206. Le comité a examiné ce cas à sa session de novembre 1995 et a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. (Voir le 300e rapport du comité, paragr. 399 à 427, approuvé par le Conseil d'administration à sa 264e session (novembre 1995).)
- 206. Le comité a examiné ce cas à sa session de novembre 1995 et a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. (Voir le 300e rapport du comité, paragr. 399 à 427, approuvé par le Conseil d'administration à sa 264e session (novembre 1995).)
- 207. Le gouvernement de Cuba a envoyé de nouvelles observations dans une communication datée du 12 septembre 1996.
- 208. Cuba a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas
- 209. Lors de l'examen antérieur du cas, étaient restées en instance une série d'allégations qui relevaient divers actes à l'encontre de dirigeants ou de syndicalistes d'organisations syndicales indépendantes: agressions, détentions, menaces et actes d'intimidation ou de harcèlement, le refus de reconnaître la personnalité juridique de la CTDC et un licenciement antisyndical.
- 210. L'organisation plaignante avait plus particulièrement signalé que:
- - selon les informations fournies par la Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba (CTDC), Mme Edith Lupe, secrétaire à l'organisation du Front syndical de la CTDC, a été citée à comparaître le 24 mai 1994 devant le Département de la sécurité de l'Etat, situé dans le quartier Capri de la municipalité d'Arroyo Naranjo à La Havane par le capitaine de ce corps. Là, le fonctionnaire susmentionné l'a menacée en termes grossiers et offensants. Il lui a dit qu'on allait "la faire disparaître ou l'emprisonner pour trois ans" si elle n'abandonnait pas ses activités dans les rangs de la CTDC. Après ces agressions verbales, elle a été entièrement déshabillée et a subi une fouille corporelle minutieuse. Ensuite, Edith Lupe a fait l'objet de nouvelles menaces et a été mise dans une cellule aménagée par les agents cubains pour intimider davantage encore les prévenus. Avant qu'elle ne quitte la cellule, le fonctionnaire Cortina lui a adressé un avertissement sévère en lui disant que son domicile pourrait être attaqué par "la foule" qui lui lancerait des pierres, et qu'elle-même serait agressée et frappée par des "gens du voisinage";
- - le 2 août 1994, dans la 19e avenue du quartier Siboney, commune de Playa (La Havane), M. Lázaro Corp Yeras, secrétaire général de l'Union syndicale des travailleurs de Cuba (USTC) et son fils cadet, Ray Corp Morales, ont été violemment frappés à coups de bâton par trois hommes. Tous deux souffrent de graves traumatismes. La CISL indique qu'elle a des raisons de penser que les agresseurs étaient liés aux forces de sécurité cubaines. Cette agression est la cinquième en moins de trois mois contre M. Lázaro Corp.
- 211. Par ailleurs, dans sa dernière communication datée du 7 juillet 1995, l'organisation plaignante avait allégué que:
- - le Département de la sécurité de l'Etat harcèle sans relâche les membres du comité exécutif national et des fronts syndicaux composant la Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba (CTDC), notamment Juan Guarino Martínez Guillén (président), Jesús Cárdenas López (vice-président) et René José Montero Garay (secrétaire aux relations internationales). En outre, la CTDC a déposé les documents nécessaires à l'obtention de sa reconnaissance juridique, mais jusqu'à présent rien ne laisse espérer qu'elle pourra l'obtenir;
- - le 29 septembre 1994 à 13 heures, M. René José Montero Garay a été convoqué à l'Unité de la police nationale révolutionnaire (PNR) dont le siège se trouve à l'angle de la rue Dragones et de la rue Lealtad (centre de La Havane). A cette occasion, plusieurs fonctionnaires de ce corps répressif l'ont interrogé et l'ont menacé en l'avertissant que lui-même, Martínez Guillén et Jesús Cárdenas seraient envoyés en prison avec des peines de 12 à 15 ans s'ils continuaient de militer à la CTDC et de défendre la classe ouvrière cubaine. Par ailleurs, le 10 novembre 1994 à 14 h 40, la sécurité de l'Etat a arrêté MM. Juan Guarino Martínez Guillén, président de la CTCD, et Jésus Cárdenas López, vice-président de la même organisation. Ils ont été conduits au commissariat le plus proche où ils ont été brutalement interrogés;
- - selon les sources de l'organisation plaignante, M. Eduardo Lamas Campos, membre du Front syndical du centre de travail "Julio Antonio Mella", à Santiago de Cuba, (Oriente), a été expulsé de son lieu de travail simplement pour avoir protesté et réclamé de meilleures conditions de travail et d'alimentation, la nourriture fournie étant très insuffisante en quantité et en qualité.
- 212. Dans sa réponse, le gouvernement a mis l'accent sur la difficulté à trouver les informations concernant les personnes mentionnées dans la plainte. En effet, aucune de ces personnes ne possède la qualité de syndicaliste, les faits mentionnés ne sont pas de nature syndicale, ces personnes ne représentent aucun collectif de travailleurs, et elles n'ont de relations de travail avec aucune entreprise ou entité professionnelle à Cuba. Ces éléments placent le Comité de la liberté syndicale dans la situation d'avoir à connaître des faits n'ayant aucun rapport avec sa louable tâche de défense des libertés syndicales.
- 213. Se référant à diverses allégations, le gouvernement a envoyé les observations suivantes:
- - la plainte de la CISL fait mention d'une certaine Edith Lupe. Il y a erreur sur le nom de la personne ainsi que sur les faits relatés. A partir de certains éléments figurant dans la communication, il a été possible de connaître l'identité réelle de la personne ainsi que le déroulement réel des événements. Il s'agit de la citoyenne Enid Amelia Luque Rosales et non pas de Edith Lupe, comme cela est mentionné par la CISL. Le 24 mai, cette personne a été convoquée au neuvième poste de la police nationale révolutionnaire, situé dans le quartier Capri, où elle a fait l'objet d'un avertissement pour activités de provocation portant atteinte à l'ordre public, conformément aux dispositions de la législation. Elle avait été convoquée et entendue dans un des bureaux de poste de police mentionnés et non pas au Département de la sécurité de l'Etat, comme cela a été affirmé à tort par la CISL. Elle est restée peu de temps dans ces locaux, elle n'a pas été placée dans une cellule, pas plus qu'elle n'a fait l'objet d'une fouille corporelle. Le gouvernement indique que, selon les déclarations mêmes de la citoyenne Enid Amelia Luque Rosales, les activités de provocation qu'elle avait menées en compagnie de quatre mauvais éléments consistaient à donner des preuves et des garanties à la Section des intérêts des Etats-Unis à La Havane pour obtenir un visa lui permettant de quitter définitivement le pays. La citoyenne Enid Amelia Luque Rosales a quitté le pays en août 1994;
- - en ce qui concerne Lázaro Corp Yeras, le gouvernement déclare qu'il est totalement erroné de dire qu'il a été attaqué par des membres du ministère de l'Intérieur. Si ce citoyen prétendait qu'il avait fait l'objet d'un acte de violence de la part d'inconnus, il pouvait porter plainte à la police, ce qu'il n'a pas fait. Lázaro Corp Yeras a quitté le pays en septembre 1994 et s'est établi aux Etats-Unis;
- - les témoignages douteux tels que ceux concernant les personnes mentionnées dans la plainte, où il n'est précisé ni la véritable identité des personnes ni l'adresse de leur domicile, ni le nom et l'adresse des centres de travail où ils se disent dirigeants de collectifs de travailleurs, outre qu'ils n'ont même pas prouvé leur qualité de travailleurs à l'époque, devraient conduire le Comité de la liberté syndicale à agir avec circonspection;
- - il existe à Cuba 18 syndicats nationaux de branches regroupant près de 98 pour cent des travailleurs du pays. La liberté syndicale est exercée dans tous les centres de travail par les collectifs de travailleurs, et leurs représentants syndicaux sont proposés et élus par les travailleurs eux-mêmes. Dans le cadre du système de relations professionnelles de Cuba, les organisations syndicales participent, de manière systématique, à leurs divers niveaux et sous des formes larges et variées, à la prise de décisions intéressant les travailleurs. Selon le gouvernement, la CISL est mal informée; les faits sont déformés par des personnes peu scrupuleuses se présentant comme des syndicalistes, alors que ce qui est certain c'est que leurs activités n'ont rien à voir avec des activités syndicales et que leur but unique est d'obtenir des avantages personnels en s'abritant derrière la propagande et les mécanismes internationaux.
- 214. Le comité avait formulé les recommandations suivantes (voir le 300e rapport, paragr. 427):
- - le comité demande au gouvernement de diligenter une enquête judiciaire sur les lésions corporelles graves qui auraient été infligées au dirigeant syndical M. Lázaro Corp, et à son fils cadet, et de le tenir informé à cet égard;
- - en ce qui concerne les allégations relatives à la détention, aux menaces et aux actes de harcèlement dont a été victime Mme Enid Amelia Luque, secrétaire du Front syndical de la Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba, le comité demande au gouvernement de lui faire parvenir les informations et les éclaircissements mentionnés dans les conclusions afin qu'il puisse se prononcer sur les allégations avec des éléments suffisants (à cet égard, le comité avait cependant souligné dans ses conclusions que le gouvernement n'avait pas expliqué en quoi consistaient les "activités de provocation portant atteinte à l'ordre public" de Mme Enid Amelia Luque et de "quatre mauvais éléments" qui ont fait l'objet d'un "avertissement" dans les locaux de la police nationale ni en quoi consistait les "manifestations de réprobation" de sa conduite par des gens du voisinage ni quel a été le contenu de l'"avertissement" donné par la police nationale (voir le 300e rapport, paragr. 425));
- - enfin, constatant que le gouvernement n'a pas répondu aux allégations présentées par l'organisation plaignante dans sa communication du 7 juillet 1995, le comité demande au gouvernement d'envoyer des observations sur:
- - - le refus de reconnaissance de la personnalité juridique de la Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba (CTDC);
- - - la détention, le harcèlement et les menaces à l'encontre de divers dirigeants de la CTDC;
- - - l'expulsion de son centre de travail d'un syndicaliste du Front syndical du centre de travail "Julio Antonio Mella" pour avoir réclamé de meilleures conditions de travail.
B. Nouvelles observations du gouvernement
B. Nouvelles observations du gouvernement
- 215. Dans sa communication du 12 septembre 1996, le gouvernement déclare que les recherches menées ont permis de constater que M. Lázaro Corp Yeras et son fils n'ont pas été agressés par des "personnes liées aux forces de sécurité cubaines", comme le déclare l'organisation plaignante sans apporter aucune preuve. Une plainte formelle relative à de tels faits n'a été déposée dans aucune unité de la police. Par ailleurs, l'enquête a permis de constater que M. Lázaro Corp Yeras n'est pas un dirigeant syndical, ne représente aucun collectif de travailleurs et n'a de relations professionnelles avec aucun centre de travail. M. Lázaro Corp Yeras a quitté le pays en septembre 1994.
- 216. Au sujet des allégations relatives à Mme Enid Amelia Luque, le gouvernement signale qu'en plus de ce qu'il a déclaré dans sa réponse antérieure du 13 juillet 1995, qu'il confirme, il signale que, selon les recherches menées, la citoyenne Enid Amelia Luque a provoqué un scandale public et des troubles dans le voisinage de son domicile en proférant des phrases offensantes qui ont suscité des réactions de réprobation envers sa conduite parmi des gens du voisinage. Il n'y a pas eu d'actes de violence, mais seulement un scandale public, ce qui a nui aux règles de bon voisinage entre les habitants de l'endroit. Le gouvernement ajoute que l'avertissement dont il est fait mention a été donné conformément aux lois de procédure, lors d'une entrevue avec des instructeurs de la police au cours de laquelle l'intéressé est informé de la faute commise et que les faits en question ne doivent pas se répéter. Il est faux de dire que la citoyenne Enid Amelia Luque a été placée dans une cellule et qu'elle a fait l'objet d'une fouille personnelle. Elle est restée peu de temps dans les locaux du poste de police, uniquement pour remplir les formalités requises. La citoyenne Enid Amelia Luque n'est ni syndicaliste ni dirigeante syndicale et elle ne représente aucun collectif de travailleurs. Elle n'est employée par aucun centre de travail. Elle a quitté le pays en août 1994.
- 217. Quant aux allégations que la CISL a présentées dans sa communication du 7 juillet 1995, le gouvernement déclare que les recherches menées ont permis de se rendre compte qu'il n'existe dans aucune entreprise ou entité de travail de tout le pays un syndicat portant le nom de Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba. Les personnes mentionnées dans la communication de la CISL datée du 7 juillet 1995 dénommées: Juan Guarino Martínez Guillén, Jesús Cárdenas López et René José Montero Garay ne sont pas des dirigeants syndicaux, et ils n'ont pas fait l'objet de menaces ou de harcèlement. Les personnes mentionnées n'ont pas été proposées ni élues dans aucun centre de travail du pays en tant que représentant d'un collectif de travailleurs. Juan Guarino Martínez a quitté le pays en mars 1996.
- 218. Au sujet d'une prétendue expulsion d'un syndicaliste qui, selon les allégations de la CISL, serait membre d'un front syndical de la centrale "Julio Antonio Mella", dénommé Eduardo Lamas Campos, le gouvernement indique que les recherches menées ont permis de se rendre compte que la personne susmentionnée a fait l'objet de trois mesures disciplinaires administratives de changement de poste de travail pour absences injustifiées au travail et pour manque de respect envers ses supérieurs et collègues. Lesdites mesures ont été prises, conformément à la législation du travail en vigueur, et ont été acceptées par le travailleur qui n'a pas utilisé les moyens de recours prévus par la législation pertinente. Le 10 octobre 1992, il a donné son congé à ce centre de travail afin d'éviter une sanction pour des causes similaires à celles mentionnées plus haut. M. Eduardo Lamas Campos n'a jamais été proposé ni élu par les travailleurs de la centrale "Julio Antonio Mella" comme dirigeant syndical. Eduardo Lamas Campos a des antécédents pénaux. En 1986, il a été condamné par les tribunaux à une année de privation de liberté pour un délit de vol à main armée.
- 219. Le gouvernement déclare également que dans le centre de travail "Julio Antonio Mella" il n'existe aucun front syndical portant le nom de Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba. Les recherches menées ont permis de se rendre compte que dans ce centre il y a 77 sections syndicales appartenant au Syndicat national des travailleurs de l'industrie sucrière. Un total de 5 135 travailleurs sont affiliés à ces 77 sections, ce qui représente une affiliation de 100 pour cent. Les dirigeants syndicaux du centre "Julio Antonio Mella" ont été proposés et élus par les travailleurs eux-mêmes. Ils participent aux activités syndicales conformément aux règlements et statuts en toute liberté et n'ont dû demander l'autorisation à aucun organisme de l'Etat pour l'exercice de leurs activités de défense des droits et intérêts des travailleurs, conformément à ce qu'énonce l'article 13 du Code du travail. M. S. Eduardo Lamas Campos n'a jamais été proposé ni élu en tant que dirigeant syndical.
- 220. Le gouvernement précise que, dans le nouveau centre de travail où il a commencé à travailler après avoir donné son congé au centre Julio Antonio Mella, le Taller Pecuario, de la Empresa de Maquinaría Agrícola, M. Eduardo Lamas a de nouveau fait l'objet de sanctions pour s'être approprié de biens du centre de travail (700 plants de tomates). Comme on peut s'en rendre compte, les mesures disciplinaires imposées à M. Eduardo Lamas Campos sont dues à ses actes d'indiscipline au travail et ne sont pas liées à des activités syndicales.
- 221. Le gouvernement déclare en outre que la CISL déforme les faits et se base sur des personnes isolées qui ne représentent aucun collectif de travailleurs et qui, d'une manière ou d'une autre, ont adopté une conduite qui viole les lois en vigueur dans le pays, en se rendant coupables de faits qui n'ont rien à voir avec des activités syndicales; la CISL cherche à présenter ces personnes au comité comme des syndicalistes, alors qu'il est certain qu'aucune des personnes mentionnées n'a déployé des activités syndicales et ne représente aucun collectif de travailleurs. Le gouvernement prie le Comité de la liberté syndicale de conclure définitivement ce cas car il n'a pas trait à des activités syndicales protégées par la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 222. Le comité observe que les allégations restées en instance se réfèrent à divers actes perpétrés à l'encontre de dirigeants ou de syndicalistes d'organisations syndicales indépendantes: agressions, détentions, menaces graves, actes d'intimidation et de harcèlement, refus de reconnaissance de la personnalité juridique de la CTDC et licenciement antisyndical.
- 223. En ce qui concerne les allégations d'agressions graves commises à l'encontre de M. Lázaro Corp et de son fils cadet, le comité note que le gouvernement déclare que: 1) les recherches menées ont permis de constater qu'ils n'ont pas été attaqués par des personnes liées aux forces de sécurité cubaines, et qu'il n'existe pas de plainte formelle contre de tels faits; 2) M. Lázaro Corp Yeras n'est pas un dirigeant syndical, il ne représente aucun collectif de travailleurs et n'avait de relations professionnelles avec aucun centre de travail; 3) il a quitté le pays en septembre 1994. Tenant compte de ces déclarations et du fait que M. Corp a quitté le pays en septembre 1994, le comité conclut que dans ces circonstances il ne semble pas possible d'ouvrir une enquête judiciaire comme il l'avait demandé à sa session antérieure.
- 224. Quant aux allégations relatives à la détention, aux menaces et aux actes de harcèlement dont a été victime Mme Enid Amelia Luque, secrétaire du Front syndical de la Confédération des travailleurs de Cuba, le comité prend note du fait que le gouvernement reconnaît que l'intéressée est restée dans les locaux de la police, bien que pour peu de temps, et qu'elle a fait l'objet d'un avertissement, procédure prévue par la loi, l'informant de la faute commise et de ce que ces faits ne devaient pas se répéter. En revanche, le gouvernement dément que Mme Enid Amelia Luque était syndicaliste ou dirigeante syndicale, qu'elle ait été placée dans une cellule et fait l'objet d'une fouille corporelle, et souligne que le motif de l'avertissement était des phrases offensantes (le gouvernement n'en indique pas le contenu) qui ont provoqué un scandale public parmi les gens du voisinage. Vu les divergences existant entre la version de l'organisation plaignante et celle du gouvernement, le comité rappelle le principe selon lequel "les mesures privatives de liberté prises contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités syndicales, même s'il ne s'agit que de simples interpellations de courte durée, constituent un obstacle à l'exercice des droits syndicaux". (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition (révisée), 1996, paragr. 77.) Enfin, le comité prend note du fait que Mme Enid Amelia Luque a quitté le pays en août 1994 et insiste sur le fait que les personnes responsables de mesures antisyndicales doivent être sanctionnées.
- 225. Pour ce qui est des allégations concernant la détention, l'interrogation et les menaces à l'encontre de Juan Guarino Martínez Guillén et Jesús Cárdenas López (respectivement président et vice-président de la CTDC) et la citation de la police et les menaces à l'encontre de M. René José Montero Garay (secrétaire aux relations internationales de la CTDC), le comité prend note que le gouvernement dément qu'ils sont des dirigeants syndicaux et qu'ils ont fait l'objet de menaces ou de harcèlement, et signale que Juan Guarino Martínez Guillén a quitté le pays en mars 1996. Le comité constate que le gouvernement n'a pas démenti expressément la détention et l'interrogation de MM. Juan Guarino Martínez Guillén et Jesús Cárdenas López ni la citation de la police adressée à M. René Montero Garay. Le comité attire, par conséquent, à nouveau l'attention du gouvernement sur le principe mentionné dans le paragraphe précédent au sujet des interpellations de syndicalistes.
- 226. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle la Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba (CTDC) n'est pas parvenue à obtenir sa reconnaissance juridique en dépit du fait qu'elle a soumis tous les documents nécessaires, le comité note que le gouvernement déclare que les recherches menées ont permis de constater qu'il n'existe dans aucune entreprise ou entité de travail de tout le pays un syndicat portant le nom de Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba. A cet égard, le comité prie le gouvernement de lui indiquer expressément s'il a reçu ou non les documents nécessaires à l'obtention de la reconnaissance juridique de la CTDC auxquels se réfère l'organisation plaignante et, dans l'affirmative, de le tenir informé de la suite qui y a été apportée. Dans ce contexte, et compte tenu du fait que diverses allégations du présent cas concernent des syndicalistes de la CTDC, le comité souhaite se référer à une des conclusions qu'il a formulées lors de l'examen antérieur du cas (voir 300e rapport, paragr. 420) qui est reproduite ci-après:
- ... le comité relève qu'une seule centrale syndicale est officiellement reconnue à Cuba et mentionnée dans la législation et que, dans des cas antérieurs, des plaintes lui ont été soumises concernant le refus de reconnaissance officielle d'organisations syndicales en marge de la structure syndicale existante officiellement reconnue. De même, dans son dernier rapport (1995), la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a demandé au gouvernement de garantir dans la législation et dans la pratique le droit pour les travailleurs et les employeurs, sans distinction d'aucune sorte, de constituer sans autorisation préalable des organisations de leur choix, y compris en dehors de toute structure syndicale existante s'ils le désirent (article 2 de la convention), ainsi que d'élire librement leurs représentants (article 3 de la convention)." (Voir rapport III (partie 4A), CIT, 82e session, 1995, p. 173.)
- 227. S'agissant de l'allégation relative à l'expulsion d'un syndicaliste du Front syndical du centre de travail "Julio Antonio Mella" (M. Eduardo Lamas Campos) pour avoir réclamé de meilleures conditions de travail, le comité note que le gouvernement déclare que ladite personne n'était pas un dirigeant syndical et qu'elle a fait l'objet de mesures disciplinaires de changement de poste de travail, notamment à cause d'absences injustifiées au travail, qu'elle a ensuite quitté son poste de travail, et qu'ultérieurement elle a été sanctionnée de nouveau à son nouveau poste de travail pour appropriation de biens.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 228. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Au sujet des allégations relatives à la citation et/ou à la détention temporaire de syndicalistes, le comité souligne le principe selon lequel les mesures privatives de liberté prises contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités syndicales, même s'il ne s'agit que de simples interpellations de courte durée, constituent un obstacle à l'exercice des droits syndicaux. Le comité insiste sur le fait que les personnes responsables de mesures antisyndicales doivent être sanctionnées.
- b) En ce qui concerne l'allégation de refus de reconnaissance de la Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba (CTDC), le comité demande au gouvernement de lui indiquer s'il a reçu ou non les documents nécessaires à l'obtention de la reconnaissance juridique de la CTDC auxquels se réfère l'organisation plaignante et, dans l'affirmative, de préciser quelle suite il y a donnée. A cet égard, le comité se réfère aux commentaires de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations qui a demandé au gouvernement "de garantir dans la législation et dans la pratique le droit pour les travailleurs et les employeurs, sans distinction d'aucune sorte, de constituer, sans autorisation préalable, des organisations de leur choix, y compris en dehors de toute structure syndicale existante s'ils le désirent (article 2 de la convention no 87), ainsi que d'élire librement leurs représentants (article 3 de la convention)".