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Definitive Report - Report No 158, November 1976

Case No 834 (Greece) - Complaint date: 06-DEC-75 - Closed

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  1. 236. La plainte du Front anti-dictatorial des travailleurs grecs (AEM) figure dans une lettre du 6 décembre 1975. Le plaignant a transmis des informations complémentaires par une communication du 20 janvier 1976. Le gouvernement a fait parvenir ses observations par une communication du 31 mars 1976.
  2. 237. La Grèce a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no °8) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 238. Le plaignant, qui représente - déclare-t-il - des dizaines de milliers d'ouvriers et d'employés, allègue que les employeurs ont licencié, en 1975, plus de 300 personnes faisant partie des cadres syndicaux et que des dizaines de grèves ont été organisées en vue de leur réintégration. D'après l'AEM, il s'agit d'une politique délibérée du patronat afin de maintenir une paix sociale selon ses voeux, et le gouvernement soutient cette tendance des employeurs à congédier des syndicalistes, alors qu'il aurait pu adopter des mesures concrètes pour la protection efficace des intéressés. Le plaignant signale notamment comme des mesures qui devraient être prises en ce sens la ratification de la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971, ainsi que l'extension à d'autres personnes des garanties prévues par la loi extraordinaire no 1803 du 26 avril 1951 sur la protection des cadres syndicaux. Il estime que ces licenciements continuels alourdissent considérablement les relations professionnelles et énumère, à titre d'exemples, les congédiements survenus dans les entreprises Petrola-Latsis (Eleusis), Motoroil-Bardinoyannis (Corinthe), Portoda, Fix, Siemens (Athènes), Eskimo (Athènes), Phyrogenis (Athènes), Viamax (Athènes), Elarko (Athènes), Branche de céramique (Athènes) et Monopoles de rafraîchissements (Athènes).
  2. 239. Dans sa lettre du 20 janvier 1976, l'AEM communique une nouvelle liste de 35 entreprises qui ont procédé à des licenciements depuis sa plainte initiale. L'AEM ajoute que les forces de police se sont attaquées le 14 janvier 1976, à l'usine Pitsos, à des travailleurs qui exerçaient depuis quelques jours leur droit constitutionnel de grève. Vingt ouvriers auraient été blessés et 10 syndicalistes arrêtés puis déférés devant les tribunaux.
  3. 240. Le gouvernement rappelle, dans sa réponse, que la Grèce a ratifié les conventions nos 87 et 98 et ajoute que le gouvernement a adopté toute une série de mesures pour la protection des droits syndicaux et l'établissement d'un véritable mouvement syndical indépendant. La législation, poursuit-il, prévoit des sanctions contre les employeurs qui interviennent dans la création, le fonctionnement ou l'administration d'une organisation de travailleurs, et la jurisprudence a affirmé le caractère abusif des congédiements dus à des activités syndicales légales. La loi no 1803 précitée de 1951 protège les présidents et les secrétaires généraux des syndicats, et le décret-loi no 4361 de 1964 a étendu cette protection aux vice-présidents et trésoriers des comités directeurs des unions syndicales (centres ouvriers, fédérations et confédérations). En outre, le gouvernement envisage l'élaboration d'un projet de loi sur les organisations professionnelles de travailleurs qui étendrait cette protection à d'autres personnes.
  4. 241. Le gouvernement déclare qu'il étudie les dispositions de la convention no 135 en vue d'une éventuelle ratification, mais que l'absence d'une législation en la matière suscite des difficultés. Il doit tenir compte également du stade actuel de développement économique du pays et de la situation existante du mouvement syndical hellénique. Il existe, précise-t-il, 3 400 syndicats, 97 centres ouvriers, 75 fédérations et 5 confédérations.
  5. 242. A propos de l'intervention de la police à l'usine Pitsos, le gouvernement déclare que 400 grévistes approximativement, faisant partie de l'entreprise, s'étaient rassemblés le 14 janvier 1976 devant et autour de l'usine et empêchaient par la force 150 ouvriers environ de se rendre à leur travail. Des agents de police intervinrent alors pour prévenir une généralisation des incidents. Par la suite, et sur mandat du représentant du Parquet qui était présent, 20 personnes furent arrêtées, dont 11 furent déférées devant les tribunaux. L'affaire fut jugée le 2 février 1976 et quatre des accusés furent condamnés à des peines de prison de quelques mois pour des actes de violence ainsi que, pour ce qui est de deux d'entre eux, pour des insultes et des coups et blessures. Les intéressés introduisirent un recours à la Cour d'appel et furent libérés. Le gouvernement souligne qu'une seule des personnes arrêtées était membre de l'administration du syndicat de l'entreprise.
  6. 243. Au sujet de ce dernier aspect du cas, le comité note la déclaration du gouvernement selon laquelle la police est intervenue non Four briser la grève, mais pour éviter que des grévistes empêchent, par la violence, d'autres travailleurs de se rendre à leur travail. Il constate que les mesures d'arrestation ont été accompagnées des garanties d'une procédure judiciaire régulière et que tous les détenus se trouvent actuellement en liberté.
  7. 244. Au sujet des actes allégués de discrimination antisyndicale, il convient en premier lieu de rappeler que, d'après l'article 23 de la loi de 1914 sur les associations, il est interdit aux chefs, directeurs, agents ou autres employés d'une entreprise quelconque: a) d'empêcher des ouvriers, employés ou autres salariés, en les congédiant ou en les menaçant de congédiement ou par d'autres moyens illicites, de fonder des associations professionnelles, d'en faire partie ou d'appartenir à des partis politiques; b) de les contraindre par les mêmes moyens à fonder des associations professionnelles ou à s'affilier à des associations déterminées; c). d'exiger des ouvriers, d'une façon quelconque, une déclaration écrite par laquelle ils s'engagent à ne pas faire partie ou à cesser de faire partie d'une association de ce genre, comme condition de la conclusion du contrat de travail ou de la continuation du contrat de travail. En cas de violation de ces dispositions, l'article 41 de la même loi prévoit des peines d'amende et d'emprisonnement.
  8. 245. En outre, la loi extraordinaire no 1803 précitée interdit le licenciement des présidents et secrétaires généraux des organisations professionnelles ouvrières, comptant plus de 100 membres, pendant la durée de leur mandat et une année après son expiration, sauf pour un motif grave prévu par la loi et selon une procédure prescrite par celle-ci. Cette loi a notamment été complétée, quant aux unions syndicales, par le décret-loi no 4361 de 1964 dont l'article 12 a étendu la protection légale aux vice-présidents et trésoriers de ces organisations.
  9. 246. La convention no 98, ratifiée par la Grèce, prévoit des garanties pour la protection des travailleurs contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi. De son côté, le comité a souvent souligné qu'un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est celui de la protection adéquate des travailleurs contre les actes de discrimination antisyndicale - licenciements ou autres actes préjudiciables - et que cette protection est particulièrement souhaitable en ce qui concerne les délégués syndicaux, étant donné que, pour pouvoir remplir leurs fonctions syndicales en pleine indépendance, ceux-ci doivent avoir la garantie qu'ils ne subiront pas de préjudice en raison de leur mandat syndical. Le comité a estimé que la garantie d'une protection de ce genre en faveur des délégués syndicaux est également nécessaire pour donner effet au principe selon lequel les organisations des travailleurs doivent avoir le droit d'élire librement leurs représentants.
  10. 247. En l'espèce, le plaignant a communiqué une longue liste d'entreprises qui auraient congédié des dirigeants syndicaux et d'autres syndicalistes pour leurs activités syndicales. Le gouvernement ne fournit pas, dans sa réponse, de renseignements précis sur les mesures qui auraient été prises dans ces différents cas, mais il se réfère à la législation en vigueur et déclare qu'il envisage d'élaborer un projet de loi qui protégerait un plus grand nombre de personnes. Il indique également que la ratification de la convention no 135 - qui concerne la protection des représentants des travailleurs dans l'entreprise et les facilités à leur accorder - se heurte à certaines difficultés en raison notamment de l'absence d'une législation spécifique en la matière.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 248. Le comité estime qu'en raison du nombre de licenciements de dirigeants syndicaux et d'autres syndicalistes allégués dans le cas présent, il serait particulièrement approprié qu'une enquête soit menée par le gouvernement en vue d'établir les véritables raisons des mesures prises. Cette enquête pourrait également permettre d'apprécier le degré d'efficacité de la législation en vigueur et des mesures qui pourraient, le cas échéant, la compléter utilement, comme le gouvernement déclare l'envisager dans le cadre d'un projet de loi en préparation.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 249. Dans ces conditions, et pour ce qui est du cas dans son ensemble, le comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) au sujet de l'intervention de la police à l'entreprise Pitsos, de décider, pour les raisons exposées au paragraphe 243 ci-dessus, que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi;
    • b) au sujet des nombreux licenciements de syndicalistes énumérés par le plaignant, de signaler qu'il serait particulièrement approprié qu'une enquête soit menée par le gouvernement en vue d'établir les véritables raisons des mesures prises, et de prier ce dernier de le tenir informé de tout développement relatif à cette affaire.
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