ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Definitive Report - Report No 69, 1963

Case No 285 (Peru) - Complaint date: 01-MAR-62 - Closed

Display in: English - Spanish

  1. 51. La plainte présentée par la Fédération des travailleurs des hôpitaux et branches connexes du Pérou figure dans un télégramme adressé directement à l'O.I.T le 1er mars 1962. Dans une communication du 8 avril 1962, l'organisation plaignante a présenté de nouvelles informations à l'appui de sa plainte. Le gouvernement du Pérou a communiqué ses observations sur ces deux communications dans une lettre du 20 octobre 1962.
  2. 52. Le Pérou a ratifié la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 (no 87), mais n'a pas encore ratifié la convention sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949 (no 98).
  3. 53. La plainte contient deux séries d'allégations, l'une concernant l'organisation des employés du secteur public, et l'autre, relative au droit de grève des travailleurs des hôpitaux; ces allégations sont examinées séparément ci-après.

A. Allégations relatives au droit d'organisation des employés du secteur public

A. Allégations relatives au droit d'organisation des employés du secteur public
  1. 54. Dans leur communication du 8 avril 1962, les plaignants allèguent que la législation interdirait aux travailleurs au service de l'Etat de s'organiser, quoique les travailleurs des hôpitaux aient réussi, dans la pratique, à progresser quelque peu sur le plan syndical, en obtenant, par exemple, de participer à l'amélioration de certains aspects de leurs conditions de travail, d'être représentés dans une commission permanente pour les affaires concernant les hôpitaux et de présenter des revendications pour l'amélioration de leurs traitements.
  2. 55. Dans sa communication du 20 octobre 1962, le gouvernement déclare que les serviteurs de l'Etat jouissent du droit d'association conformément à la loi no 11377 sur le statut et la structure hiérarchique de la fonction publique, sous la seule réserve qu'ils ne peuvent faire usage ni de la dénomination de syndicats, ni des modalités d'action de ceux-ci; néanmoins, tous les travailleurs des hôpitaux et branches connexes ont recours en fait, et sans aucune limitation, aux modes d'action propres aux syndicats.
  3. 56. Le Comité note que l'article 49 de la loi sur le statut et la structure hiérarchique de la fonction publique s'énonce textuellement ainsi Les employés du secteur public ne peuvent s'associer que dans les domaines de la culture, des sports, de l'assistance ou de l'action coopérative. Il est interdit auxdites associations d'adopter la dénomination propre aux syndicats ou de s'organiser à la manière de ceux-ci, d'adopter les modalités d'action de ces organismes, d'user de contrainte pour faire aboutir leurs revendications et de recourir à la grève.
  4. 57. Le Comité, notant que la loi sur le statut et la structure hiérarchique de la fonction publique interdit expressément aux employés du secteur public de s'organiser en syndicats, estime nécessaire, compte tenu du principe formulé dans d'autres cas, d'insister sur l'importance que revêt pour les travailleurs au service de l'Etat le droit de constituer et de faire enregistrer des syndicats, et de signaler l'incompatibilité qui existe entre ces dispositions de la législation péruvienne et le principe normalement accepté qui figure à l'article 2 de la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 (no 87), qui a été ratifiée par le Pérou, article selon lequel les travailleurs, sans distinction d'aucune sorte et sans autorisation préalable, ont le droit de constituer des organisations de leur choix.
  5. 58. Le Comité, tout en observant que les travailleurs des hôpitaux et branches connexes, ainsi que le déclare le gouvernement - ce qui est corroboré par les plaignants eux-mêmes - ont recours de facto aux modes d'action propres aux syndicats, rappelle qu'il a précisé depuis le début de ses travaux que toute la procédure de l'examen des plaintes a pour but d'assurer le respect des droits syndicaux de jure et de facto et qu'il a réitéré ce principe dans d'autres cas, lorsqu'il a déclaré que le droit des travailleurs de constituer librement des organisations de leur choix ne pouvait être considéré comme réel, à moins d'être pleinement reconnu et respecté en fait et en droit.
  6. 59. Le Comité recommande par conséquent au Conseil d'administration d'appeler l'attention du gouvernement du Pérou sur l'importance qu'il attache au principe, normalement accepté et énoncé dans l'article 2 de la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 (no 87), qui a été ratifiée par le Pérou, principe selon lequel les travailleurs sans distinction d'aucune sorte (y compris ceux de l'Etat) ont le droit de constituer des organisations de leur choix, de l'inviter à examiner la possibilité de supprimer les dispositions de l'article 49 de la loi sur le statut et la structure hiérarchique de la fonction publique, qui sont incompatibles avec le principe en question, et de porter cette recommandation à la connaissance de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
    • Allégations relatives au droit de grève des travailleurs des hôpitaux
  7. 60. Aux dires des plaignants, la loi no 13907, du 24 janvier 1962 (dont les plaignants fournissent copie), interdirait la grève aux travailleurs des hôpitaux, mesure qui leur semble s'opposer à la liberté syndicale défendue par tous les travailleurs libres du monde. Les plaignants ajoutent que cette loi « signifie un retour aux sombres périodes de l'histoire du travail » et qu'il convient de signaler que les arrêts de travail dans les hôpitaux n'ont jamais dépassé douze heures, et cela, après que toutes les tâches eurent été remplies et sans jamais abandonner les malades, puisque le personnel d'urgence a toujours été présent et qu'il n'a jamais cessé de s'occuper des malades hospitalisés ni de ceux dont l'état nécessitait une aide immédiate.
  8. 61. A cet égard, le gouvernement déclare dans sa communication du 20 octobre 1962 que la loi no 13907 établit la procédure de la négociation directe ainsi que l'arbitrage concernant les revendications collectives, qui était réservée seulement aux associations et aux revendications privées, ce qui représente un progrès par rapport à la loi sur le statut et la structure hiérarchique de la fonction publique.
  9. 62. La loi no 13907 à laquelle il est fait référence contient deux articles. L'article 1er déclare textuellement:
    • Les revendications de caractère collectif émanant de fonctionnaires de carrière, d'employés et d'ouvriers qui sont au service des hôpitaux, cliniques ou autres centres d'assistance, sont soumises à l'arbitrage en cas d'échec du contact direct. Le tribunal d'arbitrage doit comprendre cinq membres élus de la manière suivante: deux pour chacune des parties, et le cinquième membre, qui assume la présidence, est désigné d'un commun accord. Si une entente n'est pas réalisée, le cinquième membre doit être tiré au sort sur une liste de cinq noms proposés par la Cour supérieure du district judiciaire à la requête du ministère intéressé. La sentence rendue par le tribunal doit porter sur tous les points controversés et ne peut faire l'objet d'un recours.
    • L'article 2 se réfère aux sanctions en cas de violation des dispositions de l'article 1er.
  10. 63. Le Comité a toujours appliqué le principe selon lequel les allégations concernant le droit de grève n'échappent pas à sa compétence, dans la mesure où elles touchent à l'exercice des droits syndicaux et seulement dans cette mesure; il a en outre signalé à diverses reprises que le droit de grève des travailleurs et des organisations de travailleurs est normalement reconnu comme un moyen légitime de défense de leurs intérêts professionnels. A cet égard, le Comité a souligné l'importance qu'il attache à ce que, lorsque les grèves sont interdites ou soumises à des restrictions dans les services essentiels, des garanties appropriées soient accordées pour sauvegarder les intérêts des travailleurs ainsi privés d'un moyen essentiel de défense professionnelle; il a aussi indiqué que les restrictions devraient s'accompagner de procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et rapides aux diverses étapes desquelles les intéressés devraient pouvoir participer et que les décisions arbitrales devraient être dans tous les cas obligatoires pour les deux parties.
  11. 64. Dans le cas en question, le Comité estime que les dispositions de la loi no 13907 semblent sauvegarder pleinement les intérêts des travailleurs des hôpitaux en instituant un mécanisme d'arbitrage impartial dont les décisions paraissent être obligatoires pour les deux parties et, dans ces conditions, recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 65. En vertu de ce qui précède, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) en ce qui concerne les allégations relatives au droit syndical des fonctionnaires:
    • i) d'appeler l'attention du gouvernement du Pérou sur l'importance que le Conseil attache au principe normalement accepté, qui figure dans l'article 2 de la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 (no 87), qui a été ratifiée par le Pérou, article selon lequel les travailleurs, sans distinction d'aucune sorte, ont le droit de constituer des organisations de leur choix;
    • ii) d'inviter le gouvernement du Pérou à examiner la possibilité de supprimer les dispositions de l'article 49 de la loi sur le statut et la structure hiérarchique de la fonction publique, qui sont incompatibles avec le principe en question;
    • iii) de porter ces conclusions à la connaissance de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations;
    • b) de décider, pour les allégations relatives au droit de grève des travailleurs des hôpitaux, que celles-ci n'appellent pas de sa part un examen plus approfondi.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer