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Individual Case (CAS) - Discussion: 2002, Publication: 90th ILC session (2002)

Freedom of Association and Protection of the Right to Organise Convention, 1948 (No. 87) - Colombia (Ratification: 1976)

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Un représentant gouvernemental, ministre du Travail et de la Sécurité sociale, a indiqué en ce qui concerne l'adaptation de la législation du travail aux conventions de l'OIT que la loi no 584 de 2000 a réformé le système du travail sur divers points:

- elle a réaffirmé la liberté d'association et le droit à la liberté syndicale en donnant la pleine autonomie aux syndicats dans la rédaction de leurs statuts;

- elle a retiré au ministère du Travail la possibilité d'intervenir et d'enquêter sur les organisations syndicales;

- elle a permis aux organisations syndicales de mener une grève pour le non-paiement des salaires par les employeurs;

- elle a étendu la garantie de la liberté syndicale aux travailleurs du service public;

- elle a reconnu le droit de bénéficier du temps libre nécessaire pour les activités syndicales;

- elle a permis aux syndicats minoritaires de résoudre les conflits de travail par le biais d'un tribunal arbitral.

La Cour constitutionnelle a, pour sa part et par des sentences exécutoires, abrogé diverses dispositions du Code du travail révisé qui n'étaient pas conformes à la Constitution politique ni aux conventions de l'OIT. Certaines dispositions, qui autorisaient le ministère du Travail à intervenir dans le fonctionnement interne des syndicats comme l'approbation des statuts ou la participation à des assemblées syndicales, ont été déclarées illégales pour renforcer le principe de l'autonomie syndicale. Les travailleurs ont par ailleurs la possibilité de s'affilier à plusieurs syndicats. Les dispositions qui distinguaient les activités des syndicats d'entreprise avec ceux dans les secteurs agricole et de l'industrie ont été abrogées en application du principe d'égalité. Lorsque plusieurs syndicats minoritaires coexistent dans une entreprise, tous ont la possibilité d'avoir une représentation lors de la négociation collective. La grève solidaire est autorisée et celle menée à l'encontre d'un employeur ne se limite pas au motif de non-paiement des salaires mais à n'importe quelle autre obligation contractuelle. Une décision de 1998 de la Chambre de cassation sociale de la Cour suprême de justice, qui a donné une interprétation de la norme, a reconnu l'immunité circonstancielle aux travailleurs dans un conflit collectif de travail.

L'orateur a indiqué que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a organisé plusieurs séminaires avec les directeurs territoriaux et les inspecteurs du travail en vue de les former aux compétences et fonctions prévues dans les conventions. De plus, des directives sur le respect des principes du droit à la liberté syndicale ont été adoptées, à l'exemple de l'acte administratif qui prescrit que l'inscription des organisations syndicales au registre syndical ne peut faire l'objet d'un recours et qu'en cas de difficulté il revient à la juridiction ordinaire de décider. Il en est de même des résolutions sur les fonctions de responsabilité syndicale tournantes. De même, des directives imposant la négociation collective aux employeurs publics ont été adoptées conformément aux conventions nos 151 et 154. Les mouvements de protestation des travailleurs sont respectés et aucun n'a été déclaré illégal. Les organisations syndicales peuvent seules recourir au tribunal arbitral. Le recours au dialogue social et à la négociation collective est encouragé en tant que mécanisme de résolution des différends et des conflits. Les conventions collectives, décisions arbitrales et accords, qui sont au nombre de plus de 200 pour les douze derniers mois, en sont un exemple.

Le ministère du Travail a défendu l'activité syndicale comme élément fondamental de la démocratie, condamné l'assassinat et les menaces de mort contre les syndicalistes, publiquement exigé l'arrêt de ces assassinats aux groupes paramilitaires, de même qu'il a exigé la libération des nombreuses personnes détenues par les groupes paramilitaires.

Il a souligné qu'en matière de protection de la vie des syndicalistes le gouvernement, à l'initiative du président et avec la participation des délégués des syndicats, a développé un programme national de protection pour lesdits syndicats, qui est sous la responsabilité du ministère de l'Intérieur. D'autre part, le Congrès de la république, à l'initiative du gouvernement et suite à la consultation des syndicats des employés publics, a approuvé le 12 juin 2001 la nouvelle loi sur la carrière administrative qui prévoit des mécanismes d'entrée, de promotion et de permanence dans l'administration publique beaucoup plus favorables et démocratiques pour les travailleurs.

En ce qui concerne la réglementation du droit de grève dans les services publics essentiels, le gouvernement national espère que la législation qui réglemente ce droit sera le résultat d'un processus de concertation entre les employeurs, les travailleurs et le gouvernement. De toute façon, le droit de grève et de protestation sociale est garanti par la Constitution nationale. Le gouvernement a respecté pleinement ce droit et n'a déclaré illégale aucune sorte de grève ou arrêt d'activités.

Le ministère du Travail a déclaré qu'il terminera prochainement son mandat et il a remercié tous les membres de la commission pour leur collaboration afin qu'il existe en Colombie une législation du travail conforme aux principes démocratiques de l'OIT et que soit respectée la liberté syndicale, y compris la vie des syndicalistes, non seulement comme composante essentielle de la démocratie mais aussi comme garantie pour l'obtention d'un nouveau type de relations du travail. Considérant les conditions de violence aiguë que vit la Colombie, attisée par l'activité criminelle des groupes militaires, le trafic de drogue et la délinquance organisée, la meilleure collaboration que l'OIT peut apporter consiste à renforcer le Programme tripartite de coopération avec la Colombie et à stimuler les travailleurs, les employeurs et le gouvernement pour qu'ils aient la volonté politique qui permettra que les objectifs de ce programme deviennent réalité.

Les membres employeurs ont rappelé que la commission a examiné le cas de l'application de la convention depuis de nombreuses années et qu'un long débat a eu lieu l'an dernier à ce sujet. Ce cas soulève deux questions. La première concerne la non-conformité de la loi et de la pratique avec les principes énoncés dans la convention sur la liberté d'association, et la deuxième le climat de violence qui existe dans le pays et qui constitue un obstacle très sérieux à l'exercice par les employeurs et les travailleurs de leurs droits en vertu de la convention. La situation soulève aussi le problème de la relation entre le climat de violence et la non-conformité de la législation avec les critères de la convention. Il est évident qu'une législation inadéquate en matière de travail ne génère pas à elle seule un climat de violence. Toutefois, l'existence d'un climat de violence n'encourage pas les amendements législatifs. Bien que la question de la violence ne relève pas directement du mandat de la commission et que l'OIT ne soit pas en position de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à la violence, la commission fait face à un dilemme puisque le développement actuel de la législation du travail est influencé par la situation générale qui existe dans le pays.

Concernant la longue liste d'éléments faisant l'objet de commentaires de la commission d'experts dans le passé, la Commission de la Conférence a noté à sa session de juin 2001 les progrès réalisés par le gouvernement. En ce qui concerne les restrictions au droit de grève, le représentant gouvernemental a indiqué qu'un projet de loi a été préparé afin de résoudre le problème. Toutefois, rappelant leur position sur le droit de grève en relation avec la convention, les membres employeurs croient qu'aucune action législative n'est requise par le gouvernement pour que la législation soit conforme à la convention. Le climat de violence qui prévaut dans le pays constitue le problème principal. Comme l'illustre la longue liste des victimes lue l'année dernière, les syndicats sont plutôt affectés par les attaques personnelles, assassinats et enlèvements, bien que d'autres secteurs de la population incluant les employeurs, les juges, les médecins et la police soient aussi affectés. Durant les six dernières années, il y a eu 200 000 victimes, ce qui constitue un nombre horrifiant. Comme son nom le suggère, la liberté d'association présuppose un minimum de liberté et ne peut être favorisée dans un climat de menaces et de violence. Dans ces circonstances, la commission doit exprimer dans ses conclusions sa profonde préoccupation, de même que sa sympathie pour les victimes et leurs familles, et doit demander à nouveau au gouvernement de faire tout son possible pour améliorer durablement la situation, ce qui est indispensable pour que la liberté d'association puisse s'épanouir.

Les membres travailleurs ont remercié le ministre de son intervention. Il y a exactement un an, il était fait état des chiffres des assassinats de dirigeants syndicaux en Colombie. Quarante-six syndicalistes avaient perdu la vie entre janvier et mai 2001. Pour ce qui concerne l'année 2002, les informations reçues interpellent très sérieusement: 72 syndicalistes ont déjà été victimes d'assassinats. Entre juin 2001 et mai 2002, 176 femmes et hommes actifs en tant que dirigeants syndicaux ont été assassinés, sans compter les atteintes à l'intégrité et diverses situations de criminalisation de l'activité syndicale. Entre le 4 et le 6 juin, trois syndicalistes ont encore été tués. La violence en Colombie est sans pareille et touche principalement les dirigeants syndicaux. Un syndicaliste colombien a signalé que "le meilleur syndicaliste semble être celui qui est mort. Le meilleur syndicat est aussi celui qui n'existe plus". Nul doute que cette violence est de nature à désarticuler le mouvement syndical en empêchant toute expression de mécontentement face à des politiques d'exclusion. Tentatives d'assassinats, enlèvements et disparitions, menaces de mort, persécutions, détentions, licenciements, non-versement des salaires échus à des dirigeants syndicaux, restrictions dans l'accès aux locaux de travail, pire encore, assassinats et impunité, tels sont les principaux cas traités par le Comité de la liberté syndicale au cours des dernières années et pour lesquels celui-ci a exprimé de façon très insistante le besoin de la pleine application de garanties prévues dans la convention. La commission d'experts cite le Comité de la liberté syndicale dans son rapport à l'effet qu'il "regrette profondément que, dans l'énorme majorité des cas d'homicides, de tentatives d'homicides ou de disparition de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, les auteurs des cas en question n'ont été ni jugés ni condamnés". L'impunité persiste dans l'immense majorité des cas. Les atteintes contre l'intégrité des dirigeants augmentent encore davantage. Les chiffres alarmants qui ont été avancés reflètent une augmentation extrêmement inquiétante. En mars dernier, le Comité de la liberté syndicale a exprimé sa vive inquiétude:

Le comité déplore que le gouvernement n'ait pas tenu compte de ses recommandations et qu'il n'ait pas communiqué non plus d'observations sur les graves allégations présentées par les plaignants, qui font état d'une recrudescence importante de la violence. En effet, le comité regrette profondément que, depuis son dernier examen du cas de la violence, en mars 2001, aucune amélioration n'ait pu être constatée pour ce qui touche à la violence visant le mouvement syndical, ses représentants et ses adhérents. (...) Le comité rappelle une fois encore que la liberté syndicale ne s'exerce que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l'homme, en particulier du droit à la vie et du droit de la sécurité de la personne, et que les droits des organisations de travailleurs et d'employeurs ne peuvent s'exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l'encontre des dirigeants et des membres de ces organisations et (qu'il) appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. (...) Le comité souligne que l'impunité perpétrée ou tolérée par le gouvernement ou d'autres groupes en relation avec des violations extrêmes et massives des droits syndicaux fondamentaux est une menace réelle pour les droits syndicaux et les fondements de la démocratie. (...) Le comité demande également au gouvernement de lui communiquer tous les faits dont il dispose qui contribueraient à expliquer la situation d'impunité pour les actes de violence commis contre les syndicalistes. Le comité rappelle de nouveau au gouvernement qu'il lui appartient d'assurer la protection des travailleurs contre les actes de violence et d'effectuer de façon responsable une analyse factuelle de chaque acte criminel.

Le Comité de la liberté syndicale a également insisté sur le besoin de recevoir, de la part du gouvernement, des informations permettant de clarifier les motifs et les circonstances dans lesquelles les actes de violence ont été commis. Sur la base de nombreuses plaintes reçues de la part des organisations de travailleurs au cours des dernières années, le comité a souligné des secteurs spécifiques tels que l'éducation, l'industrie pétrolière, les services de santé et les administrations municipales et départementales. Ces services sont fortement touchés par la plupart des politiques de restructuration ayant un coût social élevé et un taux élevé de conflits sociaux y a été enregistré. Des dispositions légales relatives à des prérogatives essentielles de la liberté syndicale persistent telles que des entraves au droit de grève et la soumission des conflits à l'arbitrage. Sur ces points la commission d'experts a formulé des commentaires depuis de nombreuses années sans qu'aucun changement ne soit opéré.

Il est possible de continuer de s'étendre sur la situation de la Colombie car elle le mérite bien. Les faits sont accompagnés de conclusions claires et de demandes précises des instances normatives de l'OIT. Ces faits, strictement éloquents, ont été constatés sur place l'année dernière par le représentant spécial du Directeur général du BIT, les représentants de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies ainsi que par de nombreuses missions syndicales et des émissaires envoyés par plusieurs Etats Membres de l'OIT. En Colombie, l'exercice du droit d'organisation, de négociation collective et de grève dans le secteur public et dans les entreprises privées est pratiquement impossible. Les dirigeants syndicaux sont assassinés, menacés de mort, licenciés ou poursuivis injustement comme des délinquants alors que les auteurs d'assassinats de leaders syndicaux circulent en toute liberté. Il existe une véritable criminalisation du syndicalisme dans ce pays. Les organisations syndicales sont affaiblies, désarticulées, et souvent, disparaissent. Les travailleurs risquent de se retrouver progressivement sans aucune forme de protection sociale et sans aucune forme d'organisation.

Il y a un an, la mise en place d'un programme de l'OIT en Colombie a été décidée. Celui-ci n'a pas encore été instauré, ce qu'il convient de déplorer profondément au vu de la situation critique qui a été décrite. Le groupe des travailleurs a insisté pour que le programme soit lancé de toute urgence et a exhorté le gouvernement colombien à accepter la proposition d'assistance technique du Bureau pour procéder à une évaluation factuelle des cas de violence qui devrait permettre de lever l'impunité et de mettre en évidence les véritables causes de violence. Il y a un an, le groupe des travailleurs avait souhaité l'envoi d'une commission d'enquête en Colombie et cette demande est réitérée cette année. Cette commission ne doit pas être une fin en soi mais être un mécanisme, d'une extrême importance, pour progresser dans le respect des libertés syndicales en Colombie. Elle doit contribuer à répondre, sans plus attendre, aux nombreuses demandes et conclusions formulées par le Comité de la liberté syndicale et par la commission d'experts sur l'application dans la pratique et dans la législation de la convention.

Un membre travailleur de la Colombie a mentionné qu'en Colombie l'exercice de l'activité syndicale n'a jamais été facile dû à l'attitude hostile permanente des hommes d'affaires et des gouvernements. Depuis le début du XXe siècle, des assassinats massifs de travailleurs, comme le massacre de centaines de travailleurs en 1928, ont été rapportés. Le dernier mouvement de persécution antisyndicale a commencé en 1979 avec l'adoption du statut de la sécurité qui a donné lieu à des violations de domicile, des détentions et à la torture de nombreux syndicalistes. A la fin des années 80, les assassinats commencèrent. Durant ses quinze ans d'existence, la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT) a enregistré l'assassinat de plus de 3 500 dirigeants, activistes et affiliés. En 2000, 128 assassinats ont été rapportés et le chiffre est monté à 192 en 2001. Durant la Conférence internationale du Travail de 2001, les noms de 46 dirigeants assassinés au cours des cinq premiers mois de l'année ont été énumérés. En 2002, pendant la même période, le nombre est monté à 85. Trois autres dirigeants ont de plus été assassinés depuis le départ de la délégation nationale pour assister à la 90e Conférence. A ce qui précède, on doit ajouter une liste interminable de menaces, attentats, déplacements, exils, séquestrations et disparitions forcées, ce qui constitue un cadre d'horreur pour le mouvement syndical. En bref, durant la période allant de la 89e à la 90e Conférence, 420 actes de violence qui portent atteinte au droit à la vie, à l'intégrité physique et à la liberté personnelle des syndicalistes ont été perpétrés. Comme explication de cette dramatique réalité, le gouvernement et les employeurs affirment qu'il y a, en Colombie, une situation de violence généralisée qui affecte plusieurs Colombiens, entre autres des syndicalistes, et que le gouvernement fait tout son possible pour éviter ces faits. Pas plus qu'il ne peut nier la gravité de la violence et son incidence dans pratiquement toutes les activités du pays, le gouvernement ne peut se cacher derrière cette situation pour éluder sa responsabilité.

Un voile d'impunité entoure les crimes. Dans les commentaires envoyés à la commission d'experts par la CUT cette année, on cite le Comité de la liberté syndicale et mentionne que l'impunité aggrave la situation des travailleurs syndicaux. Les chiffres parlent d'eux-mêmes: plus de 3 500 assassinats et à peine 5 condamnations ont eu lieu entre le mois d'août 1986 et le mois d'avril 2002.

Les mesures du gouvernement pour protéger les syndicalistes sont très faibles. Le programme du ministère de l'Intérieur pour la protection des syndicalistes et défenseurs des droits de l'homme fonctionne de façon déficiente due aux procédures bureaucratiques et au manque de recours. Les demandes insistantes pour que ce programme soit restructuré, décentralisé, pour que les systèmes d'évaluation des risques changent et pour qu'on établisse des recours suffisants n'ont pas été entendues. La même chose se produit avec la Commission interinstitutionnelle pour la promotion et la protection des droits de l'homme des travailleurs créée en 1997, cela étant dû aux rares réponses des différentes entités de l'Etat qui la constituent. Même si les mesures de protection sont importantes (et des améliorations sont souhaitées dans ce sens), celles-ci ne sont pas suffisantes en soi. Une politique de l'Etat, visant à mettre un terme à l'impunité et à démanteler les groupes paramilitaires qui sont responsables de la majeure partie des crimes perpétrés, est nécessaire. En effet, les groupes paramilitaires font partie d'une campagne destinée à exterminer le mouvement syndical et à empêcher quelque forme de résistance aux abus du néolibéralisme.

Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les droits de l'homme, les organisations non gouvernementales des droits de l'homme, divers organismes intergouvernementaux, le Comité de la liberté syndicale et les centrales syndicales internationales ont tous eu une connaissance directe de la réalité colombienne et s'accordent sur la gravité de la situation. Ils demandent au gouvernement de prendre des mesures efficaces pour mettre fin à la barbarie. Les résultats obtenus jusqu'à ce jour sont très pauvres.

Les travailleurs colombiens s'engagent fermement à promouvoir la paix et la justice sociale à l'aide d'une solution négociée du conflit interne et sont contre tout type d'ingérence externe manifestée à travers des programmes tels que le "Plan Colombia" qui accentuent la guerre et menacent de l'étendre bien au-delà des frontières colombiennes. Les travailleurs sont préoccupés par la politique annoncée par le nouveau gouvernement car, selon eux, elle entraînera l'escalade de la guerre et l'aggravation des problèmes économiques, politiques et sociaux du pays ainsi qu'une situation encore plus critique pour les travailleurs. La tendance gouvernementale à utiliser toujours plus la répression, comme le démontrent les réformes du Code disciplinaire unique, qui criminalise des faits qui ont mené plusieurs travailleurs à la prison, et la législation de guerre annoncée par le nouveau gouvernement suscitent beaucoup d'inquiétude. Les efforts réalisés par l'OIT jusqu'à maintenant: les paragraphes spéciaux, les deux missions de contacts directs et l'envoi d'un représentant spécial du Directeur général, sont très appréciés. Il est cependant regrettable que le programme spécial de coopération avec la Colombie, approuvé par le Conseil d'administration il y a un an, n'ait pas eu lieu par manque de ressources. Le financement nécessaire pour le mettre en marche devrait être attribué. Vu que la situation s'aggrave de manière alarmante et que le gouvernement ne présente pas de résultats satisfaisants aux différentes demandes de l'OIT, la Commission de l'application des normes devrait inclure un paragraphe spécial dans ce cas et exprimer au Conseil d'administration sa préoccupation pour le retard à aborder le fond de la plainte qui a été présentée par les travailleurs en 1998, en vertu de l'article 26. Une commission d'enquête devrait aussi être nommée même si le gouvernement et les employeurs viennent de terminer une vaste campagne pour la contrecarrer, avec l'argument que celle-ci entraînerait des sanctions économiques pour le pays et aggraverait la situation en plaçant les syndicalistes colombiens dans une situation difficile pouvant entraîner de graves conséquences.

L'OIT dispose de normes et de mesures pour des cas aussi critiques que celui de la Colombie. Les normes devraient être respectées et les mesures appliquées pour que soient respectés les droits de l'homme et la liberté syndicale.

Un autre membre travailleur de la Colombie a exprimé son accord avec les déclarations des membres travailleurs qui se sont exprimés auparavant et a remercié le ministre du Travail pour ses commentaires. Il a souligné que ce dernier, durant son ministère, a empêché que des mauvais traitements encore plus graves ne se commettent à l'encontre des travailleurs. Il a soutenu que le pays a régressé dans le concert des nations en raison de l'adoption du modèle néolibéral, avec ses programmes d'ajustement structurel, de privatisations, de régression dans le niveau de protection sociale, de manque de stimulus à la production nationale, d'imposition de réformes de travail qui mènent vers une plus grande flexibilité du travail, de perte de stabilité, de précarisation de l'emploi et de démantèlement de la sécurité sociale.

Une attention spéciale doit être accordée à la question des violations au droit à la vie, à la sécurité de la personne et à l'intégrité physique et morale des dirigeants syndicaux, qui constituent des préalables essentiels à l'exercice des droits consacrés par la convention no 87. D'autres aspects de la liberté syndicale suscitent de l'inquiétude à la lumière de la convention susmentionnée et d'autres conventions fondamentales de l'OIT. De nos jours, créer une organisation syndicale est extrêmement difficile en raison de la politique antisyndicale de certains employeurs qui favorisent le licenciement de ceux qui promeuvent la création d'organisations syndicales. En outre, la déréglementation du travail et la prolifération de contrats de prestations de services ne favorisent pas la création d'organisations syndicales. D'un autre côté, la détérioration des taux de syndicalisation est en grande mesure due au climat latent de terreur qui règne sur ceux qui veulent former un syndicat. En effet, une politique est mise en œuvre pour éliminer le syndicalisme, et désigner les syndicats comme les responsables de la crise économique auquel le pays doit faire face, ce qui donne carte blanche à des assassins de tous types.

D'autres violations au droit de syndicalisation existent aussi. Il en est ainsi de l'ingérence indue des autorités administratives dans la création d'organisations syndicales et de la légalisation de l'intervention patronale dans l'enregistrement des syndicats; ils effectuent des licenciements massifs pour des raisons prétendument économiques et favorisent les "coopératives de travail associé" qui regroupent de la main-d'œuvre non syndicalisée, en faisant valoir que les travailleurs sont les propriétaires de l'entreprise et que, pour cette raison, ils n'ont pas besoin d'un syndicat. Il est impossible d'énumérer toutes les violations de l'exercice de la liberté syndicale qui sont commises de jour en jour en Colombie, et qui ont fait l'objet d'un nombre élevé de plaintes devant le Comité de la liberté syndicale. Il existe en effet, en ce moment, dix cas en instance et quatre qui font l'objet d'un suivi, et qui contiennent des allégations de nombreuses organisations syndicales. Cela démontre la situation difficile dans laquelle se trouvent les travailleurs colombiens, non seulement en ce qui concerne les droits fondamentaux de l'homme, mais aussi en ce qui concerne l'exercice de la liberté syndicale.

Le droit à la négociation collective est restreint de façon considérable. Beaucoup d'employeurs favorisent les contre-propositions tant dans le secteur public que dans le secteur privé, conduisant ainsi au démantèlement des conventions collectives de travail. Le fait que, après une longue lutte de la part des travailleurs, la convention no 151 ait été ratifiée et que la Cour constitutionnelle déclare, en dépit de tout cela, que les syndicats de fonctionnaires ne bénéficient pas du droit de négociation collective, constitue un exemple clair de la situation actuelle.

La situation que vivent les travailleurs de nombreuses entreprises publiques et privées, des communes et des départements du pays, dans le secteur de la santé publique et de l'enseignement est extrêmement inquiétante. Encore plus quand le pouvoir économique actuel annonce une plus grande flexibilité, davantage de privatisations, une réforme à la baisse du système des retraites et de nouveaux sacrifices pour les travailleurs. En fait, le futur n'est pas très prometteur. La Colombie nécessite d'urgence l'adoption de mesures qui permettent de construire les bases pour le développement d'un nouveau pays, où la paix sera le fruit de la justice.

Le membre travailleur des Etats-Unis s'est référé à la déclaration qu'il a faite devant la commission l'année dernière concernant la responsabilité spéciale et le devoir d'intervention qui lui incombe dans ce cas du fait de son statut de syndicaliste et de citoyen des Etats-Unis. Même si c'est le cas de la Colombie et non des Etats-Unis qui est l'étude, l'aide militaire fournie par son pays, par l'intermédiaire du Plan Colombia, contribue au conflit armé, augmentant du coup la terreur physique infligée aux syndicalistes colombiens. Grâce au Plan Colombia, une aide financière est fournie aux forces armées colombiennes, dont certains membres et une partie de ses ressources servent également aux forces paramilitaires qui sont responsables de bon nombre d'assassinats de citoyens et de syndicalistes colombiens. La Conférence et le Conseil d'administration ont la responsabilité spéciale et le devoir de résoudre les problèmes en Colombie.

Dans sa conclusion sur le cas no 1787 sur la Colombie, le Comité de la liberté syndicale déplore qu'aucun progrès important n'ait été réalisé dans les cas à l'étude et espère que le Conseil d'administration en tiendra compte lorsqu'il prendra une décision sur la nécessité de créer une commission d'enquête. Depuis novembre 1999, le Comité de la liberté syndicale est arrivé à la conclusion susmentionnée, la commission d'experts a étudié le cas de la Colombie, le Conseil d'administration s'est penché sur ce cas au cours de presque toutes ses sessions, une mission de contacts directs a été dépêchée et un programme spécial de coopération technique a été conçu. Pendant ce temps, plus de 128 syndicalistes colombiens ont été assassinés en l'an 2000, plus de 194 en l'an 2001 et plus de 80 au cours des six premiers mois de cette année, sans mentionner les 3 500 personnes ou plus qui ont été assassinées depuis 1985, selon les estimations de la Confédération colombienne des syndicats. Malgré cela, l'Unité nationale sur les poursuites en matière de droits de l'homme de la Colombie a conclu qu'entre 1986 et 2002 il n'y avait eu que 5 de ces affaires qui s'étaient soldées par un verdict de culpabilité.

La destruction des organisations syndicales colombiennes est aussi causée par l'application flexible et inadéquate des lois du travail qui découle souvent de la prescription, par le FMI, de mesures d'ajustement structurel ainsi que du lobbying et des pressions des employeurs. La loi colombienne autorise la conclusion de pactes collectifs directs entre les employeurs et des groupes d'employés, ce qui a pour effet de nuire aux organisations syndicales. Un autre moyen efficace pour détruire les syndicats colombiens consiste à procéder à des mises à pied massives pour ensuite créer des coopératives dont les travailleurs sont les soi-disant propriétaires. L'article 46 de la loi no 50 de 1990 accorde au ministère du Travail et aux autorités administratives le pouvoir de refuser des demandes d'enregistrement tout à fait légitimes et les autorités administratives permettent souvent aux employeurs de contester des enregistrements de syndicats.

En ce qui concerne la question de la destruction physique des syndicats et des assassinats de syndicalistes, le programme de protection du ministère de l'Intérieur a connu des dysfonctionnements en raison des restrictions budgétaires, de l'inefficacité administrative et de la mauvaise foi de la part du personnel chargé de l'administration et de l'application du programme. Un récent rapport du HCR confirme que le gouvernement a adopté des politiques et des mesures qui affaiblissent l'appareil judiciaire et qui le rendent plus inefficace, ce qui contribue davantage au taux excessivement élevé d'impunité pour les responsables de la violence dont sont victimes les syndicalistes. Le gouvernement cherche également à obtenir des pouvoirs supplémentaires lui permettant de s'ingérer dans les enquêtes sur les meurtriers de syndicalistes.

L'OIT et le Conseil d'administration sont priés d'agir dès maintenant et d'appliquer tous les moyens et les mécanismes, notamment en dépêchant une commission d'enquête. Les conclusions de la commission sur ce cas devraient aussi figurer dans un paragraphe spécial de son rapport.

Le membre travailleur de la France a déclaré qu'il allait faire un bref discours afin de permettre à la commission d'étudier tous les cas prévus pour examen. Il a déploré que des membres de la commission se soient lancés dans des discours excessifs et a appelé le président à faire en sorte que de tel abus ne se reproduisent pas.

Les violations de la convention en Colombie sont extrêmement graves et aucun progrès n'est observé. Les lois ne respectent pas les conventions ratifiées. De plus, la violence qui règne dans ce pays est telle que le droit à la vie n'est pas garanti et que d'autres droits y compris les droits à la liberté syndicale et à la négociation collective sont mis en cause. Tous les gouvernements successifs du pays ont rejeté la responsabilité sur les groupes armés et paramilitaires ou des maffias de la drogue et du crime organisé et, lorsqu'ils ont parfois pris des engagements d'édicter des lois afin d'empêcher les violations du droit syndical, ces projets de loi ne sont jamais arrivés devant le Congrès. L'impunité persiste et, sans attendre le rôle de l'éventuel Tribunal pénal international, il appartient au gouvernement de faire tous les efforts afin de mettre la législation et la pratique en conformité avec ses engagements conventionnels internationaux. Les travailleurs français sont solidaires du mouvement syndical colombien et de ses courageux militants. Leurs actions participent, aux côtés d'autres intervenants de la société civile, au renforcement et à la consolidation de la démocratie et de l'Etat de droit par leur défense active des droits des travailleurs. Il doit être mis un terme à ce qui est un véritable génocide des représentants syndicaux colombiens.

Le membre travailleur de Cuba a exprimé la solidarité des travailleurs cubains avec les travailleurs colombiens face à la gravité de la situation à l'examen par la commission. La gravité de cette situation doit se traduire par la mise à disposition inconditionnelle de toute aide qui serait nécessaire. Il a exprimé son plein accord avec ce qui a été dit par les membres travailleurs qui l'ont précédé.

Le membre travailleur de la Suisse a constaté que le cas de la Colombie ne cesse de consterner les démocrates et les syndicalistes du monde entier. Les travailleurs suisses sont très inquiets et solidaires des syndicalistes colombiens. L'Union syndicale suisse a été interpellée à plusieurs reprises par sa base au cours des derniers mois à propos de ce que l'OIT réaliserait et ne réaliserait pas en vue d'aider à parvenir à recréer les conditions susceptibles de rétablir l'exercice de la liberté syndicale et de la négociation collective. La violence et les homicides dont sont victimes les syndicalistes colombiens n'ont que trop duré, et ce hélas en toute impunité. Force est de constater que les procédures mises en œuvre jusqu'ici sont restées sans grands effets. Le programme d'assistance projeté n'a toujours pas été réalisé. Il est inadmissible d'en rester là alors que le droit à la vie, les conventions de l'OIT et la Déclaration universelle des droits de l'homme sont bafoués en Colombie. La procédure ordinaire doit être reprise et une commission d'enquête doit être dépêchée sur place sans délai. Le programme d'assistance est à mettre en œuvre au plus tôt. Il est indécent de retarder son déroulement plus longtemps sous prétexte que son financement n'est pas assuré.

Le membre travailleur du Pakistan a réaffirmé que la situation en Colombie, où d'innocents syndicalistes sont brutalement assassinés, continue de préoccuper le peuple de la Colombie et la communauté internationale. Il n'y a eu aucune amélioration dans le respect des droits fondamentaux de liberté syndicale et de négociation collective. En ce qui concerne particulièrement les travailleurs dans les services publics, les syndicats ont été bannis d'une vaste gamme de services, lesquels ne sont pas nécessairement essentiels. De plus, la législation prévoit la possibilité de congédier des dirigeants syndicaux qui ont appelé à une grève illégale ou qui y ont participé. En dépit de l'engagement pris par le gouvernement devant la commission de modifier sa législation, les dispositions pertinentes demeurent inchangées. En outre, des décisions récentes de deux tribunaux constitutionnels vont à l'encontre du droit de négociation collective. En conséquence, un grand nombre de travailleurs employés dans des services publics comme les banques, les institutions financières, les transports, les communications, l'électricité, l'éducation et les hôpitaux publics ne peuvent faire valoir leurs revendications alors que les effectifs dans le service public sont réduits, souvent dans le contexte de mesures de privatisation. Les travailleurs dans ces services ont le droit de faire valoir leurs revendications et d'entamer des négociations collectives, particulièrement quand leurs emplois sont menacés. Toutefois, au lieu de promouvoir une solution négociée, les travailleurs dans les services non essentiels qui font la grève risquent d'être congédiés. La commission d'experts a soulevé cette question à de nombreuses reprises.

Le gouvernement est donc instamment prié de modifier sa législation du travail pour éliminer les restrictions sur les activités syndicales, notamment sur la négociation collective. Le gouvernement est aussi prié de ne pas entreprendre des mesures de restructuration dans les services publics, comme les hôpitaux et les télécommunications, sans offrir les protections nécessaires. Les travailleurs ne devraient pas être pénalisés en raison de leurs activités syndicales. Les travailleurs ne devraient pas être obligés de signer des contrats dans lesquels ils s'engagent à ne pas joindre les rangs de syndicats. L'OIT est priée de fournir une assistance afin d'améliorer la situation et il est à espérer que les conclusions de la commission sur ce cas figureront dans un paragraphe spécial de son rapport.

Le membre travailleur du Royaume-Uni a rappelé que ses collègues syndicalistes colombiens sont confrontés à la violence, aux meurtres et à la désolation sur une base quotidienne. Malgré tout, ils continuent d'essayer de s'organiser et de représenter leurs membres. En fait, c'est lorsqu'ils effectuent leurs activités syndicales qu'ils sont le plus souvent attaqués. Il a rappelé que l'année dernière il a lu les noms de 46 collègues syndicalistes tués au cours des cinq mois précédents et mentionné qu'il n'allait pas, cette année, lire les noms des 192 collègues qui ont été assassinés en 2001 ou tués depuis janvier 2002. L'augmentation de la violence contre les syndicalistes en Colombie est décrite comme une tentative pour éradiquer le mouvement syndical. Afin de donner une idée du niveau de violence à laquelle font face les dirigeants des syndicats colombiens et leurs membres, il a décrit les incidents survenus lors d'une mission du TUC au pays en février 2000. Il a notamment été mis au courant que des professeurs avaient été tués en classe en face de leurs élèves et que des gens en relation avec le mouvement syndical étaient menacés. Malgré toutes les discussions de la commission sur ce cas, la violence ne cesse d'augmenter. Le programme du ministre de l'Intérieur est limité et s'est terminé le 31 mai en raison d'un manque de fonds. Malheureusement, les gouvernements n'ont pas respecté leur engagement à contribuer au programme spécial de l'OIT, lequel inclut un programme de protection et a été présenté comme une alternative à la commission d'enquête.

Les meurtres se poursuivent avec impunité. Depuis 1986, 3 500 syndicalistes ont été assassinés. Des juges d'instruction risquent de se faire tuer ou ont été démis de leurs fonctions alors qu'ils étaient en cours d'enquête. Le bureau du Procureur général a rapporté qu'il n'y a eu que 376 enquêtes initiées dont seulement trois ont donné lieu à un procès, et que seulement quelques-unes de plus sont référées aux tribunaux militaires. Seulement 5 cas ont obtenu sentence. Cela constitue l'impunité la plus totale. Malgré la bonne volonté des travailleurs pour le pays, le fait est que les institutions se sont montrées incapables de résoudre le problème de l'impunité. Des faiblesses systématiques ébranlent l'efficacité du gouvernement et la démocratie. Il y a un manque de volonté de la part des politiciens. Les forces de sécurité ne semblent pas être sous le plein contrôle du gouvernement et il existe des liens entre les paramilitaires et quelques sections des forces armées qui demeurent nébuleux. La commission doit se demander ce qui peut être fait pour aider au mieux le gouvernement et les partenaires sociaux à briser le cercle vicieux de l'impunité. Le membre travailleur du Royaume-Uni a déclaré que seule une commission d'enquête de l'OIT peut aider. Cependant, une telle mesure ne doit pas être perçue comme une menace ou une punition mais comme étant la procédure la plus puissante des structures de contrôle de l'OIT. Une telle commission d'enquête va permettre de lever le voile sur de dures et horribles vérités. Mais, sans la vérité, aucune réconciliation et, sans réconciliation, aucune paix durable ne sera possible.

Le membre travailleur de la Suède a exprimé, au nom des travailleurs du Danemark, de la Finlande, de l'Islande, de la Norvège et de la Suède, sa solidarité avec les travailleurs et travailleuses colombiens et a réitéré son engagement à continuer la coopération avec les syndicalistes colombiens. Elle a constaté, avec un mélange de fureur et de profonde douleur, que la situation de violence et le nombre d'assassinats de syndicalistes empirent de jour en jour. En dépit des promesses et de l'apparente bonne volonté manifestée par le gouvernement l'année passée devant la commission, les assassinats continuent et les assassins continuent à courir librement dans les rues. Il n'y a aucun doute que les syndicalistes sont victimes d'une terreur systématique. Cela constitue une tragédie et démontre fondamentalement un échec accablant de la part du gouvernement. Son organisation, la Confédération des syndicats suédois, a visité le pays à maintes reprises. Il est difficile de comprendre ou de décrire la situation de tension constante dans laquelle vivent les syndicalistes, qui méritent admiration et profond respect. Cette année-ci, il faut franchir un pas définitif pour changer cette situation de terreur et de mort. L'établissement d'une commission d'enquête et le déploiement d'un vaste programme d'assistance technique de l'OIT sont les éléments clés pour lancer ce processus. Son organisation a exigé du gouvernement suédois qu'il se prononce, pendant la prochaine réunion du Conseil d'administration, sur la nécessité de financer pleinement le programme d'assistance technique pour la Colombie qui a été adopté l'année dernière. Des voies pour mettre fin à la violence en Colombie et pour garantir le plein exercice de la liberté syndicale existent. Il convient que le gouvernement fasse le premier pas et ne se dérobe pas à sa responsabilité.

Le membre gouvernemental du Danemark, s'exprimant aussi au nom des membres gouvernementaux de la Finlande, de l'Islande, de la Norvège et de la Suède, s'est référé au discours que l'Union européenne a fait l'année précédente devant la commission. Dans ce discours, le gouvernement était prié de prendre des mesures urgentes et efficaces pour assurer la protection juridique et physique de ceux affectés par la violence répandue dans le pays. L'Union européenne a repris cette question à nouveau aux sessions du Conseil d'administration de novembre 2001 et de mars 2002. Le climat de violence en Colombie suscite une grande inquiétude. Les syndicalistes continuent d'être victimes d'atteintes à leur vie, à leur intégrité physique, à leur sécurité et à leur liberté de mouvement. Dans la majorité des cas d'homicides, de tentatives d'homicides ou de disparition de syndicalistes, les responsables n'ont été ni arrêtés ni inculpés. Le haut niveau d'impunité est alarmant. Les garanties énoncées dans les conventions internationales du travail, en particulier celles concernant la liberté syndicale, ne peuvent réellement s'appliquer que si les droits civils et politiques reconnus par la Déclaration universelle des droits de l'homme sont véritablement reconnus et protégés. Le gouvernement doit sans tarder prendre des mesures adéquates pour protéger la vie et l'intégrité physique des syndicalistes et le droit de liberté syndicale, notamment en appliquant et en respectant les conventions fondamentales de l'OIT. A cet égard, les organisations de travailleurs devraient avoir le droit d'organiser librement leurs activités. Le gouvernement est prié depuis de nombreuses années de porter une attention particulière à certaines dispositions du Code du travail. Au cours de la mission de contacts directs qui a eu lieu en février 2000, un avant-projet de loi avait été préparé en vue de la modification de ces dispositions. Toutefois, même si le gouvernement s'est engagé à soumettre ce projet de loi au Congrès, il ne l'a pas encore fait. Le gouvernement est donc prié de s'assurer que l'avant-projet de loi sera soumis sans délai au Congrès en vue de son adoption. Il est également important de prendre des mesures pour donner effet à la loi. Enfin, le gouvernement doit, dans le prochain rapport qu'il remettra à l'OIT, informer la commission d'experts des progrès réalisés.

Le membre gouvernemental des Etats-Unis a noté que ce cas a été porté devant la commission d'experts et la Commission de la Conférence à plusieurs reprises. Des progrès relatifs aux contradictions législatives avec la convention no 87 ont eu lieu ces dernières années et le gouvernement a démontré un engagement quant à la promotion des méthodes recommandées par la commission d'experts. Cependant, la situation de la violence à l'égard des syndicalistes reste grave, plusieurs ayant connu une mort violente, et les menaces de mort à leur endroit ne cessent d'augmenter. Le programme spécial d'assistance technique pour la Colombie a été mis en œuvre pour promouvoir le dialogue social, améliorer les relations de travail et protéger les syndicats à risque. Les Etats-Unis apportent leur appui à ce programme et encouragent l'utilisation des surplus budgétaires pour le financer. La liberté d'association joue un rôle clé dans l'accomplissement de la paix, la justice sociale, la réconciliation et la démocratie en Colombie. L'orateur espère que le nouveau gouvernement continuera, avec l'aide de l'OIT et de façon urgente, de prendre les mesures nécessaires, en droit et en pratique, afin de protéger adéquatement la liberté syndicale et le droit d'association.

Le représentant du gouvernement a déclaré qu'il a écouté très attentivement les interventions des membres employeurs et travailleurs, de même que les déclarations des membres gouvernementaux. Il n'est pas possible de cacher la violence en Colombie comme en témoignent les assassinats de milliers de Colombiens, dont ceux de syndicalistes, d'enfants, de prêtres (incluant l'évêque de Calí) et de dizaines de journalistes. De plus, on rapporte des milliers d'enlèvements, notamment ceux de 6 parlementaires, d'un gouverneur, de 45 officiers des forces armées. Même une candidate à la présidence de la République a été enlevée. On note aussi que de nombreux entrepreneurs ont été enlevés ou assassinés et des juges et des maires ont fait l'objet de menaces de mort. La situation de violence très grave qui prévaut en Colombie constitue une dégradation de la dignité humaine.

La communauté internationale suit de près les efforts de paix. Le Président de la République a fait tout son possible pour entamer un dialogue avec les FARC et l'ELN mais, dans le contexte actuel, le dialogue est rompu. L'orateur reconnaît l'existence de groupes de justice privée et d'autodéfense reliés à l'extrême droite.

Depuis que l'orateur a été nommé ministre du Travail, c'est-à-dire depuis les 23 derniers mois, aucune demande d'enregistrement de syndicats n'a été refusée. Le gouvernement s'est même abstenu de présenter au Congrès un projet de loi réglementant le droit de grève dans les services publics essentiels par crainte que les amendements éventuels ne fassent plus de mal que de bien dans un domaine où les progrès doivent être réalisés par des consultations tripartites.

L'orateur a déclaré qu'il comprend que la Commission de la Conférence voulait prendre des mesures et a souligné qu'aucune des propositions faites par la commission ne serait rejetée par le gouvernement. Il a insisté pour dire que l'esprit du paragraphe spécial adopté l'an dernier par la Commission de la Conférence était toujours d'actualité. Durant l'administration actuelle du gouvernement, tout a été entrepris dans le sens de ce paragraphe spécial. Une commission d'enquête ne mettra pas un terme au problème de la violence et ne contribuera qu'à créer des attentes sans arrêter le génocide qui est en cours en Colombie.

Afin de mettre fin au génocide, il est nécessaire de réaliser des accords politiques et sociaux entre tous les habitants de la Colombie. Ces accords doivent inclure l'Etat, les guérilleros, les syndicats et les employeurs, les paramilitaires et l'ensemble de la société colombienne. Dans les conditions actuelles, une commission d'enquête ne peut qu'envoyer un message trompeur et aggraver la violence.

Le syndicalisme est une institution importante de la démocratie. En Colombie, plusieurs employeurs sont en faveur de la paix et du dialogue social et certains s'inspirent des activités des organisations de travailleurs et d'employeurs de Suède.

L'orateur insiste sur la nécessité de renforcer le programme spécial de coopération technique pour la Colombie en utilisant les surplus budgétaires de l'OIT et en mettant l'accent sur une conception globale du problème colombien. L'orateur est reconnaissant des efforts réalisés par l'OIT pour s'occuper des problèmes en Colombie et souhaite que cela continue afin de surmonter la violence et réaliser la reconstruction du pays dans la paix durable et la justice sociale.

Les membres travailleurs ont déclaré qu'il était difficile d'avoir un débat sur une situation où l'on peut à peine parler de liberté syndicale. Si, assurément, le présent cas suscite une profonde émotion, il n'en demeure pas moins que des faits en sont à l'origine. La législation touchant au domaine syndical reste en contradiction avec la convention no 87. Des syndicalistes continuent d'être assassinés à cause de leur engagement, et d'autres font l'objet de menaces ou de poursuites. L'impunité totale qui entoure les actes criminels perpétrés contre des syndicalistes bafoue les principes de la liberté syndicale. La ligne suivie par le gouvernement équivaut à une criminalisation de l'action syndicale. C'est pourquoi les membres travailleurs ont demandé que le gouvernement accepte une commission d'enquête de l'OIT, laquelle pourrait avoir un impact important, et ont soutenu la proposition faite par le membre gouvernemental du Danemark, au nom des membres gouvernementaux des pays nordiques, de consacrer l'excédent budgétaire de l'Organisation au programme de protection des syndicats. Le défaut d'application de la convention no 87 par le gouvernement justifie, à leurs yeux, l'inclusion de ce cas dans un paragraphe spécial du rapport de la Commission de la Conférence.

Les membres employeurs ont noté qu'il est évident, suite aux discussions, que le problème actuel est vaste, a des motifs complexes et n'est pas limité aux questions de lois portant sur le travail mais qu'il touchait tous les domaines. Ils estiment donc que le problème n'est pas entièrement couvert par le mandat de l'OIT, qui n'a ni le droit ni les moyens d'entreprendre sa résolution. Ils notent que le problème cherchait toujours solution malgré les mesures prises par le gouvernement qui a, en outre, soulevé que de nouvelles mesures pouvaient avoir des contre-effets. Ils croient qu'il est difficile d'identifier l'approche adéquate au problème et concluent que la situation a besoin d'être décrite dans des termes plus clairs et objectifs. Finalement, le gouvernement doit pouvoir élaborer une proposition, sans préjudice.

Les membres travailleurs ont accepté les conclusions, telles que présentées par le président de la commission et ont condamné sévèrement l'attitude des membres employeurs qui empêche le consensus sur l'inclusion des conclusions dans un paragraphe spécial. Ils ont estimé que, de ce fait, les membres employeurs refusent implicitement de reconnaître l'aggravation du climat de violence dans le pays. Ils ont demandé que des mesures immédiates soient prises pour assurer le respect de la liberté syndicale. Enfin, les membres travailleurs se sont référés à leur intervention précédente concernant la sauvegarde de la sécurité personnelle des syndicalistes et l'utilisation du surplus budgétaire du BIT pour financer les activités du Programme spécial d'assistance technique pour la Colombie.

Les membres employeurs ont réservé leur position à l'égard de la déclaration précédente.

Les membres employeurs se sont de nouveau opposés à l'inclusion du cas de la Colombie dans un paragraphe spécial et ont protesté contre les allégations des travailleurs. La déclaration des membres travailleurs est contradictoire et non correcte en substance. Les membres employeurs ont accepté sans réserve les conclusions sur le cas de la Colombie qu'ils ont élaborées avec les membres travailleurs. Ils rejettent donc fermement l'assertion des membres travailleurs selon laquelle les membres employeurs refuseraient de reconnaître les réalités en Colombie. Ces douze dernières années, un esprit de coopération et non de confrontation règne au sein de cette commission. Mais c'est également dans cet esprit qu'il faut de temps en temps accepter de ne pas être d'accord. Il serait dangereux d'abandonner ou de mettre en danger cet esprit de coopération. Les conséquences en seraient regrettées par tous.

Le président a souligné que par définition le cas avait été clos.

Les membres travailleurs ont pris note de cela et n'ont pas souhaité rouvrir le débat.

La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi. La commission a observé avec une profonde préoccupation qu'une grave situation de violence continue à prévaloir dans le pays. Elle a rappelé que cette dramatique situation a fait l'objet et continue à faire l'objet de nombreuses plaintes devant le Comité de la liberté syndicale et qu'une plainte avait été déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution en juin 1998. La commission a une fois de plus condamné avec la plus grande fermeté les assassinats et enlèvements des syndicalistes ainsi que les séquestrations d'employeurs. La commission a rappelé que les organisations de travailleurs et d'employeurs ne peuvent exercer librement et significativement leurs activités que dans un climat exempt de violence. Elle a exhorté le gouvernement à prendre de toute urgence les mesures nécessaires pour que cesse cette situation d'insécurité et que les organisations de travailleurs et d'employeurs puissent pleinement exercer les droits qui leur sont reconnus par la convention, en restaurant le respect des droits fondamentaux de l'homme et notamment le droit à la vie et à la sécurité. A cette fin, la commission a demandé instamment au gouvernement d'établir et de renforcer les institutions nécessaires pour mettre un terme à l'intolérable situation d'impunité qui règne dans le pays et qui constitue un grave obstacle au libre exercice des droits syndicaux. La commission a noté par ailleurs que les questions concernant l'application de la convention no 87 ont été soumises à la Commission de concertation sur les politiques salariales et du travail. La commission a lancé un appel pressant au gouvernement pour qu'il prenne immédiatement les mesures nécessaires en vue de garantir une pleine application de la convention tant en droit qu'en pratique. Elle a demandé au gouvernement de présenter un rapport complet à cet égard pour que la commission d'experts puisse examiner à nouveau la situation à cet égard dès sa prochaine session. La commission a exprimé l'espoir que la plainte déposée en juin 1998 en vertu de l'article 26, toujours en instance, fera l'objet d'un réexamen du Conseil d'administration, en vue d'utiliser tous les moyens appropriés en sa possession, particulièrement les programmes de coopération technique permettant de contribuer au plein respect en droit et en pratique de la convention no 87. Au cas où le gouvernement ne tirerait pas pleinement profit de cette coopération technique, la commission se verrait dans l'obligation d'envisager des mesures plus fortes l'an prochain. La commission a noté la déclaration du ministre selon laquelle l'esprit du paragraphe spécial adopté l'an dernier prévaut toujours.

Les membres travailleurs ont accepté les conclusions, telles que présentées par le président de la commission et ont condamné sévèrement l'attitude des membres employeurs qui empêche le consensus sur l'inclusion des conclusions dans un paragraphe spécial. Ils ont estimé que, de ce fait, les membres employeurs refusent implicitement de reconnaître l'aggravation du climat de violence dans le pays. Ils ont demandé que des mesures immédiates soient prises pour assurer le respect de la liberté syndicale. Enfin, les membres travailleurs se sont référés à leur intervention précédente concernant la sauvegarde de la sécurité personnelle des syndicalistes et l'utilisation du surplus budgétaire du BIT pour financer les activités du Programme spécial d'assistance technique pour la Colombie.

Les membres employeurs ont réservé leur position à l'égard de la déclaration précédente.

Les membres employeurs se sont de nouveau opposés à l'inclusion du cas de la Colombie dans un paragraphe spécial et ont protesté contre les allégations des travailleurs. La déclaration des membres travailleurs est contradictoire et non correcte en substance. Les membres employeurs ont accepté sans réserve les conclusions sur le cas de la Colombie qu'ils ont élaborées avec les membres travailleurs. Ils rejettent donc fermement l'assertion des membres travailleurs selon laquelle les membres employeurs refuseraient de reconnaître les réalités en Colombie. Ces douze dernières années, un esprit de coopération et non de confrontation règne au sein de cette commission. Mais c'est également dans cet esprit qu'il faut de temps en temps accepter de ne pas être d'accord. Il serait dangereux d'abandonner ou de mettre en danger cet esprit de coopération. Les conséquences en seraient regrettées par tous.

Le président a souligné que par définition le cas avait été clos.

Les membres travailleurs ont pris note de cela et n'ont pas souhaité rouvrir le débat.

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