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Interim Report - Report No 90, 1966

Case No 399 (Argentina) - Complaint date: 11-MAY-64 - Closed

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  1. 220. La présente affaire a déjà été examinée par le Comité à ses sessions de mai 1965 et de novembre 1965, à l'occasion desquelles il a présenté des rapports intérimaires qui figurent aux paragraphes 278 à 304 de son quatre-vingt-troisième rapport et 492 à 503 de son quatre-vingt-cinquième rapport; ces rapports ont été approuvés par le Conseil d'administration respectivement à ses 162ème et 163ème sessions (mai 1965 et novembre 1965).
  2. 221. Dans les rapports susmentionnés, le Comité a formulé ses conclusions définitives sur certaines des allégations du cas, le seul aspect de celui-ci restant encore en suspens portant sur les poursuites qui auraient été engagées contre des dirigeants syndicaux. C'est de ce seul aspect de l'affaire qu'il sera question dans les paragraphes qui suivent.
  3. 222. L'Argentine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, de même que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 223. Une analyse des allégations de la Confédération générale du travail (C.G.T.) relatives aux poursuites engagées contre des dirigeants syndicaux figure aux paragraphes 290 et 291 du quatre-vingt-troisième rapport du Comité. Il était allégué essentiellement qu'à la suite de l'adoption par la C.G.T d'un plan d'action appelé « Plan de lutte de la C.G.T. », qui visait des objectifs d'ordre social, économique et politique, le pouvoir exécutif aurait déposé plainte contre la C.G.T en demandant que tous les membres des organes de la Confédération soient emprisonnés et que les bureaux de la Confédération soient fermés. Les revendications de l'organisation n'ayant pas reçu d'écho, celle-ci a décidé l'occupation des entreprises en vue d'appuyer lesdites revendications. A la suite de cette décision, les présidents et secrétaires généraux de plus de trois cents organisations ont été poursuivis pour atteinte à la sécurité de l'Etat et instigation à commettre des délits. Un mandat de détention préventive a été lancé contre 119 dirigeants syndicaux.
  2. 224. Dans sa réponse datée du 30 novembre 1964 (voir paragr. 292 du quatre-vingt-troisième rapport), le gouvernement indiquait que l'application du plan de latte avait donné lieu à des délits prévus par le Code pénal, tels que l'usurpation de propriété et la privation illégitime de la liberté du personnel des entreprises affectées. D'après le gouvernement, les actes dont il est question ne résultaient pas d'un différend du travail opposant les entreprises à leurs employés, mais relevaient d'un programme de caractère politique. Le gouvernement indiquait qu'aucun des dirigeants syndicaux faisant l'objet de poursuites judiciaires n'avait été incarcéré.
  3. 225. Au paragraphe 293 de son quatre-vingt troisième rapport, le Comité a rappelé avoir toujours appliqué le principe qui veut que les allégations relatives au droit de grève n'échappent pas à sa compétence dans la mesure où elles affectent l'exercice des droits syndicaux et a signalé que le droit de grève était généralement reconnu aux travailleurs et à leurs organisations en tant que moyen légitime de défense de leurs intérêts professionnels. Le Comité a néanmoins rappelé également l'avis exprimé par lui à d'autres occasions que les limitations qui seraient imposées à des grèves de caractère politique ou à des grèves visant à contraindre le gouvernement ou la collectivité à reconnaître certaines mesures ne violeraient pas les droits syndicaux.
  4. 226. Le Comité a considéré, en l'occurrence, que la grève avait eu pour objet de faire pression sur le gouvernement pour l'amener à adopter des mesures d'ordre économique, social et politique; il a constaté également que le mouvement avait été marqué par l'occupation d'un certain nombre d'entreprises, dont les cadres supérieurs s'étaient vus parfois privés de leur liberté de mouvement. Le Comité a conclu que, dans de telles conditions, les actions intentées contre les syndicalistes impliqués dans l'affaire ne permettaient pas d'alléguer dans le présent cas qu'il y ait eu violation des droits syndicaux. Cependant, les plaignants ayant allégué également que des actions avaient été intentées contre les dirigeants de plus de trois cents organisations syndicales pour atteinte à la sûreté de l'Etat et que l'autorité judiciaire était saisie des différents cas, le Comité a prié le gouvernement de bien vouloir le renseigner au sujet de la nature exacte des délits pour lesquels ces actions avaient été intentées contre lesdits dirigeants syndicaux et de le tenir au courant de tous événements nouveaux qui pourraient se produire.
  5. 227. Lors du nouvel examen du cas auquel il a procédé à sa session du mois de novembre 1965, le Comité a constaté que, sur cet aspect du cas, le gouvernement, dans sa communication du 27 août 1965, se bornait à déclarer que les informations pertinentes avaient été sollicitées des autorités judiciaires. En conséquence, le Comité a décidé de renouveler la demande qu'il avait déjà présentée et d'ajourner l'examen du cas en attendant de recevoir les informations complémentaires attendues du gouvernement.
  6. 228. Par une communication en date du 14 mars 1966, la Mission permanente de la République argentine à Genève a transmis la réponse du gouvernement à la demande d'informations complémentaires qui lui avait été adressée. En premier lieu, le gouvernement fournit certaines données en ce qui concerne les procédures engagées contre les cent dix-neuf dirigeants poursuivis pour avoir adopté le « plan de lutte », mesures au sujet desquelles le Comité a déjà exprimé son opinion dans son quatre-vingt-troisième rapport (voir paragr. 226 ci-dessus). Les informations fournies par le gouvernement comprennent les noms des dirigeants en question et expliquent que ces derniers ont été poursuivis pour instigation à commettre des délits, infraction prévue par l'article 209 du Code pénal, en tant que responsables des mesures de force adoptées aux réunions s'étant tenues les 15 et 16 janvier 1964. Le gouvernement déclare que le juge avait ordonné que les intéressés soient placés en détention préventive en décembre 1964, mais que, sans préjudice de la poursuite de l'affaire, tous ont recouvré la liberté.
  7. 229. D'autre part, le gouvernement donne des renseignements sur les poursuites intentées contre trois autres syndicalistes. M. Felipe Ernesto Ludueña, secrétaire syndical du Mouvement révolutionnaire péroniste, qui occupait des fonctions au Syndicat des constructions navales et pétrolières à la section de Santa Cruz, a été poursuivi en mars 1965 pour infraction à l'article 212 du Code pénal, qui punit diverses actions de caractère terroriste; ces poursuites ont été provisoirement suspendues en avril 1965. M. Carlos Kristoff, sous-secrétaire du Syndicat des plombiers, égoutiers employés du Service des eaux, a été poursuivi en septembre 1965 pour atteinte à la liberté du travail et pour coups et blessures; il a été remis en liberté, sans préjudice de la poursuite de l'affaire. M. Raúl Alberto Garcia, membre du Comité de direction de la Fédération des ouvriers et employés du téléphone de la République argentine a fait l'objet de poursuites le 1er décembre 1965 pour appel public à la subversion; il a été remis en liberté et son affaire définitivement classée le 23 décembre 1965.
  8. 230. En conclusion, le gouvernement affirme qu'il ne se trouve à l'heure actuelle dans le pays aucun détenu pour une cause politique ou syndicale et que toutes les procédures policières ou judiciaires mentionnées plus haut ont été motivées par des délits contre l'ordre public ou par des délits de droit commun.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 231. Au vu des informations fournies par le gouvernement, il semblerait bien que les cent dix-neuf dirigeants syndicaux poursuivis à la suite de l'adoption du « plan de lutte » l'aient été uniquement pour l'infraction prévue par l'article 209 du Code pénal, à savoir: l'instigation à commettre un délit, et non pas pour atteinte à la sûreté de l'Etat ainsi qu'il était allégué. Le Comité prend acte du fait que les intéressés, qui avaient été placés en détention préventive, ont, sans préjudice de la poursuite de l'affaire, été remis en liberté.
  2. 232. En ce qui concerne les trois syndicalistes mentionnés au paragraphe 229 ci-dessus, qui ont été poursuivis à titre individuel, le Comité constate que, bien qu'ayant été remis en liberté, deux d'entre eux, MM. Ludueña et Kristoff, paraissent encore faire l'objet de poursuites pour les délits dont ils sont accusés. Il n'apparaît pas clairement si, oui ou non, ces délits ont une relation avec les faits reprochés aux cent dix-neuf syndicalistes mentionnés antérieurement; c'est pourquoi le Comité serait reconnaissant au gouvernement de bien vouloir l'informer de la nature exacte des faits qui sont reprochés à MM. Ludueña et Kristoff et pour lesquels ils ont été poursuivis, et le tenir au courant de tout événement nouveau susceptible de se produire en ce qui concerne la situation juridique de ces syndicalistes.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 233. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration, tout en prenant note de la déclaration formulée par le gouvernement dans sa communication du 14 mars 1966 selon laquelle il ne se trouve à l'heure actuelle dans le pays aucun détenu pour une cause politique ou syndicale et d'où il ressort que les dirigeants syndicaux poursuivis à la suite de l'adoption du « plan de lutte » de la C.G.T l'ont été uniquement pour instigation à commettre un délit, de prier le gouvernement de bien vouloir continuer à tenir le Conseil au courant de tout fait nouveau quant à l'état de la procédure en ce qui concerne les dirigeants en question et de prendre note du présent rapport intérimaire, étant entendu que le Comité fera à nouveau rapport lorsqu'il sera en possession des informations complémentaires dont la nature est précisée au paragraphe 232 ci-dessus.
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