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Individual Case (CAS) - Discussion: 1997, Publication: 85th ILC session (1997)

Discrimination (Employment and Occupation) Convention, 1958 (No. 111) - Iran (Islamic Republic of) (Ratification: 1964)

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Le représentant gouvernemental a exprimé l'engagement de son gouvernement vis-à-vis des normes internationales du travail et le voeu que la commission ait un dialogue fructueux. Il a souligné que la commission d'experts, au paragraphe 1 de son observation, se réfère au rapport détaillé du gouvernement ainsi qu'à la documentation et aux statistiques fournies. Le gouvernement a communiqué depuis l'année dernière une somme d'informations sans précédent. C'est la preuve qu'il a véritablement fait un effort pour coopérer avec les organes de contrôle de l'OIT, et il semble que cette coopération ait permis à la commission d'experts d'être mieux informée des réalités. Si de nombreuses questions en suspens depuis longtemps ont été réglées, d'autres peuvent être résolues par des améliorations supplémentaires au système de rapport du gouvernement ou d'autres formes de la nécessaire coopération.

Le paragraphe 2 du rapport de la commission d'experts résume la discussion de l'année dernière au sein de la Commission de la Conférence ainsi que les réponses du gouvernement et exprime l'espoir que, dans son prochain rapport, le gouvernement fournisse des informations sur les contacts pris avec le Bureau en ce qui concerne la coopération technique. Le représentant gouvernemental a assuré la commission que le prochain rapport contiendrait certainement ce type d'information. En fait, de tels contacts ont déjà eu lieu et ont conduit à des résultats concrets en matière de coopération technique, ce qui est un élément assez nouveau dans les relations du gouvernement avec les organes de contrôle de l'OIT. Lors d'une mission de trois jours en avril 1997, des fonctionnaires du siège de l'OIT ont rencontré des membres de la Commission parlementaire sur le travail et les affaires sociales et participé à un séminaire tripartite de formation à Téhéran, organisé avec l'aide du BIT. Ces deux événements ont été l'occasion d'aborder un certain nombre de conventions fondamentales de l'OIT, notamment la convention no 111. Le séminaire de formation était destiné aux fonctionnaires chargés de l'application de la convention, y compris aux directeurs généraux et fonctionnaires du ministère du Travail aux niveaux central et provincial, et a couvert différents aspects de la convention et de son application. Dans les jours qui ont suivi, la mission a reçu des informations de première main des différentes parties intéressées. Elle a examiné avec le directeur général du Travail et des Affaires sociales du Grand Téhéran (qui connaît la concentration industrielle la plus importante du pays) et les représentants des organisations d'employeurs et de travailleurs les mécanismes nationaux de mise en oeuvre du Code du travail - notamment les dispositifs de non-discrimination ou d'arbitrage. La mission a également eu des entretiens avec la responsable du réseau d'ONG s'occupant des femmes. Des réunions distinctes ont également eu lieu avec des femmes supervisant des projets et activités pour l'emploi et le placement des femmes et visant l'amélioration de la situation économique et sociale des femmes rurales. Enfin, la mission a visité deux des plus grandes entreprises du pays. On peut donc estimer que cette coopération technique a suscité un dialogue intensif avec les organes de contrôle de l'OIT pendant l'année écoulée et espérer la continuation d'une coopération aussi efficace.

Se référant au paragraphe 5 de l'observation de la commission d'experts, le représentant gouvernemental a souligné le fait que celle-ci avait noté avec intérêt l'information selon laquelle des personnes d'une confession autre que l'islam avaient obtenu l'accès à une éducation universitaire et aux conseils islamiques du travail et sur l'existence de différents types d'organisations du travail. Au paragraphe 6 du rapport, la commission d'experts se félicite de la clarification d'une question très importante concernant une directive qui a été, pendant de nombreuses années, l'objet de controverses; une copie de la directive abrogeant la précédente directive a été communiquée au BIT. Les paragraphes 7 et 8 ont noté avec intérêt des développements pertinents; le paragraphe 9 du rapport fait état d'une communication de la Confédération internationale des syndicats libres qui a été transmise au gouvernement et qui sera examinée lors de la prochaine session de la commission d'experts.

L'orateur a assuré la commission que son gouvernement fournirait un rapport détaillé et substantiel à la commission d'experts. Le fait que le rapport détaillé de l'année dernière de son gouvernement ait été dûment examiné par la commission d'experts ne pouvait qu'encourager celui-ci à coopérer et dialoguer avec cet organe. Il a exprimé l'espoir qu'un dialogue positif analogue puisse avoir lieu au sein de la présente commission.

Les membres travailleurs ont remercié le représentant gouvernemental pour ses brefs commentaires. Le gouvernement a transmis un rapport détaillé et il convient d'espérer que le dialogue se poursuivra tant avec la commission d'experts qu'avec la présente commission. Celle-ci discute de ce cas depuis de nombreuses années; l'année dernière, à l'issue d'une discussion en profondeur, et compte tenu du fait que le gouvernement ne s'était pas engagé à accepter une mission de contacts directs, elle a mentionné ce cas dans un paragraphe spécial. Depuis lors, le gouvernement ne semble toujours pas avoir accepté formellement l'envoi d'une telle mission, ce qui ne manquera pas d'avoir des conséquences sur la nature des conclusions à adopter. Celles-ci pourraient le conduire à envisager de nouveau la possibilité d'une mission de contacts directs. Mais le gouvernement semble préférer le recours à la coopération technique. On ne peut écarter l'impression que le gouvernement cherche à gagner du temps, car la coopération technique et une mission de contacts directs sont de nature différente: la mission de contacts directs vise à évaluer la situation réelle et l'impact dans la pratique des mesures que le gouvernement mentionne dans son rapport. Des rapports détaillés sont nécessaires sans être suffisants. Tout comme la coopération technique, ils permettent le maintien du dialogue et favorisent la compréhension mutuelle. Mais un rapport détaillé peut aussi voiler la situation réelle. Les dispositions légales peuvent être annulées par d'autres dispositions ou d'autres mesures d'exécution; leur effet pratique peut être neutralisé par un pouvoir parallèle institutionnalisé qui semble disposer d'une légitimité constitutionnelle ainsi que de moyens de pression importants, quelle que soit la majorité parlementaire. L'observation de la commission d'experts est riche en informations, mais celles qui concernent la portée pratique des mesures décrites émanent dans une large mesure du gouvernement lui-même. D'autres informations, qui figurent en partie aux paragraphes 3 et 4 de l'observation, jettent une tout autre lumière sur la situation réelle. Il est indispensable que le BIT et la commission d'experts soient à même d'analyser ces informations pour évaluer la situation. Une mission de contacts directs serait le moyen approprié, eu égard au fait que le tripartisme, qui permettrait la confrontation des opinions, ne semble pas opérationnel dans le pays.

En ce qui concerne le recrutement, le gouvernement avoue implicitement qu'une priorité est accordée aux personnes de la religion officielle, mais pour en minimiser la portée. Il reconnaît en effet que cette priorité s'applique au corps enseignant, qui compte plus d'un million de membres et représente donc une part significative du marché de l'emploi. De surcroît, la loi no 14928 du 7 juin 1996 a étendu cette priorité d'embauche à l'ensemble de la fonction publique, ainsi qu'aux entreprises parapubliques et aux entreprises industrielles importantes. Une nouvelle législation l'a encore étendue à certaines professions indépendantes, comme c'est le cas pour l'accès des avocats au barreau. Par ailleurs, le gouvernement n'a pas répondu à l'observation de la commission d'experts sur la publication d'offres d'emploi discriminatoires. En matière d'enseignement, les conditions d'agrément des écoles établies par les minorités religieuses reconnues imposent d'avoir recours à des dirigeants appartenant à la religion officielle.

S'agissant de la discrimination contre les minorités, selon certaines informations, les Baha'is seraient simplement considérés comme des terroristes par de hauts responsables du régime, et 200 d'entre eux auraient été exécutés depuis 1979, tandis que des milliers d'autres étaient emprisonnés ou licenciés. Le Rapporteur spécial des Nations Unies, qui s'est rendu dans le pays en décembre 1995, a recueilli des déclarations de Baha'is, qui lui ont déclaré formellement qu'ils étaient victimes de discrimination en matière d'emploi. D'autres sources font encore état de l'assassinat de prêtres chrétiens sans que le gouvernement ait rien entrepris pour en rechercher les auteurs. En ce qui concerne la discrimination sur la base de la religion et les conseils islamiques du travail, le paragraphe 5 de l'observation note l'explication du gouvernement selon laquelle les travailleurs ont le choix entre trois modes de représentation: la constitution de syndicats, l'élection de représentants ou la constitution de ces conseils, et son indication, statistiques à l'appui, que la majorité des travailleurs ont opté pour la formule des conseils islamiques du travail. Mais ces chiffres doivent être replacés dans le contexte législatif d'ensemble et dans le cadre du système de relations professionnelles. Aux termes du code du travail, le ministère du Travail est tenu de constituer des conseils islamiques du travail dans toute entreprise comptant plus de 35 travailleurs: il n'y a donc pas de choix dans ces entreprises. Dans les entreprises de moins de 35 travailleurs, le libre choix n'est pas effectif puisque les responsables religieux ou politiques ont le droit de désigner un représentant. Et c'est l'assemblée des conseils islamiques du travail qui désigne les représentants à toutes les commissions consultatives, ainsi qu'à la délégation pour la Conférence internationale du Travail. Faute de preuve du contraire par le gouvernement, confirmée par la commission d'experts, on ne peut que conclure à l'existence d'une discrimination institutionnalisée dans le système de relations professionnelles et d'administration du travail.

S'agissant de la discrimination fondée sur le sexe dans l'appareil judiciaire, il revient à la commission d'experts d'évaluer la portée réelle de l'amendement à la loi sur les nominations mentionné par le gouvernement. Selon les informations disponibles, les femmes n'y occupent que des fonctions de conseil et d'assistance dans l'administration judiciaire et les services de protection de l'enfance, et sont exclues de la magistrature proprement dite. Plus généralement, il convient d'insister auprès du gouvernement pour qu'il fournisse dans son prochain rapport des informations complètes sur l'éducation et la formation des femmes, leurs possibilités d'emploi et leur participation à la vie professionnelle et pour qu'il transmette les statistiques pertinentes.

En conclusion, la situation réelle doit d'urgence être clarifiée. Les informations fournies par le gouvernement, pour détaillées qu'elles soient, ne sont pas pleinement convaincantes. La commission d'experts doit encore analyser en profondeur l'ensemble des dispositions et la pratique en matière d'emploi. Enfin, une mission de contacts directs est indispensable pour apprécier la situation. Le cas devrait être mentionné dans un paragraphe spécial si le gouvernement refusait de demander l'envoi d'une telle mission.

Les membres employeurs ont rappelé que ce cas faisait l'objet de commentaires de la commission d'experts depuis quinze ans, qu'il était déjà venu en discussion devant la présente commission à dix reprises et avait été mentionné six fois dans un paragraphe spécial. Comme toujours, le représentant gouvernemental se montre coopératif, mais il n'apporte pas d'éléments nouveaux. Le recours à la coopération technique est un élément positif, mais la question se pose de savoir s'il peut se substituer à l'envoi d'une mission de contacts directs, comme la présente commission l'avait recommandé l'année dernière. L'essentiel de l'observation de la commission d'experts tient dans ses paragraphes 3 et 4, qui font état d'informations préoccupantes ayant trait à des discriminations sur la base du sexe, de la religion ou de l'opinion politique. Alors que le volume de la population s'est accru, le nombre moyen de femmes sur le marché du travail a chuté. Bien que le gouvernement prétende le réfuter, il est avéré que la priorité dans l'emploi est donnée aux personnes de religion musulmane, et que ce critère est appliqué non seulement dans les ministères, mais également dans le secteur public et dans l'ensemble des entreprises à participation publique qui ont un poids particulier en Iran. Les statistiques concernant les entrées à l'université ne constituent pas à elles seules un argument suffisant pour démentir la commission d'experts. En outre, les offres d'emploi publiées par les journaux mettent en évidence la pratique consistant à donner la priorité aux musulmans. Quant à l'existence, en théorie, de trois formes de représentation des travailleurs, elle est limitée par d'autres dispositions et par la pratique. La réponse du gouvernement est également très insuffisante en ce qui concerne les discriminations sur la base de la religion à l'encontre des Baha'is, notée aussi par le Rapporteur spécial des Nations Unies sur l'intolérance religieuse. Une clarification urgente s'impose. Selon le gouvernement, l'article 1117 du Code civil, qui interdit aux femmes de travailler sans l'accord de leur mari, n'est applicable qu'aux seuls musulmans mais, comme ces derniers représentent la quasi-totalité de la population, cette disposition discriminatoire s'applique en fait à presque tout le monde. Comme l'ont indiqué les membres travailleurs, les femmes restent exclues des fonctions judiciaires. Le gouvernement souligne que le nombre de femmes entrant dans la population active ne cesse de croître, bien que certains travaux dangereux leur restent interdits. Compte tenu de l'évolution de cette notion de travaux dangereux, on est désormais plus attentif à ce que les dispositions protectrices ne soient pas un moyen déguisé de discrimination sur la base du sexe. L'envoi d'une mission de contacts directs semble bien la procédure appropriée pour évaluer la situation sur chacun de ces points. L'année dernière, le représentant gouvernemental avait déclaré qu'il n'était pas en mesure d'engager son gouvernement à ce sujet. Aujourd'hui, il ne considère pas qu'une telle mission soit nécessaire. Les récentes élections ont amené un nouveau gouvernement aux affaires, mais il est malaisé de prédire quelle sera l'évolution politique car, contrairement à ce qui se passe dans les démocraties parlementaires, il existe en République islamique d'Iran de puissantes autorités qui ne tirent pas leur légitimité du vote des citoyens. Il ne s'agit pas là d'un jugement de valeur mais de faits. Les conclusions de la présente commission doivent faire l'objet d'un paragraphe spécial et l'on doit insister auprès du gouvernement pour qu'il demande l'envoi d'une mission de contacts directs à brève échéance.

Le membre travailleur de l'Espagne s'est déclaré préoccupé par la teneur de l'article 1117 du Code civil qui permet à l'époux d'empêcher sa femme d'accepter une profession ou un travail contraire aux intérêts de la famille, aux siens ou à la réputation de son mari. On peut craindre qu'il existe également une procédure permettant à l'époux de faire valoir ses droits devant les tribunaux, ce qui revient, en pratique, à faire de l'homme le tuteur de sa femme comme du reste de la famille. Comme l'ont fait valoir les membres employeurs, il s'agit d'une discrimination institutionnalisée qui doit être fermement condamnée. Le gouvernement est en contradiction avec lui-même lorsqu'il déclare que la Constitution consacre le droit au travail alors que le Code civil ne s'applique qu'à ceux qui ont contracté mariage selon les règles de l'islam. Ces dispositions du Code civil s'appliquent à la majorité des Iraniens et il ne semble pas exister, en République islamique d'Iran, de distinction entre religion et Code civil. Le fait que le Code civil n'instaure pas un traitement égalitaire crée une situation contraire à la convention. L'orateur a rappelé que ce cas est abordé depuis de nombreuses années, notamment sur le plan de la discrimination fondée sur des motifs religieux à l'égard des francs-maçons, des Zoroastriens et des Baha'is. Si les observations de la commission d'experts ne concernent, en grande partie, que les adeptes de cette dernière confession, il convient, tout en poursuivant l'action en leur faveur, de ne pas méconnaître les problèmes concernant les autres minorités du pays faisant l'objet de discrimination. Pour conclure, l'orateur a préconisé que la commission insiste auprès du gouvernement pour que celui-ci accepte une mission de contacts directs.

Le membre travailleur des Pays-Bas s'est rallié aux considérations développées par les autres membres travailleurs sur ce cas. Il a signalé que la présentation des observations de la commission d'experts soulevait quelques difficultés du fait que, habituellement, le rapport prend note des informations du gouvernement, les analyse puis tire ses conclusions, tandis que, cette année, la commission d'experts se borne à prendre note, sauf au paragraphe 6, des informations fournies par le gouvernement et mentionne la discussion de l'année précédente sur ce cas au paragraphe 2. De ce fait, rien n'indique que toutes les informations disponibles aient été analysées. Ainsi, les orientations habituellement définies par la commission d'experts à l'intention de la commission de la Conférence font défaut. Il aurait été préférable que la commission d'experts explique, en s'appuyant sur des arguments clairs, pourquoi la situation est d'une complexité et d'une gravité telles qu'elle nécessite une mission de contacts directs. En souhaitant que la commission d'experts donne des éclaircissements à ce sujet l'an prochain, l'intervenant a déclaré souscrire aux propositions de son groupe concernant la forme à donner aux conclusions de la commission.

Le membre travailleur de la Turquie a déclaré que la République islamique d'Iran connaît toujours une situation de discrimination systématique dans l'emploi et la profession sur la base du sexe, de la religion et de l'opinion politique. Ainsi, la discrimination fondée sur le sexe découle de la loi islamique, la charia. Selon cette loi, les hommes sont considérés comme supérieurs aux femmes en intelligence, en savoir et en force. L'orateur a fait un certain nombre de citations à l'appui de ses dires. Il s'est interrogé sur la possibilité de l'égalité en matière d'emploi et de profession dans un Etat fondé sur la religion et qui considère les femmes comme inférieures aux hommes. Cette discrimination se trouve confirmée par la législation, notamment les articles 899 à 902, 1122 et 1123, 1133 et 1134, 1169 et 1180 du Code civil. En ce qui concerne la discrimination fondée sur la religion, celle-ci revêt en Iran trois formes différentes. Tout d'abord, la discrimination à l'égard des "religions officiellement reconnues". Quelques formes de cette discrimination se retrouvent dans la législation, mais la plupart se manifestent au quotidien. En second lieu, la discrimination à l'égard des religions qui ne sont pas officiellement reconnues: comme les Baha'is. Troisièmement, la discrimination à l'égard des musulmans qui n'observent pas les préceptes de l'islam. Il existe en Iran, comme dans tout pays où l'Etat n'est pas laïc, une discrimination systématique en matière d'emploi et de profession à l'égard des musulmans ayant des convictions laïques et considérant que la religion est une affaire strictement personnelle. En vertu de l'ordonnance gouvernementale du 13 août 1995, en Iran, tout individu ayant une religion mais n'observant pas ses préceptes n'a pas le droit de travailler. Pour conclure, l'orateur a déclaré qu'à moins d'une séparation entre la religion et l'Etat et à moins d'un système laïc reposant sur une démocratie authentique il n'existe aucun espoir de mettre un terme à la discrimination en matière d'emploi et de profession. Il s'est enfin déclaré fermement en faveur de la mention du cas de l'Iran dans un paragraphe spécial si le gouvernement de ce pays n'accepte pas la mission de contacts directs.

Le membre travailleur de la Grèce a fait observer qu'il était difficile de ne pas parler de religion lorsque l'on a précisément à traiter d'un cas de discrimination sur la base de la religion. Ce n'est pas la première fois qu'est évoquée cette situation et c'est un procédé facile que d'accuser de partialité ceux qui apportent des éléments d'information, tels ceux émanant d'Amnesty International, qui démontrent la violation des normes. Aucun pays ne peut fonder sa prospérité sur l'exploitation ou la discrimination d'une partie de sa population, et l'histoire enseigne que tout pouvoir ayant de telles pratiques finit toujours par être renversé. Un certain progrès est perceptible au moins dans la volonté affichée par le gouvernement de poursuivre le dialogue. S'il ne répond qu'au souci du gouvernement de soigner son image sur la scène internationale, ce dialogue est inutile. Mais si le gouvernement est réellement disposé à collaborer avec l'OIT pour la recherche de solutions, il doit alors le démontrer en demandant l'envoi d'une mission de contacts directs. La position commune aux membres travailleurs et employeurs à cet égard doit être appuyée, et le gouvernement doit donner une réponse claire à ce sujet.

Le membre travailleur du Royaume-Uni a souligné que, si les statistiques citées dans le rapport d'experts font apparaître une expansion de la population, il en ressort également que le chiffre moyen des femmes actives sur le marché du travail est tombé de 15,94 pour cent en 1976 à 10,73 pour cent en 1991. Un rapport publié par le Centre iranien de statistiques en 1994 révèle que l'on compte en moyenne 5,92 femmes pour 100 hommes dans les établissements industriels. D'une manière générale, les femmes disparaissent de la vie publique. Certaines professions et certains emplois ne sont pas accessibles aux femmes et l'on se demande ce que les autorités font devant cette situation. Les femmes, dans leur grande majorité, n'ont pas le droit de prendre un emploi sans l'autorisation de leur mari. De ce fait, ce sont eux qui décident des emplois auxquels elles peuvent accéder. Par ailleurs, si le représentant gouvernemental déclare qu'à l'heure actuelle, dans l'appareil judiciaire, les postes, aux différents échelons, sont pourvus par 97 femmes, il y a lieu de se demander si ce sont elles qui exercent activement les fonctions de magistrat, de juge, d'avocat ou d'administrateur. La question est de savoir si les femmes rendent actuellement la justice. S'agissant de l'éducation non traditionnelle et supérieure, les statistiques ne permettent pas de mettre en évidence les progrès accomplis. Il n'y a pas d'informations sur les chiffres de base, seulement sur les pourcentages, et cela n'explique pas grand-chose. On ne saurait toutefois examiner ces points spécifiques sans prendre en considération le contexte global de la vie des femmes en Iran. A cet égard, l'oratrice a évoqué le rapport de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies d'avril 1997 (53e réunion). A la lumière de ce document, on conçoit difficilement comment les prescriptions de cette convention peuvent être respectées, dans une situation où sont systématiquement institutionnalisées la ségrégation, la répression et l'oppression des femmes.

Le membre travailleur de l'Italie a relevé que, bien que les réponses du gouvernement soient détaillées, il n'en ressort pas d'élément concret, ni sur l'absence d'égalité des chances pour les femmes, dont le travail est subordonné à l'accord du mari et qui doivent subir la pression quotidienne des groupes religieux, ni sur la discrimination à l'encontre des Baha'is et d'autres minorités religieuses dans l'enseignement et l'accès à l'emploi. Le principe de tolérance religieuse consacré par l'article 23 de la Constitution iranienne est bafoué par un ensemble de dispositions discriminatoires dans la pratique. Le critère de la religion pour l'accès à l'emploi dans l'enseignement a été étendu à toute une nouvelle gamme de secteurs, et aucun signe d'assouplissement n'a été enregistré depuis la discussion de l'année dernière. Le recours à la coopération technique du BIT ou l'acceptation de la visite du Rapporteur spécial des Nations Unies sont toutefois des signes encourageants. Mais il est clair que seul l'envoi d'une mission de contacts directs bien préparée pourrait faire réellement progresser la situation.

Les membres gouvernementaux du Koweït et de l'Arabie saoudite ont affirmé que la commission ne devrait pas traiter de questions de nature politique ou religieuse.

Le représentant gouvernemental a observé que la plupart des déclarations faites au sein de la présente commission discréditaient l'OIT et ses organes de contrôle ainsi que toutes discussions ultérieures sur le renforcement du système de contrôle. Nombre des interventions sont en fait des déclarations de nature politique faites à l'encontre d'un gouvernement élu démocratiquement, et non des déclarations sur des faits contenus dans le rapport de la commission d'experts. Il n'y a pas lieu de répondre à des déclarations politiques. En outre, les affirmations de nombreux orateurs déplorant le manque d'information ou de statistiques fournies par le gouvernement ne sont pas exactes puisque celui-ci a communiqué à la commission d'experts un rapport de plus de 100 pages. Quant au rapport des Nations Unies, auquel s'est référé l'un des précédents orateurs, il n'est pas véritablement un rapport des Nations Unies. Quant à la déclaration relative à l'oppression et à la répression des femmes, elle est directement tirée d'un document qui a été distribué dans le bâtiment du BIT par un groupe venant d'un pays limitrophe de la République islamique d'Iran. L'orateur a indiqué qu'ayant noté que la commission d'experts avait examiné de manière approfondie le dernier rapport détaillé de son gouvernement il avait eu l'espoir qu'un dialogue s'instaurerait au sein de cette commission. Le débat au sein de la présente commission contient des allégations hautement politiques telles que l'affirmation selon laquelle le tripartisme n'existe pas, la désignation d'office à des postes électifs ou l'assassinat de prêtres qu'il réfute énergiquement. Les allégations concernant l'article 11A du Code civil ne prennent pas en considération la lettre du texte dont les dispositions accordent les mêmes droits aussi bien au mari qu'à la femme de saisir les tribunaux; de telles dispositions existent dans d'autres pays. Les affirmations d'un orateur précédent, mettant en cause la pertinence des statistiques fournies par le gouvernement, reposent sur des sources elles-mêmes non fiables. On ne peut pas affirmer, comme l'a fait l'un des orateurs précédents, que son pays avait accepté l'année dernière l'idée d'une mission de contacts directs. En ce qui concerne cette question, le rapport de la commission d'experts reflète correctement la position du gouvernement. Compte tenu de la teneur de la discussion qui eut lieu au sein de la présente commission, il est clair qu'une mission de contacts directs ne serait pas la bienvenue. Il existe en outre une raison pratique à cela: le nouveau gouvernement n'entrera en fonctions que le mois prochain. L'orateur a conclu ses propos en affirmant qu'il était fier de son pays et de sa religion, tout en respectant les autres religions.

Les membres employeurs se sont dits déçus par les explications du représentant gouvernemental ainsi que par son attitude consistant à protester contre l'évocation de questions ayant trait à la religion. Ce n'est pas ainsi que l'on mène un dialogue et il ne s'agit pas de discuter de questions religieuses mais bien des problèmes d'application d'une convention qui a été ratifiée par son pays et qui dispose que la religion est un motif de discrimination illicite dans l'emploi et la profession. Aucun élément nouveau n'a été apporté en réponse à l'observation de la commission d'experts qui a pourtant été adressée au gouvernement voici deux mois. Le représentant gouvernemental n'a pas répondu à la proposition d'une mission de contacts directs. La nécessité de l'envoi urgent d'une telle mission doit être à nouveau soulignée, et l'importance de ce cas justifie qu'il fasse l'objet d'un paragraphe spécial dans le rapport de la présente commission.

Les membres travailleurs ont déclaré qu'ils étaient également très déçus par l'absence de réponse du représentant gouvernemental. Il serait nécessaire que de nouvelles données soient mises à la disposition de la commission d'experts. Rien dans le débat de la présente commission ne porte atteinte à la réputation de l'OIT ou du système de contrôle, car il s'agit d'une discussion sur une convention ratifiée qui traite elle-même de la discrimination religieuse. Il est très regrettable que le représentant gouvernemental n'ait pas réagi à la suggestion faite l'année dernière de demander l'envoi d'une mission de contacts directs. Cette attitude décevante et incompréhensible contraste avec les propos sur la volonté de dialogue du gouvernement avec les organes de contrôle. Il ne suffit pas d'envoyer des rapports, mais il faut également démontrer l'existence de progrès dans la pratique. Dans ce contexte, l'envoi d'une mission de contacts directs est plus que jamais nécessaire et le cas doit figurer dans un paragraphe spécial dans le rapport de la présente commission.

La commission a pris note des observations formulées par la commission d'experts depuis de nombreuses années, des informations présentées oralement par le représentant gouvernemental et de la discussion détaillée ayant eu lieu en son sein. Elle a également pris note des explications données par le gouvernement pour ne pas donner suite à la proposition de mission de contacts directs ainsi que de l'assistance technique qui a été accordée conformément à la priorité définie par le gouvernement. Elle a constaté avec inquiétude qu'en dépit d'initiatives concrètes et du temps écoulé il subsiste des situations de violation des dispositions, de cette convention et d'autres, qui appellent un complément d'information. Dans ce sens, la commission a exprimé le ferme espoir d'être tenue informée des mesures qui seront adoptées pour éviter tout type de discrimination dans les offres d'emploi ainsi que des critères sur lesquels se fonde l'autorité compétente pour déclarer certains groupes illégaux. La commission a pris note des statistiques sur l'emploi des minorités religieuses et des femmes, des informations relatives à la règle constitutionnelle interdisant d'interroger quelqu'un sur ses croyances et de la modification de la législation permettant aux femmes d'exercer certaines fonctions dans l'appareil judiciaire. Elle a exprimé le souhait que le gouvernement continue de fournir des informations sur les progrès attendus, jusqu'à ce que la législation et la pratique nationales soient pleinement conformes aux dispositions de la convention. Elle insiste avec fermeté pour que le gouvernement accepte la mission de contacts directs évoquée l'année précédente, afin de pouvoir constater des progrès rapides et appréciables. Elle a décidé de faire mention de ce cas dans un paragraphe spécial de son rapport.

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