ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Report in which the committee requests to be kept informed of development - Report No 348, November 2007

Case No 2497 (Colombia) - Complaint date: 31-MAR-06 - Closed

Display in: English - Spanish

  1. 379. La plainte figure dans une communication conjointe de la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT) et de la Confédération des retraités de Colombie (CPC) datée de mars 2006.
  2. 380. Dans une communication datée du 6 octobre 2006, le gouvernement remet en cause le caractère syndical de la plainte. Cette plainte ayant trait à l’inexécution d’une convention collective, le gouvernement a néanmoins été invité à répondre à toutes les questions qui y étaient soulevées. Le gouvernement a fait part de ses observations dans une communication du 4 septembre 2007.
  3. 381. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 382. Dans leur communication de mars 2006, la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT) et la Confédération des retraités de Colombie (CPC) font état de ce qui suit: a) les intéressés (dont les noms sont mentionnés dans la communication) ont travaillé pendant plus de vingt ans à l’entretien des entreprises publiques de Pereira (département de Risaralda); b) les entreprises ont octroyé une pension de retraite à ces travailleurs par deux décisions, conformément à la convention collective de 1963 signée avec le syndicat; c) la convention collective de 1970 prévoit en son point 9 l’extension aux retraités ayant travaillé dix ans au service de l’entreprise d’une prime jusque-là réservée aux retraités totalisant vingt ans de service, au prorata des années effectuées; d) cette prestation est également prévue dans les conventions conclues en 1978, 1986, 1989, 1990, 1996 et 1997; e) les entreprises publiques de Pereira ont été démantelées pour former quatre entreprises indépendantes (Entreprise de nettoyage de Pereira S.A., Entreprise de télécommunications de Pereira S.A., Entreprise d’énergie électrique de Pereira S.A. et Entreprise pour l’approvisionnement en eau et la collecte des eaux usées de Pereira S.A.). Les obligations de l’entreprise d’origine envers le personnel retraité incombaient dès lors aux nouvelles sociétés, qui ont acquitté la prime régulièrement, conformément aux conditions établies par les conventions collectives.
  2. 383. Les organisations plaignantes indiquent que les entreprises ont suspendu de manière soudaine et unilatérale le versement de la prime visée. L’Entreprise d’énergie électrique de Pereira S.A. a interrompu les versements en décembre 1998, l’Entreprise de nettoyage de Pereira S.A. en juin 1999, l’Entreprise de télécommunications de Pereira S.A. en décembre 1998 et l’Entreprise pour l’approvisionnement en eau et la collecte des eaux usées de Pereira S.A. en juin 2001.
  3. 384. L’Association des retraités des entreprises publiques de la ville de Pereira a revendiqué le versement des primes auprès des instances judiciaires. Le deuxième tribunal du travail dans la circonscription de la ville de Pereira a cependant donné raison à l’entreprise au motif qu’après l’instauration de la prime par la convention collective de 1970 la loi no 4 de 1976 avait introduit une treizième mensualité, nouvelle prestation confirmée par l’article 50 de la loi no 100 de 1993. Dans sa décision, le tribunal rappelle que, conformément au paragraphe 2 de l’article 16 du Code du travail, «lorsqu’une nouvelle loi instaure une prestation déjà prévue par une convention ou sentence arbitrale, c’est la prestation la plus favorable au travailleur qui prévaut». Ce jugement est conforme à la décision du tribunal supérieur du district judiciaire de Pereira qui a estimé que, conformément à l’article 50 de la loi no 100 de 1993, les prestations établies par la loi prévalent sur celles qui sont prévues par les conventions.
  4. 385. Les organisations plaignantes soulignent que les conventions collectives postérieures à l’adoption de la loi susmentionnée faisaient toujours mention de la prime visée et que les versements n’ont été interrompus que plusieurs années après la promulgation de la loi, à des dates comprises entre 1998 et 2001.
  5. B. Réponse du gouvernement
  6. 386. Dans sa communication du 6 octobre 2006, le gouvernement déclare que la plainte concerne la protection du salaire et ne relève donc pas de la compétence du comité.
  7. 387. Dans sa communication du 4 septembre 2007, le gouvernement indique que la non-exécution du point 9 de la convention collective par les entreprises publiques de Pereira (Entreprise d’énergie électrique de Pereira, Entreprise de télécommunications de Pereira, Entreprise pour l’approvisionnement en eau et la collecte des eaux usées de Pereira et Entreprise de nettoyage de Pereira) se fonde sur la législation nationale. En effet, l’article 16 du Code du travail dispose comme suit: «Effet. 1. Les normes relatives au travail, du fait qu’elles relèvent de l’ordre public, produisent un effet général et immédiat; elles s’appliquent donc aussi aux contrats de travail en vigueur ou en cours au moment de leur promulgation; cependant, elles ne sont pas rétroactives, c’est-à-dire qu’elles restent sans effet sur les situations définies ou accomplies conformément aux lois précédentes.»
  8. 388. Il est précisé en outre au deuxième paragraphe du même article 16 que, «lorsqu’une nouvelle loi crée une prestation déjà octroyée par l’employeur à son bon vouloir, ou du fait d’une convention ou d’une décision arbitrale, c’est la prestation la plus favorable qui sera versée au travailleur».
  9. 389. Le gouvernement ajoute que l’article 7 de la convention collective prévoit par ailleurs ce qui suit: «Traitement le plus favorable. Si une nouvelle loi octroie à Sintraemsdes ou aux travailleurs des prestations d’un niveau supérieur aux prestations prévues par la présente convention, c’est l’avantage établi par la loi qui prévaudra, le cumul des prestations prévues de part et d’autre étant exclu; si les prestations octroyées par la nouvelle loi sont d’un niveau inférieur aux prestations prévues par la convention, c’est la convention qui prévaut, tout cumul étant aussi exclu.»
  10. 390. L’article 50 de la loi no 100 de 1993 dispose que: «Mensualité supplémentaire. Les personnes bénéficiant d’une pension de vieillesse ou de retraite, d’invalidité, de remplacement ou de survivant continueront de percevoir annuellement, en même temps que leur pension de novembre, dans la première quinzaine de décembre, une gratification correspondant à une mensualité de leur pension.»
  11. 391. L’article 142 de la même loi dispose comme suit: «Mensualité supplémentaire pour les pensionnés actuels. Les personnes bénéficiant d’une pension de retraite, d’invalidité, de vieillesse ou de survivant dans les secteurs public, officiel, semi-officiel, à tous les niveaux, dans le secteur privé, de l’Institut des assurances sociales, ainsi que les retraités et bénéficiaires de pensions de l’armée et de la police nationale pourront prétendre à l’octroi et au versement de trente (30) jours de la pension qui leur revient compte tenu du régime qui leur est applicable, somme qui sera versée avec la mensualité du mois de juin de chaque année à compter de 1994. Cette mensualité supplémentaire, plafonnée à quinze (15) fois le salaire mensuel minimum, sera versée par l’organe chargé d’acquitter la pension.»
  12. 392. Compte tenu du cadre juridique ainsi décrit et de la norme contenue dans les articles cités qui visent une amélioration de la prestation versée aux pensionnés, leur application se traduisant en effet par une augmentation du revenu, les entreprises citées ont suspendu pour une durée indéterminée le versement de la prime visée par l’article 77 de la convention collective. Cependant, elles n’ont pas dénoncé la convention collective, considérant qu’elles n’agissaient pas en violation de son article 77. Qui plus est, les entreprises ne sont pas favorables à la suppression de cette prestation dans la convention.
  13. 393. Les entreprises publiques de Pereira ont donc appliqué la loi directement aux bénéficiaires de pensions, considérant que c’était bien ce que prévoyait l’article 7 de la convention collective, qui indique en effet de façon claire et précise que les entreprises verseront, plutôt que les prestations établies par ce texte, toute prestation d’un niveau supérieur qui pourrait être prévue par la loi, sans autre modalité envisageable que l’application directe de la norme légale, le cumul des prestations octroyées de part et d’autre étant exclu. Il convient d’indiquer qu’une telle application n’entraîne pas l’obligation de dénoncer la convention, car c’est le principe du traitement le plus favorable aux travailleurs visés qui prévaut. Selon le gouvernement, la norme susmentionnée prévoit dans sa partie finale qu’en cas d’amoindrissement ultérieur de la prestation, soit en cas d’annulation de la loi considérée, la disposition de la convention demeure, les pensionnés pouvant donc toujours prétendre à l’avantage précédent.
  14. 394. Le gouvernement conclut à l’absence de toute violation aux dispositions de la convention no 154 au motif que les entreprises publiques de Pereira se sont fondées sur l’article 7 de la convention collective, qui porte sur le principe du traitement le plus favorable, pour appliquer la loi directement.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 395. Le comité observe que, dans le présent cas, la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT) et la Confédération des retraités de Colombie (CPC) allèguent que les sociétés ayant repris les activités des entreprises publiques de Pereira (Entreprise de nettoyage de Pereira S.A., Entreprise de télécommunications de Pereira S.A., Entreprise d’énergie électrique de Pereira S.A. et Entreprise pour l’approvisionnement en eau et la collecte des eaux usées de Pereira S.A.) ont suspendu de manière soudaine et unilatérale le versement d’une prime établie au bénéfice des pensionnés par la convention collective de 1963 et confirmée dans des conventions collectives postérieures (1970, 1978, 1986, 1989, 1990, 1996 et 1997). Cette interruption date de décembre 1998 dans le cas de l’Entreprise de télécommunications et de l’Entreprise d’énergie électrique, de juin 1999 dans le cas de l’Entreprise de nettoyage et de juin 2001 dans le cas de l’Entreprise pour l’approvisionnement en eau et la collecte des eaux usées.
  2. 396. Le comité prend note, tout d’abord, de ce que le gouvernement conteste sa compétence pour examiner ce cas étant donné qu’il traiterait de questions relatives à la protection du salaire. A cet égard, le comité doit préciser que la question qui est à l’étude dans le cas présent n’est pas la protection du salaire en tant que telle mais la non-exécution, de la part de plusieurs entreprises publiques, d’une convention collective qu’elles avaient elles-mêmes signée et qui avait trait à certaines clauses relatives à des prestations de retraites déterminées.
  3. 397. Le comité note que des procédures ont été engagées en vue du versement de la prime visée mais que l’instance compétente a débouté les demandeurs au motif qu’après l’instauration de la prime la loi no 4 de 1976 avait introduit une mensualité supplémentaire, prestation confirmée par l’article 50 de la loi no 100 de 1993. L’autorité judiciaire a estimé, conformément au paragraphe 2 de l’article 16 du Code du travail, que lorsqu’une nouvelle loi instaure une prestation déjà visée par une convention ou une sentence arbitrale c’est la prestation la plus favorable au travailleur qui doit être versée.
  4. 398. Le comité prend note que, selon le gouvernement, l’article 50 de la loi no 100 de 1993 introduit le versement d’une mensualité de pension supplémentaire. En conséquence, et compte tenu en outre de l’article 16 du Code du travail et de l’article 7 de la convention collective en vigueur, qui consacrent le principe du traitement le plus favorable, le versement de la prime précédemment octroyée aux pensionnés a été suspendu, alors que débutait le versement de la mensualité supplémentaire, prestation la plus favorable en l’espèce. Le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles les entreprises publiques de Pereira ont considéré la nouvelle législation comme étant la plus favorable et ont suspendu par conséquent le versement de la prime visée, sans dénoncer pour autant la convention collective en vigueur ni supprimer la clause établissant la prime. Le comité prend note en effet que, d’après le gouvernement, les entreprises publiques n’étaient pas favorables à la disparition de cette disposition de la convention, considérant que, si une réforme législative venait à supprimer la mensualité supplémentaire, les travailleurs ne seraient pas lésés pour autant et pourraient prétendre à nouveau à la prime antérieure.
  5. 399. Le comité observe par ailleurs que, comme indiqué par les organisations plaignantes, la disposition relative à la prime visée a continué de figurer dans plusieurs conventions collectives adoptées après l’entrée en vigueur de la loi no 100 de 1993 et que son versement a été interrompu entre cinq et huit ans seulement après l’adoption de cette loi. Le comité estime que, si le versement d’un mois de pension supplémentaire prévu par la nouvelle loi devait effectivement prévaloir sur le versement de la prime établie par la convention collective au bénéfice des pensionnés, la disposition correspondante aurait dû disparaître des conventions collectives négociées après la promulgation de la loi.
  6. 400. Le comité rappelle à cet égard que les conventions conclues doivent être contraignantes pour les parties. Il rappelle également, comme il a déjà eu l’occasion de le faire à propos d’un autre cas relatif à la Colombie, qu’une disposition légale qui autorise l’employeur à modifier unilatéralement la teneur d’une convention collective conclue antérieurement, ou qui contraint les parties à la renégocier, est contraire aux principes de la négociation collective. [Voir 344e rapport, cas no 2434, paragr. 791.] Conformément à ces principes, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les travailleurs de l’Entreprise de nettoyage de Pereira S.A., de l’Entreprise de télécommunications de Pereira S.A., de l’Entreprise d’énergie électrique de Pereira S.A. et de l’Entreprise pour l’approvisionnement en eau et la collecte des eaux usées de Pereira S.A., sociétés ayant succédé aux entreprises publiques de Pereira, reçoivent la prime établie au bénéfice des retraités par les conventions collectives signées après l’adoption de la nouvelle loi, au prorata de la période de validité de ces conventions sans que la même prestation soit payée deux fois. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 401. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
    • Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les travailleurs effectuant les travaux d’entretien des sociétés ayant succédé aux entreprises publiques de Pereira (Entreprise de nettoyage de Pereira S.A., Entreprise de télécommunications de Pereira S.A., Entreprise d’énergie électrique de Pereira S.A. et Entreprise pour l’approvisionnement en eau et la collecte des eaux usées de Pereira S.A.) reçoivent la prime établie au bénéfice des retraités par les conventions collectives signées après l’adoption de la nouvelle loi, au prorata de la période de validité de ces conventions sans que la même prestation soit payée deux fois. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer