avenir, mises en conformité avec la convention au regard de l'article 1, paragraphe 1 a), de la convention. Elle le prie de la tenir informée de toute action entreprise en ce sens.
[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 80e session.]